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Licence Droit III 1er semestre
DROIT DES CONTRATS SPECIAUX
Introduction
Le droit positif appréhende le droit des contrats sur deux niveaux. Il y a tout d’abord l’ensemble
des règles applicables à tout contrat quel qu’il soit, c’est le droit du contrat. Il y a aussi les règles
propres à chaque catégorie de contrats, c’est le droit spécial des contrats (ou le droit des contrats
spéciaux) ou le droit des contrats. Ces règles spéciales à chaque catégorie de contrat sont tantôt
impératives tantôt supplétives, tantôt elles dérogent au droit, tantôt elles le complètent. Le droit des
contrats n’est pas un droit plus simple que celui du contrat. On assiste à un phénomène de
complexification du droit des contrats spéciaux. Cette tendance tient à la conjonction de deux facteurs.
C’est tout d’abord le fait de l’apparition de nouveaux contrats. Le contrat de vente d’immeuble à
construite est un contrat récent, qui n’existait pas dans l’édition d’origine du Code civil. C’est aussi un
phénomène de spécialisation des contrats existants. Le contrat de bail par exemple a connu des
réglementations propres aux baux d’habitation, au bail rural, au bail commercial, etc. Il y a trois strates
de réglementations : le contrat est soumis au droit commun des contrats, puis à la réglementation
spéciale des baux ruraux et encore à la réglementation plus spéciale des .
Le droit des contrats spéciaux se présente comme un puzzle dont le nombre de pièces ne cesse
d’augmenter.
I- L’identification des contrats étudiés
A- Les contrats nommés et innomés
Distinction posée par 1107 du Cciv : ce sont les « contrats qui ont une dénomination propre et ceux
qui n’en ont pas ». Les contrats nommés au sens de cet article sont les contrats qui non seulement ont
un nom, mais qui, aussi et surtout font l’objet d’une réglementation spéciale qui leur est spécifique.
Les contrats innommés n’ont pas reçu de nom, ou bien la pratique leur en a donné un, mais dans les
deux cas ils ne font pas l’objet d’une réglementation spécifique.
Exemple : Deux contrats entre voisins, l’un maçon, l’autre électricien. Ils font entre eux un contrat
pour que chacun travaille chez l’autre. Avec deux accords de volonté, chacun s’engage par une
obligation. Ce contrat est innommé. Ne faisant pas l’objet d’un règlement spécifique, ils ne sont
soumis qu’au seul droit commun des contrats.
Au sein des contrats nommés, on étudiera que les contrats qui ne relèvent pas d’une discipline
distincte. Certains contrats nommés possèdent un tel particularisme qui font l’objet d’une discipline
ayant pris son autonomie par rapport au droit civil.C’est le cas des contrats administratifs qui sont
passés par une personne morale de droit public pour une mission de service public ou comportant des
clauses exorbitantes du droit commun. Il faut aussi écarter le contrat de travail étudié en droit social. Il
faut de la même manière écarter le contrat de société. Ainsi faut-il faire du PACS, de la donation, du
contrat de mariage, du cautionnement, du nantissement et des hypothèques (sûretés). Idem pour les
transactions (convention par laquelle les parties à un litige y mettent fin en se consentant des
concessions réciproques), les compromis (convention par laquelle des personnes qui sont en conflit
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décident de confier la solution du litige non pas à un tribunal, mais à un ou plusieurs arbitres). Est
enfin exclu le contrat d’assurance.
B- Les contrats primaires
Au sein des contrats nommés ne relevant pas d’une discipline distincte, nous n’étudierons que les
contrats primaires. Tous les contrats nommés n’ont pas tous la même importance. On distinguait au
XIXe siècle les petits contrats des grands. De la même manière, sont écartés de cette étude les petits
contrats. C’est par exemple le cas des contrats de jeux et de pari (art 1965 et suiv. du Cciv). Seuls les
principaux contrats privés vont retenir notre attention, à savoir :
Le contrat de vente :
Défini par l’art. 1582 CCiv qui dispose que « la vente est une convention par laquelle l’un s’oblige à
livrer une chose et l’autre à la payer. » Il y a donc le transfert de propriété et le paiement d’un prix.
Ces deux éléments suffisent à caractériser le contrat de vente.
Le contrat d’échange
Défini par l’art. 1702 CCiv selon lequel c’est un « contrat par lequel les parties se donnent
respectivement une chose ou une autre » Il y a donc le transfert de propriété A et le transfert de
propriété de B.
Le contrat de bail :
Défini à l’art.1709 du Cciv : « contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une
chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige à payer. » Il y a la
fourniture de la jouissance d’une chose et le paiement d’un prix.
Le contrat de prêt :
Défini par l’art. 1875 du Cciv, c’est un contrat par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre
pour s’en servir, à charge pour le preneur de la rendre après s’en être servi. Deux traits distinctifs, la
jouissance gratuite d’une chose et la restitution de la chose.
Le contrat de mandat :
Défini par l’art 1984. Le seul trait caractéristique du mandat est la mission du mandataire :
l’accomplissement d’un ou plusieurs actes juridiques au nom et pour le compte du mandant.
Le contrat d’entreprise :
Défini par l’art. 1710 du Cciv. Il est caractérisé par l’accomplissement d’un travail matériel
indépendant et par le paiement d’un prix.
Le contrat de dépôt :
Défini par l’art. 1915 du Cciv : « acte par lequel on reçoit la chose d’autrui à la charge de la garder
et de la restituer en nature. » Deux traits distinctifs : la garde d’une chose et la restitution de la chose.
Pourquoi les appeler contrats primaires ?
Cela signifie d’abord étymologiquement que ce sont les contrats qui viennent en premiers, c'est-à-
dire que leur importance est fondamentale. C’est par leur intermédiaire que s’opère la réalisation des
besoins essentiels.
Cela veut dire aussi simple, basique, élémentaire. Or les contrats primaires ont ceci de commun que
tous possèdent une structure simple. Ils se caractérisent par un petit nombre de traits distinctifs. (
Voir
descriptions des contrats ci-dessus
) Pour les identifier, on a besoin que d’un petit nombre de traits
distinctifs.
II- L’hybridation
Il est possible de créer des contrats hybrides grâce à l’association de plusieurs contrats primaires.
Comme en peinture il existe des couleurs primaires grâce on peut, en les mélanges, créer une infinité
de teintes. C’est la même possibilité qui est offerte aux parties qui peuvent conclure un contrat
hybride. On distingue trois situations quant à l’appréciation de ces contrats.
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1. La qualification dominante
Les parties concluent un contrat hybride à l’aide d’au moins deux contrats primaires et quand il
apparaît que l’un de ces contrats, auquel le contrat hybride peut être rattaché, domine l’économie du
contrat, celui-ci sera réduit à l’appellation du contrat primaire dominant.
Ex : L’échange avec soulte
Le contractant B transfert la propriété d’un bien à B. En contrepartie, B fait de même à l’égard de A et
s’engage également à lui verser une somme d’argent appelée soulte. Cet échange est un contrat
complexe, hybride. On y repère les traits distinctifs de deux contrats primaires : il y a deux échanges
de propriété, caractérisant
l’échange. On y retrouve aussi les traits distinctifs de la vente, c'est-à-dire
le transfert de propriété d’un bien contre le paiement d’un prix.
Quelle est l’attitude adoptée par la jurisprudence face à ce type de contrat ? Supposons que la
prestation de B, la soulte soit l’élément dominant (soulte est supérieure à la valeur du bien transféré),
le juge va considérer que l’élément dominant est celui de vente et donc que le contrat est ni plus ni
moins un contrat de vente. À l’inverse si l’élément dominant est le transfert de propriété, alors le juge
réduira ce contrat complexe à un contrat d’échange.
Ex : Le contrat d’hôtellerie
On retrouve les traits distinctifs du contrat de bail (jouissance d’une chose moyennant le paiement
d’un prix), mais aussi du
contrat d’entreprise (prestations, travail matériel indépendant contre
paiement d’un prix). Le juge considère que les éléments dominants sont ceux du contrat d’entreprise.
2. Qualification distributive
Quand deux couleurs primaires sont juxtaposées, les parties concluent un contrat complexe dans le
lequel on retrouve les traits distinctifs de plusieurs contrats primaires. Si l’on peut distinguer nettement
au sein du contrat complexe plusieurs aspects distincts, relevant chacun d’un contrat primaire
déterminé, on peut alors appliquer une qualification distributive. On va concrètement disséquer les
contrats complexes selon des régimes juridiques différents.
Ex : Porter une voiture à un garage pour une réparation implique que soit passé un contrat
complexe. Il mélange les traits du contrat
d’entreprise (travail matériel indépendant contre prix) et
ceux du contrat de
dépôt (remise de la chose, garde et restitution). Selon la jurisprudence, on peut
distinguer les deux contrats, et selon le problème posé, on considérera tantôt que c’est un contrat
d’entreprise, tantôt un contrat de dépôt. Si la voiture ne marche toujours pas, c’est l’exécution du
contrat d’entreprise qui est en cause. Si à l’inverse la voiture fonctionne, mais que l’automobile est
abîmée, le garagiste n’a pas veillé la bonne garde de la voiture. Selon l’aspect du problème qui se
pose, on applique l’une ou l’autre règle.
Ex : La location-vente
A fournit la jouissance d’une chose à B qui, au bout d’un certain temps, va devenir propriétaire de la
chose en payant le reliquat du prix. La jurisprudence distingue selon un critère chronologique. C’est
d’abord un contrat de bail (mise a disposition, paiement d’un bail) puis un contrat de vente (transfert
de propriété et paiement d’un reliquat). (Com 7 fev. 77 Bull.2 # 38)
3. Qualification sui generis
Si les parties concluent un contrat complexe sans que l’un des contrats primaires qui entre la
composition de ce contrat n’apparaissent comme dominant, et sans non plus qu’on puisse disséquer ce
contrat parce qu’il forme dans l’esprit des parties un tout indivisible, on est alors en présence d’un
contrat hybride original puisqu’il est irréductible à l’une de ses composantes primaires : c’est un
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contrat sui generis. Ce contrat n’obéit donc à aucun régime spécial et ainsi, la seule réglementation qui
lui soit applicable est le droit commun des contrats.
Le législateur peut intervenir
a posteriori et le doter d’une réglementation spéciale.
Ex : Le contrat d’exposant
C’est un contrat conclu entre l’organisateur d’une manifestation et un exposant. On retrouve les
caractéristiques du bail, du contrat de dépôt et de celui d’entreprise.
Pour le contrat de bail, l’organisateur met à la disposition de l’exposant un stand (jouissance contre
paiement d’un prix). Pour le contrat de dépôt, chaque exposant peut amener dans son stand du matériel
qui sera stocké sur place, ce bien ayant une certaine valeur. L’organisateur se charge de la garde de
cette chose. Enfin pour le contrat d’entreprise, l’organisateur s’engage auprès de chaque exposant à
effectuer un travail matériel indépendant, c'est-à-dire assurer la communication, la sécurité, etc.
La jurisprudence considère qu’aucun élément primaire n’étant dominant dans ce contrat. Impossible
donc de le réduire à un seul contrat primaire. De plus, ce contrat est indivisible donc on ne peut pas
utiliser la qualification distributive. C’est finalement un contrat
sui generis.
Ex : le contrat de crédit-bail
Une personne ne veut pas ou ne peut pas acquérir un bien dont elle a besoin. L’entreprise peut alors
conclure un contrat de crédit-bail avec un établissement financier. Il y a deux parties ; le crédit-preneur
(entreprise) et le crédit-bailleur (établissement financier). Le crédit-bailleur achète le bien dont son
client a besoin. Dans un premier temps, le crédit-bailleur va le louer au crédit-preneur. Le crédit-
bailleur consent par ailleurs à l’autre partie une promesse unilatérale de vente.En analysant ce contrat,
on s’aperçoit qu’il s’agit d’un contrat mélangeant les caractéristiques de quatre contrats primaires : du
bail (location du bien contre paiement du loyer), du contrat de prêt (le crédit bailleur est finalement
économiquement un prêteur d’argent), ceux du mandat (le mandataire accomplit un ou plusieurs actes
juridiques au nom et pour le compte du mandant, le crédit-bailleur mandate le crédit-preneur pour
acheter le bien auprès d’une entreprise) et de la vente (le crédit-preneur peut, en payant le reliquat du
prix convenu, décider d’acheter le bien).
La jurisprudence considère que l’on ne peut pas distinguer les contrats primaires composant ce contrat.
Le législateur est intervenu par le vote d’une loi le 2 juillet 1966, réglementant partiellement ce type
de contrat. Ce contrat est en passe de devenir un nouveau contrat nommé.
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PREMIERE PARTIE
LES CONTRATS AYANT POUR OBJET DE TRANSFERER
LA PROPRIETE DUN BIEN
Ce sont les « contrats translatifs de propriété ». Il y a la vente et l’échange.
TITRE I :
La VENTE
Art.1582 c.civ. : La vente est une convention par laquelle l’un s’oblige à livrer une
chose et l’autre à la payer.
Deux éléments : Transfert de propriété d’une chose et paiement d’un prix.
Le transfert de propriété d’une chose distingue la vente du bail et du prêt.
Le paiement d’un prix distingue la vente de la donation, de l’échange, et de l’apport en
société.
Les principaux caractères du contrat de vente: c’est un contrat à titre onéreux,
synallagmatique, commutatif (en principe, mais la vente peut être aléatoire : ex : rente
viagère) et consensuel (qui se forme par le seul consentement des parties)
C’est le plus important des contrats spéciaux.
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Chapitre I: LA FORMATION DE LA VENTE
Art. 1583 c.civ. : La vente est parfaite dès qu’on est convenu de la chose et du prix
La formation de la vente suppose donc la réunion de trois éléments à savoir le
Consentement sur la chose et sur le prix = formation de la vente
Attention, c’est ici différent du droit commun des contrats, qui impose la capacité, le
consentement, la cause, l’objet (art. 1108 c.civ.). Mais l’art 1583 reprend quand même 3
des 4 critères .
Mais il manque la capacité, mais les règles de la vente son quasiment les mêmes que
celles du droit commun.
Section 1 : Le consentement
Sous section 1 : La rencontre des volontés
Comment s’opère la rencontre des volontés qui préside à la formation de la vente ?
Cela peut se faire selon un processus simple, celui que décrit le droit commun des
contrats. Mais parfois cela se fait suivant un processus plus complexe (les contrats
préparatoires à la vente).
§ 1 : Le processus simple de rencontre des volontés
C’est la rencontre d’une offre et d’une acceptation.
A / L’offre (de vente)
La définition de l’offre
C’est une proposition précise et ferme de contracter, qui a vocation à entraîner la
formation du contrat par la seule survenance de l’acceptation. Une offre doit être
précise, c’est à dire qu’elle définisse, dans le cas de la vente, la chose et le prix.
Règles propres à l’offre de vente :
Certains types d’offre de vente, considérés comme particulièrement dangereux pour
les consommateurs, sont illicites :
L’offre par envoi forcé (prohibé par l’art. L 122-2 c.conso.) : le vendeur envoie le
produit à l’acheteur potentiel qui a un délai pour le retourné, sinon il est considéré
comme acheté.
L’offre de vente à la boule de neige (prohibé par l’art. L 122-6 c.conso.) : le vendeur
offre la vente à un prix très bas à la condition que l’acheteur recrute d’autres acheteurs.
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L’offre de vente liée (prohibé par l’art. L 122-1 c.conso.) : la vente est subordonnée
à l’achat d’une certaine quantité ou d’un autre produit en plus. C’est licite lorsque c’est
consacré par un usage (les yaourts par exemple).
L’offre de vente avec prime (prohibé par l’art. L 122-35 c.conso.) : le vendeur
professionnel offre une vente qui donne droit à une prime consistant à un autre produit
quelconque. C’est licite si la prime est très faible par rapport à l’objet principal de
l’offre de vente, ou alors si la prime consiste en des objets identiques que ceux de l’offre
principale (pratique du « treize à la douzaine »)
L’offre de vente avec loterie (prohibé par l’art. L 122-36 c.conso.) : si l’acheteur
accepte l’offre de vente, il pourra participer à une loterie.
Le cas de l’offre de vente par Internet fait l’objet d’une réglementation spéciale :
L’offre doit expliciter le processus de formation du contrat (art.1369-1 c.civ) et doit
contenir certaines informations à l’attention de l’acheteur (art. L141-18 c.conso)
a) La nature juridique de l’offre
L’offre de vente n’a pas une nature unique, mais une nature dualiste :
L’offre avec la stipulation d’un délai de maintien :
L’offrant émet une volonté, vendre telle chose à tel prix. Cela produit un effet de
droit, maintenir l’offre pendant le délai stipulé.
Pourquoi ? Parce que l’offrant s’y est
engagé.L’effet produit par l’offre a pour source la volonté unilatérale de l’offrant, c’est
donc un acte juridique unilatéral.
L’offre sans stipulation d’un délai de maintien :
Quel est l’effet de droit produit ? Le juge considère que l’offre doit alors être
maintenue pendant un « délai raisonnable ». Quelle est la source de l’effet de droit
produit ? Le droit objectif, puisque c’est le juge qui impose le délai raisonnable. L’offre
est alors un fait juridique, (définition du fait juridique : un événement volontaire ou non
qui produit des effets de droit, lesquels se produisent indépendamment de la volonté des
intéressés.)
L’offre est donc tantôt un acte juridique unilatéral (lorsqu’elle est assortie de la
stipulation d’un délai de maintien), et tantôt un fait juridique (lorsqu’elle ne l’est pas).
Rappel
On distingue deux grandes sources d’obligations, les faits juridiques et les actes
juridiques. Un acte juridique est une manifestation de volonté qui produit des effets de
droit, cette volonté étant indispensable. Un fait est un événement volontaire ou pas qui
produit des effets de droit voulu ou non par les intéressés.
On distingue les actes juridiques unilatéraux et les conventions ; ce premier est une
manifestation de volonté d’une personne agissant seule. Les conventions sont des
accords de volonté donc il faut être au moins deux. Parmi les conventions, on isole une
sous-catégorie : le contrat, accord de volonté qui produit des effets de droit à savoir, des
obligations.
L’offre de vente est donc un acte juridique unilatéral ou bien un fait juridique.
b) Le régime
Deux problèmes se posent.
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Que se passe-t-il si l’offrant rétracte son offre avant qu’il y ait eu acceptation ?
Si l’offrant décède avant qu’il y ait eu acceptation, son offre survit-elle ?

1. La révocation de l’offre
Il faut distinguer selon la nature de l’offre.
Si l’offre est un acte juridique unilatéral, l’offrant s’est alors engagé à maintenir
l’offre pendant le délai qu’il a lui même stipulé. En tant qu’
acte juridique, il a force
obligatoire : l’offrant est lié par son engagement. Logiquement l’offre est irrévocable
pendant le délai stipulé.
L’engagement de l’offrant est moins fort et la rétractation est possible si elle n’est
qu’un simple
fait juridique. Cette rétractation doit être possible sous réserve que
l’offrant répare le préjudice que cette rétractation pourrait causer.
Mais la position de la jurisprudence est différente. Est admis que la rétractation est,
en toute hypothèse, possible et qu’elle fait tomber l’offre. Seulement il est possible
qu’elle crée un dommage que l’offrant devra réparer. Cette dualité d’acte ne se retrouve
donc pas en pratique. L’offre est extrêmement fragile dans l’état actuel de la
jurisprudence.La Convention internationale de Vienne du 11 avril 1980, relative à la
vente internationale de marchandises entre professionnels, prévoit dans son article 16 2°
a) que « l’offre de vente, quand elle est assortie par l’offrant d’un délai, est
irrévocable ».
2. Le décès de l’offrant
Ici la jurisprudence adopte une solution conforme à la dualité.
Si l’offre est assortie d’une obligation de maintien, le décès de l’offrant n’entraîne
pas la caducité de l’offre (3Civ. 10 décembre 1997 Def.1998 Art 37753 #20).En
pratique, c’est l’héritier du défunt qui reçoit la charge de cette offre.
Si l’offre n’est pas assortie de la stipulation d’une offre de maintient, alors le décès
de l’offrant fait tomber l’offre (3Civ 10 mai 1989 B. III #109).
Ces solutions sont l’exact reflet de la dualité d’offres. Dualité de nature, dualité de
régime.
B- L’acceptation
Elle se définit comme un agrément pur et simple de l’offre. Elle entraîne la
formation automatique de la vente.
Le droit commun des contrats pose cependant trois règles.
1. L’acceptation est un agrément de l’offre.
2. L’acceptation de l’offre entraîne la formation irrévocable du contrat.
3. L’acceptation de l’offre peut intervenir à tout moment tant que l’offre n’est pas
caduque.
Dérogation à la règle première, l’acceptation est un agrément pur et simple de l’offre.
L’acceptation est un simple oui. Les ventes consenties par voie électronique posent des
difficultés. Si on appliquait la règle selon laquelle l’acceptation est un agrément de
l’offre, celle-ci se caractériserait par un clic sur un lien. Mais l’acheteur se trouverait
exposé à un double danger. Existe tout d’abord celui du clic accidentel mais aussi celui
du clique compulsif, quand l’utilisateur clique deux fois de suite sur le lien. L’art. 1369-
5 Cciv (loi du 21 juin 2004) prévoit un système particulier d’acceptation, « le système
du double clic », idée de réitération de l’acceptation. Il faut donc une première
acceptation qui ne compte pas mais aussi une seconde qui, elle, vaut acceptation.
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Il faut après le premier clic que l’acheteur puisse vérifier le détail de sa commande ainsi
que le prix. Ce n’est qu’après l’apparition du récapitulatif sur l’écran que l’acheteur peut
confirmer sa commande par le second clic.
Dérogation à la règle numéro 2 : il arrive que l’acceptation de l’offre de vente ne forme
pas la vente.Il en est ainsi quand le législateur octroie à l’acheteur une faculté de
rétractation, ou un droit de repentir. Cette faculté est discrétionnaire, c'est-à-dire que
l’acheteur n’a pas à justifier d’un quelconque motif. Ce droit est octroyé pour protéger
le consommateur de l’achat impulsif. On rencontre ce droit aussi bien en matière de
vente mobilière que pour les ventes immobilières. Pour les ventes mobilières et plus
précisément les ven
tes par démarchage à domicile, l’art. L121-5 CConso confère à
l’acheteur un délai de rétractation qu’il peut exercer dans un délai de sept jours à
compter de l’acceptation. Ce n’est pas la formation de la vente qui est retardée.
L’acceptation de l’offre de vente entraîne formation de la vente, c’est seulement
l’acheteur qui peut faire tomber la vente en usant de son droit de rétractation. D’autre
part, la
vente à distance bénéficie aussi de ce droit, dans un délai de sept jours à
compter de la livraison (art. L 121-20 du Cconso). Pour les
ventes d’immeubles à
usage d’habitation consenties à un acquéreur non professionnel et constatées dans
un acte sous seing privé
, l’art. L 271-1 CCH (Code de construction et de l’habitation)
confère à l’acheteur une faculté de rétractation dont l’acheteur peut disposer pendant un
délai de 7 jours.
Dérogation à la règle numéro 3 : il arrive que l’acceptation de l’offre de vente ne puisse
pas intervenir n’importe quand mais uniquement à l’expiration d’un délai de réflexion
que la loi impose à l’acheteur. Il en est ainsi dans la
vente d’immeuble à usage
d’habitation consentie à un acheteur non professionnel mais vente directement
constatée dans un acte authentique.
L’acheteur doit respecter un délai de 7 jours
avant de signer l’acte notarié. Le notaire va préparer un projet d’acte de vente qu’il va
remettre à chacune des parties. Ce projet devra être ou bien remis en main propre à
l’acheteur ou bien notifié par recommandé. Il faut que passe un délai de sept jours avant
de pouvoir signer l’acte de vente.
§2 Le processus complexe
Souvent en matière de vente, le mécanisme qui précède la vente ne se réduit pas à une
offre et une acceptation. La
vente elle-même sera en effet précédée de la conclusion
d’un contrat préparatoire.
On appelle souvent ces contrats préparatoires des
avant-contrats. La terminologie de
contrat se justifie car l’acte est un véritable contrat qui a pour fonction de préparer la
vente. C’est un premier contrat, distinct de la vente.
Ce processus a lieu dans deux domaines : c’est tout d’abord le cas dans la vente
d’immeubles et de fonds de commerce
. Pour conclure une vente d’immeuble et de
fonds de commerce, il faut un certain temps. Pour des raisons pratiques tout d’abord,
l’acheteur va demander du temps avant de s’engager dans un tel contrat. Il aura aussi
besoin de temps pour trouver un crédit lui permettant de faire l’acquisition. Enfin pour
les ventes d’immeuble, il faut laisser s’écouler les délais de préemption qui peuvent
s’exercer dans ce domaine. En matière de vente d’immeuble, la loi accorde à certaines
personnes un droit de préemption. C’est un droit qui permet d’acheter un bien en
priorité. En matière immobilière, il existe d’assez nombreux droits de préemption : pour
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la vente de terre agricole, le droit de préemption du fermier permet à ce dernier
d’acheter le bien d’une manière prioritaire. Existe également le droit de la SAFER qui
peut préempter sur une vente. En milieu urbain, existent le droit de préemption des
collectivités locales ainsi que celui du locataire d’un immeuble à usage d’habitation.
A chaque fois que la loi octroi un doit de préemption, elle soumet ce droit à un délai.
Ce temps signifie concrètement qu’un laps de temps assez long séparerait l’offre de
vente de son acceptation.Mais la fragilité inhérente à l’offre (toujours révocable par
l’offrant) devient extrêmement gênante dans des ventes qui nécessitent du temps pour se
former. Plus le temps est long plus la fragilité de l’offre est grande, c’est pourquoi sont
conclus ces avant-contrats.
C’est dans un second temps dans le
secteur des affaires que l’on retrouve la conclusion
de contrats préparatoires avant celle de la vente proprement dite.
Quels sont les principaux contrats préparatoires à la vente ?
A- Le pacte de préférence
1) Identification du pacte de préférence
Le pacte de préférence est un contrat préparatoire qui, en théorie, peut être utilisé
pour la préparation de tous les contrats. Dans la pratique, on s’aperçoit que la quasi-
totalité des pactes de préférence sont appliqués pour préparer le contrat de vente.
a) Définition
C’est un contrat par lequel une personne qu’on appelle le promettant ou le
souscripteur s’engage, pour le cas où elle se déciderait à vendre une chose
déterminée, à donner la préférence à une autre personne, le bénéficiaire.
(1) Signature du pacte de préférence
(2) Décision du promettant de vendre son bien.
(3) Faculté du bénéficiaire d’acheter le bien.
« Le pacte de préférence est un contrat »
C’est le plus souvent un accord de volonté entre les deux cocontractants. Mais on peut
aussi imaginer qu’un pacte de préférence soit inséré dans un testament. Le testateur
lègue un bien à un légataire et ce lègue prévoit que ce bien devra être vendu par
préférence à une personne déterminée. Or le testament est un acte juridique unilatéral,
donc le pacte de préférence en est aussi un. En dehors de cette hypothèse marginale, un
pacte de préférence est un contrat.
Ce contrat qu’est le pacte de préférence peut être un contrat unilatéral ou
synallagmatique. Unilatéral si le promettant s’engage sans obtenir une contrepartie
financière. A l’inverse s’il est prévu le paiement d’une certaine somme, alors le contrat
est synallagmatique car il y a deux obligations.
Ce pacte de préférence peut par ailleurs être un contrat inclus dans un autre contrat ou
être un contrat autonome. Le propriétaire d’un immeuble loue son bien à un
commerçant par un bail commercial. Il peut être prévu que la vente du bien se ferait
prioritairement au bénéfice du locataire. Le pacte de préférence est alors inclus dans le
bail.
« par lequel une personne s’engage pour le cas où elle se déciderait à vendre »
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Le promettant ne s’engage pas à vendre son bien. Il ne faut pas confondre la pacte de
préférence et la promesse unilatérale de vendre dans laquelle le propriétaire s’engage à
vendre son bien. La formation de la vente ne dépend donc pas du seul bénéficiaire.
C’est au promettant qu’il appartient de mettre le bien en vente.
« une chose déterminée »
Tous les éléments essentiels (chose et prix) n’ont pas à être déterminés dans le pacte de
préférence. Il suffit que la chose à propos de laquelle la préférence est faite soit
déterminée, pas le prix.
Civ. 3 15 janvier 2003 (CCC 03 #71) : « il n’est pas de la nature du pacte de préférence
de prédéterminer le prix. » Le pacte de préférence ne constitue pas un engagement
unilatéral de vente.
« à donner la préférence au bénéficiaire »
On indique ici les effets du pacte de préférence.
Le contenu des effets
L’obligation du promettant est une obligation de faire :
il s’engage à proposer la vente par préférence. (Civ. 1 10 juillet 2002 D. 02 IR p2515)
Quelle contrainte fait peser cette obligation sur le promettant ? Celui-ci peut toujours
disposer matériellement de la chose qui fait l’objet du contrat, c'est-à-dire qu’il peut
modifier la substance matérielle de la chose. Il ne va pas non plus interdire au
promettant d’aliéner la chose par un autre moyen qu’une vente. Le promettant s’est
engagé à proposer la vente par préférence. Mais il peut, sans avertir le bénéficiaire,
conclure un échange avec un tiers, ou l’inclure dans un société. Il n’a aucune priorité à
respecter si ce n’est de ne pas utiliser la vente. En effet le pacte de préférence interdit
simplement de vendre le bien à un tiers sans avoir proposer au bénéficiaire d’acheter en
priorité.
Ainsi le pacte de préférence n’entraîne qu’une légère restriction au droit de disposer
du promettant. Il en dispose matériellement et juridiquement à ceci près qu’il ne peut
vendre le bien à qui il veut.
Du point de vue du bénéficiaire : Droit de créance
Il a le droit d’exiger du promettant qu’il fasse quelque chose pour lui, c'est-à-dire qu’il
lui propose d’acquérir le bien.Il dispose d’un droit de créance à l’égard du promettant
(Cour de cassation 24 mars 99 RTDCiv 99 p 617). Ce droit est cessible.
Le délai de l’engagement
La question de la durée du pacte de préférence n’est pas tranchée en jurisprudence. Le
pacte lui-même peut créer une date extinctive. Si avant l’expiration du délai, le
souscripteur décide de mettre le bien en vente, il le propose prioritairement au
bénéficiaire. S’il le promettant ne veut pas vendre le bien pendant le laps de temps, alors
le pacte de préférence devient caduque, il disparaît de lui-même. Mais dans l’hypothèse
où l’acte ne prévoit pas de tel délai, on hésite entre trois solutions possibles. Première
solution : le pacte de préférence est un contrat qui s’étale dans le temps et s’il n’est pas
assorti d’un terme, c’est un contrat à durée indéterminée.Or le droit commun dispose
que chacune des parties dispose d’une faculté de rupture unilatérale. Ainsi le promettant
souhaitant se délier du pacte n’aurait qu’à le stipuler au bénéficiaire. Deuxième
analyse : on pourrait permettre au promettant de demander au juge qu’il fixe un terme
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raisonnable. En matière de contrat de prêt pour lesquels il n’est pas prévu de terme, la
loi prévoit que le prêteur peut saisir le juge pour qu’il fixe un délai raisonnable. Enfin
certains auteurs développent l’analyse selon laquelle le pacte de préférence est un
contrat à exécution successive. Mais le pacte de préférence n’est-il pas un contrat à
exécution instantanée ? Dès lors la seule solution serait d’admettre alors qu’il n’y a pas
de limite temporelle à ces obligations.
b) La distinction entre pacte de préférence et notions voisines
Il faut confronter le pacte de préférence à deux notions qui lui sont proches et
notamment le droit de préemption.
Ce sont d’abord les points communs qui interpellent.Dans les deux cas, le
mécanisme consiste à offrir au bénéficiaire une faculté : acheter ou ne pas acheter. On
observe dans les deux cas qu’est accordée une priorité à une personne dans le cadre
d’une rivalité pour une acquisition. On constate enfin que le seul bénéficiaire ne peut
conclure la vente : il faut attendre que le propriétaire se décide à vendre.
Au delà de ces points communs, ce sont les différences qui l’emportent entre ces
deux mécanismes. La différence fondamentale tient au fondement de ces mécanismes :
le droit de préemption a toujours pour fondement la poursuite de l’intérêt général alors
que le pacte de préférence protège toujours un intérêt particulier. Ex : le droit de
préemption du fermier, il est opportun que le propriété de la terre revienne à celui qui la
cultive, ainsi l’agriculture est performante. Le droit de préemption a forcément une
source légale car il protège l’intérêt général. Seule la loi peut créer un droit de
préemption. En revanche le pacte de préférence est d’origine conventionnelle. Le droit
de préemption permet à son titulaire de demander une fixation judiciaire du prix de
vente et ce n’est pas le cas à propos du pacte de pacte de préférence. Enfin le droit de
préemption est un mécanisme à répétition alors que le pacte de préférence est un
mécanisme à seul coup. Ce dernier épuise ses effets dès lors que le vendeur a proposé
une fois le bien au bénéficiaire. Le droit de préemption peut être exercé à chaque fois
que le bien est mis en vente.
Les deux notions ne peuvent être assimilées. Le pacte de préférence est un
mécanisme irréductible au droit de préemption. Il arrive cependant dans certains arrêts
que le pacte de préférence est un droit de préemption conventionnel mais cela laisse
suggérer que la nature juridique est la même. Le pacte de préférence est un contrat alors
que le droit de préemption est accordé par la loi.
La jurisprudence a annoncé de façon très nette que le pacte de préférence est une
promesse unilatérale de vente conventionnelle : Civ.3 16 mars 1994 (D.94 p486). En
disant cela, la Cour de cassation nie l’autonomie du pacte de préférence. En effet elle
suggère que ce pacte n’est pas un contrat préparatoire à la vente mais une variété de
promesse unilatérale de vente sous conditions.
« Une promesse unilatérale de vente… » ?
Une promesse unilatérale de vente est un contrat préparatoire de la vente plus proche de
la vente que ne l’est le pacte de préférence car le promettant s’engage d’ores et déjà à
vendre tel bien à tel prix et à tel bénéficiaire. Le pacte de préférence conditionnel est
une promesse unilatérale de vente sous condition, c'est-à-dire relatif à un événement
futur et incertain (différent du terme, événement futur et certain). Il y a la condition
suspensive et la condition résolutoire. Dans la condition suspensive, on a un contrat qui
est formé, mais tous ses effets sont suspendus jusqu’à cet événement futur et incertain.
Pour la condition résolutoire, le contrat produit tout de suite ses effets, mais si
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l’événement survient, alors le contrat est rétroactivement anéanti. Quelle est la
condition du pacte de préférence ?

La Cour de cassation répond que le pacte de préférence est une promesse unilatérale de
vente assortie d’une condition suspensive. En l’espèce l’événement futur et incertain est
la décision du promettant de vendre son bien. S’il décide de mettre son bien en vente, le
pacte de préférence produit les mêmes effets qu’une promesse unilatérale de vente.
1er problème : la condition suspensive est un élément essentiel du contrat.
Selon la doctrine, ce raisonnement ne tient pas debout. Dans l’analyse de la Cour de
cassation, le pacte de préférence est analysé comme une promesse unilatérale de vente
sous condition suspensive, la décision du promettant de vendre ; mais qu’est-ce que
cette décision de vendre ?Ce n’est ni plus ni moins que son consentement à la vente ; or
ce consentement est un élément essentiel du contrat. Mais
on ne peut constituer comme
condition suspensive un élément essentiel du contrat, seuls les éléments accessoires
le peuvent
.
2ème problème : la condition suspensive potestative
Admettons que l’on reconnaisse la validité de la promesse unilatérale de vente assortie
d’une condition suspensive, la décision de vendre. De qui dépend la réalisation de cet
événement ? Uniquement du promettant ! Cette condition qui appartient au débiteur est
une condition potestative. Or le Code civil dispose en son article 1174 que « toute
obligation est nulle lorsqu’elle a été contractée sous une condition potestative de la part
de celui qui s’oblige. »
Il faut en conclure que le pacte de préférence n’est pas une sorte de promesse
unilatérale de vente, il est autre chose : un acte préparatoire indépendant.
2) La sanction de la violation du pacte de préférence
C’est l’hypothèse dans laquelle le promettant vend son bien à une tierce personne, il
y a donc violation du pacte de préférence.
Quels sont les moyens d’action dont le
bénéficiaire de ce pacte dispose ?
Le bénéficiaire du pacte violé dispose de deux
possibilités.
Tout d’abord le bénéficiaire peut faire une action en responsabilité contractuelle
contre le promettant.Il obtiendra réparation du préjudice causé par le versement de
dommages intérêts. Cette sanction ne satisfait pas pleinement le bénéficiaire, celui-ci
préfèrerait faire jouer la préférence et acheter en priorité. La sanction qui serait vraiment
satisfactoire serait l’exécution forcée du pacte de préférence. Voir Civ.1 5 mai 2004
pourvoi n°01-15812.
L’action ne va pas être dirigée contre le promettant mais directement contre le tiers
acquéreur : il s’agit d’une action en nullité de la vente fondée sur la fraude, Fraus
omnia corrumpt (ce qui est fait sur la base d’une fraude doit être annulé).La
jurisprudence a précisé que la fraude suppose deux choses : la connaissance par le tiers
acquéreur de l’existence du pacte de préférence et la connaissance par le tiers acquéreur
de l’intention du bénéficiaire du pacte de s’en prévaloir. (Civ.3 26 octobre 82 Bul. III
#208) Autrement dit il faudra démontrer l’existence d’une collusion frauduleuse entre le
promettant et l’acquéreur. Tous les deux connaissaient le pacte de préférence et veulent
le méconnaître. C’est une action difficile car prouver que le tiers savait que le
bénéficiaire avait l’intention de se prévaloir du pacte est chose particulièrement délicate.
S’il parvient à rapporter la preuve de la fraude, la sanction réside dans la nullité de le
vente faite au tiers. Cette nullité implique donc l’anéantissement rétroactif, ainsi le bien
retourne dans le patrimoine du promettant. On revient donc au
statu quo ante. Ce que
refuse la jurisprudence, c’est d’admettre la substitution du bénéficiaire du pacte violé au
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tiers acquéreur après annulation de la vente frauduleuse. Voir Civ. 3 30 avril 1997 Bull.
II #96
Ce refus de substitution est assez mal perçu par le bénéficiaire car il a malgré tout
amené la preuve de la fraude ce qui n’est pas chose aisée.
Que vaut cette solution de la
Cour de cassation en droit ?
Il faut regarder comment elle justifie sa position. Elle fait
appel à l’art. 1142 Cciv lequel dispose que « toute obligation de faire se résout en
dommages-intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur. » Ainsi pour les
obligations de faire, il n’y aurait pas d’exécution forcée en nature. Mais l’obligation de
faire incombant au promettant, si on permettait au bénéficiaire du pacte violé de se
substituer au tiers acquéreur, cela reviendrait à une exécution forcée en nature. Le
promettant ne devait que réserver la vente au promettant, ici le promettant n’a pas
souhaité vendre son bien. Mais ce raisonnement de la Cour de cassation n’est pas
convaincant parce qu’il méconnaît le sens réel de l’art.1142 Cciv. Ce texte signifie que
l’exécution forcée en nature d’une obligation de faire est impossible dans le cas où cette
exécution porterait atteinte à la liberté physique du débiteur. Dans tous les cas où
l’exécution forcée ne porterait pas atteinte à la liberté physique, elle serait alors
possible. En l’espèce, la substitution de l’acquéreur serait une exécution forcée, mais
porterait-elle atteinte à la liberté physique du promettant ? Bien sûr que non. Et il
suffirait que le jugement décide, en même temps de la nullité, de substituer le
bénéficiaire du bien au tiers.
Il fut un temps où la jurisprudence avait admis une sanction beaucoup plus efficace.
Ce cas concernait les pactes de préférence portant sur une vente d’immeuble. Mais cette
sanction a été ensuite abandonnée. C’est un arrêt du 4 mars 1971 D71 p 358 rendu par
la 3
ème chambre civile de la Cour de cassation qui apporta cette solution. Il faut au
préalable connaître le mécanisme de la publicité foncière.
Les opérations juridiques portant sur un immeuble doivent être publiées sur les registres de la
publicité foncière.
Pourquoi organiser une telle publicité ? Cela sert à résoudre les conflits entre
deux personnes qui se prétendraient titulaires de droits concurrents sur le même bien. On ne regarde
pas la date de la vente mais celle de la publication sur les registres de la publicité foncière. Cette
publicité est opposable aux tiers. (Décret 4 janv. 55)
Le pacte de préférence entraîne une petite restriction au promettant puisque celui-ci
ne peut pas vendre à une autre personne que le bénéficiaire. Pour peu que ce pacte ait
pour objet un immeuble, alors il entraîne donc une restriction au droit de disposer de
l’immeuble. Or l’art. 28 2° du décret du 4 janv. 55 dit que les actes juridiques entraînant
une restriction au droit de disposer de l’immeuble doivent être soumis aux formalité de
la publicité foncière. L’art. 30-1 de ce même décret précise que cette publication permet
l’opposabilité aux tiers. Autrement dit, lorsque le pacte de préférence concerne un
immeuble, doivent être respectés les mécanismes de la publicité foncière. Ainsi il faut
regarder lequel des deux a publié en premier.Si c’est le bénéficiaire du pacte qui a
publié en premier, le bénéficiaire se substitue alors bel et bien au tiers acquéreur.
L’inverse marche aussi.
Ce système a été abandonné.En effet, le point de départ de tout le raisonnement de la
Cour de cassation est la qualification du pacte de préférence de restriction au droit de
disposer de l’immeuble. Cela semble logique, mais si on admet cette affirmation, on est
obligé de l’étendre
a fortiori à la promesse unilatérale de vente puisqu’elle est un
engagement plus fort que le pacte de préférence. Dans ce cas, le raisonnement de la
Cour de cassation est également valable pour la promesse unilatérale de vente
14





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(mécanisme de la publicité foncière), la logique oblige à cette conclusion mais c’est
impossible, on se heurte à un obstacle textuel : l’article 37 du décret du 4 janvier 1955
indique que « les promesses unilatérales de ventes d’immeuble ne sont soumises à
publicité que de façon facultative ». Dans le décret, un article spécial empêche d’étendre
à la promesse unilatérale de vente le raisonnement élaboré pour le pacte de préférence.
Du coup on arrive à une contradiction, car la sanction du pacte est plus efficace alors
que l’engagement est moins fort que dans le cas de la promesse. La Cour de cassation a
donc opéré un revirement spectaculaire de jurisprudence : « le pacte de préférence ayant
pour objet une vente d’immeuble n’est pas soumis à publicité foncière » (civ. 3, 16 mars
1994, Dalloz 1994 p. 486).Or il a bien fallu que la Cour de cassation se justifie, elle a
dit que « le pacte de préférence est une promesse unilatérale de vente plénière ». C’est
donc une sorte de promesse unilatérale de vente, et donc il entre dans le champs du
décret, la publicité est facultative. Le problème est que l’affirmation est fausse, la Cour
de cassation doit bien le savoir, mais il fallait qu’elle se justifie.
Depuis, les deux seules sanctions de la violation du pacte sont une action en
responsabilité contractuelle, et une action en nullité de la vente pour fraude.
B- La promesse unilatérale de vente
1)L’identification de la promesse unilatérale de vente
a) Présentation de la promesse unilatérale de vente
• La définition
La promesse unilatérale de vente est un contrat par lequel une partie (le promettant,
on ne parle pas de souscripteur) s’engage à vendre un de ses biens à une autre partie (le
bénéficiaire) si celle-ci manifeste dans un certain délai (le délai d’option) la volonté
d’acquérir. La volonté d’acquérir est appelée « levée d’option ».
Il y a donc deux étapes : la conclusion de la promesse unilatérale de vente (PUV), et
la conclusion de la vente. Entre les deux il y a le délai d’option. La « levée d’option »
signifie que le bénéficiaire souhaite acheter le bien.
• La formation de la promesse unilatérale de vente
La promesse unilatérale de vente est un contrat, sa formation résulte donc d’un
accord de volonté entre les parties. Il faut distinguer « promesse unilatérale de vente » et
« offre de vente. » L’offre de vente n’est qu’une manifestation unilatérale de volonté,
tandis que la promesse unilatérale de vente est un échange de consentements, c’est la
rencontre d’une offre et d’une acceptation.
La formation de la promesse unilatérale de vente obéit à des règles particulières
quand elle a pour objet une immeuble à usage d’habitation, et quand ??? (art. 271-1 du
code de l’habitation et de la construction). Lorsque la promesse unilatérale de vente est
constatée dans un acte sous seing privé, il existe un délai de rétractation de 7 jours.
Lorsque la promesse unilatérale de vente est constatée dans un acte authentique, un
délai de réflexion de 7 jours est imposé par la loi à compter de l’élaboration du projet de
promesse unilatérale de vente.
Y’a t-il des conditions de forme ? Le principe est que la promesse unilatérale de
vente est un contrat consensuel. Mais certaines promesses unilatérales de vente sont des
contrats formalistes. Il existe un texte (art. 1840 A du code général des impôts) qui
soumet les promesse unilatérale de vente d’immeubles et de fonds de commerce à une
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formalité. Dans les 10 jours de sa conclusion, une promesse unilatérale de vente
d’immeuble ou de fonds de commerce doit être enregistrée ou constatée dans un acte
authentique, et ceci à peine de nullité absolue.
Le délai de 10 jours est à calculer à partir de la conclusion de la promesse unilatérale
de vente, et non à partir de la levée d’option. Pour enregistrer la promesse unilatérale de
vente, il faut aller au service de l’enregistrement fiscal pour faire constater la promesse
unilatérale de vente dans un registre (moyennant une taxe). On peut aussi faire constater
la promesse unilatérale de vente dans un acte authentique. Si on ne se plie pas à l’une de
ces formalités, la promesse unilatérale de vente est frappée de nullité absolue.
Pourquoi s’agit-il d’une nullité absolue ?
Le texte cherche à lutter contre une pratique consistant pour des professionnels de
l’immobilier à se faire consentir de promesse unilatérale de vente d’immeuble, pour
ensuite céder le bénéfice de ces promesses unilatérales de vente à des clients à titre
onéreux. Cette rémunération est bien entendu occulte et ne donne donc pas lieu à
taxation (T.V.A. ou I.R.), on comprend pourquoi il s’agit d’une nullité absolue.
Attention ! En ce qui concerne les promesses unilatérales de vente d’immeubles, il
ne faut pas confondre le formalisme fiscal obligatoire et la publicité foncière qui n’est
que facultative.
• Les effets de la promesse unilatérale de vente du point de vue du
promettant
En concluant une promesse unilatérale de vente, le promettant donne d’ores et déjà
son consentement à la vente.D’ailleurs on apprécie la capacité de vendre du promettant
au jour de la conclusion de la promesse, et non au jour de la levée d’option (civ. 3, 7
janvier 1982, RTDCiv 1982, p. 600). L’engagement de vendre est doté de force
obligatoire, le promettant ne peut pas se rétracter. C’est pour cela qu’en pratique, la
promesse unilatérale de vente est beaucoup plus intéressante qu’une simple offre.
Tout cela est parfaitement logique, mais bien évidement la Cour de cassation va à
l’encontre de la logique et permet au promettant de se rétracter pendant le délai d’option
(civ.3, 15 décembre 1993, JCP 1995, part. 3, n° 22366) : « Tant que les bénéficiaires
n’avaient pas déclarés acquérir, l’obligation de la promettante ne constituait qu’une
obligation de faire et la levée d’option postérieure à la rétractation de la promettante
excluait toute rencontre réciproque des volontés de vendre et d’acheter ». Pour la Cour
de cassation, le promettant peut se rétracter à l’intérieur du délai d’option, et cela fera
obstacle à la levée d’option.
Cet arrêt n’est pas isolé, et la doctrine reproche à la Cour de cassation de donner une
solution inexacte et inopportune.
Une solution jugée inexacte sur le plan théorique :
Obligation de faire à la charge du promettant, son inexécution se résout en
dommages et intérêts selon l’art. 1142 c.civ. mais il est faux de dire que le promettant
est débiteur d’une obligation de faire, car en effet qu’à t-il à faire concrètement, sinon
attendre la décision du bénéficiaire ?
Même si la promesse unilatérale de vente mettait à la charge du promettent une
obligation de faire, il serait faux de dire que son inexécution doit se résoudre en
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dommages et intérêts. En effet, la portée réelle de l’art. 1142 est la résolution en
dommages et intérêts dans le cas où celle ci porterait atteinte à la liberté physique du
promettant. L’exécution en nature serait ici de provoquer la levée d’option malgré la
rétractation du promettant. Où serait alors l’atteinte à la liberté physique ? Il n’y en a
pas, l’exécution forcée est donc possible.
Enfin, admettre la rétractation du promettant est méconnaître la force obligatoire
des contrats (art. 1134 c.civ.).
Une solution jugée inopportune sur le plan pratique :
Avec cette jurisprudence, la promesse unilatérale de vente n’offre plus aucun
intérêt, car elle n’apporte rien de plus qu’une simple offre de vendre. La promesse
unilatérale de vente ne sert plus à rien, autant se contenter d’une simple offre de
contracter.
En dépit de toutes ces critiques, la Cour de cassation a maintenu sa position.
Dans ce cas, comment redonner un intérêt à la promesse unilatérale de vente et
neutraliser la jurisprudence de la Cour de cassation ? Il faut stipuler dans le contrat de
promesse unilatérale de vente une clause de dédit élevée. Une clause de dédit confère au
contractant qui s’est engagé la faculté de se retirer de l’opération en payant la somme
prévue à titre de dédit. Une clause de dédit élevée n’empêche pas le contractant de se
retirer mais cela l’en dissuadera fortement. Cela peut fonctionner car le juge se refuse de
réviser les clauses de dédit, si exorbitantes soient-elles.
• Les effets de la promesse unilatérale de vente du point de vue du
bénéficiaire
Droit potestatif, volonté successorale
Le bénéficiaire a le choix d’acheter ou de ne pas acheter. La levée d’option entraîne
la formation de la vente, ce qui signifie qu’une manifestation unilatérale de volonté va
créer un rapport de droit, c’est donc un droit potestatif. C’est en tout cas l’analyse de la
doctrine. La formation de la vente ne dépend que de la volonté du bénéficiaire. Dans le
cas du pacte de préférence, le bénéficiaire n’a pas la possibilité par sa seule volonté de
former la vente.
Une chose est sûre, le bénéficiaire de la promesse unilatérale de vente peut
transmettre à autrui son droit d’option. Au lieu de lever l’option à son profit, il transmet
cette faculté à quelqu’un d’autre. Il peut procéder de deux façons :
La cession de la promesse unilatérale de vente :
Le bénéficiaire, qu’on appellera alors « cédant », va céder la promesse unilatérale de
vente à une tierce personne appelée « cessionnaire ». Le promettant sera appelle « cédé
».
La cession de promesse unilatérale de vente d’immeuble ou de fonds de commerce
est soumise au formalisme de l’article 1840-A du Code général des impôts
(enregistrement ou constatation dans un acte authentique dans les 10 jours de la
cession).La sanction est la nullité absolue du contrat de cession de promesse unilatérale
de vente. Article 52 de la loi du 29 janvier 1993 : est frappée d’une nullité d’ordre
public toute cession à titre onéreux des droit conférés par une promesse de vente portant
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sur un immeuble lorsque cette cession est consentie par un professionnel de
l’immobilier.
La stipulation d’une clause de substitution :
Dès la formation de la promesse, les parties ont envisagé que l’option puisse être
levée par une autre partie que le bénéficiaire.
A priori le résultat est le même que dans le
cas de la cession, mais en fait il y a des différences assez nettes.
La clause de substitution ne nécessite pas l’accomplissement de la formalité de
l’article 1840-A du Code général des impôts. De plus la jurisprudence considère que le
bénéficiaire initial conserve la possibilité de lever l’option en cas de désistement du
bénéficiaire substitué (Civ. 3, 13 juillet 1999, Dalloz 2000 p. 195). Cette technique est
beaucoup plus intéressante que la précédente.
• L’indemnité d’immobilisation
En général il s’agit d’un dixième du prix de vente, si la vente ne se forme pas elle
sera due par le bénéficiaire au promettant. C’est une création de la pratique notariale,
ont la trouve dans toutes les promesse unilatérale de vente d’immeuble ou de fonds de
commerce, les tribunaux ont du l’analyser juridiquement : Quelle est sa nature ? Quel
est son régime ?
La nature :
La Cour de cassation a d’abord dit ce que n’était pas l’indemnité d’immobilisation.
Dans un premier temps on l’a envisagé comme une clause pénale.Article 1152 du Code
civil : le juge peut réviser le montant de la clause pénale lorsqu’elle est manifestement
excessive. C’était intéressant pour les bénéficiaires… La Cour de cassation a dit que
l’indemnité d’immobilisation n’était pas une clause pénale (civ. 3, 5 décembre 1984,
Dalloz 1985 p. 544). Ce n’est pas une sanction de l’inexécution des obligations du
bénéficiaire, puisqu’il n’était pas obligé de lever l’option. En ne levant pas l’option, le
bénéficiaire ne se place pas dans une situation d’inexécution d’une obligation, ce n’est
donc pas une clause pénale.
Dans une promesse unilatérale de vente, le promettant s’engage à vendre tel bien à
tel prix pendant le délai d’option, il immobilise le bien pendant ce délai, sans pouvoir
vendre à un tiers. Le promettant rend un service au bénéficiaire, l’indemnité
d’immobilisation est tout simplement la rémunération de ce service : «l’indemnité
d’immobilisation est le prix de l’exclusivité consentie au bénéficiaire » (civ. 1, 5
décembre 1995, bull. part. I n° 452 ).
Le régime juridique :
Le juge s’est reconnu (malgré la qualification de prix) un pouvoir de révision de
l’indemnité d’immobilisation, mais seulement à la baisse (les deux arrêts du 5 décembre
1984).Il faut deux conditions cumulatives pour que cette révision soit possible.
La condition subjective : les parties doivent avoir voulu fixer le montant de
l’indemnité d’immobilisation en fonction de la durée de celle-ci. Si dans la promesse
unilatérale de vente il est dit que l’indemnité d’immobilisation sera due en tout état de
cause (de plein droit, automatiquement…) le juge ne pourra pas toucher à son montant
(civ. 3, 8 décembre 1986, JCP 1987, part. II, n°20857).
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La condition objective : La décision anticipée du bénéficiaire de ne pas lever
l’option.
Si les deux conditions sont réunies, l’immobilisation a duré un mois au lieu de six
(par exemple), et que les parties avaient prévu une indemnité d’immobilisation pour six
mois, alors le juge pourra réviser son montant s’il n’est pas précisé dans la convention
que l’indemnité d’immobilisation est due de plein droit (en tout état de cause,
automatiquement…).
b) Distinction entre la promesse unilatérale de vente et les notions
voisines
• Distinction entre la promesse unilatérale de vente et le pacte de préférence
(cf.
supra)
• Distinction entre la promesse unilatérale de vente et la promesse synallagmatique
de vente
Dans le cadre de la promesse unilatérale de vente, il n’y a qu’un engagement de
vendre, alors que la promesse synallagmatique de vente comporte deux engagements :
un de vendre et un d’acheter. La stipulation d’une indemnité d’immobilisation dans les
promesses synallagmatiques de vente peut brouiller la frontière entre les deux contrats,
mais sans les confondre. La stipulation d’une indemnité d’immobilisation ne transforme
pas la promesse unilatérale de vente en promesse synallagmatique de vente.
Ce qui peut poser problème, c’est lorsque l’indemnité d’immobilisation est
particulièrement élevé, le juge va requalifier le contrat de promesse unilatérale de vente
en promesse synallagmatique de vente.En effet, si le montant est très élevé, le
bénéficiaire n’a pas le choix, il est contraint de lever l’option, sinon il y perd beaucoup
d’argent. Or s’il est contraint de lever l’option, il s’agit d’une promesse synallagmatique
de vente, et donc il faut requalifier le contrat. La jurisprudence indique le seuil au delà
duquel il faut requalifier le contrat (ch. com., 9 novembre 1971, Bull.II, n°273) : si
l’indemnité d’immobilisation est supérieure ou égale à 1/5ème du prix de vente, il faut
requalifier.
Théoriquement, cette position est discutable. La promesse synallagmatique de vente,
c’est deux engagements, alors que la promesse unilatérale de vente n’en compte qu’un.
Mais en pratique, on comprend pourquoi la Cour de cassation opère cette
requalification. Cela permet d’atténuer le formalisme du Code général des impôts (en
général, le juge n’aime pas trop le formalisme fiscal).
2) La sanction de la violation de la promesse unilatérale de vente
C’est le cas où le promettant vend à un tiers acquéreur le bien qui fait l’objet de la
promesse unilatérale de vente.
• Action en responsabilité contractuelle contre le promettant
• Action en responsabilité délictuelle contre le tiers acquéreur
Il faut une faute, un préjudice, et un lien de causalité entre les deux.
La faute : la connaissance de la promesse unilatérale de vente.
Le préjudice : celui du bénéficiaire.
Le lien de causalité : la faute a causé le préjudice.
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Réparation en valeur ou en nature ? Le juge peut choisir. Il est permis de penser que
la jurisprudence aura tendance à procéder à une réparation en valeur, pour finalement
permettre au promettant de se rétracter.
Quand la promesse unilatérale de vente porte sur un immeuble, en aucun cas la
sanction de la violation de cette promesse ne pourra intervenir sur le terrain de la
publicité foncière.
Attention : les ventes d’immeuble ne passent pas nécessairement par un acte
authentique. Les ventes d’immeubles sont des contrats consensuels. L’acte authentique
est nécessaire pour accomplir les formalités de publicité foncière (l’opposabilité aux
tiers), mais ne conditionne pas la validité de la vente.
C) La promesse synallagmatique de vente
1) L’identification de la promesse synallagmatique de vente
Accord de volonté au terme duquel l’une des parties (le promettant vendeur)
s’engage à vendre un bien à un prix déterminé, et l’autre partie (le promettant acheteur)
s’engage à acheter ce bien à ce prix. Cela semble simple, mais le concept recouvre deux
réalités différentes.
La promesse synallagmatique de vente valant vente : c’est la vente elle même, déjà
conclue (ce n’est pas un avant contrat !)
La promesse synallagmatique de vente ne valant pas vente : c’est un avant-contrat !
Le régime juridique est complètement différent dans les deux cas.
Il existe cependant des règles communes
La promesse synallagmatique de vente est toujours un contrat consensuel.
Il y a d’autre part une protection de l’acheteur lorsqu’il a la qualité de non
professionnel et qu’il conclut une promesse synallagmatique de vente pour un immeuble
(L271-1 Code de la Construction et de l’habitation).Si la promesse synallagmatique de
vente est constatée dans un acte sous seing privé, alors le texte offre un délai de
rétractation au profit du promettant acheteur de 7 jours. Si la promesse synallagmatique
de vente est constatée dans un acte authentique, c’est alors un délai de réflexion de sept
jours qui est imposé à l’acheteur.
a) La promesse synallagmatique de vente valant vente (catégorie de
principe)
Pourquoi cette promesse synallagmatique de vente vaut-elle vente ?
Chaque fois que l’on est en présence d’une promesse synallagmatique de vente on est
en présence de deux personnes en accord sur la
chose et sur le prix. Or d’après l’art.
1583 Cciv, la vente est parfaite dès lors qu’on est convenu de la chose et du prix.
La pratique est à parler de compromis de vente plutôt que de promesse
synallagmatique de vente. Ces deux notions renvoient au même acte, mais d’un point de
vue juridique, un compromis est une convention par laquelle les parties décident de
soustraire le litige qui les oppose à la compétence étatique pour le faire trancher par des
arbitres. Mais bien que la pratique est fortement ancrée, on parlera ici de promesse
synallagmatique de vente.
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Mais si la promesse synallagmatique de vente vaut vente, pourquoi ne pas l’appeler
vente ?
On utilise ce terme pour bien marquer que si l’on est en présence d’une vente d’ores et
déjà formée, il ne s’agit pas d’une vente ordinaire : cette vente est assortie de modalités
particulières.
Quelles sont ces modalités ?
1° La promesse synallagmatique de vente valant vente peut être une vente avec
faculté de dédit ou avec arrhes (1590 Cciv). S’il y a
faculté de dédit, cela signifie que
l’une des partie va pouvoir se retirer du contrat de manière unilatérale, à charge pour
elle de verser à l’autre la somme stipulée pour le dédit. Les
arrhes sont une variété de
dédit. Ils correspondent à une faculté de dédit réciproques. En effet les deux parties
peuvent unilatéralement rompre le contrat. Celui au profit de qui il a été prévu qu’il
verserait des arrhes peut se retirer du contrat en payant la somme prévue. Le
cocontractant pourra lui aussi se retirer en payant le double des arrhes prévues.
2° La promesse synallagmatique de vente valant vente peut aussi être une vente
dont les effets sont suspendus. Il existe en droit deux procédés qui permettent de
suspendre les effets d’un contrat déjà formé. Ce sont le « terme suspensif » et la
« condition ». Le terme est un événement futur et certain (
Quand ?) alors que la
condition est un événement futur et incertain (
Si). La promesse synallagmatique de
vente valant vente peut être une vente avec terme suspensif et/ou avec condition
suspensive.
On trouve aussi la notion de terme incertain, événement futur dont on est persuadé qu’il se
réalisera sans savoir quand.
Les promesse synallagmatique de vente sont dans la majorité des cas des ventes
suspendues jusqu’à l’arrivée d’un terme.
Vente avec terme suspensif
C’est une vente dont les parties ont prévu qu’elle ne produirait ces effets qu’à
l’arrivée d’un événement futur et certain qu’elles ont choisi. Dans les promesse
synallagmatique de vente d’immeubles, le terme suspensif le plus fréquent en principe
est ce qu’on appelle la réitération par acte authentique, c'est-à-dire que la vente est
formée mais qu’elle ne produira ces effets que lorsque sera établi l’acte notarié. La
rédaction d’acte notarié n’est pas une condition de validité de la vente mais elle a pour
fonction de permettre de l’accomplissement des formalités de publicités foncières
(décret 5 janvier 1955). Au moment où est conclue la promesse synallagmatique de
vente, l’établissement ultérieur de l’acte notarié est un événement futur et certain.
Puisque que la vente est déjà formée, la signature de l’acte notarié est un événement
futur et certain. Imaginons que l’une des deux parties ne veulent plus former le contrat,
alors le cocontractant saisira le juge qui rendra une décision constatant que la vente est
déjà formée et qui tiendra lieux d’acte authentique.
Lorsque le terme survient, la vente produit alors ces effets mais sans rétroactivité.
Vente avec condition suspensive
Cette condition suspensive est en pratique et la plupart du temps l’obtention d’un
prêt bancaire. Que se passe-t-il si le futur acheteur ne fait pas tout ce qu’il faut pour
obtenir son prêt ?
A partir du moment où il a trouvé une banque prête à lui concéder un
prêt, on considère que la condition est réalisée. Peu importe donc qu’il accepte ou pas
l’offre qui lui est faite par la banque.
On rencontre également, lorsque la promesse synallagmatique de vente concerne un
terrain non bâti, des conditions suspensives d’obtention du permis de construire.
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Si la condition suspensive se réalise, alors la vente qui était formée produit ses effets
et elle les produit rétroactivement. Si la condition ne se réalise pas, on dit alors qu’elle
est défaillante, alors la promesse synallagmatique de vente est caduque.
Vente avec terme et condition suspensive
Dans la quasi-totalité des promesses synallagmatiques de vente est prévu que si la
vente est belle et bien formée, elle ne produira ses effets que SI le promettant acheteur
obtient le prêt dont a besoin (condition) et QUAND l’acte authentique sera signé
(terme).
b) La promesse synallagmatique de vente ne valant pas vente
L’art. 1583 Cciv dresse la liste des éléments essentiels de la vente, à savoir le
consentement, la chose et le prix. Ce principe comporte des exceptions. C’est le cas
lorsque l’accord sur la chose et le prix, normalement nécessaire et suffisant, ne sera ici
pas suffisant. Ces exceptions peuvent être légales ou conventionnelles.
Elles sont légales quand le législateur subordonne la formation même de la vente à
l’accomplissement d’une formalité. Par exemple la vente de logement HLM est
règlementée par la loi qui prévoit qu’un acte notarié est nécessaire pour la validité
même de la vente (R443-20 Code de la construction et de l’habitation). C’est une
condition
ad validitatem de la formation de la vente. L’accord des parties sur la chose et
le prix ne peut pas former la vente tant que cette formalité n’est pas satisfaite. La
promesse synallagmatique de vente ne vaut donc pas vente.
Existe également une exception conventionnelle. L’art. 1583 Cciv n’est pas
considéré comme étant un texte d’ordre public, ce qui signifie qu’on peut y déroger par
des conventions particulières (art. 6 Cciv). Ce texte indique quels sont les éléments
essentiels pour la formation de la vente, mais n’étant pas d’ordre public, les parties
peuvent convenir que les éléments essentiels de la vente énoncés pas 1583 ne sont pas
les seuls, ils peuvent en rajouter librement. Alors la vente ne sera conclue que lorsque
seront réunis tous les éléments essentiels légaux ainsi que ceux ajoutés par les parties.
La promesse synallagmatique de vente aura beau réaliser un accord sur la chose et le
prix, elle ne réalisera pas la vente pour autant, les éléments supplémentaires convenus
étant également essentiels à cette formation.
Dans la pratique, lorsque les parties rajoutent un élément essentiel en plus, elles
choisissent d’ériger la rédaction d’un acte notarié. Elles conviennent dans la promesse
synallagmatique de vente que la vente ne sera formée qu’au moment de l’établissement
d’un acte notarié.
Cette promesse synallagmatique de vente ne valant pas vente est l’exception. Ainsi
quand le juge est face à une promesse synallagmatique de vente, il considère que celle ci
vaut vente et il ne peut considérer le contraire que s’il est certain que les parties ont
voulu ajouter un élément essentiel. S’il a le moindre doute, il appliquera l’article 1583
Cciv strictement.
La promesse synallagmatique de vente ne valant pas vente est finalement une
promesse synallagmatique de vente non consensuelle. La
imposer
l’accomplissement d’une formalité comme les parties peuvent imposer elles aussi
l’accomplissement d’une autre formalité.Lorsque la promesse synallagmatique ne vaut
pas vente, ce qui est retardé est la formation même de la vente et non pas les effets de
celle-ci. Dans la promesse synallagmatique de vente valant vente, ce sont ses effets qui
loi peut
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sont suspendus. La promesse synallagmatique de vente ne valant pas vente est donc un
avant contrat synallagmatique.
Quels sont les effets propres de la promesse synallagmatique de vente ne valant pas
vente ?
Elle crée des obligations à la charge des parties, une obligation de faire : faire en
sorte que l’élément essentiel ajouté aux trois légaux soit conventionnellement soit
légalement survienne.
Que se passe-t-il si l’une ou l’autre des parties fait obstacle à la
réalisation de cet événement ?
Alors les tribunaux se contentent de condamner le
promettant à des dommages-intérets sans prononcer l’exécution forcée du contrat (Civ.
1 27 mai 1998 Def. 98 p1054). Ainsi une promesse synallagmatique de vente ne valant
pas vente n’engage que ceux qui veulent la respecter. Elle est beaucoup plus fragile que
celle valant vente.
2) La sanction de la violation de la promesse synallagmatique de vente
A priori, les règles applicables seront les mêmes que la promesse vaille ou non
vente. Ici le promettant vend son bien à un tiers acquéreur au profit d’un tiers acquéreur.
Dans la pratique, la promesse synallagmatique de vente d’immeubles est soumise à
publicité obligatoire. Si la promesse synallagmatique de vente vaut vente, elle est
soumise à cette publicité en vertu de l’art. 28 1° du décret du 4 janvier 1955 relative à la
publicité des biens vendus. Si la promesse synallagmatique de vente ne vaut pas vente,
alors la vente n’est pas formée et l’on peut admettre que cela constitue une restriction au
droit de disposer de l’immeuble, laquelle doit être publiée en vertu de l’art. 28 2° de ce
même décret.Ainsi une promesse synallagmatique de vente d’immeuble doit toujours
être publiée ce qui signifie que le conflit entre le promettant acheteur et le tiers
acquéreur doit être résolu en comparant les dates de publication de chaque acte.
L’emporte celui qui l’a publié en premier.
Dans la théorie, on doit faire constater l’acte dans un acte authentique et ainsi le
promettant ne peut publier la promesse synallagmatique de vente que si elle est
constatée dans un acte notarié. Or dans la pratique, cet acte est constaté dans un acte
sous seing privé lequel n’a pas de date certaine. Le mécanisme de la publicité foncière
ne s’applique qu’au profit des personnes de bonne foi. Autrement dit si le promettant
acheteur se trouve confronté à un tiers acquéreur ayant fait publié son acte, la
promettant acheteur n’a plus comme solution que de prouver la mauvaise foi de ce tiers
acquéreur.
D- Le contrat préliminaire à la vente d’immeuble à construire
Ce contrat ne s’applique que dans le domaine de vente d’immeubles à construire à
usage de logement. La vente d’immeuble à construire désigne la situation du prometteur
qui vend un terrain et fait construire pour le compte de son client. Il vend le terrain et il
construit : il faut ces deux éléments.
Ce sont des contrats préliminaires ou contrats de réservation envisagés par l’art
L271-15 du Code de la construction.
Le promoteur, le réservant, s’engage à réserver à un éventuel acheteur, le
réservataire, un immeuble ou une partie d’un immeuble qu’il envisage de construire,
ceci moyennant un dépôt de garantie. La loi pose un certain nombre de règles relatives à
sa formation et à ses effets.
1) La formation
Le contrat préliminaire à la vente d’immeuble à construire n’est pas un contrat
consensuel. Il faut que soit rédigé un écrit pour la validité même de ce contrat. L’art.
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L271-1 du Code de la construction prévoit que si le contrat préliminaire est passé par
acte sous seing privé, le réservataire non professionnel d’un immeuble à usage
d’habitation bénéficie d’un délai de rétractation de sept jours. Mais si le contrat était
d’emblée constaté dans un acte authentique, alors le réservataire non professionnel
bénéficierait d’un délai de réflexion de sept jours.
Le contrat doit contenir une description approximative de l’immeuble à construire.
Cette description suppose que le contrat préliminaire indique son emplacement, la
surface habitable approximative, un prix prévisionnel et enfin la date prévue pour la
conclusion de la vente.
2) Les effets
a) pour le réservant (le promoteur)
Le constructeur ne s’oblige pas à construire. Il stipule seulement que le réservant
réserve un bien immobilier au profit du réservataire et se promet de le lui vendre si cette
construction a lieu.
Ce contrat permet donc au promoteur de prospecter et de savoir si son projet de
construction est économiquement viable.
Soit le promoteur ne donne pas suite au projet de construction (il n’a pas conclu
suffisamment de réservation pour que le projet lui semble rentable), alors le réservataire
récupèrera le dépôt de garantie versé au constructeur.
Soit le projet est mis à exécution et alors le réservant est obligé de réserver un bien
immobilier au cocontractant et de lui proposer à la vente.
b) pour le réservataire
Celui ci s’oblige dès la conclusion du contrat à verser un dépôt de garantie. Le
montant de ce dernier est minutieusement règlementé par la loi et ne peut dépasser 5%
du prix prévu. Il doit être déposé sur un compte bancaire spécial ouvert par le réservant ;
pour garantir la restitution, ce dépôt est indisponible, le réservant ne peut y avoir accès.
En revanche le réservataire ne s’oblige pas à acheter le bien. Même si le projet est
bel et bien réalisé, il va pouvoir renoncer. Il faut distinguer cependant selon qu’il se
rétracte en invoquant des motifs légitimes ou non.
S’il se rétracte en invoquant l’un des motifs légitimes prévus par la loi, il pourra
récupérer son dépôt de garantie. Il existe trois motifs légitimes :
-Le prix de vente dépasse de plus de 5% le prix initialement envisagé. Cela arrive en
pratique car souvent les projets immobiliers sont audacieux et les prévisions sont
difficiles à faire. D’autre part il arrive que la valeur des biens évolue rapidement.
-La consistance ou la qualité de l’ouvrage est diminuée en valeur d’au moins 10%
-L’un des équipements prévus n’est pas réalisé.
S’il se rétracte sans invoquer un motif légitime, il ne récupèrera pas son dépôt.
Ce contrat est règlementé par la loi contrairement aux autres contrats préliminaires.
Qu’elle est la nature juridique de ce contrat ?Peut-on le rapprocher à une catégorie de
contrats existante ?
Pour certains auteurs, ce contrat préliminaire n’est rien d’autre qu’un pacte de
préférence. D’autres l’analysent comme une promesse unilatérale de vente sous
condition suspensive d’achèvement de l’immeuble.
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La jurisprudence a opté pour la qualification d’avant-contrat autonome (Civ. 27 octobre
1975 Bull. #309). La loi précise que ce contrat est seul contrat à pouvoir être conclu en
matière d’immeuble à construire. Pas question donc de conclure un pacte de préférence
ou une promesse unilatérale de vente sous condition.
E- Les contrats-cadres
Définition générale :
Un contrat-cadre est un contrat qui a pour objet de définir les conditions dans lesquelles
des contrats d’application future seront conclu. En règle générale, ces contrats seront
des actes de vente : il est un contrat préparatoire à la vente.
En pratique le contrat-cadre est très utilisé dans le secteur de la distribution d’où
l’appellation de « contrat-cadre de distribution. » Ce contrat-cadre est conclu entre un
distributeur et un fournisseur et organise la collaboration économique de ces deux
agents sur la longue durée. Le distributeur s’engage à acheter les produits du fournisseur
que ce dernier s’engage à lui vendre. Un contrat-cadre n’a de sens qu’au regard des
ventes futures qui auront lieu entre les deux cocontractants.
1) Les règles communes à l’ensemble des contrats-cadre de distribution
a) Règles relatives au contenu du contrat-cadre
1. règles relatives à la clause d’exclusivité
Les contrats-cadre contiennent souvent ce type de clauses. L’exclusivité peut
d’abord être d’approvisionnement, c’est alors une
clause d’approvisionnement
exclusif
. Elle oblige le distributeur à ne s’approvisionner qu’auprès du fournisseur
cocontractant. Elle peut être également de fourniture, on parle alors de
clause de
fourniture exclusive
. Cette clause oblige le fournisseur à ne vendre dans une zone
géographique déterminée qu’au distributeur cocontractant.
Un contrat-cadre peut tout à fait contenir soit une clause soit les deux.
Ces clauses ont pour fonction d’intensifier les relations commerciales entre les parties.
Seulement, une clause d’exclusivité n’en demeure pas moins qu’elle empêche celui qui
est débiteur de l’exclusivité d’entreprendre des relations commerciales avec d’autres
partenaires qui pourraient être plus intéressant.
Lorsque l’exclusivité est d’approvisionnement, alors la clause d’exclusivité a pour
fonction de placer la partie faible, le distributeur, dans un
état de dépendance. Le
législateur est intervenu pour protéger la partie dite faible.
1°Vingt jours au moins avant la conclusion d’un contrat-cadre contenant une
telle clause d’approvisionnement exclusif, doit être remis au distributeur un document
donnant les informations sincères qui lui permettent de s’engager en connaissance
de cause
(L330-3 Code de commerce.) Un décret d’application est venu préciser ces
renseignements. Le document doit fournir des informations sur le contrat-cadre (durée,
conditions de résiliation, conditions de renouvellement, montant des investissements),
ainsi que des renseignements sur le fournisseur lui même (création de l’entreprise, son
développement, l’état du marché et ses perspectives d’évolution, liste des autres
distributeurs liés eux-aussi par un contrat-cadre). Si cette information n’est pas
respectée, le fournisseur s’expose à la sanction par une amende.
2° La clause d’exclusivité ne peut avoir d’effet au delà d’une période de 10 ans
(L330-1 Code de commerce)
2. règles relatives à la détermination du prix
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La question s’est posée de savoir si le prix des marchandises vendues au distributeur
devait être déterminé ou déterminable au moment de la conclusion du contrat-cadre à
peine de nullité de celui-ci.
Est ce que la déterminabilité des prix de vente des marchandises est une condition
de validité des contrats-cadre de distribution ?
Dans un premier temps la jurisprudence a défendu la partie faible en estimant que la
validité était déterminée par la déterminabilité du prix. Si le prix n’était pas au moins
déterminable, la contrat-cadre encourait la nullité. Le problème se posait à propos d’une
clause appelée « Tarif du fournisseur ». La jurisprudence a estimé que le prix était
indéterminé car il fallait, pour que le prix soit déterminable, que le contrat-cadre indique
les éléments objectifs par référence auxquels le prix de vente serait fixé. Ainsi pour que
le prix soit déterminable, il fallait que cette détermination ne dépende pas de la volonté
unilatérale d’une partie et que soient fixés les éléments objectifs grâce auxquels le prix
serait postérieurement fixé. C’est sur cette base que la jurisprudence a annulé beaucoup
de contrats-cadre de distribution pour indétermination du prix. Cela a suscité une forte
réaction dans la pratique ainsi que dans la doctrine. En effet, on lui reprochait de
détruire tous les réseaux de distribution en France, alors même qu’on était beaucoup
moins exigeants à l’étranger.
Face à ces critiques multiples, la Cour de cassation a fini par évoluer. Ainsi c’est en
1995 et par quatre arrêts rendus le 1
er décembre par l’assemblée plénière que le juge
opère son revirement. « Lorsqu’une convention prévoit la conclusion de contrats
ultérieurs, l’indétermination du prix de ces contrats dans la convention initiale n’affecte
pas, sauf disposition légale particulière, la validité de celle-ci. » Ainsi la déterminabilité
du prix de vente n’est plus une condition de validité des contrats-cadre de distribution.
Cela signifie que depuis 1995, un tel contrat-cadre est parfaitement valable, alors même
qu’il ne contiendrait aucune clause relative au prix. D’autre part un contrat-cadre qui
contiendrait une clause relative au prix conférant la possibilité au fournisseur de fixer le
prix unilatéralement serait valable.
Pour éviter qu’un fournisseur ne pratique des prix exorbitants, l’assemblée plénière
prévoit un contrôle dans la fixation du prix, non plus au stade de la formation su contrat
au moment de son exécution. En cas d’abus du fournisseur dans la fixation du prix, le
distributeur pourra réclamer ou bien la résiliation du contrat-cadre ou bien il pourra
mettre en jeu la responsabilité contractuelle du fournisseur (sanctions qui sont d’ailleurs
cumulables).
Quand y’a-t-il abus dans la fixation du prix ? C’est le cas lorsque le fournisseur
exercera sa faculté de fixer unilatéralement le prix de manière déraisonnable. C'est-à-
dire lorsqu’il profitera de sa position de force et qu’il en retirera un profit illégitime au
détriment du distributeur.
b) Les règles relatives à l’extinction du contrat-cadre
Un contrat-cadre de distribution est un contrat à exécutions successives à durée
déterminée ou non. En appliquant le droit commun des contrats, si le contrat est à durée
déterminée, le contrat-cadre qui arrive à son terme s’éteint, alors le fournisseur est
parfaitement libre de ne pas renouveler le contrat. Si le contrat-cadre est à durée
indéterminée, on devrait considérer que chacune des parties disposeraient de résiliation
unilatérale du contrat, sans avoir d’ailleurs de motif à faire valoir. Mais cette application
serait beaucoup trop sévère à l’égard du distributeur pour deux raisons. Tout d’abord en
raison des investissements demandés au distributeurs mais aussi, pour des raisons
juridiques, en raison de la clause de non-concurrence, le distributeur ne pouvant pas, à
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la résiliation du contrat, s’engager auprès d’un autre fournisseur. Pour cette double
raison, on ne peut appliquer le droit commun des contrats aux contrats-cadre à durée
indéterminée. La jurisprudence sanctionne donc les abus commis par le fournisseur dans
l’exercice de son droit de en pas renouveler son contrat-cadre s’il est à durée
déterminée, ou bien dans son droit de résilier son contrat s’il est à durée indéterminée.
L’abus de ce droit ne nécessite d’ailleurs pas de la part du fournisseur l’intention de
nuire au distributeur (3 juin 1997 D98 Somm. P113). L’abus est caractérisé quand le
fournisseur a laissé croire qu’il allait poursuivre le contrat en exigeant de nouveaux
investissements. Quand le fournisseur les demande, le distributeur est en droit de croire
que le contrat-cadre est susceptible de durer.
2) Les différentes sortes de contrats-cadre de distribution
Il existe trois types de contrat-cadre. Tous organisent et préparent des ventes
successives à venir, mais ils ont des particularités propres.
a) Le contrat de concession exclusive
C’est un contrat par lequel un fournisseur, le concédant, confère à son cocontractant,
le concessionnaire, le droit de vendre, dans un secteur géographique déterminé et en
exclusivité, les produits de sa marque.
Dans la pratique ce contrat est très utilisé pour la distribution automobile. Ce qui
caractérise ce contrat, c’est qu’il comporte une double exclusivité réciproque. Le
concédant s’engage à ne vendre ses produits qu’au concessionnaire cocontractant
(
exclusivité de fourniture) et ce dernier s’engage à ne s’approvisionner qu’auprès du
concédant
contrat
d’approvisionnement pourrait ne pas être prévu en pratique.
d’approvisionnement).
cocontractant
(exclusivité
Le
Ce contrat met à la charge de chacune des parties toute une série d’obligations de
faire l’un vis-à-vis de l’autre.
Obligations à la charge du concédant (fournisseur) :
-Il devra s’engager à fournir les produits de sa marque selon les modalités prévues
dans le contrat-cadre.
-Il devra aussi respecter
l’obligation d’exclusivité de fourniture. Ainsi il ne pourra pas
vendre directement sa production au consommateur d’une part, et il ne pourra d’autre
part pas confier la distribution à un autre concessionnaire.
-Il devra assister le concessionnaire sur plusieurs plans. Sur le plan commercial, il
doit l’aider dans la gestion. Sur le plan technique aussi, il devra fournir des conseils ou
du matériel. Sur le plan financier enfin, il devra être possible que le concédant accorde
des prêts au concessionnaire.
Obligations à la charge du concessionnaire :
-Il devra acheter les produits du concédant en respectant une clause de quota.
-Il doit respecter la politique commerciale du concédant.
-Il a l’obligation de respecter
la zone géographique qui lui est attribuée.
b) Le contrat de franchisage
(On parle aussi de contrat de franchise). Le franchiseur met à la disposition du
franchisé ses concepts commerciaux et éléments de notoriété (marques, savoir-faire…)
afin de lui permettre de répéter son succès. Ce contrat apparaît en France dans les
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années 70, et s’est considérablement développé, dans tous les secteurs de la vie
commerciale.
Il y a trois éléments constitutifs du contrat de franchisage :
La communication d’un savoir-faire : le franchiseur doit mettre à la disposition du
franchisé ses
l’élément
techniques, ces recettes, méthodes, marques… C’est
fondamental du contrat de franchisage. Les franchisés doivent respecter les normes
fixées par le franchiseur, aussi tous les magasins franchisés auront tous la même
apparence.
L’assistance continue : elle est due avant l’ouverture du magasin franchisé (le
franchiseur doit réaliser une étude d’emplacement du magasin), et après l’ouverture (le
franchiseur dot fournir une assistance technique et commerciale : formation, gestion,
publicité…)
La mise à disposition des éléments de ralliement de la clientèle : la ou les
marques (conclusion d’un contrat de licence de marque), l’enseigne, le nom
commercial…
L’exclusivité n’est pas mentionnée dans les éléments constitutifs, car elle n’en est
pas un, mais dans au moins les trois quarts des contrats de franchisage, on trouve une
clause d’exclusivité d’approvisionnement. Il est aussi possible de stipuler une clause
d’exclusivité de fourniture.
En pratique, le franchisé verse un droit d’accès au réseau, puis une redevance
régulière.
c) Le contrat de distribution sélective
Ces contrats sont rencontrés dans le domaine des produits de luxe, et dans le
domaine des produits de haute technicité. L’objectif du fabricant est de défendre et
protéger l’image de marque haut de gamme de ses produits. Les revendeurs sont
soigneusement sélectionnés.
« Contrat par lequel un fournisseur s’engage à approvisionner dans un secteur
déterminé un ou plusieurs commerçants qu’il choisit en fonction de critères objectifs, de
caractères qualitatifs, sans discrimination, et sans limitation quantitative injustifiée, et
par lequel le distributeur est autorisé à vendre d’autres produits concurrents » (Chambre
Criminelle , 3 novembre 1982, Bull).
Une sélection qualitative des distributeurs selon des critères objectifs et non
discriminatoires :
Il y a trois grands critères :
-L’agencement du magasin : ce critère compte beaucoup pour la distribution des
produits de luxe. Le magasin devra être aménagé selon les normes définies par le
distributeur, par exemple être situé dans un quartier chic et commerçant.
-L’assortiment en permanence de la gamme complète des produits à distribuer : le
distributeur doit toujours avoir en stock dans son magasin la gamme complète des
produits fabriqués par le fournisseur (la clientèle est exigeante).
-Le respect de certaines conditions relatives à la formation du personnel. Ce critère vaut
surtout lorsque les produits distribués sont de haute technicité.
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L’absence d’exclusivité :
Il n’y aura pas de clause d’exclusivité.
Bilan sur les contrats préparatoires à la vente :
(il faut laisser de coté dans ce bilan le contrat préliminaire à la vente d’immeuble à
construire, et les contrats cadres).
S’agissant du pacte de préférence, la question centrale est celle de la sanction de sa
violation.
S’agissant de la promesse unilatérale de vente :
-Problème de la rétractation du promettant
-Distinction formalisme fiscal / publicité foncière facultative
-Difficulté de l’indemnité d’immobilisation
S’agissant de la promesse synallagmatique de vente : Problème des deux catégories :
promesse valant vente / ne valant pas vente.
Sous-section II : Les conditions de forme
Le principe est celui du consensualisme, mais il y a des exceptions.
§1 Le principe du consensualisme
L’accord de volonté des parties suffit à former le contrat. Aucune forme
supplémentaire n’est requise. Ce principe est dérivé du dogme de l’autonomie de la
volonté. Appliqué à la vente, c’est l’article 1583 du Code civil : « La vente est parfaite
dès qu’on est convenu de la chose et du prix. »
Article 11 de la convention de Vienne (sur les ventes internationales de
marchandises entre professionnels) : « Le contrat de vente n’a pas à être conclu ni
constaté par écrit et n’est soumis à aucune autre condition de forme »
§2 : Les exceptions au principe du consensualisme
A- Les vraies exceptions au principe du consensualisme
Elles vont résulter de dispositions légales qui imposent des formalités pour la
validité même de la vente. On parle alors de « formalités ad validitatem ». Le
fondement du formalisme est toujours de protéger l’une des parties.
Tantôt la vente doit se faire selon le procédé des enchères publiques, tantôt la
formalité requise pour la validité de la vente est la rédaction d’un écrit.
1) La vente doit se faire selon le procédé des enchères publiques
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Quels sont les cas dans lesquels on doit recourir au procédé des enchères
publiques ?
- l’immeuble appartient à un mineur (art. 1291 et s. du NCPC)
- la vente d’un immeuble indivis lorsque la division est trop compliquée (art. 827 du
Code civil)
- la vente de biens ayants fait l’objet d’une saisie (art. 673 et s. du CPC)
2) L’exigence d’un écrit
Il faudra qu’un écrit soit établi pour que la vente soit valablement formée. On dit
alors que la vente est solennelle. Sans écrit la vente est nulle de plein droit (le juge ne
disposera d’aucun pouvoir d’appréciation de la nullité, il ne pourra que la déclarer).
Dans quels cas ?
-Les ventes d’immeuble à construire et les ventes de logement HLM, dans le but de
protéger les acheteurs.
-La vente à domicile : l’écrit est imposé, il doit comporter certaines mentions (art. L
121-23 du Code de la consommation)
-La vente de navires (Loi du 13 juillet 1967)
-La vente de brevets d’invention (art. L 613 – 8 du Code de la propriété
intellectuelle) ou de marque (art. L 114-1du même code)
B) Les fausses exceptions au principe du consensualisme
L’écrit est souvent nécessaire en matière probatoire, et l’acte notarié est requis pour
publier la vente. Ces formalités sont requises non pour la validité de la vente, mais pour
son opposabilité. Il n’y a exception au principe du consensualisme que lorsque la
dérogation à la formalité requise entraîne la nullité de la vente.
Section 2 : La chose
La vente porte sur une chose. Cela ne semble pas original, et pourtant… La vente
peut porter sur des choses mobilières ou immobilières, corporelles ou incorporelles…
On trouve des textes récents dans lequel le législateur parle de vente en matière de
prestation de services, ce qui semble porter atteinte à la qualification réelle de la vente :
-Loi du 13 juillet 1992, relative à la vente de voyages : le problème est qu’un
voyage n’est pas une chose, mais une prestation de service.
-Loi du 29 janvier 1993, concernant les agences de publicité : vente de
« prestations publicitaires ».
-Loi du 11 décembre 2001, qui parle de prestation de services bancaires.
On ne peut admettre l’idée de vente de service, sinon la vente devient le seul contrat
existant, absorbant tous les autres contrats spéciaux. La doctrine condamne ici le
législateur. La vente ne peut porter que sur une chose, et non sur un travail ou sur un
service.
Nb :Lorsque
il est d’usage de parler de
« cession » (cession de marque, de brevet d’invention). Si la cession a lieu à titre onéreux, c’est une
vente, mais on parle quand même de cession.
la vente porte sur un meuble
incorporel,
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Pour que la vente puisse être valablement formée, il faut en premier lieu que la
chose existe (§1) ; en second lieu elle doit présenter un certain nombre de qualités (§2).
§1 : L’exigence de l’existence de la chose
Le premier problème est celui de la perte de la chose vendue juste avant, ou
concomitamment à la vente (A). Le second problème est celui de la vente de la chose
future (B).
A- La perte de la chose vendue antérieurement ou concomitamment à
la vente
Par perte, il faut entendre destruction, disparition. Cette hypothèse est envisagée à
l’article 701 du Code civil. Il faut supposer que cette perte se fait à l’insu des parties.
Qu’advient il de la vente ?
L’article 701 distingue selon que la perte de la chose est totale ou partielle.
En cas de perte totale de la chose, la vente est nulle de plein droit. L’objet de
l’obligation du vendeur n’existe plus, et l’obligation de payer le prix n’a plus de sens.
En cas de perte partielle, l’acheteur dispose d’une option : il peut opter en faveur de
la nullité de la vente, ou bien en faveur de la réfaction de la vente (la vente est
maintenue, mais les conditions du contrats vont être modifiées par le juge, au niveau du
prix par exemple).
B) La vente d’une chose future
C’est une chose qui n’existe pas encore, mais dont l’existence ultérieure est
envisagée par les parties. Ce peut être la vente d’un immeuble à construire, ou bien
d’une chose à fabriquer. Ce type de vente est possible selon l’article 1130 alinéa 1 du
Code civil : « Les choses futures peuvent être l’objet d’une obligation ».
Il peut s’agir d’un contrat aléatoire ou commutatif. Si les parties conviennent que le
prix devra être payé en tout état de cause par l’acheteur (que la chose existe
effectivement ou non), c’est un contrat aléatoire. S’il est convenu que si la chose vient à
ne pas exister le prix ne sera pas dû, il s’agit d’un contrat commutatif.
§2 : Les qualités exigées de la chose
Il faut que la chose vendue soit aliénable (A), qu’elle appartienne au vendeur (B), et
qu’elle soit déterminée ou déterminable au moment de la vente (C).
A) Une chose aliénable
L’aliénabilité de la chose est la règle de l’article 1598 du Code civil : « Tout ce qui
est dans le commerce peut être vendu, lorsque des lois particulières n’en ont pas prohibé
l’aliénation ». L’article 30 du traité de Rome prévoit le principe de libre circulation des
biens.
L’inaliénabilité est donc l’exception, elle peut avoir une source légale ou
conventionnelle.
1) L’inaliénabilité légale : les choses hors marché
31

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Article 1128 du Code civil : « Il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui
peuvent être l’objet des conventions ». Quelles sont ces choses hors du marché?
Hors du commerce (juridique) signifie qui ne peut pas faire l’objet d’un contrat, fut-
il à titre gratuit.
Hors du marché signifie qui ne peut pas faire l’objet d’un contrat à titre onéreux
(« marché » implique une valeur du bien, une valeur marchande) .
Ex : le corps humain, les droits de la personne, les tombeaux et sépultures, les
souvenirs de famille, l’absinthe, les stupéfiants, les produits contenants de l’amiante, les
animaux atteints de maladie contagieuse, les marchandises contrefaites (ch. Com. 24
sept. 2003, bull. part. 2, n° 147).
Cas particulier des clientèles civiles (les clientèles des professions libérales) : la
position de la jurisprudence a été dans un premier temps de considérer que la cession
des clientèles était nulle car elles étaient hors du marché, car intimement attachées à la
personne du praticien, à la différence des clientèles commerciales. Le problème est
qu’un médecin qui part en retraite, et qui a une grosse clientèle est à la tête d’une valeur
patrimoniale importante. La jurisprudence a mis sur pied un stratagème : le médecin
conclut un contrat avec son successeur, en vertu duquel celui qui part contracte une
double obligation de faire moyennant une somme d’argent. Première obligation :
présenter le successeur à la clientèle. Deuxième obligation : ne pas s’installer à
proximité. Aujourd’hui la Cour de cassation (civ. 1, 7 nov. 2000, JCP 2001, part. 2, n°
10452) reconnaît la possibilité de vendre un « fonds libéral », autrement dit une
clientèle civile.
La catégorie des choses hors du marché est donc assez fluctuante.
2) L’inaliénabilité conventionnelle
Le Code civil pose des conditions, pour parer aux vieux « biens de main morte »,
devenus totalement inaliénables. Pour être valable, la clause d’inaliénabilité doit être
temporaire, et justifiée par un intérêt sérieux et légitime. Souvent, cet intérêt est la
prodigalité de l’intéressé. La clause peut cependant être neutralisée si l’intérêt sérieux et
légitime n’existe plus, ou si on arrive à son terme.
B) Une chose appartenant au vendeur
On ne peut pas transférer à autrui
plus de droits qu’on en a soi-même.
« Nemo plus juris ad alium tranfere
potest quam ipse habet
».
Dans la vente, il s’agit de transférer à l’acheteur le droit de propriété sur une chose.
Le vendeur ne peut transférer la propriété que s’il est effectivement propriétaire. Si ce
n’est pas le cas, il y a alors vente de la chose d’autrui . Or selon le code civil (art. 1599),
« La vente de la chose d’autrui est nulle ».
1) La vente de la chose d’autrui sanctionnée par l’article 1599 CCiv
Les ventes de la chose d’autrui sont celles consenties par un vendeur non-
propriétaire, et qui opèrent un transfert immédiat de la propriété du vendeur à
l’acheteur. Ce sont les deux critères de la vente de la chose d’autrui.
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a) Le défaut de propriété du vendeur
Le cas n’est pas rare.
C’est par exemple celui du vendeur de mauvaise foi qui réalise une
escroquerie,
sachant bien qu’il vend une chose ne lui appartenant pas. Mais il existe beaucoup
d’autres cas.
Le vendeur est de bonne foi, il ignore qu’il n’est pas le propriétaire de la chose. Par
exemple, un testament indique que son auteur lègue telle ou telle chose à un légataire.
Le légataire vend les biens dont il a hérité. Peu de temps après, on découvre un
testament postérieur au premier, qui institue une autre personne comme légataire. Le
vendeur a en réalité vendu un bien qui ne lui a jamais appartenu, mais en étant de toute
bonne foi.
Un chose est la propriété indivise de plusieurs personnes. Chaque indivisaire à une
« quote-part » dans la propriété du bien, chacun peut vendre seul sa quote-part. Mais
pour vendre le bien dans son intégralité, il faut l’accord de tous les indivisaires (art. 815
et s. du Code civil). Si un des indivisaires vend le bien dans son entier, il a transféré la
propriété des quotes-parts des autres indivisaires. Il a donc vendu une chose dont il n’est
pas propriétaire.
Le vendeur commerçant, pour satisfaire ses clients, va leur vendre un bien qu’il n’a
pas en stock.
b) Le transfert de propriété immédiat.
Le principe en droit français est celui du transfert de propriété solo consensu, c’est à
dire par le seul échange des consentements. Lorsque les parties à une vente sont
d’accord sur la chose et le prix, le droit considère que le transfert de propriété est
effectif, l’acheteur est devenu propriétaire.
Lorsque la vente de la chose d’autrui opère immédiatement le transfert de la
propriété (et c’est le principe), elle tombe sous le coup de l’article 1599 CCiv, et encourt
la nullité.
Si au contraire la vente entend différer le transfert de propriété, elle n’encourt pas la
nullité au sens de l’article 1599 CCiv.
Pour les ventes de meubles, et lorsqu’il s’agit de choses de genre (ce sont les choses
qui se définissent par rapport à leur genre : du bois, du blé, etc, choses à opposer aux
choses à corps certain), le transfert de propriété n’est pas immédiat. Ce qui opère le
transfert de propriété des choses de genre, c’est l’individualisation des marchandises. Si
au moment de la conclusion de la vente de la chose de genre le vendeur n’est pas
propriétaire, elle n’encourt pas la nullité avant l’individualisation de la chose, et si le
vendeur n’est toujours pas propriétaire.
Pour les immeubles, il faut parler de la promesse synallagmatique de vente valant
vente : tous les effets sont suspendus jusqu’à un terme suspensif et/ou une condition
suspensive. Dans un premier temps, cette promesse synallagmatique de vente valant
vente conclue par un vendeur non propriétaire n’est pas nulle, elle le deviendra à la
réalisation du terme suspensif et/ou de la condition suspensive, au moment du transfert
de propriété (nullité de l’article 1599 CCiv).
2) Le sort de la vente de la chose d’autrui
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Elle est nulle, conformément à l’article 1599 Cciv du Code civil. Mais de nombreux
procédés permettent à la vente de la chose d’autrui d’échapper à cette nullité.
a) La nullité
Le Code civil ne dit pas grand chose. « La vente de la chose d’autrui est nulle ». En
employant le présent, le Code désigne un état, la nullité est de plein droit, le juge devra
la prononcer.
La nullité est-elle absolue ou relative ? Quel est le fondement de la nullité de la
vente de la chose d’autrui ?
Le code ne le précisant pas, c’est la jurisprudence qui a
répondu à la question en disant que la nullité de la chose d’autrui est une nullité relative
(Civ 23 janvier 1832).
Mais qui est la personne protégée par l’article 1599 (et qui donc peut agir) ?
La vente de la chose d’autrui met en scène trois protagonistes : le vendeur (a non
domino
), l’acheteur et le véritable propriétaire (verus domina). Encore une fois c’est la
jurisprudence qui a répondu à la question.
On devrait protéger le véritable propriétaire selon une première hypothèse. Ce
n’est pas lui que le code protège, car le véritable propriétaire n’a pas besoin de l’art.
1599 pour voir ses intérêts protégés. Lorsque le vrai propriétaire veut récupérer sa chose
indûment détenue par un tiers, il doit faire une
action en revendication, action réservée
au véritable propriétaire.
Venons-en au vendeur. Ca ne peut pas être lui que l’art. 1599 CCiv protège, et ce
pour une raison technique. Le vendeur est débiteur d’une obligation de délivrer la chose,
de garantie contre les vices cachés, ainsi que d’une garantie contre l’éviction. C’est-à-
dire que le vendeur est tenu de ne faire rien qui soit de nature à perturber le droit de
propriété transmis à l’acheteur. Il doit s’abstenir de tout comportement d’où pourrait
résulter pour l’acheteur d’une totale ou partielle éviction. On exprime cette idée par
l’adage «
qui doit garantie ne peut évincer ».
Ainsi la personne protégée est l’acheteur car lui seul peut introduire une action en
nullité relative fondée sur 1599 CCiv. Ainsi seul l’acheteur peut introduire contre le
vendeur cette action. Voir Civ. 3 9 mars 2005 (Def. 05 p1240)
Quels sont les fondements de cette nullité ?
(Exposé) C’est d’abord sur le fondement du vice de consentement, car le
consentement a été vicié dès lors qu’il a passé un contrat de vente avec un non-
propriétaire. Ici on exploite l’erreur sur la substance (1110 CCiv.). L’acheteur a traité
avec un vendeur non propriétaire, il a donc cru avoir affaire à un véritable propriétaire.
Mais toute erreur n’entraîne pas la nullité, seules les erreurs sur la substance ou sur la
personne du cocontractant en matière de contrat
intuitu personnae sont acceptées. Pour
l’acheteur l’une des qualités essentielles de la chose était son appartenance au vendeur.
Or ce n’est pas le cas, et il y a donc erreur sur la substance. On expliquerait ainsi que la
nullité soit relative et qu’elle ne protège donc que l’acheteur.
(Appréciation) Cette argumentation ne tient pas en raison du texte même de l’art.
1599 Cciv., lequel dispose que « La vente de la chose d’autrui est nulle ; elle peut
donner lieu à des dommages et intérêts lorsque l’acheteur a ignoré que la chose vendue
fut à autrui. » La bonne foi de l’acheteur est prise en compte uniquement pour l’octroi
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de dommages-intérêts. Il ressort de la lettre même du texte que même si l’acheteur est
de mauvaise foi, la vente est nulle, peu importe qu’il y ait erreur.
(Exposé) On a également envisagé l’absence de cause. La cause objective de la
vente est la contrepartie, c'est-à-dire le transfert de propriété de la chose. Or le transfert
ne peut s’opérer quand le vendeur n’est pas lui-même propriétaire. Le vendeur ne peut
transférer un droit qu’il n’a pas. Ainsi il y a absence de cause à l’obligation de payer le
prix. La sanction de cette absence est la nullité.
(Appréciation) On objecte tout d’abord que traditionnellement, l’absence de cause
est sanctionnée par une nullité absolue. Mais tout d’abord, s’il est vrai que la
jurisprudence dit que c’est une nullité absolue, il ne faut pas donner raison au juge. Il
faut non seulement que la cause existe, mais il ne faut pas qu’elle soit illicite ou
immorale selon le Code. La nullité pour absence de cause protège l’intérêt de l’un des
contractants, celui qui s’engage sans contrepartie, ainsi cette nullité devrait être relative
et non pas absolue.
On réfute d’autre part cette théorie car on est en droit de se demander si la
jurisprudence n’est pas en train d’évoluer quant à la nature de la nullité encourue pour
absence de cause. N’est-elle pas en passe de reconnaître une nullité relative. Dans un
contrat aléatoire, la cause objective est l’aléas. On annulera le contrat si l’aléas fait
défaut. Or la Cour de cassation dans un arrêt du 9 novembre 99 (B.I #293) annule le
contrat pour absence de cause en affirmant que la nullité est relative.
La cause est exigée au jour de la formation du contrat. Ou bien elle existe et le
contrat est valable, ou bien elle n’existe pas et le contrat est nul. En matière de vente de
la chose d’autrui il est acquis en jurisprudence que si le vendeur qui, au moment de la
vente n’est pas propriétaire de la chose, acquiert par la suite la propriété de celle-ci,
avant que l’acheteur n’ait introduit une quelconque action en nullité, alors la vente ne
peut être annulée. S’il n’est pas possible pour l’acheteur d’agir en nullité, cette solution
ne s’accorde pas avec le fondement de l’absence de cause puisque cette absence est
regardée au moment de la formation de la vente.
(Exposé) La doctrine soutient majoritairement le fondement de la garantie
anticipée d’éviction
. La nullité de la vente de la chose d’autrui constitue une
anticipation sur la garantie d’éviction. Lorsqu’une vente est valablement formée, l’une
des obligations du vendeur est de garantir l’acheteur contre l’éviction (1630). Le droit
de propriété transmit ne doit pas être troublé, l’acheteur ne doit pas être évincé de la
propriété de la chose. Quand il y a vente de la chose d’autrui, il y a une menace
d’éviction qui plane sur l’acheteur.
Si l’art. 1599 n’existait pas, quelle serait la situation
de l’acheteur ? Alors la vente de la chose d’autrui serait valable entre les parties et il y
aurait cette obligation de garantie contre l’éviction. Mais pour que l’acheteur puisse agir
sur le fondement de la garantie d’éviction contre son vendeur, il faut qu’il soit menacé
concrètement d’éviction. Ce n’est que lorsque l’acheteur fait l’objet d’une menace
concrétisée qu’il peut agir en garantie d’éviction. Quand est-ce que cette menace se
concrétise ?
C’est quand le vrai propriétaire aura assigné l’acheteur en revendication.
L’inconvénient c’est qu’entre le moment de la vente et de la menace, un certain temps
va s’écouler. Le vendeur aura alors pu devenir insolvable. Si l’acheteur doit attendre
que la menace se concrétise, l’action ne servira plus à rien si le vendeur est devenu
insolvable. En effet la garantie d’éviction permet d’avoir le remboursement du prix au
profit de l’acheteur évincé. D’où l’intérêt de l’art. 1599 qui permet à l’acheteur
d’anticiper sur la garantie d’éviction. Et plutôt que d’attendre que la menace se
concrétise, on va permettre à l’acheteur d’anticiper en lui permettant de sortir d’un
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contrat dont il n’a rien à attendre car tôt ou tard le véritable propriétaire se manifestera.
Il demandera donc la nullité de la vente. Cette anticipation permet de raccourcir le laps
de temps entre la vente et la nullité.
« La nullité de 1599 serait l’avant-poste de la garantie d’éviction. »
(Appréciation) L’avantage de cette théorie est qu’elle permet de bien comprendre la
règle selon laquelle la vente de la chose d’autrui ne tombe sous le coup de 1599 (et est
frappée de nullité) que si elle opère transfert immédiat de la propriété. Ce n’est qu’au
moment où elle est supposée transférer la propriété que la menace d’éviction existe et
que la vente est susceptible d’être annulée.
On fonde la nullité de l’art.1599 sur l’idée d’anticipation sur la garantie d’éviction,
et dans le cadre de la garantie d’éviction, lorsque l’acheteur est totalement évincé,
l’action en garantie d’éviction aboutit à la résolution du contrat de vente.
b) les procédés permettant de soustraire la vente de la chose d’autrui à la
nullité
On peut classer ces procédés en deux grandes catégories :
-Ceux permettant de valider dès l’origine la vente de la chose d’autrui : ils vont
permettre de faire échapper dès sa conclusion, la vente. Le texte ne sera donc jamais
applicable. Ils assurent la validité initiale de la vente de la chose d’autrui.
-Ceux ne permettant que de valider ultérieurement la vente de la chose d'autrui. Le texte
a vocation à s’appliquer jusqu’à ce que survienne un événement.
1. Procédés assurant la validité initiale de la vente de la chose d'autrui
La vente de la chose d'autrui ne pourra en aucun cas être annulée sur le fondement
de 1599.
-La gestion d’affaire : (une personne, le gérant, s’immisce spontanément dans les
affaires d’autrui pour rendre service, d’une manière altruiste. Lorsque les actes, ainsi
accomplis par le gérant de l’affaire, sont utiles au gérés, ces actes s’imposent à ce
dernier)
On peut imaginer que celui qui vend la chose d’autrui le fait en qualité de gérant de
l’affaire. Il lui semble alors dans l’intérêt du géré d’effectuer ces actes. Si la vente de la
chose d'autrui faite par le gérant s’avère utile aux intérêts du véritable propriétaire, elle
s’impose au propriétaire, lequel ne peut la remettre en cause. La gestion d’affaire est
donc un moyen de neutraliser l’art. 1599.
-L’art. 2279 Cciv : « En fait de meubles (corporels), possession (de bonne foi) vaut
titre. » Si l’acheteur est en possession du meuble et qu’il est de bonne foi, alors la
possession vaut titre de propriété. Il empêche l’application de l’art. 1599 puisqu’il n’y a
pas de menace d’éviction.
-L’art. 222 Cciv : « Si l’un des époux se présente seul pour faire un acte
d’administration de jouissance ou de disposition dur un bien meuble qu’il détient
individuellement, il est réputé à l’égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de faire
seul cet acte. » (valable aussi en matière de meubles incorporels)
-La théorie de l’apparence :
(Ne concerne que les ventes d’immeubles) Quand le vendeur d’un immeuble n’en est
pas le véritable propriétaire mais qu’il en a seulement l’apparence, alors à certaines
conditions, cette apparence va pouvoir produire les mêmes effets que la réalité. Il faut
pour cela deux critères. Il faut tout d’abord la bonne foi de l’acheteur ainsi que l’erreur
commune (erreur que n’importe qui à la place de l’acheteur aurait commise).
Lorsque quelqu’un reçoit par testament un immeuble, il vend ce bien. En trouvant par la
suite un acte plus récent que le testament en question, celui-ci annule la propriété du
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vendeur, qui était en apparence propriétaire. Les parties étaient de bonne foi et l’erreur
était bien commune. La vente ne peut pas être attaquée.
Dans ces quatre hypothèses, il y a à chaque fois un intérêt supérieur qui prévaut. L’art.
1599 CCiv. a pour seule fonction de protéger un intérêt individuel. Or quand les
conditions sont réunies pour appliquer l’une de ces théories, on a à chaque fois une
raison plus forte que la protection de cet intérêt individuel. Pour la gestion d’affaire, on
veut encourager l’altruisme. Pour le reste, on veut assurer la sécurité des actions
juridiques.
2. Les procédés assurant la validité a posteriori de la vente de la chose
d’autrui
On peut en distinguer deux variétés. Certains procédés vont rendre la vente valable en
empêchant l’acheteur d’en demander la nullité. Cela ne signifie pas que cette vente
produira ses effets. D’autre part d’autres procédés vont permettre de rendre la vente de
la chose d’autrui valable et efficace.
Les procédés rendant la vente valable :
-La confirmation par l’acheteur :
L’art. 1599 CCiv indique que la vente est nulle, cette nullité étant relative, ce qui laisse
la possibilité d’une confirmation, c'est-à-dire renoncer à agir en nullité. Si l’acheteur
renonce à cette nullité, personne d’autre ne pourra la demander, donc la vente est
valable. Pour autant cela ne signifie pas qu’elle produira ces effets car rien n’empêche le
propriétaire d’agir en revendication en garantie d’éviction contre son vendeur.
-La prescription extinctive de l’action en nullité.
L’art. 1599 CCiv instaure une nullité possible pendant 5 ans. Si ce délai s’écoule,
l’acheteur ne peut plus acheter en nullité, l’action est prescrite :la vente ne pouvant plus
être annulée, elle devient valable.
Les procédés rendant la vente valable et efficace :
-La ratification émanant du véritable propriétaire :
La ratification est la renonciation à agir en revendication. La confirmation émane de
l’acheteur qui renonce à agir en nullité alors que la ratification concerne le véritable
propriétaire et l’empêche d’agir en revendication. Dès lors qu’il ratifie, il ne peut plus
demander la nullité.
-L’acquisition par le vendeur de la chose avant que l’acheteur n’agisse en
nullité.
-La prescription acquisitive (usucapion) : quand la possession dure 30
ans, on devient le propriétaire du bien possédé. Si l’acheteur a possédé
l’immeuble pendant ce temps, alors il devient propriétaire et l’on ne peut dès
lors plus demander la nullité.
Le nombre de procédés susceptibles de neutraliser l’art. 1599 CCiv sont nombreux.
La chose doit appartenir au vendeur, mais il faut enfin, et c’est la troisième qualité, que
la chose vendue soit déterminée ou déterminable.
C- Une chose déterminée ou déterminable
Chose déterminée : le contrat de vente désigne précisément la chose vendue.
Chose déterminable : la contrat de vente se contente d’indiquer les modalités objectives
qui permettront la détermination ultérieure de la chose vendue.
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On distingue les choses certaines des choses de genre quant à la détermination. Quand
le corps est certain, le corps doit être déterminé, c'est-à-dire individuellement désigné
dans le contrat (exemple de la vente portant sur tel cheval de course), ou déterminable,
dans quel cas le contrat précise les modalités de désignation postérieure de la chose de
la vente (les trois chevaux qui obtiendront les meilleurs résultats lors de la prochaine
course).
Lorsque la chose vendue est une chose de genre, qui se pèse, se mesure, se compte. On
se réfère à 1129, il faut que la chose de genre vendue soit au moment de la conclusion
de la vente soit déterminée ou déterminable dans son espèce et dans sa quotité. L’espèce
renvoie au genre de la chose (pétrole, blé vin) alors que la quotité renvoie à la quantité
(poids et mesure). Il n’est pas nécessaire aux vues de cet article que la chose soit
déterminée ou déterminable dans sa qualité. Si les parties n’ont rien dit à ce propos, le
premier réflexe du juge sera de tenter d’interpréter la volonté des parties. Le juge pourra
considérer que la chose de genre de qualité moyenne s’il n’arrive pas à se faire une
opinion (art. 1246 CCiv).
Section 3 : Le prix
C’est une somme d’argent que l’acheteur devra remettre au vendre. Il a un caractère
monétaire et permet de distinguer la vente de l’échange par exemple.
La fixation de ce prix relève de la liberté contractuelle. C’est le principe en droit
français depuis une ordonnance du 1
er décembre 1986 reprise sous l’art. L 410-2 Code
de commerce lequel dispose que « sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les
prix des biens, produits et services, sont librement déterminées par le jeu de la
concurrence. »
Si la vente est conclue de gré à gré, c'est-à-dire après discussion, le prix résultera de
la négociation entre les deux parties. Si la vente est un contrat d’adhésion, le prix est
fixé par le vendeur et accepté par l’acheteur. Dans les deux cas, l’Etat n’est pas
intervenu dans la fixation du prix de vente. A l’égard du prix, le droit positif formule
plusieurs exigences constantes (dans toute vente quelle qu’elle soit) : détermination,
réalité et sérieux du prix. Il existe d’autres exigences, plus casuelles, comme la justesse
du prix, c'est-à-dire que le prix corresponde à la valeur du bien vendu.
§ 1 : Les exigences constantes
A- La détermination du prix
Au moment de la conclusion du contrat il faut que le prix soit déterminé (art. 1591)
ou déterminable (art.1592) sous peine de nullité de la vente. C’est une condition de
validité de la vente.
Les quatre arrêts du 1er décembre 1995 rendus en Assemblée plénière établissaient le
principe selon lequel le fait que le prix soit déterminé ou déterminable ne subordonne
pas la validité du contrat, sous réserve de disposition légale contraire. Or des
dispositions contraires, il y en a en matière de vente : 1591 et 1592 CCiv.
Si le prix déterminé ne pose pas de problème (pris fixé au jour de l’offre), la
déterminabilité crée en revanche des difficultés: le prix est déterminable lorsque le
contrat, à défaut de fixer d’emblée le prix, désigne des éléments précis et objectifs,
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permettant de fixer de manière ultérieure le prix en dehors de la volonté commune des
parties et de la volonté arbitraire de l’une d’entre elle.
Le prix n’est pas fixé dès le départ, mais l’on souhaite que sa fixation ultérieure se
fasse de manière objective.
Comment rendre le prix déterminable pour satisfaire cette
exigence ?

1ère modalité : la clause de prix à dire de tiers
Les parties se mettent d’accord pour désigner un tiers à qui elles confient le soin de
fixer le prix à leurs places. Cette modalité est particulièrement utile en pratique quand
les parties ignorent le prix de la chose vendue. C’est le cas pour ce qui est du marché
des œuvres d’art. Cette modalité satisfait à l’exigence de déterminabilité à condition que
le tiers soit neutre, impartial. Cette hypothèse est envisagée à l’art. 1592, reprenant un
terme inexact en disant que le prix « peut cependant être laissé à l’arbitrage d’un tiers. »
L’ennui vient du terme « arbitrage » qui est en droit un accord entre les parties pour
soustraire un litige aux tribunaux étatiques et le soumettre à un tiers arbitre.
Cette modalité de déterminabilité de prix peut susciter deux difficultés. Tout d’abord
le tiers désigné peut ne pas pouvoir ou ne pas vouloir fixer le prix. Dans cette
hypothèse, il n’y a point de vente et le juge ne peut pas se substituer au tiers défaillant.
C’est d’autre part lorsque le tiers fait une estimation inexacte de ce prix. On fait alors
une distinction selon le type d’erreur commise (distinction opérée par le juge). En cas
d’erreur grossière, alors l’estimation faite par le tiers ne s’impose pas aux parties,
lesquelles peuvent saisir le juge pour qu’il désigne un autre expert. (Voir Com. 4 février
2004 CCC 04 N°56). Si l’erreur n’est en revanche pas grossière, le prix fixé par le tiers
s’impose malgré tout aux parties. On peut malgré tout mettre en jeu la responsabilité
contractuelle du tiers. Le montant des dommages-intérets pourra correspondre avec la
différence de prix entre les deux estimations.
2ème modalité : la clause dite « prix de marché »
C’est une modalité rencontrée en pratique dans les cas où la vente prévoit que la
chose ne sera livrée qu’un certain temps après la conclusion de la vente. Ce prix sera
fixé en fonction du marché au moment de la livraison de la chose. On cherche s’il existe
un cour officiel ou officieux, déterminé par un organe indépendant (Bourse pour
l’immobilier, Mercurial pour les denrées alimentaires, Argus pour le marché de
l’automobile d’occasion). S’il n’existe pas de cours, la jurisprudence a tendance à
considérer que la clause ne rend pas le prix déterminable et que la vente n’est alors pas
valable. Cette clause n’est donc acceptée que s’il existe un cours. La position de la Cour
de cassation parait plus sévère que d’autres droits et notamment plus sévère que la
Convention de Vienne de 1980 sur les ventes internationales de marchandise, laquelle
prévoit en son art. 55 que « la vente est valablement conclue quoique les parties n’aient
pas au moment de la conclusion valablement déterminé le prix, » les parties se référant
alors implicitement au prix du marché.
Observations :
Si le prix est indéterminé, alors la vente est nulle, le juge ne pouvant se substituer
aux parties.
Ce qui caractérise le droit français, c’est justement la rigueur du juge.
B- Réalité et sérieux du prix
1) Un prix réel
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Le prix de vente est réel quand le prix stipulé correspond au prix qui doit être
effectivement payé par l’acheteur. Le prix réel s’oppose au prix simulé. Le prix simulé
est celui qui, bien qu’indiqué au contrat, ne sera pas celui effectivement payé.
Rappel sur la simulation : Il y a deux éléments : l’acte apparent et la contre-lettre.
Les rapports entre les parties sont régies par le contre lettre. Celles ci mentent aux tiers,
pour autant cette simulation ne doit pas leur nuire. L’art. 1321 CCiv donne le choix de
se prévaloir soit de l’acte apparent soit de l’acte secret selon leurs intérêts. S’il se
prévalent de l’acte secret, ils doivent faire une action en déclaration de simulation pour
prouver cette contre lettre.
Il existe différents types de simulations. La simulation par acte fictif détruit l’acte
apparent par l’acte secret. La simulation par interposition de personne fait croire en un
contrat entre A et B alors que l’acte secret l’établit entre A et C. La simulation par
déguisement enfin peut être partielle ou totale si l’on ment sur la nature même du
contrat.
a) la simulation par déguisement total
L’acte apparent prévoit une vente alors que l’acte ostensible prévoit une donation.
On procède ainsi pour contourner une incapacité à recevoir un bien à titre gratuit. Les
médecins par exemple ne peuvent recevoir de donations de leurs malade (art. 909
CCiv). On peut aussi poursuivre un but fiscal et chercher alors à profiter des droits de
mutation de la vente qui sont plus faibles que ceux prévus pour la donation.
b) la simulation par déguisement partiel
Dans cette hypothèse on ne ment que sur le contenu du contrat. Ce sera dans le cas
d’une vente par exemple sur son prix.
Le but étant la encore de payer moins de droit de mutation. La nullité de l’acte
secret, quand il porte sur la vente d’un immeuble, peut être demandée par tout intéressé,
y compris l’acheteur (art. 1840 CGI).
2) Un prix sérieux
Le prix sérieux ne veut pas dire qu’il doit être équivalent à la valeur de la chose
vendue. Un prix sérieux ne signifie donc pas un prix juste. En revanche le prix peut être
sérieux et lésionnaire (Civ.3 11 mars 2003 RJDA 2003 #709).
Le prix sérieux c’est le prix qui n’est pas vil, pas dérisoire. Le prix dérisoire est
tellement bas qu’il est assimilable à une absence de prix. La nullité pour vil prix est
d’ailleurs une nullité pour absence de cause.
1° Exemple : Civ.1 4 juillet 1995
Bague en or, sertie d’un rubis et de 56 diamants achetée pour 101 556 Francs. Or
Cartier avait commis une erreur dans l’affichage, le prix était en réalité de 400 000
Francs. Le joaillier a invoqué le prix non-sérieux pour récupérer la bague. Mais bien que
le prix de vente soir quatre fois inférieur à la valeur de la bague, le juge considère pour
autant que le prix est sérieux.
2° Exemple :
La vente d’un immeuble moyennant rentre viagère. Lorsque les arrérages de la rente
sont inférieurs aux revenus que peuvent rapporter l’immeuble vendu, alors la vente n’est
pas justifiée. Le prix n’est alors pas sérieux, il est dérisoire.
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3° Exemple :
La vente dont le prix serait d’1 euro symbolique pourrait paraître non sérieux, seulement
il faut apporter à cette considération deux nuances.
Il se peut que le prix d’un euro ne soit pas dérisoire, c’est à dire qu’il soit juste au
regard de la chose vendue. C’est par exemple le cas des entreprises au bord de la faillite.
Si la valeur de la chose est supérieure à un euro, le contrat peut échapper à la nullité
si l’on peut le requalifier autrement que contrat de vente. Soit l’acheteur s’engage alors
à une obligation de faire (voir Civ. 3 17 mars 1981 BIII #56 pour la vente d’un terrain
pour un euro où l’acheteur avait obligation en de construire un centre équestre sur le
terrain, le contrat prévoyant un transfert de propriété contre prestation, c’est un contrat
sui generis et non une vente) soit il apparaît que le vendeur a été animé d’une intention
libérale vis à vis de l’acheteur et la vente sera requalifiée en donation.
§2 Une exigence casuelle : la justesse du prix
c’est l’idée que le prix de vente corresponde à la valeur de la chose vendue. Le
principe en droit français est que la vente est valable peu importe la justesse du prix.
A- Le principe : la justesse du prix n’est pas une condition de validité
du contrat
C’est une des conséquences logiques de l’art. 1118 CCiv au terme duquel la lésion
n’est pas en principe prise en considération. L’exigence de la justesse de prix n’est pas
posée par le droit positif.
La stabilité juridique veut que l’on ne puisse pas remettre en cause les contrats déjà
conçus, il y va de l’intérêt général. Il existe donc un antagonisme entre l’utile et le juste.
B- Les tempéraments
1) Procédés tendant à sanctionner a posteriori les ventes comportant un
prix injuste
On vise les cas dans lesquels la lésion est sanctionnée.
a) Les ventes concernées
1. les ventes consenties par un incapable
Une vente consentie par un incapable pourra toujours être sanctionnée si elle est
lésionnaire. La loi ne fixe pas de taux de lésion, il est laissé à l’appréciation du juge.
2. les ventes consenties par une personne capable
La vente d’immeubles (1674 CCiv):
Seul le vendeur peut faire sanctionner la lésion. On veut ainsi protéger les fortunes
immobilières.
On peut demander la sanction de la lésion dans un délai de 2 ans si son taux est
supérieur ou égal à 7/12, c'est-à-dire que le prix reçu est inférieur aux 7/12 de la valeur
réelle du bien. (Ce taux de 7/12 trouve son origine dans l’ancien droit où l’on
sanctionnait la lésion pour plus de la moitié du prix, ce qui correspond au 7/12 actuels).
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Echappent à cette règles les ventes d’immeubles par aléas ainsi que celles qui ont lieu
par autorité de justice.
La vente de meubles :
-Lésion invocable par l’acheteur en matière de vente d’engrais et de semences
(loi du 8 juillet 1907) : il doit dire si le taux de lésion est d’au moins un quart. Le délai
est de 40 jours à compter de la livraison. Il s’agit ici de protéger les agriculteurs.
-Lésion invocable par le vendeur : la vente d’une oeuvre littéraire ou artistique,
lorsqu’elle intervient à un prix forfaitaire : S’il y a une lésion atteignant un taux de 7/12,
le vendeur peut agir (art. L 131-5 du Code de la propriété intellectuelle).
-La lésion de la vente d’office ministériel était encore retenue avant 2004 (Civ.1
7 décembre 2004, bull.I n°307).
b) La sanction de la lésion
En matière d’immeuble, seul le vendeur est protégé. Il peut introduire une action en
récision pour lésion. L’acheteur dispose alors d’une option : ou bien la vente est annulée
(avec restitutions mutuelles) ou bien il s’engage à payer une somme pour sauver la
vente, c'est-à-dire qu’il doit payer le supplément du juste prix, moins 1/10 du prix total.
Le but est d’inciter l’acheteur à sauver la vente, en lui faisant une petite « ristourne ».
2) Procédé tendant à assurer a priori un prix juste dans la vente
a) La réglementation des prix
L’autorité publique fixe elle-même le prix de vente ou bloque les prix à un niveau
donné ou encore encadre les prix. Ce procédé est depuis 1986 en régression, plus
précisément depuis l’ordonnance du 1
er décembre 1986 ss art. L410-2 Code du
commerce. Il intervient en matière de vente de livre (fixation d’un prix unique, Loi
Lang), de médicament remboursable, d’électricité, etc.
b) Le recours au juge en cas de droit de préemption
Quand une vente donne lieu à un droit de préemption, il est fréquent que la loi
permette à son titulaire une fixation judiciaire du prix (sauf pour le droit accordé au
locataire).
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Chapitre 2 : Les effets de la vente
Son premier effet est d’opérer le transfert de propriété ; c’est l’ « effet réel de la
vente. » Son second effet est la création d’obligation ; on dit que c’est « l’effet
obligationnel.
Section1 : L’effet réel
Le transfert de propriété a pour corollaire le transfert des risques.
§1 : Le transfert de la propriété
A- La réalisation du transfert de la propriété entre les parties
Attention, les thèses divergent, par exemple Daniel Langer est d’une opinion
opposée.
1) Le principe
Formulé par l’art. 1583 du Code civil : « La vente est parfaite et la propriété est
acquise de droit à l’acheteur dès que l’on est convenu de la chose et du prix. » C’est la
règle du transfert de propriété
solo consensu. Le transfert de propriété s’opère à l’instant
de l’échange de consentements donnant naissance au contrat. Cette règle est une
originalité du droit français.
Il y a deux analyses possibles dans ce principe :
Les ventes de meubles corporels :
L’opposabilité du transfert de propriété à l’égard des tiers résulte de la règle de la
bonne foi. C’est les art. 2279 et 2241 qui s’appliquent : à partir du moment où il détient
le bien en étant de bonne foi, alors cette possession est opposable aux tiers.
Ex : A vend à B et A revend le même meuble à C. Il y a donc rivalité entre les
acquéreur. Si C est entré en possession du meuble le premier en ignorant la première
vente, alors sa possession est opposable à B.
Les ventes des meubles incorporels :
Dans certaines ventes de meubles incorporels, l’opposabilité aux tiers du transfert de
propriété nécessite l’accomplissement d’une formalité.
Ainsi pour les ventes de brevets d’invention, de marque, ou de dessins et modèles, il
faut publier la vente sur un registre spécial tenu par l’INPI et c’est la réalisation de cette
publicité qui rend le transfert de propriété du brevet opposable aux tiers.
En ce qui concerne les cessions de créances, c’est l’accomplissement d’une
notification de la cession au débiteur cédé qui rend la cession opposable aux tiers. Cela
est prévu à l’art. 1690 CCiv. A a une créance contre B. A peut céder cette créance à C
(A cédant, C cessionnaire et B, cédé) Il faut que le cession de créance soit précisée à B.
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Dans un certains nombre de vente de meubles incorporels, l’opposabilité ne fait pas
l’objet d’une disposition spécifique. Alors l’opposabilité du transfert résulte du seul
contrat de vente. Ainsi en cas de conflits entre deux acquéreurs successifs du même
meuble corporel, il faudra donner gain de cause à celui qui acheter en premier. (Prior
tempore prior …) Ce système s’applique par exemple en cas de vente de fonds de
commerce ou de vente de droits d’auteur.
A l’effet translatif de propriété de la vente est attaché le transfert des risques.
§2 Le transfert de risques
Les risques dont il est ici question sont les risques de perte de la chose vendue, la
perte étant la destruction totale ou partielle de la chose, à la suite d’un événement fortuit
(extérieur, imprévisible et irrésistible). La question est de savoir qui doit supporter la
charge de cette disparition ? Faut-il faire supporter cette destruction au vendeur ou à
l’acheteur.
Si c’est l’acheteur qui la supporte, il doit alors payer le prix et le vendeur s’en tire
indemne.
Si c’est le vendeur qui la supporte, alors on considérera que l’acheteur est libéré de
son obligation de payer le prix.
Quand la chose vendue est fortuitement vendue, soit l’acheteur paie le prix soit il est
libéré de son obligation de payer.
A- Le principe
La charge du risque de perte de la chose vendue par force majeure est lié à la qualité
de propriétaire. C’est l’application de
res perit domino, la chose périt pour le
propriétaire. Ainsi quand on est confronté à ce problème, pour savoir qui doit supporter
le poids de l’événement, il faut rechercher qui était propriétaire de la chose au moment
de sa destruction.
Puisque la vente opère instantanément (règle du transfert solo consensu de l’acte), il
s’en suit que dès l’instant de la formation de la vente, la charge du risque de perte pèse
sur l’acheteur puisqu’il est devenu à cet instant la propriétaire. C’est alors que le
transfert de propriété opère transfert des risques.
B- Les limites
1) Les limites légales
On peut en citer principalement deux.
La première est prévue à l’art. 1138 al2 CCiv. Lorsque le vendeur ne délivre pas la
chose vendue, l’acheteur peut le mettre en demeure de le faire. Cette mise en demeure a
pour effet de retransférer au vendeur la charge des risques de perte.
La seconde concerne la vente internationale de marchandises, régie par la
Convention de Vienne (CDIM) du 11 avril 1981. Le transfert des risques est lié non pas
au transfert de la propriété mais la délivrance des marchandises. Ce la signifie que tant
que les marchandises vendues n’ont pas été délivrées à l’acheteur, la charge des risques
de perte de ces marchandises pèse sur le vendeur.
2) Les limites conventionnelles
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règle d’ordre publique.
Le principe selon lequel le transfert des risques est lié au transfert de la propriété
n’est pas une
Il est donc possible d’y déroger
conventionnellement. Il peut y etre dérogé dans deux sens opposés. Soit le contrat peut
stipuler que l’acheteur devenu immédiatement propriétaire de la chose vendue ne
supportera pas la charge du risque de perte, laquelle continuera d’incomber au vendeur
jusqu’à une date indiquée par le contrat. Soit le contrat peut prévoir que l’acheteur qui
n’est pas encore devenu propriétaire de la chose parce que le contrat contient une clause
de réserve de propriété, supportera tout de même la charge du risque de perte de la
chose (en pratique c’est l’acheteur qui utilise la chose alors que le prix n’est pas encore
complètement payé, le vendeur se réserve la propriété de la chose dont l’acheteur est
dès la vente entièrement responsable).
Le principe en droit français reste la connexion entre transfert de propriété et
transfert des risques.
Section 2 : L’effet obligationnel
Sous section 1 : Les obligations du vendeur
§1 Les obligations relatives à la chose vendue
A- Les obligations principales
Le droit de la vente a récemment perdu son unité en ce qui concerne les obligations
principales que la vente impose au vendeur. Il y a les règles du Code civil, et les autres...
D’après l’art. 1603 CCiv, « le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer
et celle de garantir la chose qu’il vend. » Ces deux obligations obéissent à deux régimes
juridiques distincts. Mais des règles spéciales récentes, régissant certaines ventes
particulières, fusionnent ces deux obligations en une seule, c’est l’obligation en garantie
de conformité. Il y a donc un système dualiste prévu par le Code contre un système
moniste prévu par des textes spéciaux.
1) Le dualisme du Code civil
C’est donc un principe affirmé à l’art. 1603 CCiv. Il s’applique potentiellement à
internationales de marchandises conclues entre
les ventes
toute vente sauf
professionnels.
Dès la conclusion du contrat de vente, le droit de propriété sur la chose est
automatiquement et instantanément transférer à l’acheteur. Il est en droit propriétaire de
la chose à l’instant même de la formation de la vente. Le Code civil met à la charge du
vendeur l’obligation de délivrer cette chose dont l’acheteur est propriétaire. Il n’y a que
s’il a la chose en possession que l’acheteur peut pleinement jouir de son droit de
propriété et retirer l’utilité de la chose vendue. Encore faut-il que cette chose soit en
mesure de procurer ces utilités attendues. Ce ne sera pas le cas si la chose est affectée
d’un vice caché, c’est-à-dire un défaut qui la rend inapte à son usage normal. C’est
l’obligation de garantie contre les vices cachés que prévoit le Code.
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a) L’obligation de délivrance
a.1 Le contenu de l’obligation de délivrance
L’obligation de délivrance consiste à mettre à disposition de l’acheteur une chose
conforme.
a.1.1. La mise à disposition (alpha)
a.1.1.1. Définition
Le texte de l’article 1604 CCiv entend donner la définition de cette notion. « La
délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de
l’acheteur. » Il y a un écart énorme entre la définition légale et celle retenue par le droit
positif. Cette définition est défectueuse pour une double raison : la référence à la notion
de puissance à coté de celle de possession. Soit c’est une redondance, soit la notion de
puissance renvoie à une autre chose. La puissance c’est abstrait, comme le droit de
propriété. Mais la définition est alors fausse, ce n’est pas l’exécution de l’obligation de
délivrance qui transfert le droit de propriété. On ne peut donc pas donner au mot
puissance un sens juridique distinct du mot possession. Ces deux mots sont donc
employés de manière redondante. La délivrance est donc le transport de la chose vendue
en la possession de l’acheteur.
Le second défaut est l’emploi du mot « transport ». Cela donne à penser que le
vendeur doit transporter la chose, c’est-à-dire la livrer à domicile. Bref la délivrance
serait la livraison, mais ça ne peut pas être cela. L4art 1657 CCiv s’y oppose : « dans les
ventes de meubles, l’acheteur a l’obligation de venir retirer la chose vendue auprès du
vendeur. » C’est donc à l’acheteur de venir chercher chez le vendeur la chose vendue.
On ne peut donc pas analyser l’obligation de délivrance comme une obligation de
livraison.
Ainsi cette obligation de livraison est une obligation de mettre la chose à la
disposition de l’acheteur pour que l’acheteur puisse venir la chercher.
a.1.1.2. L’objet de la mise à disposition
Le vendeur doit mettre à disposition de l’acheteur la chose « dans l’état où elle se
trouve au moment de la vente » (1614 CCiv). Donc si la délivrance a lieu un certain
temps après la formation de la vente, le vendeur a une obligation implicite de
conservation de la chose.
Le vendeur doit mettre à la disposition la chose vendue avec ses accessoires (art.
1615 CCiv). Ces accessoires sont aussi bien matériels que juridiques.
Ils sont matériels : les fruits si la chose est frugifère, les immeubles par destination si
la chose vendue est un immeuble par nature,… ainsi que les emballages et
conditionnements.
Ils sont juridiques : Ce sont tous les documents administratifs nécessaires à
l’utilisation de la chose vendue ainsi que tous les droits et actions attachés à la chose
a.1.1.3. Les modalités de la mise à disposition
a.1.1.3.1 Forme
Cela dépend de la nature de la chose vendue. Pour les immeubles, la mise à
disposition s’opère par la remise du titre de propriété qui s’accompagnera de la remise
des clés (art. 1605 CCiv).
Pour les ventes de meubles corporels, la mise à disposition s’opère ou bien par la
« tradition » (l’acheteur vient chercher le bien, main propre) ou bien par la mise à
disposition des moyens d’accès à la chose (1606 CCiv).
Pour les meubles incorporels, la mise à disposition s’opère par la remise des titres
les constatant.
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a.1.1.3.2. Le lieu
Où s’opère la mise à disposition ?
On distingue selon que la chose est un corps certain ou une chose de genre.
Corps certain : c’est l’endroit où la chose était au moment de la vente. (art. 1609
CCiv)
Chose de genre : c’est le domicile du vendeur (art. 1247 CCiv).
Ces règles s’appliquent sous réserve de stipulation contraire dans le contrat.
a.1.1.3.3. Le délai
Le Code civil en parle, tout comme le Code de la consommation.
Code civil :
Il n’impose aucun délai légal de mise à disposition. Ainsi il appartient aux parties à
la vente de fixer elles-mêmes le délai de délivrance. Ce n’est là qu’une faculté pour les
parties ; si elles ne l’ont pas fait, alors il appartiendra au juge de fixer lui-même un délai
raisonnable.
Code de la consommation :
Il prévoit deux règles.
La première concerne les ventes de meubles dépassant 500 euros. L’art. L114-1
CConso oblige le vendeur à indiquer la date à laquelle il mettra le meuble vendu à la
disposition de l’acheteur. Si le vendeur est en retard de plus de sept jours, l’acheteur
peut décider de résoudre unilatéralement le contrat.
La seconde concerne la vente à distance (téléphone, fax et internet). L’art. L121-20-
3 CConso prévoit que, sauf stipulation différente, la mise à disposition de la chose
vendue devra intervenir dans un délai de 30 jours à compter du lendemain du jour où
l’acheteur a passé commande.
a.1.2. La conformité (Béta)
Il n’est pas fait référence à l’idée d’une conformité dans le Code. C’est un ajout de la
jurisprudence, mais qui n’est pas dénué de tout fondement textuel : on peut le
raccrocher à un texte relevant du droit commun des contrats, l’art. 1243 CCiv qui
dispose que « le créancier ne peut être contraint de recevoir une autre chose que celle
qui lui est due, quoique la valeur de la chose offerte soit égale ou même plus grande. »
L’idée de la conformité trouve son fondement textuel dans cet article.
En revanche on ne sait pas à quoi doit être conforme la chose. Cette définition de la
conformité s’est avérée très difficile à mettre en place. Cette question a semé la zizanie
au sein même de la Cour de cassation. Cela a duré jusqu’aux années 93-94 où le juge a
adopté une définition unitaire.
a.1.2.1. La phase de zizanie
On a eu une opposition entre la troisième chambre qui préconisait une définition
stricte et la première chambre et la chambre commerciale qui adoptaient une conception
extensive de la conformité.
a.1.2.1.1. La définition stricte de la conformité
prônée par la troisième chambre civile
L’obligation de délivrance oblige le vendeur à mettre à la disposition de l’acheteur
une chose conforme au contrat, c’est-à-dire conforme aux stipulations contractuelles.
Ainsi pour vérifier si la chose délivrée est ou non conforme, il suffit de comparer la
chose délivrée et la chose convenue. Il suffit de comparer les caractères que présente al
chose délivrée par rapport aux caractères que le contrat prévoyait. Avec cette définition,
on comprend que le contrôle de la conformité sera d’autant plus poussé que les
stipulations du contrat auront été précises. On donne l’exemple de la vente d’un
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véhicule neuf. L’acheteur commande une voiture bleu foncé alors que celle livrée est
bleu clair.
La non conformité s’entend d’une différence entre la chose délivrée et la chose
convenue. Il y a non-conformité dès lors qu’il y a différence.
La troisième chambre civile a proposé cette définition dans le but de clairement
distinguer l’obligation de délivrance conforme de l’obligation de garantie contre les
vices cachés. Un vice caché est un défaut de la chose qui la rend impropre à son usage
normal. Avec la définition de la conformité adoptée par la Troisième chambre civile, on
distingue très bien ces obligations. Dans notre exemple, un défaut de freinage empêche
l’utilisation normale du véhicule et cela doit relever des vices cachés. Le problème de
couleur de peinture n’est pas touché par cette garantie contre les vices cachés.
L’obligation de délivrance conforme est celle pour le vendeur de mettre à la
disposition de l’acheteur une chose conforme au contrat. On compare donc la chose
livrée par rapport à la chose convenue. S’il y a coïncidence, l’obligation est bine
exécutée, sinon il y a défaut de conformité.
Cette définition permettait de distinguer parfaitement bien cette obligation de celle
de garantir contre les vices cachés (défaut de la chose qui la rend inapte à son usage
normal). Dans la logique de cette chambre, il faut comprendre que le défaut de
conformité et le vice caché ne se situent pas sur le même plan. Le vice caché se place
sur le plan du fonctionnement de la chose vendue tandis que le défaut de conformité se
place sur le plan de la définition même de la chose vendue.
On peut dire que le vice caché correspond à une altération de la chose. Le défaut de
conformité lui correspond à l’altérité de la chose vendue (du latin alter, autre).
a.1.2.1.2. La définition extensive de la conformité
par les chambres première civile et commerciale
Le raisonnement de ces chambres est au départ le même que celui de la troisième
chambre. Le vendeur doit mettre à disposition de l’acheteur une chose conforme au
contrat. Mais au lieu de s’arrêter là, elles étaient allées plus loin.
L’acheteur veut que la chose qui va lui être délivrée corresponde à la chose convenue.
Au delà de cette conformité, l’acheteur souhaite aussi que la chose fonctionne. Il faut
ainsi que cette chose soit certes conforme aux stipulations expresses du contrat mais
aussi qu’elle soit conforme à cette stipulation contractuelle classique selon laquelle la
chose est apte à son usage normal.
Pourquoi les chambres avaient préconisé ce raisonnement ? Elles voulaient protéger
l’acheteur. A l’époque le délai pour agir en garantie des vices caché par l’acheteur était
au terme de l’art. 1648 CCiv « un bref délai » (en moyenne entre 6 mois et un an). Très
souvent, l’acheteur réagissait trop tard, alors qu’il était forclos. L’acheteur se retrouvait
dès lors sans protection. C’est ainsi que les chambres ont trouvé cette définition
extensive. Avec celle-ci, le défaut de conformité englobe le vice caché (tout vice caché
est un défaut de conformité). Grâce à cette conception, l’acheteur qui ne peut plus agir
sur le vice caché n’a plus qu’à poser son fondement sur le défaut de conformité de la
chose vendue dont le délai de prescription est de droit commun, c'est-à-dire 30 ans si la
vente est civile ou 10 ans si elle est commerciale.
On se trouvait alors avec une opposition au sein même de la Cour de Cassation.
a. 1.2.2. L’unité retrouvée
C’est en 93 que la première chambre civile, la première, a abandonné sa définition
extensive de la troisième chambre civile : Civ.1 5 mai 1993 (D93 p506). C’est ensuite la
chambre commerciale qui a opéré son revirement : Com. 26 avril 1994 (CCC94 #134).
Si la chose vendue est affectée d’un défaut qui la rend inapte à son usage normal,
l’acheteur doit agir sur le fondement de la garantie des vices cachés. S’il ne peut plus
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agir sur ce terrain, alors tant pis, il ne peut pas exercer l’action. Si l’acheteur est déçu
parce que la chose vendue n’est pas identique à la chose convenue, l’action doit être
fondée sur l’action sur la non-délivrance conforme. Si le problème vient du
fonctionnement de la chose, alors il doit se fonder sur la garantie des vices cachés.
1) Ex : Vente d’une voiture d’occasion. Après une série d’incidents mécaniques,
l’acheteur s’aperçoit que le moteur a plus que le kilométrage indiqué. L’acheteur
assigne donc son vendeur.
Sur quel terrain faut-il se placer ? La Cour de Cassation
répond qu’il faut se placer sur le défaut de conformité. Peu importe son kilométrage, la
voiture n’est pas inapte à son usage normal. Mais la différence entre la chose remise à
l’acheteur et la chose vendue sera le fondement de l’action. Civ. 15 mars 2005 CCC 05#
2) Ex : Vente d’un immeuble. L’acheteur s’aperçoit que le toit n’est pas étanche. Le
juge précise qu’il faut agir sur la garantie contre les vices cachés car la maison est inapte
à son usage normal. Il n’y a pas de différence entre la chose convenue et la chose
vendue. Civ.3 6 oct. 2004 CCC05#25
nb : Le contrôle de la conformité sera d’autant plus poussé que les spécificités
contractuelles auront été nombreuses.
a.2. Sanction de l’inexécution de l’obligation de délivrance
Les hypothèses de cette inexécution sont diverses. Il y a deux obligations, celle de
remettre la chose, celle de la conformité de la chose.
Tout d’abord le vendeur peut n’avoir jamais mis à disposition la chose vendue à
l’acheteur, ou que partiellement. Par exemple il n’a pas mis à sa disposition tous les
accessoires de la chose vendue ; ou bien le vendeur a mis la chose vendue à sa
disposition tardivement.
L’inexécution de l’obligation de délivrance peut tenir à la non-conformité.
Quelles sont les sanctions imputables au cocontractant défaillant ?
a.2.1 L’inventaire des sanctions
a.2.1.1. Les remèdes préalables
Ils tendent à essayer de résoudre le problème sans aller jusqu’à la sanction
définitive. Avant toute sanction, l’acheteur peut tenter de faire pression sur le vendeur,
pour l’inciter à s’exécuter. Ces remèdes sont au nombre de deux.
L’un peut être utilisé si le problème tient en la non mise à disposition et l’autre si
cela tient à une non-conformité. Dans le premier cas, en cas de non mise à disposition,
l’acheteur peut invoquer l’exception d’inexécution. Il refusera de payer le prix tant que
l’acheteur ne lui aura pas remis la chose.
D’autre part, si l’inexécution tient à la non conformité, alors l’acheteur peut utiliser
la technique du « laisser pour compte » laquelle consiste pour l’acheteur à refuser la
marchandise en la retournant rapidement au vendeur. Ainsi c’est au vendeur d’agir. Soit
il constate le défaut de conformité et échange la marchandise soit il considère que la
chose est conforme et c’est alors à lui d’agir, ou bien en paiement forcé du prix ou bien
en résolution de la vente.
a.2.1.2. Les remèdes définitifs
- L’exécution forcée
Ce que l’acheteur doit faire en premier lieu, c’est envoyer au vendeur une mise en
demeure. Si elle reste infructueuse, alors l’acheteur va pouvoir saisir le juge en lui
demandant d’ordonner l’exécution (sous astreinte).
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Dans une hypothèse particulière, l’exécution forcée peut se faire sans le juge : c’est
dans le cas où la vente est conclue par un commerçant, sur une chose de genre et quand
le vendeur s’est rendu coupable d’une inexécution totale de son obligation de mise à
disposition, alors l’exécution forcée s’opère car l’acheteur peut mettre en œuvre la
faculté de remplacement (Art. 144 CCiv). Cela consiste à acheter directement la
marchandise auprès d’un autre vendeur et si le prix est alors supérieur, la différence sera
supportée par le vendeur défaillant.
- La résolution de la vente :
L’acheteur peut opter pour cette résolution. Il faut introduire une action en justice
sans qu’il y ait besoin de mise en demeure. La résolution n’est pas automatique, le juge
dispose d’un pouvoir d’appréciation. Il va examiner quelle est l’inexécution et ne
prononcera que la résolution que l’inexécution est particulièrement grave. C’est gênant
pour l’acheteur qui n’est pas certain d’obtenir la résolution.
Dans deux hypothèses, la résolution sera automatique. On peut tout d’abord stipuler
une clause résolutoire dans le contrat de vente. D’autre part, l’art. L114-1 CConso à
propos des ventes de meubles consenties par un vendeur professionnel, lorsque le
meuble vendu est vendu à un prix supérieur à 500 euros et qu’il a été stipulé dans la
vente que la livraison serait ultérieure. Lorsque le vendeur ne respecte pas le délai de
délivrance de plus de 7 jours, alors l’acheteur peut alors rompre unilatéralement le
contrat en envoyant une simple lettre avec AR.
- La réfaction judiciaire de la vente :
Dans un premier temps, la jurisprudence ne l’appliquait que dans les ventes
commerciales, mais la tendance est aujourd’hui à ouvrir la portée de cette action.
- La responsabilité contractuelle contre le vendeur :
Il est débiteur d’une obligation de délivrance qu’il n’a pas exécuté correctement.
Cette action est d’autant plus aisée à mettre en œuvre que l’obligation de délivrance est
une obligation de résultat (Civ. 13 nov. 2003 pourvoi 01-02475) et le vendeur ne peut
donc s’exonérer de la responsabilité qu’en rapportant la preuve d’une cause étrangère en
les caractéristiques de la force majeure.
Elle pourra être la seule sanction déclenchée par l’acheteur ou bien être une cation
complémentaire.
Lorsque le manquement à l’obligation provient du manquement de conformité, alors
l’acheteur peut utiliser l’une de ces sanctions, mais il peut aussi fonder son action sur
les vices du consentement, soit l’erreur ou le dol. La sanction ne consistera ainsi que
dans la nullité du contrat. Cette possibilité en cas de délivrance d’une chose non
conforme a été reconnu dans un arrêt Civ.1 23 mars 2003 (JCP03 I art.170#6 et suiv.).
Dans l’exemple de notre voiture, l’acheteur aurait pu invoquer une erreur sur la
substance de la chose, sur l’une des qualités essentielles de la chose. Pour peu que cette
différence entre kilométrage réel et apparent soit du fait du vendeur, il y aurait alors dol
de la part de ce dernier. La prescription de l’action est ici de 5 ans, contre 30 ou 10 ans
pour l’action en défaut de conformité de la chose vendue. Cette action ne présente donc
pas un réel intérêt, seulement elle est envisageable.
a.2.2. l’application des sanctions.
Sanctions
C’est à l’acheteur qu’incombe la charge de la preuve de la non délivrance conforme.
Délai pour agir
On applique la prescription de droit commun : 30 ans si vente civile, 10 ans si l’une
des parties est commerçante, vente commerciale.
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Si l’inexécution de l’obligation tient dans la non-conformité de la chose, il faut que
l’acheteur ait refusé la réception de la chose, ou bien qu’il ait émis des réserves dès qu’il
s’est aperçu du défaut de conformité. Ce n’est que si l’acheteur a pris soin de faire cela
qu’il va pouvoir exercer son action dans le délai de droit commun, sinon il sera
irrecevable. Voir Civ.1 12 juillet 2005 (D05 2879) : « la réception sans réserve de la
chose convenue couvre les défauts apparents de conformité. »
Une fois que la chose vendue a été délivrée à l’acheteur, il a entre els mains une
chose conforme à ce à quoi il s’attendait. Il va pouvoir retirer une utilité de la chose,
encore faut-il que celle-ci soit en mesure de procurer cette jouissance.
b) L’obligation de garantie contre les vices cachés
Le Code civil réglemente cette obligation. La garantie légale exposée, on verra dans
quelle mesure elle peut être envisagée conventionnellement.
b.1. La garantie légale contre els vices cachés.
C’est la réglementation qui figure aux art. 1641 et suiv. CCiv.
Il faut que trois conditions soient réunies.
b.1.1. Les conditions
b.1.1.1-L’existence d’un vice de la chose
Qu’est ce qu’un vice de la chose ?
Le vice est un défaut inhérent à la chose, nuisible à son usage normal.
« usage normal »
Cette formule ne figure pas à l’art. 1641 CCiv. mais se réfère à l’usage auquel on
destine la chose. Ce dont on a déduit qu’il fallait se référer à l’usage normal de la chose,
et non pas à l’usage particulier que l’acheteur voulait en faire. Si jamais l’acheteur
entendait faire de la chose un usage particulier, alors l’acheteur ne peut pas se plaindre
sur le terrain des vices cachés. L’acheteur doit alors le préciser dans le contrat, lequel
contiendra une clause relative à la destination originale de la chose. Alors si la chose
n’est pas apte à satisfaire l’acheteur, il devra se fonder sur l’inexécution de l’obligation
de délivrance conforme.
Exemple jurisprudentiels :
Un cd audio muni d’un dispositif de verrouillage anti-copie rend la lecture du CD
impossible sur ordinateur ou autoradio. C’est un vice caché selon le TGI de Nanterre.
(Plus les choses sont technologiquement complexes, plus elles sont susceptibles d’être
inaptes à un usage normal.
Un véhicule dont le moteur a été remplacé par un autre de cylindrée différente fait
l’objet d’une vente. Ce changement devait faire l’objet d’un passage au service des
mines. La Cour de Cassation, dans un arrêt Civ 1 fev. 2004 02-13113), reconnaît
l’inaptitude à l’usage normal. Cette inaptitude est juridique et non pas matérielle.
Un tableau vendu n’est pas authentique. Son acheteur introduit une action en
garantie des vices cachés. La juge estime qu’il n’y a pas de vice. (Civ1 14 dec. 2004
Bull.I #326)
b.1.1.2-le caractère caché du vice
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L’art. 1641 CCiv vise les défauts cachés. Encore dans l’art. 1642, le législateur
précise que « l’acheteur n’est pas tenu des vices apparent. » Le Code insiste donc sur
cette qualité liée à l’apparence.
Mais comment apprécier ce caractère occulte ?
La jurisprudence a défini le vice caché comme celui dont l’acheteur n’a pas eu
connaissance au moment de la vente et qu’un examen normalement attentif de la chose
vendue ne permettait pas de déceler.
« celui dont l’acheteur n’a pas eu connaissance au moment de la vente »
Si l’acheteur, au moment de la conclusion de la vente, en a eu d’une manière ou
d’une autre connaissance, il ne pourra assigner le vendeur en garantie des vices cachés.
Si le vendeur sait que la chose comporte un vice et qu’il avertit l’acheteur, alors celui-ci
ne pourra se retourner contre son vendeur.
« qu’un examen normalement attentif de la chose vendue ne permettait pas de
déceler. »
Que faut-il entendre par examen normalement attentif de la chose ? Pour
déterminer si l’acheteur qui n’a pas détecté la vice, s’est livré à un examen normalement
attentif, les tribunaux utilisent deux données essentiellement. La première est la nature
de la chose vendue (chose neuve ou d’occasion). La seconde est la qualité de l’acheteur.
Si l’acheteur est un profane, l’examen est celui d’un bon père de famille. Si l’acheteur a
des connaissances techniques relatives à la chose vendue, alors l’examen auquel il doit
se livrer devra être celui du professionnel type ayant les mêmes connaissances
techniques. Dans deux cas, le juge se montre encore plus sévère à l’égard de l’acheteur
professionnel en allant jusqu’à présumer la connaissance du défaut de la chose. Dans
l’hypothèse où l’acheteur est un professionnel de même qualité que le vendeur, il est
alors présumé de connaître le défaut. Quand l’acheteur professionnel a contracté avec
un vendeur profane, l’acheteur est la aussi présumé d’avoir eu connaissance du défaut.
Si le vice était indécelable, il y a alors lieu de reconnaître qu’il ait eu vice caché.
b.1.1.3. L’antériorité des vices par rapport au transfert des
risques
Si le défaut de la chose vendue ne naît qu’après le moment où la vente opère le
transfert des risques à la charge de l’acheteur, c’est alors à l’acheteur de supporter la
charge de la chose. En revanche si le vice existait au moins en germe avant le moment
où la vente a opéré le transfert des risques, alors l’acheteur peut invoquer les risques
contre les vices cachés.
On dit qu’il faut que le vice soit antérieur à la vente pour qu’on puisse mettre en
œuvre la garantie contre les vices cachés. Mais ce n’est qu’une approximation. La vente
opère immédiatement le transfert de propriété de la chose à l’acheteur. En même temps
que le transfert de propriété, s’opère le transfert des risques. Parfois le transfert des
risques est découplé du transfert de propriété. Alors la date de référence de mise en jeu
de la garantie de vices cachés est celle du transfert des risques. Les juges du fond
apprécient souverainement si le défaut n’avait pas une origine antérieure au transfert des
risques.
b.1.2. Les effets
b.1.2.1. L’identification des actions ouvertes à l’acheteur
Elle se fait à l’aide de deux textes les art. 1644 et 1645 CCiv. Le premier offre à
l’acheteur une option entre l’action rédhibitoire et l’action estimatoire. Le second
permet à l’acheteur d’exercer contre le vendeur une action en dommages et intérêts.
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L’option de l’art. 1644 CCiv.
L’action rédhibitoire conduit à la résolution du contrat de vente, c'est-à-dire qu’il est
rétroactivement anéanti. Cette résolution ne peut être provoquée que dans un délai de
deux ans contre 30 ou 10 ans pour les actions de droit commun.
L’action estimatoire (ou quanti minoris) est celle qui conduit à la réfaction de la
vente.
Un vice caché est un défaut qui rend à la chose impropre à son usage normal ou bien
qui diminue l’usage normal de la chose. L’acheteur a une option entre ces deux actions.
Cette option est discrétionnaire, et ainsi l’acheteur n’a pas à se justifier de son choix. Il
existe cependant une réserve. Si l’acheteur n’est pas en mesure de restituer la chose
vendue au vendeur ou bien parce qu’il l’a revendu ou bien parce que la chose a été
détruite.
L’action en dommages et intérêts prévus par l’art. 1645 CCiv.
A l’inverse de l’option de l’art. 1644, cette action ne peut être exercée que contre un
vendeur de mauvaise fois.
Si le vendeur professionnel est assimilé par la jurisprudence à un vendeur de
mauvaise foi, il est alors toujours réputé connaître le vice de la chose qu’il vend. C’est
une présomption de mauvaise foi qui pèse sur le vendeur de manière irréfragable. Cette
solution jurisprudentielle est audacieuse car elle est d’abord contraire à la règle selon
laquelle les présomptions irréfragables sont légales et contraire au principe de bonne foi
présumée (C’est le raisonnement à l’origine dans les années 60 au vendeur de mauvaise
foi).
Cette action permet à l’acheteur d’obtenir réparation du dommage que lui cause le
dysfonctionnement de la chose vendue. Il se peut que le défaut provoque un dommage
corporel ou bien un dommage un dommage à une autre chose. LA réparation de ces
dommages causés ne relèvent pas de cette action en responsabilité fondée sur 1645
CCiv mais de l’obligation de sécurité qui incombe désormais au vendeur. Cette action
ne sert qu’à réparer les dommages causés qu’à la chose elle même.
Cette action peut être exercée seule ou en accompagnement d’une action rédhibitoire
ou estimatoire.
b.1.2.2. Les modalités de mises en œuvre des actions
Quelles qu’elles soient, les actions fondées sur la garantie contre les vices cachés
doit être exercée dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice par
l’acheteur. C’est ce que prévoit l’art. 1648 CCiv. Cela résulte d’une ordonnance du 17
fev. 2005. Avant l’acheteur ne devait agir que dans un bref délai, sans que le délai soit
chiffré. L’ordonnance de 2005 a donc clarifié les choses sans pour autant que toutes les
questions soient réglées. Une question reste en effet en suspend.
Avec ce bref délai, bien souvent l’acheteur agissait trop tard. La jurisprudence avait
donc mis en place un stratagème pour neutraliser ce piège. Il suffisait pour l’acheteur de
faire à l’intérieur de ce bref délai une citation en référé expertise, ce qui interrompait la
délai. Concrètement ce référé consistait en une demande d’expertise pour savoir s’il y a
ou non vice. Cette citation interrompt le bref délai, c'est-à-dire que le délai reprendra à
zéro quand il recommencera à courir. Ce nouveau délai n’étant pas un bref délai mais un
délai de prescription de droit commun. C’est une interversion de la prescription, c’est à
dire une substitution du délai de droit commun au délai interrompu. Les art. 2271 à
2273 prévoient plusieurs cas d’interversion pour des délais courts. Et pour le juge,
puisque le Code prévoit ces cas pour ces délais, pourquoi ne pas les étendre à la vente.
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La jurisprudence va-t-elle reprendre ce mécanisme d’interversion qu’elle avait mis
en place auparavant ?
La doctrine a tendance à penser qu’elle va reprendre ce
mécanisme. Ainsi à compter du moment où l’acheteur aura eu connaissance du vice
caché, il aura deux ans pour désigner un expert, interrompant ainsi le délai. S’il conclut
à la présence d’un vice caché, l’acheteur disposera de 30 ou 10 ans selon le type de
vente. La Cour de Cassation n’a pas encore répondu à cette question.
Si la Cour de cassation reprend le système de l’interversion des délais de
prescription, pendant le délai de deux ans, l’acheteur devra assigner le vendeur en
référé-expertise. Cette assignation interrompant alors le délai de deux ans, il
recommencerait à courir à partir de zéro, mais pour un délai de droit commun (5 ou 10
ans).
Si elle ne le fait pas, c’est dans le délai de deux ans que l’acheteur devra agir au
fond.
Mais pour le moment il y a une incertitude quant à la position future de la Cour de
cassation sur le nouvel article 1648. Mais de toute façon, certains acheteurs se feront
toujours piéger par le délai de deux ans pour agir au fond.
Peut-il se baser sur un autre fondement pour sanctionner un défaut qui affecterait la
chose ?
Il ne peut plus agir sur le fondement de l’obligation de délivrance conforme
(possibilité condamnée depuis 1993, où la jurisprudence de la Cour de cassation s’est
unifié sur ce point).
La tentative a été faite de faire sanctionner ces vices cachés sur le terrain des vices
du consentement : erreur et dol.
L’erreur : le vice est caché, l’acheteur n’a pas pu le voir. Il faut se placer sur le
terrain de l’erreur de la substance.
Mais que faut-il entendre par substance dans ce cas?
Il faut considérer que l’absence de vice caché est une qualité substantielle. Dans un
premier temps la Cour de cassation a admis cette possibilité pour un acheteur forclos sur
le fondement des vices cachés (civ. 3, 28 mai 1988, D.1989, p. 450). Mais le juge opéra
un revirement le 27 octobre 1993 (Bulletin n°305) selon lequel lorsque la chose vendue
comporte un vice caché, il n’est pas question d’annuler la vente sur le fondement de
l’erreur sur la substance (article 1110). (Conf. civ 1. 19 oct. 2004, rjda 2005 n° 241). La
fermeture de cette voie date de 1993, la même année du refus de la Cour de cassation
que l’acheteur puisse se placer sur le terrain de l’obligation de délivrance conforme
(voir
supra).
Le dol : c’est une erreur provoquée. La jurisprudence accepte que l’acheteur forclos
sur le terrain des vices cachés puisse agir sur le fondement du dol : Civ 1, 6 novembre
2002 (pourvoi n° 0010192). Il serait choquant que la déloyauté du vendeur reste
impunie : il a caché le défaut qu’il connaissait, si l’acheteur est forclos, le vendeur s’en
tire facilement. La Cour de cassation a voulu empêcher cela.
b.2 Les aménagements conventionnels
Les clauses extensives : protection accrue de l’acheteur : elles sont toujours valables,
mais évidemment elle sont très rares.
Les clauses restrictives : cette expression recouvre deux types de clauses :
- Les clauses exclusives de la garantie contre les vices cachés : le contrat va indiquer
que l’acheteur achète le bien en l’état à ses risques et périls.
- Les clauses limitatives : exemple : pas de résolution de la vente possible, mais
réajustement du prix.
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Une clause restrictive de la garantie contre les vices cachés est valable lorsqu’elle est
stipulée par un vendeur non professionnel de bonne foi. Or la quasi totalité des ventes
d’immeuble contient une clause exclusive de la garantie contre les vices cachés. La
clause est valable, mais sous la réserve d’une triple limite :
La loi du 8 juin 1999 relative à la présence de termites : Pour protéger les acquéreur
d’immeubles contre les termites : les clauses exclusives de la garantie contre les vices
cachés ne seront valables qu’à la condition qu’ait été annexée à l’acte authentique un
état parasitaire datant de moins de trois mois. Si un tel état parasitaire n’est pas annexé,
la vente n’est pas nulle, mais la clause exclusive de la garantie contre les vices cachés
est inefficace pour ce qui concerne le vice résultant de la présence de termites.
L’article L 1334-7 du Code de la santé publique à propos des ventes de maisons
individuelles dont le permis de construire a été délivré avant le 1er juillet 1997 : pour
ces ventes, un constat doit être dressé pour informer l’acheteur sur l’éventuelle présence
d’amiante. Sans ce constat, une clause exclusive de garantie contre les vices cachés
serait inefficace si un défaut lié à l’amiante survenait.
L’article L 334-5 du Code de la santé publique : vente d’immeubles construits avant
1948, et situés dans une zone à risque d’exposition au plomb. Il faut annexer au contrat
un état d’accessibilité au plomb.
Une clause restrictive de la garantie contre les vices cachés est valable lorsque le
vendeur est un professionnel, et que l’acheteur est lui-même un professionnel de la
même spécialité que le vendeur.
• Les clauses mixtes : très fréquentes dans les ventes mobilières. Le vendeur
professionnel ne peut pas stipuler une clause restrictive car elle serait nulle (il est
présumé de mauvaise foi), mais comme il n’a pas intérêt a stipuler une clause purement
extensive, en pratique on rencontre le plus souvent des clauses mixtes.
2) Le monisme des textes spéciaux
a) La convention de Vienne du 11 avril 1980 relative à la vente
internationale de marchandises entre professionnels
Cette convention fusionne très clairement l’obligation de délivrance conforme et
celle de garantie contre les vices cachés. Elle les fusionne en une « obligation de
conformité », c'est-à-dire une obligation de fournir des marchandises conformes à la
commande et aptes à leur usage normal.
Délais :
La convention distingue quant au délai pour agir deux délais. Le
délai de
dénonciation est un délai raisonnable qui court à compter du moment où l’acheteur a
constaté le défaut. Le
délai d’action est alors de 2 ans à compter de la délivrance.
Sanction :
Elle peut être ou bien la diminution du prix ou bien la réparation des
marchandises, le choix appartenant à l’acheteur. En cas de « contravention essentielle
au contrat », c'est-à-dire en cas de manquement grave, alors l’acheteur a le choix de
réclamer soit la
résolution du contrat de vente soit le remplacement de la chose
vendue.
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b) L’ordonnance du 17 février 2005 relative à la vente de meubles
corporels entre vendeur professionnel et acheteur consommateur.
Elle est intégrée au Code de la Consommation aux art. L211-1 et suiv. L’origine de
ce règlement se trouve dans une directive communautaire du 25 mai 1999 « sur certains
aspects de la vente et des garanties des biens de consommation ». Cette directive avait
pour but d’instaurer une protection minimale de l’acheteur consommateur. La lenteur de
la transposition s’explique par un débat vif sur la manière de transposer cette directive.
Certains voulaient saisir cette occasion de transposition pour moderniser globalement
tout notre droit de la vente en réformant le Code civil. Face à ce clan, un second était
partisan d’une transposition
a minima de la directive : il fallait simplement ajouter au
Code de la consommation une réglementation spécifique à ces ventes. C’est cette
dernière qui a triomphé par l’ordonnance du 17 février 2005.
Cette réglementation spéciale ne s’applique pas aux ventes d’immeubles ou de
meubles incorporels, elles ne s’applique pas non plus entre les ventes de meubles
corporels entre deux professionnels ou entre deux consommateur, pas plus que si
l’acheteur est professionnel et le vendeur consommateur.
Les art. L211-1 et suiv. CConso mettent en place un système moniste.Il n’existe
qu’une « obligation de garantie de conformité ».
Définition :
Elle se trouve à l’art. L211-5 CConso. Cette obligation oblige le vendeur à fournir à
l’acheteur un meuble qui, d’une part, « doit être propre à l’usage habituellement attendu
d’un bien semblable » (1°), et d’autre part qui doit « présenter les caractéristiques
définies d’un commun accord par les parties ou être propre à tout usage spécial
recherché par l’acheteur porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a
accepté. »
Pour que l’acheteur puisse se plaindre d’un manquement à cette obligation de
garantie de conformité, il faut que la défectuosité du meuble vendu soit antérieure à la
vente. Pour favoriser la protection du consommateur, l’art. L211-7 CConso pose une
présomption d’antériorité du défaut. Il dispose que « quand le défaut apparaîtra dans un
délai de 6 mois à partir de la délivrance, alors il sera présumer avoir existé avant. »
La sanction :
Le Code de la consommation prévoit un système de sanction qui est inspiré de la
Convention de Vienne. Cela est étonnant car on est en présence d’une réglementation
spéciale qui relève du droit de la consommation. Or pour protéger le consommateur, la
réglementation s’inspire d’une réglementation qui ne concerne que des ventes entre
professionnels.
Le Code de la consommation met en place un système de sanction hiérarchisé. En
première ligne, l’acheteur a une option entre la réparation du meuble acheté et son
remplacement (L211-9). Cela revient à procurer à l’acheteur une satisfaction en nature.
En principe, l’acheteur peut choisir librement de demander la réparation ou le
remplacement (L211-9 al.1). L’alinéa 2 de ce même article pose une réserve, c'est-à-dire
que « la mesure choisie n’ait pas un coût manifestement disproportionné par rapport à
l’autre. »
Deuxième rang : s’il est impossible de procéder à la réparation ou au remplacement,
ou s’il est impossible de le faire dans un délai d’un mois à compter de la réclamation
formulée par l’acheteur, ou bine enfin si ces solutions présentent pour l’acheteur un
inconvénient majeur compte tenu de la nature du bien et de l’usage recherché, alors
dans tous ces cas de figure, l’acheteur dispose d’une option entre la résolution de la
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vente ou sa réfaction (L211-10 CConso). L’acheteur ne pourra opter pour la résolution
de la vente su le manquement du vendeur est mineur (L211-10
in fine). Il pourra au
surplus demander des dommages et intérêts au vendeur (L211-11 al2).
La mise en œuvre des sanctions :
Le délai pour agir est de 2 ans à compter de la délivrance du bien vendu (L211-12).
Est-ce vraiment avantageux pour le consommateur ? On compare ces délais par rapport
à ceux prévus par le Code civil. Si le manquement du vendeur est relatif à l’obligation
de délivrance conforme, on applique le délai de droit commun pour agir, c'est-à-dire
celui des ventes commerciales, à savoir 10 ans. Si le défaut est relatif au vice caché, le
délai de 2 ans de l’art.1648 CCiv doit être retenu à partir de la découverte du vice. Ces
mesures ne sont donc pas favorables.
La Cour de Cassation va-t-elle appliquer le mécanisme de l’interversion de la
prescription.
Cette réglementation spéciale prévue par le Code de la consommation ne se
substitue pas à la réglementation prévue par le Code civil pour la vente en général.
L’art. L211-13 énonce que l’acheteur garde la possibilité d’exercer les actions prévues
par le Code civil. On a créé une réglementation spéciales qui s’est ajoutée à celle
existante, sans s’y substituer.
Quel est l’intérêt de cette nouvelle réglementation pour l’acheteur ? Cela
complexifie le droit de la vente, mais est ce que l’acheteur consommateur s’y retrouve ?
A propos du délai pour agir, il ne gagne rien, les délais offerts par le Code civil lui étant
plus favorables. Pourtant cette réglementation semble avoir deux avantages concrets : la
présomption d’antériorité ainsi que l’option de réparation offerte à l’acheteur.
La « garantie commerciale » est une clause aménageant la garantie de conformité
prévue par la Code de la consommation. Cet aménagement conventionnel est possible
mais il doit forcément prendre la forme d’un écrit comportant un certain nombre de
mentions obligatoires quant au contenu de la garantie, à ses modalités de mises en
œuvre et à sa durée. Par ailleurs il faut que l’écrit précise clairement que l’acheteur
conserve en tout état de cause al possibilité de se placer sur le fondement des textes du
Code civil.
B- Les obligations accessoires
Elles ont été rajoutées pas la jurisprudence.
1) L’obligation d’information et de conseil
Le Code civil n’avait pas imaginé cette obligation car ce n’était pas au vendeur de
conseiller l’acheteur mais à l’acheteur de se renseigner. L’évolution postérieure a été
dans le sens d’une plus grande complexité de choses faisant l’objet de vente. Le fossé
s’est donc creusé entre le vendeur qui connaît toutes les informations relatives à la chose
vendue et l’acheteur qui les ignore. Quel texte est sollicité pour fonder cette obligation ?
L’art. 1135 CCiv et l’art. 1602 al1 ont servi cette obligation.
L’art. 1135 énonce que le contrat « oblige à ce qui est exprimé mais aussi à toutes
les suites que l’équité donne au contrat d’après sa nature. » L’équité qui commande de
compenser l’ignorance de l’acheteur, commande d’imposer au vendeur une obligation
d’informer le vendeur.
L’art. 1602al1 énonce que « le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce à quoi il
s’oblige ». Dans l’esprit des rédacteurs du Code civil, cet alinéa était indissociable de
l’alinéa 2 : « Tout pacte obscur ou ambigu s’interprète contre le vendeur. » Donc l’art.
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1602 ne concerne pas l’obligation du vendeur mais l’interprétation du contrat de vente.
Quand le contrat a besoin d’être interprété, l’obligation se fera contre le vendeur. On a
artificiellement découpé un article qui en réalité formait un bloc.
a) Le contenu de l’obligation d’information
1. La définition de l’obligation d’information et de conseil
Le vendeur va devoir informer, conseiller l’acheteur et ces informations devront
l’être aussi bien avant la conclusion de la vente qu’après.
Avant la conclusion de la vente, le vendeur doit donner à l’acheteur des informations
et des conseils qui sont susceptibles d’influencer le consentement de l’acheteur. Le
vendeur doit devoir fournir des renseignements sur les caractéristiques essentielles de la
chose vendue. Cet aspect de l’obligation prétorienne a été consacré par le législateur
aussi bien en matière de vente de meuble que d’immeuble.
le consommateur en mesure de connaître
En ce qui concerne les ventes de meubles, le vendeur professionnel doit « avant la
conclusion du contrat, mettre
les
caractéristiques essentielles du bien » (L111-1 CConso) ainsi que « les prix, les
limitations éventuelles de la responsabilité contractuelles et les conditions particulières
de la conclusion » (L113-3). Le vendeur doit indiquer la période pendant laquelle il est
prévisible que les pièces indispensables à l’utilisation du bien seront disponibles sur le
marché. Il doit indiquer aussi le délai de livraison de la chose (L114-1). En cas de vente
de meubles à distance, il doit fournir toute une série d’informations (L121-18).
Pour les ventes d’immeubles, une ordonnance du 8 juin 2005 a réformé l’art. L71-4
du Code de la construction au terme duquel le vendeur d’immeuble doit fournir à
l’acheteur un dossier de diagnostic technique. Cela comporte toute une série
d’informations prévues par ailleurs par d’autres textes. L’ordonnance veut simplement
rassembler toutes ces informations. Il contient d’abord le constat de saturnisme,
d’amiante (L1334-13 CSP), de présence de termites (L133-6 Code construction et
habitation), de l’état d’installation du gaz naturel, l’état des risques naturels et
écologiques… et enfin le diagnostic de performance énergétique.
Le conseil : cela consiste à éclairer l’acheteur sur l’opportunité de conclure le contrat
de vente envisagé. Cela impose au vendeur de s’enquérir des besoins de l’acheteur et
d’expliquer au besoin que la chose qu’il envisage d’acheter n’est pas pour lui. Le
conseil va donc jusqu’à dissuader l’acheteur d’acquérir une chose non adaptée. Voir
Com. 4 janv. 2005 CCC05#108
Après la conclusion de la vente, le vendeur doit fournir des renseignements à
l’acheteur quant aux conditions d’utilisation du meuble vendu ainsi qu’une mise en
garde sur les dangers que l’utilisation de la chose vendue peut présenter.
2. L’étendue de l’obligation d’information et de conseil
C’est une obligation à géométrie variable, c'est-à-dire qu’elle est variable selon les
contrats. Elle est fonction de trois paramètres.
La chose vendue : l’obligation est plus ou moins étendue selon que la chose est
nouvelle ou pas, selon qu’elle est plus ou moins complexe et enfin selon qu’elle est plus
ou moins dangereuse.
La qualité de l’acheteur : on distingue selon que l’acheteur est un consommateur ou
non. S’il est consommateur, il doit être informé de tout ce qu’il n’est pas en mesure de
connaître lui-même. Si c’est un professionnel et qu’il n’a pas de compétence technique à
l’égard de la chose qu’il achète, la tendance des tribunaux est de traiter cet acheteur à
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peu près comme un consommateur. En revanche s’il a des compétences techniques,
l’étendue de l’obligation est beaucoup plus restreintes, au point même que quelques
fois, certaines décisions vont jusqu’à dire que cette obligation d’information et de
conseil disparaît, à moins que le chose ne soit dangereuse.
La qualité du vendeur : on distingue selon que le vendeur est ou non un
professionnel. S’il est professionnel, il est débiteur d’une obligation d’information et de
conseil. S’il ne l’est pas, il est débiteur d’une obligation d’information, mais pas de
conseil.
Quand on a exposé le contenu de cette obligation, on a vu qu’elle s’exerçait en partie
avant l’exécution de l’obligation et en partie après. Si l’acheteur se plaint d’une
mauvaise exécution de l’obligation avant la conclusion du contrat, dans est dans une
phase précontractuelle et il faudrait agir sur le fondement de 1383 CCiv. S’il se plaint
de ne pas avoir été informé après l’exécution, c’est alors la responsabilité contractuelle
du vendeur qu’il faudrait recherché. Cela paraît logique mais ce n’est pas simple pour
l’acheteur. La jurisprudence a donc assez nettement tendance à concevoir de façon
unitaire l’obligation d’information et de conseil. Elle y voit une obligation unique de
nature contractuelle, englobant tous les détails qui doivent être donnés à l’acheteur (voir
Com. 4 janv. 2005).
Cette obligation de conseil est une obligation de moyen renforcée d’après la
jurisprudence. Lorsque l’acheteur se plaint d’un manquement du vendeur de
l’obligation, il n’a pas à prouver la faute commise par le vendeur. La faute du vendeur
est présumée. Le vendeur peut s’exonérer en rapportant la preuve qu’il n’a pas commis
de faute. C’est une présomption simple de faute.
b) La sanction de l’inexécution de l’obligation d’information et de
conseil
On distingue la sanction normale des sanctions exceptionnelles.
La sanction normale est la mise en jeu de la responsabilité contractuelle. EN ce qui
concerne les informations qui doivent être délivrées à l’acheteur d’un immeuble relative
à la présence d’amiante, de plomb ou de termite, alors l’unique sanction possible réside
dans l’inefficacité de la clause excluant la garantie contre les vices cachés sera
inefficace.
Lorsque le manquement est particulièrement grave, alors une sanction plus radicale
est concevable. Cela pourra être la nullité du contrat pour dol ou bien la résolution de la
vente pour inexécution.
2) L’obligation de sécurité
C’est une obligation qui a d’abord été inventée par la jurisprudence et dans un
second temps le législateur est intervenu.
a) L’invention par la jurisprudence d’une obligation de sécurité
autonome
C’est à partir de la fin des années 80 que cette obligation a été mise à la charge du
vendeur. L’idée de cette obligation était déjà dans l’air du temps. L’article premier de la
loi du 21 Août 1983 disposait que « les produits et les services doivent, dans des
conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement
prévisibles par le professionnels, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement
s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes. » Mais ce texte avait une
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portée générale ; c’était davantage un souhait qu’une véritable obligation pise à la
charge du vendeur.
Deux ans plus tard, la directive européenne du 25 juillet 1985 relative à la
responsabilité du fait des produits défectueux a joué un rôle décisif dans la création de
l’obligation de sécurité. Cette directive aurait du être transposée avant le 30 juillet 1988,
mais la France ne l’a pas fait en temps utile. Elle a été condamnée en manquement à
cette date et c’est alors que le juge a décidé d’anticiper sur une transposition qui tardait
à intervenir ; c’est à partir de 1989 que la Cour de Cassation a dégagé une obligation de
sécurité autonome à la charge du vendeur. (La directive, quant à elle, n’a été transposée
qu’en 1998) La Cour de Cassation a joué son rôle en suivant les consignes de la CJCE
qui prescrit au juge nationaux d’interpréter le droit national à la lumière du texte et des
directives non encore transposés. Il incombait donc au juge de créer cette obligation,
même sans texte (CJCE 13 juillet 1990). A partir de 1989, la Cour de Cassation dessine
les contours de l’obligation de sécurité.
1. Le contenu de l’obligation de sécurité
L’obligation de sécurité est « l’obligation de fournir des produits exempts de tout
défaut de nature à créer un danger pour les personnes ou pour les biens. » Civ.1 20 mars
1989 D.89 p381
Le juge précise «qu’un produit comporte un défaut de sécurité « lorsqu’il n’offre pas
la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre. » Civ.1 3 mars 1998 JCP98II
#8049
2. L’identification des débiteurs
Tout vendeur n’est pas débiteur d’une obligation de sécurité. Elle ne pèse que sur le
fabricant du produit et tous les revendeurs professionnels. Ainsi lorsque l’acheteur est
victime d’un défaut de sécurité, il va pouvoir agir contre le fabricant et contre tous les
revendeurs professionnels qui pourront être condamnés
in solidum. Civ.1 17 janvier
1995 Bull.I #43. Mais si la victime a agit contre un vendeur professionnel et qu’il a été
condamné, ce dernier pourra exercer un recours récursoire contre le fabricant et un
recours récursoire intégral s’il apparaît que le défaut de sécurité est du à un défaut de
conception ou de fabrication du produit.
3. Les créanciers de cette obligation
Le juge précise que les revendeurs sont débiteurs de l’obligation tant à l’égard de
l’acheteur qu’à l’égard des tiers. Civ. 1 17 janvier 1995 (voir supra).
La victime est un tiers :
Le tiers sera victime soit d’un dommage corporel soit d’un préjudice matériel.
Pourquoi la situation de ce tiers est-elle améliorée ?
Avant cette création jurisprudentielle, le tiers pouvait agir contre le fabricant ou un
vendeur en se fondant sur la responsabilité extracontractuelle soit sur la responsabilité
pour faute (Art. 1383 CCiv.) soit sur la responsabilité du fait des choses (en démontrant
que le vendeur ou fabricant avait gardé la garde de la chose) (Art. 1384 al.1 CCiv). Mais
le tiers allait se trouver face à une difficulté probatoire : il faut, se fondant sur 1383
CCiv, prouver une faute, et, se fondant sur 1384 al1 CCiv, prouver que l’acheteur
n’avait pas la garde de la structure. Même en surmontant cette difficulté, il ne
parviendra jamais qu’à faire condamner qu’une seule personne, celui qui a commis une
faute ou celui ayant conservé la garde.
Après cette invention, le tiers n’aura qu’à établir le défaut de sécurité du produit, c'est-à-
dire qu’il ne présentait pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s’attendre. De
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plus le tiers pourra faire condamner in solidum le fabricant ainsi que tous les revendeurs
professionnels.
La victime est l’acheteur lui-même :
Avant la création de l’obligation de sécurité, on réparait les dommages corporels subis
par l’acheteur ou aux biens en se fondant sur la garantie contre les vices cachés. D’après
l’art. 1645 CCiv, l’acheteur peut demander réparation du dommage qui résulte pour lui
de la présence d’un vice caché. Mais la jurisprudence avait procédé à une interprétation
très extensible de cet article car sa fonction première était de réparer le dommage
résultant pour l’acheteur du dysfonctionnement de la chose. La doctrine disait
traditionnellement que cet article réparait les dommages causés
à la chose. Mais le juge
avait permis l’utilisation de ce texte pour les dommages causés
par la chose.
Depuis l’invention de l’obligation de sécurité autonome, on retrouve la distinction, et en
ce qui concerne les dommages causés
à la chose, la réparation s’obtient sur la réparation
des dommages causés par les vices cachés. Mais pour le réparation des dommages
causés
par la chose, il faut se fonder sur la violation de cette nouvelle obligation.
L’intérêt est que cette action ne tombe pas sous le coups de 1648 CCiv. : ainsi le délai
pour agir est celui de droit commun puisque aucun texte ne réglemente ce droit. La
prescription est donc de 10 ans (au lieu de 2).
b) L’intervention du législateur
C’est la transposition tardive de la directive européenne par une loi du 19 mai 1998
qui a créé dans le Code civil intitulé « De la responsabilité su fait des produits
défectueux ».
Mais toutes les ventes ne sont pas concernées. Les ventes immobilières ne sont pas
concernées pas plus que les ventes de meubles consenties par des non professionnels.
Seules les ventes de meubles consenties par des professionnels sont donc ici concernées.
1. Qui sont les responsables ?
Les responsables sont les producteurs (art. 1386-6 CCiv). Et les revendeurs
professionnels ne sont que subsidiairement responsables (loi du 9 dec. 2004). Ils ne sont
responsables que si le producteur est inconnu (1386-7 CCiv).
2. Quelles sont les conditions de déclenchement de cette responsabilité du
fait des produits défectueux ?
1° Il faut un défaut de sécurité d’un produit mis en circulation.
Le défaut de sécurité existe quand le produit vendu ne présente pas la sécurité a
laquelle on peut légitimement s’attendre.
Est un produit tout objet mobilier, y compris les produits du sol, de l’élevage, du
corps humain.
La mise en circulation doit s’entendre du dessaisissement volontaire initial du
produit par la producteur ayant pour finalité la distribution du produit.
2° Il faut aussi un dommage susceptible d’être réparé, c'est-à-dire un dommage corporel
ou matériel (qui excède 500 ).
3° Il faut enfin un lien de causalité entre le défaut du produit et le dommage subi par la
victime.
3. Dans quels délais peut-on introduire cette action ?
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Le délai de forclusion : il faut agir dans les 10 ans à compter de la mise en
circulation du produit.
Si cette action peut être faite, le délai de l’action est de 3 ans à partir de l’instant où
la victime a eu ou aurait du avoir connaissance du défaut de sécurité et l’identité du
responsable.
4. Quels dont les moyens d’exonération dont dispose le producteur ?
Le producteur ne peut s’exonérer en prouvant qu’il n’a pas causé de faute. ( Art.
1386-10 CCiv)
Un second article énumère, de manière limitative, les causes pouvant être invoquées
(Art. 1386-11 CCiv.) On peut les regrouper en trois catégories.
La non-imputabilité de la mise en circulation peut être invoquée par le producteur
quand la mise en circulation n’est pas du fait du producteur.
La non-imputabilité du défaut de sécurité : Il peut d’abord être prouvé que le
défaut du produit n’existait pas au moment où le produit a été mis en circulation
(Inexistence du défaut). Le producteur d’une composante du produit s’exonère s’il
démontre que le défaut n’est pas imputable à la composante qu’il a fabriquée
(composante non responsable). Le défaut de sécurité du produit est dû au respect de
règles impératives (ordre de la loi). Le risque de développement peut enfin exonérer
quand l’état objectif le plus avancé des connaissance scientifiques et techniques à
l’époque de la mise en circulation du produit ne permettait pas de déceler le défaut
(risque de développement) (point à l’origine du retard dans la transposition de la
directive).
Enfin la faute de la victime peut être invoquée, entraînant l’exonération totale ou
partielle du producteur.
5. Dans quel délai est ouvert cette action ?
c) L’articulation de la responsabilité légale du fait des produits et de
l’obligation jurisprudentielle de sécurité dans la vente
Quand on se met à la place d’un acheteur victime d’un défaut de sécurité, a-t-il le
choix de se fonder sur la responsabilité du fait des produits défectueux ou sur la
responsabilité contractuelle ? On a hésité pendant un temps, mais aujourd’hui il n’y a
plus de doute. Un arrêt du 25 avril 2002 (D02p2462), la CJCE a décidé que les Etats
membres n’ont pas la possibilité de maintenir un régime général de responsabilité du
fait des produits défectueux différent de celui prévu par la directive. Peuvent seuls être
maintenus concurremment avec ce régime des régimes de responsabilité contractuels ou
extracontractuel reposant sur des fondements différents telle la garantie de vices cachés
ou la faute. Cela signifie que la mise en place d’un régime légal de responsabilité du fait
des produits défectueux en transposition de la directive de 1985 entraîne l’éviction de
l’action en responsabilité fondée sur le manquement à l’obligation de sécurité que la
jurisprudence avait inventé dans le contrat de vente. Ainsi le régime légal chasse
l’obligation jurisprudentielle.
Ainsi l’acheteur doit agir contre le seul producteur sur le fondement du régime légal
de l’art.1386-1 et suiv. (mis en place en 1998) et ne peut plus se faire sur le fondement
de l’inexécution de l’obligation de sécurité (sauf pour les ventes d’immeubles
consenties par un professionnel).
§2 L’obligation relative au droits transmis
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C’est l’obligation de garantir l’acheteur contre l’éviction. Elle fait l’objet d’une
réglementation légale, même si elle peut faire l’objet d’aménagements conventionnels.
A- La garantie légale contre l’éviction
1) Le contenu
L’obligation pour le vendeur de garantir le vendeur contre l’éviction est réglementée
par les art. 1626 et suiv. du CCiv. En vertu de cette obligation, le vendeur doit garantir
l’acheteur contre les atteintes dont le droit de propriété, qui a été transmis
solo
consensu,
pourrait être l’objet, que cette atteinte ait pour origine le fait personnel du
vendeur (garantie du fait personnel) ou qu’elle ait pour origine le fait d’un tiers (garantie
du fait d’un tiers).
a) La garantie du fait personnel
Le vendeur ne doit rien faire qui soit de nature à perturber le droit transféré à
l’acheteur. L’adage dit que « qui doit garantie ne peut évincer ».
Ainsi la garantie du fait personnel impose au vendeur de ne causer no trouble de fait
ni trouble de droit au droit acquis par l’acheteur.
Trouble de droit : le vendeur ne doit pas revendiquer un droit relatif à la chose
vendue qui porterait atteinte au droit de propriété acquis par l’acheteur.
Ex : Un acheteur acquiert un terrain, mais n’habitant pas sur les lieux, il ne
s’aperçoit pas de la possession de l’ancien propriétaire. Supposons que le vendeur
possède le terrain pendant un certain temps, il ne peut pas revendiquer le terrain par
l’effet de l’usucapion, car cela perturberait le droit qu’il a transmis à l’acheteur.
Cette interdiction faite au vendeur n’empêche pas le vendeur d’introduire une action
en nullité de la vente, une action en récision pour lésion ou résolution de la vente pour
inexécution… Le vendeur va causer un trouble de droit certes, mais cela n’est pas
contradictoire avec la garantie d’éviction car ici la vente va être rétroactivement
anéantie. C’est pour la même raison que le vendeur pourra stipuler dans la vente une
clause de réméré (du latin retimere, racheter)( art. 1659 à 1673 CCiv), par laquelle il se
réserve la faculté de racheter le bien qu’il a vendu dans un délai de 5 ans, moyennant
remboursement du prix et de certains frais. Quand le vendeur exerce sa faculté, il
provoque la résolution du contrat de vente conclu (c’est un mécanisme tombé en
désuétude en raison de l’évolution des systèmes de crédit).
Trouble de fait : Dans cette hypothèse le vendeur n’invoque pas un droit. Ici il doit
s’abstenir de tout comportement matériel de nature à troubler le droit de propriété de
l’acheteur.
Ex : En matière de vente d’immeuble, le trouble de fait que l’on rencontre le plus
fréquemment est l’empiètement. Le vendeur cède une parcelle de terrain à son voisin
immédiat. Le vendeur, après avoir vendu cette parcelle, empiète dessus.
Ex : En matière mobilière, concerne les ventes de fonds de commerce (meuble
incorporel). Dans une vente de fonds, le vendeur doit pour l’avenir s’abstenir de tout
acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé.
b) La garantie du fait d’un tiers
Deux conditions doivent être réunies :
Il faut d’abord qu’un trouble de droit émanant d’un tiers mais imputable au vendeur.
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Il faut que l’acheteur soit de bonne foi.
1. L’existence d’un trouble de droit émanant d’un tiers mais imputable au
vendeur
« Trouble de droit émanant d’un tiers… »
C’est un trouble de droit, pas de fait. Ainsi les troubles de fait qui pourraient émaner
d’un tiers ne sont pas couverts par la garantie d’éviction. L’acheteur devenu propriétaire
doit faire son affaire des troubles de fait dont il peut être l’objet.
C’est donc l’hypothèse où un tiers invoque un droit relatif à la chose vendu, où s’il
est reconnu, entraînera l’éviction totale ou partielle de l’acheteur. L’éviction totale est
l’hypothèse où le tiers invoque sa propriété sur le bien, ou même un droit réel
accessoire.
«… mais imputable au vendeur »
Cela signifie que c’est dans un acte du vendeur antérieur à la vente que le droit
invoqué par le tiers doit trouver son origine.
2. La bonne foi de l’acheteur
Cela signifie que l’acheteur a du ignorer le risque d’éviction qui le menaçait. Il a
donc du ignorer le droit dont un tiers allait pouvoir se prévaloir. La bonne foi de
l’acheteur est présumée de manière très forte par la jurisprudence (2268 CCiv).
Trois illustrations :
-Quand le droit invoqué par le tiers a fait l’objet d’une publication antérieure sur les
registres de la publicité foncière, l’acheteur n’en est pas moins toujours supposé de
bonne foi. Ainsi c’était au vendeur d’avertie l’acheteur du droit qui risquait de troubler
celui-ci.
-Quand le droit qu’invoque le tiers est une servitude légale.Le juge considère que le
juge est présumé avoir ignoré les servitudes légales, même si théoriquement nul ne doit
ignorer la loi.
-Quand le droit invoqué par le tiers est une servitude apparente (servitude résultant
de la configuration des lieux, ex : servitude de passage en cas d’enclave, servitude
d’écoulement des eaux. Quand le tiers se prévaut d’une servitude apparente on pourrait
penser que l’acheteur en ait eu connaissance, mais la jurisprudence est nuancée et il faut
d’après le juge que la servitude invoquée soit très apparente pour que l’acheteur soit
considéré de mauvaise foi. Quand le droit est une servitude apparente, les juges vont se
demander si cette servitude était évidente.
Quand les deux conditions sont réunies, l’acheteur peut se retourner contre le
vendeur.
2) Les sanctions
a) La riposte préalable
art. 1653 CCiv : « si l’acheteur est troublé ou a juste sujet de craindre d’être troublé
par une action soit hypothécaire soit en revendication, il peut suspendre le paiement du
prix jusqu’à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble si mieux n’aime celui-ci donner
caution. »
Cet article sera utilisé plus particulièrement par l’acheteur quand celui ci s’aperçoit
qu’un tiers va se prévaloir d’un droit, qui s’il est reconnu, va entraîner son éviction.
L’acheteur peut alors suspendre le paiement du prix, tant que le vendeur n’aura pas fait
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cesser le trouble ou bien tant qu’il n’aura pas trouver l’engagement d’une caution. Si le
vendeur ne fait pas cesser le trouble, l’acheteur risque d’être évincer, alors le vendeur
devra rembourser toute ou partie du prix de vente, mais est-il solvable ? L’acheteur
prend conscience d’une menace d’éviction qui plane sur lui, quoi qu’elle ne se soit pas
encore concrétisée. C’est l’application de la sanction de l’exception d’inexécution. Ainsi
cet article est une application au cas d’éviction de l’exception d’inexécution. Mais la
jurisprudence se montre assez sévère vis à vis de l’acheteur quand aux modalités
d’exercice du droit de suspendre le paiement du prix. Dans un arrêt Civ.3 26 mai 1992
(Bull.III #176), le juge estime que « l’acheteur doit mettre en demeure le vendeur
d’exercer la faculté que lui reconnaît ce texte moyennant la cessation du trouble ou la
fourniture d’une caution d’obliger l’acquéreur au paiement. » Le juge semble vouloir
dire que quand l’acheteur veut se prévaloir de 1643, il faut d’abord qu’il adresse au
vendeur une mise en demeure, dans laquelle il va dire au vendeur qu’il le somme, ou
bien de faire cesser le trouble ou bien de lui garantir une caution faute de quoi, il ne
paiera pas le prix (dans le droit commun, l’exception d’inexécution n’exige pas de mise
en demeure).
La mise en œuvre de la garantie d’éviction peut se faire de deux manières.
-La garantie incidente :
La menace d’éviction s’est concrétisée. Le tiers qui se prévaut d’un droit sur la
chose, assigne l’acheteur pour faire reconnaître son droit. La menace d’éviction s’est
donc concrétisée et l’acheteur ne va pas attendre que cette menace d’éviction soit
consommée, il va tout de suite se retourner contre son vendeur pour l’appeler en
garantie, c'est-à-dire que le vendeur devient partie au procès. L’acheteur va avoir deux
procès à mener, l’un contre le tiers et l’autre contre le vendeur.
-La garantie principale :
Le tiers assigne en justice l’acheteur pour faire reconnaître son droit. Mais l’acheteur
n’appelle pas son vendeur en garantie d’éviction. Si le tiers gagne, l’acheteur est évincé.
Ce n’est que dans un second temps que l’acheteur, une fois que l’éviction est définitive,
qu’il se retourne contre son vendeur une action en garantie contre l’éviction.
L’acheteur a intérêt à choisir la première car la seconde lui fait courir un risque. En
effet si l’acheteur opte pou la garantie principale, il court le risque de se voir appliquer
la sanction prévue à l’art. 1640 selon lequel dispose que « la garantie pour cause
d’éviction cesse lorsque l’acquéreur s’est laissé condamner par un jugement en dernier
ressort ou dont l’appel est irrecevable, sans appeler son vendeur, si celui-ci prouve qu’il
existait des moyens suffisant pour faire rejeter la demande. » Le risque encouru par
l’acheteur est d’être déchu du droit de se prévaloir de la garantie d’éviction contre son
vendeur et cette privation est subordonnée à deux conditions, tout d’abord une décision
d’éviction définitive et aussi une éviction qui aurait pu être évitée.
a) l’éviction totale (art. 1630 à 1635 du CCiv)
Ce sont les qui la réglementent. Le vente est ici résolue et le Code prévoit un
système de sanction favorable à l’acheteur. Tout d’abord il va obtenir la restitution de la
totalité du prix qu’il avait du payer (peu importe qu’entre le vente et l’éviction la valeur
du bien ait diminué), il va aussi avoir une indemnisation complète. Cette indemnisation
recouvre les fruits, les divers frais exposés par l’acheteur à l’occasion de la vente, la
plus-value que le bien a pu prendre et enfin les travaux effectués sur le bien.
b) L’éviction partielle (1636 à 1638)
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La sanction peut être ou bien la résolution de la vente, ou bien sa réfaction judiciaire.
Résolution :
Elle peut être réclamée par l’acheteur si l’éviction partielle a une importance telle
que l’acheteur n’aurait pas conclu le contrat de vente s’il avait connu au départ la
menace d’éviction. C’est ce que l’on appelle la menace d’éviction déterminante.
Réfaction :
La vente est maintenue mais l’acheteur obtiendra un remboursement partiel su prix
payé pour tenir compte de l’éviction partielle dont il est l’objet. Il y aura réfaction de la
vente soit lorsque l’éviction n’est pas déterminante soit lorsqu’elle qu’elle l’est, mais
qu’il choisit la réfaction, à moins qu’il ne préfère la résolution.
B- L’aménagement conventionnel de la garantie contre l’éviction
Il peut jouer dans les deux sens : une clause peut stipuler une extension ou une
restriction de cette garantie contre l’éviction.
1) Les clauses extensives
Article 1627 du Code civil : elles sont valables.
2) Les clauses restrictives
Elles sont exclusives ou limitatives. Mais attention, les clauses restrictives du fait
personnel ne sont jamais valables. Pour les clauses restrictives de la garantie du fait
d’un tiers, elles ne sont valables que si le vendeur est de bonne foi et s’il n’est pas un
professionnel.
Lorsqu’elles sont valables, ces clauses n’ont qu’un effet limité.
La clause exclusive : la garantie d’éviction est exclue par le contrat de vente. Si
l’acheteur est victime d’une éviction totale, la clause ne l’empêche pas de se retourner
contre le vendeur, une fois qu’il a remis le bien au tiers, afin de se faire restituer le prix.
Mais alors quelle est la portée de cette clause ? Elle a simplement pour effet de
dispenser le vendeur d’indemniser l’acheteur évincé. Pour exclure réellement et
totalement la garantie, il faut stipuler dans le contrat que l’acheteur achète à ses risques
et périls (l’acheteur va payer la chose moins chère, mais la vente prend un caractère
aléatoire, il risque l’éviction).
§3 : La situation du vendeur à l’égard des sous-acquéreurs de la
chose
Il s’agit du cas de la chaîne de vente : A vend à B qui vend à C. C est donc le sous-
acquéreur. Il peut arriver que ce dernier, lorsqu’il est déçu par la chose, n’agisse pas
contre son propre vendeur, mais contre un maillon antérieur dans la chaîne des ventes
successives, A dans notre exemple. Ce type d’action est nécessairement de nature
contractuelle (Cour de cassation, 7 novembre 986, Dalloz 1986, p. 293). Cette position
jurisprudentielle mérite une explication, car A et C sont des tiers l’un par rapport à
l’autre. En fait il s’agit ici d’une transmission des actions attachées à la chose par voie
d’accessoire. En vertu de la première vente, B acquiert en plus de la propriété un certain
nombre d’action contre A. Lorsque B revend la chose à C, la propriété est transmise de
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nouveau (c’est le principal), mais les actions qui lui sont attachées aussi (au titre de
l’accessoire).
L’action de nature contractuelle en question n’est pas une action propre que C aurait
acquise en vertu du contrat de vente qu’il aurait lui-même conclu, c’est une action
transmise, elle lui a été transmise par B. La conséquence est que le régime juridique de
cette action est à rechercher dans le contrat passé entre A et B, et non dans celui passé
entre B et C.
Sous section 2 : Les obligations de l’acheteur
Payer le prix et prendre livraison de la chose.
§1 L’obligation de payer le prix
A- Les modalités de paiement du prix
1) Le moment du paiement
« Le prix doit être payé au jour réglé par la vente ». Mais qu’en est-il s’il n’y a pas
de clause prévoyant le moment du paiement ? L’article 1651 du Code civil propose une
règle supplétive : le prix doit être payé au moment de la délivrance. Cela semble simple
mais il se pose une difficulté, le Code civil se contredit : article 1612 : le vendeur n’est
pas tenu de délivrer la chose si l’acheteur n’en paye pas le prix. Les articles 1612 et
1651 se contredisent clairement. Pour se sortir de cette impasse, il faut établir un ordre
de priorité, et c’est la jurisprudence qui l’a fait : civ.1, 19 novembre 1996 (JCP part. 2,
n°22862) « Sauf convention particulière, l’obligation pour l’acheteur de payer le prix
résulte de l’exécution complète par le vendeur de son obligation de délivrance ». C’est
une position très favorable à l’acheteur. Dans l’espèce de 1996, il s’agissait d’une vente
d’installation informatique de beaucoup d’ordinateurs d’une grande société. Le vendeur
avait délivré un certain nombre d’ordinateurs, aussi il a réclamé une partie du prix. La
Cour de cassation a refusé, l’acheteur ne doit rien au vendeur tant que celui-ci a rempli
toutes ses obligations.
Il est possible de prévoir qu’une fraction du prix soit payée par anticipation
(acompte). Les arrhes sont par contre constitutifs d’une faculté de dédit réciproque
(article. 1590) (cf.
supra). La difficulté est de déterminer la nature d’une somme payée
juste après la conclusion du contrat : arrhes ou acompte ? La différence est de taille, car
dans un cas on peut se dédire (arrhes), alors que dans l’autre pas du tout (acompte).
L’article L 114-1 du Code de la consommation prévoit que ces sommes sont des arrhes,
sauf stipulations contraires du contrat. Mais cette précision n’est valable que pour les
ventes entre vendeur professionnel et acheteur consommateur.
Le paiement du prix peut enfin intervenir plus tard.
Le paiement retardé en vertu de la loi : Dans les ventes d’immeuble, l’acheteur peut
en vertu de l’article 1653 retarder le paiement du prix lorsqu’il a des justes raisons de
craindre qu’il va être évincé.
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Le paiement retardé conventionnellement : un échéancier de paiement est convenu
entre les parties.
Le paiement retardé judiciairement : lorsque le juge octroie un délai de grâce au
débiteur qui éprouve une difficulté à régler sa dette (article 1244).
2) Le lieu du paiement
Article 1650 : le prix doit être payé au lieu réglé par la vente.
Pour les ventes réglée comptant, le paiement doit se faire au lieu de la délivrance.
3) La preuve du paiement
Lorsque la vente porte sur un immeuble, la preuve du paiement du prix se fait au
moyen d’une quittance que le vendeur remet à l’acheteur. Pour les ventes de meubles, la
remise matérielle de la chose entre les mains de l’acheteur permet de présumer que le
prix a été payé.
B) Les moyens d’action du vendeur en cas de non paiement du prix
La première solution, c’est de refuser la délivrance tant que le prix n’est pas payé
(article 1612), mais ce moyen d’action est aujourd’hui neutralisé par la jurisprudence
précitée. D’autres moyens d’action sont envisageables.
1) L’exécution forcée
Le vendeur dispose de deux sûretés légales, deux privilèges. Un privilèges est un
droit conféré par la loi à un créancier de faire vendre aux enchères publiques un bien
appartenant au débiteur pour se faire payer par préférence sur le prix d’adjudication.
Pour les ventes de meubles, la loi confère au vendeur le privilège du vendeur de
meubles. Lorsqu’il est impayé, il peut saisir le bien vendu, le vendre, et se faire payer
du prix de vente par préférence. Le problème c’est que ce privilège n’est pas très
efficace. La loi a multiplié les privilèges des créanciers, ce qui a eu pour effet de
hiérarchiser les créanciers entre eux, et malheureusement, le privilège du vendeur de
meuble n’est pas bien placé dans la hiérarchie. Mais souvent les vendeurs prévoient une
clause de réserve de propriété.
Le vendeur de meuble a lui aussi un privilège, qui fonctionne de la même façon mais
qui est plus efficace. Il doit être publié à la conservation des hypothèques dans les deux
mois suivants la vente. S’il le fait le privilège va prendre rang rétroactivement au jour de
la vente, ce qui est une bonne position.
2) La résolution de la vente
Le vendeur peut préférer neutraliser l’opération. La résolution de la vente pour non
paiement du prix doit normalement être demandé au juge (article 1654), qui a un
pouvoir d’appréciation. Mais il est possible de stipuler dans le contrat une clause
résolutoire, qui porte aussi le nom de pacte commissoire. L’intérêt pour le vendeur, c’est
qu’en cas de non paiement du prix, la vente sera automatiquement résolue après qu’une
mise en demeure infructueuse ai été adressée à l’acheteur.
3) L’action en responsabilité contractuelle
Cette action est cumulable avec les autres. Il faudra bien sur démontrer que le défaut
de paiement du prix a causé un préjudice.
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§2 : L’obligation de prendre livraison de la chose
Il faut faire une analogie avec l’obligation de délivrance, qui est de mettre la chose
vendue à la disposition de l’acheteur. C’est à l’acheteur de venir chercher la chose
vendue auprès du vendeur.
Dans le ventes immobilières, l’obligation de prendre livraison de la chose vendue
n’a pas une consistance matérielle très palpable : il va récupérer le titre de propriété et
les clefs au moment de la signature de l’acte authentique.
Pour les ventes de meubles, l’obligation de prendre livraison est aussi appelée «
obligation de retirement ». Dans quels délais ce retirement doit-il se faire ? Il doit le
faire dans le délai prévu au contrat. Si le contrat n’a rien prévu, l’acheteur doit retirer le
meuble vendu dans un délai raisonnable. Mais l’acheteur peut suspendre le retirement
du meuble vendu s’il apparaît que de son côté le vendeur n’a pas rempli toutes ses
obligations (conformité par exemple). Quelles sont les sanctions encourues par
l’acheteur lorsqu’il n’exécute pas son obligation de prendre livraison ? Elles sont très
fortes. Le vendeur peut agir contre l’acheteur en exécution forcée, il peut même
réclamer une astreinte (somme à payer par jour de retard). Le vendeur peut en plus
demander au juge qu’il l’autorise à remettre le meuble vendu en dépôt chez un tiers aux
frais de l’acheteur (article 1264). La seconde sanction permet au vendeur de décider la
résolution unilatérale du contrat de vente. Cette résolution pourra intervenir sans mise
en demeure (article 1657) ! Cela ne peut évidemment se faire qu’à la condition qu’il ait
intégralement exécuté ses obligation.
Pourquoi cette obligation de prendre livraison fait l’objet d’une sanction aussi forte,
alors qu’elle n’est pas l’obligation principale de l’acheteur ?
Tant que l’acheteur n’a pas procédé au retirement du meuble vendu, celui-ci reste
chez le vendeur. Cela peut poser un gros problème de stockage au vendeur commerçant,
surtout si tous les acheteurs se comportent de cette façon. De plus, pèse sur le vendeur
une obligation de conservation de la chose tant que l’acheteur n’est pas venu la retirer,
aussi cela peut devenir pesant pour lui si l’acheteur ne vient pas retirer la chose.
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