Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
Approche juridique du dialogue social : Réalité et défis.
Introduction
La législation sociale en Tunisie constitue un droit spécial avant-gardiste
qui a évolué grâce à une doctrine riche et constructive1. Le rôle créateur de la
jurisprudence prud’homale et les amendements successifs marquent également la
dynamique du droit social. Le niveau de protection sociale des travailleurs en
Tunisie se mesure par référence aux normes minimas de protection telles que
définies par les conventions internationales du travail2 et par le militantisme des
travailleurs regroupés en syndicats. C’est en période de crise que les inégalités
sociales font surface et s’accentuent. La période post-révolution a été marquée par
un bras de fer incessant, traduit en grève et lockout parfois anarchiques et souvent
sans issue. Le législateur, hors crise, vise à organiser les rapports sociaux en
rééquilibrant les pouvoirs. En tant de crises, les décideurs politiques sont appelés
à prendre des mesures exceptionnelles prises à la hâte et décidées unilatéralement
pour les besoins d’un semblant d’une justice sociale. La crise sanitaire n’a fait
qu’accentuer la précarité de certaines catégories sociales et les répercussions de
ce déséquilibre ne sont pas encore mesurables. C’est là que se mesurent la
réactivité des organisations sociales et son aptitude à maintenir un échange porteur
d’idées constructives.
L’importance du dialogue social est incontestable dans ce contexte, en
période de tension ou de paix sociale. L’expression violente ou raisonnée de cet
échange dépend du degré de maturité des acteurs sociaux et de l’établissement
d’instruments juridiques efficients pouvant l’encadrer. La lutte pour permettre la
continuité du dialogue à travers ces instruments devrait être constante au sein de
l’entreprise. La conscience collective supporte le devoir de prévenir les crises ou
apaiser les tensions. Le Droit sanctionne les manifestations extrêmes non
1 Les travaux de l’association tunisienne du droit social et d’autres éminents professeurs de droit social
ont fait des Travaux publiés à la Revue Tunisienne du droit social une source importante pour les
chercheurs dans ce domaine. À titre indicatif de la doctrine consultée, nous citons :
Farouk Michri. Le droit du travail en Tunisie. Éd. Sud Éditions 2009.
Hatem Wertatani, « 50 ans depuis sa création, le Code du travail : Des amendements à la
reformulation » In, mélanges en l’honneur du Doyen Mongi Tarchouna. (pp-35-41) (Article en arabe.)
consulté le 3/3/2020.
https://www.fes-tunisia.org/fileadmin/user_upload/documents/publications/Contenu.pdf
Hatem Kotrane. Nouveau droit du travail. Les presses de simpact : 2 018. 214 p.
Mongi Tarchouna. La négociation collective en Tunisie. Thèse soutenue en 1986. Paris I. S. Dir. Gérard
Lyon-Caen.
Nouri Mzid. Le juge et le droit du travail. Publications Rouf Yaaich. Tunis 2002. 179 p. (livre en Arabe).
Hatem Kotrane. Nouveau droit du travail. Les presses de simpact : 2 018. 214 p.
2 OIT. https://libguides.ilo.org/minimum-wages-fr/standards
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raisonnées ou non encadrées. La technicité de la norme juridique ne permet pas
de reproduire et régir tous les faits sociaux. C’est la Socialisation du Droit3 qui
garantit une meilleure organisation des rapports en vue de protéger la partie la
plus faible dans l’entreprise.
La technicité du droit social est tempérée par des notions larges et variables
telle la notion des conflits sociaux dont le champ est souvent déterminé à travers
une typologie des conduites4. « Un conflit est une relation antagonique entre deux
ou plusieurs unités d’action dont l’une au moins tend à dominer le champ social
de leurs rapports5. » un droit social à sens unique ne pourra pas trouver un
équilibre pouvant assurer la protection sociale des travailleurs et l’efficacité
économique en même temps.
L’équilibre ne peut être atteint que par un encadrement juridique clair et
progressif de l’échange entre les partenaires pour le bien-être du travailleur et le
développement de l’entreprise. Le dialogue social s’il est mené rationnellement
avec un cheminement clair, pourra conduire à la construction d’une réelle
démocratie sociale.
Georges Burdeau considère la démocratie sociale comme « une société d’où sont
exclus les privilèges économiques que confèrent la fortune, la situation sociale ou
le type d’activité à laquelle s’adonne l’individu… La démocratie sociale pourrait
être définie comme le régime du bien-être dans la justice… l’objectif de la
démocratie sociale se résume à la libération de l’individu de toutes formes
d’oppression. »6 Cette définition de la démocratie présente une vision presque
utopique de la société que l’auteur avance et oppose à la démocratie politique.
Selon G. Burdeau, l’émergence de l’Homme situé socialement, c’est-à-dire
l’Homme concret définit par ses conditions réelles de travail et de vie, par sa
contingence et non plus par son essence d’Homme doué de raison, a permis le
passage de la démocratie politique articulée autour de la reconnaissance exclusive
des droits politiques, à la démocratie sociale, s’ouvrant aux droits économiques et
sociaux. « La démocratie politique protège les libertés, tandis que la démocratie
sociale établit des créances de l’individu sur la société7. » C’est ce genre de
créances que les partenaires sociaux sont appelés à définir concrètement à travers
un dialogue social efficient.
« Le dialogue social n’est pas une fin en soi, il n’est qu’un outil de cette
démocratie sociale (que tous espèrent atteindre) ; sa valeur ne se mesure qu’à la
3 Jean Carbonnier. Sociologie juridique. Paris 3e Éd. PUF. 416 p.
4 Conflits inter-sociaux/Conflits organisationnels/conflits de pouvoirs…
5 Dictionnaire de la Sociologie. Encyclopedia Universalis. Paris. 1998.
6 Georges Burdeau. La démocratie. Édition du Seuil. 1 956 p. 72. 116. P.
7 Ibid. G. Burdeau p . 39.
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loyauté de ceux qui s’y réfèrent ou de ceux qui s’y emparent8. » Les lexiques
juridiques9 relativement récents ne comportent pas de référence au dialogue social
comme terme technique. La notion est récente, utilisée récemment dans les
instruments internationaux. C’est le terme consensus10 qui est souvent cité et qui
constitue l’aboutissement de tout un processus.
Les corollaires du dialogue social sont cités pourtant pour désigner la spécificité
du droit social :
La concertation : recherche en commun par les personnes dont les intérêts sont
convergents, complémentaires ou même opposés, d’un accord tendant à
l’harmonisation de leurs conduites respectives.
La consultation : Fait de consulter, solliciter d’un organisme ou d’une personne,
sur une question de sa compétence ou de sa qualification, un avis que l’on n’est
jamais tenu de suivre, même dans les cas où l’on est obligé de provoquer cet avis.
La négociation : interprofessionnelle : négociation menée au niveau national par
les confédérations patronales et ouvrières. Professionnelle : Recherche d’un
accord dans le cadre d’une profession, ou d’un ensemble de profession
constituant une branche d’activité11.
Le dialogue social introduit dans la culture juridique est étudié en se
référant aux engagements internationaux pris par la Tunisie. L’organisation
internationale du travail a œuvré depuis les années 70 à promouvoir le dialogue
social en adoptant des conventions et en produisant des rapports de suivi et
d’étude des modalités et des formes du dialogue social12. La convention N° 144
sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail
N° 61 du 21 juin 1976 est une convention de Gouvernance (présentée comme
prioritaire par l’O.I.T.). Le tripartisme concernant les normes de l’O.I.T. contribue
au développement de la culture du dialogue social sur les questions économiques
et sociales. C’est en 2018 que la convention a été ratifiée par 144 pays membres
8 Pierre Yves Verkind, « L’article L1 du Code du travail au miroir des exigences de la démocratie
sociale. » In, Revue de droit social N° spécial N° 5 mai 2010. p. 519. (519-522)
9 Lexique des termes juridiques. 20e éd. Dalloz.
10 Le consensus c’est « cet accord général minimal qui fait qu’une société est une société, que les
individus qui en sont membres reconnaissent les mêmes valeurs, se conforment aux mêmes normes et
s’interdisent mutuellement l’usage privé de la violence dans la solution de leurs conflits. » Dictionnaire
de la Sociologie. Encyclopedia Universalis. Paris. 1998.
11 G. Cornu. Vocabulaire juridique. Éd. Point Delta 2011.
12 OIT : Rapport IV dialogue social et tripartisme. Conférence internationale du travail 162 session.
2018.
OIT Le dialogue social transnational. Rapport d’experts. Genève (12 – 15 Février 2019)
Voir aussi. Rapport V Renforcement de la capacité de l’OIT d’appuyer les efforts déployés par ses
membres pour atteindre ses objectifs dans le cadre de la mondialisation. Conférence internationale du
travail. 96E session. 2007.
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de l’O.I.T.. La Tunisie a ratifié la convention N° 144 (entre autres conventions à
la même date, sur les conventions collectives C 154 et les relations de travail dans
la fonction publique C 151.. ) le 11 février 2014. Les rapports du bureau
international du travail font référence à la nécessité de la mise en place en Tunisie
de critères objectifs déterminants la représentativité des partenaires sociaux13.
Cette ouverture sociale aurait pu être éludée ou même bloquée s’il n’y avait pas
des changements politiques post-révolution qui ont abouti à un nouveau contrat
social.
L’apport des actions sociales au droit est certain il est plus révélateur au cours des
changements socio-économiques. L’acte de légiférer en droit social en Tunisie va
passer (si ce n’est déjà fait) de la phase de la réglementation à celle de la
régulation. Le pouvoir d’édicter des règles générales, abstraites et obligatoires
cédera une place importante à l’élaboration des règles de Soft Law14. Ce sont « des
règles de conduite qui en principe n’ont pas de force légale obligatoire ;
néanmoins, ils peuvent avoir des effets pratiques15. »
Cet état des choses ouvrira la voie à une meilleure organisation de l’entreprise.
Certes, la mondialisation et les conflits sociaux sont à l’origine de ce changement,
mais il y a d’autres facteurs : des notions nouvellement introduites dans
l’environnement des affaires imposent de nouveaux impératifs tels que la
responsabilité sociale, le développement durable, et même la réorganisation du
travail. Le législateur dans un souci de modernisation les intègre par bribes, mais
ne prévoit pas souvent les mesures accompagnant cette réception. C’est ce souci
de modernisation qui présente le Conseil du dialogue social comme un cadre
intégrant ces nouveaux impératifs.
Le droit social a été défini justement comme étant « une technique de civilisation
de l’entreprise… (c’est l’action) d’y substituer les rapports de droit aux rapports
de force16. » Le droit du travail n’est pas construit pour restreindre la liberté
d’entreprendre ou réduire l’expansion économique. C’est un cadre légal
spécifique traduisant en termes techniques « Le socialement souhaitable et
13 BIT Genève : Rapport de synthèse des dialogues nationaux sur l’avenir du travail. OIT 2 017 P 73.
https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---dgreports/
cabinet/documents/publication/wcms_591506.pdf (consulté le 20 février 2020)
14 Cécile Bourreau Dubois. Bruno Jean Didier (S.Dir). L’économie sociale et droite : Économie et droit
du travail. Tome I Pris. L’Harmattan. 2006. P. 26
15 Définition de F. Snyder. « Soft law concerns rules of conduct which, in principle, have no legally
binding force but which nevertheless may have practical effects. » Francis Snyder. « Soft law and
institutional practice in the European community. » In, Steve Martin (Éd.) The construction of Europe.
Essays in Honor of Emile Noel. Kluwer. 1993. P. 198.
16 A. Supiot. Critique du droit du travail, Coll. Les voies du droit. Éd. PUF Paris 1994. 280 p.
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l’économiquement possible17- Plus de références et documents sur Legaly Docs. » C’est là tout l’objectif premier du dialogue
social : confronter des protagonistes ayant des intérêts opposés dans une
discussion rationnelle.
Intérêt du dialogue social sur le plan national. Les Facteurs sociaux qui imposent
l’ouverture à l’échange et la préservation de la cohésion sociale suggèrent le suivi
d’une bonne gouvernance. Les partenaires sociaux auront un moyen/Cadre légal
pour promouvoir et relancer l’échange et minimiser les disparités sociales.
Intérêt du dialogue social sur le plan international : La conformité aux exigences
de l’organisation internationale du travail qui œuvre pour la promotion du
dialogue social transnational n’est plus un choix. C’est une nécessité dictée par
les engagements internationaux pris pour mettre en place des structures propres à
toute démocratie sociale participative.
Étudier tous les aspects du dialogue social invite à utiliser une approche légale et
sociale pour expliquer un processus en devenir qui échappe aux définitions
traditionnelles des règles juridiques et dont l’intérêt réel dépend de sa réceptivité.
Le dialogue social tel que « réédité » récemment par le législateur pour servir les
intérêts des partenaires sociaux pourra-t-il contribuer à la reformulation d’un droit
social plus progressiste ?
Le dialogue social traduit par le Droit (première partie) est l’expression
la plus raisonnée d’une société démocratique, mais l’invitation au dialogue ne
suffit pas à imposer des changements concrets ; ce n’est qu’un cadre à respecter.
C’est aux acteurs sociaux de le remplir. Ils seront appelés à être plus réactifs pour
façonner le Droit par le dialogue social (deuxième partie)
17 Le développement durable est souvent présenté comme ayant trois fondements essentiels :
environnemental/social/économique. Trois critères définissent ce qui est physiquement possible,
socialement souhaitable et finalement économiquement faisable. Le développement durable est
interdisciplinaire, ayant pour objectif premier le bien-être de l’Homme et des générations futures. H.
Abaza A. Baranzini. (Ed) Implementing sustainable developement. UNEP. 2002. Edwar Elgar
publishing limited. P.1.
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Première partie :
Le dialogue social encadré par le Droit :
La nécessité de la formulation juridique du dialogue social tient à la
particularité de ce droit. Le droit social est un droit spécial qui s’attache aux faits
sociaux pour les traduire en règles organisant les relations de travail tout en
laissant aux protagonistes le soin de formuler leurs attentes respectives sous forme
de contrats et de conventions collectives. Le dialogue social organise et gère cet
échange. Ses attributions sont citées à l’article 2 de la loi N° 2017/5418. Elles sont
nombreuses, mais se limitant à l’encadrement et à la gestion à travers un organe
privé de prérogatives de la puissance publique19. L’importance du dialogue social
sera recherchée dans le pouvoir de suggestion accordé au Conseil pour reformuler
18 Loi n° 2017-54 du 24 juillet 2017, portant création du Conseil national du dialogue social et fixant ses
attributions et les modalités de son fonctionnement.
Art. 2 – Le conseil est chargé d’organiser et de gérer le dialogue social concernant les questions sociales
et économiques d’intérêt commun pour les trois partenaires sociaux, dans un cadre qui garantit la
continuité et la régularité du dialogue.
Le conseil est chargé notamment d’assurer les missions suivantes :
– garantir un dialogue social tripartite efficient concernant les questions d’intérêt commun,
– agir en vue de mettre en place un climat social incitant et encourageant à l’investissement et
garantissant les conditions du travail décent,
– suivre le climat social et observer le degré de respect des législations sociales,
– émettre un avis sur les projets de réformes présentés par le gouvernement dans le domaine économique
et social,
– organiser un dialogue social sur les éventuelles questions importantes ayant un aspect national,
régional ou sectoriel dans les domaines qui relèvent de sa compétence,
– proposer les mécanismes susceptibles de prévenir les conflits collectifs,
– réaliser des études sur les questions relevant de sa compétence,
– encadrer les négociations collectives,
– présenter des propositions concernant l’évolution du salaire minimum garanti dans les deux secteurs
agricole et non agricole,
– contribuer au développement de la performance des entreprises dans la gestion des relations
professionnelles et la résolution des conflits du travail,
– Émettre un avis sur la ratification des conventions internationales ayant trait aux normes
internationales du travail et contribuer à l’élaboration et à la rédaction des rapports présentés par le
gouvernement à l’organisation internationale du travail.
19 M. Hauriou définit la puissance publique comme étant « le pouvoir de l’État, en tant qu’il s’applique
à l’accomplissement de la fonction administrative… Les pouvoirs ou droits des administrations
publiques, exercés par la puissance publique, sont exorbitants du droit commun. Ces droits ont pour
caractère commun de contenir le pouvoir de commander à des hommes libres et leurs effets spéciaux se
justifient par les besoins des services publics. Cette puissance de volonté… se caractérise par : le
privilège de l’exécution préalable et le privilège de la création du contentieux par des actes préalables. »
Précis de droit administratif et de droit public. 5e ÉD. Librairie de la société du recueil des lois et arrêtés.
Paris. 1903. p 225.
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le droit social par la négociation (A) et tout reposera sur la compétence et la bonne
volonté des acteurs de ce dialogue (B).
A. La formulation du droit social par la négociation
Le droit du travail « s’est élaboré au profit de travailleurs se trouvant dans
une situation de dépendance appelant une protection particulière. Il est le droit
du travail pour autrui ; ce qui exclut de son champ d’application les travailleurs
indépendants exerçant une activité professionnelle pour leur propre compte20. »
Les sources du droit du travail sont spécifiques et adaptées à la dynamique sociale.
C’est cette dynamique poussée à l’extrême qui a justifié la formulation d’un
nouveau contrat social21 : la nouvelle constitution a affirmé la coloration sociale
de l’ordre juridique en citant la justice sociale comme un impératif majeur22. Les
droits sociaux fondamentaux sont cités pour réaffirmer une réalité sociale
antérieure : le droit de la grève et les droits syndicaux23. L’engagement de l’État
à garantir le travail pour tous a été cité aussi24.
Les conventions internationales produites par l’O.I.T. et ratifiées par la
Tunisie constituent une source importante du droit social25. Le Code du travail,
malgré son âge, est un code moderne qui comporte des acquis importants, mais
n’offre pas une protection suffisante pour les travailleurs. Les usages
professionnels et les règlements internes des entreprises sont aussi pris en compte
comme sources déterminant les relations entre employeurs et employés tout en
respectant la hiérarchie des normes et l’ordre public26. Le droit du travail s’est
20 Jean Mouly. Droit du travail. 4e Éd. Bréal. Lexifac. Paris 2008. P. 8. 286 p.
21 E. Dubout, N. Baccouche.(S.Dir) Nouvelle constitution tunisienne et transition démocratique.
Lexisnexis 2016. 184 p.
22 Article 12 de la constitution de 2 014 « L’État agit en vue d’assurer la justice sociale, le
développement durable et l’équilibre entre les régions…. » Reste que l’équilibre social n’est pas
complètement atteint puisque les droits économiques ne sont pas cités. Ce n’est pas une évidence de dire
que l’Etat encourage la liberté d’entreprendre et protège les droits collectifs des consommateurs. Ces
droits font partie d’un tout, formant une vision socio-libérale de la société, c’était urgent de leur octroyer
une valeur constitutionnelle. On aurait pu gagner plus d’effectivité des normes s’y rattachant et une
harmonisation légale souhaitable en droit économique.
23 Article 36 de la constitution.
24 Article 40 de la constitution tunisienne : « Tout citoyen et toute citoyenne ont droit au travail. L’État
prend toutes les mesures nécessaires afin de les garantir sur la base du mérite et de l’équité. Tout citoyen
et toute citoyenne ont droit au travail dans des conditions favorables et avec un salaire équitable. »
25 Le Code du travail la loi N° 66-27 du 30 avril 1966 relative à l’adoption du Code du travail. Loi
amendée plusieurs fois : notamment par les lois no 73-77 du 8 décembre 1973 et 76-84 du 11 août 1976 ;
la loi n° 96-62 du 15 juillet 1996. – Lois/décrets/arrêtés les conventions collectives. Droit de la sécurité
sociale. Autres sources : jurisprudence et doctrine. La jurisprudence de prud’homme joue un rôle
important dans l’interprétation de la loi et le contrôle des contrats de travail en faveur des travailleurs.
26 Voir infra Partie 2.
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construit grâce à des structures et des règles qui maintiennent une certaine justice
sociale de compromis.
Toutes ces sources sont la traduction d’un ordre public économique déterminant
les choix du législateur. « L’ordre public économique est l’ensemble des règles
obligatoires dans
l’organisation
économique, aux rapports sociaux et à l’économie interne du contrat27. »
les rapports contractuels relatives à
Tout dialogue social doit être mené en respect de la nature spécifique de la
norme sociale : la contractualisation du droit social justifie la place privilégiée
accordée aux négociations collectives. L’application du droit du travail est
commandée par l’existence d’un contrat qui place l’employé sous l’autorité de
l’employeur. Les intérêts divergeant et la subordination peuvent créer un
déséquilibre. Ce déséquilibre significatif explique l’originalité du droit du travail.
Une originalité accentuée par la souplesse des notions prévues par le droit du
travail. Un dialogue social permet d’intégrer une nouvelle dimension de la justice
sociale dépassent la simple lutte des classes pour englober les besoins de la
démocrate sociale participative. Les dispositions de ce droit constituent un arsenal
de règles progressistes qui défendent les intérêts de la partie faible adhérente au
contrat. Le droit du travail s’est détaché du droit civil par l’originalité de ses
sources, mais aussi par la place importante accordée à la jurisprudence lors de la
révision des contrats de travail et le contrôle des clauses réputées abusives et
nuisibles aux travailleurs.
La nature juridique des conventions collectives : C’est une source formelle du
droit social sous forme d’un accord entre partenaires sociaux28. C’est une source
de droit parce qu’il est accordé aux partenaires sociaux le droit d’adapter la
situation sociale aux exigences de chacun par voie de négociation29. Au niveau de
l’article 31 du Code du travail, le législateur utilise le terme d’Accord pour
désigner les conventions. Celle-ci s’applique aux conditions de travail nées de
contrats privés. La convention est un accord certes dont les clauses sont librement
déterminées par les partenaires sociaux, mais ce n’est pas un simple contrat. La
convention collective agrée par arrêté devient une source formelle de droit30. Le
refus d’agrément (motivé) rend la convention sans effet même entre les parties
contractantes. La convention émane de la volonté des parties, mais ses effets ne
sont pas relatifs et elle est rendue exécutoire par un acte d’autorité. Le
consensualisme et la recherche du consensus sont les fondements du droit social
négocié. Cette partie du droit est importante pour constituer un bouclier contre
l’utilisation parfois abusive du pouvoir patronal de subordination qui peut créer
des tensions sociales. L’organisation d’un dialogue social effectif peut minimiser
27 G. Farjat, « L’ordre public économique. » RIDC, Vol 19, N° 2 1967. P. 520.
28 B. Teyssie. Droit du travail Tome 2, Les relations collectives du travail. 2e Éd. LITEC Paris 1993.
29 La convention collective conclue entre groupements ou organisations afin de définir le comportement
respectif de leurs adhérents. J. Cornu.
30 Article 38 du Code du travail.
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les risques des tensions sociales même en temps de crises. Son impact peut être
important lorsqu’il englobe toutes les revendications des intervenants sur la scène
sociale.
Il a été justement affirmé que « La grève… ne doit pas être comprise comme un
acte de rupture, mais comme forme d’attachement à l’entreprise. La négociation
et les accords collectifs, moment positif sont nécessairement précédés de conflits,
moment négatif31. » Le dialogue social permet d’absorber les conflits les plus
compliqués. C’est une reconnaissance légale de la spécificité des intérêts sociaux
qui ne peuvent être protégés par une réglementation rigide, mais par une
production normative consensuelle prenant en compte la dynamique sociale. Son
applicabilité dans l’absolu est difficile à prévoir parce que le choix de procédures
et de modalités d’exécution est laissé au libre arbitre des membres du Conseil. Le
manque de directives et d’habillage procédural de l’action du Conseil prédit son
faible impact sur la production des conventions collectives. L’issue heureuse
d’une longue période de concertation alimentée par des tensions sociales de part
et d’autre dépend de plusieurs facteurs qui échappent parfois aux acteurs sociaux.
rapide des besoins économiques et
L’évolution
les crises sociales
l’accompagnant, s’accordent mal avec la lenteur des procédures et l’absence
d’obligations de résultat pour le Conseil. Les seules exigences légales se résument
à la consultation à la demande et à la présentation annuelle du rapport sur les
activités à la présidence de la République. Les études théoriques sur la situation
sociale comprenant. Les conditions du travail, la force salariale, la mobilité, les
exigences salariales… sont importantes, si elles sont communiquées et étudiées
par tous les intéressés en vue d’entamer des négociations périodiques et
sectorielles. Le Conseil national invite au dialogue pour assurer la négociation en
dehors de l’entreprise32. Les conventions collectives cadre ne suffisent plus à
répondre aux besoins réels sociaux et économiques. L’échange rationnel doit être
mené pour plus d’efficience, en fonction des spécificités de chaque secteur. Outre
l’exigence de compétence et d’ouverture, les membres du Conseil doivent œuvrer
pour rétablir la confiance entre les partenaires sociaux sur la base de l’éthique
professionnelle. La réceptivité des interlocuteurs aux concessions constitue la
raison d’être de ce dialogue social. L’esprit de la loi doit être recherché dans
l’ouverture au dialogue pour une meilleure productivité tout en assurant les
intérêts légitimes des travailleurs.
31 Catherine Le Bris, « Le Droit comme langage de la société. »In, Droit et sociétés N° 88 – 2 014/3. P.
750 (pp – 747 – 758) https://www.cairn.info/revue-droit-et-societe1-2014-3-page-747.htm (consulté le
1er février 2020)
32 Kamel Hachoumi, « Le dialogue social en tant que mesure de révision et d’évolution de la
réglementation sociale. Étude comparative du droit arabe » In, mélanges en l’honneur du Doyen Mongi
Tarchouna. (pp – 42-57) (Article en arabe). consulté le 3/ 3/2020.
https://www.festunisia.org/fileadmin/user_upload/documents/publications/Contenu.pdf
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
B – La désignation légale des acteurs sociaux
Le Droit permet l’identification des acteurs de ce dialogue ; permet d’énoncer
leurs attentes et offre des structures pour prévenir ou/et protéger des intérêts
naturellement conflictuels. Ce cadre juridique ne peut être calqué aveuglément sur
les modèles d’autres sociétés, mais devrait traduire une réalité sociale en
continuelle mutation. En Tunisie, la période post-révolution a eu des
répercussions graves pour les travailleurs. La formulation légale des défis sociaux
s’est faite parfois à la hâte et sans échanges académiques préalables répondant à
des expressions extrêmes de la lutte sociale : grèves et lockout.
Désigner les acteurs du dialogue social ne veut pas dire donner une forme
rigide ou créer de toute pièce un organe viable. Le législateur en adoptant la loi
N° 2017-54 du 24 juillet 201733, institutionnalise le dialogue social et affirme la
volonté de traduire en normes légales une des exigences de la démocratie sociale
en devenir. Cet acte législatif n’est pas nouveau. Déjà depuis 1996, le Code du
travail comprenait toute une section sur la commission nationale du dialogue
social dont la composition et les modalités de fonctionnement étaient fixées par
décret34. Le dialogue social en tant que concept existait déjà en Tunisie, mais n’a
jamais été traduit en actions concrètes35. Il aurait fallu une révolution pour
insuffler un vent perturbant ce processus. Avec le temps, la commission a pris des
rides et est devenue un Conseil des sages. Elle a pris surtout du poids !
Il est difficile de justifier le choix de la structure du Conseil : un Conseil constitué
d’un nombre important d’intervenants et qui ne sont pas représentatifs de tous les
secteurs. C’est la base qui devait être élargie, et non le sommet. « L’élite » ne
pourra être représentative que si elle puise de la base les vrais enjeux des faits
sociaux et économiques. Le dialogue tripartite s’est élargi ; a-t-il gagné de
maturité ? A-t-il effacé tous les acquis ou assure-t-il la continuité ? La réponse sur
le fond est difficile puisqu’il manque des rapports publiés sur les activités de la
33 Loi N° 2017-54 du 24 juillet 2017 portant création du Conseil national du dialogue social et fixant
ses attributions et les modalités de son fonctionnement. J.O.R.T du 1er août 2017 N° 61 p. 2508
34 Loi N° 96/62 du 15 juillet 1996 modifiant l’article 335(abrogé) du Code du travail.
Le Chapitre IX du Code du travail sous le titre : La commission nationale du dialogue social présente
ladite commission comme suit : article 335 « Il est créé auprès du ministère chargé des affaires sociales,
une commission dénommée commission nationale du dialogue social. »
35 « La commission ne s’est jamais réunie ! » et « les partenaires sociaux affichaient un tripartisme de
façade qui masquait l’absence du dialogue social. »
Said Ben Sedrine « État des lieux et défis à relever pour promouvoir le dialogue social au Maroc, en
Jordanie et en Tunisie. Rapport final. » In, Solid South Med Social dialogue. Rapport final 2017. 36.
Etat_Lieux_Defis_A_Relever_Promouvoir_dialogue_Social_Maroc_Jordanie_Tunisie_VF.pdf.
(consulté le 3/3/2020)
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
commission depuis sa création. Même des informations indirectes sur le sujet font
défaut. On ne peut qu’étudier la composition formelle de ces deux organes pour
en déterminer l’impact. Ces réflexions ne peuvent être étayées ou rejetées avant
de recevoir les premiers aboutissements de ce processus d’échange.
Ce que propose le législateur :
Les acteurs sur un plan national du « dialogue tripartite » sont désignés par
l’Article 2 du décret N ° 2018 -676. La composition du Conseil est présentée
comme suit36 :
« 35 membres représentants le gouvernement (les ministères y sont
représentés et les directeurs généraux des administrations les plus importantes) /
35 membres représentants l’organisation des travailleurs la plus représentative /
30 membres représentants l’organisation des employeurs la plus représentative
non agricole / 5 membres représentants l’organisation des employeurs la plus
représentative agricole/ »
L’ancienne commission nationale du dialogue social selon l’article 2 du
Décret N° 200/1 990 du 12 septembre 2000 (abrogé), présidée par le ministre des
Affaires sociales ou son représentant, comprenait 18 représentants des ministères
et autres administrations plus : Trois représentants l’UGTT ; deux représentants
l’UTICA et un représentant de l’union tunisienne de l’agriculture et de la pêche.
Le ministre des Affaires sociales pouvait inviter toute personne qu’il juge utile à
la participation des travaux de la commission. On note que la reformulation de la
commission en Conseil ne semble pas avoir pris en compte l’élément d’efficacité
et de bonne gouvernance. L’élargissement du cercle gouvernemental est
incompréhensible et la gestion du travail du Conseil ainsi constitué, paraît
difficile. La nouvelle version de cette composition a juste maquillé un monopole
en évitant de nommer les représentants à partir de la base. Il est plus effectif de
diviser les interlocuteurs en choisissant un critère sectoriel plus représentatif.
Ce que le législateur a omis de clarifier :
L’adoption d’un dialogue social sur un plan national ne veut pas dire que d’autres
formes du dialogue seront écartées. Cependant, à partir des critères posés par le
législateur concernant la question de la représentativité syndicale, on peut dire que
le principe du pluri-syndicalisme ne sera pas respecté.
L’article 2 pose des critères : « Le nombre des adhérents arrêté le 31 décembre
2017/la tenue du congrès électoral de l’organisation syndicale/le nombre des
structures sectorielles/le nombre des structures régionales et locales de
l’organisation syndicale. Ces critères sont appliqués pour désigner l’organisation
36 Décret gouvernemental N° 2018 – 676 du 7 août 2018 portant fixation du nombre des membres du
Conseil national du dialogue social. J.O.R.T 10 août 2018 N° 64 p 2689.
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syndicale la plus représentative à l’échelle nationale des employeurs et des
employés et c’est le ministre des Affaires sociales qui est chargé de cette
désignation (article 4)37.
Le législateur parle de l’organisation syndicale au singulier. Ce qui veut dire que
les critères seront déterminants par rapport à une évaluation en nombre en premier
lieu et ne seront pas envisageables suivant une diversité des groupes
professionnels qui peuvent exister dans d’autres secteurs non représentés dans
l’organisation sélectionnée.
Les articles 242, 243 et 248 du Code du travail n’ont pas été abrogés et les
syndicats légalement constitués, continuent normalement à jouer un rôle
important. Selon l’article 243 : « Les syndicats professionnels ont exclusivement
pour objet, l’étude et la défense des intérêts économiques et sociaux de leurs
adhérents. »
L’article 248 du Code du travail dispose que « les syndicats peuvent être consultés
sur les différends et toutes les questions se rattachant à leurs spécialités. Dans les
affaires contentieuses, les avis des syndicats sont tenus à la disposition des parties
qui peuvent en prendre communication et copie. »
du
personnel/syndicats/groupes
interentreprises : Comité
Au niveau des consultations : Les acteurs
d’entreprise/représentant
professionnels
devraient avoir plus de prérogatives pour accéder aux informations et participer
aux concertations38. Ils jouent un rôle important dans le maintien d’un climat
social apaisé et dans la gestion des crises pouvant naître des rapports
professionnels naturellement conflictuels. La création du Conseil national ne leur
enlève en rien en principe de leur importance. La base de ces consultations
constitue une source d’information importante du Conseil pour préparer des
études et orienter les parties vers les négociations les plus adaptées.
La représentativité des acteurs sociaux est ancienne et a été l’objet de
plusieurs commentaires : la loi N° 94 – 29 du 21 Février 1994 a institué de
nouvelles dispositions pour la représentation du personnel dans l’entreprise. La
commission consultative d’entreprise a instauré la participation obligatoire des
salariés. Dans le domaine social, le comité d’entreprise est compétent pour
examiner les revendications et les réclamations individuelles et collectives et
toutes les difficultés nées de l’application de la législation du travail. C’est
l’organe le plus habilité à coopérer avec la direction de l’entreprise à
37 Arrêté du ministère des Affaires sociales du 26 septembre 2018 fixant des critères pour déterminer
l’organisation syndicale la plus représentative à l’échelle nationale pour la composition du Conseil
national du dialogue social. J.O.R.T du 5 octobre 2018 p. 3402.
38 Les comités d’entreprises : Décret N° 95 – 30 du 9 janvier 1995 relatif à la composition et au
fonctionnement de la commission consultative d’entreprise et aux modalités d’élection et d’exercice et
missions des délégués du personnel.
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
l’amélioration des conditions collectives de travail, de vie et d’éducation du
personnel. Dans le contexte économique actuel, le comité d’entreprise est appelé
à donner son avis sur l’organisation de l’entreprise, à étudier et à proposer
l’application de toute mesure ayant pour but d’accroître la production et
d’améliorer le rendement. Mais en dehors de ces attributions économiques et
sociales, le comité d’entreprise est conçu dans une perspective d’association
progressive du personnel à la gestion et au développement de l’entreprise39.
L’amendement de la loi durant la fin des années quatre-vingt pouvait être perçu
comme une révolution et comme l’instauration d’un dialogue social bipartite. Cet
état des choses ne pouvait être vérifié pour deux raisons : le caractère volontaire
de la consultation du comité et pour le manque de rapports ou actions concrètes
des entreprises attestant de la participation effective du personnel. Disons que ni
le patronat ni les syndicats n’ont pu suivre une dynamique sociale de concertation
que le législateur avait instaurée par une législation jugée « progressiste » à cette
époque. Le Conseil national est appelé à utiliser comme outils de travail et de
recherche les rapports ou autres documents issus de l’entreprise et des
organisations sociales40.
Le dialogue bipartite partant de la base est en réalité important et peut être plus
efficient que le dialogue construit à partir du sommet. Les partenaires sociaux sont
appelés à agir tout en mesurant l’importance de l’opportunité qui leur est offerte.
La régulation des rapports et faits sociaux est une responsabilité partagée et c’est
le dialogue social qui pose les premières fondations de ce Droit négocié.
Deuxième partie
Le droit façonné par le dialogue social :
De la force normative41 du pouvoir étatique à la force normative des
groupes d’intérêts ; c’est là tout l’avantage du dialogue social. Au niveau de la
prévention, l’encadrement ou la résolution des conflits ; le Droit dans sa forme
technique et rigide ne peut suivre la dynamique sociale ni définir les rapports
sociaux. La régulation s’invite, non pas pour se substituer au Droit, mais pour
39 Professeur Mohamed Ennaceur, « Rapport introductif : La participation des travailleurs et le droit
social. » Actes du colloque organisé à Tunis par L’ATDS juin 1987. CERP 1988. (pp 13-23) p 18.
40 Article 16 de la loi énumère les missions du bureau de l’assemblée générale du conseil national.
41 Selon la Théorie de C Thibierge sur la force normative : Trois pôles se dégagent en étudiant les sources
qui constituent autant de dimensions du Droit : « La valeur normative/ La portée normative/ La garantie
normative. » C Thibierge. La force normative, Naissance d’un concept. Paris. Bruxelles L.G.D.J.
Bruylant 2009. 912 p.
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
détecter les lacunes que les groupes professionnels se proposent de déjouer.
L’intégration effective du dialogue social dans l’environnement économique est
une nécessité pour la pérennité de l’entreprise et ceci ne se fera qu’à travers la
régulation (A). Dans cet ordre des choses, les rapports sociaux seront modifiés et
des défis nouveaux feront surface. L’étendue de l’influence du Conseil sur les
rapports professionnels ne peut être mesurée sur la base de missions non encore
accomplies (B). L’environnement économique et le cadre juridique permettent au
Conseil du dialogue social d’étudier ses changements et redéfinir les conflits en
dehors de tout traitement judiciaire.
A. Le rôle du dialogue social en tant que condition préalable à la régulation :
L’intérêt de l’entreprise est omniprésent dans le processus du dialogue
social42. Il permet aussi la formulation renouvelée des exigences de la dynamique
sociale. Tous s’accordent à dire que l’entreprise de demain sera une grande
plateforme numérique43 et que le rôle de l’entrepreneur sera d’orchestrer le flux
de l’offre et de la demande digitalisées. Les notions de l’espace et de temps du
le
travail évolueront forcément et
changement. Cette évolution de l’exécution du travail fera naître forcément des
contrats de travail atypiques et des risques sociaux inédits. Le droit ne pourra pas
régir tous les aspects sociaux de ces transformations. C’est là où réside tout
l’intérêt du dialogue social : il permettra de suggérer des usages professionnels
nouveaux, adaptés aux besoins de secteurs précis.
les rapports professionnels subiront
Tout en respectant les principes directeurs du droit social classique, la
régulation offre la possibilité d’intégrer des normes nouvelles suggérées par une
économie globalisée : la responsabilité sociale de l’entreprise, le développement
durable et, d’une manière générale, l’éthique appliquée au monde des affaires sont
des notions qui échappent au lexique strictement juridique. Le caractère de
coercition fait défaut et pourtant ces notions dessinent la nouvelle politique de
l’entreprise44. L’efficience de ces impératifs nouveaux se mesure d’après la
42 N. Mzid, « Le droit du travail entre la fonction protectrice et l’efficience de l’entreprise. » (Article
en arabe) colloque : Vers plus d’efficience de l’entreprise face aux défis actuels. L’association
tunisienne des inspecteurs du travail. 10/ 12 /2014 Hammamet
43 A.F De Saint-Laurent-Kogan et JL Metzger. (S.Dir) Où va le travail à l’ère du numérique ? Éd. Les
presses Paris Tech. Paris. 2007.
David Fayon. Michael Tartar. Transformation digitale. 5 leviers pour l’entreprise. Tours. Éd. Pearson
France. 2014.
44 La théorie de la Compliance aux normes internationales tient entre autres choses à la nouvelle fonction
de l’entreprise. L’entreprise sociale a été présentée par la commission européenne le 6 octobre 2011 à
propos de la proposition d’un « règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un
programme de l’UE pour le changement social et l’innovation sociale » dont un des objectifs vise à
« stimuler l’emploi et l’inclusion sociale en augmentant la disponibilité et l’accessibilité du micro
financement pour les groupes vulnérables et les microentreprises et en améliorant l’accès au financement
pour les entreprises sociales ». Le document propose cette définition de « l’entreprise sociale » : « une
entreprise dont le principal objectif est d’avoir une incidence sociale plutôt que de générer du profit
pour ses propriétaires ou ses partenaires. Elle opère sur le marché en fournissant des biens et des
services de façon entrepreneuriale et innovante et elle utilise ses excédents principalement à des fins
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
réactivité des partenaires sociaux. Plus spécialement, les entrepreneurs doivent se
soumettre aux textes régulateurs tels que charte d’entreprise, code de conduite…
tout en laissant une marge de manœuvre non négligeable à la participation directe
du personnel.
Le dialogue social ouvre la voie vers la discussion autour de la dynamique
entrepreneuriale au plus haut niveau et constitue une composante renouvelée du
droit post moderne : « Le droit post moderne entre de plain-pied dans le monde
de la complexité : complexité des mécanismes de production ; complexité des
modalités d’articulation des normes juridiques. Mais le droit post moderne est
aussi caractérisé par la flexibilité : flexibilité du contenu des normes et flexibilité
des processus d’adaptation. Par ces deux dimensions, le droit post moderne
s’oppose au droit moderne : à l’unité il oppose en effet le pluralisme ; à la
hiérarchie, la diversité ; à la contrainte, la régulation ; à la stabilité,
l’adaptabilité45. » Tout l’intérêt du Conseil du dialogue social doit être porté sur
la recherche de l’effectivité dans un contexte de pluralisme juridique déconcertant
même pour les spécialistes. « L’État n’est plus le seul producteur de droit, il
émerge une pluralité de foyers normatifs, de sous-systèmes de droit. En droit du
travail à proprement parler, la production du droit dans sa dimension pluraliste
renvoie aux notions d’autonomie collective et de négociation collective. »
Sous
l’organisation
l’impulsion de
internationale du
les
interlocuteurs sociaux revendiquent le droit à l’harmonisation au niveau des
conditions du travail, la mobilité et la protection sociale... Grâce à la promotion
du dialogue social au niveau international, les partenaires sociaux ne sont plus
invités uniquement à la négociation salariale, mais sont appelés également à
participer à l’échange d’informations, des consultations et concertations pour
arriver au final à l’étape de la négociation.
travail,
L’évolution du cadre normatif au niveau social peut se faire grâce aux
travaux du Conseil national du dialogue social. Ce Conseil est investi de missions
multiples et variées qui peuvent concurrencer ou faire de l’ombre à d’autres
structures sociales. Un dialogue social qui aboutit à un consensus risque « d’être
assimilé à la négociation collective qui est précisément une activité de production
des règles juridiques46. » Est-ce que le Conseil est habilité à encadrer un dialogue
social consultatif ou peut-il après les consultations et concertations participer aux
négociations ?
sociales. Elle est soumise à une gestion responsable et transparente, notamment en associant ses
employés, ses clients et les parties prenantes concernées par ses activités économiques"
http://recma.org/sites/default/files/changement_social_et_innovation.pdf (consulté le 3 février 2020)
45Jacques Chevallier. « Vers un droit post-moderne ? Les transformations de la régulation juridique. »
In, Revue du droit public et de la science politique, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence,
1998 (pp. 659-714.) p.9. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01728684 (consulté le 1er février 2020)
46 Philippe Martin. Le dialogue social, modèles et modalités de la régulation juridique. Pessac Presses
universitaires de Bordeaux. 2007. P 23.
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
À la lecture du texte juridique, il semble que le Conseil national invite à la
négociation et ne se propose pas de se suppléer à tous les interlocuteurs. Il devrait
être considéré comme un Conseil des sages ; il ne peut pas être juge et partie à la
fois. Un dialogue social effectif sera mené par des personnalités compétentes et
impartiales surtout lors de l’étape pré-négociation.
L’article 2 de la loi N° 2017-54 présente les attributions du Conseil comme suit47 :
« Le Conseil est chargé d’organiser et de gérer le dialogue concernant les
questions sociales et économiques d’intérêt commun pour les trois partenaires
sociaux, dans un cadre qui garantit la continuité et la régularité du dialogue.
Le Conseil est chargé notamment des missions suivantes :
- Garantir un dialogue social tripartite efficient concernant les questions
d’intérêt commun.
- Agir en vue de mettre en place un climat social incitant et encourageant
à l’investissement et garantissant les conditions du travail décent.
- Suivre le climat social et observer le degré de respect des législations
sociales.
- Émettre un avis sur les projets de réformes présentés par le
gouvernement dans le domaine économique et social.
- Organiser un dialogue social sur les éventuelles questions importantes…
qui relève de sa compétence.
- Proposer des mécanismes susceptibles de prévenir les conflits collectifs.
- Réaliser des études sur les questions relevant de sa compétence.
- Encadrer les négociations collectives
- Présenter des propositions sur l’évolution du salaire minimum garanti
dans les deux secteurs agricole et non agricole.
- Contribuer au développement de la performance des entreprises dans la
gestion des relations professionnelles et la résolution des conflits du
travail.
- Émettre un avis sur la ratification des conventions internationales ayant
trait aux normes internationales du travail et contribuer à l’élaboration
et la rédaction des rapports présentés par le gouvernement à L’O.I.T. »
Et la liste peut s’allonger puisque le législateur a énuméré à titre indicatif
les attributions en utilisant le terme notamment.
L’article 348 dispose le recours obligatoire au Conseil pour requérir son avis sur
les projets de loi et décrets gouvernementaux ayant trait au travail, aux relations
professionnelles, à la formation professionnelle et à la protection sociale. L’avis
47 Loi N° 2017-54 du 24 juillet 2017 portant création du Conseil national du dialogue social et fixant
ses attributions et les modalités de son fonctionnement. J.O.R.T du 1er août 2017 N° 61 p. 2508
48 Loi N° 2017-54 p. 2508
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
du Conseil est obligatoirement annexé au projet de loi soumis à l’assemblée des
représentants du peuple.
Le dialogue social et le Code du travail invitent à la recherche d’un
consensus produit après une consultation partant de la base. L’ancienne version
du Conseil national du dialogue social n’a pas eu des effets notoires sur la
négociation collective. Il fallait que le changement vienne de l’extérieur des
structures nationales avec le développement du soft Law dans plusieurs domaines.
La notion du soft Law (droit souple conformément à la culture juridique
francophone) a été initiée au niveau de la Common Law pour se répandre au
niveau international. C’est devenu une branche à part, portée par plusieurs
organisations et institutions influentes. Les sources non étatiques ne sont pas
obligatoires, mais ont une valeur normative aussi forte que la loi49. Dans le
contexte qui nous concerne, la régulation sectorielle du droit social se prépare à
partir de la base. La production des accords d’entreprises, conformes aux
spécificités de l’activité ou créés pour formuler des rapports atypiques du travail,
constitue une source importante du droit social. L’autorité étatique au niveau
social a consenti à être concurrencée par la négociation des rapports sociaux. Les
partenaires sociaux sont encouragés dans leur rôle d’adaptation des lois aux
situations sociales et économiques. Par l’effet de la régulation, il y aurait d’autres
formes de concurrence. Mais il ne faut pas oublier de préciser que le pouvoir
normatif patronal a une portée limitée50 : Il ne peut imposer des obligations
contraires à la loi ou aux conventions collectives. La régulation des normes
suggère désormais l’énonciation de nouveaux défis et les rapports sociaux seront
redessinés et c’est au niveau du Conseil que ces questions seront étudiées.
B. L’influence du Conseil du dialogue social sur les rapports
professionnels
Il a été présenté au paragraphe précédent le rôle du Conseil du dialogue
social au niveau de la régulation des rapports sociaux : Trop de prérogatives sont
accordées au Conseil : quel impact sur les partenaires sociaux en un
environnement social en continuelle mutation ? Trop de missions et d’attentes
inadaptées à la situation peuvent entériner l’objectif initial du dialogue.
L’harmonisation sociale des normes51 ne sera atteinte que si le Conseil utilise des
moyens clairs en visant des objectifs précis pour prévenir les tensions. L’objectif
49 Emmanuelle Bernheim « Le pluralisme normatif, un nouveau paradigme pour appréhender les
mutations sociales et juridiques. » in, RIEJ Vol 67 2011/ 2 (pp 1 – 41).
50 A. Supiot, « La réglementation patronale dans l’entreprise. » Revue de droit social 1992. p. 215.
51 Emmanuelle Mazuer. L’harmonisation sociale européenne. Processus et modèle. Éd. Bruylant
Bruxelles 2007. P. 109 et 110.
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
étant de laisser la porte ouverte à l’échange pour d’autres personnes non
représentées au Conseil.
Par ailleurs, la concertation obligatoire du Conseil national avant
négociation n’est pas significative parce que la demande d’avis est obligatoire,
mais le gouvernement n’est pas tenu de suivre cet avis. L’acte de légiférer sera
dans ce cas retardé pour « régularisation » si l’avis du Conseil n’est pas parvenu
au ministère porteur de l’initiative législative, mais il n’est pas annulé pour autant.
L’effectivité de la norme est normalement garantie par une sanction, mais le
contenu de la loi organisant le dialogue social n’a qu’un effet régulateur des
rapports sociaux sans pouvoir avoir un effet coercitif. C’est là toute la philosophie
du dialogue social : responsabiliser les acteurs sociaux pour éviter les
affrontements nuisibles sur le plan économique et social.
On a relevé que le dialogue social existait depuis 1996, mais qu’il était
tombé en désuétude vu le climat non réceptif à la bonne gouvernance. Toute
l’efficience de ce genre de processus dépend de la maturité et du niveau éthique
des protagonistes. Ceux-ci sont appelés à représenter les intérêts sociaux et
économiques sur tous les fronts et pourtant, ils sont privés d’un outil important de
pacification des conflits que le législateur a omis de leur accorder.
L’évitement des conflits par la médiation : La médiation est un processus
non prévu par la loi sur le D.S et pourtant ce MARD Mode alternatif de règlement
des différends, peut constituer un atout majeur pour les acteurs sociaux. La
médiation est à distinguer de la conciliation sociale devant le juge. Si la
représentativité des salariés est assurée devant le juge de prud’homme et qu’il a
la possibilité de concilier dans l’intérêt des parties, il ne peut que proposer des
solutions sur la base de la loi. La médiation en revanche est un procédé libre qui
peut advenir à des stades avancés de la négociation et avant l’aggravation de la
situation. C’est un mode de résolution des conflits, mené par une personne neutre
qui invite au dialogue et encourage les parties à trouver un consensus sans influer
sur leur décision ou suggérer une transaction. « Le terme « médiation est
polysémique… Le médiateur est dans un sens très répandu, celui qui est au
milieu : L’intermédiaire. » C’est ainsi qu’une définition générale de la médiation
fait référence à « l’entremise réalisée par un tiers et destinée à réconcilier les
parties en litige52. »
Le législateur au niveau de la loi relative au dialogue social aurait pu nommer
explicitement ce mode de résolution surtout que la médiation obligatoire n’est pas
un risque pour les travailleurs comme c’est le cas de l’arbitrage. L’arbitrage cité
au niveau du Code du travail est rarement utilisé par les partenaires sociaux parce
52 Dictionnaire de la culture juridique. S. Dir. Denis Alland et Stéphane Rials. Médiation. Éd. PUF 2003.
P1009.
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
qu’il va à l’encontre de leurs attentes respectives : L’arbitrage donne la possibilité
à l’arbitre de trancher obligatoirement le litige et suspens toute grève entamée en
cas du choix de ce procédé et durant toute la procédure. La médiation est un
procédé libre qui est basé sur l’invitation au dialogue. On aurait pu imaginer que
le Conseil national serait la partie la plus habilitée à mener ce genre de procédé
par la diffusion de la culture de la médiation en premier lieu, et par l’offre
d’expertise en deuxième lieu tout en assurant la neutralité requise pour amener à
bien l’issue du conflit.
Le règlement amiable des litiges a toujours été le centre d’intérêt des
académiciens et des professionnels soucieux de l’allègement du contentieux
judiciaire. Les différentes rencontres et formations sur le sujet témoignent de cet
enthousiasme53. Et le domaine de prédilection de ces procédés semble être les
litiges commerciaux. Le succès de la médiation conventionnelle dans ce domaine
repose aussi sur le degré de conscience et d’aptitude à la concession. La médiation
est le domaine le plus sensible aux variations culturelles et sociales parce que c’est
un processus basé sur des actions choisies et non imposées.
La médiation en droit tunisien a été intégrée par bribes, dans quelques secteurs et
peut être assimilée à la conciliation. En appliquant la théorie générale des
obligations et des contrats, rien n’empêche le recours à la médiation par les
protagonistes du dialogue social au profit des parties au conflit. La
contractualisation de la médiation sous forme de clause ou compromis aura un
effet important sur la pacification des rapports sociaux.
Il est nécessaire de reformuler la mission du Conseil et restreindre sa composition
par le nombre, mais l’élargir par l’ouverture à d’autres branches professionnelles.
Ceci aura un impact sur la gestion des conflits et l’efficience de son action. Une
législation comportant des notions floues et imprécises peut être source de blocage
du pouvoir législatif et ne rien apporter aux négociations collectives. Avec peu de
moyens ou des moyens inadaptés, le Conseil du dialogue social ne servira pas à
éviter les blocages ou à rapprocher des interlocuteurs défendant des intérêts
opposés. Les salariés veulent garantir l’emploi, la formation, les conditions
favorables au travail et l’augmentation salariale. Les entrepreneurs peu soucieux
du bien-être des travailleurs cherchent la qualité, la rentabilité, le respect des
délais et engagements pour plus de productivité et de développement.
53 W. Ben Hamida et S. Bostanji. S. Dir. La Médiation dans tous ses états. Actes du colloque international
organisé à Tunis les 9 et 10 mars 2017. Éditions A. Pedone. 2018.
J Cruyplants, M. Gonda, M. Wgemans. Droit et pratique de la médiation. Éd. Bruylant. Bruxelles 2008.
405 p.
Jean Philippe Tricoit « La médiation judiciaire ». Éd. L’Harmattan 2008. Paris. 156 p.
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
Les conditions pré-requises pour assurer un dialogue social, pouvant rééquilibrer,
un ordre social rompu sont résumées comme suit :
*Un dialogue pour une
constitutionnels et traduite par des conventions collectives appropriées.
justice sociale élevée au rang des principes
*Un dialogue social productif, porté par les acteurs sociaux compétents et
exprimé rationnellement au sein des instances et institutions nationales.
Il faut dire que les enjeux sont considérables en cette période de crise économique
et sanitaire. La responsabilité doit être partagée pour faire de ce cadre
institutionnel un outil caractérisant l’intelligence sociale. « Cette intelligence
sociale se sert de tous les outils qui sont à sa disposition (relationnels,
institutionnels, innovation sociale, expérimentation…) pour transformer ce qui
était impossible en un “possible". L’intelligence sociale ne croit pas en la fatalité
sociale et encore moins en la fatalité économique tant que la part d’intelligence
est au cœur du dialogue social54. »
54 Gerard Toponat. Philippine Arnal-Roux. Dialogue social. 1re Éd. De Boeck sup. Belgique 2016. 136
p. P. 13.
Salma Ben Ayed. Maître assistante en Droit privé et sciences criminelles. Université de Tunis.
Bibliographie
W. Ben Hamida et S. Bostanji. S. Dir. La médiation dans tous ses états. Actes du colloque
international organisé à Tunis les 9 et 10 mars 2017. Éditions A. Pedone. 2018.
E. Bernheim « Le pluralisme normatif, un nouveau paradigme pour appréhender les mutations
sociales et juridiques. » in, RIEJ Vol 67 2011/2 (pp 1 – 41)
C. Le Bris, « Le Droit comme langage de la société. » In, Droit et sociétés N° 88 – 2 014/3. P.
750 (pp – 747 – 758) https://www.cairn.info/revue-droit-et-societe1-2014-3-page-747.htm
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