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Le Manuel Permanent
du Droit des Affaires
tunisien
F E U I L L E S R A P I D E S D E D R O I T D E S A F F A I R E S
N° 198
SOMMAIRE
Février 2012
PREMIERE PARTIE
Chèque :
Chèques portant mention "en règlement
final" : L'encaissement d'un chèque portant
la mention "en paiement final"
Création de la caisse des dépôts et des
consignations :
Rôle et missions de la CDC
Etablissements de crédit :
Renforcement des règles de bonne
gouvernance dans les établissements de
crédit
Etablissements de micro-finance :
les
sont
Quelles
conséquences de
l'encaissement d'un chèque pour une partie de la
somme due, lorsque ce chèque porte la mention
P. 3
"Paiement Final" ?
La caisse des dépôts et consignations (CDC) a
été créée par le décret-loi n° 2011-85 du 13
septembre 2011. Nous examinons ses multiples
P. 3
fonctions et utilités.
Une nouvelle circulaire organise l'ensemble des
établissements de crédit et décrit un ensemble
de règles de bonne gouvernance dans l'objectif
d'asseoir une gestion saine et prudente qui
assure la pérennité des établissements de crédit.
P. 4
Micro-financement : Réforme du système de
micro-financement
Le nouveau cadre juridique de l'activité des
P. 7
établissements de micro-finance
Fiscalité de l’entreprise
Fiscalité internationale :
La double imposition des dividendes en
question
Vérification fiscale :
Conditions d'imposition des dividendes dans le
cadre de conventions de non double imposition
conclues entre la Tunisie et d'autres pays.
P. 8
Vérification fiscale et comptabilité : Le juge
fiscal devant le rejet de la preuve comptable
Quelle est la position de la jurisprudence
tunisienne face au recours simultané aux
FEUILLES RAPIDES de Mise à jour du Manuel du Droit des Affaires réalisées par le Cabinet Salah AMAMOU
14, Avenue Salah Ben Youssef 1013 Menzah 9 Tunis, Tél. 71 872.738, 71 874.523, 71 871 602. Fax. 71 874.945.
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Feuilles Rapides de Mise à jour du Manuel Permanent du Droit des Affaires
Intérêt :
Taux d'intérêt excessif et taux effectif global
Obligations sociales de l’entreprise
Licenciement :
éléments comptables et extracomptables en
P. 9
présence d'une comptabilité régulière ?
Publication des taux d'intérêt effectifs moyens et
des seuils des taux d'intérêt excessifs
P. 10
correspondants.
I/ Le licenciement pour des absences
répétées
Peut-on licencier un salarié pour absences
P. 11
répétées ou prolongées ?
II/ Licenciement pour insuffisance de
résultats
Peut-on licencier pour insuffisance de résultats ?
P. 11
Obligation de non-concurrence :
Clause de non-concurrence et preuve
Travail à temps partiel :
Absence de contrat écrit et temps partiel
DEUXIEME PARTIE
Abus de biens sociaux :
Conditions légales et moyens de défense
Actions - Actionnaires :
Comment prouver une clause de non-
P. 14
concurrence en l'absence d'écrit ?
Comment prouver l'existence d'un temps partiel
P. 14
en l'absence d'écrit ?
Quelles sont les conditions légales de l'infraction
d'abus sociaux et les moyens de défense à
P. 15
invoquer en cas de poursuite ?
Cession d'actions : le délai pour procéder au
rachat après un refus d'agrément
Le délai de rachat des actions en cas de refus
P. 16
d'agrément du cessionnaire
Commissaire aux comptes :
Obligations de nommer un commissaire aux
comptes : Pour quelle société ?
Quant (et comment) nommer un commissaire
P. 18
aux comptes ?
Comptes sociaux :
La modification des comptes sociaux par
l'assemblée générale ordinaire annuelle des
actionnaires : Pouvoirs de l'assemblée
générale ordinaire en matière de modification
des comptes d'un exercice antérieur
L'assemblée générale ordinaire annuelle
d'approbation des comptes dispose-t-elle du
pouvoir de modifier ce qu'elle a, elle-même, voté
P. 19
précédemment ?
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PREMIERE PARTIE
Chèque :
Chèques portant mention "en règlement final" : L'encaissement d'un chèque portant la mention
"en paiement final"
Il arrive fréquemment qu'un débiteur transmette
à son créancier un chèque pour un montant
moindre que celui réclamé, en y inscrivant la
mention "en paiement final", ou une autre
expression ayant une signification équivalente.
Le créancier qui reçoit un tel chèque s'empresse
bien souvent de l'encaisser ou de le faire
certifier, et avise ensuite son débiteur qu'il
n'accepte pas la condition de ce dernier et qu'il
considère ce paiement comme un simple
versement sur la dette initiale.
Si le créancier endosse ce chèque et l'encaisse
sans réserve, le débiteur est-il déchargé de toute
obligation envers son créancier ?
Selon une première opinion, l'encaissement d'un
chèque, même sous condition, portant la
mention "en règlement final" constitue une
quittance finale et une fin de non-recevoir à
toutes réclamations subséquentes.
Selon une deuxième opinion, le seul fait
d'encaisser un chèque portant l'expression " en
règlement final " ne crée aucune présomption
d'acceptation de la part du créancier.
Le principe général reconnu est à l'effet que
l'encaissement d'un chèque comportant la
mention "Paiement Final" ou accompagné d'une
lettre indiquant que ce chèque constitue un
paiement final, crée une présomption de faits
que la dette est éteinte par ce paiement.
Cependant, si la conduite du créancier qui
encaisse le paiement démontre qu'il l'accepte
comme un paiement partiel de la dette en
avisant par écrit le débiteur, le paiement ne sera
pas considéré comme un paiement final. Il s'agit
bien entendu d'une présomption qui peut être
repoussée suite à la preuve faite et cette
question est laissée à l'appréciation du tribunal.
En effet, l'encaissement du chèque par le
créancier constitue une présomption de
paiement final en faveur du débiteur, mais il
s'agit d'une présomption de
fait. En
conséquence, cette présomption de paiement
final peut être combattue par une preuve
contraire, même par une preuve testimoniale.
Les règles de droit en pareille matière sont
simples : il s'agit pour le créancier d'une
renonciation à partie de sa créance ; le débiteur
qui invoque pareil abandon d'un droit est tenu,
évidemment, d'en fournir la preuve certaine ;
cette preuve certaine peut résulter d'une
présomption, même de fait.
Il est inutile pour le débiteur de prétendre que le
contexte dans lequel le chèque litigieux a été
encaissé équivaut à paiement final s'il n'a pas
pris au départ la précaution d'inscrire une
mention libératoire sur le chèque ou sur un
document remis en même temps. Il faut
absolument que le chèque (ou une lettre qui
l'accompagne) porte clairement une mention à
l'effet qu'il s'agit d'un paiement final pour que
son encaissement par le bénéficiaire emporte
renonciation de sa part à réclamer un montant
additionne, sinon il est inutile de soulever cette
question.
Création de la caisse des dépôts et des consignations :
Rôle et missions de la CDC
Eu égard à la période délicate que connaît
l'économie tunisienne en matière de climat
d'affaires et afin de renouer avec le rythme de
l'investissement et de lancer des signaux positifs
tant vers les investisseurs tunisiens qu'étrangers
tout en évitant l'attentisme et l'hésitation, le
décret-loi n° 2011-85 du 13 septembre 2011 a
créé un nouveau mécanisme de financement de
l'économie dénommé " la Caisse des Dépôts et
des Consignations (CDC) ".
A caractère public et dotée de l'autonomie
financière, cette nouvelle structure a pour
principales missions de stimuler
les
investissements, de soutenir les entreprises et
de créer davantage d'emplois par le financement
des projets d'infrastructure, notamment dans les
régions de l'intérieur du pays, et par le
développement des petites et moyennes
entreprises (PME) et leur accompagnement
surtout dans les régions défavorisées.
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L'article trois du décret-loi précité dispose qu'il
est mis à la disposition de ladite caisse des
ressources
constituées,
importantes
essentiellement, par les dépôts du Centre
d'épargne postale (CEP) (ex. CENT) auxquels
s'ajoutent les dépôts et consignations détenus
par le Trésor public ainsi que les emprunts
mobilisés au nom de l'Etat sur le marché
domestique et les marchés extérieurs.
Selon l'article 2 du décret-loi précité, ces
ressources seront utilisées pour acquérir les
bons du Trésor, toutes catégories confondues y
compris ceux assortis de la garantie de l'Etat,
réaliser, d'une façon directe ou indirecte ou
d'une manière individuelle ou dans le cadre d'un
partenariat avec le secteur privé, des
placements et des investissements à long terme
et à caractère stratégique dans tous les
domaines économiques tout en préservant leur
pérennité et ce, essentiellement, dans les
secteurs de l'infrastructure de base, les projets
de développement régional et les domaines des
nouvelles technologies, de l'environnement et du
développement durable. Il est à indiquer que ces
ressources peuvent être employées pour
soutenir les PME.
Egalement, la caisse des dépôts et des
consignations peut utiliser ses ressources sur le
marché financier à travers l'achat des actions
des sociétés cotées en Bourse et la souscription
aux emprunts obligataires émis.
S'agissant du volet gestion et mode de
fonctionnement de la CDC, cette dernière est
soumise à des règles de gestion et des normes
prudentielles qui seront fixées ultérieurement.
Elle est présidée par un Directeur Général
nommé après avis du Premier Ministre et qui
exerce ses fonctions sous le contrôle d'une
Commission de supervision présidée par le
Ministre des Finances.
Cette Commission est chargée, notamment, de
la mise en place de
la stratégie de
développement de l'activité de la caisse et de la
politique générale de son intervention, ainsi que
de la fixation de son programme annuel
d'investissements.
Trois comités permanents issus de la
Commission de supervision sont créés au sein
de la CDC.
Le premier, dénommé le Comité d'audit et de
contrôle, est chargé, notamment, de l'audit et du
contrôle des comptes de la Caisse et du respect
des règles prudentielles.
Le deuxième, dénommé le Comité des
ressources et des emplois, est chargé,
essentiellement, de la proposition de la politique
générale de la Caisse et du champ de ses
interventions, de l'approbation préalable de tous
les investissements à réaliser par la Caisse et
des mobilisations de ressources y afférentes,
hormis les opérations de gestion courante.
Quant au troisième Comité, dénommé le Comité
des risques, il est chargé d'assister la
Commission de supervision pour exercer ses
missions relatives à la gestion et à la prévention
des risques. Ce Comité est chargé aussi de
proposer la stratégie de gestion de tous les
risques financiers et opérationnels et d'évaluer la
politique de couverture des risques liés aux
investissements et placements de la CDC, ainsi
que des résultats des placements réalisés et le
respect des normes de la gestion prudentielle.
Etablissements de crédit :
Renforcement des règles de bonne gouvernance dans les établissements de crédit
La gouvernance d'entreprise
regroupe
l'ensemble des relations entre les dirigeants de
l'entreprise et son organe de gouvernance avec
les actionnaires d'une part et les autres parties
prenantes d'autre part ; et ce, dans l'objectif de
création de valeur pour l'entreprise.
La gouvernance d'entreprise s'intéresse donc à
la manière dont les entreprises sont dirigées et
contrôlées et s'assure de la capacité des
organes de gestion :
- à poursuivre des objectifs conformes aux
intérêts des actionnaires et des autres parties
prenantes ;
- à mettre en oeuvre des systèmes de contrôle
efficaces pour gérer les conflits d'intérêt
potentiels et les risques éventuels et prévenir les
abus de pouvoir de nature à faire prévaloir des
intérêts particuliers sur "l'intérêt social".
Le thème de la gouvernance d'entreprise fait
l'objet, dans différents pays, d'un flux continu de
nouvelles réglementations et pratiques. C'est
une question qui suscite l'intérêt également de
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bon nombre d'institutions internationales.
Pour le cas des établissements de crédit en
particulier, qui jouent un rôle primordial dans la
collecte de l'épargne et le financement de
l'économie, la question de la gouvernance est
essentielle pour
leur
développement. En effet, comparée aux autres
entreprises, la gouvernance au sein de ces
établissements présente des spécificités dont
notamment :
leur solidité et
- Le développement du niveau de bancarisation
est conditionné, dans une large mesure, par le
degré de confiance du public dans le mode de
fonctionnement des établissements de crédit ;
- Les établissements de crédit sont exposés aux
risques opérationnels, déontologiques ou de
réputation du fait qu'ils ont accès à des
informations confidentielles sur la clientèle, ce
qui appelle à une plus grande rigueur dans leur
gestion ;
fondamental assuré par
les
- Le rôle
établissements de crédit dans le fonctionnement
des systèmes de paiement et des marchés
interbancaires rendent plus facile la transmission
des effets systémiques d'une mauvaise
risque de contagion
gouvernance
systémique) ;
(le
- De par la nature de leurs activités, les
établissements de crédit sont exposés à
différentes
situations de conflits d'intérêts (rentabilité/risque,
crédit aux apparentés, fonctions conflictuelles
…).
Dans le sillage de ces évolutions, la banque
centrale de Tunisie a édicté, en mai 20117, une
circulaire aux établissements de crédit n° 2011-
06 du 20 mai 2011 relative au renforcement des
règles de bonne gouvernance dans les
établissements de crédit.
contrôle
systèmes de
Ce nouveau mode de gouvernance permettra de
garantir la transparence dans la gestion, la
pertinence du pilotage des risques, la fiabilité
des
(conseil
d'administration, direction générale et diverses
structures de gestion, audit, inspection,
structures de conformité et de qualité) et,
intérêts des
partant, de préserver
actionnaires, des déposants et des autres tiers
(partenaires, créanciers,
investisseurs,
personnel,...).
les
aspects : la définition des règles de bonne
gouvernance au sein des différents organes de
direction et de contrôle des établissements de
crédit (notamment au niveau de leurs Conseils
d'Administration, des comités exécutifs de crédit,
des comités des risques et des comités
permanents d'audit interne), la nomination, la
rémunération et la politique de communication.
S'agissant du conseil d'administration et
notamment de ses missions, il a été décidé, en
particulier, que celui-ci doit arrêter la stratégie de
développement et les politiques d'intervention de
l'établissement de crédit considéré tout en
s'assurant que les moyens humains, financiers
et logistiques disponibles sont en adéquation
permanente avec la stratégie et les politiques
arrêtées.
En outre, le conseil d'administration est tenu
d'assurer la surveillance effective de la Direction
Générale en portant des jugements sur les
décisions prises par le contrôle de la conformité
des actions entreprises avec la stratégie arrêtée
(y compris la politique des risques). Pour ce
faire, des indicateurs quantitatifs et qualitatifs de
suivi en matière de solvabilité, de liquidité et de
rentabilité doivent être établis. Le Conseil doit
veiller, également, à ce que l'établissement de
crédit jouisse en permanence d'une bonne
réputation à même de préserver la confiance
auprès du public.
De même, le conseil est tenu de mettre en place
un dispositif de gouvernance. Il doit, à ce titre,
fixer des
règles de bonne conduite
professionnelle à consigner dans un code de
gouvernance et veiller à leur application par tous
les niveaux hiérarchiques au sein de
l'établissement de crédit.
D'un autre côté, la nouvelle réglementation a
imposé aux administrateurs de respecter
certaines obligations ayant trait, notamment, au
devoir de loyauté, à l'honnêteté, à l'intégrité et à
la confidentialité et ce, pour éviter les conflits
d'intérêt entre
les administrateurs et
l'établissement de crédit en question.
En outre,
les membres du conseil
d'administration sont appelés à exercer
effectivement leurs mandats en participant
activement et de manière assidue aux
délibérations des conseils.
Les établissements de crédit doivent avoir au
sein de leurs Conseils au moins deux membres
indépendants et au plus un membre dirigeant.
Les nouvelles dispositions ont concerné quatre
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Par ailleurs, au moins un membre du conseil,
représentant les intérêts des actionnaires
personnes physiques autres que les actionnaires
principaux, doit être parmi les administrateurs au
cas où l'établissement de crédit est coté à la
Bourse des valeurs mobilières de Tunis (BVMT).
Tous les membres du conseil d'administration
doivent avoir les qualifications requises, une
compréhension appropriée des différents types
d'activités financières importantes ainsi qu'une
capacité d'analyse développée.
En outre, il est interdit à tout membre du conseil
d'administration d'une banque d'être, à la fois,
membre du conseil d'une autre banque et à tout
membre du conseil d'un établissement financier
de siéger également dans
le conseil
d'administration d'un autre établissement
financier.
Afin de garantir l'exécution efficiente des
missions assignées aux membres du conseil
d'administration, la banque centrale de Tunisie a
recommandé aux établissements de crédit
d'assurer auxdits membres des programmes de
formation spécifiques se rapportant aux
opérations bancaires et financières, à la gestion
des risques et aux autres domaines connexes.
Par ailleurs, la nouvelle réforme des règles de
gouvernance a
les modalités de
fonctionnement des comités exécutifs de crédit,
des comités des risques et des comités
permanents d'audit interne.
fixé
De même, elle a imposé aux conseils
d'administration de fixer la politique de
rémunération du personnel des établissements
de crédit et, notamment, celle des membres de
l'organe de direction, du conseil d'administration
et des différents comités.
Pour ce qui est des comités (émanant du Conseil
et dans lesquels siègent ses membres, à savoir
le comité exécutif de crédit, le comité des risques
et comité permanent d'audit interne), sensés
assister le conseil d'administration dans
l'exécution de ses missions à travers la
préparation de ses décisions stratégiques et
l'accomplissement de sa mission de surveillance,
ils sont tenus, notamment, d'analyser en
profondeur les questions techniques qui relèvent
de leurs attributions, de rendre compte
régulièrement de leurs travaux au conseil et
d'informer ce dernier de tout événement
susceptible de porter préjudice à l'activité de
l'établissement de crédit considéré.
Ces comités sont tenus, également, de
présenter leur rapport annuel, dont une copie
sera adressée à la banque centrale de Tunisie
quinze jours avant la tenue de l'assemblée
générale ordinaire des actionnaires, à l'occasion
de la réunion consacrée à l'examen des états
financiers annuels de l'établissement de crédit.
Concernant le comité exécutif de crédit, chargé
d'examiner l'activité de financement assurée par
l'établissement, il est appelé à donner son avis
au Conseil sur certaines catégories de crédit
(crédits qui entraîneraient des dépassements
des engagements, crédits de restructuration
dépassant les limites fixées par le conseil,
crédits accordés aux clients classés, ...).
risques, à
Pour ce qui est du comité des risques, ses
attributions consistent à assister le conseil
d'administration à s'acquitter de ses
responsabilités relatives à la gestion et à la
surveillance des
travers
principalement la conception et la mise à jour
d'une stratégie de gestion de tous les risques
avec fixation des limites d'exposition et des
plafonds opérationnels, l'approbation des
systèmes de mesure et de surveillance des
risques,
l'exposition de
l'établissement de crédit à tous les risques, y
compris les risques de crédit, de liquidité, de
marché et le risque opérationnel, ainsi que la
conformité de l'exposition à la stratégie arrêtée
en la matière, l'évaluation de la politique de
provisionnement et l'adéquation permanente des
fonds propres par rapport au profil des risques
de l'établissement.
l'analyse de
Quant au comité permanent d'audit interne, il est
appelé, notamment, à procéder à la vérification
de la clarté des informations fournies et à
apprécier la cohérence des systèmes de
mesure, de surveillance et de maîtrise des
risques, à examiner les insuffisances du
fonctionnement du système de contrôle interne
relevées par les différentes structures de
l'établissement de crédit et autres organes
chargés des missions du contrôle et l'adoption
des mesures correctrices et à contrôler et
coordonner les activités de la structure d'audit
interne tout en veillant à ce qu'elle soit dotée des
moyens humains et logistiques pour mieux
accomplir ses missions.
Pour ce qui est de la nomination et de la
rémunération, il a été précisé que le conseil
d'administration d'un établissement de crédit est
tenu, notamment, d'arrêter une politique de
rémunération en adéquation avec
les
performances à moyen et long terme de
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l'établissement en matière de risque et de
rentabilité.
Le conseil peut demander à deux de ses
membres de lui proposer un plan de succession
au niveau de la direction générale ou des
responsables de l'encadrement supérieur.
Outre ses missions de nomination des membres
de la direction générale et des responsables de
l'encadrement supérieur (selon des critères bien
définis) et de supervision de la politique de
recrutement et d'intéressement du personnel, le
conseil doit veiller à la mise en place et à la mise
à jour d'un dispositif de diffusion de l'information
auprès des différents destinataires
:
actionnaires, déposants, contreparties sur le
marché, régulateurs et le public en général.
Ce dispositif doit assurer la communication en
temps opportun d'informations fiables et
pertinentes sur les aspects significatifs de
l'activité de l'établissement de crédit.
Enfin, il y a lieu de signaler que la Banque
centrale de Tunisie a accordé un délai allant
jusqu'au 1er juillet 2012 pour que les
établissements de crédit se conforment à ces
nouvelles dispositions.
Etablissements de micro-finance :
Micro-financement : Réforme du système de micro-financement
Le décret-loi 2011-117 du 5 novembre 2011
relatif à l'organisation de la micro-finance fixe les
conditions d'exercice de cette activité. L'objectif
du décret est d'élargir le statut juridique des
intervenants dans le secteur, structurer les
associations intervenantes, en plus de la
création d'une autorité de contrôle de ce secteur.
La micro-finance offre des services financiers au
profit de personnes non bancables qui sont
généralement à faible revenu.
Afin d'organiser davantage le système actuel des
micro-crédits et mieux cibler ses interventions,
dans le cadre du système national de solidarité
par le biais des associations et organisations qui
sont habilitées à accorder des micro-crédits aux
personnes économiquement faibles leur
permettant de lancer des projets individuels ou
familiaux productifs et de leur assurer un revenu
répondant à leurs besoins, une réforme du
système des micro-crédits a fait l'objet de
nouvelles dispositions réglementaires pour
organiser l'activité des établissements de micro-
financement et instaurer un cadre juridique plus
propice à leur activité.
Ce nouveau cadre juridique permet, désormais,
aux établissements de micro-financement de se
constituer, soit sous forme de sociétés
anonymes dont le capital social ne doit pas être
inférieur à trois millions de dinars, soit sous
forme d'associations (régies par le décret-loi
n°2011-88 du 24 septembre 2011 portant
organisation des associations) et dont l'apport
minimal associatif ne doit pas être inférieur à 200
mille dinars.
Ces établissements de micro-financement ne
sont pas soumis aux dispositions de la loi n°
2001-65 relative aux établissements de crédit et
ne sont pas autorisés à recevoir des dépôts du
public, ainsi qu'ils ne peuvent pas mettre à la
disposition de la clientèle des moyens de
paiement ni les gérer.
Il y a lieu de préciser que le nouveau cadre
juridique a défini clairement les conditions
d'exercice de l'activité de micro-financement et
les modifications institutionnelles qui peuvent
surgir lors de l'exercice de cette activité par les
établissements
de micro-financement
(opérations de fusions, de filialisations ou de
créations d'unions d'associations). En outre, il a
été décidé d'élargir le domaine d'intervention de
la micro-finance aux opérations de micro-
assurance.
Sur un autre plan, ces établissements sont
appelés à mettre en place les procédures
nécessaires à la gouvernance, favorisant la
séparation claire entre les fonctions des
structures d'administration avec celles des
structures de gestion, et à adopter un système
de contrôle interne permettant l'évaluation
permanente des procédures internes et la
gestion et le suivi des risques inhérents à leur
activité.
D'autres aspects ont été institués par ce
nouveau cadre juridique, à savoir la création
d'un système de protection des clients des
établissements de micro-financement afin de
préserver les intérêts de leurs clients quant à la
qualité des services offerts par ces
établissements, la mise en place des normes
comptables et financières spécifiques à ces
établissements, la création d'une autorité de
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contrôle et de régulation de tous les aspects liés
à l'exercice de l'activité de micro-financement, la
création d'une association professionnelle des
établissements de micro-financement ayant pour
missions, essentiellement, de défendre leurs
intérêts auprès des pouvoirs publics et
d'élaborer un code d'éthique professionnelle
ainsi que l'institution d'un cadre fiscal spécifique
à ces établissements.
Fiscalité de l’entreprise
Fiscalité internationale :
La double imposition des dividendes en question
Le terme "dividendes" désigne généralement les
revenus provenant d'actions ou bons de
jouissance, par de fondateurs ou autres parts
bénéficiaires à l'exception des créances, ainsi
que les revenus d'autres parts sociales assimilés
aux revenus d'actions par la législation fiscale de
l'Etat dont la société distributrice est un résident.
Le droit d'imposition des dividendes revient au
pays de la résidence du bénéficiaire. Autrement
dit, les dividendes sont imposables dans l'Etat
dont le bénéficiaire est un résident.
Toutefois la plupart des conventions conclues
par la Tunisie reconnaissent au pays de la
source, c'est-à-dire à l'Etat dont la société qui
paie les dividendes est un résident, le droit
d'imposer les dividendes dans la mesure où sa
législation interne prévoit une telle imposition.
Dans ce derniers, l'imposition a lieu soit au taux
de droit commun soit à un taux maximum fixé
par chaque convention.
1. Dividendes de source tunisienne : Il est
clair que cette double taxation n'incite pas un
étranger à investir dans une société tunisienne.
En investissant dans son pays de résidence,
l'étranger est taxé une seule fois sur ces
dividendes. Par contre, en faisant le même
investissement en Tunisie, il sera taxé une
première fois en Tunisie, puis, sur ce qui lui
reste, une deuxième fois dans son pays de
résidence.
Pour le cas de la Tunisie, lorsqu'elle est l'Etat de
la source, aucune imposition n'est due au titre
des dividendes payés à des personnes non
résidentes du fait qu'ils sont en dehors du champ
d'application de l'impôt.
Compte tenu de l'exonération des distributions
des bénéfices en Tunisie à partir du 1er janvier
1990, une telle clause conventionnelle n'a plus
d'effet fiscal en ce qui concerne la Tunisie.
Ainsi, pour le cas de la Tunisie, lorsqu'elle est
l'Etat de la source, aucune imposition n'est due
au titre des dividendes payés à des personnes
non résidentes du fait qu'ils sont en dehors du
champ d'application de l'impôt.
De ce fait, les dividendes distribués par toute
société établie en Tunisie à des non résidents
sont exempts de toute imposition et, par
conséquent, de toute retenue à la source.
Dans une prise de position (1606) du 12 août
2000, la DGELF a rappelé que les dividendes
versés par une société établie en Tunisie à des
associés non établis en Tunisie sont exonérés
de l'IRPP et de l'IS.
De ce fait, les dividendes distribués à des
associés personnes morales ou physiques
établies en France ne sont pas passibles de
l'impôt tunisien.
Dans une prise de position (607) du 11 avril
2001, la direction générale des études et de la
législation fiscale a précisé que les dividendes
servis à des personnes non résidentes en
Tunisie ne sont exonérés que sous la double
condition : ils doivent être :
- décidés par l'AGO ; et
- distribués en fonction des parts revenant à
chacun des associés.
2. Dividendes de source étrangère : En
revanche, les dividendes perçus de l'étranger
sont soumis à l'impôt en Tunisie, dans la
catégorie "autres revenus" pour les personnes
physiques et dans le cadre du bénéfice
imposable pour les personnes morales.
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Vérification fiscale et comptabilité : Le juge fiscal devant le rejet de la preuve comptable
Vérification fiscale :
Aux termes de l'article 38, alinéa 1er, du code
des droits et procédures fiscaux, "La vérification
approfondie de la situation fiscale porte sur tout
ou partie de la situation fiscale du contribuable;
elle s'effectue sur la base de la comptabilité pour
le contribuable soumis à l'obligation de tenue de
comptabilité et dans tous les cas sur la base de
renseignements, de documents ou de
présomptions de fait ou de droit".
Ainsi, le contribuable soumis à l'obligation de
tenue de comptabilité peut facilement se voir
privé de ce moyen de preuve. L'administration
peut écarter une comptabilité jugée irrégulière et
sans valeur probante et procède au
redressement des bases d'imposition sur des
bases extra-comptables.
Fort heureusement, le juge fiscal tunisien a mis
en valeur l'importance de la comptabilité qui
constitue la base des travaux de vérification
fiscale (Tribunal de première instance de Sfax,
requête n°76 de 12/5/2004, " Chronique de la
jurisprudence fiscale tunisienne (première
instance) ", Revue tunisienne de fiscalité, n° 5,
p. 199).
Le rejet de la comptabilité a été jugé comme
étant un procédé lourd pour les contribuables
redressés en les mettant dans des situations
fragiles et précaires et en renversant la charge
de la preuve.
L'application de ce procédé et le recours aux
éléments extra-comptables se justifie, dans
certains cas précis, tels que le défaut de tenue
d'une comptabilité ou la tenue d'une comptabilité
entachée d'irrégularités graves formelles et
substantielles de nature à priver celle-ci de toute
force probante et qui laissent subsister des
manoeuvres frauduleuses.
Néanmoins, si la régularité de la comptabilité n'a
pas été contestée, l'administration fiscale ne
doit, du moins, ne devrait, emprunter la voie des
présomptions de fait ou de droit pour établir des
impositions supplémentaires parallèlement aux
redressements fondés sur la comptabilité.
tribunal administratif, à
Le
travers sa
jurisprudence antérieure à la promulgation du
code des droits et procédures fiscaux, avait
confirmé que le recours aux éléments
extracomptables, notamment les présomptions,
et ce, sous l'empire du code de l'impôt sur le
revenu des personnes physiques et de l'impôt
sur les sociétés et du code de la patente, ne
pouvait être envisagé par les vérificateurs qu'en
cas de défaut présentation ou en cas de rejet de
cette comptabilité (T.A, Cassation, requête n°
1186, 23 octobre 1995 ; T.A., requête n° 32434
du 13 novembre 2000).
Il a également énoncé le principe selon lequel "
si le rejet de la comptabilité n'est pas motivé
d'une manière claire,
recours aux
présomptions devient douteux et inadmissible"
(T.A., requête n° 32434 du 13 novembre 2000).
le
Les juridictions du fond, particulièrement le
tribunal de première instance de l'Ariana, se sont
alignées sur la position du tribunal administratif.
En effet, depuis son jugement n° 55 du 19 avril
2003, le tribunal de première instance de l'Ariana
a posé le principe selon lequel lorsque la
comptabilité est jugée régulière par le fisc, elle
ne peut être écartée par l'utilisation des moyens
extracomptables (Tribunal de première instance
de l'Ariana, requête n°55 du 19 avril 2003).
Cette jurisprudence a été maintenue notamment
dans le jugement n° 337 du 3 juin 2006 dans
lequel le juge a rappelé le principe selon lequel
le recours aux éléments extra-comptables
nécessite au préalable la preuve de l'insincérité
de la comptabilité qui lui ôte son caractère
probant (Tribunal de première instance de
l'Ariana, requête n°337 du 3 juin 2006).
Voir dans le même sens (Tribunal de première
instance de l'Ariana, requête n°335 du 18 mars
2006, Tribunal de première instance de Sfax,
requête n°317du 23 février 2005).
Le juge ajoute qu'une telle interprétation de
l'alinéa 1er de l'article 38 du code des droits et
procédures fiscaux est "juste" parce qu'il doit
toujours y avoir une distinction entre le
contribuable respectueux de ses obligations
fiscales et comptables et le contribuable
négligent ou récalcitrant (Tribunal de première
instance de l'Ariana, 3 juin 2006, requête n°337,
arrêt précité)
En outre il est à signaler que le recours parallèle
aux éléments comptables et extra- comptables
peut être un moyen pour l'administration pour
bénéficier de la durée d'un an au lieu de six
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Feuilles Rapides de Mise à jour du Manuel Permanent du Droit des Affaires
mois. Face aux pouvoirs d'appréciation étendus
de l'administration fiscale, il est facile de
prétendre que la vérification approfondie ne
s'effectue pas sur la base de la comptabilité
uniquement mais aussi sur la base des
présomptions, surtout que ces dernières
peuvent être des indices théoriques qui résultent
des études faites par l'administration elle-
même. Dans ces conditions, la durée de
vérification sera tributaire de l'appréciation de
l'administration fiscale, ce qui pourrait être
source d'incertitude pour le contribuable.
Cependant, il a été constaté que la tendance
générale des tribunaux autorise le recours
simultané aux éléments comptables et
extracomptables en présence d'une comptabilité
régulière.
La cour d'appel de Tunis a également affirmé
qu'une comptabilité non rejetée n'empêchait pas
le vérificateur fiscal de recourir à des éléments
extra-comptables (Cour d'appel de Tunis, 1 juin
2006, requête n° 36023, Infos juridiques, janvier
2007, n° 16117, p. 24 ; Cour d'appel de Tunis,
26 janvier 2006, requête n° 25628/ 28407)
Ce flottement jurisprudentiel ne fait que fragiliser
la situation du contribuable de bonne foi.
Or, si l'interprétation littérale de l'article 38 du
code des droits et procédures fiscaux place le
contribuable dans une situation "délicate et
précaire", il n'en demeure pas moins que le juge
se doit de réserver un traitement préférentiel au
contribuable soucieux de respecter ses
obligations comptables.
Intérêt :
Taux d'intérêt excessif et taux effectif global
Le taux d'intérêt excessif représente le taux
maximum légal admis lors de la conclusion d'un
prêt conventionnel ou d'un contrat similaire. Le
taux effectivement appliqué, qui ne doit pas
dépasser le taux d'intérêt excessif, s'appelle le
taux effectif global. Tout prêt consenti à un taux
d'intérêt excessif constitue un délit pénal lorsque
le taux d'intérêt dépasse un certain plafond
déterminé par la loi. Le caractère excessif des
intérêts stipulés au contrat varie en fonction du
type de crédit consenti.
L'article premier de la loi n° 99-64 du 15 juillet
1999, relative aux taux d'intérêt excessifs,
dispose que "constitue un prêt consenti à un
taux d'intérêt excessif tout prêt conventionnel
consenti à un taux d'intérêt effectif global qui
excède, au moment où il est consenti, de plus du
cinquième le taux effectif moyen pratiqué au
cours du semestre précédent par les banques et
les établissements financiers pour des
opérations de même nature".
Pour chaque catégorie de crédits accordés, la
banque centrale de Tunisie détermine
semestriellement le taux d'intérêt effectif moyen
à partir de la moyenne arithmétique simple des
taux d'intérêts effectifs globaux observés durant
le même semestre. Ce taux ainsi déterminé est
utilisé au cours du semestre suivant pour la
détermination du taux d'intérêt excessif.
Les taux d'intérêt effectifs moyens et les seuils
des taux d'intérêt excessifs correspondants sont
publiés par arrêté du ministre des finances au
journal officiel à la fin de chaque semestre pour
le semestre suivant.
En vertu de l'arrêté du ministre des finances du
18 janvier 2012, les taux d'intérêt effectifs
moyens relatifs au deuxième semestre 2011et
des seuils des taux d'intérêt excessifs
correspondants ont été publiés comme suit :
Catégorie des concours
Taux d'intérêt
effectif moyen (%)
Seuil du taux d'intérêt
excessif correspondant (%)
1 - Leasing mobiliers et immobiliers
2 - Crédits à la consommation
3 - Découverts matérialisés ou non par des effets
4 - Crédits à l'habitat financés sur les
ressources ordinaires des banques
5 - Crédits à long terme
6 - Crédits à moyen terme
7 - Crédits à court terme découverts non compris
11,25
9,38
7,87
9.44
7,86 9,43
7,22
6,29
6,24
6,20
8,66
7,54
7.48
7,44
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Obligations sociales de l’entreprise
Licenciement :
I/ Le licenciement pour des absences répétées
Plusieurs catégories d'absences peuvent être
qualifiées d'injustifiées.
En effet, il peut s'agir d'une absence sans
demande préalable, mais également d'une
absence refusée par l'employeur ou de la
prolongation injustifiée d'une absence.
Dans ces conditions, ces absences du salarié
non autorisées ou non justifiées par des motifs
légitimes peuvent-ils constituer une cause réelle
et sérieuse de licenciement ?
1. En cas d'absences refusées par
l'employeur :
L'absence après un refus de
l'employeur de toute autorisation d'absence
constitue un refus volontaire de travail ; comme
telle elle peut légitimer un licenciement et
caractériser la faute grave.
2. En cas d'absences sans demandes
préalables à l'employeur :
L'absence sans
autorisation sollicitée, provoquée par un cas
fortuit, type incident familial ou accident, ne
constitue pas une faute, du moins lorsque la
durée du retard ou de l'absence reste en rapport
avec l'événement et où l'employeur a été averti
dès que possible.
En revanche, l'absence sans demande
d'autorisation, provoquée par des circonstances
prévisibles, ou sans cause légitime, justifie un
licenciement.
L'incidence du comportement du salarié sur la
marche du service ou le déroulement du travail
constitue un élément déterminant dans
l'appréciation des conséquences.
Ainsi, le fait d'avoir placé brusquement
l'employeur devant une situation de nature à
désorganiser le travail peut, au-delà de
l'absence en soi, constituer une cause réelle et
sérieuse de licenciement
La prise d'un jour de congé pour convenance
personnelle sans se soucier de l'intérêt du
service dont le salarié est responsable, peut
également être une cause réelle et sérieuse de
licenciement.
Enfin, une absence de plusieurs semaines sans
autorisation ni justification, dans une période
d'activité importante pour l'entreprise caractérise
une faute grave.
3. En cas de multiplication des absences et
des retards :
Lorsque le comportement du
salarié prend le caractère d'une insubordination
délibérée, la faute présente un caractère
suffisamment grave pour
légitimer un
licenciement sans préavis.
Toutefois, il faut préciser que l'absence
prolongée et injustifiée ne dispense pas
l'employeur de déclencher une procédure de
licenciement. Ce comportement n'est pas
assimilable à une volonté non équivoque de
démissionner.
II/ Licenciement pour insuffisance de résultats
Le non-respect des objectifs commerciaux est
devenu le mode de rupture du contrat de travail
"habituel" aux cadres commerciaux ou technico-
commerciaux. La motivation intellectuelle en est
que le "cadre commercial" qui ne vend pas n'a
plus sa place dans l'entreprise, à ce poste. Cette
justification est-elle conforme à la réalité
juridique ?
Mais la cour de cassation française considère
que cette clause ne doit jamais être invoquée
comme seule cause au licenciement du salarié
(Cass. Soc. 16 janvier 1992, Aff : Smadja c/
Rea). Confrontée à des situations très variées
d'utilisation de cette clause, la Cour de
Cassation a eu l'occasion de préciser son
régime d'utilisation.
Le principe dégagé par la cour de cassation
française en la matière est que les parties
(surtout l'employeur) peuvent consentir une
clause d'objectif minimal, ou de résultat, lors de
la conclusion du contrat, ou par avenants
ultérieurs.
Plusieurs questions se posent concernant ce
motif de rupture du contrat de travail.
- la licéité et la validité "per-se" de ce motif de
rupture ;
- l'appréciation
in abstracto ou in concreto de la
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Feuilles Rapides de Mise à jour du Manuel Permanent du Droit des Affaires
réalisation des objectifs contractuels.
licenciement.
I. Liceité et validité du motif de licenciement
pour non-réalisation des objectifs
contractuels ou pour insuffisance de
résultats
Plusieurs catégories d'objectifs peuvent être
fixés. Certains seront une manière déguisée de
transformer le travail horaire forfaitaire en un
travail à la tâche, alors que d'autres sont
simplement des moyens contractuels de prévoir
la rupture d'un contrat de travail.
Des arrêts récents de la cour de cassation
confirment sa jurisprudence sur le licenciement
pour non atteinte des objectifs et insuffisance de
résultats.
Validité intrinsèque du motif de licenciement tiré
de l'insuffisance de résultats : (Cass. Soc.
14/11/00 : Aff : Der c/SA Affichage Giraudy).
La cour de cassation française a rappelé deux
principes prohibitifs en la matière :
1. Interdiction de prévoir des causes de
licenciement autres que les causes "légales"
:
La cour de cassation française a jugé que le
contrat de travail ne peut pas fixer à l'avance les
circonstances qui constitueraient une cause de
licenciement.
La justification de cette interdiction est logique.
Les contrats de travail sont conclus à durée
indéterminée. De manière exceptionnelle, ils
peuvent être conclus à terme déterminé. Mais la
loi n'a pas prévu que le terme puisse être la non-
réalisation d'un objectif contractuel. L'accepter
reviendrait à insérer une clause de rupture
automatique du contrat de travail, ce qui n'est
pas possible.
Cette solution n'est pas nouvelle. Il ressortait
déjà en 1992, dans l'affaire Smadja c/ Rea du 16
janvier 1992 (précitée), que la clause ne peut
servir à justifier, en soi, un licenciement.
2. Vérification des motifs invoqués : En
corollaire à l'interdiction de prévoir la cause du
licenciement à l'avance, la cour de cassation
française rappelle que le juge du contrat de
Travail doit vérifier si les faits invoqués dans la
lettre de licenciement constituent une cause
réelle et sérieuse de licenciement.
Le simple énoncé de l'insuffisance de résultats
ou de la non-réalisation de ces résultats ne suffit
donc pas à justifier "judiciairement" le
Cette solution était déjà préparée par Cass. Soc
16 octobre 1991, Aff : Fortat c : Sté Blois Les
Saules Automobiles.
Un licenciement pour insuffisance de résultats
au regard des objectifs fixés ne procède pas
d'une cause réelle et sérieuse dès lors que les
mauvais résultats ne sont pas imputables au
salarié.
Ces deux principes fixés il restait à déterminer
comment ce fait cette vérification. Doit-elle
s'arrêter au seul constat de la réalité du résultat
? Ou faut-il aller au delà de l'apparence
contractuelle, pour rechercher ce que pouvait
faire le salarié, et le confronter à ce qu'il a
réellement fait ?
II. Contenu de l'Obligation de Vérification :
1. Objectifs réalistes ou réalisables : C'est en
ce domaine que le régime a le plus évolué, pour
les
se mettre
bouleversements économiques des 15 dernières
années.
harmonie
avec
en
La jurisprudence traditionnelle considérait que la
conjoncture économique ne pouvait pas être un
élément exonérateur de l'insuffisance des
résultats, et validait le licenciement, même si
une faute (de gestion ?) pouvait être reprochée à
l'employeur qui aurait du rechercher une
méthode plus efficace… Cass. Soc. 18 mars
1986.
Un revirement s'est opéré en 1999 : Cass. Soc
30 mars 1999, Aff : Evrard c/ Sté Samsung
Informations Systems.
De cet arrêt il ressort que l'insuffisance de
résultats au regard des objectifs fixés ne
constitue pas une cause de rupture privant le
juge de son pouvoir d'appréciation de l'existence
d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Le juge doit donc vérifier que les objectifs définis
- sont compatibles avec le marché.
- sont raisonnables
L'extension de cette jurisprudence a amené à
contrôler si les objectifs fixés sont réalisables.
Ses pouvoirs de juge du contrat lui permettent
de requalifier le contrat, et d'écarter les objectifs
"irréalisables".
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Dans l'affaire Giraudy précitée, un cadre
commercial avait été licencié pour n'avoir pas
atteint les objectifs fixés au contrat. La Cour
d'Appel avait considéré que le licenciement était
fondé sur une cause réelle et sérieuse, sans
vérifier si l'objectif fixé était réalisable.
La cour de cassation française rappelle non
seulement que le juge du fond contrôle la réalité
des moyens de fait (non-réalisation des
objectifs), mais également leur pertinence, en
entrant dans les relations contractuelles des
parties.
2. Appréciation du caractère réaliste des
objectifs :
Appréciation "in abstracto" ou "in
concreto" ? : Le juge social a deux solutions
pour exercer ce contrôle de la validité de
l'objectif.
Il peut apprécier le contrôle "in abstracto", de
manière purement théorique.
Ainsi un objectif illicite sera, en soi, irréalisable,
de sorte qu'un licenciement fondé sur cet objectif
ne serait pas bien fondé. De même un objectif
manifestement irréalisable sera rejeté.
Mais le juge ne doit pas s'arrêter à l'apparence.
Il doit rentrer dans le détail du contrat, et
notamment, s'agissant des objectifs chiffrés en
chiffre d'affaires ou en progression de parts de
marché, vérifier si l'objectif est réalisable compte
tenu de l'état du marché.
Cass. Soc 13/03/2001, Aff Grandel c/ SA Pouey
International : Dans cette affaire, la cour de
cassation française a jugé que le motif de
licenciement (insuffisance de résultats) n'est
valable que si :
même par rapport au marché, dès lors que le
marché le permet. Mais en revanche, c'est un
objectif irréaliste par rapport au salarié qui devra
l'atteindre.
Ainsi, la cour d'appel de Paris a retenu que "rien
n'établit que les résultats obtenus étaient
insuffisants par eux-mêmes…" pour juger que la
cause de licenciement tirée de l'insuffisance de
résultats n'était pas justifiée en fait (CA PARIS
22ème Chambre A, 20 juin 2001, aff : 37181/99
DA SILVA c/ SA PIAL ).
Elle reconnaît donc la validité implicite de ce
motif, mais se réserve précisément le contrôle
de la suffisance du résultat, donc de la réalité du
critère.
Et faisant application de la jurisprudence de la
Cour de Cassation, elle vérifie si les résultats
qualifiés d'insuffisants le sont par rapport aux
possibilités offertes au salarié compte tenu des
éléments de fait mis à sa disposition par
l'employeur.
Il ressort de ces cas sommairement cités, que
l'insuffisance de résultat n'est pas un motif de
licenciement automatiquement valable.
Ce motif est licite, et opposable au salarié, mais
il n'a pas une force absolue. En effet, le salarié
peut opposer à son employeur un certain
nombre d'exceptions et de faits justificatifs de
l'insuffisance de résultats qui lui est reprochée,
et notamment :
- la situation du marché économique,
- ses compétences personnelles lors de la
création de son obligation de résultat,
- Les objectifs fixés sont réalistes (objectifs
proportionnés à l'état du marché…)
- et également l'insuffisance de moyens dont il
dispose.
- Le salarié est en faute de ne pas les avoir
réalisés (absence de diligence dans l'exécution
de sa mission…)
Le caractère proportionné à l'état du marché est
certainement le critère le plus évident
d'appréciation "in concreto" de l'objectif.
On peut juste regretter qu'il n'ait pas encore été
jugé que la validité du critère s'apprécie par
rapport au salarié. Ainsi, fixer un objectif d'un
certain montant à un débutant, sur un produit
difficile à vendre, alors qu'un commercial
confirmé n'atteint qu'exceptionnellement ce
montant, n'est pas un objectif irréaliste en soi, ni
En conclusion, l'utilisation de la clause de
résultat est une arme à double tranchant.
D'une part elle ne peut servir à justifier, en soi,
un licenciement. D'autre part l'objectif fixé doit
être réaliste et réalisable eut égard aux
circonstances propres à l'entreprise et au
salarié.
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Obligation de non-concurrence :
Clause de non-concurrence et preuve
La clause de non-concurrence est celle par
laquelle le salarié s'interdit, lors de son départ de
l'entreprise et pendant un certain temps par la
suite, d'exercer certaines activités susceptibles
de nuire à son ancien employeur.
Plusieurs droits étrangers imposent la rédaction
d'un écrit pour la clause de non-concurrence.
Les parties doivent l'avoir signée et acceptée.
Ces formalités sont obligatoires sous peine de
nullité de la clause.
L'absence d'encadrement légal de la clause de
non-concurrence en droit du travail tunisien
conduit à s'interroger sur l'obligation de
respecter un formalisme en la matière. Si la
nécessité d'une manifestation expresse de
volonté est généralement reconnue à raison de
l'atteinte aux principes de liberté du travail et de
concurrence imposée au salarié, aucune forme
n'est théoriquement exigée puisque le code du
travail n'impose pas aux parties à un contrat de
travail de rédiger un contrat écrit.
Aux termes de l'article 6 du code du travail en
effet, la relation de travail est prouvée par tout
moyens.
La clause de non-concurrence accessoire à un
contrat de travail peut donc théoriquement être
verbale en l'absence d'une disposition contraire
et être valable. L'établissement d'un écrit n'est
en principe pas obligatoire.
L'absence d'écrit sera cependant source de
difficultés considérables pour administrer la
preuve de l'existence et du contenu de la clause
de non-concurrence, difficultés qu'une
disposition contractuelle claire et précise
permettrait d'éviter.
A. - La preuve de l'existence et de l'étendue
de l'obligation de non-concurrence
Comment l'employeur peut-il, en l'absence
d'écrit, prouver de façon certaine, qu'à l'issue du
contrat de travail le salarié n'a pas retrouvé une
pleine et entière liberté puisque seul le
consentement du salarié est à l'origine de
l'obligation ? Comment l'employeur peut-il établir
la nature exacte des activités interdites et
l'étendue de l'obligation de non-concurrence
dans le temps ou dans l'espace ?
Ces précisions sont capitales si la validité de la
clause de non-concurrence est contestée par le
salarié puisque l'existence ou la nullité de son
engagement en dépend et qu'aux termes de
l'article 529 du code des obligations et des
contrats, "Dans le doute, l'obligation s'interprète
dans le sens le plus favorable à l'obligé, mais à
la charge par celui-ci de prêter serment à l'appui
de ses déclarations.
Il est envisageable d'appliquer à la clause de
non-concurrence le principe dégagé par la
Chambre sociale de la Cour de cassation selon
lequel c'est à la personne qui entend se prévaloir
de l'existence d'un contrat de travail d'en
rapporter la preuve.
C'est ainsi sur l'employeur qui souhaite interdire
toute concurrence à l'ancien salarié que pèsera
la charge de la preuve de l'existence et de
l'étendue de la clause de non-concurrence. De
même, le salarié qui demandera le versement de
la contrepartie pécuniaire aura à établir
l'existence de la clause de non-concurrence et
de la contrepartie. Ceci est conforme à l'article
420 du code des obligations et des contrats
selon lequel 'La preuve de l'obligation doit être
faite par celui qui s'en prévaut".
B. - Conséquences de l'absence d'écrit
S'il n'existe pas de convention collective,
l'employeur ne pourra pas prouver aisément
l'existence d'une obligation de non-concurrence
en l'absence d'une manifestation expresse de
volonté dans le contrat de travail ou tout
document ultérieur.
Dans l'hypothèse inverse, il sera tenté de se
référer à la convention collective applicable si
celle-ci impose une obligation de non-
concurrence à charge du salarié. Il cherchera
ainsi à démontrer qu'à l'issue de la relation de
travail, le salarié est tenu à une obligation de
non-concurrence.
Travail à temps partiel :
Absence de contrat écrit et temps partiel
Un contrat de travail est à temps partiel lorsque
la durée de travail ne dépasse pas 70% de la
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Feuilles Rapides de Mise à jour du Manuel Permanent du Droit des Affaires
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durée normale de
l'entreprise.
travail applicable à
L'article 94-3 du code du travail impose que le
contrat de travail à temps partiel soit rédigé par
écrit. Parmi les mentions obligatoires, doivent
notamment figurer notamment la qualification
professionnelle du travail leur, les éléments de
'la rémunération, la durée du travail et la
modalité de sa répartition sur la semaine, le mois
ou l'année.
En l'absence d'écrit ou de mention de la durée
du travail ou de sa répartition, le contrat est
présumé conclu pour un horaire à temps plein.
Toutefois, il ne s'agit que d'une présomption
simple. Ce qui signifie que l'employeur conserve
la possibilité de prouver que l'emploi est bien à
temps partiel. Mais, quelle preuve doit-il apporter
pour renverser la présomption de contrat de
travail à temps complet ?
Pour la jurisprudence française, en l'absence de
ces mentions, le contrat est présumé à temps
complet, sauf preuve contraire, à la charge de
l'employeur. Il incombe dans ce cas à
l'employeur qui se prévaut d'un contrat à temps
partiel non écrit de rapporter la preuve, d'une
part de la durée exacte hebdomadaire ou
mensuelle convenue, d'autre part que le salarié
n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à
quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas
à se tenir constamment à sa disposition.
Par ailleurs, la Cour de cassation française vient
de prendre en considération l'existence d'un
autre emploi à temps partiel pour écarter la
requalification à temps plein du salarié (Cass.
Soc. 30 mars 2011, n° 09-70853). La cour de
cassation française a ainsi considéré que le fait
pour le salarié de travailler pour un autre
employeur indiquait qu'il connaissait à l'avance
son rythme de travail, et qu'il n'était pas obligé
de se tenir constamment à la disposition de son
employeur.
DEUXIEME PARTIE
Abus de biens sociaux :
Conditions légales et moyens de défense
L'abus de biens sociaux frappe, en général, au
nom de la société, les dirigeants qui détournent
l'intérêt de l'entreprise vers leur intérêt
personnel.
Tous les dirigeants de sociétés de capitaux (SA,
SARL) sont concernés ; seul l'entrepreneur
individuel, dont le patrimoine personnel se
confond par définition avec celui de son
entreprise, peut encore disposer de ses biens
comme il l'entend.
D'après les dispositions du code des sociétés
commerciales (article 146 pour les gérants des
SARL et article 223 pour les dirigeants des
sociétés anonymes), l'abus de biens sociaux
suppose la réunion de quatre éléments.
- L'usage d'un bien social ou du crédit de la
société.
Les biens sociaux sont tous les éléments,
mobiliers ou immobiliers, du patrimoine de la
société, tandis que, le crédit social est la
confiance qui s'attache à la société en raison de
son capital, de la nature des affaires et de sa
bonne marche. C'est aussi la capacité
d'emprunter ou le fait de constituer des garanties
(l'abus sera par exemple caractérisé dès lors
que la société cautionnera un emprunt contracté
par la maîtresse du dirigeant).
- Cet usage doit être contraire à l'intérêt social : Il
faudrait que cet usage entraîne pour la société
un risque sans contrepartie raisonnable de
gains. En revanche, il n'est pas nécessaire que
la société ait subi un préjudice, l'éventualité
serait suffisante.
En aucun cas, donc, le dirigeant ne doit mettre à
la charge de la société ses dépenses
personnelles. Le dirigeant qui augmente
inconsidérablement sa rémunération ou abuse
des remboursements de frais prend vraiment
des risques, dans le cas où surviendrait une
procédure collective d'apurement du passif.
- Pour qu'il y ait abus de biens sociaux, il faut
qu'il y ait poursuite d'un intérêt personnel direct
ou indirect. Celui-ci peut être d'ordre pécuniaire,
professionnel ou même moral.
L'exemple classique est l'acquisition par la
société d'un véhicule ou d'un local appartenant
jusqu'alors au dirigeant, à un prix excessif (très
supérieur à sa valeur à l'argus ou, au prix moyen
du mètre carré dans le quartier).
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consistant
Un autre délit qui pourra aussi être épinglé est
celui
opérations
désavantageuses pour la société et menées
dans le seul but de maintenir des relations
amicales avec un tiers.
aux
- Le dirigeant doit avoir agi de mauvaise foi,
c'est-à-dire avoir eu conscience que ce qu'il
faisait était contraire à l'intérêt de la société.
L'indice de cette intention délictuelle pourrait
résider dans le fait de n'avoir pas demandé
l'accord du conseil d'administration.
Ce qui ne signifie pas que toute convention
approuvée par le conseil d'administration
protègera le dirigeant en toutes circonstances.
La notion d'abus de biens sociaux ne doit
cependant pas se confondre avec celle d'acte
anormal de gestion, même si elle recouvre dans
la plupart des les mêmes agissements
coupables.
La première est une notion pénale et la seconde
une notion fiscale.
2) Les moyens de défense susceptibles
d'exclure l'abus de biens sociaux ou d'en limiter
les sanctions
Bien que certaines situations permettent de
justifier les agissements, il faut faire la part des
choses entre les arguments utiles et ceux qui ne
le sont pas.
- Le quitus donné aux gérants pour
l'accomplissement de leur mandat au cours de
l'exercice en question ne peut avoir pour effet
d'empêcher une action en responsabilité contre
les gérants pour
faute commise dans
l'accomplissement de leur manda. En effet, selon
l'article 119 du code des sociétés commerciales,
"Est également réputée nulle de nullité absolue
toute décision de l'assemblée générale ayant
pour effet d'interdire l'exercice de l'action en
responsabilité contre le gérant pour faute
commise dans l'exercice de son mandat".
- Le remboursement ou la compensation du
préjudice subit n'effacent pas le délit d'abus de
biens sociaux mais peuvent permettre d'obtenir
soit un non lieu à poursuite soit une dispense de
peine.
- L'ignorance ou l'incompétence du dirigeant en
matière comptable ou son éloignement des
tâches comptables ou administratives de la
société ne sont pas de nature à l'exonérer de sa
responsabilité pénale du chef d'abus de biens
sociaux.
- La transparence, le respect de la procédure
relative aux conventions réglementées ou
l'inscription en comptabilité des détournements
litigieux n'excluent pas le délit d'abus de bien
sociaux mais permettront de faire partir le délai
de prescription de la poursuite (3 ans) qui, le cas
échéant, empêchera toute poursuite pénale de
ce chef.
- La contrainte extérieure ou l'obéissance à la
volonté des actionnaires peuvent influencer le
quantum de la peine mais n'ont aucun effet sur
la constitution du délit d'abus de bien sociaux.
- La délégation de pouvoir est inopérante lorsque
le dirigeant participe personnellement à
l'infraction, en profitant des biens mis à sa
disposition de manière injustifié par le détenteur
de la délégation de pouvoir, mais la délégation
de pouvoir peut permettre de démontrer la
qualité de dirigeant de fait de son détenteur
lorsque celui-ci ne fait pas partie des personnes
visées par la loi.
- La pratique courante ne peut constituer en soit
un fait justificatif, mais l'existence d'une pratique
courante peut contribuer à écarter la mauvaise
foi du dirigeant et donc l'infraction, tels par
exemple :
* le remboursement de certains frais modestes
de déplacements et de représentation, inscrits
en comptabilité et entrant dans la pratique
courante qui autorisait les administrateurs à les
faire prendre en charge par la société.
* le versement de primes à un dirigeant, dès lors
que ces rémunérations étaient d'usage dans
l'entreprise pour tout le personnel.
Actions - Actionnaires :
Cession d'actions : le délai pour procéder au rachat après un refus d'agrément
Les actions d'une société anonyme sont en
principe librement cessibles.
Toutefois, très souvent, les statuts contiennent
une clause, dite d'agrément, prévoyant que toute
cession d'actions est subordonnée à l'agrément
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par la société de l'acquéreur proposé. Une telle
clause permet de contrôler les mouvements
d'actionnaires et d'écarter ainsi l'entrée dans la
société de personnes jugées indésirables.
À noter la libre cessibilité des actions peut
également être restreinte par une clause de
préemption (permettant aux actionnaires
d'acquérir les actions mises en vente en lieu et
place du cessionnaire pressenti) et/ou par une
clause d'interdiction de cession avant l'expiration
d'un certain délai.
Les clauses d'agrément ne peuvent pas être
stipulées dans les statuts d'une société dont les
titres sont cotés.
Elles ne s'appliquent pas, en principe, aux
cessions d'actions opérées dans le cadre d'une
succession ni aux cessions d'actions consenties
au conjoint, à un ascendant ou à un descendant.
En pratique, lorsque les statuts contiennent une
clause d'agrément, l'actionnaire qui cède ses
actions (ou le cessionnaire) doit, préalablement
à la réalisation de l'opération, adresser à la
société une demande d'agrément.
Cette demande doit évidemment indiquer :
- l'identité et l'adresse du cessionnaire proposé
(s'il s'agit d'une société, sa forme, sa
dénomination sociale et l'adresse de son siège
social) ;
- le nombre de titres objet de la cession ;
- et le prix convenu entre les parties.
Précision la demande d'agrément doit être faite
par acte d'huissier ou par lettre recommandée
avec demande d'avis de réception.
L'organe compétent, pour statuer sur l'agrément,
est librement déterminé par les statuts. Le plus
souvent, il s'agit du conseil d'administration ou
du conseil de surveillance. Mais ce peut être
aussi l'assemblée générale (ordinaire ou
extraordinaire) des actionnaires. Il peut
également être prévu que la décision du conseil
d'administration sur l'agrément soit ratifiée par
l'assemblée générale.
L'agrément à la cession est donné par une
décision favorable notifiée au demandeur. Il est
également réputé acquis en l'absence de
réponse de la société à l'expiration d'un délai de
3 mois à compter de la notification de la
demande ou lorsque, après un refus, le rachat
des actions par un actionnaire, par un tiers ou
par la société elle-même n'est pas intervenu
dans un délai de 3 mois.
Toute cession effectuée en violation d'une
clause d'agrément est nulle.
En cas de refus d'agrément, deux alternatives
sont offertes par l'article l'article 323 du code des
sociétés commerciales :
- Ou bien, les actions dont la cession est
envisagée sont achetées par un ou plusieurs
actionnaires ou par d'autres tiers agréés ;
- Ou bien la société procède au un rachat des
actions et à une réduction du capital.
Ces deux solutions doivent intervenir dans le
délai de trois mois à compter de la date de refus.
Sachant que si l'achat n'est pas réalisé à
l'expiration de ce délai de 3 mois, l'agrément est
réputé donné et l'actionnaire cédant autorise
alors à procéder à la cession au profit du
cessionnaire proposé.
Il en est de même lorsque le président du
tribunal de première instance du lieu du siège
social a désigné un expert comptable inscrit sur
la liste des experts judiciaires pour déterminer le
prix des actions et que ce prix est fixé à une date
postérieure à l'expiration du délai de 3 mois.
En effet, la désignation d'un expert, à l'intérieur
du délai de 3 mois, ne rend pas la cession
parfaite dès lors que le prix n'est pas fixé à
l'expiration de ce délai.
Autrement dit,
l'expert désigné doit
impérativement fixer le prix dans le délai de 3
mois.
À défaut, l'agrément au profit du cessionnaire
initialement proposé par le cédant est considéré
comme donné.
À moins que la mission de l'expert ait été
prorogée. La loi prévoit en effet que le délai légal
de 3 mois peut être prolongé, à la demande de
la société, par une décision de justice. Dans ce
cas, l'achat des actions doit avoir lieu avant
l'expiration du délai prorogé.
Par ailleurs, le caractère impératif des
dispositions légales relatives à la prorogation du
délai ne permet pas aux parties d'y déroger par
convention.
Les intéressés n'ont donc pas la possibilité de
convenir entre eux de proroger la mission de
l'expert chargé de fixer le prix. Seul le juge (le
président du tribunal de commerce statuant en
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référé) dispose de ce pouvoir.
Il en résulte, là encore, que si le prix est fixé au-
delà du délai de 3 mois, l'agrément est réputé
donné au profit du cessionnaire initialement
proposé par l'actionnaire cédant, et ce quand
bien même les parties avaient convenu entre
elles d'octroyer à
l'expert un délai
supplémentaire.
Après avoir refusé de donner leur agrément à
une cession d'actions, puis avoir proposé au
cédant un actionnaire ou une tierce personne
pour acquérir ses titres, les dirigeants de la
société concernée doivent faire preuve de
vigilance sur la suite des opérations et veiller à
ce que l'achat des actions ait bien lieu dans le
délai imparti.
Lorsque le cédant et le cessionnaire proposé par
la société sont d'accord sur le prix, il n'y a pas de
difficulté puisque précisément la cession est
parfaite à la date de l'accord sur le prix.
Mais lorsque les parties sont en désaccord sur le
prix et désignent un expert afin qu'il procède à sa
fixation, les dirigeants sociaux doivent prendre
soin de demander au juge une prorogation du
délai de 3 mois. Car s'ils restent passifs, ils
risquent d'être victimes d'un agrément forcé au
profit du cessionnaire initialement prévu par le
cédant, au cas où l'expert ne parviendrait pas à
fixer le prix avant l'expiration du délai de 3 mois.
Cette demande doit être effectuée auprès du
président du tribunal de commerce statuant en
référé, l'actionnaire cédant et le cessionnaire
étant appelés. Souvent, ce dernier fixe le délai
prorogé en fonction du temps nécessaire à
l'expert pour établir son rapport. Son ordonnance
n'étant pas susceptible de recours.
Commissaire aux comptes :
Obligations de nommer un commissaire aux comptes : Pour quelle société ?
Le commissaire aux comptes est un organe de
contrôle comptable, financier et juridique de la
société. Sa mission principale est de certifier que
les états financiers annuels de la société sont
réguliers et sincères. Le commissaire aux
comptes doit être, pour cela, une personne
indépendante de la personne morale contrôlée.
Deuxième cas : nomination obligatoire si
certaines conditions sont remplies :
la SARL
(pluripersonnelles ou
Dans
unipersonnelles), la nomination du commissaire
aux comptes n'est obligatoire que si deux des
trois seuils suivants sont franchis :
Selon l'article 13, alinéa 1er, du code des
sociétés commerciales, la nomination d'un
commissaire aux comptes est une obligation
légale pour toutes les sociétés commerciales.
Premier cas : nomination obligatoire, sans
conditions :
La société anonyme, la société en commandite
par actions doivent obligatoirement désigner un
ou plusieurs commissaires aux comptes.
- Dans la société anonyme, à la constitution de
la société, les premiers commissaires aux
comptes sont désignés par l'assemblée générale
constitutive.
En cours de vie sociale, les commissaires aux
comptes sont désignés par l'assemblée générale
ordinaire, sur proposition du conseil
d'administration (ou du conseil de surveillance).
- Dans la société en commandite par actions, il
est désigné par l'assemblée générale ordinaire,
sur proposition du conseil de surveillance.
- Le total du bilan dépasse cent mille dinars,
- Le total des produits hors taxe dépasse trois
cent mille dinars,
- Le nombre moyen des employés dépasse dix
employés.
Toutefois, conformément à l'article 123 du code
des sociétés commerciales, même si la société
n'est pas tenue de désigner un commissaire aux
comptes du fait qu'elle ne répond pas aux
critères prévus, un ou plusieurs associés,
représentant au moins le dixième du capital
social, peuvent demander l'insertion à l'ordre du
jour de l'assemblée générale ordinaire la
question de désignation d'un ou de plusieurs
commissaires aux comptes.
Par ailleurs, en application de l'article 124 du
code des sociétés commerciales, même si les
critères de taille ne sont pas atteints, la
nomination d'un commissaire aux comptes peut
être demandée en justice par un ou plusieurs
associés représentant au moins le cinquième du
capital social.
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Enfin, selon le même article, une disposition
statutaire pourra prescrire la désignation d'un ou
plusieurs commissaires aux comptes.
Le président du tribunal dans le ressort duquel
se trouve le siège social de la société désignera
le ou les commissaires aux comptes par
ordonnance sur requête, à la demande du ou
des associés concernés.
Enfin, selon le même article, une disposition
statutaire pourra prescrire la désignation d'un ou
plusieurs commissaires aux comptes.
Comptes sociaux :
La modification des comptes sociaux par l'assemblée générale ordinaire annuelle des
actionnaires : Pouvoirs de l'assemblée générale ordinaire en matière de modification des
comptes d'un exercice antérieur
La jurisprudence et la doctrine reconnaissent à
l'assemblée générale ordinaire annuelle des
actionnaires le pouvoir de modifier les comptes
sociaux qui leur sont soumis, la modification
pouvant être votée sur
l'initiative des
actionnaires ou sur l'initiative des dirigeants
sociaux.
Qu'en est-il des comptes approuvés par une
assemblée antérieure ? L'assemblée ordinaire
des actionnaires peut-elle également envisager
la rectification ou l'annulation de décisions
antérieures ?
La jurisprudence française s'est prononcée sur
cette question pour des résolutions ayant des
objets différents, et notamment, sur des
résolutions portant modification des bilans. La
cour de cassation française a jugé que " le
principe de l'annualité du bilan ne s'oppose pas
à ce qu'une assemblée générale d'actionnaires
modifie le bilan d'un exercice antérieur ou révise
la valeur qu'avaient les éléments d'actif à la fin
de cet exercice, alors que ces modifications
n'ont pour but que d'assurer l'exactitude et la
sincérité du bilan. " (Cass. Requêtes 22 juin
1926 - D.P. 1927.1.117).
La modification d'une décision prise par une
assemblée antérieure peut être adoptée sous
deux réserves (Bulletin des Commissaires aux
comptes 1980, n° 37, mars 1980, p. 96 et
suivantes).
d'une assemblée générale précédente qui avait
proposé une distribution de dividendes, même si
ces dividendes n'avaient pas été effectivement
répartis entre les associés (Trib. com Seine, 4
mars 1933).
Selon Monsieur Colin ("La faculté pour une
assemblée générale d'actionnaires d'annuler les
décisions d'une assemblée précédente, Rev.
Trim. du droit des sociétés et du droit financier,
1937, p. 149 et suivantes)" les assemblées
générales … disposent d'une véritable
souveraineté ; il n'est pas d'entraves que le
pacte social ou les résolutions antérieures
apportent à l'exercice de leur pouvoir ". L'auteur
poursuit en précisant que " l'existence de
résolutions antérieures est sans influence sur le
pouvoir d'une assemblée. Les limites ou les
obstacles que rencontrent la versatilité ou les
revirements nécessaires à la volonté sociale ne
tiennent pas … à l'existence d'une décision
antérieure. Qu'ils proviennent des droits acquis
des
légales
réglementant les manifestations des organes
sociaux, rien ne permet d'en conclure que la
volonté sociale n'a pas la même autonomie que
la volonté des personnes physiques ". Il conclut
sur la constatation qu'il n'a trouvé dans les droits
des tiers et ceux des associés " aucun élément
qui permette de soutenir que les assemblées
soient liées par leurs décisions antérieures ". Il
en résulte qu'une assemblée pourrait " modifier
les postes d'un bilan précédemment approuvé ".
tiers ou des dispositions
La résolution votée doit, premièrement,
concerner une décision qui n'a encore reçu ni
publicité, ni commencement d'exécution (Trib.
com. Lyon, 20 octobre 1902 ; Paris 20 décembre
1948 ; Paris 25 chambre A, 28 mars 1989).
Une certaine doctrine et quelques décisions de
jurisprudence apportent des tempéraments à ce
pouvoir reconnu à l'assemblée des actionnaires,
lorsque la modification concerne des décisions
de gestion.
La résolution votée doit, deuxièmement,
préserver les droits acquis des actionnaires. La
jurisprudence a notamment refusé à une
assemblée d'actionnaire de rapporter la décision
Selon un courant d'opinion, une assemblée
générale ordinaire ne pourrait réviser les
comptes approuvés par une précédente
assemblée qu'en cas d'erreurs, omissions, faux
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Le pouvoir de modification est reconnu pour les
comptes du dernier exercice clos, mais
également pour ceux qui ont été approuvés par
une précédente assemblée.
ou doubles emplois.
Messieurs Houpin et Bosvieux écrivent que "
l'inventaire, lorsqu'il a reçu l'approbation de
l'assemblée générale, est assimilable à un arrêté
de compte. Il y a donc lieu de lui appliquer
l'article 541 du Code de procédure civile, aux
termes duquel il ne peut être procédé à la
révision d'aucun compte que s'il y a erreurs,
omissions, faux ou doubles emplois " (Traité
général des sociétés civiles et commerciales, T.
II, n° 1231). Cette position est partagée par
Messieurs de Juglart et Ippolito qui écrivent que
les comptes, une fois approuvés ne peuvent être
révisés par la suite qu'en cas d'erreurs,
d'omissions, de faux ou doubles emplois (Droit
commercial, 2ème volume. Les sociétés
commerciales, éd. Montchrestien, n° 790).
Cette opinion s'appuie sur une jurisprudence
ancienne, selon laquelle l'assemblée générale
des actionnaires est autorisée à " relever et
rectifier les inexactitudes contenues dans un
bilan antérieur " (Paris, 19 mars 1890 - J. soc.
1891.478). Ou encore, l'assemblée générale des
actionnaires est autorisée à réviser des comptes
approuvés par l'assemblée générale ordinaire si
cette révision est justifiée " par des erreurs,
omissions, faux ou doubles emplois " (Lyon, 3
décembre 1925 - J. soc. 1927, p. 351). Et enfin,
l'assemblée générale des actionnaires est
autorisée à rectifier les " décisions antérieures
en cas d'erreurs graves commises dans
l'établissement des bilans " (Douai, 26 juin 1930
- J. soc. 1932, p. 348 ; Douai, 23 avril 1932 - J.
soc. 1933, p. 487).
L'assimilation de l'approbation des comptes à un
arrêté des comptes établi entre deux parties
semble, à certains auteurs, abusive.
L'établissement des comptes est un acte
unilatéral, soumis à l'approbation de l'assemblée
générale ordinaire qui conserve toujours, en
fonction de sa nature spécifique, la possibilité de
revenir sur une décision antérieure. Ce pouvoir
s'exerce dans la limite du respect des droits
acquis et de l'absence de publicité ou
d'exécution de la décision antérieure. L'arrêté
des comptes, quant à lui, est établi entre deux
parties dans la procédure spéciale de reddition
des comptes (Bulletin des commissaires aux
comptes 1980, n° 37, mars 1980, p. 96 et
suivantes). Les différences de ces actes justifient
l'application de régimes juridiques distincts.
Les textes et la jurisprudence reconnaissent
donc assez largement le droit de l'assemblée
générale ordinaire des actionnaires de modifier
les comptes sociaux.
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