DIRECTION GÉNÉRALE DES POLITIQUES EXTERNES DE L'UNION 
DÉPARTEMENT THÉMATIQUE 
ÉTUDE 
Les politiques de l’Union européenne  
en Tunisie, avant et après la révolution 
RÉSUMÉ 
l’Union  européenne  envers 
Cette  étude  examine  l’évolution  et  les  répercussions  possibles  des  politiques  de 
l’Union européenne en Tunisie avant et après la révolution sous un angle analytique 
novateur.  À  cette  fin,  ce  document  décrit  les  étapes  importantes  des  cadres  de 
coopération  établis  entre  l’Union  européenne  et  la  Tunisie  ainsi  que  les  politiques 
mises  en  place.  L’incidence  de  ces  politiques  avant  la  révolution  et  leur  évolution 
ultérieure  sont  analysées  afin  de  dégager  les  causes  et  les  conséquences  du 
changement  d’attitude  de 
les 
conclusions d’une consultation des protagonistes de la politique tunisienne et de la 
société  civile  viennent  compléter  la  présente  analyse.  Avant  que  la  révolution  n’ait 
lieu, les relations entre l’Union européenne et la Tunisie se limitaient à des échanges 
d’intérêts commerciaux, financiers et stratégiques, comme c’est le cas pour la plupart 
des programmes d’appui au développement dans le monde. La révolution tunisienne 
a  déclenché  deux  mouvements  fondamentaux,  une  démocratisation  et  une 
déstabilisation,  qui  ont  eu  des  répercussions  considérables  sur  la  relation  entre 
l’Union européenne et la Tunisie. Ces changements ont ouvert la porte à de nouvelles 
synergies et complémentarités entre les projets politiques des deux partenaires et ont 
appelé à une augmentation du soutien financier, ce qui a donné l’occasion à l’Union 
européenne  de  renforcer  la  coopération  dans  un  esprit  gagnant-gagnant,  de 
consolider le codéveloppement et d’approfondir l’intégration.
la  Tunisie.  Enfin, 
EP/EXPO/B/AFET/2015/04 
Décembre 2016 - ST\1108807FR - PE578.002 
FR
© Union européenne, 2016 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Cette étude a été réalisée à la demande de la commission des affaires étrangères du Parlement européen. 
Rédaction achevée le 21 avril 2016. 
Version linguistique originale : EN 
Document traduit en FR. 
Imprimé en Belgique. 
Auteurs : Rym AYADI, professeur de commerce international et de finance, directrice de l’Institut international des 
coopératives  d’HEC  Montréal,  présidente  fondatrice  d’Euro-Mediterranean  Economists  Association  (EMEA),  et 
Emanuele SESSA, chercheur auprès d’Euro-Mediterranean Economists Association. 
Fonctionnaire responsable : Benjamin REY 
Tout commentaire est le bienvenu. Veuillez contacter Benjamin REY : benjamin.rey@europarl.europa.eu. 
Pour obtenir des exemplaires imprimés, veuillez envoyer une demande à l’adresse suivante : 
poldep-expo@europarl.europa.eu. 
Cette étude sera publiée sur le site web du Parlement européen, dans la base de données en ligne « Think Tank ». 
Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement la position 
officielle du Parlement européen. Ce document est destiné aux députés du Parlement européen et à leurs collaborateurs 
dans  le  cadre  du  travail  parlementaire.  La  reproduction  et  la  traduction  à  des  fins  non  commerciales  sont  autorisées, 
moyennant  mention  de  la  source,  information  préalable  du  Parlement  européen  et  transmission  d’un  exemplaire  à 
celui-ci. 
ISBN 978-92-846-0364-0 (pdf) 
doi: 10.2861/58672 (pdf) 
ISBN 978-92-846-0363-3 (papier) 
doi: 10.2861/613293 (papier) 
Numéro de catalogue : QA-01-16-422-FR-N (pdf) 
Numéro de catalogue : QA-01-16-422-FR-C (papier) 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Table des matières 
1 Synthèse 
2
Introduction et raisonnement 
3 Les politiques de l’Union européenne, avant et après 
la révolution en Tunisie 
3.1 Coopération bilatérale 
3.2 Coopération régionale 
3.3 Autres programmes régionaux 
4
7
10
11
17
19
4 L’évolution et l’incidence des politiques de l’UE depuis 
21
la révolution en Tunisie 
4.1 Incidence des politiques de l’UE avant la révolution tunisienne  23
4.2 Évolution des politiques de l’UE depuis la révolution tunisienne  29
5 Conclusions et recommandations politiques 
Références 
Annexe : Questionnaire 
41
45
49
3 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
1
Synthèse 
La  Tunisie  a  été  un  partenaire  fondamental  de  l’Union  européenne  depuis  les  débuts  du  partenariat 
euro-méditerranéen, lancé en 1995 dans le cadre du processus de Barcelone. Elle a été le premier pays du 
Sud  de  la  Méditerranée  à  signer  un  accord  d’association,  en 1998,  et  un  plan  d’action,  en 2005. 
Progressivement,  l’ampleur  et  la  portée  du  partenariat  de  la  Tunisie  avec  l’Union  ont  augmenté, 
parallèlement  à  son  importance  stratégique  pour  le  pays.  La  Tunisie  est  l’État  voisin  de  l’Union  qui  a 
participé le plus activement, dans un premier temps, à l’avancement des négociations sur une zone de 
libre-échange  (ZLE),  puis  à  un  accord  de  libre-échange  complet  et  approfondi  (ALECA)  et  à  la 
collaboration sur le sujet de la sécurité, ce qui prouve l’intérêt commun des deux partenaires à s’occuper 
conjointement des opportunités et des défis majeurs de la région méditerranéenne dans son ensemble. 
Cette  étude  examine  et  évalue  l’évolution  des  politiques  de  l’Union  en  Tunisie,  avant  et  après  la 
révolution,  ainsi  que  leur  incidence.  Le  présent  travail  s’ouvre  premièrement  sur  une  description  des 
étapes importantes des cadres de coopération établis entre l’Union européenne et la Tunisie, ainsi que 
des  politiques  et  programmes  que  ces  cadres  ont  fait  naître.  Deuxièmement,  l’étude  analyse  les 
répercussions  de  ces  politiques  avant  la  révolution  et  leur  évolution  ultérieure  au  moyen  d’un  cadre 
analytique inédit, conçu pour l’occasion, afin de déterminer les causes et les conséquences de la nouvelle 
stratégie de l’Union vis-à-vis de la Tunisie et d’évaluer la valeur ajoutée apportée par ce changement pour 
la  coopération  entre 
les  deux  partenaires.  Troisièmement,  des  témoignages  d’acteurs  clés  du 
gouvernement  tunisien,  du  paysage  politique  et  de  la  société  civile  du  pays,  recueillis  au  moyen  d’un 
questionnaire,  viennent  compléter  la  présente  analyse.  Quatrièmement,  des  conclusions  et  des 
recommandations  politiques  sont  formulées  à  partir  des  analyses  ainsi  que  des  contributions  récoltées 
lors de la consultation. 
Avant la révolution, les relations de l’Union avec ses pays partenaires méditerranéens se cantonnaient en 
général (et plus particulièrement dans le cas du régime autocratique de Ben Ali) à l’échange d’intérêts 
commerciaux,  financiers  et  stratégiques,  conformément  à  la  plupart  des  programmes  d’appui  au 
développement  dans  le  monde.  La  rhétorique  de  l’Union,  vantant  les  mérites  des  principes  de 
démocratie et d’économie de marché en tant que vecteurs de stabilité et de prospérité pour la région, 
n’était  pas  toujours  en  accord  avec  la  mise  en  œuvre  des  politiques  de  l’UE  sur  le  terrain.  Ces
incohérences ont fait le lit des gouvernements autocratiques, comme celui de Ben Ali, et leur ont permis 
de  maintenir  leur  contrôle  sur  l’économie  et  la  société.  En  effet,  l’analyse  révèle  que  les  politiques  de 
l’Union  mises  en  œuvre avant  la  révolution  tunisienne  se  fondaient  sur  et  se  limitaient  à  trois 
concessions fondamentales issues de l’échange d’intérêts avec le régime en place. Les trois concessions 
génériques  retenues  dans  l’analyse  correspondent  aux  trois  axes  principaux  de  coopération,  à  savoir 
politique, économique et socio-culturel, et sont définies dans cette étude en tant que « commerce contre 
aide », « bénéfices contre libertés », et « sécurité contre silence ». 
La  révolution  tunisienne  a  déclenché  deux  processus  fondamentaux,  une  démocratisation  et  une 
déstabilisation, qui ont eu des répercussions considérables sur la relation entre l’Union européenne et la 
Tunisie. Ces changements ont ouvert la porte à de nouvelles synergies et complémentarités entre les 
projets politiques des deux partenaires et ont appelé à une augmentation du soutien financier, ce qui 
a  donné  l’occasion  à  l’Union  européenne  de  renforcer  la  coopération  dans  un  esprit  gagnant-
gagnant,  de  consolider  le  codéveloppement  et  d’approfondir  l’intégration,  conformément  aux 
objectifs  de  la  politique  européenne  de  voisinage  (PEV).  L’Union  a  considérablement  modifié  ses 
politiques et a presque doublé son soutien financier au cours des premières années après la révolution 
afin de saisir cette occasion dans les trois domaines de la coopération. 
L’évolution de la coopération politique entre l’Union et la Tunisie après la révolution se caractérise par 
une  vaste  convergence  des  normes  et  des  valeurs,  mais  également  par  l’apparition  de  nouvelles 
4 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
critiques  et  de  défis  associés.  Dans  les  domaines  de  coopération  pour  lesquels  l’Union  et  la  Tunisie 
partagent  des  intérêts  et  des  valeurs  communes,  tels  que  le  développement  et  la  consolidation  des 
institutions  démocratiques,  le  dialogue  politique  a  pu  être  fortement  renforcé.  En  ce  qui  concerne  les 
domaines de coopération où l’Union a tendance à appuyer ses propres intérêts dans les accords, comme 
c’est  le  cas  pour  les  sujets  liés  à  l’immigration,  de  nombreux  participants  exprimant  leur  opinion  dans 
l’espace  public  forcent  l’Union  à  reconsidérer  sa  façon  de  mener  le  dialogue  politique.  Garantir  la 
cohérence  entre  la  rhétorique  et  la  pratique  des  politiques  de  l’Union  dans  le  pays,  améliorer  la 
coordination transversale entre les domaines de coopération et augmenter la participation lors de 
la  formulation  et  de  l’évaluation  de  la  priorité  des  politiques  permettrait  à  l’Union  d’améliorer 
sensiblement son image auprès des parties prenantes tunisiennes et de créer des conditions propices au 
partage  effectif  de  la  responsabilité  des  mesures  mises  en  œuvre.  Plus  généralement,  construire  des 
coopérations  politiques  sur  la  base  de  synergies  d’intérêts  respectifs  plutôt  que  de  priorités 
communes supposées revient à rester sur des concessions qui se sont déjà révélées difficiles à maintenir 
et qui risqueraient, dans le climat d’instabilité actuel, de saper les conséquences de la révolution. 
Depuis  la  révolution,  il  y  a  une  plus  grande  marge  de  manœuvre  pour  les  réformes  socio-
économiques  dont  le  but  est  de  préparer  le  terrain  pour  la  libéralisation  des  échanges  et  limiter  ses 
effets négatifs à court terme, ce qui permet de préparer une intégration économique accrue et la création 
d’un  ALECA.  D’autre  part,  les  difficultés  socio-économiques  et  budgétaires  persistent  en  raison  de 
l’instabilité  et  de  l’incertitude  dans  lesquelles  est  plongée  la  période  de  transition,  ce  qui  représente 
encore  aujourd’hui  un  défi  de  taille  pour  la  Tunisie.  Cette  situation  complique  l’adoption  de  réformes 
structurelles,  qui  impliquent  potentiellement  des  ajustements  précis  et  dont  la  réussite  requiert  par 
conséquent  le  soutien  de  l’ensemble  de  la  société.  Dans  ce  contexte,  la  présente  étude  avance  qu’il 
convient de promouvoir explicitement les réformes socio-économiques les plus susceptibles d’aboutir à 
des  résultats  concrets  en  matière  de  création  d’emplois  et  de  reconnaître  les  risques  associés  à  un 
avancement  trop  rapide  des  négociations  controversées  portant  sur  un  ALECA,  au  vu  de  la 
situation délicate du pays. 
La portée de la coopération socio-culturelle entre l’Union et la Tunisie a largement augmenté depuis 
la révolution. L’Union a cessé de se focaliser sur le gouvernement pour se tourner vers la société dans son 
ensemble. Cette vision inédite de la coopération socio-culturelle implique un dialogue direct de l’Union 
avec un large éventail de participants. Elle débouche sur de nouvelles perspectives, mais aussi sur de 
nouveaux  problèmes  liés  notamment  aux  incohérences  entre  le  discours  de  l’Union  et  ses  pratiques 
politiques ainsi que les critiques formulées sur ce sujet par une société civile active et exigeante. 
Recommandations politiques 
• L’Union  devrait  prêter  attention  à  l’écart  existant  entre  les  perceptions  et  la  réalité  sur  le  terrain 
lorsqu’elle exporte sa vision normative et se doit de l’adapter à la convergence générale des normes 
et des valeurs dans le cas des pays qui ont connu une révolution, comme la Tunisie. Les incohérences 
permanentes entre la rhétorique de la politique de voisinage de l’Union dans les pays qui n’avaient 
pas  encore  connu  de  révolution  ont  progressivement  entamé  sa  légitimité  aux  yeux  d’un  grand 
nombre  d’acteurs  participant  aujourd’hui  au  dialogue  politique.  Une  nouvelle  stratégie,  fondée  sur 
les complémentarités, les synergies gagnantes-gagnantes et le codéveloppement, devrait peu à peu 
voir  le  jour.  Afin  d’optimiser  l’incidence  des  politiques  de  l’Union  sur  le  terrain,  une  évaluation 
politique,  économique  et  sociale  complète  doit  être  menée,  dans  la  mesure  du  possible,  avec  les 
parties concernées. 
5 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
• L’approche universelle de la politique de voisinage de l’Union, selon laquelle l’aide apportée aux pays 
partenaires  est  fournie  sur  la  base  d’un  principe  de  différenciation  relativement  limité,  doit  être 
réexaminée pour la Tunisie. Ce pays s’est lancé corps et âme sur la voie de la démocratie, processus 
qui s’accompagne d’une série d’effets déstabilisateurs exigeant des mesures de soutien ad hoc, une 
évaluation  bien  plus  précise  des  priorités  parmi  ces  mesures,  l’amélioration  de  la  coordination 
transversale des différents domaines de coopération et un calendrier plus flexible. Cette modification 
de  la  coopération  avec  la  Tunisie  respecterait  la  déclaration  politique  en  faveur  d’un  partenariat 
privilégié  formulée  en 2012.  Il  convient  de  fournir  de  nouvelles  perspectives  au  pays.  Le  principe 
« donner  plus  pour  recevoir  plus »  pourrait  être  interrompu  lorsque  la  Tunisie  aura  rempli  une  liste 
d’exigences liées aux réformes politiques, économiques et sociales à mettre en place pour garantir la 
convergence avec ce que l’on peut appeler « démocraties modernes » et pourra profiter d’une telle 
interruption. Une telle mesure aboutirait à un partenariat équilibré et pourrait inciter d’autres pays du 
Sud de la Méditerranée à suivre un processus similaire. 
• L’Union devrait agir avec détermination et augmenter son soutien financier ainsi que son assistance 
technique  à  la  Tunisie  pour  que  cette  dernière  soit  en  mesure  de  répondre  aux  besoins  politiques, 
économiques  et  sociaux  urgents  et  maximiser 
les  chances  de  succès  du  processus  de 
démocratisation  et  de  stabilisation  progressive  du  pays.  Une  telle  action  doit  être  organisée  en 
collaboration  et  en  coordination  étroite  avec  les  partenaires  internationaux.  La  Tunisie  pourrait 
devenir  un  exemple  d’autodétermination  réussie  pour  toute  la  région  du  Sud  de  la  Méditerranée 
mais  présente  également  le  risque  de  basculer  sous  la  pression  de  la  radicalisation  (le  pays  est  à 
l’heure  actuelle  le  pourvoyeur  principal  de  combattants  étrangers)  et  l’influence  de  la  Libye,  son 
voisin  instable.  Il  est  dans  l’intérêt  de  l’Union  de  continuer  à  augmenter  son  soutien  et  de  faire 
pencher la balance vers la démocratisation et la stabilisation, car le sort du pays est essentiel pour la 
sécurité et la stabilité en Europe. 
• Du  point  de  vue  politique,  l’Union  se  doit  de  mieux  exploiter  les  synergies  existantes  entre  les 
projets  politiques  tunisien  et  européen,  en  améliorant  l’appropriation  commune  du  dialogue 
politique  et  en  allouant  spécifiquement  davantage  de  fonds  à  l’amélioration  de  l’entente  et  du 
consensus sur les politiques qui devront à l’avenir être mises en œuvre dans l’ensemble de la société. 
Si  l’Union  décide  au  contraire  de  suivre  une  ligne  de  conduite  unilatérale  et  normative  qui  ne 
respecte  pas  les  différentes  vues  du  paysage  politique  tunisien,  elle  pourrait  rater  l’occasion 
présentée  par  la  révolution  tunisienne  d’améliorer  la  coopération  et  de  progresser  véritablement 
dans son association avec la Tunisie. Les actions concrètes à entreprendre incluent le développement 
et l’apport d’un soutien intégral en faveur de la démocratie, la fourniture des moyens techniques et 
financiers  nécessaires  et  la  définition  des  priorités.  De  plus,  une  meilleure  coopération  avec  les 
institutions  de  l’Union  doit  permettre,  au  moyen  d’une  action  de  soutien  claire,  de  prendre  des 
mesures de soutien concrètes dans le secteur judiciaire et celui de la sécurité. 
• Du  point  de  vue  économique,  l’Union  devrait  revoir  sa  vision  de  l’intégration  économique  par 
l’intermédiaire  de  l’ALECA  et  laisser  place  à  une  méthode  plus  graduelle,  qui  mette  l’accent  sur  les 
priorités  locales  et  les  besoins  économiques.  Il  convient  d’explorer  les  possibilités  de  libéralisation 
partielle  et  sectorielle,  en  fonction  des  conséquences  anticipées  et  des  résultats  concrets  des 
réformes  économiques  structurelles,  afin  de  permettre  à  l’économie  tunisienne  de  supporter  une 
plus  grande  ouverture  commerciale  sans  s’effondrer  lors  de  la  phase  d’ajustement  et  d’éviter  en 
particulier  les  potentiels  effets  néfastes  pour  un  secteur  de  l’emploi  fragilisé.  De  plus,  des  actions 
concrètes doivent aborder : 1) le développement régional et la réduction des inégalités, en autorisant 
par  exemple  la  Tunisie  à  bénéficier  de  la  politique  régionale  et  des  fonds  structurels  de  l’Union ; 
2) le développement  et  le  financement  des  micro,  petites  et  moyennes  entreprises  au-delà  des 
possibilités  d’un  secteur  bancaire  qui  bat  de  l’aile,  en  appuyant  par  exemple  les  organisations  de 
garantie du crédit au niveau national et régional, le microcrédit, le financement coopératif, etc. 
6 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
• Du  point  de  vue  social,  l’Union  devrait  s’atteler  à  consolider  la  société  civile  en  allouant  les  fonds 
nécessaires  au  développement  des  capacités  de  gouvernance  et  de  travail  en  réseau  des 
organisations  de  la  société  civile,  tout  en  faisant  la  promotion  d’une  approche  plutôt  civique  que 
politisée  dans  ses  activités.  Ces  actions  sont  nécessaires  pour  favoriser  une  participation  accrue 
essentielle  de  la  société  civile  dans  le  dialogue  politique  entre  l’Union  et  la  Tunisie,  mais  peuvent 
également  la  limiter.  Des  évaluations  complètes  indépendantes  sont  par  conséquent  nécessaires 
pour  garantir  que  les  organisations  bénéficiaires  s’engagent  véritablement  dans  le  processus  de 
démocratisation et de stabilisation du pays. Le partenariat pour la mobilité doit en outre être mis en 
place  sans  plus  tarder.  Il  convient  également  d’explorer  des  possibilités  telles  qu’une  dispense  de 
l'obligation  de  visa  pour  les  ressortissants  tunisiens  et  un  assouplissement  des  conditions  de 
délivrance  pour  les  entrepreneurs,  les  chercheurs,  les  scientifiques,  les  professeurs,  etc.  En  ce  qui 
concerne  les  sciences,  la  technologie  et  l’innovation,  l’Union  et  la  Tunisie  devraient  concevoir 
ensemble un plan d’action exhaustif pour fixer les priorités du pays dans ce domaine. Les étudiants et 
les  chercheurs  devraient  être  davantage  soutenus  par  les  programmes  Erasmus  et  autres  réseaux 
universitaires euro-méditerranéens. 
2
Introduction et raisonnement 
La  Tunisie  a  été  un  partenaire  clé  de  l’Union  européenne  depuis  les  débuts  du  partenariat  euro-
méditerranéen, lancé en 1995 dans le cadre du processus de Barcelone. Elle a été le premier pays du Sud 
de 
la  Méditerranée  à  signer  un  accord  d’association,  en 1998,  et  un  plan  d’action,  en 2005. 
Progressivement,  l’ampleur  et  la  portée  du  partenariat  de  la  Tunisie  avec  l’Union  ont  augmenté, 
parallèlement  à  son  importance  stratégique  pour  le  pays.  La  Tunisie  est  l’État  voisin  de  l’Union  qui  a 
participé le plus activement, dans un premier temps, à l’avancement des négociations sur une zone de 
libre-échange  (ZLE),  puis  à  un  accord  de  libre-échange  complet  et  approfondi  (ALECA)  et  à  la 
collaboration sur le sujet de la sécurité, ce qui prouve l’intérêt commun des deux partenaires à s’occuper 
conjointement des opportunités et des défis majeurs de la région méditerranéenne dans son ensemble. 
La  croissance  soutenue  du  commerce  et  de  l’aide  entre  la  Tunisie  et  l’Union  au  cours  des  dernières 
années (à l’exception de la période de crise économique qu’a connue l’Union) illustre cet engagement et 
a  permis  à  l’Union  de  renforcer  sa  position  en  tant  que  partenaire  commercial  principal  de  la  Tunisie 
(en 2014, selon les données publiées par la Commission européenne, 64,7 % des importations et 72,5 % 
des  exportations  de  la  Tunisie  étaient  réalisées  avec  l’Union  des  vingt-huit)  et  l’un  des  principaux 
fournisseurs d'aide au pays. 
La portée du partenariat entre l’Union et la Tunisie s’est élargie avec les révisions ultérieures des cadres 
de  coopération  de  l’Union  avec  ses  pays  voisins.  Cette  relation,  à  l’origine  limitée  à  une  formule 
« commerce contre aide » restreinte, s’est peu à peu transformée en une démarche plus globale couvrant 
tous les aspects de tous les secteurs de la politique, de l’économie et de la société tunisiennes. 
La révolution tunisienne a bouleversé les conditions politiques, économiques et sociales des pays de la 
région,  marquant  une  cassure  nette  avec  le  statu  quo  de  longue  date  préservé  par  les  régimes 
autoritaires et répressifs. Elle a également remis en question les politiques de l’Union dans la région, ce 
qui  a  mené  à  un  examen  rigoureux  de  l’attitude  de  l’Union  envers  ses  États  voisins.  Les  résultats 
principaux de cet examen sont l’application du principe « donner plus pour recevoir plus » et du principe 
de  différenciation  dans  le  cadre  de  la  politique  européenne  de  voisinage  (PEV),  qui  consistent 
essentiellement  à  récompenser  avec  un  soutien  supplémentaire  (technique  et  financier)  les  pays 
partenaires qui progressent rapidement grâce à des réformes démocratiques ancrées dans les normes et 
7 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
valeurs  partagées  avec  l’Union.  Le  programme  SPRING1  a  permis  l’application  de  ces  principes  dans  la 
région méditerranéenne  et  la  Tunisie,  grâce  au  processus  ambitieux  de  transition démocratique  que  le 
pays a lancé de façon pacifique, en a été le principal bénéficiaire. 
En Tunisie, ce que l’on appelle « le printemps arabe » a pris la forme de deux processus fondamentaux, 
à  savoir  la  démocratisation  et  la  déstabilisation.  Les  données  de  l’équation  de  ces  deux  processus 
semblent avoir façonné l’évolution de la situation dans la région méditerranéenne, la Tunisie étant le seul 
pays  où  les  difficultés  de  la  déstabilisation  ne  l’ont  pas  emporté  sur  la  démocratisation  du  système 
politique, par rapport aux autres pays de la région, notamment la Syrie et la Libye. En effet, tandis que la 
déstabilisation du pouvoir en place dans des régions agitées et les crises sociales et économiques qui en 
ont  résulté  ont  mené  à  l’éclatement  des  sociétés  syrienne  et  libyenne  et  à  la  réaffirmation,  après  des 
réformes  plus  ou  moins  ambitieuses,  des  pouvoirs  politiques  ou  militaires  traditionnels  dans  d’autres 
pays, la Tunisie est jusqu’à présent parvenue à avancer grâce à une transition démocratique complète et 
des  réformes  en  ce  sens2,  malgré  les  graves  difficultés  économiques  et  sociales  auxquelles  le  pays  est 
confronté  dans  un  contexte  régional  conflictuel  et  complexe.  Une  assemblée  constituante  et  un 
gouvernement  de  transition  ont  été  élus  en 2011 ;  une  constitution  moderne  a  été  adoptée  en 2014, 
suivie  par  des  élections  législatives  et  présidentielles  au  cours  de  la  même  année.  La  transition  s’est 
accompagnée  du  développement  d’une  société  civile  dynamique  qui  a  grandement  contribué  aux 
travaux  de  l’assemblée  constituante  par  l’intermédiaire  du  quartet  du  dialogue  national,  composé  de 
l’Union  générale  tunisienne  du  travail  (UGTT),  de  l’Union  tunisienne  de  l'industrie,  du  commerce  et  de 
l'artisanat (UTICA), de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH) et de l’Ordre national des avocats 
de  Tunisie  (ONAT),  ainsi  que  grâce  à  son  rôle  de  médiateur entre  les  factions  politiques.  La  transition a 
également  illustré  les  faiblesses  socio-économiques  fondamentales  héritées  du  régime  répressif  en 
vigueur avant la révolution, ce qui a poussé des milliers de jeunes tunisiens éduqués et impatients3 à fuir 
le pays pour combattre en Syrie et en Irak. 
L’Union a tenté d’adapter ses politiques à l’évolution rapide de la situation en Tunisie et, potentiellement, 
de  profiter  de  l’occasion  de  développer  la  coopération  présentée  par  la  transition  démocratique  du 
pays. Elle a par conséquent renforcé sa coopération avec la Tunisie et a considérablement augmenté son 
financement  (passant  de  subventions  initialement  prévues  à  540 millions d’EUR  pour  la  période 
2007-2013  à  775 millions d’EUR  finalement  versés4)  accompagné  de  500 millions d’EUR  d’assistance 
macrofinancière  (AMF)5  et  d’opérations  importantes  de  prêts  au  travers  de  la  Banque  européenne 
d'investissement (BEI) qui ont atteint plus d’1 milliard d’EUR depuis 20116. Ces fonds ont été utilisés pour 
augmenter  les  capacités  des  institutions  démocratiques  nouvelles  ou  largement  renouvelées,  aider  le 
gouvernement à gérer la situation délicate des finances publiques et favoriser l’émergence d’une société 
civile active capable de s’adapter aux réalités changeantes. 
1 L’Aide au partenariat, aux réformes et à la croissance inclusive (Support for partnership, reform and inclusive growth, SPRING) a 
doté l’Union des outils nécessaires pour augmenter son appui à la Tunisie sans pour autant compromettre la cohérence de ses 
actions extérieures dans la région, puisque l’allocation de fonds, en vertu du principe « donner plus pour recevoir plus », est liée à 
l’ambition des réformes démocratiques mises en œuvre dans le pays partenaire. Voir la note de la Commission européenne sur 
l’adoption du programme SPRING, disponible à l’adresse suivante : http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-11-636_fr.htm. 
2 Cependant, la poussée inquiétante du terrorisme endogène provoque dans certains cas des retours en arrière des réformes, la 
décision regrettable de rétablir la peine de mort dans le code pénal en est un récent exemple. Les droits de l’Homme 
fondamentaux risquent donc concrètement d’être enfreints. 
3 Selon un rapport de la BBC datant de mars 2016, la Tunisie est le pays d’où proviennent la majorité des combattants étrangers, 
suivi par l'Arabie saoudite ; pour plus d'informations, voir : http://www.bbc.com/news/world-middle-east-27838034. 
4 Voir le résumé des activités et des résultats de la politique européenne de voisinage, disponible à l’adresse suivante : 
http://enpi-info.eu/medportal/publications//726/European-Neighbourhood-Instrument-2007-2013-%E2%80%93-Overview-of-
Activities-and-Results (p. 35). 
5 Voir le communiqué de presse, disponible à l'adresse suivante : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-16-289_fr.htm. 
6 Voir la section consacrée aux institutions financières du rapport annuel de 2014 sur la coopération entre l’Union et la Tunisie, 
disponible à l’adresse suivante : http://eeas.europa.eu/delegations/tunisia/more_info/publications/index_fr.htm (p. 148). 
8 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
La révolution tunisienne représente sans l’ombre d’un doute une circonstance opportune pour l’Union, 
mais elle s’accompagne également de nouveaux défis, dont celui de trouver une stratégie optimale qui 
favorise le renforcement des institutions et encourage les réformes, ce qui relève plutôt du moyen à long 
terme, tout en réagissant aux urgences économiques, sociales et sécuritaires qui, par nature, requièrent 
des  réponses  à  court  terme  qui  incluent  l’ensemble  des  acteurs  majeurs  dans  la  transition 
démocratique.  Les  leçons  tirées  des  pays  voisins  laissent  entendre  que  la  marge  de  manœuvre  dont 
dispose l’Union lorsqu’elle défend des réformes et la viabilité des mesures appliquées dépendent de la 
perception  de  tous  les  participants  sociétaux  clés  de  la  région  ou  des  pays  où  l’Union  est  active.  Cette 
marge  de  manœuvre  semble  quelque  peu  réduite  lorsque  les  dirigeants  politiques  et  les  leaders  de  la 
société civile sont divisés en deux camps, pro et anti-Union européenne7. C’est pourquoi il est essentiel 
de garantir que le partenariat avec l’Union est considéré par tous les acteurs principaux de la transition 
démocratique comme stratégique et marqué par une philosophie gagnant-gagnant, afin que les mesures 
politiques  de  l’Union  soient  acceptées  et  efficacement  mises  en  œuvre  dans  les  pays  au  cours  des 
prochaines années. 
La  présente  étude  examine  et  évalue  l’évolution  des  politiques  de  l’Union  en  Tunisie,  avant  et  après  la 
révolution,  ainsi  que  leur  incidence.  Ce  travail  s’ouvre  premièrement  sur  une  description  des  étapes 
importantes  des  cadres  de  coopération  établis  entre  l’Union  européenne  et  la  Tunisie,  ainsi  que  des 
politiques et programmes que ces cadres ont fait naître. Deuxièmement, l’étude analyse les répercussions 
de ces politiques avant la révolution et leur évolution ultérieure sous un angle analytique inédit afin de 
déterminer  les  causes  et  les  conséquences  de  la  nouvelle  stratégie  de  l’Union  vis-à-vis  de  la  Tunisie  et 
d’évaluer la valeur ajoutée apportée par ce changement pour la coopération entre les deux partenaires. 
Troisièmement, des témoignages d’acteurs clés du gouvernement tunisien, du paysage politique et de la 
société civile du pays, recueillis au moyen d’un questionnaire, viennent compléter l’analyse présentée ici 
(voir  annexe).  Quatrièmement,  des  conclusions  et  des  recommandations  politiques  sont  formulées  à 
partir des analyses ainsi que des contributions récoltées lors de la consultation. 
Les  sections  suivantes  de  cette  étude  comportent  une  description  des  stratégies  élaborées,  des 
politiques  mises  en  œuvre  et  des  programmes  instaurés  par  l’Union  en  Tunisie  avant  et  après  la 
révolution ;  le  cadre  conceptuel  choisi  pour  analyser  l’évolution  des  mesures  appliquées  après  la 
révolution est illustré ; les causes et les conséquences de cette évolution sont minutieusement analysées ; 
et  pour  terminer,  les  conclusions  et  les  recommandations  politiques  sont  formulées  en  tenant  compte 
des contributions d’acteurs clés en Tunisie. 
7 Cette déclaration est fondée sur les conclusions préliminaires encore non publiées des recherches effectuées par les auteurs 
dans les pays voisins de l’Union dans le cadre du partenariat oriental. 
9 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
3
Les politiques de l’Union européenne, avant et après 
la révolution en Tunisie 
La politique de l’Union envers les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée, parmi lesquels la Tunisie fait 
figure  de  partenaire  essentiel,  a  deux  objectifs  principaux ;  à  savoir  encourager  chaque  pays  à 
entreprendre  des  réformes  politiques  et  économiques  qui  respectent  ses  spécificités  et  favoriser  la 
coopération  régionale  entre  les  pays  de  la  région  eux-mêmes  et  avec  l’Union  européenne.  Ces  deux 
grands objectifs sont poursuivis respectivement par une coopération bilatérale et régionale dans le cadre 
de la politique européenne de voisinage (PEV) et de l’Union pour la Méditerranée (UpM) agrémentée par 
des programmes spécifiques pour la participation des pays partenaires aux programmes de l’Union (par 
exemple,  Tempus,  Erasmus  Mundus,  les  programmes-cadres  de  recherche  et  Horizon 2020)  ou  la 
coopération entre des régions à la frontière entre deux pays, c’est-à-dire la coopération transfrontalière 
(CTF). 
L’objectif  général  de  la  coopération  bilatérale à  travers  la  PEV  est  d’atteindre  le  plus  grand 
rapprochement  politique  et  le  plus  haut  degré  d’intégration  économique  possibles  sur  la  base  des 
intérêts communs et des valeurs partagées telles que la démocratie, l’État de droit, le respect des droits 
de  l’Homme  et  la  cohésion  sociale.  La  PEV  est  une  initiative  conjointe  dont  la  mise  en  œuvre  engage, 
d’une  part,  le  pays  partenaire  sur  la  voie  des  réformes  politiques  et  économiques  visant  à  améliorer  la 
démocratie, les droits de l’Homme, l’État de droit, la bonne gouvernance, les principes de l’économie de 
marché  et  le  développement  durable  et,  d’autre  part,  l’Union  européenne  à  soutenir  ces  objectifs  par 
l’aide  financière,  l’intégration  économique,  l’assouplissement  des  procédures  en  matière  de  visas, 
l’assistance technique et le soutien de la société civile. 
L’objectif général de la coopération régionale à travers l’UpM est de proposer un forum unique pour 
l’amélioration de la coopération et du dialogue dans la région euro-méditerranéenne, de rassembler les 
28 États membres de l’Union et les 15 pays du Nord de l’Afrique et du Moyen-Orient, de fixer des priorités 
régionales  et  de  décider  d’initiatives  de  coopération  spécifiques  à  mettre  en  place.  L’UpM  couvre  six 
domaines  prioritaires  de  coopération,  à  savoir :  le  développement  économique,  le  transport  et  le 
développement urbain, l’énergie, l’eau et l’environnement, l’enseignement supérieur et la recherche ainsi 
que les affaires civiles et sociales. 
Cette  section  schématise  les  stratégies  bilatérales,  régionales  et  transfrontalières  mises  en  œuvre 
ultérieurement  par  l’Union  et  la  Tunisie,  en  tenant  compte  du  contexte  national  évolutif,  mais  sans 
explorer davantage les causes et conséquences sur la situation du pays au regard de l’incidence et de la 
valeur  ajoutée  des  mesures  étudiées.  La  modélisation  a  été  effectuée  à  l’aide  d’informations  publiques 
sur  le  partenariat  entre  l’Union  et  la  Tunisie  obtenues  par  recherche  documentaire.  Des  références  de 
sources secondaires viennent compléter ces informations. Le cadre conceptuel de l’analyse de l’évolution 
et des répercussions des politiques de l’Union dans le pays est développé dans la section suivante, afin 
d’évaluer les mesures prises par l’Union et la Tunisie avant et après la révolution. Dans le but de fournir 
une  évaluation  qualitative  de  la  nature  changeante  du  partenariat  entre  l’Union  et  la  Tunisie  dans  ce 
cadre, la recherche documentaire a été complétée par une consultation ciblée, utilisant un questionnaire 
soigneusement élaboré, qui a permis de récolter et d’analyser les réponses d’un groupe d’acteurs clés du 
gouvernement, du paysage politique et de la société civile en Tunisie (en annexe). 
10 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
3.1
Coopération bilatérale 
Tableau 1 – Étapes de la coopération bilatérale UE-Tunisie8
Étape 
Accord d'association 
Politique européenne de voisinage 
Plan d'action de la PEV 2005-2010 
Programme SPRING 
Partenariat privilégié 
Plan d'action de la PEV 2013-2017 
Source : auteurs 
Date 
1995/1998 
2004 
2005 
2011 
2012 
2014 
La Tunisie a été le premier État méditerranéen à signer un accord d’association avec l’Union, en 1995. 
L’accord vise à promouvoir le développement durable dans le pays grâce à une amélioration du dialogue 
politique  et  de  la  coopération  économique  et  financière,  en  mettant  l’accent  sur  la  libéralisation  des 
échanges  et  les  questions  de  sécurité.  Au  cours  de  la  période  1995-2006,  les  dispositions  de  l’accord 
étaient  appliquées  par  les  programmes  MEDA I  et II  qui  portaient  sur  les  différents  domaines  identifiés 
dans  l’accord.  Ces  programmes  s’accompagnaient  de  ressources  financières  allouées  par  l’instrument 
FEMIP géré par la Banque européenne d'investissement (BEI) et avaient pour but de créer les conditions 
nécessaires  à  une  libéralisation  des  échanges  réussie.  Ils  accordaient  la  priorité  à  deux  domaines :  le 
développement du secteur privé et la création d’un environnement propice aux investissements. 
Le  total  des  ressources  financières  octroyées  à  la  Tunisie  entre 1995  et 2006  a  atteint  environ 
1 milliard d’EUR  de  subventions  à  travers  les  programmes  MEDA  et  2 milliards d’EUR  de  prêts  accordés 
par  l’instrument  FEMIP9.  La  Tunisie  a  reçu  11 %  du  total  des  subventions  accordées  aux  pays 
méditerranéens dans le cadre de MEDA I et II (9 milliards d’EUR) et 15 % du total alloué par l’instrument 
FEMIP  (13 milliards d’EUR).  Le  programme  MEDA  a  plus  précisément  octroyé  320 millions d’EUR  au 
soutien à la macro-économie et à la gouvernance institutionnelle (32 % du total), 320 millions d’EUR à la 
coopération  économique  et  au  secteur  privé  (25 %),  240 millions d’EUR  à  la  coopération  sociale  (24 %), 
160 millions d’EUR au développement rural et à l’environnement (16 %) et 30 millions d’EUR aux médias 
et  à  la  justice  (3 %).  L’instrument  FEMIP  a  également  alloué  2 milliards d’EUR  afin  de  consolider 
l’infrastructure économique, protéger l’environnement et développer le secteur privé. 
8 Voir http://eeas.europa.eu/delegations/tunisia/eu_tunisia/chronology/index_fr.htm pour une chronologie plus détaillée des 
relations bilatérales entre l’Union et la Tunisie. 
9 Pour consulter les fonds alloués dans le cadre des programmes MEDA et de l’instrument FEMIP, voir Estruch, E. (2007), European 
Instruments and Programmes Towards Southern Mediterranean: A General Overview, Centro Studi di Politica Internazionale, pp. 9-
32. Pour plus d’informations sur le programme MEDA II, se référer à Commission européenne (2009), Évaluation du règlement du 
Conseil nº 2698/2000 (MEDA II) et de sa mise en œuvre, Rapport final. Pour une vue d’ensemble plus complète de la coopération 
euro-méditerranéenne et de l’attribution des financements, consulter également http://www.medea.be/fr/themes/cooperation-
euro-mediterraneenne/. 
11 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Graphique 1 – Allocation des fonds dans le cadre du programme MEDA (I et II) pour la Tunisie 
Source : auteurs 
En 2004,  après  la  vague  d’élargissement,  l’Union  européenne  a  lancé  la  politique  européenne  de 
voisinage (PEV) afin de consolider et de renforcer ses relations avec ses pays voisins de l’Est et du Sud. La 
PEV  a  proposé  les  valeurs  communes  que  sont  la  démocratie,  l’État  de  droit,  le  respect  des  droits  de 
l’Homme et la cohésion sociale comme base d’une coopération politique, culturelle et sociale accrue. Son 
objectif  général  est  de  promouvoir  la  stabilité,  la  sécurité  et  la  prospérité  dans  le  voisinage  de  l’Union 
grâce à un soutien plus exhaustif du programme de réforme de pays tels que la Tunisie. La PEV repose sur 
les accords d’association signés par les pays partenaires et est appliquée par l’intermédiaire de ses plans 
d’action. 
Au  cours  de  la  période  2007-2013,  l’instrument  européen  de  voisinage  et  de  partenariat  (IEVP)  était  le 
principal  instrument  de  financement  appuyant  la  mise  en  œuvre  de  la  PEV.  Les  ressources  financières 
fournies  par  l’IEVP  étaient  octroyées  conformément  à  trois  objectifs  stratégiques :  soutenir  la  transition 
démocratique  et  la  promotion  des  droits  de  l’Homme ;  accompagner  la  transition  vers  l’économie  de 
marché ;  et  promouvoir  le  développement  durable  ainsi  que  les  politiques  d’intérêt  commun.  Dans  le 
cadre  de  l’IEVP,  9 milliards d’EUR  ont  été  alloués  aux  pays  méditerranéens  de 2007  à 2013,  tandis  que 
5 milliards d’EUR avaient été déboursés au titre du programme MEDA II entre 2000 et 2006. La Tunisie est 
le  quatrième  pays  à  avoir  reçu  le  plus  de  fonds  de  l’IEVP,  après  la  Palestine,  le  Maroc  et  l’Égypte,  avec 
775 millions d’EUR, ce qui équivaut environ à 8,5 % du total octroyé10. La part du montant total des fonds 
versée  à  la  Tunisie  a  légèrement  diminué  par  rapport  aux  précédentes  périodes  étudiées  (11 % 
entre 1995 et 2006, 9 % entre 2000 et 200611). 
Le plan d’action UE-Tunisie pour la période 2005-2013 a été signé en 2005 afin d’atteindre les objectifs 
de la PEV dans le pays. Ce plan visait à renforcer le dialogue politique, la libéralisation des échanges et la 
coopération  économique,  sociale,  culturelle  et  financière,  soutenir  les  réformes  démocratiques  et  la 
bonne  gouvernance,  améliorer  la  coopération  sectorielle,  appliquer  des  mesures  de  réduction  de  la 
pauvreté et développer des relations entre les gens. Concrètement, 79 mesures sont reprises dans le plan 
d’action,  couvrant  six  domaines  de  coopération :  le  dialogue  et  les  réformes  politiques,  les  réformes 
économiques et sociales, les réformes du commerce, du marché et de la réglementation, la coopération 
10 Voir l’annexe 1 du résumé des activités et des résultats de la politique européenne de voisinage, disponible à l’adresse 
suivante : http://enpi-info.eu/medportal/publications//726/European-Neighbourhood-Instrument-2007-2013-%E2%80%93-
Overview-of-Activities-and-Results (p. 74). 
11 Selon les données sur l’allocation des fonds des programmes MEDA I et MEDA II présentés ci-dessus. 
12 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
la 
justice  et 
intérieures, 
sur 
l’environnement, les sciences et la technologie, et les relations entre les gens.  
le  transport, 
les  affaires 
l’énergie, 
la  société  de 
l’information  et 
repris  dans  deux  programmes 
Le plan d’action était appliqué selon des lignes directrices formulées dans un document de stratégie par 
pays (DSP) pour la période 2007-2013. Les programmes à mettre en œuvre et l’allocation des fonds en 
conséquence  étaient 
(PIN),  couvrant 
respectivement  les  périodes  2007-2010  et  2010-2013.  Le  montant  total  des  ressources  allouées  à  la 
Tunisie  dans  le  cadre  du  PIN  pour  la  période  2007-2010  a  atteint  330 millions d’EUR,  principalement 
consacrés à des programmes économiques, étant donné les difficultés rencontrées dans les domaines de 
la coopération politique et socio-culturelle par le programme MEDA. Ces programmes comprenaient la 
gouvernance économique, la compétitivité et la convergence avec l’Union (46 %, 151 millions d’EUR), le 
développement durable (34 %, 112 millions d’EUR) et l’amélioration de l’aptitude à l’emploi des diplômés 
de l’enseignement supérieur (20 %, 66 millions d’EUR). 
indicatifs  nationaux 
Graphique 2 – Fonds alloués dans le cadre du Programme indicatif national 2007-2010 pour la Tunisie 
Source : auteurs 
À  cause  de  la  révolution  tunisienne,  de  la  révision  du  PEV  qui  en  a  découlé  et  du  lancement  du 
programme baptisé SPRING, les programmes mis en œuvre et les ressources octroyées dans le cadre du 
PIN au cours de la période 2011-2013 étaient sensiblement différents de ceux prévus à l’origine. L’objectif 
principal  du  programme SPRING  était  d’aider  les  pays  comme  la  Tunisie,  en transition  démocratique, à 
surmonter  leurs  difficultés  politiques,  sociales  et  économiques.  Le  total  de  l’aide  au  développement 
accordée à la Tunisie entre 2011 et 2013 a atteint 445 millions d’EUR, ce qui représente presque le double 
des 240 millions d’EUR initialement prévus, conformément aux travaux de la période 2007-2013. Outre les 
fonds  octroyés  à  l’origine,  155 millions d’EUR  ont  été  versés  sous  le  programme  SPRING  (la  Tunisie  a 
largement  bénéficié  du  principe  « donner  plus  pour  recevoir  plus »  grâce  aux  réformes  démocratiques 
ambitieuses adoptées dans le pays et est rapidement devenue le premier bénéficiaire du programme) et 
35 millions d’EUR supplémentaires ont été investis sous la forme de mesures spéciales. Les programmes 
finalement  mis  en  œuvre par  le  PIN  révisé  pour  la  période  2011-2013  traitaient  de  la  compétitivité  des 
entreprises  (56 %,  249 millions d’EUR),  de  l’emploi  et  de  la  protection  sociale  (9 %,  40 millions d’EUR)  et 
deux  programmes  SPRING  se  sont  respectivement  consacrés  à  la  croissance  durable  et  inclusive  et  au 
développement  économique  (28 %,  125 millions d’EUR)  et  à  la  transformation  démocratique  et  au 
renforcement des institutions (7 %, 31 millions d’EUR)12. 
12 Voir le résumé des activités et des résultats de la politique européenne de voisinage, disponible à l’adresse suivante : 
http://enpi-info.eu/medportal/publications//726/European-Neighbourhood-Instrument-2007-2013-%E2%80%93-Overview-of-
Activities-and-Results (p. 35). 
13 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Graphique 3 – Fonds alloués dans le cadre du Programme indicatif national 2011-2013 pour la Tunisie 
Source : auteurs 
Les ressources de l’IEVP ont été allouées à travers différentes modalités de soutien en tenant compte de 
la capacité d’absorption des pays bénéficiaires et de l’application des réformes convenues. La Tunisie a 
été  évaluée  positivement  sur  ces  deux  critères,  ce  qui  explique  en  partie  sa  position  de  premier 
bénéficiaire  du  programme  SPRING,  recevant  62 %  du  montant  total  des  fonds  déboursés  pour  l’appui 
budgétaire.  Les  38 %  des  fonds  restants  ont  été  attribués  suivant  d’autres  modalités  de  soutien, 
notamment TWINNING, TAIEX et la facilité de financement consacrée à la gouvernance. De plus l’Union, 
en collaboration avec ses États membres et les institutions de finances publiques européennes, a soutenu 
des  investissements  importants  au  titre  de  la  facilité  d’investissement  pour  le  voisinage  (FIV)  et 
principalement de l’instrument FEMIP qui ont continué à octroyer des prêts  à la Tunisie dans le but de 
développer son secteur privé et d’améliorer le climat des affaires dans le pays. 
La relation entre l’Union et la Tunisie a franchi un cap en 2012 avec la conclusion d’un accord privilégié
fondé  sur  trois  piliers :  la  coopération  politique,  l’intégration  économique  et  sociale  et  les  partenariats 
entre les gens. Le partenariat privilégié a été mis en place par la négociation et l’adoption d’un nouveau 
plan  d’action  Union-Tunisie  pour  la  période  2013-2017  considérablement  différent  des  documents 
stratégiques  précédents.  Le  plan  d’action  2013-2017  se  focalise  sur  la  consolidation  des  institutions 
démocratiques et prépare le terrain pour un accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA), 
prévoit  d’optimiser  l’intégration  et  la  réduction  de  la  pauvreté  dans  le  programme  économique, 
d’effectuer un rapprochement vers les normes de l’Union et de soutenir continuellement la compétitivité 
des  entreprises  dans  les  différents  secteurs  de  l’économie.  L’amélioration  de  la  coopération  sur  les 
questions  de  sécurité  est  également  en  ligne  de  mire,  en  particulier  au  moyen  de  la  négociation  d’un 
partenariat pour la mobilité13, signé pour le moment par dix États membres dont la France, l’Allemagne 
et l’Italie14, ainsi que la modernisation et la restructuration du secteur de la sécurité. 
13 Voir le communiqué de presse portant sur la déclaration politique, disponible à l’adresse suivante : 
http://europa.eu/rapid/press-release_IP-14-208_fr.htm. 
14 Voir l’annexe 1 du rapport sur les dépenses en matière de migration dans les pays du voisinage publié par la Cour des comptes 
européenne en 2016 (Rapport spécial nº 9/2016). 
14 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
En 2014,  l’instrument  européen  de  voisinage  (IEV)  a  remplacé  l’IEVP  en  tant  que  principal  mécanisme 
financier de  la  PEV.  La  répartition indicative  bilatérale  pour  la  Tunisie,  pour  la période  2014-2020,  varie 
entre 725  et 886 millions d’EUR  (115 millions d’EUR  par  année  en  moyenne)15.  À  cela  viennent  s’ajouter 
éventuellement les financements provenant des « fonds à compartiments multiples », proportionnels aux 
progrès des réformes démocratiques et selon le principe « donner plus pour recevoir plus », ainsi que des 
facilités  d’investissement  telles  que  la  FIV,  la  FEMIP  et  d’autres  instruments  créés  pour  des  objectifs 
spécifiques, tels que le mécanisme de voisinage en faveur de la société civile. 
la  compétitivité  et 
Les  politiques  et  les  programmes  de l’Union  dans  le  cadre  du  nouveau  plan d’action  sont  formulés  sur 
une  base  annuelle,  en  fonction  de  l’action  des  gouvernements  de  transition  en  Tunisie  qui  établissent 
actuellement leur programme de réformes sur une année au lieu de cinq. Le plan d’action annuel pour 
2015  se  centre  sur  trois  domaines  stratégiques  de  coopération :  les  réformes  socio-économiques  pour 
une  croissance  solidaire, 
la  gouvernance 
démocratique  et  des  institutions,  et  le  développement  régional  et  local  durable.  Dans  la  répartition 
indicative  du  Cadre  unique  d’appui de 2014  à 2015,  40 % du financement  total  est  alloué  aux  réformes 
socio-économiques, 30 % au développement régional et local, 15 % à la consolidation de la démocratie 
et 15 % au renforcement des institutions. Plus concrètement, il est prévu de mettre en œuvre au total six 
programmes, en faveur du secteur privé (32 millions d’EUR), du secteur de la sécurité (23 millions d’EUR), 
de  la  décentralisation  et  du  développement  intégré  des  régions  (43 millions d’EUR),  du  processus 
d’intégration  (12,8 millions d’EUR),  du  secteur  culturel  (6 millions d’EUR)  et  du  secteur  du  tourisme 
(70 millions d’EUR). 
la  consolidation  de 
l’intégration, 
Graphique 4 – Fonds alloués par le Cadre unique d’appui 2014-2015 pour la Tunisie 
Source : auteurs 
Les mesures du Cadre unique d’appui sont agrémentées d’une assistance macrofinancière (AMF) sous 
la  forme  d’un  soutien  de  300 millions d’EUR  pour  le  vaste  programme  de  réformes  et  d’ajustement 
économique  de  deux  ans  convenu  entre  la  Tunisie  et  le  Fonds  monétaire  international  (FMI).  Ce 
programme  a  été  lancé  afin  d’aider  la  Tunisie  à  surmonter  les  graves  difficultés  économiques  qu’elle 
connaît depuis la révolution, provoquées par un environnement international peu porteur et l’incertitude 
de la transition démocratique entamée dans le pays. La Commission européenne a annoncé début 2016 
15 Voir le Cadre unique d'appui pour l'appui de l'UE à la Tunisie (2014-2015), disponible à l’adresse suivante : 
https://ec.europa.eu/europeaid/single-support-framework-ssf-programming-document-tunisia-2014-2015_en (p. 10). 
15 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
être  prête  à  apporter  une  AMF  supplémentaire  de  500 millions d’EUR,  nouvelle  preuve  de  son 
engagement à soutenir la Tunisie dans ses difficultés économiques actuelles. 
Pour  conclure,  l’objectif  principal  de  l’accord  d’association  établi  entre  l’Union  et  la  Tunisie  est  de 
préparer  le  terrain  pour  la  création  d’une  zone  de  libre-échange  (ZLE),  comme  l’attestent  le  grand 
nombre  de  dispositions  visant  de  manière  explicite  ou  implicite  à  libéraliser  les  échanges.  L’accord 
d’association  comprend  à  la  fois  des  mesures  tarifaires  et  non  tarifaires  ainsi  que  des  dispositions  de 
coopération économique dont le but est de préparer l’économie tunisienne à une plus grande ouverture 
et à une libéralisation, telles que les mesures anti-trust et la protection des droits de propriété visant à 
favoriser la compétition sur le marché et l’adoption d’un cadre réglementaire permettant l’établissement 
de prestataires de services étrangers. Le démantèlement tarifaire des produits manufacturés s’est achevé 
en 2008, ce qui a entraîné la création de la première ZLE pour les produits industriels entre l’Union et un 
pays partenaire méditerranéen. 
L’Union  et  la  Tunisie  ont  entamé  des  négociations  pour  un  accord  de  libre-échange  complet  et 
approfondi (ALECA) fin 2015 avec l’objectif déclaré de créer de nouvelles possibilités d’accès au marché, 
d’améliorer  le  climat  d’investissement  et  soutenir  les  réformes  économiques  en  cours  dans  le  pays. 
L’ALECA  est  si  vaste  qu’il  étend  la  ZLE  existante  aux  produits  et  services  agricoles  et  comprend  des 
modifications des domaines réglementés par les cadres juridiques, tels que les obstacles techniques au 
commerce,  les  mesures  sanitaires,  la  protection  des  investissements,  la  passation  de  marchés  et  la 
politique  de  concurrence.  L’accord  repose  sur  les  dispositions  prévues  par  l’accord  d’association  et  il 
représentera, s’il est conclu, une avancée importante dans l’intégration entre l’Union et la Tunisie. 
16 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
3.2
Coopération régionale 
Tableau 2 – Étapes de la coopération régionale UE-Tunisie 
Partenariat euro-méditerranéen (Processus de Barcelone) 
Étape 
Union pour la Méditerranée 
Source : auteurs 
Date 
1995 
2008 
Le  partenariat  euro-méditerranéen  a  été  lancé  en 1995  à  Barcelone  dans  le  but  de  faire  de  la 
Méditerranéenne  une  région  commune  de  paix,  de  stabilité  et  de  prospérité.  Ce  partenariat  reprenait 
trois  domaines  de  coopération  multilatérale :  partenariat  politique  et  de  sécurité,  partenariat 
économique  et  financier,  et  partenariat  social,  culturel  et  humain.  En 2008,  sous  l’impulsion  de  la 
présidence française du Conseil de l’Union et l’organisation du sommet de Paris pour la Méditerranée, les 
États membres de l’Union et leurs homologues méditerranéens se sont mis d’accord pour renforcer leurs 
relations  et  mettre  à  nouveau  l’accent  sur  le  partenariat  euro-méditerranéen.  L’Union  pour  la 
Méditerranée (UpM) a été créée afin de mieux faire accepter de part et d’autre le cadre de coopération 
multilatérale et d’apporter des avantages concrets aux habitants et aux entreprises des pays membres.  
Si  les  objectifs  principaux  du  « processus  de  Barcelone »,  à  savoir  la  création  d’une  région  de  paix,  de 
stabilité, de sécurité et de prospérité partagée accompagnée de la promotion du respect des principes 
démocratiques,  des  droits  de  l’Homme  et  de  la  compréhension  mutuelle,  ont  été  maintenus, 
les initiatives concrètes et la coopération accrue sur six domaines d’action prioritaires ont été privilégiées. 
Ces  derniers  concernent  le  développement  économique,  le  transport  et  le  développement  urbain, 
l’énergie, l’environnement et l’eau, l’enseignement supérieur et la recherche ainsi que les affaires civiles. 
Le secrétariat de l’UpM a vu le jour en 2010 pour renforcer le dialogue régional et la coopération entre les 
États membres de l’UpM et les parties prenantes, et coordonner la mise en œuvre envisagée d’initiatives 
concrètes. 
La Tunisie participe actuellement à 22 projets régionaux coordonnés par le secrétariat de l’UpM dont la 
valeur  totale  dépasse  1,2 milliard d’EUR.  Le  programme  Med4Jobs  est  à  l’origine  de  cinq  d’entre  eux 
visant  à  promouvoir  des  initiatives  de  création  efficace  et  visible  d’emplois  dans  le  secteur  privé.  Trois 
projets  d’investissements  ont  pour  but  de  développer  les  grandes  infrastructures  urbaines  et  de 
transport, six projets traitent des questions environnementales aux niveaux régional, national et local et 
sept projets se consacrent au rôle des femmes et de la jeunesse dans la société. Les projets dépendant de 
l’UpM exécutés en Tunisie sont repris dans le tableau 3 ci-dessous. 
17 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Tableau 3 – Projets dépendant de l’UpM auxquels participe la Tunisie par domaine de coopération prioritaire 
Domaine prioritaire 
Projet 
Centre euro-méditerranéen pour le développement des entreprises 
(CDEM) 
Med4jobs – Établissement d’une plateforme régionale pour le 
développement de clusters dans les industries culturelles et créatives de 
la région Sud de la Méditerranée 
Développement 
des entreprises 
Med4jobs – Génération entrepreneur 
Med4jobs – Haute opportunité en Méditerranée pour le recrutement de 
cadres d’excellence (HOMERe) 
Med4jobs – Réseau entreprendre en Méditerranée 
Med4jobs – Réseau Méditerranée nouvelle chance (MedNC) 
Promouvoir l'autonomisation des femmes pour le développement 
industriel inclusif et durable dans la région MENA 
Former des citoyens responsables – Promouvoir l’éducation civique afin 
de prévenir la violence à l'école 
Les compétences au service de la réussite – Employabilité des femmes 
Affaires civiles et sociales 
Femmes d’avenir en Méditerranée (FAM) – Nouvelle génération de 
leaders 
Croissance CEED – Développement des petites et moyennes entreprises 
Développer l’autonomie des femmes 
Jeunes femmes créatrices d’emploi 
Activités de formation LOGISMED (LOGISMED – TA) 
Transport et 
développement urbain 
Parachèvement de l’axe central de l’autoroute Transmaghrébine 
Projet Sfax Taparura de l'UPFI 
Eau et environnement 
BlueGreen Med-CS – Rassembler la société civile de la région 
méditerranéenne par les questions liées à l’environnement et à l’eau 
Gouvernance et financement du secteur de l’eau en Méditerranée 
Programme intégré pour la protection du lac de Bizerte contre la 
pollution 
Projet méditerranéen ReSCP post Rio +20 – Soutien de l'adoption des 
modèles de consommation et de production durables (CPD) et 
d'utilisation rationnelle des ressources (URR) en Méditerranée 
Plate-forme méditerranéenne des connaissances sur l’eau (Med Water 
Knowledge) 
Programme de renforcement des capacités concernant l’intégrité dans le 
domaine de l’eau au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 
Source : auteurs 
18 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
3.3
Autres programmes régionaux 
Outre  la  coopération  bilatérale  et  régionale organisée  dans  le  cadre de  la  PEV  et  de  l’UpM,  la Tunisie a 
bénéficié  de 
la  coopération  transfrontalière  (CTF)  et  de programmes  régionaux  appuyant 
l’enseignement supérieur et la recherche (Tempus et Erasmus), ainsi que d’instruments accompagnant 
la  transition  démocratique  et,  en  particulier,  l’émergence  de  la  société  civile :  l’instrument  européen 
pour la démocratie et les droits de l'Homme (IEDDH), l’instrument contribuant à la stabilité et à la 
paix (IcSP) et le mécanisme de voisinage en faveur de la société civile. 
La Tunisie a participé à deux programmes CTF pendant la période 2007-2013 qui ont été renouvelés pour 
2014-2020,  à  savoir 
le  programme  CTF  Bassin  maritime 
méditerranéen16. 
le  programme  CTF 
Italie-Tunisie  et 
Le  programme  CTF  Italie-Tunisie  pour  la  période  2007-2013  visait  à  promouvoir  l’intégration 
économique, sociale, institutionnelle et culturelle des territoires de la Sicile et de la Tunisie sur la base de 
trois objectifs prioritaires : le développement socio-économique, les défis communs et les relations entre 
les gens. Ces objectifs ont été revus pour la période 2014-2020 à partir des leçons tirées de la consultation 
organisée avec les acteurs pertinents. La priorité est désormais accordée au développement des PME et à 
l’entrepreneuriat, l’aide à la formation, la recherche et l’innovation et la protection de l’environnement. 
L’intégration  économique  et  la  création  d’emplois  sont  à  présent  des  composantes  transversales  du 
programme. Le montant total des fonds alloués entre 2007 et 2013 s’élève à 27 millions d’EUR, dont 65 % 
a  été  consacré  au  développement  socio-économique,  25 %  aux  défis  communs  et  10 %  aux  relations 
entre  les  gens.  Ce  montant  a  été  augmenté  pour  le  programme  2014-2020  et  atteint  aujourd’hui 
33 millions d’EUR, dont 40 % est dédié à l’éducation, la recherche et l’innovation, 40 % à la protection de 
l’environnement et les 20 % restants devraient soutenir les PME. 
Graphique 5 – Fonds alloués dans le cadre du programme CTF Italie-Tunisie 2014-2020 
Source : auteurs 
16 À titre de comparaison, le Maroc a bénéficié de trois programmes CTF de 2007 à 2013 dans le cadre de l’IEVP, à savoir le Bassin 
maritime méditerranéen avec la Tunisie et deux programmes CTF dédiés respectivement aux régions CTF du détroit et de 
l’Atlantique gérées conjointement dans le contexte de la coopération territoriale entre l’Espagne et le Maroc. Le programme CTF 
du détroit n’a pas été repris dans le programme de l’IEV pour la période 2014-2020 (voir http://www.eaptc.eu/en/eni-cbc-
programmes.html). 
19 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Le programme CTF Bassin maritime méditerranéen visait, pour la période 2007-2013, à rassembler les 
territoires  côtiers  pour  qu’ils  coopèrent  dans  quatre  domaines  prioritaires,  à  savoir  la  promotion  du 
développement socio-économique et l’amélioration des territoires, la protection de l’environnement au 
niveau du bassin, l’amélioration des conditions et des modalités du mouvement des personnes, des biens 
et des capitaux, ainsi que la promotion du dialogue culturel et de la gouvernance locale. Entre 2014 et 
2020,  les  priorités  ont  été  rationalisées  en  deux  objectifs  plus  larges :  promouvoir  le  développement 
économique  et  social  et  relever  les  défis  environnementaux  communs.  Les  relations  entre  les  gens 
restent  une  modalité  de  coopération  et  le  renforcement  des  capacités  institutionnelles  est  à  présent 
considéré comme une composante transversale. Ces deux objectifs généraux sont divisés en une série de 
priorités,  à  savoir  premièrement  le  développement  des  affaires  et  des  PME,  l’aide  à  l’éducation,  la 
recherche et l’innovation, la promotion de l’inclusion et la réduction de la pauvreté, et deuxièmement la 
protection environnementale et l’adaptation aux changements climatiques. Le montant total des fonds 
alloués  au  programme  CTF  Bassin  maritime  méditerranéen  2007-2013  s’élevait  à  environ 
171 millions d’EUR, dont 40 % était dédié au développement socio-économique, 30 % à la protection de 
l’environnement,  20 %  à  la  promotion  du  dialogue  culturel  et  les  10 %  restants  à  la  mobilité  des 
personnes, des biens et des capitaux.  
la  coopération  et 
les  échanges  pour 
la  modernisation  et 
Le programme Tempus, lancé en 2002 par l’instrument MEDA et maintenu jusqu’en 2013 par l’IEVP, visait 
le  développement  de 
à  améliorer 
l’enseignement supérieur dans les pays partenaires. Le montant total octroyé par le programme s’élève à 
222 millions d’EUR pour la période 2003-2013. La Tunisie a reçu 11 % de cette somme et s’est avérée être 
l’un des pays les plus actifs, avec l’intégration de 62 projets. La Tunisie était également le premier pays 
partenaire méditerranéen à rejoindre le programme Erasmus en 2013. Au cours de la première année de 
participation  au  programme,  13 universités  tunisiennes  ont  reçu  une  subvention  de  4,8 millions d’EUR 
qui a permis d’accorder 343 bourses de mobilité à des étudiants de différents niveaux de l’enseignement 
LMD  (licence,  master,  doctorat)  et  au  personnel  administratif  de  ces  universités.  De  plus,  la  Tunisie 
participe depuis 2011 à un programme de jumelage électronique en faveur de l’enseignement primaire 
et secondaire qui rassemblait 28 structures et jusqu’à 60 enseignants en 201417. 
17 Voir la section consacrée à l’éducation du rapport annuel de 2014 sur la coopération entre l’Union et la Tunisie, disponible à 
l’adresse suivante : http://eeas.europa.eu/delegations/tunisia/more_info/publications/index_fr.htm (pp. 47-48). 
20 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
4
L’évolution et l’incidence des politiques de l’UE depuis 
la révolution en Tunisie 
La section précédente cartographiait les politiques et programmes de l’Union mis en œuvre en Tunisie 
avant et après la révolution, sans s’attarder sur les conséquences de leur évolution dans le temps. Dans la 
présente section, l’incidence des politiques mises en œuvre avant la révolution de 2011, leur évolution et 
la transition démocratique difficile du pays sont évaluées. La présente analyse est réalisée sous un angle 
analytique  innovant  défini  aux  fins  de  cette  étude  et  illustré  dans  le  graphique  nº 6  ci-dessous.  Il  est 
structuré comme suit : 
Les  deux  dimensions  interdépendantes  considérées  dans  l’analyse,  l’évolution  de  la  situation  en 
Tunisie et le changement de stratégie de l’Union envers le pays, sont représentées à l’arrière-plan du 
schéma  (cadres  noirs).  L’évolution  de  la  situation  en  Tunisie  y  est  présentée  comme  une  phase 
de transition  entre  un  régime  autoritaire  répressif  (désigné  dans  le  graphique  par  « régime »)  et 
une démocratie,  caractérisée  par  deux  processus 
fondamentaux,  une  déstabilisation  et  une 
démocratisation  (flèches  bleues).  Le changement  de  stratégie  de  l’Union  y  est  présenté  comme  une 
réaction  aux  événements  se  déroulant  en  Tunisie  et  comporte  une  intervention  d’urgence  face  à  la 
déstabilisation socio-économique, y compris les problèmes d’insécurité (flèche orange), et une action à 
un  moment  opportun  pour  renforcer  le partenariat  découlant  de  la  transition  démocratique  (flèche 
verte). 
Les triangles imbriqués l’un dans l’autre au sommet et à la base du cadre analytique fournissent une vue 
d’ensemble  des  politiques  de  l’Union  en  Tunisie  avant  et  après  la  révolution  (triangles  en  pointillé  et 
cercles).  La  stratégie  de  l’Union  envers  le  pays  au  cours  du  régime  autoritaire  de  Ben Ali  est 
considérée comme résultant d’une série de concessions génériques et simplifiées : « commerce contre 
aide »,  « sécurité  contre  silence »  et  « bénéfices  contre  libertés »  (triangle  rouge).  Ces  concessions 
génériques  signifiaient  que  l’Union  affirmait  son  pouvoir  de  négociation  quant  à  la  libéralisation  des 
échanges en augmentant l’assistance financière pour les programmes d’ajustement structurel locaux afin 
de soutenir les efforts de modernisation, renforçait la coopération sur les questions de sécurité liées à la 
migration illégale et aux activités criminelles au détriment de l’avancement des réformes démocratiques 
et  privilégiait  les  bénéfices  économiques  plutôt  que  les  libertés  politiques  et  les  droits  de  l’Homme 
fondamentaux. La stratégie actuelle de l’Union envers le pays devient plus globale, à tel point que le 
nouveau  partenariat  privilégié  couvre  pratiquement  tous  les  aspects  de  l’économie,  du  régime 
politique  et  de  la  société  (triangle  vert),  et  repose  sur  une  vision  gagnant-gagnant  et  sur  le 
codéveloppement destiné à atteindre la paix et la prospérité pour tous. 
Le  raisonnement  qui  sous-tend  les  décisions  prises  dans  cette  démarche  analytique  est  le  suivant :  la 
Tunisie passe d’une situation de « stabilité non durable » qui caractérisait le pays avant la révolution à 
une  situation de « durabilité  instable ».  Dans la  première  situation,  celle  de  la  stabilité  non  durable,  la 
stabilité  macro-économique  et  politique  était  garantie  par  des  mesures  autoritaires  et  répressives. 
L’Union fermait alors les yeux sur ce qui peut être défini comme une démocratie de façade caractérisée 
par  un  manque  de  libertés,  des  violations  des  droits  de  l’Homme  fondamentaux,  la  segmentation  et 
l’absence d’engagement de la société, une situation qui s’est révélée intenable. De telles conditions ont 
mené à la rupture du contrat social avant les révoltes tunisiennes18. Dans la seconde situation, celle de la 
durabilité  instable,  la  révolution  tunisienne  et  la  transition  démocratique  qui  a  suivi  ont  amélioré  le 
caractère durable de l’État en garantissant la représentation et la participation des différentes tranches de 
18 Pour une étude de la caducité intrinsèque du régime autoritaire de Ben Ali, voir Paciello, M.C. (2011), Tunisia: Changes and 
Challenges of Political Transition, MEDPRO Technical Report, nº 3. 
21 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
la  population  dans  le  processus  politique,  mais  cette  avancée  est  compromise  à  court  terme  par  la 
déstabilisation de l’économie nationale, les conflits politiques internes, les troubles sociaux et l’instabilité 
géopolitique générale de la région.  
L’argument avancé ici concernant la compréhension du changement de la stratégie et des politiques de 
l’Union est le suivant : la révolution tunisienne a ouvert de nouvelles possibilités de coopération car elle 
est fondée sur les  normes  et  les valeurs  démocratiques défendues par l’Union dans ses pays voisins, 
mais  elle  a  également  donné  naissance  à  de  nouveaux  défis  liés  à  l’émergence  d’un  grand  nombre  de 
participants  au  dialogue  politique.  En  outre,  les  difficultés  économiques  exceptionnelles  que 
rencontre  le  pays  et  les  défis  géopolitiques  fondamentaux  de  la  région  provoqués  par  les  guerres 
régionales  en  Libye  et  en  Syrie  requièrent  une  réponse  exceptionnelle,  ce  qui  affirme  la  position  de 
l’Union  en  tant  que  partenaire  clé  pour  le  soutien  de  la  transition  démocratique  et  pour  atteindre  une 
durabilité sur le long terme qui soit avantageuse pour les deux partenaires. 
From generic simplified trade-offs... 
Graphique 6
Benefits vs 
Freedoms 
EU POLICIES 
From regime... 
TUNISIA 
Trade vs 
Aid 
Society 
Economy 
Polity 
Security vs 
Silence 
UNSUSTAINABLE STABILITY 
Destabilisation 
EMERGENCY 
RESPONSE 
REVOLUTION 
WINDOW OF 
OPPORTUNITY 
Democratisation 
Economic 
cooperation 
UNSTABLE SUSTAINABILITY 
Economy 
Polity 
Society 
...to democracy. 
Political 
cooperation
...to full-fledged partnership and co-development. 
Socio-cultural 
cooperation 
22 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
4.1
Incidence des politiques de l’UE avant la révolution tunisienne 
La signature d’un accord d’association en 1995 a profondément changé la nature de l’aide apportée par 
l’Union en Tunisie, passant d’une formule « commerce contre aide » qui consistait à supprimer les droits 
de  douane  à  une  approche  plus  globale  et  à  une  assistance  financière  accrue  pour  les  programmes 
d’ajustement  structurel.  Ces  programmes  combinaient  des  mesures  de  coopération  politique, 
économique et socio-culturelle dont l’objectif était de favoriser la stabilité et la prospérité dans la région. 
Ce  changement  d’approche  de  l’Union  vis-à-vis  de  la  coopération,  résultat  de  son  élargissement 
progressif  et  des  ajustements  géopolitiques  qui  ont  suivi  le  démantèlement  de  l’Union  soviétique 
en 1991,  s’est  renforcé  avec  le  lancement  de  la  PEV  en 2004  et  la  signature  du  plan  d’action  de  la  PEV 
en 2005.  La  coopération  politique,  économique  et  socio-culturelle  de  la  PEV  était  ancrée  dans 
l’intérêt  commun  et  des  valeurs  partagées  définies  unilatéralement,  mais  était  également  inspirée 
de normes et de bonnes pratiques reconnues internationalement.  
Ancrer  la  coopération  dans  l’intérêt  commun  et  les  valeurs  partagées  avait  pour  but  de  créer  des 
conditions  démocratiques  équitables  entre  les  États  membres  de  l’Union  et  leurs  pays  voisins,  en 
s’appuyant sur l’hypothèse selon laquelle renforcer la démocratie et l’État de droit était la meilleure 
chose à faire pour stabiliser la région. L’accent renouvelé sur les normes et valeurs démocratiques, la 
bonne  gouvernance  et  le  développement  durable  a  été  conservé  en  tant  que  condition  pour  l’octroi 
d’aides, avec l’intention explicite d’obtenir davantage de réformes dans des pays tels que la Tunisie et de 
préparer le terrain pour une coopération et une intégration accrues avec l’Union européenne. 
les 
incitations  nécessaires  pour  persuader 
Cela  étant  dit,  l’expérience  montre  que  lorsque  la  rhétorique  de  l’Union  est  mise  à  l’épreuve,  elle  ne 
parvient  pas  à  créer 
les  pays  partenaires 
méditerranéens  à  lancer  les  réformes  jugées  nécessaires  pour  atteindre  les  objectifs  ambitieux  fixés 
par le partenariat. En effet, tandis que l’Union estimait que la promotion des principes de démocratie et 
de  l’économie  de  marché  favoriserait  la  stabilité  et  la  prospérité  de  la  région,  les  gouvernements 
autocratiques des pays méditerranéens se concentraient sur le maintien de leur contrôle de l’économie 
et  de  la  société.  Cette  différence  a  de  facto  limité  les  relations  de  l’Union  avec  ses  pays  partenaires 
méditerranéens,  notamment  avec  le  gouvernement  autocratique  de  Ben Ali,  à  l’échange  d’intérêts 
commerciaux,  financiers  et  stratégiques,  conformément  à  la  plupart  des  programmes  d’appui  au 
développement  dans  le  monde  (Ayadi  et  Gadi,  2013:  4).  La  relation  entre  l’Union  et  la  Tunisie  était 
fondée, avant la révolution, sur une série de concessions. Bien que la coopération ait été renforcée au-
delà  de  la  simple  formule  « commerce  contre  aide »  et  « sécurité  contre  silence »  des  décennies 
précédentes, elle souffrait encore de ces limitations. 
Les  intérêts  stratégiques  et  commerciaux  de  l’Union  consistaient  à  l’époque  à  accroître  les  échanges 
commerciaux  avec  la  région,  en  particulier  avec  la  Tunisie,  et  à  tenter  de  contrôler  le  flux  de  migrants 
gagnant  la  rive  sud  de  l’Europe,  surtout  après  les  attaques  terroristes  de 2001  à  New York,  de 2003  à 
Casablanca  et  de 2004  à  Madrid.  De 2004  à 2010,  le  commerce  de  biens  entre  l’Union  et  la  Tunisie  est 
passé  de  7,6 milliards d’EUR  d’exportations  et  6,7 milliards d’EUR  d’importations  en 2004  à 
11 milliards d’EUR  d’exportations  et  9,9 milliards d’EUR  d’importations  en 2011,  ce  qui  a  doté  l’Union 
d’une balance commerciale de plus en plus positive19. Cette tendance s’est poursuivie après la révolution 
tunisienne.  D’autre  part,  les  intérêts  stratégiques  et  commerciaux  de  Ben Ali  consistaient  à  obtenir 
davantage de ressources financières sous la forme d’aides financières officielles et à légitimer son régime 
et  son  emprise  sur  la  société  et  l’économie  tunisiennes  au  moyen  de  meilleures  relations  avec  ses 
partenaires  internationaux,  au  lieu  d’organiser  des  élections  démocratiques  équitables,  régulières  et 
19 Voir les statistiques descriptives du commerce Union-Tunisie publiés par la Direction générale du commerce de la Commission 
européenne, disponibles à l’adresse suivante : http://trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2006/september/tradoc_122002.pdf. 
23 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
libres.  Cependant,  le montant  total  de  l’aide  financière  officielle  promise  par  l’Union  et  ses  plus  grands 
États membres (la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne) s’élevait pour l’ensemble des pays du Sud et 
de l’Est de la Méditerranée, à l’exception de la Turquie, à environ 39 milliards d’EUR de 1995 à 2009, ce qui 
revient  à  moins  de 180 EUR  par  habitant  pour  toute  la  période  considérée.  De  ce  montant,  la  Tunisie  a 
reçu  une  aide  financière  de  1,4 milliard d’EUR  sur  la  même  période.  Cet  argent  a  été  alloué  à  tous  les 
secteurs  de  coopération,  y  compris  l’économie,  la  sécurité,  le  secteur  social,  la  justice  et  les  affaires 
intérieures20.  Dans  ce  contexte,  la  coopération  entre  l’Union  et  la  Tunisie  n’a  produit  que  des  résultats 
limités,  notamment  dans  sa  composante  régionale,  car  il  semblait  plus  difficile  d’imposer  ses  intérêts 
dans un cadre de coopération multilatéral. Les résultats de la coopération bilatérale étaient plus mitigés. 
Certaines avancées ont pu être réalisées dans les domaines de coopération qui représentaient également 
un intérêt pour l’Union, tels que le commerce et les questions de sécurités, tandis que d’autres domaines 
n’ont pas du tout progressé, en particulier la promotion de la gouvernance démocratique21. 
Cette  étude  part  du  principe  que  les  politiques  de  l’Union  mises  en  œuvre  avant  la  révolution 
tunisienne  se  fondaient  sur  et  se  limitaient  à  trois  concessions  fondamentales  issues  de  l’échange 
d’intérêts avec le régime répressif en place avant la révolution. Les trois concessions génériques retenues 
dans l’analyse correspondent aux trois axes principaux de coopération, à savoir politique, économique et 
socio-culturel, et sont définies dans cette étude en tant que « commerce contre aide », « bénéfices contre 
libertés », et « sécurité contre silence ». 
La  formule  « commerce  contre  aide »  représente  le  total  de  l’aide  financière  fournie  à  la  Tunisie  afin 
d’encourager la libéralisation et l’ouverture de son économie22 en préparation à la création d’une ZLE et 
caractérise  également  l’abandon  relatif  d’autres  aspects  importants  du  développement  économique 
visant  à  compenser  les  effets  négatifs  de  la  libéralisation  et  de  l’ouverture,  tels  que  le  manque  de 
développement  du  secteur  privé  intérieur,  l’exclusion  sociale  et  le  chômage  des  jeunes.  La  formule 
« bénéfices  contre  libertés »  exprime  l’approche  relativement  restrictive  de  la  valeur  économique 
ajoutée et des aspects de gouvernance ainsi que l’abandon de la dimension politique du développement 
social  qui  entrave  de facto l’incidence  des mesures  politiques  appliquées.  La  formule « sécurité  contre 
silence » décrit l’attention presque exclusivement réservée aux questions de sécurité dans la coopération 
politique des années précédant la révolution tunisienne et le silence des autorités de l’Union quant aux 
progrès  minimes,  si  pas  à  la  détérioration,  de  la  situation  démocratique  du  pays,  et  ce  malgré 
l’importance accordée explicitement aux normes et valeurs démocratiques par la PEV. 
Coopération économique : une libéralisation des échanges sans économie de marché ? 
l’industrie  et  d’augmenter  sa  compétitivité  sur 
L’objectif principal de la coopération économique précédant la révolution était de préparer le terrain 
pour la création et le lancement d’une ZLE, en vigueur depuis 1998, pour les produits industriels et 
une sélection de produits agricoles, dans le but d’accroître la libéralisation et l’ouverture de l’économie 
et,  parallèlement,  de  moderniser 
les  marchés 
internationaux. Les mesures concrètement mises en œuvre étaient de nature tarifaire et non tarifaire et 
visaient à ouvrir l’économie aux entreprises et aux investissements étrangers, à soutenir les installations 
de production et d’exportation de certaines industries et à augmenter la compétition sur le marché via 
des  programmes  ciblés,  des  ressources  financières  associées  et  une  assistance  technique.  L’économie 
était toutefois dominée par de grandes entreprises plus ou moins liées aux autorités et à la famille 
de Ben Ali, les mesures ont donc d’une certaine façon renforcé la position de monopole des entreprises 
en place au lieu de favoriser la compétition, de développer le secteur privé, en particulier celui des PME, 
20 Voir Ayadi et Gadi (2013). 
21 Pour une évaluation plus complète, consulter Ayadi et Gadi (2013). 
22 Selon l’index de liberté commerciale (Index of Trade Freedom) calculé par la Heritage Foundation, l’index du pays a augmenté 
de 2000 à 2009, ce qui suggère un accroissement du niveau de libéralisation des échanges dans la région. 
24 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
et de promouvoir l’inclusion de la population dans une économie de marché plus juste et plus libre au 
service de tous. De vastes pans de l’économie et de la population, notamment les jeunes et les régions 
défavorisées, n’ont en fait pas profité des opportunités de croissance économique naissant de l’ouverture
progressive et de la libéralisation de l’économie, et ont continué à souffrir de conditions précaires et de 
haut  taux  de  chômage.  Si  l’index  de  liberté  commerciale  de  la  Heritage  Foundation  s’est  amélioré  sur 
cette période, le taux de chômage constamment élevé, en particulier chez les jeunes, qui atteignait 
plus de 10 % avant la révolution23 illustre bien cet état de fait. 
Les  politiques  de  l’Union  dans  le  pays  n’ont  pas  suffi  à  créer  les  incitations  nécessaires  pour  faire 
fonctionner le principe de conditionnalité et, par conséquent, n’ont produit que des résultats mitigés par 
rapport  à  l’objectif  de  créer  les  conditions  propices  à  une  économie  de  marché  saine  via  des  réformes 
socio-économiques ciblées. Des questions importantes n’ont pas été suffisamment traitées, par exemple 
l’ampleur  du  rôle  de  l’État  dans  l’économie  et  ses  potentiels  effets  néfastes  sur  le  développement  des 
PME  et  la  création  d’emplois,  l’amélioration  du  respect  des  libertés  essentielles  pour  garantir  une 
compétition  équitable  sur  le  marché  et  les  questions  de  gouvernance.  En  ce  sens,  la  coopération 
économique  a  eu  des  effets  positifs  sur  l’ouverture  et  la  libéralisation,  mais  n’a  pas  pu 
fondamentalement changer le système de capitalisme de connivence mis en place par le régime de 
Ben Ali, qui s’est peut-être même retrouvé renforcé par la position toujours plus dominante de certaines 
industries et grandes entreprises dans l’économie24. Ces résultats ont été longuement étudiés dans une 
évaluation  complète  de  l’intégration  économique  de  la  région  euro-méditerranéenne  commandée 
quelques années avant la révolution tunisienne par la Commission européenne25. Les auteurs avançaient 
que, tandis que la libéralisation progressive des échanges dans le cadre de l’accord d’association s’était 
révélée efficace pour réduire les droits de douane des produits industriels, même si plus lentement que 
prévu,  celle-ci  n’a  apporté  que  peu,  voire  pas  d’amélioration  concernant  les  obstacles  non  tarifaires  et 
l’environnement  commercial,  ainsi  que  davantage  de  réformes  structurelles  visant  à  préparer  le  terrain 
pour une libéralisation bénéfique des échanges. 
Pour  conclure,  les  politiques  mises  en  œuvre  ont  fourni  aux  acteurs  de  l’économie  tunisienne  des 
perspectives de croissance économique grâce à la libéralisation des échanges et l’intégration progressive 
des marchés de l’Union, mais ont échoué dans leur objectif de jeter les bases nécessaires pour un modèle 
de  développement  économique  durable  et  l’inclusion  sociale.  Cela  s’explique  par  la  pression  de 
l’internationalisation que ces politiques ont exercé sur les grandes entreprises, sans pour autant proposer 
d’incitations  ou  d’opportunités  concrètes  de  création  d’emplois  ou  de  développement  local  étayé  par 
l’égalité  des  chances  pour  tous.  Cette  hypothèse  est  confirmée  par  les  données  économiques  de  la 
période  précédant  la  révolution  tunisienne,  montrant  une  croissance  économique  soutenue  (de  4 % 
par  an  en  moyenne),  mais  également  une  augmentation  substantielle  du  chômage  et  des 
inégalités entre segments de la population et entre les différentes régions du pays26. Ce processus 
contradictoire  pourrait  avoir  alimenté  des  tensions  dissimulées  au  sein  de  l’économie  tunisienne  qui, 
exacerbées par la crise financière mondiale de 2008, la crise économique qui a suivi en Europe et la chute 
des  prix  internationaux  des  produits  agricoles  ont  peut-être  mené  à  l’éclatement  au  grand  jour  des 
troubles sociaux de 201127. 
23 Pour de plus amples informations sur le chômage et le défi que constitue l’inclusion des jeunes en Tunisie, voir : 
http://www.banquemondiale.org/content/dam/Worldbank/document/MNA/tunisia/breaking_the_barriers_to_youth_inclusion
_fre_chap3.pdf. 
24 Voir Ayadi et Gadi (2013), Youngs (2005), Youngs (2006) et IEMED (2010). 
25 Voir De Wulf, L., Maliszewska, M. et al (2009). 
26 Voir El Laithy (2012). 
27 Voir Ayadi et al (2013). 
25 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Coopération socio-culturelle : une vision restrictive de l’efficacité et du rapprochement 
La  détérioration  des  conditions  économiques  qui  s’est  produite  dans  les  années  précédant  la 
révolution  était  majoritairement  due  à  la  crise  économique  et  financière  qui  a  frappé  les  pays  en 
développement,  et  notamment  l’Union  européenne  et  les  faiblesses  structurelles  du  marché  du  travail 
tunisien.  Cela  était  particulièrement  visible  en  raison  de  la  création  insuffisante  d’emplois  adéquats 
compatibles avec les compétences disponibles et l’augmentation de la population en âge de travailler. 
Cette  détérioration  a  été  encore  aggravée,  au  lieu  d’être  compensée,  par  les  politiques  sociales 
inefficaces  mises  en  œuvre  par  le  gouvernement  autocratique  de  Ben Ali,  qui  étaient  davantage  de  la 
poudre aux yeux qu’une soupape sociale pour aider les populations des régions défavorisées. Le contrat 
social avec la population, fondement de la légitimité du régime, consistait à profiter de larges bénéfices 
économiques partagés par une poignée de représentants économiques politiquement liées au pouvoir, 
en  échange  de  libertés  politiques  limitées  et  contrôlées.  Le  système  de  protection  sociale  a  été  par  la 
suite utilisé à cette fin. Deux spécificités de la situation tunisienne doivent par conséquent être prises en 
considération  lors  de  l’évaluation  de  l’incidence  et  de  l’évolution  des  politiques  socio-économiques  de 
l’Union dans le pays, à savoir le fort taux de chômage de la jeunesse hautement qualifiée28 et le contrat 
social  liant  la  population  au  régime  de  Ben Ali,  unique  à  bien  des  égards  parmi  les  gouvernements 
autoritaires de la région. 
Le retrait de l’aide sociale pour les opposants a été l’une des mesures répressives les plus utilisées par le 
régime  et  cet  abus  des  politiques  sociales  en  amont  a  limité  l’impact  potentiel  des  mesures 
promues par l’Union dans ce domaine de coopération. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que la 
coopération  socio-culturelle  entre  l’Union  et  la  Tunisie  au  cours  des  années  précédant  la  révolution 
tunisienne  se  soit  fortement  concentrée  sur  la  gestion  économique  de  l’éducation,  les  institutions 
sanitaires et le rapprochement des normes du travail avec celles de l’Union européenne, au lieu de faire 
pression  pour  obtenir  de  plus  grandes  réformes  et  de  traiter  de  mesures  plus  sensibles  sur  le  plan 
politiques,  telles  que  l’utilisation  des  subventions,  le  rôle  de  l’économie  informelle  et  le  problème 
fondamental du chômage des jeunes, pour n’en citer que quelques-unes. 
Les  politiques  mises  en  œuvre  visaient  principalement  à  améliorer  les  performances  quantitatives  du 
secteur de l’éducation et ont considérablement fait progresser les taux d’inscription, du nombre d’élèves 
par  enseignant  et  des  dépenses  en  matière  d’éducation,  ainsi  que  l’efficacité  du  secteur  de  la  santé29. 
L’essor  des  partenariats  et  des  échanges  dans  le  secteur  de  l’éducation,  notamment  dans  le  cadre  des 
programmes Tempus et Erasmus Mundus, et dans  une certaine mesure dans le secteur de la santé ont 
permis aux scientifiques, chercheurs et professionnels tunisiens de se tourner vers l’étranger, d’échanger 
des savoirs et de créer des liens avec leurs pairs. La participation des femmes au secteur de l’éducation a 
nettement progressé et le rapprochement des normes du travail avec celles de l’Union se poursuit, avec 
l’objectif  annoncé  d’attirer  les  IED  dans  le  pays  et  de  mieux  gérer  le  flux  des  travailleurs  migrants. 
Néanmoins,  la  coopération  socio-culturelle  avec  l’Union  n’est  pas  parvenue  à  mettre  en  place  les 
incitations nécessaires pour que le gouvernement de Ben Ali applique des réformes sociales plus 
larges et, par conséquent, n’a pas réussi à déclencher les améliorations qualitatives indispensables pour 
gérer  l’inadéquation  des  compétences  entre  le  système  éducatif  et  le  marché  du  travail  et  rendre  le 
système  de  protection  sociale  plus  durable30.  C’est  pourquoi  ni  les causes  ni  les  conséquences  du 
chômage, en particulier celui des jeunes, n’ont été traitées efficacement. 
28 Pour plus d’informations sur la particularité de la situation de chômage en Tunisie, voir Ayadi et El Mahdi (2013) and Ayari, C., 
Reiffers, J.L., Mouley, S. et al (2015). 
29 Ayadi et Gadi (2013) et El Mehdi (2013). 
30 Voir Ayadi et El Mehdi (2013). 
26 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Pour conclure, la coopération socio-culturelle des années précédant la révolution s’est révélée utile pour 
améliorer l’efficacité des secteurs de l’éducation et de la santé, ainsi que pour rapprocher les normes du 
travail des exigences internationales, mais n’a pas abouti à un marché du travail plus ouvert et n’a donc 
pas  réglé  le  problème  du  chômage  en  général,  ni  de  celui  des  jeunes  en  particulier.  En  outre,  cette 
coopération  n’a  pas  débouché  sur  une  réforme  du  système  de  protection  sociale,  qui  n’est  par 
conséquent toujours pas viable, qui exclut encore les zones défavorisées et ne garantit pas le respect des 
droits  fondamentaux,  tâches  qui  incombent  d’ordinaire  à  de  tels  systèmes.  Dans  l’ensemble,  les 
conditions  à  l’origine  de  la  détérioration  de  la  situation  socio-économique  et  du  déclenchement  des 
manifestations  de  masse  de 2011  sont  liées.  Symboliquement,  l’étincelle  qui  a  mis  le  feu  aux  poudres 
vient d’un jeune vendeur de fruits qui s’est immolé en réclamant la fin d’une corruption qui a perpétué 
les actes d’intimidation, après que les autorités ont violé à plusieurs reprises ses droits fondamentaux et 
lui  ont  interdit  de  gagner  modestement  sa  vie  en  vendant  des  fruits  à  l’extérieur  des  canaux  de 
distribution organisés. 
Coopération politique : la montée et la chute de la coopération fondée sur des concessions 
Dans  la  relation  entre  l’Union  et  la  Tunisie  avant  la  révolution,  la  coopération  politique  est  de  loin  le 
domaine qui a comblé le moins d’attentes, en raison du financement limité qui lui a été alloué et de la 
nette  préférence  accordée  aux  questions  de  sécurité  au  niveau  opérationnel,  par  rapport  à  l’accent 
placé sur les réformes démocratiques dans la rhétorique de l’accord d’association et du plan d’action de 
la PEV. La grande détermination de l’Union à garantir la collaboration de ses pays partenaires dans la lutte 
contre  le  terrorisme, la  migration  illégale  et  les  autres  formes  de  trafic  après  les  attaques  terroristes  du 
début  des  années 2000  a  limité  sa  marge  de  manœuvre  lorsqu’il  s’agissait  d’exiger  des  comptes  des 
gouvernements  autocratiques  pour  leur  comportement  antidémocratique  et  le  non-respect  des  droits 
fondamentaux. Cela a empêché la coopération politique de l’Union d’aboutir à des résultats concrets en 
termes  de  gouvernance  démocratique,  d’État  de  droit  et  de  promotion  des  droits  de  l’Homme,  ces 
avancées ayant été de ce fait sacrifiées sur l’autel de la coopération sécuritaire. Les dirigeants au pouvoir 
en Tunisie avant la révolution, ainsi que dans d’autres pays de la région, ont en fait utilisé l’argument de 
la  coopération  en  matière  de  sécurité  pour  garantir  le  silence,  voire  la  complaisance  de  l’Union 
face  aux  régimes  autocratiques  et  aux  mesures  répressives.  Cette  situation  a 
européenne 
progressivement entamé la légitimité de l’Union en tant que défenseur actif des réformes démocratiques. 
Les  mesures  de  l’Union  dans  le  domaine  de  la  coopération  politique  ont  engendré  de  constants 
progrès en matière de coopération sécuritaire, mais n’ont pas mené à des réformes démocratiques. 
Il est même possible que les politiques réalisées par l’Union aient eu un effet néfaste pour la démocratie, 
car la décision de faire de l’aspect sécuritaire une priorité a permis à Ben Ali de renforcer son appareil de 
sécurité et de légitimer davantage son gouvernement, proche allié de l’Union combattant le terrorisme et 
le crime organisé. L’Union a rencontré de nombreuses difficultés lors de la mise en œuvre de projets dans 
le cadre de la composante politique du programme MEDA, et le plan d’action de la PEV signé en 2005 n’a 
pas  eu  d’effet  considérable,  à  l’exception  de  certains  programmes  de  coopération  technique  dans  le 
secteur  judiciaire.  Des  problèmes  importants  tels  que  la  corruption  endémique  qui  gangrène  les 
systèmes  politique  et  économique  étroitement  imbriqués  dans  le  pays,  ou  les  violation  des  libertés 
politiques  et  des  droits  de  l’Homme  engendrées  par  les  mesures  répressives  n’ont  même  pas  été 
mentionnées  dans  la  rhétorique  présentée  par  l’Union  concernant  le  partenariat,  et  ce  malgré 
l’importance consacrée à ces questions par la PEV. Ce silence a miné la légitimité de l’Union, alors que 
Ben Ali renforçait son emprise sur la société, maquillant sa politique insoutenable d’un vernis de 
stabilité. 
27 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Ces  arguments  sont  présentés  en  détail  par  Durac  et  Cavatorta  (2009)  dans  leur  article  Strengthening 
Authoritarian  Rule  through  Democracy  Promotion?  Examining  the  Paradox  of  the  US  and  EU  Security 
Strategies:  The  Case  of  Ben  Ali's  Tunisia.  Les  auteurs  avaient  averti  à  l’époque  que  les  contradictions  et 
incohérences de la stratégie de coopération politique de l’Union, qui consistait à placer au second rang la 
promotion  de  la  démocratie  afin  de  conserver  le  statu  quo  au  nom  de  la  stabilité,  n’était  pas  viable  et 
pouvait avoir des conséquences fâcheuses et profondes. La situation est finalement devenue de plus en 
plus intenable, la population croissante de jeunes a progressivement pris conscience de la situation et a 
exigé  des  évolutions  politiques  et  sociales,  que  ce  soit  grâce  à  l’internet,  aux  réseaux  sociaux  ou  aux 
perspectives  offertes  par  l’Union  grâce  à  l’intégration  économique  et  aux  relations  interpersonnelles, 
mais cette population était simultanément confrontée aux difficultés économiques et à la répression du 
régime.  Cela  a  fini  par  déclencher  la  révolution  tunisienne,  qui  a  totalement  changé  la  donne  pour  la 
coopération politique entre l’Union et la Tunisie, comme l’explique la prochaine section. 
28 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
4.2
Évolution des politiques de l’UE depuis la révolution tunisienne 
La  révolution  tunisienne  a  entraîné  deux  mouvements  fondamentaux :  une  démocratisation  et  une 
déstabilisation, qui ont eu des répercussions considérables sur les relations entre l’Union européenne et 
la Tunisie. Ces changements ont ouvert la porte à de nouvelles synergies et complémentarités entre les 
projets politiques des deux partenaires et ont imposé une augmentation du soutien financier, ce qui a 
donné l’occasion à l’Union européenne de renforcer la coopération dans un esprit gagnant-gagnant, de 
consolider  le  codéveloppement  et  d’approfondir  l’intégration,  conformément  aux  objectifs  de  la 
politique  européenne  de  voisinage  (PEV).  D’une  part,  la  démocratisation  du  pays  a  engendré  des 
conditions équitables pour le renforcement du partenariat avec l’Union, pour autant que la politique 
des gouvernements de transition de la Tunisie, à l’issue de la révolution, soit guidée par les principes sur 
lesquels  repose  la  PEV,  c’est-à-dire  la  démocratie,  l’État  de  droit,  la  bonne  gouvernance,  l’économie  de 
marché  et  le  développement  durable.  De  l’autre,  la  déstabilisation  de  l’économie  tunisienne  et 
l’introduction  d’une  série  de  restrictions  politiques,  sociales  et  budgétaires  limitant  la  marge  de 
manœuvre  des  autorités  pour  faire  face  à  ces  situations  d’urgence,  ont  conduit  ces  autorités  à  plaider 
pour  un  soutien  financier  extraordinaire  auprès  de  certains  donateurs  internationaux  dont,  entre 
autres, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, afin d’éviter un désastre. 
L’Union a introduit d’importants changements dans ses politiques et a presque doublé son soutien 
financier dans les années qui ont suivi la révolution, profitant de l’occasion31. Ce soutien a été adapté 
aux progrès des réformes démocratiques, avec le lancement du programme SPRING et la mise en œuvre 
du principe « donner plus pour recevoir plus », qui fonctionne comme un système de récompense visant 
à  encourager  les  gouvernements  qui  ont  entamé  une  transition  démocratique  à  mettre  en  place  le 
programme de réformes convenu. Avant la révolution, lorsque la volonté du gouvernement d’engager de 
véritables  réformes  était  mise  en  doute,  l’application  de  ce  principe  en  Tunisie  était  ancrée  dans  les 
relations du pays avec l’Union. Depuis la révolution et au vu des efforts de démocratisation entrepris par 
le  pays  ainsi  que  de  son  engagement  dans  un  programme  de  réformes  ambitieux,  il  conviendrait  de 
réviser le principe « donner plus pour recevoir plus » dans le cadre des rapports avec la Tunisie. 
Les missions et les visites de hauts fonctionnaires et d’experts de l’Union européenne se sont multipliées 
en vue d’établir de bonnes relations avec les nouvelles autorités tunisiennes et d’appuyer les différentes 
étapes  de  la  transition  démocratique,  telles  que  la  création  d’autorités  de  contrôle,  l’élaboration  de  la 
constitution  et l’organisation  d’élections.  L’Union  s’est,  dans  les  faits,  placée  au  rang  de  promoteur 
principal  de  la  démocratisation  du  pays,  tandis  que  les  autorités  démocratiques  récemment 
constituées  ont  profité  de  ce  parrainage  pour  légitimer  leur  place  dans  les  enceintes  régionales  et 
internationales.  Ce  renforcement  de  l’association  politique  entre  l’Union  et  la  Tunisie  a  conduit  à  la 
création d’un partenariat privilégié en 2012 et à des progrès considérables sur des dossiers clés tels que 
les  négociations  sur  l’accord  de  libre-échange  approfondi  et  complet  (ALECA)  ou  l’établissement  d’un 
partenariat pour la mobilité à la suite de la déclaration politique de mars 2014, et ce, malgré une période 
initiale d’enlisement politique relatif et d’ajustement institutionnel. 
31 Comme le souligne Tocci (2011), ce rapport comporte des éléments importants qui représentent un progrès par rapport aux 
politiques appliquées par l’Union au cours de la dernière décennie, voire des dernières décennies. Pourtant, eu égard aux 
évolutions majeures qui ont lieu dans la région, l’évaluation de la PEV risque d’être insuffisante et trop tardive. En échouant à 
offrir suffisamment d’avantages notables, à s’engager de manière conséquente en vertu du principe de conditionnalité, à tenir 
compte de la réalité multipolaire de la région (et du monde), et à effectuer une révision appropriée du cadre multilatéral plus 
large de ses politiques, l’Union risque d’être distancée par les événements. 
29 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
le 
Le  nouveau  gouvernement  tunisien,  élu  en 2014,  a  affirmé  son  engagement  à  poursuivre 
développement de l’intégration économique avec l’Union et le à renforcer la collaboration dans tous les 
domaines.  L’Union,  à  son  tour,  s’est  engagée  à  accroître  son  soutien  au  pays,  débloquant  150 millions 
d’euros  supplémentaires  pour  la  consolidation  des  institutions  démocratiques  et  la  stabilisation  de 
l’économie.  En  ce  sens,  la  transition  démocratique  de  la  Tunisie  a  ouvert  la  voie  à  une  véritable 
coopération politique, économique et socio-culturelle. L’Union est désormais en mesure d’atteindre les 
objectifs  ambitieux  fixés  dans  le  cadre  de  la  PEV.  Cette  évolution  constitue  une  première  étape, 
conformément à la transition écologique vers un développement durable, dans le scénario d’une alliance 
euro-méditerranéenne élargie, comme le soulignent Ayadi et Sessa (2013)32. 
Coopération politique : des concessions aux synergies et aux complémentarités 
La coopération politique entre l’Union et la Tunisie, qui, avant la révolution tunisienne, était considérée 
comme un talon d’Achille, est depuis devenue source de fierté du point de vue des politiques de l’Union 
dans  le  pays.  Après  la  révolution,  l’Union  s’est  présentée  comme  le  principal  promoteur  de  la 
transition démocratique du pays en jouant un rôle constructif dans les avancées du processus. Elle 
a offert une aide considérable dans la construction et la consolidation des institutions démocratiques et 
de l’État de droit, espérant ainsi consolider sa crédibilité et sa légitimité qui avaient été mises à mal par 
sa passivité face aux agissements antidémocratiques du régime, malgré le discours de la PEV en faveur de 
la démocratie. La révolution a engendré une vaste convergence entre les aspirations démocratiques des 
Tunisiens  et  les  objectifs  poursuivis  par  l’Union  au  moyen  d’une  coopération  politique  dans  la  région, 
comme  exposé  dans  la  PEV,  créant  de  fait  des  conditions  équitables  pour  l’approfondissement  du 
dialogue politique et le renforcement de l’appropriation partagée. 
Eu  égard  à  cette  évolution,  l’Union  a  plaidé  en  faveur  de  la  protection  des  droits  de  l’Homme 
fondamentaux  dès  le  tout  début  de  la  transition  du  pays  et  a  fait  pression  pour  que  la  liberté 
d’expression soit reconnue en tant qu’élément essentiel de toute démocratie saine. Des progrès notables 
dans ce domaine ont rapidement pu être constatés après la chute du régime oppressif, avec par exemple 
l’adoption d’un nouveau cadre réglementaire protégeant l’indépendance des organisations de la société 
civile. 
La  possibilité,  pour  un  grand  nombre  d’acteurs,  d’exprimer  leurs  opinions  politiques  et 
d’influencer le processus décisionnel du pays constitue un autre développement majeur engendré 
par  la  révolution  et  représente  autant  un  défi  qu’une  chance  pour  l’Union.  Les  nombreuses  critiques 
exprimées par les médias tunisiens et, plus généralement, par la société civile à propos de dossiers clés, 
tels que le partenariat pour la mobilité et les négociations au sujet d’un ALECA, peuvent être considérées 
soit comme une menace pour la conclusion et la mise en œuvre efficace de ces accords, soit comme une 
chance de rendre les relations avec la Tunisie plus ouvertes et participatives. Le discours qui accompagne 
la  PEV  accorde  une  grande  importance  aux  valeurs  communes  et  aux  intérêts  partagés  en  tant  que 
conditions  préalables  à  l’appropriation  partagée  des  politiques  mises  en  place  et,  à  terme,  à  leur 
efficacité. Les décideurs politiques de l’Union disposent à présent d’une chance à saisir en ce sens, ayant 
beaucoup  à  gagner  et  peu  à  perdre  dans  l’intégration  rigoureuse  des  aspirations  qui  ont  conduit  le 
peuple tunisien à renverser le régime autoritaire de Ben Ali au sein de l’élaboration des politiques de l’UE 
qui doivent être mises en place33. 
32 Voir http://www.medpro-foresight.eu/fr/publication/sc%C3%A9narios-d%C3%A9valuation-et-de-transitions-vers-une-euro-
m%C3%A9diterran%C3%A9en-durable-en-2030. 
33 Dans un rapport du Forum euro-méditerranéen des instituts de sciences économiques (FEMISE), qui présente un ensemble 
d’éléments essentiels à la conception d’une stratégie de développement socio-économique pour la période suivant la transition, 
Ayari, C., Reiffers, J.L., Mouley, S. et autres (2015) soulignent l’importance d’une pleine intégration des aspirations des Tunisiens 
dans les politiques européennes en tant que condition préalable au succès de toute stratégie de coopération avec ce pays. 
30 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Cependant, d’importantes divergences subsistent entre le discours et la pratique des politiques de 
l’UE  sur  le  terrain,  en  dépit  des  changements  considérables  dans  la  portée  et  l’ampleur  des 
relations de l’Union et la Tunisie. L’évolution, après la révolution tunisienne, de la coopération sur les 
questions de sécurité en est une illustration parlante et constitue une étude de cas intéressante pour ce 
qui est des conséquences de ces divergences. 
Dès  le  tout  début  de  la  transition  démocratique,  l’Union  et  la  Tunisie  ont  entamé  un  dialogue  sur  des 
questions liées à la sécurité et à la migration et des progrès notables dans ce domaine ont été constatés, 
malgré  la  situation  politique  relativement  enlisée  et,  de  ce  fait,  un  certain  ralentissement  en  matière 
d’application  des  réformes.  L’Union  a  consacré  des  ressources  considérables  à  des  programmes  de 
coopération  judiciaire  et  policière,  dont  les  résultats  de  sont  avérés  limités,  notamment  au  cours  des 
premières années de la transition, et a continué à prêter une grande attention à la gestion des frontières 
et au contrôle des flux migratoires. En conséquence, un partenariat pour la mobilité ambitieux, quoique 
controversé34,  a  été  conclu  en 2014.  En  revanche,  la  coopération  en  matière  de  recouvrement  d’avoirs 
détournés  et  de  modernisation  du  secteur  de  la  sécurité,  c’est-à-dire  les  priorités  définies  par  le 
gouvernement  tunisien,  n’a  pas  encore  apporté  de  résultats  notables.  Dans  les  faits,  la  rhétorique  de 
l’Union  en  matière  de  questions  de  sécurité,  qui  était,  à  l’époque  du  régime  répressif  précédant  la 
révolution,  presque  exclusivement  axée  sur  la  coopération  policière  et  la  gestion  des  frontières  pour 
contrer  les  migrations  illégales  et  les  menaces  terroristes,  a  évolué  en  un  discours  plus  large  sur 
l’importance  de  la  consolidation  de  l’État  de  droit  et  de  la  garantie  de  la  protection  des  droits  et  des 
libertés  acquis  grâce  à  la  révolution.  Pourtant,  en  pratique,  la  coopération  en  matière  de  sécurité 
demeure fortement centrée sur le contrôle des flux de migration et la lutte contre le terrorisme. 
Cette divergence entre discours et pratique a alimenté les critiques au sein des médias tunisiens et de 
la société civile vis-à-vis du partenariat pour la mobilité signé en 2014, qui vise à faciliter la circulation 
des  personnes  entre  l’Union  européenne  et  la  Tunisie  et  à  promouvoir  une  gestion  commune  et 
responsable  des  flux  migratoires  existants.  Ce  partenariat  prévoit  une  simplification  des  procédures 
d’octroi  de  visas  ainsi  qu’une  externalisation  de  facto  des  frontières  de  l’Union  en  Tunisie  et  le 
rapatriement  automatique  des  migrants  illégaux  venant  de  Tunisie  ou  ayant  transité  par  le  pays.  De 
nombreux responsables ont fait remarquer que ces mesures ambitieuses ne servaient pas les intérêts de 
la  Tunisie,  la  simplification  des  procédures  d’octroi  de  visas  demeurant  soumise  à  des  négociations 
supplémentaires tandis que les mesures impliquant la responsabilité de la Tunisie dans la gestion des flux 
migratoires sont censées être mises en œuvre dans des délais plus courts et sans conditions particulières. 
En outre, la déclaration politique commune annonçant un partenariat pour la mobilité a été émise à une 
époque où la Tunisie ne disposait d’aucune politique migratoire clairement formulée, contrairement aux 
dires  de  l’Union  qui  affirme  que  ses  relations  avec  les  pays  partenaires  ont  été  fondées  sur  des 
programmes  de  réformes  et  des  cadres  stratégiques  nationaux.  Lors  de  la  consultation,  certaines 
personnes interrogées ont déclaré que le partenariat pour la mobilité est le résultat de la détermination 
des  priorités  de  l’Union  et  d’une  stratégie  visant  à  imposer  ses  propres  intérêts  à  un  moment 
particulièrement  délicat  pour  la  Tunisie.  D’autres  ont  fait  observer  que,  même  si  la  transition 
démocratique  a  favorisé  la  convergence  entre  les  valeurs  et  les  intérêts  de  l’Union  et  de  la  Tunisie,  les 
différences dans la perception d’enjeux essentiels tels que la migration affaiblissent la confiance 
mutuelle  des  partenaires.  Les  difficultés  rencontrées  lors  de  l’obtention  de  visas  témoignent  de  ce 
problème, révélant une contradiction avec les promesses faites par l’Union en vertu du partenariat pour 
la mobilité. 
34 Plusieurs organisations de la société civile ont critiqué la réadmission de migrants en situation irrégulière prévue par le 
partenariat. 
31 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
On  peut  retenir  plusieurs  enseignements  des  débats  qui  ont  accompagné  la  signature  du  partenariat 
pour  la  mobilité.  La  transition  démocratique  de  la  Tunisie  force  l’Union  à  davantage  prendre  en 
compte les acteurs concernés par ses politiques dans le cadre du dialogue avec les autorités du pays, 
et à nouer des liens reposant sur des synergies entre les intérêts respectifs des parties prenantes plutôt 
que sur des concessions. C’est là une conséquence du nombre de participants actifs et de points de vue 
qui  émergent  au  sein  de  la  société  tunisienne  et  de  l’influence  de  ce  phénomène  sur  les  décideurs 
politiques  nationaux.  Les  critiques  formulées  par  certaines  parties  concernées  à  propos  du  partenariat 
pour la mobilité sont davantage liées à des questions de calendrier et de détermination des priorités 
des  réformes  examinées  qu’à  leur  contenu  à  proprement  parler.  La  Tunisie  a  également  intérêt  à  se 
doter  de  systèmes  efficaces  pour  la  gestion  des  flux  de  migration  et  la  prévention  des  menaces 
terroristes, en particulier dans un contexte régional agité ; cependant, dans la délicate phase de transition 
actuelle, la priorité est indubitablement de réformer le secteur de la sécurité et de renforcer les capacités 
de  gestion  des  affaires  intérieures.  Le  gouvernement  tunisien  a,  en  réalité,  demandé  à  l’Union 
européenne un soutien pour gérer l’instabilité interne et la consolidation démocratique, et un ambitieux 
programme de réforme et de modernisation du secteur est prévu dans le plan d’action annuel pour 2015. 
Il est cependant indispensable, du moins pour ce qui est de la perception qu’ont les Tunisiens de l’Union 
européenne,  de  promouvoir  une  meilleure  compréhension  et  de  créer  un  consensus  autour  des 
réformes défendues par l’Union. En ce sens, il serait judicieux de traiter en priorité les mesures prévues et 
de mieux prendre en compte les intérêts respectifs de chaque partie. Dans le cas contraire, le « capital de 
sympathie »  qu’a  acquis  l’Union  avec  le  ferme  soutien  qu’elle  a  apporté  à  la  transition  démocratique 
risque d’être compromis. 
Dans  son  article  intitulé  « Channelled  Policy  Transfers:  EU-Tunisia  Interactions  on  Migration  Matters » 
(« Orientation des transferts de politiques : interactions UE-Tunisie en matière de migration »), Cassarino 
(2014) analyse les relations UE-Tunisie en matière de sécurité et de migration, démontrant que la priorité 
qui  a  été  accordée  à  des  questions  liées  à  la  sécurité  dans  les  négociations  sur  la  mobilité, 
instrumentalisées par l’ancien président Ben Ali à ses propres fins, n’a pas véritablement évolué après la 
révolution  tunisienne.  Il  soutient  ensuite  que  la  résilience  de  ce  traitement  prioritaire  est  menacée  par 
l’émergence de certains individus influents parmi la population civile et par les critiques y afférentes, ce 
qui risque d’entraver, ou du moins de compliquer, le dialogue politique. Ces conclusions attestent de la 
nécessité  de  renforcer  la  participation  des  parties  prenantes  dans  l’élaboration  et  la  détermination  des 
priorités  des  politiques  de  l’UE  afin  d’éviter  que  soient  privilégiées  les  questions  de  sécurité,  ce  qui 
mènerait de fait à une détérioration du dialogue politique sur la migration et empêcherait de trouver des 
solutions à la crise actuelle. 
Contrairement à l’évolution de la coopération en matière de sécurité, domaine dans lequel les intérêts et 
priorités des deux parties ne coïncident pas forcément, le soutien total de l’Union à la construction et 
à  la  consolidation  de  la  démocratie  en  Tunisie  a  contribué  à  un  changement  dans  la  perception  de 
l’Union européenne qui, auparavant considérée comme complaisante à l’égard d’un régime répressif, est 
désormais  vue  comme  une  gardienne  de  la  révolution.  L’observation  permanente  des  progrès  des 
réformes  démocratiques,  l’organisation de  missions ad  hoc  et  la  préparation  de  déclarations  politiques 
appelant  à  des  réformes  essentielles  à  une  époque  de  grande  agitation  sociale  et  d’impasse  politique 
sont autant de raisons qui ont contribué à ce changement. Les résultats de la consultation portant sur ces 
questions s’avèrent cependant mitigés : tous les répondants s’accordent en apparence sur l’importance 
que pourrait avoir l’Union dans le soutien à la transition démocratique, mais certains ont fait remarquer la 
rareté  des  actions  concrètement  mises  en  place  à  cette  fin.  Ces  résultats  prouvent  à  quel  point  il  est 
essentiel d’éviter les divergences entre le discours et la pratique des politiques et des programmes 
de l’UE. 
32 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Plus particulièrement, l’appui fourni par l’Union à la transition démocratique s’est articulé autour de trois 
axes  principaux.  Le  premier  a  été  d’accompagner  la  transition  dans  chacune  de  ses  étapes 
fondamentales,  surveillant  de  près  les  progrès  effectués  dans  le  programme de  réformes  au  moyen de 
rapports  d’étape  annuels  dans  lesquels  sont  formulées  des  recommandations  destinées  à  guider  les 
actions  des  autorités  récemment  élues.  Des  missions  de  fonctionnaires  et  d’experts  de  l’Union 
européenne ont également été organisées afin de prôner l’adoption de réformes essentielles, d’appuyer 
l’élaboration de la constitution et de contrôler le déroulement d’élections démocratiques à l’occasion de 
missions  d’observation  électorale  (MOE).  Le  deuxième  axe  a  été  la  contribution  de  l’Union  au 
renforcement des capacités des institutions démocratiques et à l’introduction de pratiques de bonne 
gouvernance à l’aide de programmes de jumelage et de programmes d’assistance technique et échange 
d’informations  (TAIEX)  ciblés,  apportant  par  exemple  un  soutien  au  secteur  judiciaire  dans  le  but  de 
garantir  son  indépendance  vis-à-vis  des  pouvoirs  exécutif  et  législatif.  Le  troisième  axe  a  été  de 
promouvoir les normes et les valeurs démocratiques dans le pays, et notamment le respect des droits 
de  l’Homme  fondamentaux  tels  que  l’égalité  des  sexes  et  la  liberté  d’expression  en  préconisant 
l’adoption de traités internationaux et l’organisation d’événements de sensibilisation ciblés au sein de la 
société civile. 
L’Union a joué un rôle important en ce qu’elle a soutenu les autorités tunisiennes d’après la révolution à 
faire face aux défis de la transition, exploitant ainsi la possibilité de renforcer la coopération avec le pays 
qu’a représentée la révolution tunisienne. En conséquence, un partenariat privilégié a été lancé en 2012, 
les  travaux  préparatoires  pour  les  négociations  sur  un  ALECA  ont  été  achevés  et,  comme  mentionné 
précédemment,  une  déclaration  commune  en  faveur  d’un  partenariat  pour  la  mobilité  a  été  émise 
en 2014.  Dans  le  plan  d’action  annuel 2015  de  la  PEV,  la  consolidation  de  la démocratie  est  retenue  en 
tant que priorité essentielle, plaçant de facto la coopération politique, et non les négociations portant sur 
des questions commerciales, au premier plan des relations de l’Union avec la Tunisie. 
Pour  finir,  l’évolution  de la  coopération  politique  entre  l’Union  et  la  Tunisie  après  la  révolution  est 
caractérisée par une vaste convergence des normes et des valeurs, mais également par l’apparition 
de nouvelles critiques et de défis associés. D’un côté, dans les domaines de coopération pour lesquels 
l’Union  et  la  Tunisie  partagent  des  intérêts  et  des  valeurs  communes,  tels  que  le  développement  et  la 
consolidation  des  institutions  démocratiques,  le  dialogue  politique  a  pu  être  fortement  renforcé  et  a 
d’ores  et  déjà  abouti  à  des  résultats  positifs,  dont  notamment  le  succès  même  de  la  transition 
démocratique,  qui  aurait  été  encore  plus  difficile  à  réaliser  sans  le  soutien  de  l’Union.  D’un  autre  côté, 
dans les domaines de coopération où l’Union, aux prises avec ses propres démons, a tendance à appuyer 
ses  propres  intérêts  dans  les  accords,  comme  c’est  le  cas  pour  les  sujets  liés  à  la  migration,  le  grand 
nombre  de  parties  concernées  exprimant  leurs  opinions  dans  le  domaine  public  forcent  l’Union  à 
reconsidérer sa façon de mener le dialogue politique. Ces critiques, souvent très sévères, sont exacerbées 
par le climat qui demeure très tendu au lendemain de la révolution et risquent d’affaiblir la confiance de 
la Tunisie en l’Union en tant que partenaire incontournable. 
Dans l’ensemble, si le dialogue et la coopération politiques ne reposent pas sur des synergies entre 
les  intérêts  respectifs  des  parties  plutôt  que  sur  des  intérêts  soi-disant  partagés,  les  relations 
risquent de demeurer dans une situation de compromis dont les défaillances et les limites ont déjà été 
éprouvées  eu  égard  aux  troubles  sociaux.  Cette  section  a  souligné  l’importance  de  garantir  une 
appropriation partagée et efficace du dialogue politique en améliorant la compréhension des politiques 
de l’UE au sein de la société en général ainsi qu’en renforçant la participation des acteurs concernés dans 
l’élaboration de ces politiques. Veiller à la cohérence entre le discours et la pratique des politiques 
de l’Union européenne, en particulier, renforcerait la confiance de la population à l’égard des actions de 
l’Union,  tandis  que  promouvoir  la  coordination  transversale  entre  différents  domaines  de 
coopération, de manière à mieux tenir compte des priorités de la Tunisie, contribuerait à la réalisation de 
33 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
l’objectif  de  stabilisation  activement  poursuivi  par  l’Union  dans  le  pays.  Dans  le  cas  emblématique  du 
partenariat pour la mobilité, certains commentateurs, dans l’Union comme en Tunisie, ont soutenu que 
bloquer  ou  rapatrier  des  migrants  sur  le  territoire  tunisien,  y  compris  des  migrants  qui  ne  sont  pas 
tunisiens,  accentuerait  encore  davantage  une  instabilité  socio-économique  déjà  dangereuse,  alors  que 
construire le partenariat sur la base de possibles synergies entre les économies européenne et tunisienne 
pourrait  profiter  aux  deux  parties35.  Ces  commentateurs,  qui  comptent  parmi  eux  certaines  figures 
politiques  de  la  gauche  de  l’échiquier  politique  du  Parlement  européen,  ont  proposé  d’augmenter 
considérablement  les  migrations  légales  afin  d’offrir  aux  jeunes  Tunisiens  des  chances  au  sein  d’une 
économie européenne vieillissante, en échange d’un contrôle renforcé des flux migratoires illégaux aux 
frontières tunisiennes. Leur opinion a eu une grande portée dans la société civile tunisienne. 
Coopération économique : la stabilisation, un prérequis pour l’intégration 
La  question  de  prendre  en  compte  les  priorités  de  la  Tunisie,  non  seulement  dans  l’élaboration  de 
politiques et de programmes, mais également dans la détermination des priorités parmi ces politiques et 
programmes au sein du programme de coopération, revêt une importance particulière dans le domaine 
de la coopération économique. La priorité principale de la Tunisie, comme l’a déclaré le gouvernement 
élu,  est  toujours  de  créer  de  l’emploi  et  de  remédier  aux  inégalités  croissantes  entre  les  régions 
côtières et les régions de l’intérieur du pays36. Le taux de chômage des jeunes élevé et persistant, qui se 
situe à une moyenne de 30 % sur les vingt dernières années selon les statistiques de la Banque mondiale, 
représente  une  composante  structurelle  de  l’instabilité  socio-économique  qui  peut  être  considérée 
comme  le  facteur  déterminant  des  troubles  sociaux  ayant  mené  à  la  révolution  en 2011  et  qui, 
aujourd’hui,  en  compromet  les  aboutissements.  C’est  un  fait :  un  grand  nombre  de  jeunes  gens  se 
radicalisent, désillusionnés par une révolution qu’ils ont amorcée mais qui a échoué à leur apporter de 
nouvelles possibilités économiques. Un rapport publié récemment par le groupe de travail des Nations 
unies  sur  l’utilisation  de  mercenaires  souligne  que  jusqu’à  6 000  Tunisiens  ont  rejoint  les  champs  de 
bataille en tant que combattants étrangers en Syrie, en Iraq, au Yémen, au Mali ou en Libye voisine. Dans 
ce contexte, stabiliser l’économie du pays à l’aide de réformes socio-économiques visant à optimiser 
la  création  d’emploi  devrait  être  considéré  non  seulement  comme  une  priorité,  mais  également 
comme  une  condition  préalable  à  la  libéralisation  des  échanges,  compte  tenu  qu’à  court  terme, 
poursuivre l’ouverture de l’économie pourrait engendrer des adaptations sectorielles qui pourraient avoir 
des conséquences négatives sur l’emploi et l’intégration sociale. 
35 Pour une analyse de la question, voir la série d’articles et d’éditoriaux publiés sur le site Nawaat (http://nawaat.org/portail/) au 
sujet du partenariat pour la mobilité et, plus globalement, de la manière dont l’Union gère la crise des réfugiés dans la région. 
36 Lors d’une récente visite en Tunisie, le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim a appelé à concentrer davantage le 
soutien international sur ces deux priorités essentielles pour le pays. Voir le communiqué de presse, disponible à l'adresse 
suivante (en anglais) : http://www.worldbank.org/en/news/press-release/2016/03/28/world-bank-international-support-
political-economic-transition-tunisia. 
34 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Cette hypothèse est tempérée par les résultats de plusieurs études37 portant sur l’incidence des mesures 
de libéralisation des échanges mises en œuvre dans le passé et l’évaluation des conséquences possibles 
de  l’ALECA  actuellement  en  cours  de  négociation.  Ces  études  ont  fait  ressortir  que  si  la  libéralisation 
présente  des avantages à  moyen et à  long terme,  elle  peut néanmoins  s’avérer  coûteuse  à court 
terme,  et  notamment  pour  certains  secteurs  spécifiques  de  l’économie  tels  que  l’agriculture,  où  l’on 
constate  un  important  déséquilibre  entre  les  producteurs  tunisiens  et  ceux  des  États  membres  de 
l’Union38. Dans un rapport du Centre commun de recherche portant sur les perspectives de croissance de 
l’intégration commerciale euro-méditerranéenne dans le secteur de l’agriculture et ses conséquences sur 
l’emploi, il apparaît que l’ALECA est susceptible d’entraîner une expansion du secteur agricole tunisien, 
qui  pourvoit  principalement  des  emplois  faiblement  qualifiés,  mais  aussi  une  détérioration  des 
conditions  dans  le  secteur  des  services,  qui  est  le  plus  favorable  à  la  création  d’emplois  hautement 
qualifiés39. 
Dans  les  faits,  les  statistiques  montrent  que  depuis  le  lancement  de  la  PEV  en 2004  et,  plus 
particulièrement, depuis la création d’une zone de libre-échange pour les produits industriels en 2008, la 
Tunisie  a  vu  sa  balance  commerciale  et  son  équilibre  budgétaire  se  détériorer,  en  partie  à  cause  de  la 
réduction des droits de douane et de l’augmentation des importations en provenance de l’Union qui en a 
résulté  mais  n’a  pas  été  compensée  par  une  augmentation  des  exportations40.  Certaines  études  non 
publiées  laissent  également  entendre  que  la  création  d’une  zone  de  libre-échange  pour  les  produits 
manufacturés  et  les  programmes  connexes  qui  soutiennent  la  compétitivité  des  secteurs  d’activité 
tunisiens ont  favorisé  le  renforcement  de  grandes entreprises  nationales  aux  dépens  d’entreprises  plus 
petites et ce, bien que les PME soient les principaux fournisseurs d’emploi dans le secteur privé des pays 
comme la Tunisie. Ces résultats, pour le moins mitigés, doivent toutefois être contextualisés. L’accord de 
libre-échange sur les produits manufacturés a été signé juste avant la crise financière mondiale de 2008, 
qui a eu des effets négatifs sur les importations de l’Union, principale partenaire de la Tunisie41. Deux ans 
plus  tard,  la  révolution  tunisienne  a  eu  de  nombreuses  répercussions  négatives  sur  la  situation 
économique et budgétaire, contribuant largement à la détérioration des indicateurs susmentionnés. 
37 Mattoo, Rathindran et Subramanian (2002) affirment que l’incidence de la libéralisation des services sur l’emploi des facteurs 
de production nationaux est incertaine. D’une part, l’emploi connaîtra un déclin si le pays est importateur net du service 
libéralisé, pour autant que ce secteur ait été, au départ, compétitif au sein du pays. D’autre part, si le secteur était soumis à des 
restrictions d’entrée nationales avant le processus de libéralisation, l’emploi national pourrait connaître une croissance à la suite 
de ce processus. L’Organisation internationale du travail (2013) souligne que les pays en développement ont tendance à avoir 
des exportations peu diversifiées et qu’au fur et à mesure de la croissance du pays, ces exportations se diversifient avant de 
connaître une nouvelle période de spécialisation. Tandis que la marge intensive (volumes) domine en matière de croissance des 
exportations, c’est la marge extensive (nouveaux produits) qui domine en matière de diversification. Par conséquent, si les 
décideurs politiques se préoccupent de la croissance de l’emploi lié aux exportations, la marge intensive peut sembler attractive, 
du moins à court et à moyen terme, les pays du Sud de la Méditerranée ayant un avantage compétitif comparatif dans la 
production agricole, où il existe un fort potentiel commercial inexploité. Cependant, Weisbrot et Baker (2005) laissent entendre 
qu’une incertitude similaire prévaudrait lors de la libéralisation agricole. Si le processus de transition est trop rapide, il est 
probable que de nombreux travailleurs perdent leur emploi et doivent subir de longues périodes de chômage, au lieu de 
retrouver rapidement du travail comme le suggère la théorie. Si le déplacement de la main-d’œuvre est suffisamment important 
au point de générer une instabilité sociale, les investissements nécessaires ne se concrétiseront pas, mettant au chômage les 
personnes auparavant employées dans les secteurs nationaux insuffisamment protégés. 
38 Voir les conclusions de l’évaluation de l’impact du commerce sur le développement durable qui appuie les négociations sur 
l’ALECA commandée par la Commission européenne et disponible à l’adresse suivante (en anglais) : 
http://ec.europa.eu/trade/policy/policy-making/analysis/sustainability-impact-assessments/assessments/. 
39 Voir le Centre commun de recherche (2013). 
40 Ces arguments sont fondés sur les données commerciales publiées par la Direction générale du commerce de la Commission 
européenne et la Banque centrale de Tunisie. 
41 Voir Ayadi (2013). 
35 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
Cependant,  ces  tendances  négatives  et  le  manque d’avantages  concrets  pour  la  Tunisie qui  résulte 
des accords commerciaux conclus par le passé ont alimenté le scepticisme de nombreux Tunisiens 
vis-à-vis des négociations sur un ALECA. L’évaluation de l’impact du commerce sur le développement 
durable qu’aurait un ALECA entre la Tunisie et l’Union, commandée par cette dernière afin de préparer le 
terrain  pour  les  négociations  à  venir,  relève  que  cet  accord,  s’il  est  supposé  profiter  à  l’économie 
tunisienne à moyen et à long terme, est susceptible d’engendrer une hausse de 7 % du PIB et de 20 % des 
exportations vers l’Union ainsi que de multiples réajustements au niveau sectoriel sur le court terme, et 
l’on prévoit un transfert entre certains secteurs qui concernera jusqu’à 8 % de la main-d’œuvre qualifiée 
et 11 %  de  la  main-d’œuvre  non  qualifiée.  Ces  ajustements  à  court  terme,  étant  donné  la  situation 
actuelle de chômage élevé et persistant et, en conséquence, d’instabilité socio-économique, pourraient 
ne  pas  s’avérer  viables  pour  la  Tunisie.  Langan  (2015)  soutient  ce  point  de  vue  et  fait  observer  que 
l’ALECA entraîne le risque d’aggraver la pauvreté et d’alimenter encore davantage les troubles sociaux, ce 
qui viendrait s’ajouter à une situation déjà très délicate, en dépit des bonnes intentions qui sous-tendent 
les négociations. 
De nombreux économistes, dans l’Union comme en Tunisie, ont soutenu que poursuivre l’ouverture de 
l’économie tunisienne sans mobiliser au préalable les investissements nécessaires à l’approfondissement 
de  la  modernisation  des  structures  productive  du  pays  et  stimuler  la  compétitivité  des  producteurs 
locaux pourrait avoir de graves conséquences, et notamment dans le secteur agricole. Ces arguments ont 
suscité de vives critiques à l’encontre de l’ALECA, dans les médias tunisiens et, dans une moindre mesure, 
au sein de la société civile, qui a à son tour demandé à être davantage associée aux négociations à venir 
et,  en  ce  sens,  a  formulé  des  recommandations  spécifiques42.  L’Union  s’est  montrée  réceptive  aux 
critiques  exprimées  et  a  souligné  l’importance  d’une  libéralisation  asymétrique,  qui  constitue  un 
moyen  de  compenser  les  effets  négatifs  d’un  tel  accord  sur  le  court  terme  et  de  laisser  du  temps  aux 
réformes  socio-économiques  destinées  à  préparer  l’économie  tunisienne  à  une  libéralisation  plus 
approfondie, en vue d’engendrer les résultats escomptés. La question cruciale est de savoir si procéder à 
une  libéralisation  asymétrique  sera  suffisant  pour  permettre  à  la  Tunisie  d’amortir  les  chocs  sectoriels 
prévus à court terme ou si, même pour cela, la situation s’avère trop fragile. 
Toutes les personnes ayant participé à la consultation ont soutenu que l’ALECA représentait une chance 
pour le développement économique du pays, mais certaines ont relevé la nécessité d’avoir un dialogue 
ouvert sur ses effets à court et à long terme, et de veiller à ce que les consultations au niveau sectoriel 
permettent de garantir la réelle durabilité des ajustements à court terme. Il est intéressant de remarquer 
que l’une des personnes interrogées a souligné que le gouvernement élu de manière démocratique est la 
seule instance légitime qui s’implique dans les négociations de l’ALECA, et que les critiques formulées par 
les organisations de la société civile devraient être attentivement prises en compte car elles pourraient 
bien être motivées par des griefs politiques contre le gouvernement. 
Les  difficultés  économiques  exceptionnelles  auxquelles  est  actuellement  confrontée  la  Tunisie 
comportent  une  dimension  économique,  mais  aussi  sociale  et  budgétaire.  D’une  part,  le  chômage 
des  jeunes  et  les  inégalités  territoriales  se  sont  aggravés  en  raison  de  l’instabilité  et  de  l’incertitude 
prolongées  qu’a  engendrée  la  période  de  transition.  D’autre  part,  la  situation  chaotique  dans 
l’administration  publique  du  pays  et 
institutionnelles  qui  en  découlent  ont 
les  défaillances 
considérablement  réduit  la  marge  de  manœuvre  budgétaire  des  autorités  tunisiennes,  compliquant 
encore davantage la stimulation de l’économie. 
La réaction de l’Union face à ces enjeux a été double et la coopération économique, dans les années qui 
ont suivi la révolution, ont visé à la fois la dimension socio-économique et la dimension budgétaire. Parmi 
42 Pour plus d’informations, consulter l’adresse suivante : http://ftdes.net/2016/02/declaration-sur-laleca/. 
36 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
les  ressources  allouées  à  la  Tunisie,  80 %  des  ressources  pour  la  période 2011-2013  et  40 %  pour  la 
période 2014-2020  visent  à  soutenir  les  réformes  socio-économiques  conçues  pour  stimuler  une 
croissance inclusive, notamment grâce au développement et à la capacité du secteur privé et des micro, 
petites et moyennes entreprises à créer des emplois. Sur ces deux périodes, 10 % et 30 % des ressources 
visent à soutenir l’emploi et la cohésion sociale. En ce qui concerne la dimension budgétaire, l’Union a 
d’abord  affecté 300 millions d’EUR  à 
l’aide  macrofinancière,  puis  a  augmenté  cette  somme 
à 500 millions d’EUR  afin  de  compléter  le  plan  d’ajustement  du  Fonds  monétaire  international  (FMI)  et, 
ainsi, d’aider le gouvernement tunisien à respecter ses obligations financières. Par conséquent, l’Union a 
considérablement  renforcé  son  rôle  de  principal  partenaire  économique  de  la  Tunisie,  apportant 
aux autorités récemment élues un soutien essentiel pour faire face aux enjeux socio-économiques de la 
période  de  transition  et  se  fondant  sur  cette  coopération  renforcée  pour  faire  avancer  davantage  les 
travaux préparatoires en vue des négociations de l’ALECA. 
Ce rôle de premier plan s’est traduit par une plus grande coopération économique et par un soutien 
plus complet. Les mesures mises en place jusqu’à présent comprennent des programmes bilatéraux et 
régionaux  pour  le  développement  du  secteur  privé  et  la  création  de  partenariats  spécifiques  pour  la 
coopération  sectorielle  (technologies  de  l’information  et  de  la  communication,  transport  aérien  et 
gestion des ressources en eau). L’Union a appuyé le développement du secteur privé depuis les débuts 
de  la  Facilité  euro-méditerranéenne  d’investissement  et  de  partenariat  (FEMIP),  mais  les  écarts  dans  la 
promotion  de  réformes  socio-économiques  se  sont  accrus  avec  le  lancement  du  partenariat  privilégié 
en 2012,  comme  le  démontre  l’application  de  l’initiative  relative  aux  PME  (« Small  Business  Act »)  ou  le 
lancement  du  programme  Med4jobs  promu  par  l’Union  pour  la  Méditerranée.  Par  ailleurs,  l’une  des 
priorités fondamentales du cadre unique d’appui pour la période 2014-2020 est l’aide au développement 
régional et local, qui anticipe de nouvelles possibilités d’approfondissement de la coopération, compte 
tenu  de  la  longue  expérience  de  l’Union  dans  le  domaine  couvert  par  la  politique  de  cohésion.  Cette 
priorité  soulève  la  question  de  savoir  s'il  convient  d’accompagner  la  Tunisie  pour  qu’elle  accède  au 
financement structurel à moyen terme. 
Toutes  ces  mesures  sont  essentielles  pour la  consolidation  de  l’économie  tunisienne,  eu  égard  à 
l’approfondissement  de  l’intégration  économique  du  pays  avec  l’Union,  qui  devrait  aboutir  à  la 
création  de  l’ALECA,  source  de  controverse.  Les  programmes  mis  en  place  ont  contribué  à  accélérer  le 
rapprochement des cadres législatifs et réglementaires tunisiens des normes de l’UE, comme le montre la 
signature d’un accord sur l'évaluation de la conformité et l'acceptation des produits industriels (ACAA). 
En  outre,  l’appui  de  l’Union  aux  réformes  socio-économiques  et,  plus  particulièrement,  les  initiatives 
lancées en vue de développer le secteur privé ont été favorablement accueillis dans les médias tunisiens 
et  au  sein  des  organisations  de  la  société  civile,  ce  qui  contraste  avec  les  critiques  parfois  sévères 
exprimées au sujet des négociations sur un ALECA. 
Pour finir, il existe aujourd’hui une plus grande marge de manœuvre pour la promotion de réformes 
socio-économiques  visant  à  développer  le  secteur  privé  et  à  améliorer  les  conditions  du  marché, 
ouvrant  la  voie  à  une  intégration  économique  plus  approfondie  et  à  la  création  d’un  ALECA.  La 
coopération  économique,  auparavant  étroitement  concentrée  sur  la  stimulation  de  l’ouverture  de 
l’économie  et  la  libéralisation du  commerce,  bénéficie  désormais  d’une  approche  plus  globale,  grâce à 
laquelle les négociations commerciales sont complétées par un soutien aux mesures destinées à jeter les 
bases de la libéralisation des échanges et à en limiter les effets négatifs à court terme. En parallèle, les 
difficultés  socio-économiques  et  budgétaires  persistantes,  liées  à  l’instabilité  et  à  l’incertitude  de  la 
période de transition, demeurent un enjeu crucial pour la Tunisie et la promotion de ces réformes socio-
économiques  structurelles,  qui  engendreront  probablement  des  résultats  notables  en  matière  de 
création  d’emploi  à  court  et  à  moyen  terme,  devraient  bénéficier  d’un  traitement  prioritaire  et  sans 
ambiguïté. 
37 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
En  ce  sens,  avancer  trop  rapidement  dans  les  négociations  controversées  de  l’ALECA  implique  le 
risque  de  compromettre  la  grande  marge  de  manœuvre  pour  la  promotion  de  réformes  socio-
économiques  dont  bénéficie  à  présent  l’Union,  en  particulier  si  l’opinion  publique  a  le  sentiment  que 
cette  marge  de  manœuvre  est  peu  à  peu  réduite.  Là  encore,  la  qualité  du  dialogue  politique  sur  les 
négociations de l’ALECA est une question déterminante, dans la mesure où ce dialogue doit faire en sorte 
que  les  négociations  consolident,  et  non  ne  compromettent,  le  rôle  de  l’Union  en  tant  que  partenaire 
essentiel  de  la  Tunisie.  De  plus,  toutes  les  personnes  ayant  participé  à  la  consultation  ont  relevé 
l’importance  des  mesures  de  soutien  de  l’Union  pour  exploiter  la  chance  que  représente  l’ALECA, 
appuyant  encore  davantage 
les 
programmes  de  soutien  engendrent  des  résultats  tangibles  avant  de  s’engager  dans  une  plus  grande 
libéralisation des échanges. 
il  serait  préférable  d’attendre  que 
l’hypothèse  selon 
laquelle 
Coopération socio-culturelle : du dialogue intergouvernemental au soutien de la société 
Dans les années qui ont précédé la révolution tunisienne, seuls des progrès limités ont été réalisés dans le 
domaine  de  la  coopération  socio-culturelle,  à  l’exception  des  secteurs  de  l’éducation  et  de  la  santé.  Le 
régime exploitait alors les politiques sociales pour maintenir son emprise sur la population et la plupart 
des  politiques  prévues  par  l’Union  étaient  considérées  comme  étant  trop  intrusives.  Comme  souligné 
précédemment, le manque de réformes socio-économiques et de mesures concrètes pour remédier à des 
problèmes  importants  tels  que  la  durabilité  du  système  de  protection  sociale  ou  la  protection  des 
travailleurs  a  contribué  au  déclenchement  des  manifestations  de  masse  et,  finalement,  à  la  chute  du 
régime.  Le  tableau  a  considérablement  changé  avec  la  révolution  et  le  détournement  partiel  de 
l’attention de l’Union, qui s’est déplacée du gouvernement à la société en général, se traduisant par 
un soutien total à la construction et à la consolidation d’une société démocratique, fondée sur le respect 
des droits et des libertés individuels. 
Trois  principales  évolutions  de  la  coopération  socio-culturelle  peuvent  notamment  être  soulignées. 
Premièrement,  l’Union  considère  désormais  le  soutien  à  la  société  civile  comme  une  priorité  dans  la 
conception  et  la  mise  en  œuvre  de  ses  politiques  en  Tunisie,  partant  de  l’hypothèse  que  le  bon 
fonctionnement  d’une  société  civile  démocratique  est  utile  pour  surveiller  les  actions  prises  par  le 
gouvernement au pouvoir. Deuxièmement, le développement du secteur de la culture est vu comme 
un vecteur essentiel de citoyenneté, de cohésion sociale et, plus généralement, de développement socio-
économique ;  il  est  donc  intégré  aux  mesures  visant  à  consolider  la  démocratie  dans  le  pays,  qui 
représentent l’un des principaux domaines de coopération socio-culturelle retenus dans le cadre unique 
d’appui  pour  la  période 2014-2020.  Troisièmement,  les  contacts  interpersonnels  continuent  d’être 
développés, dans le but explicite de parvenir à une compréhension mutuelle et de créer des liens entre 
Européens et Tunisiens, comme c’était déjà le cas avant la révolution, mais avec une marge de manœuvre 
à présent bien moins limitée. Plus particulièrement, des mesures de soutien à l’action de la diaspora ont 
été  annoncées,  élargissant  l’horizon  de  la  coopération  socio-culturelle  au-delà  des  frontières  de  la 
Tunisie. En ce sens, l’Union ne traite désormais plus exclusivement avec les représentants du régime, mais 
dialogue avec la quasi-totalité de la société tunisienne, apportant un soutien de plus en plus important à 
une grande diversité d’acteurs sans se limiter au gouvernement du pays. 
En  ce  qui  concerne  les  organisations  nationales  de  la  société  civile,  deux  dimensions  distinctes, 
quoiqu’étroitement liées, doivent  être  prises  en  compte :  leur émergence  dans  la  sphère  publique et 
leur participation au processus décisionnel. D’un côté, le nombre d’organisations de la société civile a 
augmenté de manière exponentielle depuis la révolution, en se fondant sur les aspirations de l’ensemble 
de  la  société,  libérée  de  l’oppression  du  régime  de  Ben  Ali,  en  faveur  d’un  développement  politique, 
social  et  économique.  De  l’autre,  la  transition  démocratique  implique  des  changements  considérables 
dans  les  institutions  formelles  et  informelles  du  pays  et  dans  la  réorganisation  de  l’administration 
publique, ce qui signifie que les structures et les cadres essentiels pour l’intégration des organisations de 
38 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
la  société  civile  au  processus  décisionnel  sont  encore  à  construire.  Ces  facteurs  ont  d’importantes 
répercussions sur le paysage de la société civile, fortement fragmenté et politisé, qui ne dispose pas 
des  ressources  nécessaires  pour  s’organiser  en  un  ensemble  plus  cohérent.  Une  étude  du 
Programme  des  Nations  unies  pour  le  développement,  publiée  en 2014,  révèle  qu’un  grand  nombre 
d’organisations  sont  liées  au  militantisme  politique  ou  définissent  leur  objectif  premier  comme  étant 
d’agir en tant que contre-pouvoir face aux autorités gouvernementales, malgré leur taille généralement 
réduite  et  la  participation  limitée  des  jeunes  à  leurs  activités.  Dans  ce  contexte,  la  création  des  cadres 
législatifs et des mécanismes de financement nécessaires est déterminante pour assurer l’autonomie et 
l’indépendance des organisations de la société civile et, en parallèle, améliorer les conditions d’un 
dialogue avec les autorités à tous les niveaux de l’administration publique. 
Dans un rapport conçu pour préparer l’élaboration et la mise en place du programme de l’Union visant à 
soutenir  les  organisations  de  la  société  civile,  une  analyse  SWOT  a  été  effectuée  pour  appréhender  les 
principales forces et faiblesses de la société civile tunisienne ainsi que les possibilités et menaces qui lui 
sont  présentées43.  Les  auteurs  affirment  que  l’enthousiasme  dont  ont  témoigné  les  participants 
impliqués,  l’étendue  de  leurs  connaissances  dans  ce  domaine  et  leur  capacité  à  mobiliser  des  capitaux 
humains  et  sociaux  constituent  des  atouts  non  négligeables  pour  l’émergence  de  la  société  civile.  En 
revanche,  l’insuffisance  des  compétences  en  matière  de  gestion  et  l’inefficacité  des  structures  de 
gouvernance interne qui en découle, ainsi que les ressources limitées et les relations conflictuelles avec 
les  autorités  gouvernementales,  représentent  des  obstacles  considérables  qu’il  faudra  surmonter  pour 
permettre  le  développement  des  organisations  de  la  société  civile  et  leur  meilleure  participation  à 
l’élaboration des politiques. En outre, peu d’organisations sont suffisamment développées pour avoir un 
impact notable dans le domaine ou une influence sur le dialogue politique, et le travail en réseau entre 
les organisations reste relativement limité. 
L’Union  a  mis  en  place  plusieurs  instruments  visant  à  soutenir  l’émergence  d’organisations  de  la 
société civile et à encourager leur participation au dialogue politique. Le mécanisme de voisinage en 
faveur de la société civile a été conçu dans le but de faciliter l’accès aux ressources pour les organisations 
qui cherchent à renforcer leurs capacités en matière de promotion, de travail en réseau et de surveillance. 
Le  Fonds  européen  pour  la  démocratie  (FEDEM)  a,  lui,  été  mis  en  place  pour  aider  les  acteurs  qui 
souhaitent un changement politique et sont confrontés à des obstacles dans l’accès au financement par 
des donateurs, tandis que la Fondation Anna Lindh a reçu des fonds supplémentaires pour promouvoir le 
interculturel.  Plus  particulièrement,  3 millions d’euros  ont  été  affectés  au  programme 
dialoguer 
« Citoyens pour le dialogue », dont l’objectif est de renforcer la capacité des organisations de la société 
civile en matière de dialogue, d’échanges et de travail en réseau. La feuille de route pour le soutien de 
l’Union  à  la  société  civile  sur  la  période 2014-2017  établit  trois  priorités :  créer  un  environnement 
favorable  pour  les  organisations  de  la  société  civile ;  encourager  la  participation  au  processus 
d’élaboration  des  politiques ;  et  renforcer  les  capacités  des  organisations  locales  en  matière  de 
participation  au  développement  socio-économique.  L’Union  a  également  entrepris  d’associer  les 
organisations de la société civile dans la programmation et la mise en œuvre de ses politiques en Tunisie. 
Comme  souligné  précédemment  dans  cette  étude,  intégrer  les  parties  prenantes  des  politiques  de 
l’Union européenne dans la programmation et l’application de ces politiques peut représenter des 
avantages pour l’Union, non seulement par rapport à son image mais aussi par rapport à l’efficacité des 
politiques  en  question.  L’organisation  d’événements  et  de  consultations,  notamment  dans  le  cadre 
des  négociations  portant  sur  le  plan  d’action 2013-2017  et  sur  les  travaux  préparatoires  en  vue  de 
l’ALECA, constitue une étape importante en ce sens. Cependant, plusieurs critiques ont été émises par les 
participants ayant participé aux événements en question, qui ont relevé le format relativement fermé de 
43 Voir la délégation de l’Union en Tunisie (2012). 
39 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
la  consultation  et  le  peu  de  temps  dont  ils  ont  disposé  pour  formuler  des  propositions  et  des 
recommandations. En conséquence, de nombreuses organisations ont uni leurs forces pour demander à 
être  associées  de  manière  permanente  aux  négociations  portant  sur  l’ALECA  ainsi  qu’au  contrôle  des 
études  indépendantes  commandées  pour  appuyer  les  négociations.  L’importance  de  dépolitiser  les 
organisations  de  la  société  civile  et  de  développer  une  culture  de  la  citoyenneté  a  néanmoins  été 
soulignée par certains participants à la consultation, ce qui démontre un certain degré de scepticisme vis-
à-vis de la rationalisation de la contribution de la société civile dans les conditions actuelles. 
En  ce  sens,  certaines  leçons  peuvent  être  tirées  des  conférences  régionales  sur  la  contribution  de  la 
société  civile  à  la  transition  démocratique  organisées  par  le  Programme  des  Nations  unies  pour  le 
développement. Lors de ces conférences, les priorités en matière de développement dans huit différents 
domaines  ont  été  discutées  avec  les  représentants  de  diverses  organisations  de  la  société  civile  et  un 
grand  nombre  de  recommandations  politiques  ont  été  formulées  suivant  une  approche  par  le  bas.  La 
méthodologie  participative  appliquée  lors  de  ces  conférences  contraste  avec  l’approche  par  le  haut 
adoptée  par  l’Union  dans  ses  consultations,  et  a  reçu  un  retour  positif.  Par  ailleurs,  les  participants  ont 
insisté  sur  l’importance  des  campagnes  de  sensibilisation  et  d’information,  illustrant  la  nécessité  de 
parvenir à une compréhension et à créer un « capital de sympathie » autour des réformes qui doivent être 
soutenues et mises en place. Enfin, la portée de la coopération socio-culturelle entre l’Union et la Tunisie 
s’est considérablement élargie après la révolution, l’attention de l’Union se détournant du gouvernement 
pour  porter  sur  la  société  dans  son  ensemble,  ce  qui  a  donné  lieu  à  de  nouvelles  politiques,  à  de 
nouveaux programmes et, par conséquent, à la création d’instruments de soutien à la société civile et au 
secteur de la culture. En parallèle, la coopération et les partenariats dans les secteurs de l’éducation 
et  de  la  santé  ont  continué  à  jouer  un  rôle  important  dans  les  relations  bilatérales  et  régionales, 
s’inspirant du succès des programmes Tempus et Erasmus Mundus. Ces deux programmes ont permis à 
des étudiants, professeurs et employés tunisiens d’échanger des connaissances et des expériences et ont 
offert aux chercheurs du pays de nouvelles possibilités de financement et de collaboration scientifique. 
En  ce  sens,  ces  programmes  ont  considérablement  contribué  à  ouvrir  la  voie  vers  l’intégration 
économique  entre  l’Union  et  la  Tunisie  et  à  tisser  des  liens  essentiels  entre  leurs  communautés 
académiques respectives44. 
Toutefois,  plusieurs  critiques  ont  été  émises  en  marge  des  débats  portant  sur  le  partenariat  pour  la 
mobilité et ont soulevé la question primordiale de la fuite des cerveaux, soulignant que l’Union, tout 
en  dressant  des  barrières  contre  l’immigration  de  travailleurs  peu  qualifiés,  facilite  la  mobilité  pour  les 
talents  les  plus  prometteurs.  Ce  fait  alimente  le  scepticisme  général  vis-à-vis  des  intentions  de  l’Union 
dans sa coopération avec la Tunisie, fragilisant la base sur laquelle repose la légitimité du renforcement 
de l’appropriation partagée des politiques de l’UE mises en œuvre dans le pays. Toutefois, la Tunisie étant 
confrontée au problème spécifique que constitue un taux de chômage remarquablement élevé chez les 
travailleurs très qualifiés, la question de la fuite des cerveaux ne semble pas particulièrement pressante à 
court terme. 
44 Voir la section 3.3 du présent rapport pour des statistiques sur les programmes Tempus et Erasmus. 
40 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
5
Conclusions et recommandations politiques 
Cette étude examine l’évolution et les répercussions possibles des politiques de l’Union européenne en 
Tunisie avant et après la révolution sous un angle analytique novateur élaboré spécialement à cette fin. 
Elle se fonde sur une description des étapes importantes des cadres de coopération établis entre l’Union 
européenne  et  la  Tunisie,  ainsi  que  des  politiques  et  programmes  qui  ont  vu  le  jour  dans  ces  cadres. 
L’étude analyse ensuite les répercussions de ces politiques avant la révolution et leur évolution ultérieure 
au  moyen  d’un  cadre  analytique  inédit  afin  d’identifier  les  causes  et  les  conséquences  de  la  nouvelle 
approche  de  l’Union  vis-à-vis  de  la  Tunisie  et  d’évaluer  la  valeur  ajoutée  apportée  par  ce  changement 
pour la coopération entre les deux partenaires. Enfin, les conclusions d’une consultation d’acteurs clés du 
paysage politique tunisien et de la société civile tunisienne viennent compléter l’analyse présentée ici. 
Cette analyse a été réalisée sous un angle analytique dynamique, qui prend en compte deux dimensions 
liées :  l’évolution  de  la  situation  en  Tunisie  et  le  changement  de  stratégie  de  l’Union  vis-à-vis  du 
pays,  soit  la  transition  d’une  situation  de  « stabilité  non  durable »  vers  une  situation  de  « durabilité 
instable ». 
Avant la révolution, les relations de l’Union avec ses pays partenaires méditerranéens se cantonnaient en 
général (et plus particulièrement dans le cas du régime autocratique de Ben Ali) à l’échange d’intérêts 
commerciaux,  financiers  et  stratégiques,  conformément  à  la  plupart  des  programmes  d’appui  au 
développement  dans  le  monde.  Le  discours  de  l’Union,  fondé  sur  la  promotion  des  principes  de  la 
démocratie  et  de  l’économie  de  marché  constituant  un  terreau  fertile  pour  la  stabilité  et  la  prospérité 
dans  la  région,  n’est  pas  parvenu  à  créer  les  incitations  nécessaires  pour  entraîner  les  pays 
méditerranéens  partenaires  sur  la  voie  des  réformes  jugées  indispensables  pour  la  réalisation  des 
objectifs ambitieux établis dans le cadre du partenariat. Les divergences entre la rhétorique et la pratique 
des politiques de l’UE sur le terrain ont été instrumentalisées par les gouvernements autocratiques, tels 
que celui de Ben Ali, afin que le régime conserve le contrôle de l’économie et de la société. La présente 
analyse  révèle  ainsi  que  les  politiques  de  l’Union  européenne  appliquées avant  la  révolution 
tunisienne reposaient sur trois concessions fondamentales résultant d’un échange d’intérêts avec le 
régime  au  pouvoir,  et  s’y  limitaient.  Les  trois  concessions  génériques  retenues  dans  l’analyse 
correspondent aux trois axes principaux de coopération, à savoir politique, économique et socio-culturel, 
et sont définies dans cette étude en tant que « commerce contre aide », « bénéfices contre libertés », et 
« sécurité contre silence ». 
La  révolution  tunisienne  a  déclenché  deux  mouvements  fondamentaux :  une  démocratisation  et  une 
déstabilisation, qui ont eu des répercussions considérables sur les relations entre l’Union européenne et 
la Tunisie. Ces changements ont ouvert la porte à de nouvelles synergies et complémentarités entre les 
projets  politiques  des  deux  partenaires  et  ont  appelé  à  une  augmentation  du  soutien  financier,  ce  qui 
a donné  l’occasion  à  l’Union  européenne  de  renforcer  la  coopération  dans  un  esprit  gagnant-
gagnant,  de  consolider  le  codéveloppement  et  d’approfondir  l’intégration,  conformément  aux 
objectifs  de  la  PEV.  L’Union  a  considérablement  modifié  ses  politiques  et  a  presque  doublé  son 
soutien financier au cours des premières années suivant la révolution afin de profiter de cette occasion
dans les trois domaines de la coopération. 
L’évolution de la coopération politique entre l’Union et la Tunisie après la révolution est caractérisée 
par une vaste convergence des normes et des valeurs, mais également par l’apparition de nouvelles 
critiques  et  de  défis  associés.  Dans  les  domaines  de  coopération  pour  lesquels  l’Union  et  la  Tunisie 
partagent  des  intérêts  et  des  valeurs  communes,  tels  que  le  développement  et  la  consolidation  des 
institutions  démocratiques,  le  dialogue  politique  a  pu  être  fortement  renforcé.  En  ce  qui  concerne  les 
domaines de coopération où l’Union a tendance à appuyer ses propres intérêts dans les accords, comme 
41 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
c’est  le  cas  pour  les  sujets  liés  à  l’immigration,  l’émergence  de  nombreux  participants  exprimant  leurs 
opinions dans le domaine public forcent l’Union à reconsidérer sa façon de mener le dialogue politique et 
à encourager la participation des parties prenantes dans l’élaboration et la définition des priorités de ses 
politiques en Tunisie. 
La  présente  étude  a  mis  en  évidence  deux  éléments  importants  pour  l’amélioration  de  l’appropriation 
partagée  du  dialogue  politique  et  la  promotion  d’une  meilleure  compréhension  au  sein  de  la  société 
civile : assurer une cohérence entre le discours et la pratique des politiques de l’Union européenne, 
et  améliorer  la  coordination  transversale  entre  les  différents  domaines  de  coopération.  Selon 
l’argument qui est avancé, cela permettrait de renforcer le « capital de sympathie » de l’Union auprès des 
parties  prenantes  de  ses  politiques  et  de  veiller  à  ce  que  leurs  aspirations  soient  dûment  prises  en 
compte  dans  l’établissement  des  priorités  de  ces  politiques.  Plus  généralement,  construire  des 
coopérations  politiques  sur  la  base  de  synergies  d’intérêts  respectifs  plutôt  que  de  priorités 
communes supposées revient à rester sur des concessions qui se sont déjà révélées difficiles à maintenir 
et qui risqueraient, dans le climat d’instabilité actuel, de saper les conséquences de la révolution. 
La  marge  de  manœuvre  disponible  pour  la  promotion  de  réformes  socio-économiques  visant  à 
développer  le  secteur  privé  et  à  améliorer  les  conditions  du marché  a  été  élargie  grâce  à la  révolution, 
ouvrant  la  voie  à  une  intégration  économique  renforcée  et  à  la  création  d’un  ALECA.  La  coopération 
économique,  auparavant  étroitement  concentrée  sur  la  stimulation  de  l’ouverture  de  l’économie  et  la 
libéralisation  du  commerce,  bénéficie  désormais  d’une  approche  plus  globale,  grâce  à  laquelle  les 
négociations commerciales sont complétées par un soutien aux mesures destinées à jeter les bases de la 
libéralisation du commerce et à limiter ses effets négatifs à court terme. Cependant, les difficultés socio-
économiques et budgétaires persistent en raison de l’instabilité et de l’incertitude dans lesquelles est 
plongée la période de transition, ce qui représente encore aujourd’hui un défi de taille pour la Tunisie et 
complique  considérablement  l’adoption  de  réformes  structurelles  pouvant  impliquer  des  ajustements 
délicats. 
Dans ce contexte, la présente étude avance qu’il convient de promouvoir explicitement et en priorité les 
réformes  socio-économiques  les  plus  susceptibles  d’aboutir  à  des  résultats  concrets  en  matière  de 
création  d’emplois  et  de  reconnaître  les  risques  associés  à  un  avancement  trop  rapide  des 
négociations controversées portant sur un ALECA. Approfondir la libéralisation des échanges pourrait 
causer des chocs sectoriels impossibles à amortir dans un contexte aussi délicat pour la Tunisie et attiser 
les  flammes  du  mécontentement  social,  alors  qu’il  est  important  que  les  réformes  économiques 
structurelles bénéficient d’un large soutien. 
La portée de la coopération socio-culturelle entre l’Union et la Tunisie s’est considérablement élargie 
après la révolution, l’attention de l’Union se détournant du gouvernement pour de porter sur la société 
dans  son  ensemble,  ce  qui  a  donné  lieu  à  de  nouvelles  politiques,  à  de  nouveaux  programmes  et,  par 
conséquent,  à  la  création  de  nouveaux  instruments.  En  parallèle,  la  coopération  et  les  partenariats 
dans  les  secteurs  de  l’éducation  et  de  la  santé  ont  continué  à  jouer  un  rôle  important  dans  les 
relations bilatérales et régionales, s’inspirant du succès des programmes Tempus et Erasmus Mundus. 
Ce  renouvellement  complet  de  la  stratégie  de  coopération  socio-culturelle  comprend  l’association 
directe de l’Union avec une grande variété de participants allant des organisations de la société civile 
aux  institutions  culturelles  et  même  aux  individus,  sous  la  forme  de  programmes  spécifiques  dans  le 
domaine  des  contacts  interpersonnels.  Cette  évolution  déterminante  débouche  sur  de  nouvelles 
opportunités,  mais  aussi  sur  de  nouveaux  défis,  en  particulier  en  lien  avec  les  incohérences  entre  le 
discours de l’Union et ses pratiques politiques ainsi que les critiques proférées sur ce sujet par une société 
civile émergente, qui s’avère active et exigeante. 
42 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Recommandations stratégiques 
• L’Union  devrait  prêter  attention  à  l’écart  entre  les  perceptions  et  la  réalité  sur  le  terrain  lorsqu’elle 
exporte  sa  vision  normative,  qu’elle  devrait  adapter  en  fonction  d’une  convergence  générale  des 
normes  et  des  valeurs  dans  le  cas  des  pays  qui  ont  connu  une  révolution,  comme  la  Tunisie.  Les 
incohérences permanentes entre la rhétorique de la politique de voisinage de l’Union dans les pays 
qui  n’avaient  pas  encore  connu  de  révolution  ont  progressivement  entamé  sa  légitimité  aux  yeux 
d’un  grand  nombre  d’acteurs  participant  aujourd’hui  au dialogue  politique. Une  nouvelle  stratégie, 
fondée sur les complémentarités, les synergies gagnantes-gagnantes et le codéveloppement, devrait 
peu  à  peu  voir  le  jour.  Afin  d’optimiser  l’incidence  des  politiques  de  l’Union  sur  le  terrain,  une 
évaluation politique, économique et sociale complète doit être menée, dans la mesure du possible, 
avec les parties concernées. 
• La vision universelle de la politique de voisinage de l’Union, selon laquelle l’aide apportée aux pays 
partenaires dépend d’un principe de différenciation relativement limité, doit être réexaminée pour la 
Tunisie.  Ce  pays  s’est  lancé  corps  et  âme  sur  la  voie  de la  démocratie,  processus  qui  s’accompagne 
d’une série d’effets déstabilisateurs exigeant des mesures de soutien ad hoc, une évaluation bien plus 
précise des priorités parmi ces mesures, l’amélioration de la coordination transversale des différents 
domaines de coopération et un calendrier plus flexible. Cette modification de la coopération avec la 
Tunisie respecterait la déclaration politique en faveur d’un partenariat privilégié formulée en 2012. Il 
convient de fournir de nouvelles perspectives au pays. Le principe « donner plus pour recevoir plus » 
pourrait disparaître lorsque la Tunisie aura rempli une liste d’exigences liées aux réformes politiques, 
économiques  et  sociales  à  mettre  en  place  pour  garantir  la  convergence  avec  ce  que  l’on  peut 
appeler  « démocraties  modernes »  et  pourra  profiter  d’une  telle  interruption.  Une  telle  mesure 
aboutirait  à  un  partenariat  équilibré  et  pourrait  inciter  d’autres  pays  du  Sud  de  la  Méditerranée  à 
suivre un processus similaire. 
• L’Union devrait agir avec détermination et augmenter son soutien financier ainsi que son assistance 
technique  à  la  Tunisie  pour  que  cette  dernière  soit  en  mesure  de  répondre  aux  besoins  politiques, 
les  chances  de  succès  du  processus  de 
économiques  et  sociaux  urgents  et  maximiser 
démocratisation  et  de  stabilisation  progressive  du  pays.  Une  telle  action  doit  être  organisée  en 
collaboration  et  en  coordination  étroite  avec  les  partenaires  internationaux.  La  Tunisie  pourrait 
devenir  un  exemple  d’autodétermination  réussie  pour  toute  la  région  du  Sud  de  la  Méditerranée 
mais  présente  également  le  risque  de  basculer  sous  la  pression  de  la  radicalisation  (le  pays  est  à 
l’heure  actuelle  le  pourvoyeur  principal  de  combattants  étrangers)  et  l’influence  de  la  Libye,  son 
voisin  instable.  Il  est  dans  l’intérêt  de  l’Union  de  continuer  à  augmenter  son  soutien  et  de  faire 
pencher la balance vers la démocratisation et la stabilisation, car le sort du pays est essentiel pour la 
sécurité et la stabilité en Europe. 
• Du  point  de  vue  politique,  l’Union  se  doit  de  mieux  exploiter  les  synergies  existantes  entre  les 
projets  politiques  tunisien  et  européen,  en  améliorant  l’appropriation  commune  du  dialogue 
politique  et  en  allouant  spécifiquement  davantage  de  fonds  à  l’amélioration  de  l’entente  et  du 
consensus sur les politiques qui devront à l’avenir être mises en œuvre dans l’ensemble de la société. 
Si l’Union décide au contraire de suivre une stratégie unilatérale et normative qui ne respecte pas les 
différentes  vues  du  paysage  politique  tunisien,  elle  pourrait  rater  l’occasion  présentée  par  la 
révolution tunisienne d’améliorer la coopération et de véritablement progresser dans son association 
avec  la  Tunisie.  Les  actions  concrètes  à  entreprendre  incluent  le  développement  et  l’apport  d’un 
soutien  intégral  en  faveur  de  la  démocratie,  la  fourniture  des  moyens  techniques  et  financiers 
nécessaires et la définition des priorités. De plus, une meilleure coopération avec les institutions de 
l’Union doit permettre, au moyen d’une action de soutien claire, de prendre des mesures de soutien 
concrètes dans le secteur judiciaire et celui de la sécurité. 
43 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
• Du  point  de  vue  économique,  l’Union  devrait  revoir  sa  conception  de  l’intégration  économique 
passant par l’ALECA et laisser place à une méthode plus graduelle, qui mette l’accent sur les priorités 
locales et les besoins économiques. Il convient d’explorer les possibilités de libéralisation partielle et 
sectorielle,  en  fonction  des  conséquences  anticipées  et  des  résultats  concrets  des  réformes 
économiques structurelles, afin de permettre à l’économie tunisienne de supporter une plus grande 
ouverture  commerciale  sans  s’effondrer  lors  de  la  phase  d’ajustement  et  d’éviter  en  particulier  les 
potentiels  effets  néfastes  pour  un  secteur  de  l’emploi  fragilisé.  De  plus,  des  actions  concrètes 
devraient  aborder :  1) le  développement  régional  et  la  réduction  des  inégalités,  en  autorisant  par 
exemple  la  Tunisie  à  bénéficier  de  la  politique  régionale  et  des  fonds  structurels  de  l’Union ; 
2) le développement  et  le  financement  des  micro,  petites  et  moyennes  entreprises  au-delà  des 
possibilités  d’un  secteur  bancaire  qui  bat  de  l’aile,  en  appuyant  par  exemple  les  organisations  de 
garantie du crédit au niveau national et régional, le microcrédit, le financement coopératif, etc. 
• Du  point  de  vue  social,  l’Union  devrait  s’atteler  à  consolider  la  société  civile  en  allouant  les  fonds 
nécessaires  au  développement  des  capacités  de  gouvernance  et  de  travail  en  réseau  des 
organisations  de  la  société  civile,  tout  en  faisant  la  promotion  d’une  approche  plutôt  civique  que 
politisée  dans  ses  activités.  Ces  actions  sont  nécessaires  pour  favoriser  une  participation  accrue 
essentielle  de  la  société  civile  dans  le  dialogue  politique  entre  l’Union  et  la  Tunisie,  mais  peuvent 
également  la  limiter.  Des  évaluations  complètes  indépendantes  sont  par  conséquent  nécessaires 
pour  garantir  que  les  organisations  bénéficiaires  s’engagent  véritablement  dans  le  processus  de 
démocratisation et de stabilisation du pays. Le partenariat pour la mobilité doit en outre être mis en 
place  sans  plus  tarder.  Il  convient  également  d’explorer  des  possibilités  telles  qu’une  dispense  de 
l'obligation  de  visa  pour  les  ressortissants  tunisiens  et  de  faciliter  l’obtention  de  visa  pour  les 
entrepreneurs, les chercheurs, les scientifiques, les professeurs, etc. En ce qui concerne les sciences, la 
technologie  et  l’innovation,  l’Union  et  la  Tunisie  devraient  concevoir  ensemble  un  plan  d’action 
exhaustif pour fixer les priorités du pays dans ce domaine. Les étudiants et les chercheurs devraient 
être davantage soutenus par les programmes Erasmus et autres. 
44 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Références 
Documents stratégiques 
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http://www.iemed.org/publicacions-en/historic-de-publicacions/enquesta-euromed/euromed-
survey-2010/presentacio, consultée le 30 mars 2015. 
48 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
Annexe : Questionnaire 
REMARQUES PRÉLIMINAIRES 
La Tunisie est un partenaire majeur de l’Union européenne depuis le lancement du partenariat euro-méditerranéen 
en 1995,  et  cette  coopération  a  été  renforcée  au  fil  des  révisions  successives  des  cadres  de  coopération  de  l’Union 
avec  ses  pays  voisins.  Ces  révisions  ont  consisté,  entre  autres,  à  améliorer  la  capacité  de  l’Union  à  promouvoir  les 
normes et les valeurs démocratiques dans son voisinage immédiat. 
La révolution tunisienne a conduit le pays sur le chemin de la démocratisation et, en ce sens, a créé des circonstances 
favorables  à  l’amélioration  de  la  coopération  avec  l’Union  européenne.  L’augmentation  considérable  du 
financement alloué à la Tunisie, non seulement axé sur le soutien à la création d’institutions et à l’émergence d’une 
société  civile,  mais  également  sur  la  gestion  des  besoins  urgents  liés  à  la  déstabilisation  de  l’économie  du  pays, 
atteste la volonté dont fait preuve l’Union européenne pour exploiter ces possibilités. 
L’objectif de cette collecte de données est de recenser les opinions individuelles des acteurs du milieu politique et de la 
société civile en Tunisie sur la coopération entre leur pays et l’Union européenne, afin que les décideurs politiques de 
l’UE comprennent mieux les enjeux pour l’avenir du partenariat entre l’Union et la Tunisie. 
Ce  questionnaire  a  été  envoyé  par  courriel  à  un  échantillon  de  fonctionnaires  d’État,  d’organisations  politiques  et 
d’organisations  de  la  société  civile  qui  sont  au  courant  des  politiques  de  l’Union  européenne  en  Tunisie  et  qui  ont 
bénéficié des programmes de l’Union. Les réponses ont été collectées et intégrées à la section 4.2 de la présente étude. 
Il convient de remarquer que le taux de réponse a été faible en raison du peu de temps alloué à la consultation. 
SECTION A – COORDONNÉES 
A1 – Nom 
A2 – Organisation 
A3 – Fonction au sein de l’organisation 
A4 – Temps passé au sein de l’organisation 
A5  –  Depuis  quand  l’organisation  agit-elle  dans  le 
cadre  de  la  mission  actuelle  et  avec  le  mode  de 
fonctionnement actuel ? 
1) avant la révolution 
2) après la révolution 
A6  –  Quels  sont  les  principaux  défis  liés  à  la 
transition  démocratique  auxquels  sont  confrontées 
la mission et les activités de votre organisation ? 
49 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
A7  –  Quels  sont  les  principales  opportunités  liées  à 
la  transition  démocratique  qui  se  présentent  par 
rapport  à  la  mission  et  aux  activités  de  votre 
organisation ? 
Question ouverte 
SECTION B – AVANTAGES DU PARTENARIAT UE-TUNISIE 
B1  –  Votre  organisation  a-t-elle  reçu  ou  reçoit-elle 
actuellement un soutien de l’Union européenne ? 
0) oui 
1) non 
B1a – Si oui, dans le cadre de quel programme votre 
organisation 
reçoit-elle 
actuellement ce soutien ? 
a-t-elle 
reçu 
ou 
Question ouverte 
B1b  –  Si  oui,  à  quel  point  êtes-vous  satisfait(e)  du 
soutien apporté à votre organisation ? 
Veuillez  noter  que  cette  évaluation,  comme  toutes  les 
réponses  fournies  dans  ce  questionnaire,  n’engage  que 
vous  et  pas  nécessairement  l’organisation  pour  laquelle 
vous travaillez. 
B2  –  Le  soutien  apporté  par  l’Union  européenne  a 
été  essentiel  pour  la  gestion  des  changements  et 
des  défis  liés  à  la  transition  démocratique  et  aux 
difficultés économiques qui en résultent. 
0) très insatisfait(e) 
1) insatisfait(e) 
2) neutre 
3) satisfait(e) 
4) très satisfait(e) 
0) pas du tout d'accord 
1) pas d'accord 
2) neutre 
3) d'accord 
4) tout à fait d'accord 
B3 – Estimez-vous que l’Union pourrait contribuer à 
vous  soutenir  face  aux  différents  défis  ou  vous 
permettre d’exploiter les possibilités offertes par le 
processus de transition actuel ?
1) oui 
2) non 
50 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
B3a  –  Si  oui,  avez-vous  une  idée  du  programme 
grâce  auquel  l’Union  pourrait  vous  apporter  le 
soutien nécessaire ? 
Question ouverte 
Plusieurs  programmes  à  court  terme  et  à  moyen  terme 
liés à la période de transition sont présentés ci-dessous. 
SECTION C – POSSIBILITÉS D’AMÉLIORATION DE LA COOPÉRATION 
Cette section est subdivisée en trois sous-sections distinctes qui traitent respectivement des perspectives d’amélioration de 
la coopération politique, économique et socio-culturelle. Lors des entretiens, il est conseillé de mettre l’accent sur l’une ou 
l’autre  de  ces  sous-sections  en  fonction  du  participant  concerné :  institution  politique  (C1),  acteur  économique  (C2)  ou 
organisation de la société civile (C3). 
SECTION C1 – PERCEPTION DU PARTENARIAT POLITIQUE UE-TUNISIE 
C1.1  –  D’après  vous,  au  cours  de  la  transition 
démocratique du pays, l’Union européenne : 
1) a constitué un obstacle à la démocratisation 
2) n’a pas joué un rôle important 
3) a joué le rôle d’une vigie 
4) s’est engagée activement dans la transition 
C1.2  –  L’Union  a  joué  un  rôle  important  dans 
l’institutionnalisation  et  l’internationalisation  des 
transition 
autorités 
démocratique. 
issues  de 
tunisienne 
la 
C1.3 – Le partenariat entre l’Union et la Tunisie, dans 
sa  forme  actuelle,  est  fondé  sur  des  valeurs 
communes et des intérêts partagés. 
C1.4  –  Pourriez-vous  préciser  dans  quels  domaines, 
d’après vous, les valeurs et les intérêts  de l’Union et 
de la Tunisie ne peuvent pas converger ? 
1) pas du tout d'accord 
2) pas d'accord 
3) neutre 
4) d'accord 
5) tout à fait d'accord 
1) pas du tout d'accord 
2) pas d'accord 
3) neutre 
4) d'accord 
5) tout à fait d'accord 
Question ouverte 
C1.5  –  Plus  particulièrement,  estimez-vous  que  les 
valeurs  et  les  intérêts  de  l’Union  et  de  la  Tunisie 
convergent  dans  le  cadre  du  Partenariat  pour  la 
mobilité signé en 2014 ? 
1) oui 
2) non 
51 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
C1.6 – Si non, pourriez-vous préciser pourquoi ? 
Question ouverte 
1) n’est pas du tout stratégique 
2) n’est pas la meilleure stratégie 
3) neutre 
4) est plutôt stratégique 
5) est hautement stratégique 
Question ouverte 
C1.7 – D’après votre perception de l’évolution future 
du  pays,  vous  considérez  que  l’association  politique 
de la Tunisie avec l’Union : 
C1.8  –  Comment  serait-il  possible  de  rendre 
l’association politique entre l’Union et la Tunisie plus 
stratégique, par rapport au  développement de cette 
dernière ? 
Du point de vue de la consolidation de la démocratie mais 
également du rôle du pays dans les enceintes régionales et 
internationales.
SECTION C2 – POSSIBILITÉS LIÉES À L’INTÉGRATION ÉCONOMIQUE AVEC L’UNION EUROPÉENNE 
1) pas du tout d'accord 
2) pas d'accord 
3) neutre 
4) d'accord 
5) tout à fait d'accord 
1) oui 
2) non 
1) une menace 
2) une chance 
3) les deux à la fois 
C2.1  –  Une  intégration  progressive  avec  l’Union  est 
bénéfique  pour  le  développement  économique  du 
pays. 
L’intégration  économique  avec 
l’Union  comprend  un 
rapprochement  progressif  des  normes  tunisiennes  et  de 
celles  de  l’Union,  un  renforcement  de  l’ouverture  et  de  la 
libéralisation  de  l’économie  du  pays  et  la  conclusion  d’un 
accord  de  libre-échange  complet  et  approfondi  (ALECA)  et 
d’un partenariat pour la mobilité. 
– 
Estimez-vous  que 
C2.2 
d’intégration 
économique 
augmenté avec la transition démocratique ? 
les  perspectives 
ont 
l’Union 
avec 
C2.3  –  En  ce  qui  concerne  le  développement  des 
activités  de  votre  organisation,  vous  estimez  que  la 
signature d’un ALECA avec l’Union représente : 
52 
Les politiques de l’Union européenne en Tunisie, avant et après la révolution 
C2.3a – Si vous estimez que la signature d’un ALECA 
représente  une  menace,  pourriez-vous  préciser  la 
raison ? 
Question ouverte 
C2.4  –  Comptez-vous  sur  le  soutien  de  l’Union  pour 
faire  face  aux  défis  et  exploiter  les  possibilités 
engendrés par la signature d’un ALECA ? 
1) oui 
2) non 
C2.4a  –  Si  oui,  avez-vous  une  idée  du  programme 
grâce  auquel  l’Union  pourrait  vous  apporter  le 
soutien nécessaire ? 
Question ouverte 
programmes 
Plusieurs 
le 
développement  socio-économique  à  moyen  terme  et  à 
long terme sont présentés ci-dessous. 
soutenir 
prévus 
pour 
SECTION  C3  –  RÔLE  DE  L’UNION  EUROPÉENNE  DANS  L’ÉMERGENCE  DE  LA  SOCIÉTÉ  CIVILE 
TUNISIENNE 
C3.1  –  L’Union  a  joué  un  rôle  important  dans 
l’émergence des acteurs de la société civile lors de la 
transition démocratique. 
1) pas du tout d'accord 
2) pas d'accord 
3) neutre 
4) d'accord 
5) tout à fait d'accord 
C3.2  –  Estimez-vous  qu’en  tant  que  représentant(e) 
de  la  société  civile,  votre  voix  est  suffisamment 
entendue  lors  des  délibérations  entre  les  acteurs 
politiques du pays ? 
1) oui 
2) non 
C3.2a – Si non, pourriez-vous préciser ce qui pourrait 
être  fait  pour  soutenir  non  seulement  l’émergence 
des organisations de la société civile, mais aussi leur 
participation au processus décisionnel du pays ? 
Question ouverte 
C3.3  –  Estimez-vous  qu’en  tant  que  représentant(e) 
de  la  société  civile,  votre  voix  est  suffisamment 
entendue  lors  des  délibérations  entre  l’Union  et  la 
Tunisie ? 
1) oui 
2) non 
53 
Département thématique, Direction générale des politiques externes 
C3.3a – Si non, pourriez-vous préciser ce qui pourrait 
être  fait  pour  soutenir  non  seulement  l’émergence 
des organisations de la société civile, mais aussi leur 
participation au dialogue politique avec l’UE ? 
Question ouverte 
CONCLUSION 
Merci d’avoir pris le temps de répondre à ce questionnaire. 
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