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Revue de droit comparé du travail et de la
sécurité sociale
 
1 | 2019
Doctrine
Dialogue social et démocratie en Tunisie dans un
contexte de transition
Nouri Mzid
Édition électronique
URL : https://journals.openedition.org/rdctss/1602
DOI : 10.4000/rdctss.1602
ISSN : 2262-9815
Éditeur
Centre de droit comparé du travail et de la sécurité sociale
Édition imprimée
Date de publication : 1 avril 2019
Pagination : 7-17
ISSN : 2117-4350
Référence électronique
Nouri Mzid, « Dialogue social et démocratie en Tunisie dans un contexte de transition », Revue de droit
comparé du travail et de la sécurité sociale
[En ligne], 1 | 2019, mis en ligne le 01 novembre 2021,
consulté le 13 novembre 2021. URL : http://journals.openedition.org/rdctss/1602 ; DOI : https://
doi.org/10.4000/rdctss.1602
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Nouri Mzid
Dialogue social et démocratie
en Tunisie dans un contexte de
transition
RÉSUMÉ
La promotion du dialogue social est une exigence de la transition démocratique en Tunisie. Mais,
l’efficacité de ce dialogue reste limitée à cause notamment des lacunes de la loi concernant
l’institutionnalisation du dialogue social tripartite, ainsi que l’absence d’un cadre juridique adapté en
matière de dialogue social bipartite.
MOTS CLÉS : Démocratie, dialogue social, syndicat, relations professionnelles.
ABSTRACT
Promoting social dialogue is a requirement of the democratic transition in Tunisia. But, the effectiveness
of this dialogue remains limited in particular because of the shortcomings of the law concerning the
institutionalization of tripartite social dialogue, as well as the lack of an appropriate legal framework
for bipartite social dialogue.
KEY WORDS : Democraty, Social Dialogue, Trade Union, Industrial relations.
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Le dialogue social est une notion centrale dans tout système moderne des
relations professionnelles. Ayant pour finalité de pacifier les rapports de
travail, il constitue à la fois un instrument clé de promotion de la cohésion
sociale et du développement inclusif, ainsi qu’une illustration d’une
1
. Cette modernité
modernité du système des relations professionnelles
consiste, en effet, à (cid:109) civiliser (cid:125) ces relations, c’est-à-dire y substituer aux rapports de
forces des rapports de droit à travers des mécanismes de régulation sociale basés sur
le dialogue et la concertation.
Le dialogue social est aussi un modèle de gouvernance et une exigence de l’idéal
démocratique, voire l’instrument le plus adapté pour la réalisation de la démocratie
sociale considérée comme l’indispensable complément de la démocratie politique.
Cette affirmation est aujourd’hui, plus que jamais, d’une grande actualité en Tunisie
dans un contexte de transition vers la démocratie qui reste encore fragile. Le succès de
cette transition dépend dans une large mesure de l’existence d’un véritable consensus
2
.
social fondé sur le dialogue entre des acteurs représentatifs et légitimes
3
L’adoption d’une nouvelle Constitution tunisienne, le 27 janvier 2014, marque
une étape décisive dans le processus de cette transition. Elle a largement consolidé
les droits sociaux fondamentaux qui constituent une exigence de l’édification de tout
. Mais cette Constitution, comme celle de 1(cid:28)5(cid:28), a totalement ignoré le
Etat social
principe du dialogue social et la liberté de négociation collective qui constitue son
instrument essentiel. Pourtant, cette liberté est un prolongement indissociable du
principe de la liberté syndicale, qui est solennellement proclamé par la Constitution
4
et largement consacré par le Code du travail
5.
1 Voir M. Tarchouna, (cid:109)  La modernisation du système tunisien des relations professionnelles,
bilan et perspective (cid:125), in
Tunisie 2040 : le renouvellement du projet moderniste tunisien, Ouv.
coll., Association Mohamed Ali de la culture ouvrière, Sud Editions, Tunis 2011, p. 415.
2 Voir Institut international d’études sociales, Tunisie, un nouveau contrat social pour une
croissance juste et équitable, BIT, 2011. Sur le rôle des syndicats dans la transition démocratique
en Tunisie, v. N. Mzid (dir.),
Syndicats et transition démocratique, Etudes à la mémoire du
Doyen M. Tarchouna, Faculté de droit de Sfax, 201(cid:25). V. aussi N.Mzid et A. Hamza Safi, (cid:109) Droit
du travail et transition démocratique en Tunisie (cid:125), in Mélanges en l’honneur d’Antoine Lyon-
Caen, Dalloz, 201(cid:27), p. (cid:25)(cid:28)3.
3 Voir notre article intitulé (cid:109)  L’insertion des droits sociaux fondamentaux dans la nouvelle
Constitution tunisienne : une effectivité à l’épreuve (cid:125),
Revue de droit comparé du travail et de
la sécurité sociale, 2015/1, p. (cid:27)0.
4 Affirmé par la Constitution du 1er juin 1(cid:28)5(cid:28) (art. (cid:27)), le principe de la liberté syndicale a été
consolidé par la Constitution du 27 janvier 2014 (art. 35 et 3(cid:25)).
5 Voir le chapitre 1 du Livre VII du C.T, intitulé : Les syndicats professionnels.
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Le principe du dialogue social trouve son fondement, surtout, dans un ensemble
de normes adoptées par l’OIT et ratifiées par la Tunisie
(cid:25). Fondée sur le principe du
tripartisme, cette organisation encourage largement les pays membres à promouvoir
la coopération entre les autorités publiques et les organisations d’employeurs et
de travailleurs, à travers le recours au dialogue social tripartite, ainsi qu’entre ces
organisations à travers le recours au dialogue social bipartite
7. Mais il n’existe pas
un modèle universel de dialogue social. Les instruments de l’OIT relatifs à ce sujet
laissent aux Etats membres une grande latitude quant aux modalités et procédures à
adopter en la matière.
En Tunisie, la pratique du dialogue social, notamment sous sa forme de
négociation collective, est relativement enracinée dans le système des relations
professionnelles. Mais l’efficacité de ce système reste souvent limitée, pour des
raisons multiples dont l’absence d’une organisation juridique claire permettant de
garantir la vitalité et la continuité du dialogue social et de renforcer son efficience.
Cette affirmation peut (cid:172)tre vérifiée, d’abord, au niveau du dialogue social tripartite
s’exerçant à l’échelle nationale entre les représentants du gouvernement et des
organisations des salariés et des employeurs. L’institutionnalisation de cette forme de
dialogue, à travers la création d’un organe spécifique, dénommé le conseil national
du dialogue social (CNDS), par la loi n(cid:114) 54 du 24 juillet 2017, peut (cid:172)tre un appui à la
transition vers la démocratie. Mais l’apport de cette loi reste mitigé, étant donné ses
lacunes et ambiguïtés qui risquent d’affecter le rôle de cet organe et les modalités
de son fonctionnement (I). Ensuite, un manque d’efficacité du système tunisien des
relations professionnelles peut (cid:172)tre observé au niveau du dialogue social bipartite.
En effet, le dispositif relatif aux structures de ce dialogue au sein de l’entreprise
reste inadapté, et le cadre juridique dans lequel s’exerce la principale forme de ce
dialogue, à savoir la négociation collective normative, est très lacunaire (II).
(cid:25) Parmi ces normes, on peut mentionner notamment la convention n(cid:114)  (cid:27)7 sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, et la convention n(cid:114) (cid:28)(cid:27) sur le droit d’organisation
et de négociation collective. Ces deux conventions qui font partie du bloc des normes
fondamentales du travail ont été ratifiées par la Tunisie depuis 1(cid:28)57. La Tunisie a ratifié aussi,
en 2007, la convention de l’OIT n(cid:114) 135 sur la représentation des travailleurs dans l’entreprise.
De m(cid:172)me, la Tunisie a ratifié, en 2013, trois autres conventions de l’OIT, ayant un rapport
étroit avec le principe du dialogue social, à savoir  : la convention n(cid:114)  144 sur le dialogue
social tripartite, la convention n(cid:114)151 sur les relations du travail dans la fonction publique et
la convention n(cid:114) 154 sur la négociation collective.
7 Voir BIT, Dialogue social, Conférence internationale du travail, 102ème session, 2013.
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Dialogue social et démocratie en Tunisie
I - L’INSTITUTIONNALISATION DU DIALOGUE SOCIAL TRIPARTITE,
UN APPUI MITIGÉ À LA TRANSITION VERS LA DÉMOCRATIE
Le législateur tunisien avait créé, en 1(cid:28)(cid:28)(cid:25), une structure dénommée (cid:109) la commission
nationale du dialogue social  (cid:125), qui était chargée d’émettre son avis sur diverses
questions concernant notamment la législation du travail, les normes internationales
du travail, les salaires, la classification professionnelle, les négociations collectives et
le climat social
(cid:27). Mais cette structure a connu un échec total. Ne disposant pas d’une
réelle autonomie vis-à-vis des autorités publiques et ayant une composition dominée
par les représentants du gouvernement, elle a été boycottée par la centrale syndicale
UGTT
(cid:28). Une réforme de la loi, en vue de promouvoir et d’institutionnaliser le dialogue
social tripartite, est devenue alors d’une grande nécessité, comme l’ont exprimé les
signataires du contrat social en 2013
10. Cette réforme a été concrétisée par la loi
n(cid:114) 54 du 24 juillet 2017 portant création du conseil national du dialogue social. Mais
l’analyse de cette loi permet de constater que si le champ d’intervention de cette
nouvelle structure est très étendu (A), son fonctionnement reste mal encadré (B).
A - Un champ d’intervention étendu
Le CNDS est appelé à assurer des
fonctions multiples se rapportant
essentiellement à deux grands domaines d’intervention. D’abord, il est chargé d’une
fonction d’organisation et de gestion du dialogue social. Dans ce cadre, la loi a
confié au Conseil plusieurs missions qui semblent ambitieuses, visant notamment la
promotion du dialogue social en assurant sa continuité et sa régularité, la pacification
des relations professionnelles,
la
présentation des propositions concernant l’évolution du salaire minimum garanti,
ainsi que l’instauration d’un climat social paisible garantissant les conditions du travail
décent et encourageant à l’investissement.
l’encadrement des négociations collectives,
Mais ces missions restent parfois mal définies et formulées dans des termes très
vagues. Ainsi, à titre d’exemple, tout en chargeant le CNDS de (cid:109) garantir un dialogue
social tripartite efficient  (cid:125), la loi n’a fixé aucun critère objectif et précis permettant
de mesurer l’impact de l’intervention du Conseil dans ce domaine et d’évaluer son
efficience. De m(cid:172)me, la mission d’encadrement des négociations collectives est
très vague. S’agit-il d’un simple rôle de facilitation et d’assistance des partenaires
sociaux en vue d’assurer un bon déroulement des négociations, ou s’agit-il d’exercer
un pouvoir d’organisation et de contrôle du processus des négociations collectives,
englobant à la fois l’habilitation des agents de négociation ainsi que la fixation de la
périodicité des négociations et leurs modalités procédurales ?
(cid:27) Voir l’article 335 (ancien) du C.T.
(cid:28) Union générale tunisienne du travail.
10 Voir le contrat social signé en date du 14 janvier 2013 entre le gouvernement, l’Union
générale tunisienne du travail et l’Union tunisienne pour l’industrie, le commerce et l’artisanat
(disponible sur internet).
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Ensuite, le CNDS est impliqué dans la gouvernance des affaires publiques, en
formulant ses avis sur l’élaboration des réformes et des politiques de l’Etat dans le
domaine économique et social. Cette fonction englobe aussi des aspects multiples,
qui se traduisent notamment par la consultation obligatoire du Conseil sur les
projets de lois et de décrets gouvernementaux ayant trait au travail, aux relations
professionnelles, à la formation professionnelle et à la protection sociale.
Le domaine de la consultation obligatoire couvre aussi l’intervention du Conseil
pour exprimer son avis sur la ratification des conventions internationales du travail et
contribuer à l’élaboration et à la rédaction des rapports présentés par le gouvernement
à l’OIT. Cette mission spécifique qui s’inscrit dans l’application des dispositions de la
Convention internationale du travail n(cid:114) 144, ratifiée par la Tunisie en 2013, est une
illustration du principe du tripartisme qui gouverne le fonctionnement de l’OIT et ses
activités normatives, et qui exige d’(cid:172)tre conforté au niveau national par un dialogue
tripartite en vue de promouvoir la ratification et l’application effective des normes
internationales du travail.
En dehors du domaine de la consultation obligatoire, le Conseil peut également
(cid:172)tre consulté, à titre facultatif, sur les projets de lois et des décrets gouvernementaux
à caractère économique et social, ainsi que sur les plans de développement et les
budgets économiques.
Dans tous les cas, le Conseil émet son avis dans un rapport motivé qu’il transmet
au chef du gouvernement dans un délai d’un mois à compter de sa réception du
projet du texte qui lui est soumis. Cet avis est obligatoirement annexé aux projets de
loi soumis au Parlement. Mais, juridiquement, le gouvernement peut toujours opter
pour un passage en force en cas de retard ou de blocage concernant la formulation
des avis du Conseil.
Par ailleurs, le législateur a donné au Conseil, par la technique d’auto-saisine,
la possibilité d’(cid:172)tre l’initiateur des projets de réforme. En réalité, cette technique a
un domaine d’application limité aux questions ayant trait au travail et aux relations
professionnelles. Mais, elle rev(cid:172)t une importance dans la mesure o(cid:187) elle permet
au Conseil de déclencher le processus des réformes sur des questions dont il juge
l’intér(cid:172)t de soulever et de présenter des propositions à leur sujet aux autorités
compétentes. Certes, ces autorités ne sont pas tenues par un délai précis pour
examiner ces propositions, ni de les approuver. Mais, pour donner une crédibilité au
dialogue social tripartite dans ce domaine, les autorités concernées devraient étudier
sérieusement les propositions du Conseil dans des délais raisonnables, avant de
décider des suites à leur donner.
Tout en disposant d’un champ d’intervention étendu, le CNDS risque de voir son
rôle limité à cause des faiblesses relatives aux modalités de son fonctionnement.
B - Un fonctionnement mal encadré
Plusieurs faiblesses risquent d’affecter
les modalités de fonctionnement
du CNDS. D’abord, une certaine ambiguïté peut (cid:172)tre signalée concernant la
représentativité syndicale au sein du Conseil. L’article (cid:27) de la loi du 24 juillet 2017
dispose que cette structure (cid:109)  se compose d’un nombre égal de représentants du
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gouvernement, de représentants des organisations les plus représentatives des
travailleurs et de représentants des organisations les plus représentatives des
employeurs dans les secteurs agricole et non agricole  (cid:125). En utilisant le pluriel à
propos des organisations des travailleurs et des employeurs, le législateur adopte ici
une conception pluraliste de la représentativité syndicale au sein du Conseil. Or, les
textes réglementaires d’application de la loi
ont retenu une conception majoritaire
de cette représentativité
, en se référant à (cid:109) l’organisation la plus représentative (cid:125) des
travailleurs et des employeurs. Un problème de légalité des textes mentionnés peut
alors (cid:172)tre évoqué, à cause de leur manque de conformité à la loi à ce sujet.
12
11
De m(cid:172)me, la loi a gardé le silence concernant les critères de la représentativité
syndicale au sein du CNDS. C’est l’arr(cid:172)té du Ministre des affaires sociales du 2(cid:25)
septembre 201(cid:27) qui est venu fixer ces critères. Selon son article 2, (cid:109) est considérée
l’organisation syndicale des travailleurs et des employeurs la plus représentative,
l’organisation qui a tenu son congrès électoral et celle qui a le plus grand nombre
d’adhérents et le plus grand nombre des structures sectorielles, régionales et
locales (cid:125). Parmi ces critères, celui du nombre des adhérents appara(cid:176)t comme étant le
plus significatif, voire le critère décisif de la représentativité syndicale. Mais les autres
critères mentionnés par l’arr(cid:172)té semblent (cid:172)tre des critères formels et insuffisants
à mesurer l’audience de l’organisation syndicale, son influence, ainsi que son
indépendance et son attachement aux valeurs de la démocratie.
- Plus de références et documents sur Legaly Docs13
Par ailleurs, le législateur a prévu d’impliquer dans l’assemblée générale du
Conseil d’autres membres désignés en leur qualité, ainsi que des membres reconnus
pour leur expérience et leur compétence dans les domaines juridiques, sociaux et
économiques. Mais, la loi n’a pas fixé de critères précis pour la désignation de ces
. En revanche, le législateur n’a pas prévu la possibilité d’impliquer d’autres
membres
corps de la société civile, à côté des représentants des organisations syndicales des
travailleurs et des employeurs, telles que les associations de défense des chômeurs.
Pourtant, la participation de telles composantes de la société civile peut (cid:172)tre très utile
pour renforcer le rayonnement du Conseil et tenir compte d’une plus large diversité
des intér(cid:172)ts en jeu.
D’autres faiblesses peuvent (cid:172)tre constatées, ensuite, au niveau de l’organisation
interne du CNDS. La loi du 24 juillet 2017 dispose, dans son article 1
er, que le
Conseil (cid:109) est doté de l’autonomie administrative et financière (cid:125), mais sans indiquer
explicitement qu’il jouit de la personnalité morale. En réalité, un manque d’autonomie
11 Voir le décret n(cid:114) (cid:25)7(cid:25) du 7 ao(cid:189)t 201(cid:27) portant fixation du nombre des membres du CNDS, et
l’arr(cid:172)té du Ministre des affaires sociales en date du 2(cid:25) septembre 201(cid:27) portant fixation des
critères pour déterminer l’organisation syndicale la plus représentative à l’échelle nationale
pour la composition du CNDS.
12 Sur la distinction entre la conception pluraliste et la conception majoritaire de la
représentativité syndicale, v. J-M. Verdier,
Syndicats et droit syndical, vol. 1, Dalloz, 2ème éd.
1(cid:28)(cid:27)7, p. 4(cid:27)0.
13 D’ailleurs, le décret du 7 ao(cid:189)t 201(cid:27) a totalement gardé le silence concernant ce sujet.
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du Conseil peut (cid:172)tre observé à travers quelques dispositions de la loi. Ainsi, le
budget du Conseil relève de celui du Ministère des affaires sociales. Son règlement
intérieur doit (cid:172)tre approuvé par décret gouvernemental. De m(cid:172)me, l’organisation
administrative et financière du Conseil est fixée par décret gouvernemental. Du reste,
sa gestion administrative et financière est assurée par un directeur désigné par décret
gouvernemental. Tous ces éléments risquent d’affaiblir considérablement l’autonomie
du Conseil et d’affecter l’efficacité de son fonctionnement et sa crédibilité.
Par ailleurs, des lacunes peuvent (cid:172)tre signalées aussi au niveau des mécanismes
d’intervention du Conseil. Ainsi, tout en instituant une obligation de consulter le
CNDS dans plusieurs domaines déjà mentionnés, le législateur n’a pas indiqué la
sanction en cas de défaillance à cette obligation. De m(cid:172)me, aucune modalité n’a
été prévue par la loi pour assurer un meilleur impact des avis et des propositions
exprimés par le Conseil aux autorités compétentes sur les décisions finales à adopter
par ces dernières. Ce vide juridique peut limiter l’efficacité des attributions du Conseil
et engendrer un manque d’articulation entre la démocratie sociale, à travers les
mécanismes du dialogue tripartite, et la démocratie politique.
Enfin, le CNDS en tant qu’organe consultatif n’est pas investi d’un pouvoir
normatif analogue à celui accordé aux syndicats représentatifs comme agents
de la négociation collective. Mais l’absence d’une délimitation précise de son rôle
en matière d’encadrement des négociations collectives peut engendrer aussi un
problème d’articulation entre le dialogue social tripartite et le dialogue social bipartite
à cause du risque d’empiétement du Conseil sur le pouvoir des syndicats dans le
domaine de la négociation collective.
II - L’INDISPENSABLE MODERNISATION DU DIALOGUE SOCIAL
BIPARTITE, UNE EXIGENCE DE L’IDÉAL DÉMOCRATIQUE
La démocratisation des rapports de travail passe essentiellement à travers la
promotion du dialogue social bipartite, ce qui exige le renforcement du rôle des
organisations de salariés et d’employeurs en tant qu’acteurs incontournables de
la démocratie sociale. En effet, sans la liberté de dialogue et de négociation entre
interlocuteurs représentatifs et légitimes, il est vain de parler de démocratie sociale.
Mais, le système tunisien des relations professionnelles souffre à ce niveau de
plusieurs insuffisances qui limitent considérablement l’efficacité du dialogue social.
D’une part, le dispositif relatif aux structures de ce dialogue au niveau de l’entreprise
est inadapté (A). D’autre part, le cadre juridique dans lequel s’exerce la principale
forme de ce dialogue, à savoir la négociation collective, est encore lacunaire (B).
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A - Les structures du dialogue social dans l’entreprise :
un dispositif inadapté
En Tunisie, le dialogue social dans l’entreprise repose sur un système dualiste
de représentation des salariés, mais qui est marqué par une grande ambivalence
14.
Alors que les organes de représentation non syndicale, qui sont institués par la loi, ont
fait preuve de leur inefficacité comme structures de dialogue social, la présence de
l’organe syndical dans l’entreprise, qui s’impose en réalité comme étant le principal
interlocuteur du chef d’entreprise au nom des salariés, est encore quasi ignorée par
le Code du travail.
Le législateur a prévu, depuis 1(cid:28)(cid:25)0, l’institution du comité d’entreprise en tant
qu’organe de représentation élu du personnel. Mais cette structure n’a pas connu un
grand succès et a été remplacée, depuis 1(cid:28)(cid:28)4, par une autre structure dénommée la
commission consultative d’entreprise
15. Contrairement à l’ancien comité d’entreprise
qui était composé seulement par des représentants élus du personnel, cette
commission est une structure paritaire composée par un nombre égal de représentants
désignés par la direction de l’entreprise et de représentants des travailleurs élus par
ces derniers. De part sa composition paritaire et la multiplicité des domaines de son
intervention
1(cid:25), elle semble avoir une vocation comme structure de dialogue et de
concertation au sein de l’entreprise. Mais, en réalité, il n’est pas difficile de constater que
le système de représentation élue du personnel est toujours en crise, pour plusieurs
raisons. D’abord, ce système ne concerne qu’un nombre très faible d’entreprises,
étant donné que le tissu économique tunisien est composé majoritairement par des
entreprises de très petite taille, qui ne répondent pas à la condition d’effectif exigée
par la loi pour la mise en place des structures de représentation du personnel. Ensuite,
les attributions de la commission consultative d’entreprise, notamment en matière
économique, demeurent très vagues. Sur ce plan, on peut observer un grand recul
par rapport à la législation relative à l’ancien comité d’entreprise, selon laquelle celui-
ci (cid:109) est consulté sur les questions intéressant l’organisation de l’entreprise, de manière
à (cid:172)tre associé progressivement à sa gestion et à son développement (cid:125)
17. Du reste, les
14 Sur ce système dualiste de représentation des salariés dans l’entreprise en droit tunisien, v.
notre thèse,
La liberté syndicale en droit tunisien, Faculté de droit et des sciences politiques
de Tunisie, 1(cid:28)(cid:28)5, p. 2(cid:28)7.
15 Art. 157 et s. du C.T. Cette structure doit (cid:172)tre créée dans toute entreprise employant au
moins quarante salariés permanents. Dans les entreprises employant un nombre de salariés
permanents égal ou supérieur à vingt et inférieur à quarante, la loi prévoit l’élection d’un
délégué titulaire du personnel et un délégué suppléant.
1(cid:25) La Commission consultative d’entreprise intervient dans divers domaines liés à la gestion
du personnel, dont notamment l’organisation du travail, la gestion des (cid:272)uvres sociales, la
formation professionnelle, la santé au travail, et la discipline des salariés (art. 1(cid:25)0 du C.T). Du
reste, elle est chargée aussi d’intervenir comme structure de conciliation en cas de conflits
collectifs de travail au sein de l’entreprise (art. 37(cid:25) du C.T).
17 Ancien art. 1(cid:25)1 du C.T
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moyens dont dispose la commission consultative d’entreprise pour l’exercice de ses
fonctions sont très limités. D’ailleurs, la commission n’est pas dotée de la personnalité
juridique et ne dispose pas d’un budget propre pour son fonctionnement. De ce
point de vue, il n’est pas excessif d’affirmer qu’elle reste dans une dépendance totale
à l’égard de l’employeur. Tous ces facteurs ne peuvent que provoquer le désintér(cid:172)t
des salariés et la grande méfiance des syndicats à l’égard de cette commission qui
est devenue, de fait, une instance exclusivement disciplinaire, et dont l’échec dans sa
fonction comme structure de dialogue social ne fait aucun doute
1(cid:27).
En revanche, c’est l’organe syndical qui exerce effectivement cette fonction
et s’impose comme étant le principal organe intervenant en tant que porte-parole
des salariés et interlocuteur du chef d’entreprise. Mais sa présence sur les lieux
du travail reste sous le signe de la précarité à cause d’une attitude équivoque du
législateur. En effet, tout en proclamant le principe de la liberté syndicale, garanti
par la Constitution
1(cid:28) et en accordant aux syndicats des prérogatives très étendues,
leur permettant d’intervenir comme acteur principal du dialogue social sur le plan
national et collaborateurs de l’Etat à l’organisation de la profession, le Code du travail
garde un silence quasi-total s’agissant de la place du syndicat dans l’entreprise. Il
ne réglemente pas, ainsi, sa présence sur les lieux du travail et ne lui accorde pas
des prérogatives spécifiques à ce niveau comme structure de représentation du
personnel. Le législateur semble toujours ignorer le rôle du syndicat comme organe
d’expression de l’identité collective des salariés au sein de l’entreprise.
Cette abstention du législateur n’a pas emp(cid:172)ché l’organe syndical de s’affirmer
dans plusieurs entreprises o(cid:187) il est devenu un acteur incontournable pour tout
dialogue social sérieux et authentique. Ce rôle est confirmé par les conventions
collectives qui ont introduit depuis 1(cid:28)73 l’ébauche d’un statut du syndicat dans
l’entreprise, en tant que porte-parole des salariés et interlocuteur privilégié du chef
d’entreprise. Elles ont créé, ainsi, à la charge de celui-ci l’obligation de reconna(cid:176)tre
l’organisation syndicale représentée par ses délégués à l’entreprise et de recevoir ces
derniers une fois par mois et toutes les fois qu’il y a urgence
20.
Mais la voie conventionnelle, qui reste par définition une source fragile et
souvent déterminée par le rapport des forces entre les partenaires sociaux, est-elle
suffisante pour encadrer juridiquement l’exercice d’un droit aussi fondamental que
celui relatif à l’action syndicale dans l’entreprise ? Rien n’est moins s(cid:189)r, d’autant plus
que la Constitution tunisienne dispose dans son article (cid:25)5 que les textes régissant le
statut des syndicats doivent prendre la forme d’une loi organique. Une intervention
1(cid:27) Voir H. Kotrane, 50 ans après. Plaidoyer pour un nouveau Code du travail, Cahier de l’ITES,
n(cid:114) 3, mars 2017, p. 7(cid:28). Du m(cid:172)me auteur, (cid:109) Quel modèle de dialogue social en droit du travail
tunisien  ? (cid:125), in
Consensus social  : discours et pratiques, ouv. coll., ARFORGHE et Konrad-
Adenauer-Stiftung, Tunis, 200(cid:25), p. 133.
1(cid:28) Art. 35 et 3(cid:25) de la Constitution du 27 janvier 2014.
20 Sur l’apport des conventions collectives concernant la présence du syndicat dans l’entreprise
en droit tunisien, v. notre th. précitée, p. 21(cid:25).
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du législateur en vue d’introduire une réforme substantielle du droit syndical
dans l’entreprise nous semble alors nécessaire. Cette réforme peut contribuer à la
réconciliation entre le syndicat et l’entreprise et favoriser l’émergence d’une nouvelle
dynamique du dialogue social au sein de celle-ci, notamment à travers la promotion
de la négociation collective.
B - La négociation collective comme processus de dialogue
social : un cadre juridique lacunaire
La négociation collective est un instrument privilégié du dialogue social bipartite.
Elle occupe une place essentielle en tant que technique d’encadrement normatif
des rapports de travail. Gr(cid:164)ce à cette fonction, on assiste à l’émergence d’un droit
négocié, comme moyen de régulation sociale, à côté du droit étatique. C’est l’une des
manifestations les plus importantes de la démocratie sociale.
Dans sa conception moderne, l’institution de la négociation collective n’est plus
conçue seulement sous l’angle de ses résultats enregistrés sous forme d’accords
collectifs conclus entre les parties concernées. Elle est saisie aussi en tant que
processus qui nécessite d’(cid:172)tre encadré juridiquement dans ses différentes étapes.
Ainsi, le droit de la négociation collective est devenu essentiellement un droit
procédural qui conditionne largement les résultats des négociations consignés
dans des accords collectifs. Or, le droit tunisien est très en retard par rapport à cette
conception moderne de l’institution de la négociation collective. Cela tient à l’absence
21
d’un cadre juridique adéquat relatif à l’organisation du processus de la négociation
.
Ce vide juridique se manifeste, d’abord, au niveau de la représentativité des syndicats
habilités à négocier et conclure les conventions collectives. Dans un contexte marqué
par l’émergence d’un pluralisme syndical, qui trouve son assise juridique dans le
principe de la liberté syndicale garantie par la Constitution, ce vide juridique est
aujourd’hui une source de surenchère syndicale et de tension sociale.
le
En réalité,
législateur tunisien n’ignore pas totalement
la notion de
représentativité syndicale, notamment en matière de négociation collective. Il retient,
ainsi, la notion d’organisations syndicales les plus représentatives auxquelles il attribue
un monopole dans la négociation et la conclusion des conventions collectives. Mais,
la loi ne fixe pas les critères d’appréciation de cette représentativité, ni son régime
juridique. A cet égard, l’article 3(cid:28) du Code du travail se contente de signaler qu’en
cas de différend au sujet de la représentativité syndicale, un arr(cid:172)té du Ministre chargé
des affaires sociales déterminera les organisations syndicales habilitées à conclure
la convention collective. Une intervention du législateur pour fixer des critères
objectifs et précis de la représentativité syndicale dans ce domaine est aujourd’hui
d’une grande nécessité afin d’éviter tout risque de partialité ou d’abus de la part de
l’autorité publique
22
.
21 Cf. notamment, M. Tarchouna, La négociation collective en Tunisie, thèse, Université de
Paris 1, 1(cid:28)(cid:27)(cid:25).
22 Les critères de représentativité syndicale, tels que fixés par l’arr(cid:172)té du Ministre des affaires
sociale en date du 2(cid:25) septembre 201(cid:27), ne concernent que la détermination des organisations
syndicales habilitées à (cid:172)tre membre du Conseil national du dialogue social. Voir supra.
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Nouri Mzid
Le législateur est appelé aussi à clarifier sa conception en matière de
représentativité syndicale  : s’agit-il d’une conception fondée sur le principe
d’exclusivité qui attribue un monopole de négociation à l’organisation déclarée la
plus représentative, ou d’une conception proportionnelle qui permet d’attribuer la
qualité d’organisation représentative à deux ou plusieurs syndicats  ? De m(cid:172)me, le
législateur est appelé à préciser à quel niveau doit (cid:172)tre appréciée la représentativité
des syndicats : au niveau national, celui de la branche, celui de l’entreprise, ou encore
à tous ces niveaux de manière combinée ?
23
Un autre vide juridique concerne l’organisation institutionnelle des négociations
collectives
. Ce vide juridique est la conséquence de l’absence d’un droit de la
négociation collective, et plus particulièrement de l’absence d’une obligation de
négocier. De m(cid:172)me, le droit tunisien ne fixe pas la périodicité des négociations, ni
les modalités et les procédures concrètes relatives à leur déroulement et à la révision
des conventions collectives de travail. Toutes ces lacunes font que la négociation
collective risque d’(cid:172)tre soumise à l’affrontement des acteurs sociaux et à la loi du plus
fort, et de perdre ainsi une grande partie de sa signification et de sa dynamique.
Du reste, les négociations collectives en Tunisie sont très centralisées au niveau
national et celui de la branche. Il en résulte que la négociation d’entreprise n’occupe
qu’une place subsidiaire et reste cantonnée dans un rôle mineur. D’ailleurs, l’attitude
du législateur ne favorise pas le développement de la négociation d’entreprise. La loi
établit, en effet, une hiérarchie rigide qui donne à la négociation de branche une place
centrale par rapport à la négociation d’entreprise. Ainsi, conformément à l’article 44
du Code du travail, la convention d’entreprise ne peut (cid:172)tre conclue que dans le cadre
d’une convention de branche applicable à cette entreprise, sauf dérogation spéciale
du ministre des affaires sociales. En plus, la convention d’entreprise ne peut, en
aucune façon, contenir des dispositions moins favorables pour les salariés que celles
de la convention de branche applicable à l’entreprise. Le contenu de la convention
d’entreprise reste, alors, largement conditionné par celui de la convention de branche.
Le législateur a voulu, ainsi, éviter une fragmentation des conditions de travail et
d’emploi. Mais ce choix du législateur a abouti à une centralisation excessive de la
négociation collective et à sa méconnaissance de la situation réelle de l’entreprise.
Par ailleurs, la négociation collective en Tunisie reste largement centrée sur la
question salariale, au détriment d’autres questions qui rev(cid:172)tent aujourd’hui une
grande importance, telles que les questions relatives à la gestion prévisionnelle de
l’emploi, à la formation professionnelle, à la démocratisation des rapports de travail
au sein de l’entreprise, à la productivité et à l’intéressement des salariés aux résultats
de l’activité. Or, la négociation relative à ces questions ne peut s’accommoder qu’avec
le niveau de l’entreprise. D’o(cid:187) la nécessité d’une diversification de la structure et du
contenu de la négociation collective pour qu’elle soit mieux adaptée à la réalité
mouvante des rapports socioprofessionnels et puisse jouer pleinement sa fonction
comme instrument privilégié de dialogue social.
23 Cf. M. Tarchouna, thèse précitée. Du m(cid:172)me auteur, (cid:109) Négociation collective et système de
relations professionnelles, quel consensus ? (cid:125), in
Consensus social : discours et pratiques,
op. cit., p. 14(cid:28).
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Dialogue social et démocratie en Tunisie
Pour conclure, une intervention du législateur en vue d’introduire une réforme
substantielle du droit de la négociation collective semble nécessaire. Mais elle doit s’inscrire
dans une démarche globale de modernisation du système des relations professionnelles,
permettant d’introduire une nouvelle dynamique du dialogue social. Sans cette réforme,
l’avènement de la démocratie sociale restera du domaine de l’utopie.
NOURI MZID
Professeur agrégé et ancien Doyen de la Faculté de droit de l’Université de Sfax (Tunisie).
Thèmes de recherche : Droit du travail, droit de la sécurité sociale, libertés et droits
fondamentaux.
Publications :
~« Droit du travail et transition démocratique en Tunisie » (avec Aicha Hamza Safi), in Mélanges
en l’honneur d’Antoine Lyon-Caen, Dalloz, 2018, p. 693.
~ «  L’incitation à l’emploi  : quoi de neuf  ? », in
L’incitation à l’investissement, quoi de neuf  ?,
Revue Tunisienne de Fiscalité, n° 27, 2018, p. 305.
~ «  Le procès en droit social  », in
Le procès, Actes du colloque organisé en l’honneur de
Maître Najib Féki, Faculté de droit de Sfax, 2017, p. 21.
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