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Tunisie : Promouvoir les 
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l'Instance Vérité et Dignité 
sur la réforme de la justice
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de l’Etat de droit. Elle dispose d’une expertise juridique unique pour développer et renforcer 
les systèmes de justice nationaux et internationaux. Créée en 1952 et active sur les cinq 
continents, la CIJ veut garantir le développement et la mise en oeuvre du droit international 
des droits humains et du droit international humanitaire, veiller à la réalisation des droits 
civils, culturels, économiques, politiques et sociaux, s’assurer de la séparation des pouvoirs 
et préserver l’indépendance de la justice et des professions juridiques.
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Note d'analyse
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affaires étrangères de Finlande.
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
Tunisie : Promouvoir les recommandations 
de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme 
de la justice 
Note d’analyse
Novembre 2021 
Table des matières
I. Introduction..........................................................................................................
5
II.  Réformer le système judiciaire pour garantir son indépendance et sa 
redevabilité.........................................................................................................
i. Renforcer le rôle du Conseil supérieur de la magistrature .............................................
ii. Fournir les moyens de réaliser l'indépendance de la justice en pratique..........................
iii. Garantir l'indépendance du Ministère public...............................................................
iv. Réformer le système de justice militaire.....................................................................
7
7
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III. Conclusion.........................................................................................................
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I. Introduction 
La loi organique n° 2013-53 du 24 décembre 2013 relative à l'instauration et à l'organisation 
de la justice transitionnelle (la loi de 2013) prévoit la mise en place d'une Instance Vérité et 
Dignité (IVD)1. L'IVD a été mandatée pour : (i) tenir des audiences publiques ou à huis-clos 
pour les victimes de violations flagrantes des droits de l'homme commises entre 1955 et 2013 ; 
(ii) documenter ces violations ; (iii) déterminer les responsabilités ; (iv) proposer des mesures 
pour éviter qu'elles ne se reproduisent ; et (v) élaborer un programme global de réparations2.
En  outre,  l'article  43  de  la  loi  de  2013  a  chargé  l'IVD  de  formuler  des  recommandations  de 
réforme, notamment au sein du secteur de la justice, afin d'éviter la récurrence des violations 
des droits de l'homme, de protéger les droits de l'homme et de promouvoir l'état de droit3. 
L'IDV a commencé ses travaux en juin 2014. Conformément à l'article 67 de la loi de 2013, elle 
a remis, le 31 décembre 2018, son rapport final aux autorités, lequel a finalement été rendu 
public le 26 mars 20194. Conformément à la loi de 2013, une section du rapport de l'IVD est 
consacrée aux recommandations de réformes concernant, notamment, le secteur de la justice5. 
Afin de comprendre le raisonnement qui sous-tend ces recommandations, il est important de 
noter que l'IVD a largement documenté la manière dont les anciens régimes ont utilisé et abusé 
du système judiciaire pour perpétrer des violations flagrantes des droits humains6. La réforme 
du secteur de la justice, en tant que pilier de l'État de droit, est donc censée garantir la non-
répétition des violations des droits de l'homme en Tunisie.
Conformément à l'article 70 de la loi de 2013, le gouvernement avait une année pour préparer 
un plan d'action visant à mettre en œuvre les recommandations de l'IVD. Cependant, à ce jour, 
aucun  plan  d'action  ne  semble  avoir  été  adopté  et  plusieurs  des  recommandations  de  l'IVD, 
notamment en ce qui concerne la réforme du secteur de la justice, restent sans suites. 
En  vue  de  promouvoir  cet  aspect  important  du  travail  de  l'IVD,  la  présente  note  fournit  une 
analyse de certaines des recommandations de l'IVD visant à réformer les institutions de la justice 
7et formule des recommandations supplémentaires quant à leur mise en œuvre conformément 
au droit international et aux normes internationales en matière de droits de l'homme. 
Suspension de l'État de droit, de l'ordre constitutionnel et de la séparation 
des pouvoirs
Le 25 juillet 2021, invoquant l'article 80 de la Constitution relatif aux mesures exceptionnelles, 
le président Kais Saïed a démis le gouvernement, s'est autoproclamé chef de l'exécutif et du 
Ministère public, a suspendu le corps législatif du pays (l'Assemblée des représentants du peuple, 
ARP)  et  a  retiré  aux  membres  de  l'ARP  leurs  immunités  parlementaires8.  En  outre,  le  décret 
présidentiel n° 117 du 22 septembre 2021 a suspendu la majeure partie de la Constitution et a 
confié au président les pleins pouvoirs exécutifs et législatifs, y compris celui de régir par décret 
l’organisation de la justice et de la magistrature, de l'armée, des forces de sécurité intérieure, 
des  partis  politiques,  des  syndicats  et  des  associations,  sans  aucune  possibilité  de  contrôle 
judiciaire et/ou constitutionnel9.
1. Loi de 2013, Titre II.
2. Loi de 2013, art. 39.
3. Voir également la loi de 2013, art. 67.
4.  Le rapport complet final de l'IVD fait 1869 pages et n'est disponible qu'en arabe. Un résumé de 644 pages a 
été  traduit  en  anglais  et  est  disponible  sur  http://www.ivd.tn/rapport/doc/TDC_executive_summary_report.
pdf (dernière consultation le 28 octobre 2021). Les références au résumé ci-après se rapportent à la traduction 
en anglais, sauf indication contraire.
5.  Rapport complet final de l’IVD, partie V, pp. 203-217 et pp. 236-239. Voir également le résumé, pp. 565-579, 
pp. 594-597 et pp. 606-608.
6. Résumé exécutif, pp. 175-199.
7.  La présente note se concentre sur les recommandations visant à garantir l'indépendance du pouvoir judiciaire 
dans son ensemble. En tant que tel, il n'aborde pas les recommandations spécifiquement liées à la Cour des 
comptes, aux tribunaux administratifs et aux Chambres criminelles spécialisées.
8.  Voir  https://www.icj.org/tunisia-presidents-power-grab-is-an-assault-on-the-rule-of-law/.  Voir  également 
https://www.icj.org/tunisia-president-must-reestablish-the-rule-of-law/ sur le renouvellement de ces mesures.
9.  Voir  https://www.icj.org/tunisia-reverse-the-presidents-power-grab/.    En  particulier,  le  décret  117  supprime 
également l'organe chargé du contrôle de la constitutionnalité des lois.
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Le 30 juillet, Yassine Ayari, député au Parlement tunisien, qui avait qualifié de coup d'État la 
prise de pouvoir du Président Saïed, a été arrêté et emprisonné sur la base d'un verdict rendu 
par un tribunal militaire trois ans plus tôt pour « diffamation de l'armée », suite à la levée de 
son immunité parlementaire. Il fait actuellement l'objet d'une enquête du parquet militaire pour 
ses publications sur Facebook critiquant avec virulence les mesures prises par le Président de la 
République le 25 juillet10. Une augmentation significative du nombre de civils traduits devant les 
tribunaux militaires a été documentée depuis le 25 juillet, y compris un journaliste, un blogueur 
et un autre membre du Parlement, simplement pour avoir critiqué le Président11.
À  l'heure  où  le  Président  a  mis  en  suspens  l'État  de  droit  et  la  séparation  des  pouvoirs  en 
Tunisie, la pertinence des recommandations de l'IVD visant à assurer l'indépendance du pouvoir 
judiciaire, en tant que garant essentiel contre le retour de l'autoritarisme et la récurrence des 
violations des droits de l'homme, ne saurait être trop soulignée.
Dans le prolongement du processus de justice transitionnelle, des mesures doivent être prises 
pour assurer la pleine mise en œuvre des recommandations de l'IVD dès le retour de l'ordre 
constitutionnel.
10.  Voir https://www.icj.org/tunisia-judiciary-must-act-as-a-check-on-presidents-power-grab/; see also https://
inkyfada.com/en/2021/09/28/how-can-military-courts-judge-civilians/.
11.   Voir  https://www.amnesty.org/en/latest/news/2021/11/tunisia-alarming-increase-in-number-of-civilians-facing-
military-courts/.
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II.  Réformer le système judiciaire pour garantir son indépendance 
et sa redevabilité
Afin de prévenir tout nouvel abus du pouvoir judiciaire à des fins politiques ou personnelles, 
l'IVD a formulé plusieurs recommandations visant à renforcer l'indépendance de la justice, en 
soulignant que :
« [l]a réforme du système judiciaire requiert, essentiellement, le parachèvement de son 
indépendance pour qu'il puisse remplir son rôle constitutionnel en tant qu'autorité assurant 
l'administration  de  la  justice,  la  suprématie  du  droit  et  la  protection  des  droits  et  des 
libertés par le biais de réformes assurant l'indépendance du judiciaire conformément aux 
normes  internationales  »12.
Il incombe à toutes les institutions, gouvernementales et autres, « de respecter l'indépendance 
de la magistrature »13. Un système judiciaire indépendant est le fondement de l'état de droit 
et de la gouvernance démocratique. La Tunisie a ratifié le Pacte international relatif aux droits 
civils et politiques (PIDCP) en 1969. L'article 14 du PIDCP garantit à chacun le droit à l'égalité 
devant les tribunaux et les cours de justice et à ce que sa cause soit entendue équitablement 
et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi. Il s'agit 
d'un « droit absolu qui ne souffre aucune exception »14. En tant que partie au PIDCP, la Tunisie 
est tenue de respecter ce droit, ainsi que de pourvoir à l'adoption de mesures d’ordre juridique 
et autre propres à donner effet à ce droit, y compris en prévoyant les garanties nécessaires pour 
assurer sa réalisation15.
L'indépendance de la magistrature en vertu de l'article 14 du PIDCP comprend non seulement 
l'indépendance  effective  des  juridictions  de  toute  intervention  politique  des  autres  branches 
de l'État,  à savoir l'exécutif et  le législatif,  mais  s'étend également aux procédures régissant 
le  statut  des  magistrats  (par  exemple,  leur  nomination,  leur  rémunération,  la  durée  de  leur 
mandat, leur avancement, leur suspension, leur révocation et les mesures disciplinaires dont ils 
peuvent faire l’objet)16. En conséquence, les recommandations de l'IVD abordent de multiples 
aspects qui affectent l'indépendance de la justice, notamment le rôle du Conseil supérieur de la 
magistrature en ce qui concerne le statut des magistrats ; les moyens de parvenir effectivement 
à l'indépendance ; le statut du ministère public ; et le système de justice militaire. Chacun de 
ces aspects est exploré plus en détail ci-dessous17. 
i. Renforcer le rôle du Conseil supérieur de la magistrature
En vertu de l'article 114 de la Constitution et de l'article 1er de la loi organique n° 2016-34 du 
28 avril 2016 relative au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), le CSM garantit le bon 
fonctionnement  de  la  justice  et  le  respect  de  son  indépendance.  L'IVD  a  recommandé  de  « 
renforcer le [CSM] en lui fournissant tous les moyens nécessaires pour assurer son efficacité 
et son indépendance ». Elle a également formulé plusieurs recommandations sur le rôle que le 
CSM devrait jouer en ce qui concerne la carrière et la discipline des magistrats afin de renforcer 
leur  indépendance.
A.  Carrière des magistrats
L'IVD a recommandé que le recrutement des juges et du personnel judiciaire soit placé sous la 
12. Résumé exécutif, p. 594.
13.  Principes  fondamentaux  des  Nations  Unies  relatifs  à  l'indépendance  de  la  magistrature,  adoptés  par  le 
septième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants tenu à Milan 
du 26 août au 6 septembre 1985 et entérinés par les résolutions 40/32 de l'Assemblée générale de novembre 
1985 et 40/146 du 13 décembre 1985 (« Principes fondamentaux des Nations Unies sur l'indépendance de la 
magistrature »), Principe 1. 
14.  Comité des droits de l'homme, Observation générale n° 32, Article 14 : Droit à l'égalité devant les cours et 
tribunaux et à un procès équitable (« Observation générale n° 32 »), UN Doc. CCPR/C/GC/32, par. 19.
15. PIDCP, article 2.
16. Observation générale n° 32, par. 19-20.
17. Résumé exécutif, p. 594.
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supervision du CSM et soit fondé sur des considérations de compétence et de probité18. Une telle 
approche est conforme au principe 10 des Principes fondamentaux de l'ONU sur l'indépendance 
de  la  magistrature,  selon  lequel  «  Les  personnes  sélectionnées  pour  remplir  les  fonctions  de 
magistrat doivent être intègres et compétentes » (c'est nous qui soulignons).
Certaines réformes législatives ont été adoptées à cet effet. Par exemple, en vertu de l'article 45 
de la loi organique n° 2016-34, le Conseil supérieur de la magistrature statue sur la nomination, 
la promotion et la mutation des magistrats, tant des juges que des procureurs, y compris ceux 
des rangs les plus élevés, sur la base de la compétence, de l'impartialité et de l'indépendance.
Cependant,  l'article  4  du  décret  gouvernemental  n°  2020-28  du  10  janvier  2020  fixant  les 
attributions  de  l’Institut  supérieur  de  la  magistrature19,  chargé  de  la  formation  initiale  et 
continue des magistrats, prévoit que les membres du jury chargés du concours de recrutement 
des auditeurs de justice sont nommés par arrêté du chef du gouvernement et sur proposition du 
ministre de la Justice. Comme le détaille le rapport de la CIJ, « Indépendance et responsabilité 
du système judiciaire tunisien : Tirer les leçons du passé pour construire un futur meilleur », sur 
l'indépendance de la justice en Tunisie, si les normes internationales n'excluent pas absolument 
que les pouvoirs exécutif et législatif puissent jouer un rôle dans les nominations judiciaires, 
elles soulignent la nécessité de veiller à ce que le processus de sélection soit exempt de toute 
influence  politique20.
En  outre,  l'article  42  de  la  loi  organique  n°  2016-34  a  confié  au  CSM  un  rôle  simplement 
consultatif  concernant  la  formation  des  magistrats  à  l'Institut  supérieur  de  la  magistrature, 
lequel reste sous la tutelle du Ministère de la Justice21. À cet égard, les normes internationales 
exigent que tous les aspects de la carrière des juges, y compris leur formation, soient à l'abri 
de  toute  influence  indue  ou  inappropriée  des  pouvoirs  exécutif  ou  législatif22. 
Par  conséquent,  la  CIJ  estime  que  le  décret  n°  2020-28  et  les  lois  connexes  devraient  être 
modifiés pour empêcher toute influence du pouvoir exécutif dans la sélection des magistrats et, 
plus généralement, pour faire en sorte que l'Institut supérieur de la magistrature soit transféré 
sous la supervision du CSM.
L'IVD a également recommandé que tous les magistrats, y compris les juges administratifs et 
les juges de la Cour des comptes, suivent un cursus commun harmonisé à l'Institut supérieur 
de la magistrature23. L’IVD a également déclaré que les programmes de formation des juges 
devraient être révisés « afin d’augmenter leur performance dans l’exercice du nouveau rôle qui 
leur est confié par la Constitution »24, à savoir « assurer la suprématie de la Constitution, la 
souveraineté de la loi et la protection des droits et libertés »25 .
À cet égard, la CIJ considère que la loi devrait garantir que les magistrats reçoivent une formation 
initiale et continue adéquate et appropriée, y compris une formation sur le droit international 
des droits de l'homme.
18. Résumé exécutif, pp. 594-595.
19.  Le  titre  complet  est  le  Décret  gouvernemental  n°  2020-28  du  10  janvier  2020  fixant  les  attributions  de 
l'Institut  supérieur  de  la  magistrature,  le  régime  des  études  et  de  formation.
20.  Rapport de la CIJ, Indépendance et responsabilité du système judiciaire tunisien : Tirer les leçons du passé 
pour  construire  un  futur  meilleur,  13  mai  2014  («  Rapport  de  la  CIJ  sur  l’indépendance  de  la  justice  en 
Tunisie  »,  pp.  29-30,  disponible  en  anglais  sur  http://www.icj.org/wp-content/uploads/2014/05/Tunisia-
Strengthen-Judicial-Independence-Report-2014-ENG.pdf, dernière consultation le 6 octobre 2021. Un résumé 
en français est disponible sur https://www.icj.org/wp-content/uploads/2014/05/Tunisia-Strengthen-Judicial-
Independence-Report-Introduction-2014-FRE.pdf,  dernière  consultation  le  30  novembre  2021.
21.  Selon l'art. 2 de la loi n° 85-80 du 11 août 1985 portant création d'un Institut supérieur de la magistrature et 
fixant sa mission, telle que modifiée par la loi n° 92-70 du 27 juillet 1992.
22.  Rapport  de  la  CIJ  sur  l’indépendance  de  la  justice  en  Tunisie,  p.  34.  Voir  notamment  Observations  finales 
du Comité des droits de l'homme sur la République du Congo, UN Doc. CCPR/C/79/Add.118, par. 14, avec 
une attention particulière portée à la formation des juges ; Conseil de l'Europe, Recommandation (2010)12 
du Comité des Ministres sur les juges : indépendance, efficacité et responsabilités (« Recommandation CdM 
(2010)12 »), par. 57 ; Charte européenne sur le statut des juges, par. 2.3, qui renvoie au par. 1.2.
23. Résumé exécutif, p. 595, en ce qui concerne la Cour des comptes et les tribunaux administratifs.
24. Résumé exécutif, p. 596.
25. Constitution, art. 102.
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B.  Régime disciplinaire et redevabilité
L'IVD a rappelé qu’il convenait de « renforcer le principe de l'inamovibilité des juges en tant 
que garantie fondamentale de l'indépendance des juges, tout en respectant la compétence du 
[CSM] chargé de la discipline, de la promotion et du mouvement des juges, tels que garantis 
par la loi et par les normes internationales pour l'indépendance du juge »26.
Ce principe est inscrit dans l'article 107 de la Constitution. La CIJ note toutefois que l'article 
107  ne  garantit  pas  pleinement  le  principe  de  l'inamovibilité,  car  il  n'inclut  pas  de  garantie 
d'inamovibilité jusqu'à l'âge de la retraite ou l'expiration du mandat, comme l'exigent les normes 
internationales27.
L'IVD a également observé que le CSM, à travers ses trois composantes, à savoir les conseils 
judiciaire,  administratif  et  financier,  est  compétent  pour  statuer  sur  les  actions  disciplinaires 
à  l'encontre  des  juges,  mais  qu'il  reste  à  voir  si  les  réformes  futures  incluront  des  garanties 
procédurales  pour  respecter  la  présomption  d'innocence  et  faire  en  sorte  que  l'Inspection 
générale (IG), qui est placée sous l'autorité directe du ministre de la Justice28, soit déplacée sous 
l'autorité du CSM29. En effet, les normes internationales exigent que les mesures disciplinaires 
pour les juges et toute décision concernant leur suspension ou leur révocation, ne soient prises 
qu'à  l'issue  d'une  audience  équitable  par  un  organe  indépendant  sur  la  base  de  règles  de 
conduite établies et qu'elles soient soumises à réexamen30.
Si la loi organique n° 2016-34 confie les décisions disciplinaires concernant les juges à chaque 
conseil  compétent  du  CSM31,  elle  confère encore  d'importantes  prérogatives  à  l’IG,  qui  reste 
sous le contrôle du Ministère de la Justice. Si les plaintes contre un magistrat peuvent désormais 
être  adressées  soit  au  CSM,  soit  au  ministre  de  la  Justice,  qui  les  transmettent  sans  délai  à 
l’IG  pour  enquête.  L'inspecteur  général  peut  également  agir  de  sa  propre  initiative.  À  l'issue 
de  l'enquête,  l'inspecteur  général  peut  soit  classer  l'affaire,  soit  la  renvoyer  devant  le  CSM. 
Le requérant peut exercer un recours gracieux à l’encontre des décisions de classement sans 
suite  auprès  de  l'Inspecteur  général32.  L’IG  contrôle  donc  entièrement  le  renvoi  des  affaires 
disciplinaires  au  CSM.
Ceci est une source de préoccupation car, comme l'a confirmé l'instance provisoire chargée du 
contrôle de la constitutionnalité des projets de loi, l'intervention du pouvoir exécutif dans les 
actions disciplinaires contre les magistrats porte atteinte à l'indépendance de la magistrature33.
Par conséquent, afin de mettre pleinement en œuvre la recommandation de l'IVD conformément 
à la Constitution et aux normes internationales, la CIJ considère que les liens structurels entre l’IG 
et le pouvoir exécutif devraient être supprimés et que l’IG devrait être placée sous la supervision 
du  CSM.  Ses  pouvoirs  d'inspection  pourraient  être  étendus  aux  tribunaux  administratifs  et  à 
la Cour des comptes, ce qui n'était pas possible jusqu'à présent puisqu’ils ne relèvent pas de 
l'autorité du Ministère de la Justice. 
26. Résumé exécutif, p. 596.
27.  Principes fondamentaux des Nations Unies sur l'indépendance de la magistrature, Principe 12 ; Directives et 
Principes de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples sur le droit à un procès équitable 
et à l'assistance judiciaire en Afrique, 2003 (« Directives et Principes de la CADHP »), Section A, Principe 4(l) 
; Recommandation CdM (2010)12, par. 49.
28.  Selon l'art. 24 du décret n° 2010-3152 du 1er décembre 2010 portant organisation du ministère de la justice 
et des droits de l’homme, Journal Officiel n° 99 du 10 décembre 2010, modifié par le décret gouvernemental 
n° 2018-334 du 6 avril 2018.
29. Résumé exécutif, p. 571 et traduction française du résumé, à la p. 566.
30.  Principes fondamentaux des Nations Unies sur l'indépendance de la magistrature, principes 17 et 20 ; Directives 
et Principes de la CADHP, Section A, Principe 4(q) ; Recommandation CdM (2010)12, par. 69 ; Rapport du 
Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, UN Doc. A/HRC/11/41, par. 60-61.
31. Art. 58.
32. Art. 59.
33.  Voir Décision n° 02/2015 de l'instance provisoire chargée du contrôle de la constitutionnalité des projets de loi 
du 8 juin 2015 concernant le projet de loi organique sur le CSM (Journal Officiel de la République Tunisienne, 
12 juin 2015, n° 47) : « ... Le fait que le ministre de la Justice ait le pouvoir, sur décision de l'inspecteur 
général, de réexaminer les plaintes, signalements et griefs à l’encontre d’un juge, le met dans une position 
privilégiée vis-à-vis de la décision de non-lieu prise par l'inspecteur général dans un domaine lié à la discipline, 
qui porte atteinte à l'indépendance de la magistrature prévue par les articles 102 et 114 de la Constitution, ce 
qui entraîne que l'article 60 du projet de loi est déclaré anticonstitutionnel » (notre traduction).
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
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En  ce  qui  concerne  l'équité  des  procédures  disciplinaires  à  l'encontre  des  magistrats,  la  CIJ 
note que la loi organique n° 2016-34 a apporté des améliorations significatives, notamment le 
droit pour les magistrats concernés d'être assistés par un avocat, de disposer du temps et des 
facilités nécessaires à la préparation de leur défense et de bénéficier d'un réexamen judiciaire 
indépendant34. La CIJ rappelle toutefois que la loi devrait être encore améliorée en veillant à ce 
que les sanctions qui sont imposées à la suite d'un constat de faute soient proportionnées et en 
faisant en sorte que les magistrats ne puissent être révoqués que pour des motifs graves, pour 
faute ou incompétence35.
En outre, l'IVD a recommandé qu'un code de déontologie soit promulgué et soit généralisé à 
tous les organes judiciaires36. Cette mesure est nécessaire à plusieurs égards : pour garantir 
la redevabilité des magistrats, pour que ces derniers s'astreignent aux normes d'intégrité les 
plus élevées afin de regagner la confiance du peuple et pour que dans toutes les procédures 
disciplinaires, de suspension ou de révocation les décisions soient prises en fonction des règles 
établies en matière de conduite des magistrats37 et selon une procédure régulière.
L'article 42 de la loi organique n° 2016-34 confie au CSM la rédaction d’un tel code. Or, celui-ci 
est en cours de préparation depuis plusieurs années. 
La CIJ considère que le CSM devrait accélérer la rédaction d'un code de conduite suffisamment 
détaillé et complet, en étroite consultation avec les magistrats et conformément aux normes 
internationales, notamment les Principes fondamentaux de l'ONU relatifs à l'indépendance de la 
magistrature et les Principes de Bangalore sur la déontologie judiciaire38. Ce code de conduite 
devrait être consacré dans la loi comme la base sur laquelle les juges seront tenus de rendre 
des comptes sur le plan professionnel.
Afin  de  garantir  davantage  la  redevabilité  des  juges,  l'IVD  a  également  recommandé  de 
renforcer le rôle du CSM dans l'application de l'obligation incombant aux magistrats de déclarer 
leur  patrimoine39.  La  loi  n°  2018-46  du  1er  août  2018  portant  déclaration  des  biens  et  des 
intérêts, de la lutte contre l'enrichissement illicite et les conflits d'intérêt dans le secteur public 
dispose que, dans un délai maximum de 60 jours à compter de la date de leur nomination, les 
magistrats doivent déclarer leur patrimoine et leurs intérêts. Ils doivent également renouveler 
cette déclaration tous les trois ans et déclarer toute modification substantielle de leur patrimoine 
et de leurs intérêts. Il s'agit d'un outil de surveillance important pour détecter, traiter et prévenir 
la corruption.
A la lumière de ce qui précède, la CIJ approuve les recommandations de l'IVD et, en particulier, 
exhorte les autorités tunisiennes à :
I.  Adopter  un  nouveau  statut  des magistrats  conforme  aux  normes  internationales, 
notamment en veillant à ce que tous les aspects liés à leur sélection, nomination, 
mutation et discipline soient fondés sur des critères objectifs, fondés sur le mérite 
et sur des procédures transparentes ;
II.  Adopter  une  loi  consolidée  sur  le  CSM  qui  abroge  les  dispositions  obsolètes  des 
lois et décrets non conformes à la Constitution et aux normes internationales ; en 
particulier, une telle loi devrait :
    (i).   Donner  au  Conseil  supérieur  de  la  magistrature  compétence  sur  toutes  les 
questions relatives à la carrière des magistrats, y compris leur sélection, leur 
nomination,  leur  formation,  leur  évaluation,  leur  mutation,  leur  promotion, 
leur discipline et la fin de leur mandat, en excluant tout rôle substantiel des 
pouvoirs  exécutif  et  législatif  dans  ce  domaine  ;
34. Art. 60-67.
35.  Recommandation  CdM  (2010)12,  par.  69  ;  Directives  et  Principes  de  la  CADHP,  Section  A,  Principe  4(p)  ; 
Observation  générale  n°  32,  par.  20.
36. Résumé exécutif, p. 596.
37. Principes fondamentaux des Nations Unies sur l'indépendance de la magistrature, Principe 19.
38.Voir Rapport de la CIJ, Tunisia: Judicial Conduct and the Development of a Code of Ethics in Light of International 
Standards, novembre 2019, disponible en anglais sur https://www.icj.org/wp-content/uploads/2019/11/Tunisia-
Code-of-Ethics-Advocacy-Analysis-Brief-2016-ENG.pdf, dernière consultation le 31 octobre 2021, et en arabe sur 
https://www.icj.org/wp-content/uploads/2019/11/Tunisia-Code-of-Ethics-Advocacy-Analysis-Brief-2016-ARA.pdf, 
dernière consultation le 30 novembre 2021.
39. Résumé exécutif, p. 596.
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
 | 11   
(ii).   Mandater  le  CSM  pour  superviser  les  procédures  de  sélection  des  auditeurs  de 
justice, ainsi que la formation initiale et continue des magistrats, et veiller à ce 
que l'Institut supérieur de la magistrature soit placé sous la supervision du CSM ;
     (iii).  Accorder au CSM la supervision de tous les aspects des procédures disciplinaires, 
y  compris  la  nomination  des  membres  et  le  fonctionnement  du  corps 
d'inspection  judiciaire  de  l’IG  et  l'ouverture  des  procédures  disciplinaires  ;
     (iv).   Prévoir que le code de conduite adopté par le CSM soit la base sur laquelle 
les magistrats seront tenus de rendre des comptes sur le plan professionnel ;
     (v).   Garantir l'inamovibilité des magistrats jusqu'à un âge de retraite déterminé ou 
pour une durée déterminée adéquate ;
     (vi).   Limiter les cas dans lesquels un magistrat peut être démis de ses fonctions aux 
événements suivants : avoir atteint l'âge de la retraite, le cas échéant, ou la 
date d’expiration d’un mandat à durée déterminée ; la démission ; l'inaptitude 
documentée par un certificat médical ; ou l'imposition d'une sanction légale et 
proportionnée de révocation à l'issue d'une procédure disciplinaire complète 
et équitable.
III.  Garantir une formation initiale et continue adéquate, appropriée et efficace des 
magistrats aux frais de l'État.
En  outre,  la  CIJ  note  que  les  recommandations  de  l'IVD  visant  à  renforcer  le  rôle  du  CSM, 
dont certaines sont déjà inscrites dans la Constitution et la loi organique n° 2016-34, mettent 
en  évidence  la  nécessité  de  consolider  davantage  le  statut  du  CSM  en  tant  que  garant  de 
l'indépendance  de  la  justice  et  de  préserver  les  progrès  réalisés  dans  le  renforcement  de 
l'indépendance de la magistrature. Cela nécessite non seulement l'adoption de réformes, mais 
aussi la mise en œuvre effective de celles qui ont déjà été adoptées. À cet égard, le CSM lui-
même  porte  une  responsabilité  importante  et  doit  jouer  pleinement  son  rôle  pour  faire  en 
sorte  que  l'indépendance  aille  de  pair  avec  la  redevabilité,  notamment  en  adoptant  un  code 
de  conduite  suffisamment  détaillé  et  complet,  en  étroite  consultation  avec  les  magistrats  et 
conformément  aux  normes  internationales.
ii. Fournir les moyens de réaliser l'indépendance de la justice en pratique
L'IVD  a  recommandé  de  «  réorganiser  la  justice  de  manière  à  garantir  l'indépendance 
administrative et financière des [...] tribunaux [et]  libérer ainsi l'administration de la justice de 
la tutelle de l’exécutif, qui a toujours été, pendant la dictature, la porte d’entrée de l’intervention 
de l’autorité exécutive, dans le cours de la justice, la déviant ainsi de son rôle de garantie de 
l'état de droit et de protecteur des droits et libertés »40.
L'IVD a spécifiquement recommandé que le pouvoir judiciaire soit doté de ressources suffisantes 
pour lui permettre de remplir son devoir constitutionnel d'assurer l'administration de la justice41, 
insistant  sur  la  nécessité  de  renforcer  ses  ressources  humaines  pour  accélérer  le  jugement 
des affaires tout en garantissant le droit à un procès équitable42. L'IVD a ajouté que les juges 
devraient  bénéficier  d'«  un  niveau  de  rémunération  décent  et  […]  de  conditions  de  travail 
permettant de mieux s'acquitter de leur travail et de renforcer l'indépendance de leur décision»43. 
Cette  disposition  est  conforme  aux  normes  internationales  relatives  à  l'indépendance  de  la 
magistrature44.
40. Résumé exécutif, p. 595.
41. Résumé exécutif, p. 597.
42. Résumé exécutif, p. 595.
43. Résumé exécutif, p. 596.
44.  Le  Principe  7  des  Principes  fondamentaux  de  l’ONU  sur  l'indépendance  de  la  magistrature  dispose  que  « 
[c]haque  État  membre  a  le  devoir  de  fournir  les  ressources  nécessaires  pour  que  la  magistrature  puisse 
s’acquitter  normalement  de  ses  fonctions.  De  même,  la  Déclaration  de  Bordeaux  précise  :  «  Des  moyens 
organisationnels, financiers, matériels et des ressources humaines suffisants devront être mis à la disposition 
de  la  justice  ».  (Avis  no  12  (2009)  du  Conseil  consultatif  de  juges  européens  (CCJE)  et  avis  no  4  (2009) 
du Conseil consultatif de procureurs européens (CCPE) à l’intention du Comité des ministres du Conseil de 
l’Europe sur « juges et procureurs dans une société démocratique », CM(2009)192, point 4). Les Directives 
et Principes de la CADHP précisent la nécessité d'une « rémunération appropriée » pour les magistrats et les 
procureurs (Section A, Principe 4(m) et Section F, principe b).
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
12 |    
En ce qui concerne l'indépendance financière de la justice, les normes internationales exigent 
que le pouvoir judiciaire soit associé à l'élaboration de son propre budget45. Si l'article 113 de 
la Constitution et l'article premier de la loi organique n° 2016-34 garantissent l'indépendance 
financière du CSM, la CIJ considère qu'en outre, le CSM devrait être habilité à dresser le projet 
de budget de la justice, en consultation avec le Parlement et devrait se voir accorder un droit 
de regard sur le budget de la justice.
Plusieurs  recommandations  spécifiques  de  l'IVD  visent  à  prévenir  les  ingérences  dans  les 
décisions judiciaires et leur exécution. Par exemple, entre autres, l'IVD a recommandé ce qui 
suit : « Fournir aux tribunaux la protection nécessaire en imposant des sanctions pénales et 
administratives contre toute personne qui exerce des pressions sur les juges et les témoins et 
dissimule des documents et des preuves »46. L'IVD a également recommandé la mise en place 
d'un « corps de police judiciaire rattaché au Ministère de l'Intérieur mais travaillant sous l'autorité 
et la supervision des présidents des tribunaux et des procureurs, en charge de la sécurité des 
tribunaux, de l’acheminement des convocations, de l'exécution des mandats judiciaires et des 
jugements »47.
A cet égard, la CIJ approuve la nécessité de traiter de manière adéquate et de sanctionner, le 
cas échéant, les cas d'ingérence dans le système judiciaire, y compris les actes qui perturbent 
l'exécution des décisions judiciaires. Parfois, le recours au droit pénal peut être justifié par la 
gravité de tels comportements. En outre, la CIJ rappelle qu'elle a dénoncé à plusieurs reprises 
l’absence d'exécution par les agents de la force publique des ordonnances judiciaires rendues 
par les Chambres criminelles spécialisées (CCS)48. En particulier, des accusés ne se sont pas 
présentés à leur procès devant les CCS et les forces de l'ordre n'ont pas exécuté les mandats 
d’amener et les ordonnances judiciaires connexes visant à les contraindre à comparaître. Un 
tel manquement constitue une obstruction à la justice et prive les victimes de violations des 
droits de l'homme de l'accès à la justice et à des recours effectifs. À cet égard, il ne s'agit pas 
seulement d'un coup porté au processus de justice transitionnelle et à la lutte contre l'impunité 
pour les violations graves des droits de l'homme, mais aussi d'une violation manifeste de l'État 
de droit : cela frappe au cœur du bon fonctionnement de la séparation des pouvoirs en privant 
les décisions du pouvoir judiciaire de tout effet. 
Dans le cadre de ces recommandations de l’IVD, la CIJ exhorte les autorités tunisiennes à :
I.  Habiliter le CSM à consulter directement le pouvoir législatif dans l’établissement 
du budget de la justice et accorder au CSM un certain contrôle sur le budget de la 
justice ;
II.  Garantir  des  ressources  humaines  et  financières  suffisantes  et  l'autonomie 
financière  de  la  justice  et  assurer  des  conditions  de  travail  et  de  rémunération 
adéquates  aux  magistrats,  y  compris  des  prestations  de  sécurité  sociale  et  une 
pension  de  retraite  ;
III.  Interdire  toute  influence  ou  ingérence  indue  ou  inappropriée,  quelle  qu'en  soit 
la source, et sanctionner de manière appropriée tout comportement de ce type 
ainsi  que  toute  tentative  de  porter  atteinte  à  l'indépendance  et  à  l'impartialité 
des  magistrats  ;
IV.  Veiller à ce que les décisions et ordonnances judiciaires soient pleinement exécutées 
et  traiter  et  sanctionner  de  manière  adéquate  les  tentatives  d'obstruction  à  la 
justice. 
45.  Rapport du Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, UN Doc. A/HRC/11/41 (2009), 
par.  39  ;  Directives  et  Principes  de  la  CADHP,  Section  A,  Principe  4(v)  ;  Recommandation  CdM  (2010)12, 
par.  40  ;  CIJ,  Principes  internationaux  sur  l'indépendance  et  la  redevabilité  des  juges,  des  avocats  et  des 
procureurs  :  Guide  pratique  n°  1,  Genève,  2007,  p.  33  (disponible  en  anglais  sur  https://www.icj.org/
wp-content/uploads/2012/04/International-Principles-on-the-Independence-and-Accountability-of-Judges-
Lawyers-and-Procecutors-No.1-Practitioners-Guide-2009-Eng.pdf  et  en  arabe  sur  https://www.icj.org/wp-
content/uploads/2013/08/PGJL_Arabic_ElecDist.pdf,  dernière  consultation  le  30  novembre  2021).
46. Résumé exécutif, p. 596.
47.  Résumé exécutif, p. 596. Voir aussi p. 594, où l'IVD recommande de placer les officiers de police judiciaire 
sous la tutelle du ministère public.
48.  Voir  par  ex.  https://www.icj.org/tunisia-prosecutors-are-failing-victims-of-serious-human-rights-violations/ 
(disponible  en  anglais)  ;  https://www.icj.org/wp-content/uploads/2020/12/Tunisia-SCC-assess-Advocacy-
Analysis-brief-2020-FRA.pdf ; https://www.icj.org/wp-content/uploads/2021/03/Tunisia-Special-Procedures-
Joint-Submission-2021-FRE.pdf. 
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
 | 13   
iii. Assurer l'indépendance du Ministère public
Dans  le  système  pénal  tunisien,  le  Ministère  public  est  l'autorité  responsable  et  habilitée  à 
mettre en mouvement et exercer l'action publique. En vertu du Code de procédure pénale, le 
Ministère public est également chargé de veiller à l'application de la loi, y compris l’exécution 
des décisions de justice49. Comme détaillé dans le rapport précité de la CIJ sur l'indépendance 
de la justice en Tunisie, les normes internationales visent à garantir que les procureurs jouent un 
rôle effectif dans l'administration de la justice, notamment en assurant le droit de l'accusé à un 
procès équitable, la protection des droits de l'homme et l'état de droit. Dans ce contexte, la CIJ 
souligne que, selon les normes internationales, l'indépendance ou l'autonomie du Ministère public 
n'est pas de nature aussi impérative que celle des juges du siège. Les normes internationales 
reconnaissent  et  prennent  en  compte  le  fait  que  le  statut  et  le  rôle  des  procureurs  diffèrent 
dans certains systèmes juridiques nationaux et que leur rôle a trait à la politique de l'État en 
matière de poursuites. Cependant, les procureurs sont au moins tenus d'agir avec impartialité 
et objectivité, bien qu'il y ait une tendance croissante vers une exigence d'indépendance50.
La Constitution de 2014 a modifié le statut du Ministère public en soulignant dans l'article 115 
qu’il « fait partie de la justice judiciaire et bénéficie des mêmes protections constitutionnelles », 
dont l'indépendance51. Toutefois, la même disposition précise que les magistrats du Ministère 
public exercent leurs fonctions « dans le cadre de la politique pénale de l'État. »
L'IVD  a  recommandé  d'«  adopter  une  loi  organique  garantissant  l'indépendance  du  pouvoir 
judiciaire,  conformément  à  l'article  115  de  la  Constitution,  en  particulier  l'indépendance  du 
parquet par rapport au Ministère de la Justice »52, soulignant ainsi la nécessité d'intégrer ces 
principes  constitutionnels  dans  les  lois  régissant  le  Ministère  public.  En  effet,  le  Statut  de  la 
magistrature  et  le  Code  de  procédure  pénale  doivent  encore  être  modifiés  pour  assurer  la 
conformité  à  la  Constitution  à  cet  égard. 
Si,  comme  décrit  ci-dessus,  la  loi  organique  n°  2016-34  soumet  désormais  la  carrière  et  la 
discipline de tous les magistrats, y compris les procureurs, à l'autorité générale du CSM, la loi 
n° 67-29 du 14 juillet 1967 relative à l'organisation judiciaire53 reste en vigueur dans la mesure 
où elle n'a pas été modifiée par des lois ultérieures54. En particulier, en vertu de l'article 15 de 
cette  loi,  les  magistrats  du  Ministère  public  restent  placés  sous  la  direction  et  le  contrôle  de 
leurs chefs hiérarchiques et sous l'autorité du ministre de la Justice, ce qui illustre une fois de 
plus la nécessité d'un nouveau statut consolidé des juges conforme aux normes internationales 
et abrogeant les lois obsolètes, comme la CIJ l'a recommandé ci-dessus.
Par ailleurs, les articles 21 à 23 du Code de procédure pénale55 permettent au Ministère de la 
Justice de donner des instructions au Procureur Général, y compris pour engager des poursuites 
dans des dossiers individuels, que le ministère public est tenu de suivre dans ses réquisitions 
écrites, bien qu'il puisse librement développer des observations orales lors des audiences. La 
CIJ  considère  que  le  projet  de  réforme  du  Code  de  procédure  pénale  devrait  modifier  ces 
dispositions  conformément  aux  normes  internationales.
Dans le cadre de cette recommandation de l’IVD, la CIJ exhorte les autorités tunisiennes à :
I.  Modifier  la  loi  n°  67-29,  en  particulier  l'article  15,  afin  de  supprimer  l'autorité 
hiérarchique du ministre de la justice sur le Ministère public, y compris la possibilité 
de contrôler et de diriger les procureurs. 
49. De l'art. 20 et 22 du Code de procédure pénale.
50.  Rapport de la CIJ sur l’indépendance de la justice en Tunisie, pp. 68-72.
51. Comme inscrit dans l'art. 102 de la Constitution.
52. Résumé exécutif, p. 595.
53.  Loi  n°  67-29  relative  à  l’organisation  judiciaire,  au  Conseil  supérieur  de  la  magistrature  et  au  statut  de  la 
magistrature.
54.  Conformément à l'art. 20 de la loi organique n° 2013-13 du 02 mai 2013, les dispositions de la loi n° 67-29 
qui n'ont pas été modifiées ou abrogées par ladite loi organique restent en vigueur. De même, l'art. 78 de la 
- Plus de références et documents sur Legaly Docsloi organique n° 2016-34 prévoit que sauf contradiction avec ladite loi organique, les dispositions de la loi n° 
67-29 restent applicables.
 55. Loi n° 68-23 du 24 juillet 1968, modifiée par la loi n° 2016-5 du 16 février 2016.
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
14 |    
II.  Réformer  le  Code  de  procédure  pénale  pour  garantir  sa  pleine  conformité  avec 
la  Constitution  et  les  normes  internationales,  notamment  en  supprimant  toute 
référence  à  l'autorité  du  ministre  de  la  Justice  sur  le  Ministère  public  et  à  son 
pouvoir de donner des instructions dans des dossiers individuels et en limitant le 
rôle  du  ministre  de  la  Justice  à  la  possibilité  d'informer  le  procureur  compétent 
de la commission d'un délit et de coordonner avec les chefs du ministère public la 
mise en œuvre de la politique pénale de l'État. 
iv. Réformer le système de justice militaire
L'article 110 de la Constitution dispose : 
« Les catégories de tribunaux sont créées par loi. La création de tribunaux d’exception ou 
l’édiction de procédures dérogatoires susceptibles d’affecter les principes du procès équitable 
sont  interdites.  Les  tribunaux  militaires  sont  compétents  pour  connaître  des  infractions 
à  caractère  militaire.  La  loi  détermine  leurs  compétence,  composition,  organisation,  les 
procédures suivies devant eux et le statut général de leurs magistrats. »
L'IVD a formulé les recommandations suivantes :  
« Créer des chambres judiciaires spécialisées dans les tribunaux de première instance pour 
examiner les crimes commis au sein des casernes ou leur environnement par des militaires. 
Proscrire la comparution de civils devant la justice militaire conformément aux dispositions 
de  la  Constitution  et  aux  normes  internationales.  [À  titre]  transitoire,  réviser  le  Code 
de  justice  militaire  pour  rendre  les  tribunaux  militaires  compétents  exclusivement  dans 
l’examen des crimes commis par les militaires au sein de la caserne ou son environnement, 
conformément à l'article 110 de la Constitution »56.
Le Code de justice militaire (CJM)57 n'a pas encore été réformé comme l'exige l'article 110 de 
la Constitution. La CIJ considère que le CJM n'est pas conforme aux normes internationales en 
matière  d'indépendance  judiciaire  et  que  la  Constitution  et  la  recommandation  de  l'IVD  sont 
insuffisantes à cet égard.
Comme cela a été exposé plus en détail dans le rapport précité de la CIJ sur l'indépendance 
de  la  justice  en  Tunisie58,  bien  que  les  magistrats  militaires  soient  censés  être  indépendants 
de  la  hiérarchie  militaire59,  les  tribunaux  militaires  ne  peuvent  pas  être  considérés  comme 
indépendants et impartiaux, comme l'exige, entre autres, le droit de toute personne accusée 
d'une  infraction  pénale  à  «  à  ce  que  sa  cause  soit  entendue  équitablement  et  publiquement 
par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi » garanti par l'article 14 
du PIDCP, pour les raisons suivantes. Premièrement, l'exécutif, en particulier le ministre de la 
Défense,  contrôle  le  processus  de  recrutement  et  de  nomination  des  magistrats  militaires60. 
Deuxièmement, les membres du Ministère de la Défense, y compris le ministre de la Défense 
qui  siège  en  tant  que  Président,  dominent  le  Conseil  de  la  magistrature  militaire,  qui  est  le 
conseil  de  discipline  des  magistrats  militaires61.  Troisièmement,  les  procureurs  et  les  juges 
d'instruction  opérant  dans  les  tribunaux  militaires  demeurent  des  membres  de  l'armée  et 
restent donc incorporés dans la chaîne de commandement militaire. Ils ne disposent donc pas 
56.  Résumé  exécutif,  p.  595.  Voir  aussi  p.  577,  où  l'IVD  a  regretté  que  les  réformes  adoptées  à  la  suite  de 
la  révolution  n'interdisent  pas  aux  tribunaux  militaires  de  juger  des  civils  et  que  «  [d]e  nombreux  civils 
continuent  d'être  poursuivis  et  déférés  devant  des  tribunaux  militaires  pour  des  infractions  notamment 
relatives  à  l'exercice  de  la  liberté  d'expression  ».
57.  Tel que promulgué par le décret n° 9 du 10 janvier 1957 et modifié notamment par les décrets-lois n° 2011-
69,  modifiant  et  complétant  le  code  de  justice  militaire,  et  2011-70,  relatif  à  l’organisation  de  la  justice 
militaire et au statut des magistrats militaires, du 29 juillet 2011.
58.  Rapport de la CIJ sur l’indépendance de la justice en Tunisie, pp. 50-64.
59. Art. 5 du Décret-loi n° 2011-70.
60.  La  liste  des  candidats  autorisés  à  se  présenter  au  concours  de  recrutement  des  magistrats  militaires  est 
arrêtée par une commission créée par arrêté du ministre de la Défense et présidée par le procureur général 
directeur de la justice militaire (Décret-loi n° 2011-70, art. 10). Les modalités et le programme du concours 
sont également fixés par arrêté du ministre de la Défense (Décret-loi n° 2011-70, art. 11). Cependant, le 
Conseil  judiciaire  du  CSM  a  rendu  une  décision  le  14  juillet  2020,  selon  laquelle  la  désignation  des  juges 
judiciaires dans les tribunaux militaires relève de sa compétence, excluant ainsi le rôle de l'exécutif dans la 
nomination des magistrats de l’ordre judiciaire prévu par l'art. 2 du décret-loi n° 2011-70.
61. La composition du Conseil de la magistrature militaire est fixée à l'art. 14 du décret-loi n° 2011-70.
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
 | 15   
de  l'indépendance  et  de  l'impartialité  requises,  conformément  aux  normes  internationales62.
En outre, comme le détaille le rapport de la CIJ sur les droits des victimes de violations des 
droits de l'homme en Tunisie63, IJ sur les droits des victimes de violations des droits de l'homme 
en Tunisie, les dispositions du CJM et de la loi n° 82-70 du 6 août 1982 portant statut général 
des  Forces  de  sécurité  intérieure  (FSI)  qui  confèrent  aux  tribunaux  militaires  la  compétence 
pour  connaître  d’infractions  non  militaires,  y  compris  des  violations  flagrantes  des  droits  de 
l'homme  et  des  infractions  commises  par  des  civils,  sont  contraires  au  droit  et  aux  normes 
internationaux64.  Selon  l'article  1er  du  CJM,  la  compétence  ratione  materiae  des  tribunaux 
militaires  couvre  le  champ  potentiellement  large  des  «  affaires d’ordre  militaire  ».  L'article  5 
du CJM précise que les tribunaux militaires connaissent tant des infractions de droit commun 
commises par les militaires que des infractions de droit commun commises contre les militaires, 
tandis que l'article 8 prévoit expressément que les tribunaux militaires peuvent juger des civils 
accusés de telles infractions. 
En  outre,  selon  l'article  22  de  la  loi  n°  82-70,  les  tribunaux  militaires  sont  compétents  pour 
juger les affaires impliquant « les agents de Forces de Sécurité Intérieure ou des faits survenus 
dans ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions lorsque les faits incriminés ont trait à leurs 
attributions dans les domaines de la sécurité intérieure ou extérieure de l’État ou au maintien de 
l'ordre sur la voie publique et dans les lieux publics et entreprises publiques ou privées, et ce au 
cours ou à la suite des réunions publiques, cortèges, défilés, manifestations et attroupements. 
» Cette disposition permet notamment de traduire des civils devant la justice militaire.
Dans son rapport sur la Tunisie, le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, 
de la réparation et des garanties de non-répétition a recommandé aux autorités tunisiennes de 
« s’assurer que les tribunaux militaires ne sont compétents que pour juger des militaires qui ont 
commis des infractions militaires »65. En effet, les tribunaux militaires manquent d'impartialité 
pour mener des enquêtes sur les violations flagrantes des droits de l'homme. C'est notamment 
le  cas  lorsque  les  auteurs  présumés  des  violations  des  droits  de  l'homme  faisant  l'objet  de 
l'enquête sont eux-mêmes des militaires66.
A  cet  égard,  la  CIJ  considère  que  la  recommandation  susmentionnée  de  l’IVD  de  rendre,  à 
titre transitoire, les tribunaux militaires compétents exclusivement pour les « crimes commis 
par  les  militaires  au  sein  de  la  caserne  et  son  environnement  »  ne  respecte  pas  les  normes 
internationales en matière de droits de l'homme susmentionnées - pas plus que l'article 110 
de la Constitution - car elles n'excluent pas les violations graves des droits de l'homme de la 
compétence des tribunaux militaires et ne limitent pas la compétence de ces derniers aux seules 
infractions militaires. Par exemple, de tels crimes peuvent inclure des violations des droits de 
62.  Rapport du Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, UN Doc A/HRC/20/19 (2012), 
par. 57.
63.  Rapport de la CIJ, Illusory Justice, Prevailing Impunity Lack of Effective Remedies and Reparation for Victims 
of  Human  Rights  Violations  in  Tunisia,  13  mai  2016,  pp.  96-103,  disponible  en  anglais  sur  https://www.
icj.org/wp-content/uploads/2016/05/Tunisia-Remedies-and-reparations-Publications-Thematic-report-
2016-ENG.pdf,  dernière  consultation  le  6  octobre  2021,  et  en  arabe  sur  https://www.icj.org/wp-content/
dernière 
uploads/2016/05/Tunisia-Remedies-and-reparations-Publications-Thematic-report-2016-ARA.pdf, 
consultation  le  30  novembre  2021.
64.  Voir  par  ex.  Projet  de  principes  sur  l'administration  de  la  justice  par  les  tribunaux  militaires  (les  Principes 
Decaux), UN Doc. E/CN.4/2006/58 (2006), Principes 5 et 9 ; Directives et Principes de la CADHP, Principe L(a) 
; Ensemble de principes actualisés pour la protection et la promotion des droits de l'homme par la lutte contre 
l'impunité, E/CN.4/2005/102/Add.1, 2005, Principe 29. Voir aussi CIJ, Military jurisdiction and international 
law:  military  courts  and  gross  human  rights  violations,  Vol.  I,  Genève,  2004,  disponible  en  anglais  et  en 
arabe  sur  https://www.icj.org/military-jurisdiction-and-international-law-military-courts-and-gross-human-
rights-violations-vol-1/.
65.  Rapport du Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de 
non-répétition, Mission en Tunisie (11-16 novembre 2012), UN Doc A/HRC/24/42/Add.1 (2013), par. 85(c).
66.  Voir,  par  exemple,  Cour  européenne  des  droits  de  l'homme,  Voicilescu  c.  Roumanie,  requête  n°  5325/03, 
arrêt du 3 février 2009. Voir également Comité des droits de l’homme, Observations finales sur la Colombie, 
UN Doc. CCPR/C/79/Add.76, 5 mai 1997, par. 19, 23, 32, 34 ; Observations finales sur le Venezuela, 26 avril 
2001, UN Doc. CCPR/CO/71/VEN, par. 8 ; Observations finales sur le Kirghizstan, 24 juillet 2000, UN Doc. 
CCPR/CO/69/KGZ,  par.  7  ;  Observations  finales  sur  le  Chili,  30  mars  1999,  UN  Doc.  CCPR/C/79/Add.104, 
par. 10 ; Observations finales sur la Biélorussie, 19 novembre 1997, UN Doc. CCPR/C/79/Add.86, par. 9 ; 
Observations  finales  sur  la  Macédoine,  18  août  1998,  UN  Doc.  CCPR/C/79/Add.96,  par.  9  ;  Observations 
finales  sur  la  Macédoine,  18  août  1998,  UN  Doc.  CCPR/C/79/Add.96,  par.  10  ;  Observations  finales  sur  la 
France, 4 août 1997, UN Doc. CCPR/C/79/Add.80, par. 16 et s. ; et Rapport du CDH à l'Assemblée générale, 
35ème session, UN Doc. A/35/40 (1980), par. 249 et s.
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
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l'homme, ainsi que des crimes ordinaires, dont aucun ne constituerait une infraction purement 
militaire. Par conséquent, la CIJ considère que cette recommandation de l'IVD est inacceptable, 
même en tant que mesure temporaire et transitoire.
De plus, il n'est pas clair  si  les  « Chambres judiciaires spécialisées au sein des tribunaux de 
première  instance  »  que  l'IVD  propose  d'établir  à  plus  long  terme  pour  juger  de  tels  crimes 
répondraient aux normes d'un tribunal indépendant et impartial. Il n'est pas non plus expliqué 
ce qui nécessiterait l'établissement de chambres spécialisées, même au sein de tribunaux civils 
ordinaires,  pour  de  tels  crimes  commis  par  les  militaires,  surtout  si  ceux-ci  englobent  des 
violations  des  droits  de  l'homme.
A  la  lumière  de  ce  qui  précède,  la  CIJ  recommande  que  le  système  de  justice  militaire  soit 
réformé  de  manière  à  :
I. Garantir l'indépendance et l'impartialité des tribunaux militaires ;
II.  Limiter la compétence des tribunaux militaires au personnel militaire et veiller à ce 
que les tribunaux militaires n’aient pas compétence pour juger des civils, même si 
la victime est un membre des forces armées ou de sécurité ou si l'accusé est censé 
avoir commis l'infraction avec un membre des forces armées ;
III.  Restreindre  expressément  la  compétence  des  tribunaux  militaires  aux  affaires 
impliquant  des  membres  de  l'armée  pour  des  infractions  militaires  présumées 
(en  veillant  à  ce  que  la  perpétration  de  violations  graves  des  droits  de  l'homme 
soit  explicitement  exclue  de  ces  infractions)  et,  à  cette  fin,  prendre  les  mesures 
suivantes  :
     (i).  Limiter en conséquence les infractions énoncées à l'article 5 du CJM ; 
     (ii).  Exclure explicitement la compétence des tribunaux militaires dans les affaires 
impliquant  des  violations  des  droits  de  l'homme  et  des  crimes  de  droit 
international  tels  que  le  génocide,  les  disparitions  forcées,  les  exécutions 
extrajudiciaires  ou  la  torture,  les  crimes  de  guerre  et  les  crimes  contre 
l'humanité  ;
     (iii).  Garantir  que  les  allégations  de  violations  des  droits  de  l'homme  commises 
par les militaires ou les forces armées fassent l'objet d'une enquête par les 
autorités civiles ; et
     (iv).  Modifier  l'article  22  de  la  loi  n°  82-70  sur  les  FSI  afin  que  tous  les  crimes 
commis par les FSI ou par des civils soient jugés par des tribunaux ordinaires.
IV.  S'assurer  que  les  magistrats  qui  siègent  dans  les  tribunaux  militaires  sont 
indépendants  et  impartiaux  et  qu'ils  disposent  d'un  statut  garantissant  leur 
indépendance  et  leur  impartialité.  En  particulier,  à  cette  fin,  veiller  à  ce  que  :
     (i).  La sélection des magistrats qui siègent dans les tribunaux militaires soit fondée 
sur des critères clairs, notamment les qualifications juridiques, l'expérience et 
l'intégrité ; 
     (ii).  Le CSM joue un rôle dans la sélection des magistrats des tribunaux militaires 
et que le processus de sélection soit indépendant et impartial et conforme aux 
exigences d'indépendance et d'impartialité de la justice ; 
     (iii).   Les  magistrats  siégeant  dans  les  tribunaux  militaires  bénéficient  de 
l'inamovibilité et doivent répondre, dans le cadre d'une procédure équitable, 
des infractions à un code de déontologie clairement défini, conformément aux 
normes  internationales  en  matière  de  déontologie  judiciaire  ;  et 
     (iv).  Les magistrats siégeant dans les tribunaux militaires restent en dehors de la 
chaîne de commandement militaire et de l'autorité militaire en ce qui concerne 
les questions relatives à l'exercice de toute fonction judiciaire.
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
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III.  Conclusion
La  Constitution  de  2014  et  la  loi  organique  2016-34  constituent  un  progrès  significatif  dans 
la limitation de l'influence du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire et dans la garantie de 
l’indépendance  de  celui-ci  par  le  biais  du  CSM.  Pourtant,  l'analyse  des  lois  en  vigueur  à  la 
lumière  des  recommandations  de  l’IVD  illustre  la  nécessité  d'une  réforme  complète  des  lois 
contraires à la Constitution et aux normes internationales, ainsi que l'adoption d’autres mesures 
demandées  par  l’IVD,  comme  autant  d'étapes  importantes  supplémentaires  pour  établir  et 
maintenir  l'indépendance  et  l'intégrité  de  la  justice.
La prise de pouvoir par le Président et l'utilisation abusive de mesures d’exception montrent qu'il 
est plus important que jamais que le pouvoir judiciaire puisse agir comme un contrôle sur les 
autres branches de l'État et qu'il soit correctement habilité à freiner leurs abus de pouvoir. Cela 
souligne la pertinence des recommandations de réformes de l'IVD en tant que garanties de non-
récurrence. Parallèlement à la mise en place de la Cour constitutionnelle, qui n'a que trop tardé, 
les réformes nécessaires pour garantir pleinement l'indépendance du pouvoir judiciaire, telles 
que décrites dans la présente note, doivent être rapidement adoptées par le corps législatif une 
fois que l'ordre constitutionnel est rétabli.
Toutefois,  les  réformes seules  ne  suffisent  pas  :  il  est  également nécessaire de  faire  évoluer 
les  mentalités  des  acteurs  de  la  justice  afin  de  préserver  leur  indépendance  et  de  regagner 
la  confiance  du  public,  ce  qui  ne  peut  se  faire  que  par  une  pleine  autonomisation  et  une 
responsabilisation accrue. À cet égard, en tant que gardien de l'indépendance de la justice, le 
CSM doit jouer pleinement le rôle qui lui a été confié, ce qui est d'autant plus important dans 
les  circonstances  politiques  actuelles.
Tunisie : Promouvoir les recommandations de l'Instance Vérité et Dignité sur la réforme de la justice
Commissaires de la CIJ
Mars 2021 (pour la liste actualisée : www.icj.org/commission) 
Président 
Prof. Robert Goldman, États-Unis
Vice-Présidents 
Prof. Carlos Ayala, Venezuela
Juge Radmila Dragicevic-Dicic, Serbie
Comité exécutif
Juge Sir Nicolas Bratza, Royaume-Uni
Dame Silvia Cartwright, Nouvelle-Zélande
(Présidente) Mme Roberta Clarke, Barbade-Canada
M. Shawan Jabarin, Palestine
Mme Hina Jilani, Pakistan
Juge Sanji Monageng, Botswana
M. Belisário dos Santos Júnior, Brésil
Autres membres de la Commission
Prof. Kyong-Wahn Ahn, République de Corée
Juge Chinara Aidarbekova, Kirghizistan
Juge Adolfo Azcuna, Philippines
Mme Hadeel Abdel Aziz, Jordanie
M. Reed Brody, États-Unis
Juge Azhar Cachalia, Afrique du Sud
Prof. Miguel Carbonell, Mexique
Juge Moses Chinhengo, Zimbabwe
Prof. Sarah Cleveland, États-Unis
Juge Martine Comte, France
M. Marzen Darwish, Syrie
M. Gamal Eid, Égypte
M. Roberto Garretón, Chili
Mme Nahla Haidar El Addal, Liban
Prof. Michelo Hansungule, Zambie
Mme Gulnora Ishankanova, Ouzbékistan
Mme Imrana Jalal, Fidji
Juge Kalthoum Kennou, Tunisie
Mme Jamesina Essie L. King, Sierra Leone
Prof. César Landa, Pérou
Juge Ketil Lund, Norvège
Juge Qinisile Mabuza, Eswatini
Juge José Antonio Martín Pallín, Espagne 
Prof. Juan Méndez, Argentine
Juge Charles Mkandawire, Malawi
Juge Yvonne Mokgoro, Afrique du Sud
Juge Tamara Morschakova, Russie
Juge Willly Mutunga, Kenya
Juge Egbert Myjer, Pays-Bas
Juge John Lawrence O’Meally, Australie
Mme Mikiko Otani, Japon
Juge Fatsah Ouguergouz, Algérie
Dr Jarna Petman, Finlande
Prof. Mónica Pinto, Argentine
Prof. Victor Rodriguez Rescia, Costa Rica
M. Alejandro Salinas Rivera, Chili
M. Michael Sfard, Israël 
Prof. Marco Sassoli, Italie-Suisse
Juge Ajit Prakash Shah, Inde
Juge Kalyan Shrestha, Népal 
Mme Ambiga Sreenevasan, Malaisie 
Juge Marwan Tashani, Libye
M. Wilder Tayler, Uruguay
Juge Philippe Texier, France
Juge Lillian Tibatemwa-Ekirikubinza, Ouganda
Juge Stefan Trechsel, Suisse
Prof. Rodrigo Uprimny Yepes, Colombie
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