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INTRODUCTION GENERALE
On définit le droit commercial comme étant l’ensemble des règles édictées dans
l’intérêt du commerce et des commerçants. Si le législateur a prévu des règles
particulières, c’est parce que le monde du commerce ne peut pas se satisfaire
des règles de droit civil et notamment celles qui s’appliquent en cas d’insolvabilité
d’un débiteur. En effet, le droit civil se limite à offrir aux créanciers impayés
des voies d’exécution qui leur permettent d’exécuter individuellement sur les
biens de leur débiteur. Il s’agit donc de poursuites individuelles de telle sorte
que le paiement est le prix de la course. Autrement dit les premiers venus sont
les premiers servis.
Dans le domaine des relations commerciales, l’insolvabilité d’un débiteur
commerçant est une situation dangereuse qui ne peut pas être traitée aussi
simplement. En effet, le monde du commerce vit du crédit et chaque commerçant
effectue tous les jours de nombreuses transactions dans lesquelles il est parfois
débiteur et parfois créancier. La défaillance d’un débiteur commerçant implique,
donc, un risque ignoré du droit civil puisqu’elle risque de se propager aux autres
commerçants. Ainsi un commerçant impayé peut se retrouver en difficulté
économique dans la mesure où il ne peut plus faire face à ses engagements. C’est
pour cette raison que les commerçants ont besoin de règles particulières
différentes de celles posées par le droit civil et inspirées surtout d’une approche
collective qui assure un traitement égal entre les différents créanciers
chirographaires qui n’ont pas été payés. C’est cette approche collective que
traduit le terme « procédures collectives »
Ainsi lorsqu’on parle des procédures collectives, on vise les règles de droit
commercial applicables lorsque un commerçant débiteur n’est plus en mesure
d’honorer ses engagements à l’égard de ses créanciers eux mêmes commerçants.
Le code de commerce (C.C) a prévu deux procédures collectives réservées aux
entreprises en difficultés économiques.
La première est une procédure de sauvetage réservée aux commerçants
honnêtes mais malheureux. C’est le concordat préventif.
La deuxième est une procédure de naufrage réservée aux commerçants
malhonnêtes. C’est la procédure de faillite.
Le choix entre ces deux procédures se faisait d’après un critère moral à savoir
l’attitude honnête ou malhonnête du commerçant et non pas sur la base d’un
critère économique, ce qui a conduit à des choix anti-économiques, puisqu’une
entreprise qui n’est plus viable économiquement pouvait bénéficier du concordat
préventif parce que le commerçant était honnête, et inversement une entreprise
viable économiquement était liquidée simplement parce que le commerçant était
malhonnête. Néanmoins, ces règles pouvaient se justifier à l’époque. En effet, le
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commerce se limitait essentiellement au petit commerce de détail , ce qui a fait
du C.C un texte de conception classique qui s’adresse essentiellement aux
commerçants personnes physiques. D’ailleurs sur les 150 articles réservés aux
procédures collectives seuls 5 concernent la faillite des entreprises.
Conscient que les dispositions du C.C sont devenues vieillissantes, alors que le
paysage économique du pays a considérablement changé, le législateur tunisien
est intervenu en 1995 pour introduire une refonte du droit de procédures
collectives à travers la loi n°95-34 du 17 Avril 1995 relative au redressement
des entreprises en difficultés économiques telle que modifiée à deux reprises
par la loi n°99-63 du 15 juillet 1999 et par la loi n°03-79 du 29/12/2003. La loi
de 1995 a été suivie d’une autre loi n°95-35 qui a abrogé les articles du C.C
relatifs au concordat préventif.
L’intervention du législateur était devenue indispensable pour un certain nombre
de raisons :
D’abord, on a voulu se doter, comme les autres pays, d’une législation moderne
tournée vers le sauvetage des entreprises et non pas des seuls commerçants.
C’est dans ce sens que l’article 1
er de la loi prévoit que « le régime de
redressement tend essentiellement à aider les entreprises qui connaissent
des difficultés économiques à poursuivre leurs activités et à maintenir les
emplois et à payer leur dettes
»
De même l’article 3 nouveau prévoit : «
bénéficie de ce régime toute personne
physique ou morale assujettie au régime d’imposition réel exerçant une
activité commerciale, industrielle ou artisanale ainsi que les sociétés
agricoles ou de pêche »

Il en résulte que les procédures collectives sont désormais applicables et aux
commerçants personnes physiques, et aux commerçants personnes morales.
Ensuite, le législateur a voulu dépasser l’échec qu’a connu l’institution du
concordat préventif qui visait la sauvegarde des commerçants honnêtes. Le
concordat préventif est, en effet, un accord entre le commerçant débiteur et
ses créanciers qui prévoit soit une remise des dettes soit un rééchelonnement
des dettes. Cependant, et puisque les conditions de bénéfice du concordat
préventif étaient très sévères voire même impossibles à vérifier, très peu de
commerçants pouvaient en bénéficier, ce qui a conduit, en pratique, à une
application systématique de la faillite.
En outre, on a voulu tenir compte du nouveau contexte économique du pays
(l’adhésion de la Tunisie à l’OMC, la signature de l’accord du libre échange avec
l’Union Européenne …) qui soumet les entreprises tunisiennes à une concurrence
très forte et qui risque d’avoir comme conséquence la disparition de nombreuses
entreprises tunisiennes.
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Enfin, le législateur a voulu intervenir pour mettre fin à la confusion entreprise
et entrepreneur et dissocier le sort de l’homme dirigeant et celui de l’entreprise,
entité économique indépendante, et ce en faisant prévaloir les données
économiques sur les données morales et juridiques.
1ère partie : le sauvetage des entreprises en difficulté
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ème partie : le naufrage des entreprises en difficulté
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Première Partie : le redressement des entreprises en difficultés économiques
Partant de l’idée selon laquelle il vaut mieux prévenir que guérir, le législateur de
1995 a multiplié les procédures de sauvetage des entreprises en difficultés
économiques. En effet, et en application de l’article 2 de la loi «
le régime de
redressement comprend la notification des signes précurseurs de difficultés
économiques, le règlement amiable et le règlement judiciaire ».
Ces
procédures sont appelées à jouer en fonction de la gravité des difficultés que
connaît l’entreprises. Si les deux premières sont des mesures de prévention dans
la mesure où elles interviennent avant tout cessation de paiement, la 3éme, à
savoir, le règlement judiciaire (RJ) est une mesure curative puisqu’elle intervient
une fois que l’entreprise est en état de cessation de paiement.

Chapitre1 : la notification des signes précurseurs de difficultés économiques
Il s’agit d’une mesure de précaution qui a pour objectif d’alerter les chefs
d’entreprise afin d’attirer leur attention sur les difficultés économiques qui
s’annoncent et qui menacent leurs entreprises. Pour ce faire, la loi a prévu deux
types d’alerte : une alerte externe et une alerte interne.
Section 1 : la procédure d’alerte externe
Cette alerte est effectuée par une commission spécialisée créée auprès du
ministère de l’industrie, appelée la commission de suivi des entreprises
économiques (CSEE). Cette commission a, en vertu de l’article 4 de la loi,
plusieurs attributions :
- elle est d’abord chargée « par l’intermédiaire d’un observatoire national
de centraliser, d’analyser, et d’échanger les données sur l’ activité
des entreprises en difficultés économiques, dans le cadre d’un réseau
informatique, avec les parties intéressées »
. Pour recueillir ces
informations, la loi a prévu plusieurs sources d’informations de la CSEE. Il
s’agit, d’après l’article 5 de la loi, de l’inspection du travail, de la CNSS,
des services de la comptabilité publique, et des institutions financières qui
«
doivent informer la commission, de tous actes constatés par eux, et
menaçant la continuité de l’activité de l’entreprise, et notamment en
cas de non paiement de ses dettes, 6 mois après leurs échéances ».
Le même article ajoute dans son deuxième alinéa, introduit par la réforme
de 2003, une nouvelle source d’information à savoir les associés, puisqu’il
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prévoit que « la notification doit également être faite par l’associé ou
les associés détenant, au moins le dixième du capital une société en
difficultés économiques, s’il s’agit d’une société de capitaux ou d’une
SARL, dans les autres sociétés elle doit être faite par tout associé
nonobstant la part du capital social qu’il détient ».
Il s’agit ici d’une nouveauté introduite suite à la promulgation du nouveau
code des sociétés commerciales qui instaure un véritable droit à
l’information au profit des associés minoritaires.
- Ensuite, la commission est chargée « de fournir au président du tribunal
de première instance, dans le ressort duquel le débiteur a son siège
principal, chaque fois qu’il le lui demande tous les renseignements dont
elle dispose, et notamment de toute entreprise dont les pertes ont
atteint, le tiers du capital, ainsi que de toute entreprise dont
l’existence de situations ou actes de nature à menacer la continuation
de son activité ».
Il faut noter, à cet égard, qu’il appartient aux commissaires aux
comptes(CAC) d’informer la CSEE de toute perte du tiers du capital.
Cependant, pour les autres sociétés, il est difficile de déceler cette perte à
moins que leurs déclarations fiscales ne le fasse apparaître. On en déduit que
l’ouverture de la procédure de notification des signes précurseurs, reste tout
de même réservée aux grandes entreprises économiques, ce qui est de nature
à réduire sensiblement sa portée et donc son efficacité.
- Elle est chargée, en outre, de proposer des plans de redressement des
entreprises, et elle émet obligatoirement son avis, sur les plans de
redressement soumis au tribunal.
- elle est également chargée de recevoir les demandes présentées par les
dirigeants pour être admis au bénéfice du règlement amiable (RA). Cette
attribution permet à la CSEE d’établir le diagnostic préliminaire de
l’entreprise, et de le transmettre au président du tribunal de première
instance, pour qu’il puisse se prononcer sur l’ouverture du RA.
D’après l’article 8 nouveau « le président du tribunal procède dès la
réception de la notification des difficultés économiques, à la convocation
du dirigeant de l’entreprise ou son propriétaire, pour lui demander les
mesures qu’il compte prendre pour surmonter les difficultés que confronte
l’entreprise et lui fixe à cet effet un délai ».
Il ressort de cet article que
le président du TPI est appelé à apprécier individuellement les solutions
proposées par les dirigeants. Ceci ne devrait pas poser de problèmes lorsque
les actes menaçant l’activité de l’entreprise sont d’ordre juridique, comme par
exemple, le dépassement du pouvoir par les dirigeants sociaux, ou encore
lorsque ces derniers privilégient un créancier par rapport à d’autres… . Un
problème se pose lorsque les premiers signes de difficultés sont d’ordre
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économique. En effet, le président du TPI n’est pas habilité à apprécier seul
les solutions proposées. C’est pourquoi la loi aurait du prévoir qu’il soit assisté
par un ou plusieurs experts. De toutes les façons, le président ne va
réellement intervenir, que lorsque les solutions sont vraiment inefficaces, ou
lorsque le délai fixé est expiré sans qu’aucune solution ne soit envisagée.
C’est dans ce sens que l’article 8 dispose «
à la l’expiration de ce délai, le
président du tribunal, peut ordonner l’ouverture d’une procédure de
redressement judiciaire, si ces conditions sont réunies. En cas d’urgence,
il peut également décider
immédiate d’une période
d’observation, et désigner un juge commissaire, un administrateur
judiciaire, et un expert en diagnostic. »
Il faut, cependant, souligner que lorsque le dirigeant est vigilant et diligent, il
ne va pas attendre que les autres dénoncent les difficultés que connaît son
entreprise. Il peut, en effet, et avant que la situation ne s’aggrave saisir le
tribunal pour qu’il soit admis au bénéfice du RA.
l’ouverture
Section 2 : la procédure d’alerte interne
Cette alerte a été confiée à un organe interne à l’entreprise à savoir le
commissaire aux comptes. Elle est également, déclenchée depuis la loi de 2003,
par les associés
Paragraphe 1er : l’alerte déclenchée par le commissaire aux comptes
C’est l’article 6 de la loi qui met à la charge du CAC « de demander par écrit au
dirigeant des éclaircissements relatifs à tous actes menaçant l’activité de
l’entreprise, relevés à l’occasion de l’accomplissement de ses fonctions. Ce
dernier doit y répondre par écrit dans un délai de quinze jours. A défaut de
réponse, ou en cas de réponse insuffisante, le commissaire aux comptes,
soumet la question au conseil d’administration de l’entreprise ou au conseil de
surveillance, et en cas d’urgence, il convoque l’assemblée générale des
actionnaires et ce dans un délai ne dépassant pas un mois de la date de
réception de la réponse ou de l’expiration du délai de réponse ».
L’intervention du commissaire aux comptes semble être de portée limitée puisque
l’article 6 lie la procédure d’alerte à l’existence du commissaire aux comptes qui
est obligatoire, il est vrai, dans les sociétés anonymes et dans les SARL qui
l’article du code des sociétés
répondent aux conditions posées par
commerciales . Néanmoins, Il faut également rappeler que toute société
commerciale, doit, par application de l’article 13 du CSC «
désigner un
commissaire aux comptes, si durant trois exercices successifs, son chiffre
d’affaire ou son capital dépasse un montant fixé par arrêté du ministre
chargé des finances »
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A priori, l’article 6 s’adresse, donc, à toutes les catégories de sociétés. Or, on
peut émettre des réserves dans la mesure où l’article parle du CA du CS et de
l’AG qui n’existent que dans les sociétés par actions. Il en résulte que le devoir
d’alerte, n’est prévu que dans ce type de sociétés, ce qui exclu les autres types
de sociétés et rend la portée de l’alerte très limitée.
Dans ces autres sociétés, le législateur aurait pu confier l’alerte aux comptables,
qui y existent normalement.
A) Rôle du commissaire aux comptes
Il s’agit ici de déterminer les actes ou les faits qui donnent lieu à l’alerte.
D’après l’article 6, le commissaire aux comptes, doit révéler, tout acte menaçant
l’activité de l’entreprise. On remarque que le législateur emploie une forme
volontairement vague, qui peut englober tout acte sans aucune précision, et qui
laisse une grande marge de manœuvre au CAC, ce qui est en soi quelque peu grave
puisque le défaut d’alerte est sanctionné pénalement par l’article 55al 2 de la loi
qui punit de sanctions pécuniaires «
le CAC qui s’abstient de la notification
bien qu’il ait eu connaissance des difficultés de l’entreprise
». C’est pourquoi
quelques précisions doivent être apportées pour déterminer ces actes :
- Il peut s’agir des faits et actes fondés sur la situation financière de
l’entreprise, et qui risquent de provoquer une cessation de paiement tels
que par exemple une situation nette négative, un fond de roulement
dégradé, une trésorerie négative, une décision de la société de supprimer
une ou plusieurs filiales…
- Il peut s’agir des faits fondés sur l’exploitation elle-même, tel que
l’importance des frais financiers, l’insuffisance de l’excédent brut
d’exploitation….
- Il peut s’agir des faits résultant de la conjoncture économique et de
l’environnement de l’entreprise comme par exemple la diminution des
commandes, les difficultés d’approvisionnement en matière première…..
De toutes les manières, et quelque soit leur nature, les actes doivent menacer la
continuité de l’activité de l’entreprise, et ne doivent pas avoir donné lieu à une
réaction appropriée du dirigeant, puisque l’alerte a pour objectif d’attirer son
attention sur la gravité des actes qui risquent d’affecter dans un avenir
prévisible la continuité de l’exploitation de l’entreprise. Ainsi, le commissaire au
compte dispose, désormais et en vertu de la loi de 1995 de deux missions : une
mission traditionnelle qui consiste dans le contrôle des comptes et une mission
qui consiste dans le déclenchement d’alerte.
Cependant la portée de cette mission doit être précisée à deux niveaux :

- D’abord elle ne doit pas être systématique : c’est-a- dire que le
commissaire au compte ne doit dénoncer que les faits dont il a eu
connaissance à l’occasion de l’accomplissement de ses fonctions. Dès lors,
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on ne peut lui reprocher de ne pas avoir déclenché l’alerte, si les actes
menacent l’activité de l’entreprise, ne pouvaient lui être révélés qu’à
travers des investigations qui dépassent l’exercice habituel de sa mission.
Par contre, sa responsabilité serait engagée s’il ne tirait pas la sonnette
d’alarme, lorsque les faits menaçant l’activité de l’entreprise sont
évidents. Sa responsabilité est donc engagée lorsqu’il s’agit d’une simple
négligence ou lorsqu’ il n’a pas su détecter les indices de difficultés alors
qu’il aurait dû en prendre connaissance.
Il engage aussi sa responsabilité s’il déclenche une alerte tardive ou
prématurée. En effet, si l’alerte est tardive, elle risque de ne pas pouvoir
redresser une situation qui est déjà compromise. Si elle est prématurée, elle
risque d’aggraver les difficultés qui s’annoncent et inquiéter les partenaires
de l’entreprise.
- Elle ne doit pas constituer une immixtion dans la gestion : il est, en
effet, traditionnellement admis que la mission du CAC est une stricte
mission de contrôle et non d’intervention dans la gestion de l’entreprise.
Par conséquent, le CAC doit se garder, une fois l’alerte déclenchée, de
proposer les moindres solutions au dirigent ni de remettre en cause sa
gestion de l’entreprise. L’alerte doit donc être purement objective, elle
doit simplement dénoncer les faits sans expliquer leurs causes ou
chercher à leur trouver des solutions.

B) Le déroulement de la procédure de notification
C’est l’article 6 de la loi qui décrit la procédure de notification qui comporte trois
phases :
-
D’abord, une phase confidentielle dans laquelle le CAC va demander par
écrit des éclaircissements relatifs aux actes dont il a eu connaissance et
qui sont susceptibles de menacer l’activité de l’entreprise. Lorsque dans un
délai de 15 jours, le CAC reçoit une réponse suffisante, les choses vont
rester à ce stade et la procédure de notification prend fin à ce niveau. A
l’inverse, et en l’absence de réponse de la part du dirigent ou en cas de
réponse insuffisante, la procédure rentre dans sa deuxième phase puisque
le commissaire aux comptes soumet la question au CA ou au CS. L’alerte
est, ainsi, quelque peu élargie, mais elle reste toujours en rapport avec les
organes de gestion de l’entreprise ou du contrôle de gestion.
- Ensuite, Cette deuxième phase, de confidentielle, peut devenir publique et
intéresser tous les actionnaires puisque et en vertu de l’article 6 le CAC
peut, en cas d’urgence, et dans le même délai convoquer l’AG des
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actionnaires. Cette phase n’est pas cependant systématique car elle est
conditionnée et doit être motivée par l’urgence.
- Enfin, lorsque le commissaire constate la persistance des mêmes menaces,
il doit adresser dans un délai d’un mois un rapport à la CSEE. C’est là la
troisième phase de la procédure de notification réglementée non dans
l’article 6 mais dans l’article 7. On en déduit que cette alerte ne va pas
rester strictement interne du moment que la CSEE va être saisi mais en
dernier ressort.

Paragraphe 2 : L’alerte déclenchée par les associés
Il s’agit d’une alerte déclenchée par l’intermédiaire des questions écrites que les
associés pourront poser aux dirigeants. En effet et par application de l’article
138 du CSC
« tout associé non gérant pourra deux fois par exercice poser
une question écrite au dirigeant sur tout acte ou fait de nature à exposer la
société à un péril ».
Le critère est ici différent de celui sur la base duquel
l’alerte du CAC est déclenchée puisque le critère choisi par l’article 138 à savoir
que les actes doivent exposer la société à un péril est beaucoup plus large et
englobe tous les actes qui peuvent menacer la continuité de l’activité de
l’entreprise. Le texte ajoute dans son alinéa 2 que «
le gérant est tenu de
répondre par écrit dans le mois de la réception de la question. Sa réponse
doit être obligatoirement communiquée au CAC s’il en existe un. »
On
remarque qu’il s’agit ici d’une procédure quelque peu illusoire Elle ne permet, en
fait, que de démontrer que les associés peuvent être conscients des difficultés
de l’entreprise à un moment où les dirigeants peuvent les ignorer.
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Chapitre 2 : Le règlement amiable
Ce sont les articles 9 à 17 de la loi qui régissent le règlement amiable (RA) des
difficultés économiques des entreprises. Le règlement amiable est la procédure
collective qui s’est substituée au concordat préventif du code de commerce et
qui constitue, de ce fait, la principale innovation de la loi de 1995.
Le règlement amiable peut être défini comme étant une procédure judiciaire à
objet contractuel par laquelle le débiteur en situation difficile, s’accorde avec
ses créanciers pour mettre en œuvre des mesures propres à éviter la cessation
des paiements de son entreprise. Il s’agit, donc, d’un accord qui ne produit ses
effets entre les parties et envers les tiers que lorsqu’il est homologué par le
tribunal. Le RA présente ainsi deux caractères :
-U
n caractère judiciaire qui se vérifie en amont de la procédure, c’est-à-dire
lors de l’introduction de la demande, et en aval c’est-à-dire au moment de
l’homologation de l’accord par le tribunal.
-Un caractère contractuel puisqu’il s’agit d’un contrat entre le débiteur et ses
créanciers.
Pour étudier le RA, il faudra suivre une démarche chronologique qui rend compte
successivement de l’ouverture de la procédure, de son déroulement et enfin de
son dénouement c’est- à -dire de ses effets.
Section 1ère : L’ouverture de la procédure de règlement amiable
Même si le législateur a conçu le règlement amiable comme une institution
purement volontaire, c’est-à-dire qui est soumise à la seule initiative de tout
dirigent, il a imposé des conditions de fond et de forme nécessaires à l’ouverture
de la procédure.
Paragraphe 1er : Les conditions de fond de l’ouverture de la procédure
Ces conditions sont relatives aux personnes pouvant bénéficier de la procédure
de RA et à la situation économique de l’entreprise débitrice.
A)-Les personnes bénéficiaires du règlement amiable
Pour déterminer ces personnes, il faut combiner l’article 9 et l’article 3 nouveau
de la loi. En effet, l’article 3 nouveau prévoit que «
bénéficie de ce régime (le
régime de redressement) toute personne physique ou morale assujettie au
régime d’imposition réel exerçant une activité commerciale, industrielle ou
artisanale ainsi que les sociétés commerciales, agricoles ou de pêche ».
Il ressort de cet article que le RA peut être demandé, lorsqu’il s’agit d’une
personne physique, par tout commerçant, industriel ou artisan et par toute
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société commerciale exerçant les mêmes activités ainsi que par les sociétés
commerciales par la forme ayant pour objet l’agriculture et la pêche. On
remarque, ainsi, que pour déterminer le champ d’application du régime de
redressement et donc du RA, le législateur a choisi le critère de la nature de
l’activité, qui doit être commerciale, industrielle artisanale, agricole ou de pêche
lorsqu’elle est exercée dans le cadre d’une société commerciale par la forme.

Il nous faut remarquer à cet égard que la distinction entre l’activité commerciale
et l’activité industrielle est sur le plan juridique du pur langage, puisque d’après
l’article 2 du CC, l’industrie fait partie des activités commerciales par nature.
Il ressort de l’article3 que le régime de redressement est destiné aux personnes
physiques ou morales assujetties au régime réel d’imposition. Il vise, donc, les
personnes qui tiennent une comptabilité conformément à l’article 7 du C.C.
Autrement dit les personnes physiques ou morales à l’exception des SARL, SA et
des commandités par actions et qui sont soumises à l’impôt sur les sociétés et qui
réalisent un chiffre d’affaire (TTC) inférieur à 50000 dinars par année sont
soumises au régime forfaitaire et sont donc exclues de procédures de
redressement.
Seule la procédure de la faillite demeure applicable aux commerçants, industriels
ainsi qu’aux sociétés agricoles ou de pêche. Autrement dit plus de 85% des
acteurs économiques sont exclus de toute procédure collective. C’est là l’une des
contradictions de la loi de 1995 qui a vidé toutes les procédures collectives de
leur substance. Il aurait fallut, en effet, se contenter d’une seule condition à
savoir la cessation des paiements.
L’article 9 quant à lui prévoit que «
tout dirigeant d’une entreprise peut avant
la cessation des paiements demander par écrit à la commission de suivi des
entreprises qu’il soit admis au bénéfice de règlement amiable conformément
à l’article 4 bis de cette loi. »
Il s’agit, d’après cet article, d’une procédure qui
est soumise à l’initiative de tout dirigeant. Seul le dirigeant peut saisir la CSEE
pour bénéficier de la procédure de règlement amiable. Il s’agit d’une décision
purement volontaire puisque le dirigeant est libre de solliciter la procédure ou
de l’ignorer.
B- la situation économique du débiteur
Pour que la procédure de règlement amiable puisse être ouverte, il faut que
l’entreprise soit en difficultés économiques. Il s’agit là de la condition positive
imposée par le législateur et qui est très importante puisque le RA se traduit en
général par une réduction des dettes ou des délais de paiement plus longs. Il ne
faudrait donc pas que le dirigeant d’une entreprise en bonne santé demande le
bénéfice d’un règlement amiable dans le seul but d’augmenter ses bénéfices par
la réduction de ses dettes.
Pourtant, et malgré son importance, le législateur ne donne aucune définition de
la notion de difficulté économique.
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Pour demander le RA, il ne faut pas, non plus, que les difficultés économiques
soient graves. En effet, et selon l’article 9 la demande de RA doit intervenir
avant toute cessation de paiements. Ainsi la cessation de paiements est le
principal critère qui permet de connaître la procédure collective qui doit être
choisie. En effet, le RA ne peut être mis en œuvre que tant que l’entreprise n’a
pas cessé ses paiements. Le règlement judiciaire et la faillite sont engagés après
la cessation des paiements.
Mieux encore, même dans le cas de cessation de paiements avec une situation
économique désespérée, il n’y aura plus de redressement possible, et donc plus
de règlement judiciaire et le tribunal prononcera directement la faillite
La définition de l’état de cessation de paiement : Malgré son importance et
jusqu'à la réforme de 2003, le législateur a évoqué la cessation des paiements
sans en donner une définition légale et ce contrairement au droit français qui
prévoit clairement que «
l’entreprise est en état de cessation de paiement si
elle est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible par son actif
disponible. »
En 2003, le législateur tunisien est intervenu dans l’article 18 de la loi pour
définir la cessation de paiement comme suit «
est considérée en état de
cessation de paiements au sens de la présente loi, notamment, toute
entreprise qui se trouve dans l’impossibilité de faire face à son passif
exigible, avec ses liquidités et actif réalisable à court terme. »

L’existence d’une définition légale de la cessation de paiement est importante,
dans la mesure où elle permet aux débiteurs de mieux apprécier la situation
économique de leurs entreprises et donc de choisir la procédure à suivre. Or le
législateur tunisien en employant l’expression « notamment » ne fait que décrire
une situation parmi d’autres dans laquelle une entreprise peut être considérée en
état de cessation de paiement.
Face à cette indétermination de la notion, il faut distinguer la cessation des
paiements des autres notions voisines :
- elle se distingue de la notion civiliste de l’insolvabilité. L’insolvabilité est
une notion comptable qui suppose que l’ensemble de l’actif du débiteur est
insuffisant pour régler l’ensemble du passif. Autrement dit, c’est la
situation dans laquelle le passif est supérieur à l’actif. Comme la cessation
de paiements, l’insolvabilité suppose un arrêt matériel de paiement, et
c’est en cela où se rencontrent les deux notions mais elles restent
indépendantes dans la mesure où d’une part la solvabilité n’exclut pas la
cessation de paiements puisqu’un débiteur parfaitement solvable peut être
déclaré en état de cessation de paiement si ses actifs ne sont pas
suffisamment liquides pour lui permettre de faire face à ses échéances.
D’autre part, l’insolvabilité n’implique pas nécessairement la cessation de
paiements si les dettes du débiteur ne sont pas immédiatement exigibles
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ou s’il dispose pour y faire face d’une réserve de crédit. De plus ces deux
notions se distinguent puisque la cessation de paiement consiste dans le
faite de ne pas payer une dette exigible alors que l’insolvabilité suppose
que l’ensemble de l’actif est insuffisant de régler l’ensemble du passif.
- Par ailleurs, la cessation de paiement se distingue de la gène
momentanée
. La gène momentanée est une situation qui est due à une
conjoncture économique et sociale difficile. La cessation de paiement est
une situation plus grave qui suppose des difficultés étendues dans le
temps.
La différence entre ces deux notions est une différence de degré. L’arrêt
des paiements causé par une gène est dû à des causes qu’on peut
facilement dépasser alors que la cessation de paiements traduit une
situation économique plus grave dans la mesure où elle se présente
lorsqu’un débiteur n’est plus en mesure d’honorer ses engagements à leurs
échéances. Il s’agit de l’impossibilité pour le débiteur de faire face à son
passif exigible, c’est-à-dire aux dettes certaines liquides et exigibles
quelque soit leur nature commerciale ou civile et quelque soit leur nombre
(le non paiement d’une seule dette quelque soit son montant peut être
constitutif de l’état de cessation de paiement), avec les liquidités et l’actif
réalisable à court terme, c’est-à-dire en d’autres termes l’actif disponible
Les liquidités veulent dire les sommes immédiatement disponibles, c’est-à-
dire les fonds existants en caisse ou en banque.
L’actif réalisable à court terme comporte les valeurs réalisables à très
court terme et les sommes dont le débiteur peut disposer immédiatement
grâce aux ouvertures de crédit qui peuvent lui être consenties.
Cette conception matérielle de la cessation de paiement, qui ne prend pas en
considération la situation générale et globale de l’entreprise, ne rend pas compte
de la différence qui existe entre la CP comme condition positive de l’ouverture
de RJ et la CP dans la procédure de faillite. En effet, dans le cadre du RJ, la
cessation des paiements ne doit pas correspondre à une situation économique
irrémédiablement compromise, c’est-à-dire sans aucune issue. La CP doit
correspondre à une situation de maladie non pas passagère mais chronique sans
que cette maladie ne soit révélatrice d’une mort économique traduisant une
situation désespérée comme c’est le cas dans le cadre de la faillite.
Paragraphe 2- les conditions de forme de l’ouverture de RA
La demande au bénéfice de règlement amiable doit être faite par écrit par le
dirigeant de l’entreprise. Elle est selon l’art 9 transmise à la CSEE et doit selon
l’art 4 bis de la loi être accompagnée de documents qui sont nécessaires pour
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éclairer le juge et notamment pour vérifier l’absence de CP. Les documents sont
les suivants :
-
la dénomination de l’entreprise demanderesse du redressement ou sa
raison sociale et son siège, les noms et prénoms et adresses personnelles
de son représentant légal, son numéro d’identifiant fiscal, le numéro
d’immatriculation du registre de commerce avec un extrait de ce registre
avec le numéro d’affiliation à la CNSS,
- Les causes de la demande de redressement, la nature des difficultés et
leur importance,
- Le nombre d’emplois et une liste nominative des salariés,
- L’activité de l’entreprise,
- Le plan de redressement proposé,
- Le compte d’exploitation prévisionnel des deux prochaines années,
- Un état des salaires et autres créances non payées ainsi que les avantages
revenant à chaque salarié,
- Un état du patrimoine du débiteur et ses participations,
- Un état de l’actif et dettes de l’entreprise et les titres les justifiant avec
indication des identités des créanciers et débiteurs, et leurs domiciles et
sièges respectifs,
- Les garanties réelles et personnelles données par le débiteur,
- Le rapport de CAC s’il s’agit d’une société commerciale soumise à
l’obligation de désigner un CAC.
L’ensemble de ces exigences est posé sous peine d’irrecevabilité de la demande.
Il s’agit d’une nouveauté introduite par l’article 4 bis nouveau «
la demande est
obligatoirement rejetée si les documents et données exigées au présent
article ne sont pas présentées. Le rejet n’empêche pas la présentation d’une
nouvelle demande.»

Une fois la CSEE saisie de la demande, elle doit établir selon l’article 9 nouveau
le diagnostic préliminaire de l’entreprise et le transmettre dans un délai d’un
mois au président du tribunal de première instance dans le ressort duquel le
débiteur a son siège principal pour se prononcer sur l’ouverture de RA.
Paragraphe 3- le rôle du président de tribunal de première instance
L’article 10 de la loi donne au président du tribunal un large pouvoir
d’appréciation avec en plus une possibilité d’investigation pour qu’il soit le mieux
informé possible sur la situation de l’entreprise. Sa décision doit être bien
préparée avant d’être prise.
A- la préparation de la décision
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Le président peut, pour ce faire, décider d’une enquête ou ordonner une
expertise
a) l’enquête
Aux termes de l’article 10 nouveau alinéa 2« le président peut aussi demander
des informations sur la situation de l’entreprise auprès de toute
administration ou établissement administratif ou financier et en particulier
auprès de la CSEE »
. Les personnes citées ne peuvent pas opposer au juge le
secret professionnel pour refuser de lui donner les renseignements qu’il cherche.
Cependant, la loi ne prévoit aucune mesure particulière pour les obliger à donner
les informations recherchées.
b) l’expertise
L’article 10 permet également au juge de « charger un expert comptable ou un
bureau d’étude pour s’enquérir sur la véritable situation de l’entreprise ».
Il transmet obligatoirement une copie de l’étude de diagnostic à la CSEE pour
requérir son avis. Il s’agit donc d’une expertise de diagnostic qui a pour but de
vérifier le volet économique, social et financier de l’entreprise. Autrement dit
l’expert en diagnostic va faire un audit global de la situation de l’entreprise dans
le but de déterminer si un plan de redressement est envisageable ou non et s’il a
des chances de réussite.
B- Le contenu de la décision du Président du tribunal
Lorsqu’il est suffisamment informé, le président peut prendre l’une des deux
décisions suivantes :
- rejeter purement et simplement la demande de RA. Le rejet peut se
justifier, soit pour des considérations optimistes, lorsque la situation ne
nécessite pas un règlement amiable, soit pour des considérations
pessimistes. Avant la modification de 1999, l’article 19 permettait dans
cette hypothèse au tribunal de se saisir d’office pour ordonner l’ouverture
du règlement judiciaire.
- accepter la demande et ordonner l’ouverture de la procédure de
règlement amiable
, il s’agit ici de la phase judiciaire du règlement amiable.
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Section 2- Le déroulement de la procédure du règlement amiable
Tout au long de son déroulement, le débiteur et ses créanciers vont entamer des
négociations afin de conclure un accord.
Paragraphe 1- la recherche d’un accord
- Plus de références et documents sur Legaly DocsCette phase est réglementée par l’article 10 nouveau alinéa 1 « dès la réception
de la transmission, le président du tribunal décide l’ouverture de la
procédure de règlement amiable et désigne un conciliateur chargé d’amener à
l’entente le débiteur et ses créanciers, dans un délai qui ne dépasse pas les
trois mois prorogeable d’un seul mois. Il peut assumer lui-même cette
mission. »
Cette première phase est marquée par la désignation d’un conciliateur qui est
chargé expressément d’amener à l’entente le débiteur et ses créanciers.
Autrement dit de rapprocher les points de vue des deux parties. Son rôle ne
consiste pas, en effet, à administrer ou à gérer l’entreprise en difficultés ni
même à négocier directement les termes de l’accord de RA. Sa mission consiste
uniquement à animer une négociation à laquelle il n’est nullement parti. Le
conciliateur, qui ne dispose pas, d’ailleurs, d’aucune prérogative d’investigation
propre, a pour seule source d’information l’ensemble des renseignements que le
président de tribunal a pu recueillir. Il s’agit, en quelque sorte, d’un catalyseur.
La désignation d’un conciliateur a pour objectif de faciliter la conclusion de
l’accord amiable. Dés lors, on se demande pourquoi le législateur a confiné sa
mission dans un délai aussi bref, à savoir trois mois plus un mois de prorogation.
Il s’agit, en réalité, d’une solution sage car le législateur veut laisser la
possibilité aux entreprises en difficultés de recourir aux autres procédures de
redressement. En effet, le temps joue contre l’entreprise puisque en ouvrant le
RA l’entreprise est déjà malade, si on passe trop de temps à chercher un accord,
la situation pourra s’aggraver et la viabilité de l’entreprise risque d’être
irrévocablement compromise.
Au cours de la négociation, le juge sur l’initiative du conciliateur, peut prendre
des mesures provisoires citées dans l’article 12 tel que modifié en 2003. En
effet,«
le président du tribunal ne peut ordonner la suspension des
procédures de poursuites et d’exécutions visant le recouvrement d’une
créance antérieure à la date d’ouverture de règlement amiable que s’il est
établi que son paiement aboutirait à la détérioration de la situation de
l’entreprise et une entrave à la possibilité de son redressement, il ne peut
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ordonner la suspension des procédures de poursuites et d’exécutions visant la
récupération des biens meubles ou immeubles que s’il s’avère qu’ils sont
indispensables à l’activité de l’entreprise débitrice. Il peut, aussi, ordonner
l’arrêt du cours des intérêts, les pénalités de retard, et suspendre les
délais de déchéance, et ce, jusqu’au prononcé du jugement sur la demande
de règlement.»

Par ailleurs, l’article 12 nouveau a envisagé les créances revenant aux salariés, ce
qui constitue une nouveauté de la loi. Cet article prévoit que «
le président du
tribunal saisi de la demande en règlement ne peut ordonner la suspension des
procédures de poursuites relatives aux créances revenant aux salariés. Il ne
peut également ordonner la suspension des procédures d’exécutions d’un
jugement relatif aux créances d’un salarié que si l’exécution est à même
d’empêcher le redressement de l’entreprise.»

Il ressort de cet article qu’a l’égard des salariés, la suspension de poursuite est
purement interdite. Quant aux procédures d’exécutions, la suspension n’est
permise que si l’exécution empêche le redressement de l’entreprise. Il faut enfin
signaler que l’article 12 s’intéresse à la situation de la caution et prévoit que pour
ordonner la suspension des procédures de poursuites et d’exécutions visant le
recouvrement d’une créance garantie, le président du tribunal doit convoquer la
caution ou le gérant ainsi que tout débiteur solidaire et le créancier.
Il faut préciser que cette suspension ne produit d’effet à l’égard de la caution ou
du garant que si le créancier la consentie (article 12 alinéa 3)
En contre partie de la suspension des poursuites, il faut suspendre les délais de
prescription et de forclusion
Paragraphe 2- la conclusion de l’accord amiable
Le caractère conventionnel du RA implique deux conséquences importantes
relatives aux parties à l’accord et à son contenu, de plus le caractère judiciaire
implique qu’on s’intéresse à son homologation par le juge
A- les parties à l’accord
Le RA met en présence le débiteur et son créancier. La loi ne donne aucune
précision quant à la qualité des créanciers ni sur leurs importance. Néanmoins,
tous ne sont pas obligés de participer au RA et le débiteur n’est pas tenu de les
convoquer tous. En pratique, ce sont les créanciers dont les créances sont les
plus élevées qui participent à la négociation parce qu’ils sont généralement le plus
diligents et donc les plus motivés. Exemple, du côté privé, les banques et
principaux entrepreneurs. Du côté public, le trésor et la CNSS.
Par ailleurs, aucun créancier ne peut être contraint à participer à la procédure
de RA puisque le conciliateur ne dispose à leur égard d’aucun pouvoir coercitif, ce
qui constitue d’après certains, une lacune de la loi. Cependant, il ne faut pas
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oublier qu’il s’agit d’une procédure amiable et qu’il ne sert à rien d’obliger un
créancier à participer au RA pour le voir par la suite le saboter.
Les créanciers partis au RA sont donc ceux qui ont signé l’accord avec le
débiteur. Il faut, d’ailleurs, noter que les créanciers signataires ne sont pas
obligés d’inclure toutes leurs créances ou l’intégralité de leurs créances dans
l’accord.
B- le contenu de l’accord
Il est librement fixé par les parties. En effet, et par application de l’article 13
alinéa premier de la loi «
les parties ne sont astreintes à aucune restriction
dans la détermination des clauses de l’accord de règlement »
. Ainsi l’article
exprime clairement le principe de la liberté des négociations. En effet, en
employant une formule large, le législateur essaie de donner le maximum de
chance au succès du RA, ce qui constitue en soi une chance au redressement
puisque à travers cette liberté contractuelle laissée aux parties, les créanciers
peuvent accorder à leur débiteur le maximum de sacrifices parmi lesquels
l’article 13 cite l’échelonnement des dettes et leur remise, l’arrêt du cours des
intérêt.
Les moyens de redressement prévus par ce texte ne sont pas nécessairement les
mêmes pour tout les créanciers. Le RA n’est pas nécessairement égalitaire entre
tous les créanciers.
L’article 13 se limite aux sacrifices consentis par les créanciers et oublie de
parler de la situation de débiteur mais il s’agit ici d’une simple apparence, puisque
la demande de RA est obligatoire accompagnée d’un plan de redressement par
conséquent, les créanciers ne vont consentir à accorder des sacrifices que si le
débiteur propose un plan de redressement solide, avec par exemple, comme
mesure, l’augmentation de capital, la cessation d’une activité peu rentable, la
fermeture de certains de ses établissements etc..
Par application de l’article 13 alinéa 3
« l’accord est déposé au greffe du
tribunal, inscrit au registre du commerce publié au JORT et une copie est
transmise à la CSEE ». Cet article envisage le cas le plus optimiste à savoir
l’homologation de l’accord par le juge.
C- l’homologation de l’accord
C’est l’article 13 alinéa 2 qui traite de l’homologation de l’accord par le tribunal.
Cette homologation constitue le caractère judiciaire de l’accord.
L’article 13 distingue entre deux sortes d’homologation, la première est de plein
droit, la deuxième est facultative.
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- l’homologation de plein droit (obligatoire) : « le président du tribunal
homologue l’accord conclu entre le débiteur et l’ensemble de ses
créanciers
». Il s’agit là d’une homologation obligatoire qui ne peut intervenir que
si tous les créanciers ont accepté les termes de l’accord.
- l’homologation facultative : « il peut homologuer l’accord signé par les
créanciers dont le montant des créances représente les 2/3 du montant
global des dettes et ordonner le rééchelonnement des autres dettes quelque
soit leur nature sur une période ne dépassant pas la durée de l’accord.. »
.
Cela veut dire en ce qui concerne l’homologation facultative, la majorité en
nombre n’est pas prise en considération
L’homologation a une dimension psychologique importante. De plus, elle offre aux
parties un titre exécutoire.
Section 3 : les effets du règlement amiable
A l’égard du débiteur, le RA n’opère aucun dessaisissement (reste toujours le
chef d’entreprise) mais il est tenu de respecter les termes de l’accord qui
produit des effets contractuels à l ‘égard des créanciers partis et étrangers de
l’accord et des effets légaux
Paragraphe 1- Les effets légaux du règlement amiable
A- les effets à l’égard des créanciers partis de l’accord
Pour l’application de l’article 12 alinéa dernier « l’accord de règlement engendre
l’arrêt des procédures de poursuite et d’exécution visant le recouvrement
d’une créance antérieure ou la récupération de biens meubles ou immeubles
en raison du non paiement d’une créance et ce jusqu'à la fin de la période
de l’accord »

Malgré la généralité des termes de l’article, il ne s’applique qu’aux créanciers
partis à l’accord.
La suspension ne va intéresser, donc, que les créances qui rentrent dans l’accord
sachant que le créancier peut limiter son sacrifice à certaines de ses créances
ou même à une partie seulement de sa créance.
L’article 12 ne vise que la suspension des procédures tendant au recouvrement
d’une créance antérieure ou de la récupération d’un bien meuble ou immeuble en
raison du non paiement d’une créance, il en découle que les autres actions
peuvent être exercées telles que les actions en nullité, les actions en résolution,
les actions qui tendent à faire constater l’existence d’une créance contestée.
La loi n’a pas prévu de corollaire à la suspension des délais de prescription et de
forclusion. Dans ce cas le droit commun est applicable. La suspension de
procédure va durer jusqu'à la fin de la période de l’accord.
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B- les effets à l’égard des créanciers étrangers à l’accord
C’est le principe de l’effet relatif du contrat qui s’applique. Le RA ne nuit pas aux
créanciers étrangers à l’accord et il ne leur profite pas. Cependant, le président
du tribunal peut homologuer l’accord signé par les créanciers dont le montant des
créances représente 2/3 dans le montant global et ordonner le rééchelonnement
des autres dettes.
Il faut, cependant, remarquer que le rééchelonnement n’est pas un effet
automatique, il s’agit d’une simple faculté accordée au juge.
Cette faculté, bien que quelque peu préjudiciable aux créanciers, est bénéfique à
l’entreprise puisque l’objectif majeur de la loi est le maintien de l’activité de
l‘entreprise.
Ainsi le RA, est contrairement au droit français, est opposable à tous les
créanciers.
Paragraphe 2- les effets contractuels du règlement amiable
S’agissant d’un contrat, le RA produit ses effets à l’égard des parties. Et comme
dans tout contrat, les parties doivent respecter leurs engagements pris dans le
cadre de l’accord de RA. Ainsi, et pour conserver les faveurs qui lui sont
accordées, le débiteur doit honorer ses engagements faute de quoi le RA sera
résolu. En effet, d’après l’article 15 nouveau alinéa 1 : «
en cas de défaillance du
débiteur aux engagements qu’il a pris à l’égard de l’un de ses créanciers en
vertu de l’accord de règlement amiable pendant 6 mois à compter de la date
où ses engagements sont devenus exigibles, tout intéressé peut demander au
tribunal la résolution de cet accord, la déchéance des termes accordés au
débiteur ainsi que le retour des parties à l‘état où elles étaient avant la
conclusion de l’accord pour les dettes non encore payées »

La sanction est, donc, d’après l’article 15, la résolution. Néanmoins, cette
résolution est quelque peu originale par rapport à celle de droit commun. En
effet, la résolution va agir à la fois avec et sans effet rétroactif alors que la
résolution de droit commun agit avec un effet rétroactif ce qui la distingue de la
résiliation.
En effet, la résolution de l’accord amiable va anéantir les délais de paiement
accordés par les créanciers. Elle va entraîner la déchéance des délais de
paiement accordés au débiteur en cas d’homologation facultative et elle va
anéantir la remise des dettes.
Ce pendant, et par application de l’art 15, les parties vont retourner «
à l’état où
elles étaient avant la conclusion de l’accord pour les dettes non encore
payées
» ceci constitue l’originalité par rapport au droit commun en raison de
l’absence de l’effet rétroactif pour ce cas précis.
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L’absence d’effet rétroactif se justifie pleinement, puisque l’objectif est de
protéger les créanciers et réaliser un minimum de sécurité juridique. Ainsi si les
créanciers ont obtenu un paiement partiel avant la résolution du contrat ils ne
seront pas tenus de rembourser ou de remettre des parties reçues. Sur le plan
terminologique, il aurait été plus correct de parler de résiliation.
Par ailleurs, et c’est encore une originalité par rapport au droit commun, la
résolution ne peut être demandée qu’après l’expiration d’un délai de 6 mois à
partir de la date où l’engagement inexécuté est devenu exigible.
Ce délai constitue une chance supplémentaire accordée au débiteur pour honorer
ses engagements et éviter la résolution de l’accord de RA.
L’article 16 prévoit une autre cause de résolution. En effet, et par application de
ce texte «
si au cours de la procédure de RA, un jugement de cessation de
paiement est prononcé à l’encontre du débiteur, l’accord de règlement est
résolu de plein droit, les créanciers rentrent dans l’intégralité de leurs
droits antérieurs à l’accord déduction faite des sommes qu’ils ont perçues,
en vertu de RA »

Il s’agit ici d’un cas de résolution légale qui s’applique lorsque le débiteur est
devenu en état de CP. Par ailleurs, cette même résolution jouera comme
d’habitude à la fois avec et sans effet rétroactif
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Chapitre 3 : Le règlement judiciaire
Le règlement judiciaire (RJ) constitue la principale innovation de la loi 1995. En
effet, avant la promulgation de la loi, toute entreprise qui cesse ses paiements
était déclarée en faillite et ce conformément à l’article 45 du CC aujourd’hui
abrogé.
Le RJ peut être défini comme étant une procédure préalable et obligatoire avant
l’application de la faillite puisque l’objectif traditionnel de l’apurement du passif
a été relégué au troisième plan et la survie de l’entreprise est devenue l’objectif
prioritaire. Ceci implique que si les difficultés sont devenues trop graves pour
être résolues à l’amiable s’ouvre automatiquement une procédure collective
judiciaire dans laquelle l’entreprise bénéficiera d’un traitement curatif et non
plus préventif.
Dans le cadre de l’étude de cette dernière procédure de redressement des
entreprises en difficultés économiques,
l’on envisagera successivement
l’ouverture de la procédure de RJ, la période d’observation (PO) et enfin les
différentes solutions que le juge peut retenir à l’issue de la période
d’observation.
Section 1 : l’ouverture du règlement judiciaire
Pour étudier l’ouverture de la procédure, il faut s’arrêter d’abord, sur la saisine
de tribunal, ensuite, sur l’état de l’entreprise, et enfin, sur la décision du
tribunal. Il faut juste signaler que par application de l’article 3 alinéa 2 ainsi que
de l’article 56 de la loi «
ne bénéficie pas de ce régime toute entreprise qui a
cessé son activité depuis au moins un an »
. On en déduit que le RJ doit être
demandé dans l’année qui suit la cessation de l’activité de l’entreprise. Cette
solution risque de poser des difficultés pratiques, en raison de l’indétermination
de la notion de cessation d’activité. Evidement, le RJ ne peut être prononcé que
si avant la cessation de l’activité l’entreprise a été en état de cessation de
paiement. En tout état de cause, le RJ ne peut plus être demandé après
l’expiration d’un délai d’un an même si le commerçant n’a pas procédé à sa
radiation du registre de commerce.
Paragraphe 1- La saisine du tribunal
C’est l’article 19 de la loi qui cite les personnes qui peuvent demander le RJ « la
demande de RJ est présentée au président du tribunal de première instance
dans le ressort duquel se trouve le siège principal de l’entreprise et ce
conformément à l’article 4 bis nouveau de la présente loi par :
-
-
le propriétaire de l’entreprise lorsqu’il s’agit d’une entreprise
individuelle soumise à la présente loi,
le Président directeur général, le directeur général ou la majorité des
22






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-
membres du Conseil d’administration lorsqu’il s’agit d’une société
anonyme à conseil d’administration,
le président du directoire, le directeur général, ou la majorité des
membres du directoire lorsqu’il s’agit d’une société anonyme à
directoire,
l’associé unique lorsqu’il s’agit d’une SUARL,
le gérant lorsqu’il s’agit d’une autre société,
-
-
- tout créancier n’ayant pas pu recouvrer sa créance par les voies
d’exécution individuelles »
Il découle de cette énumération que la demande de RJ peut être faite, soit par
le débiteur lui-même, soit par l’un de ses créanciers. Le tribunal peut dans des
cas exceptionnels se saisir d’office, c ‘est-à –dire sans demande.
A. La saisine par le débiteur
Elle doit être faite, soit par le débiteur personne physique, c’est-à-dire, le
propriétaire de l’entreprise, soit par le représentant de la personne morale.
La saisine par le débiteur est également appelée le dépôt de bilan ou déclaration
de cessation de paiement. Elle constitue le mode normal de saisine du tribunal.
Ainsi, un débiteur qui a cessé ses paiements est obligé de demander l’ouverture
de la procédure de RJ et ceci par application de l’article 56 de la loi de 1995.
Le caractère obligatoire de la déclaration de cessation de paiement s’explique
aisément puisque l’ouverture tardive de la procédure rend le sauvetage plus
difficile et le paiement des créanciers plus aléatoire.
La demande de RJ présentée par le débiteur doit contenir les données et
documents prévus à l’article 4 bis nouveau de la loi. Par application de ce texte, le
débiteur doit présenter une déclaration contenant un état de ses actifs et de
ses passifs, des créanciers de la société, leurs sièges et domiciles respectifs…
Cette obligation qui pèse sur le débiteur s’explique par l’objectif de réunir le
maximum d’informations sur la situation de l’entreprise.
En cas de non respect de ces exigences, le débiteur sera poursuivi pour délit
d’entrave aux procédures de redressement prévu par l’article 55 de la loi, et ce
conforment aux dispositions de l’article 22 alinéa 3 de la loi.
B. La saisine par un créancier
Aux termes de l’article 19, la demande de RJ peut être présentée par « tout
créanciers n’ayant pas pu recouvrer sa créance par les voies d’exécution
individuelles »
. Il ressort de cet article que préalablement à l’assignation
(action), le créancier doit avoir exercé des poursuites et des voies d’exécution
qui sont restées infructueuses. Ainsi, le créancier doit apporter la preuve d’une
poursuite et d’une exécution qui n’a pas réussi sinon, il ne peut pas demander le
RJ. Cette condition, ajoutée par la loi de 2003, est largement critiquable. En
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effet, d’une part, parce qu’elle alourdit la procédure, et d’autre part, parce
qu’elle ne permet pas l’ouverture précoce de la procédure de RJ. A cet égard, le
législateur aurait dû exiger la preuve de l’existence de la créance et le refus de
son paiement par le débiteur. En effet, un protêt faute de paiement est
largement suffisant pour prouver la cessation de paiement, ce qui permet aux
créanciers de saisir plus facilement le juge pour demander l’ouverture de la
procédure.
Par ailleurs, si la demande de RJ est présentée par l’un des créanciers, elle doit
comporter les noms, prénoms et le cas échéant la dénomination sociale du
demandeur ainsi que son numéro d’immatriculation au registre de commerce, sa
forme juridique, son siège ainsi que les causes de la demande avec la justification
que l’entreprise a cessé ses paiement (art 4 bis avant dernier alinéa). L’exigence
de la preuve de cessation de paiement semble, aussi, critiquable dans la mesure
où l’on sait que le créancier ne peut demander le RJ que s’il prouve qu’il n’a pas pu
recouvrer ses créances par les procédures d’exécution individuelles. Cette
preuve semble insuffisante aux yeux des rédacteurs de la loi de 2003 pour
établir l’état de cessation de paiement, ce qui nous semble largement
contestable.
Que la demande émane du débiteur ou d’un créancier, elle doit respecter les
conditions de l’article 4 bis nouveau.
Aux termes de l’article 20 de la loi, « lorsque la de demande RJ est présentée
par l’un des créanciers, le greffier du tribunal avise le débiteur de la
demande de règlement sans délais et la communique au parquet ».
Le
débiteur ainsi avisé doit «
présenter une déclaration signée contenant un état
de ses actifs et passifs, avec l’indication des identités des créanciers et
débiteurs et leurs domiciles et sièges respectifs et des principaux clients et
fournisseurs avec une liste nominative des salariés et dirigeants, et
émoluments et avantages revenant à chacun d’entre eux et ce dans un
délai
maximum de 15 jours à compter de la date à laquelle la demande de RJ lui a
été notifiée ou la date de la demande » (art 15 alinéa 2)
C. La saisine d’office du tribunal
-
La saisine d’office du tribunal est exceptionnelle. Elle est prévue dans trois cas :
le cas de l’article
8 qui prévoit qu’à l’expiration du délai accordé au
dirigeant de l’entreprise pour prendre les mesures nécessaires, le
président du tribunal peut ordonner l’ouverture de la procédure de RJ si
ses conditions sont réunies.
le cas de l’article
17 de la loi c’est- à -dire en cas d’échec du règlement
amiable.
le cas de l’article
46 qui vise l’hypothèse où le débiteur ne respecte pas les
engagements contractuels qu’il a pris dans le cadre du plan de continuation.
-
-
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Page 25
Il s’agit ici d’un cas de réouverture du RJ pour la reprise de l’entreprise
par un tiers.
Paragraphe 2- la situation de l’entreprise
C’est l’article 18 de la loi qui décrit la situation de l’entreprise bénéficiaire de ce
régime puisqu’il prévoit : «
peut bénéficier de règlement judiciaire, toute
entreprise en état de cessation de paiement de ses dettes »
donc le
règlement judiciaire est la procédure de sauvetage qui vient après la cessation
des paiements.
La cessation de paiement, quant à elle, elle est définie par le législateur comme
étant «
l’impossibilité pour une entreprise de faire face à son passif exigible
avec ses liquidités et actifs réalisables à court terme.
Pour étudier la cessation des paiements, il nous faudra déterminer son régime
juridique c’est- à –dire, envisager sa preuve et sa date.
A- La preuve de la cessation de paiements
Il appartient à celui qui demande l’ouverture de RJ de rapporter la preuve de
l’état de CP. En principe, la charge de la preuve incombe au débiteur puisqu’il doit
par application de l’art 56 de la loi qui renvoie à l’art 448 du CC demander le RJ.
Aux termes de cet article «
tout débiteur qui cesse ses paiements est tenu
d’en faire la déclaration au greffier du tribunal compétent dans le délai d’un
mois qui suit la cessation de paiements faute par lui de ce faire, il est
déclaré banqueroutier et encourt les peines prévues à l’article 290 du code
pénal ».
Cependant, lorsque le tribunal est saisi par assignation d’un créancier, il
appartient à ce dernier de rapporter la preuve de la CP et ce par application de
l’article 4 avant dernier alinéa. Si le créancier ne rapporte pas cette preuve, il
peut le cas échéant engager sa responsabilité pour la faute résultante d’une
demande abusive d’ouverture de R.J.
Il appartient de toutes les manières au président du tribunal et ensuite au
tribunal d’apprécier la réalité de la CP, et ce, quelque soit l’auteur de la demande.
Etant un fait juridique, la CP peut être prouvée par tout moyen sauf que le
créancier demandeur ne doit pas se limiter à la preuve de l’existence de la
créance et du refus de son paiement. Il doit également prouver qu’il n’a pas pu la
recouvrer par les voies d’exécution individuelles. Ainsi, un protêt faute de
payement n’est pas à lui seul suffisant, l’aveu du débiteur ainsi que sa fuite ou
encore la fermeture de ses magasins sont également insuffisants. Tout ceci
démontre combien est critiquable l’exigence de la preuve par le créancier de
l’état de cessation de paiements.
B- La date de la cessation de paiements
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Outre le fait qu’elle entraîne l’ouverture du règlement judiciaire, la cessation des
paiements est le point de départ de la période suspecte c’est -à-dire de la
période qui se situe entre la date de CP et le jugement d’ouverture du RJ.
L’importance de la détermination de la date de CP est, donc, indéniable.
Par application de l’article 38 alinéa 3 de la loi, «
en cas d’admission de la
demande, le tribunal fixe la date de CP. Au cas où il ne se prononce pas sur
cette date, la date de dépôt de la demande sera retenue comme telle »
La loi supplée, donc, au défaut de date en réputant que la CP est apparue au jour
de la saisine du tribunal. Il faut signaler qu’il s’agit ici d’une fiction légale parce
que la CP apparaît toujours avant la saisine du tribunal. Ce dernier, doit, dans
tous les cas, motiver le choix de la date de CP.
La question qui reste à se poser est de savoir si la fixation de cette date est
définitive ? Le tribunal peut-il revenir sur sa décision pour reculer la date de la
CP à une date antérieure ?
Malgré le silence des textes, on peut admettre la possibilité de report en arrière
de la date, et ce en raisonnant par analogie avec les règles du code de commerce
régissant la faillite pour dire que la durée maximale de la période suspecte est
de 18 mois.
Paragraphe 3- la décision du juge
Le président du tribunal de première instance demande l’avis de la CSEE sur la
demande de RJ et lui fixe un délai de 20jours à l’expiration duquel le président
peut prendre plusieurs décisions. Néanmoins, et avant d’examiner ces décisions,
il faut signaler que la loi reconnaît compétence à la fois au président du tribunal
et au tribunal lui-même. En effet, la loi de 2003 a renforcé les attributions du
président en lui conférant d’importants pouvoirs, qui, auparavant appartenaient
au tribunal.
Ainsi, la demande est présentée au président du tribunal. Lorsqu’elle s’avère
fondée, le président ordonne l’ouverture de la période d’observation (PO).
Néanmoins, c’est la chambre collégiale du tribunal qui intervient à la fin de la
période d’observation et qui doit se prononcer sur le sort de l’entreprise et ce
par application de l’article 38 de la loi.
Avant la réforme, c’était le tribunal qui ordonnait l’ouverture de la procédure et
ce en vertu de l’ancien article 27. Cette solution est plus logique, car c’est dans
la même décision que les mesures les plus importantes sont prises (fixation de
l’étendue des pouvoirs du débiteur, l’étendue de son dessaisissement, l’annulation
des actes de la période suspecte, la fixation de la date de la CP…). Ces mesures
sont urgentes et doivent être prises dés le départ c’est- à -dire dès l’ouverture
de la procédure.
26






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Pour revenir aux décisions prises par le président, ce dernier peut soit
- rejeter la demande au cas où l’entreprise n’a pas cessé ses
paiements,
- ordonner la cession de l’entreprise à un tiers sans passer par la
période d’observation, s’il s’avère que c’est l’unique solution pour le
redressement,
- Ordonner le déclenchement de la procédure de RJ et l’ouverture
d’une période d’observation.
La loi n’envisage pas l’hypothèse où aucun moyen de redressement n’est possible.
Dans ce cas, il faut attendre la fin de la PO pour déclarer le débiteur en faillite
et ce d’après l’article 39. Il s’agit ici d’un gaspillage de temps inutile dans la
mesure où avant la réforme, le tribunal pouvait prononcer la faillite sans passer
par la PO ce qui était logique et appréciable.
Par ailleurs, la décision de cession que peut prendre le juge après l’examen de la
demande constitue une nouveauté de la loi de 2003. Cette décision semble
également difficile à prendre sans le passage par la PO qui est, par définition,
une période d’investigation et de diagnostic. De plus, cette possibilité semble
être contradictoire avec les dispositions de l’article 47 qui précise que «
la
cession n’est envisageable que lorsque le redressement au sens des articles
41 à 47 n’est plus possible »
. Ces articles traitent la poursuite de l’activité de
l’entreprise ce qui veut clairement dire que la cession est bien une solution
secondaire par rapport à la continuation et on voit mal, par conséquent, comment
elle peut être décidée sans le passage par la PO.
Ceci étant, le renforcement des pouvoirs du président par la loi de 2003 appelle
les remarques suivantes :
- La décision d’ouverture de la procédure de RJ est une décision grave
de conséquences et c’est pour cette raison qu’elle était dans le cadre
de la loi de 1995 prise parle tribunal et non par le président statuant
seul. En effet, l’ancien article 26 prévoyait que «
le tribunal statue
sur la demande en chambre de conseil après audition du débiteur et
du représentant des créanciers et en présence du ministère
public »

- L’attribution de la compétence au président du tribunal pour l’ouverture
de la PO a crée une grande perturbation au sein des articles 22 et
suivants qui la réglementent. Il ressort de ces articles, qu’à priori, le
tribunal n’intervient qu’au moment de l’homologation du plan de
redressement c’est- à- dire à la fin de la PO et ce par application de
l’article 38 alinéa 1. Or, on trouve d’autres textes qui accordent au
tribunal des pouvoirs avant cette date, c’est–à-dire
lors du
déroulement de la PO tel que par exemple la délimitation des pouvoirs
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de l’administrateur judiciaire (art 26), la fixation de la date de CP
(art38), et l’annulation des actes de la période suspecte (art 30).
Avant la réforme, les choses étaient plus claires et plus logiques
puisque c’est dans la même décision ordonnant l’ouverture de la
procédure que toutes ces autres décisions étaient prises.
- La date de la CP ne sera fixée, d’après cette nouvelle répartition des
compétences, qu’après la date de l’homologation du plan ce qui veut dire
que la période suspecte ne sera fixée qu’à cette date. Cette solution
nouvelle risque et va entraîner une grave conséquence puisque les
opérations accomplies au cours de cette période ne vont être annulées,
par application de l’article 30 que très tardivement.
Section 2- la période d’observation
Cette période constitue comme son nom l’indique une phase de diagnostic de la
situation économique, financière et sociale de l’entreprise. Elle est réservée à
l’élaboration du plan de redressement qui est établit par les soins de plusieurs
personnes et qui doit être soumis à l’homologation du tribunal.
La PO va avoir pour conséquence la modification de la situation des créanciers.
Paragraphe 1- les organes de la période d’observation
Par application de l’article 22 de la loi « dans un délai ne dépassant pas 15
jours à partir de la date de réception de l’avis de la commission ou à
l’expiration du
délai qui est imparti à cette dernière pour donner son avis et
au cas ou la demande est fondée, le président du tribunal désigne un juge
commissaire auquel il confie le dossier, et un administrateur judiciaire
chargé de l’élaboration du plan de redressement dans un délai de 3 mois
renouvelable pour la même durée par décision du président du tribunal. Le
cas échéant, il peut désigner également un ou plusieurs experts en diagnostic
pour s’enquérir sur la véritable situation financière et sociale de l’entreprise
en vue d’aider l’administrateur judiciaire dans l’élaboration du plan de
redressement. »
Il ressort de cet article que les organes qui interviennent dans la PO sont le juge
commissaire, l’administrateur judiciaire et l’expert en diagnostic. Toutefois, il
faut préciser que le tribunal continue à jouer un rôle très important pendant
cette période.
A- le juge commissaire
Le juge commissaire a pour mission principale le contrôle de gestion de
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l’entreprise. Il intervient dans deux situations : l’une prévue par l’article 26,
l’autre par l’article 35 de la loi.
1ère intervention: Le juge commissaire intervient, selon l’article 26, en
cas de conflit entre l’administrateur judiciaire et le dirigeant de l’entreprise. En
effet, l’administrateur judiciaire est amené à participer à la gestion de
l’entreprise dans la mesure où il va assister le dirigeant dans la gestion de
l’entreprise. Ainsi, certains actes ne peuvent être accomplis valablement par le
débiteur que s’ils sont co-signés par l’administrateur judiciaire. Dans certains cas
l’administrateur judiciaire peut refuser d’apposer sa signature sur l’acte en
question. Dans ce cas, «
l’affaire sera soumise au juge commissaire qui doit
trancher sans délai ».
2ème intervention : Elle est prévue par l’article 35 et se rapporte à la
question de l’exécution des contrats en cours. En effet, l’ouverture de la PO
n’entraîne pas la résolution de plein droit des contrats en cours conclus par le
débiteur avant la PO et qui continuent à produire leurs effets. «
L’exécution
des contrats en cours liant l’entreprise au tiers, clients, fournisseurs et
autres sera poursuivie. L’administrateur judiciaire ou le débiteur peuvent
demander d’y mettre fin après autorisation du juge commissaire, s’ils ne
sont pas nécessaires à l’activité de l’entreprise. Les contrats de travail
restent soumis aux lois et conventions qui les régissent ».
Il en résulte que le
juge commissaire intervient pour autoriser la rupture des contrats en cours.
La troisième attribution accordée au juge commissaire constitue un ajout de la
loi de 2003 à ces pouvoirs. D’après l’article 25 de cette loi, ce dernier est amené
à collaborer avec la CSEE ou toute autre partie pour s’informer sur la véritable
situation de l’entreprise. C’est lui qui arrête la liste des créanciers, désigne un ou
plusieurs personnes pour les représenter et lui communiquer leurs observations.
B- l’administrateur judiciaire
C’est l’organe central de la période d’observation. Il joue un rôle très important
eu égard à sa mission et à ses différents pouvoirs
a- La mission de l’administrateur judiciaire (AJ): l’administrateur
judiciaire est chargé d’élaborer un plan de redressement de l’entreprise. A cet
effet, l’article 26 lui donne un délai relativement court pour réaliser cette
mission. En effet, l’AJ dispose de 3 mois renouvelables une seule fois pour la
même durée par le président du tribunal.
L’établissement du plan n’est pas une tache facile, c’est pourquoi la loi a prévu
que l’AJ peut se faire assister par un ou plusieurs experts en diagnostic.
Il s’agit en réalité d’un projet de plan, qui peut, le cas échéant être modifié et
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dans tout état de cause, il ne devient effectif que suite à son homologation par
le tribunal.
De même, et bien que la loi ne le dise pas, l’AJ n’est pas tenu d’établir le plan si
l’entreprise n’offre aucune chance de redressement.
Par ailleurs, l’AJ doit dans l’élaboration de son plan, tenir compte du plan proposé
par le débiteur et ce par application de l’article 4bis de la loi.
La loi prévoit les moyens de sauvetage que peut contenir un plan, et notamment
lorsqu’il va s’agir d’un plan de continuation, par exemple l’augmentation ou la
réduction du capital, le rééchelonnement ou la remise des dettes…
b- Les pouvoirs de l’administrateur judiciaire
Par application de l’article 26 « l’administrateur judiciaire est chargé de
contrôler les actes de gestion ou d’assister le débiteur en tout ou en partie
dans les actes de gestion ou de prendre la direction totale ou partielle de
l’entreprise avec ou sans le concours du débiteur dans les conditions définies
par le tribunal. Au cas où la mission de l’administrateur est limitée au
contrôle, le tribunal détermine les opérations qui ne peuvent être accomplies
sans sa co-signature avec le débiteur et en cas de refus de l’administrateur
judiciaire d’apposer sa signature, l’affaire sera soumise au juge commissaire
qui doit trancher sans délai ».
Il ressort de cet article que l’AJ dispose d’un grand pouvoir dans l’administration
de l’entreprise en difficultés économiques. En effet, le premier pouvoir dont il
est investi est le contrôle des actes de gestion. Ceci suppose que c’est le
débiteur qui gère l’entreprise comme il l’entend et l’administrateur judiciaire
intervient à posteriori pour contrôler les opérations accomplies par le débiteur.
Par conséquent, le débiteur doit rendre compte de sa gestion pour que l’AJ
puisse apprécier l’opportunité des actes accomplis. Néanmoins, l’acte accompli
par le débiteur reste valable quelque soit le degré de son inopportunité.
Toutefois, l’article 26 précise que lorsque la mission de l’AJ est limitée au
contrôle, le tribunal détermine les opérations qui ne peuvent être accomplies
sans sa co-signature.
Le deuxième pouvoir dont est investi l’AJ consiste dans l’assistance du débiteur
dans tout ou partie des actes de gestion. Dans ce cas, l’AJ va cogérer
l’entreprise avec le débiteur.
Le troisième pouvoir qui peut être confié à l’AJ est la direction totale ou
partielle de l’entreprise avec ou sans le concours du débiteur. A priori, c’est l’AJ
qui va gérer l’entreprise totalement ou partiellement. Néanmoins, on peut hésiter
sur ce pouvoir de direction ou de gestion puisque l’article ajoute l’expression
« avec ou sans le concours du débiteur ». En effet, la direction de l’entreprise et
le concours du débiteur sont incompatibles, puisque lorsque le débiteur concourt
à la gestion, l’AJ ne dirige pas l’entreprise, il assiste uniquement le débiteur, or,
c’est là le deuxième pouvoir dont est investi l’administrateur judiciaire.
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En définitive, nous dirons que l’AJ peut contrôler, gérer ou cogérer une
entreprise en difficultés économiques.
C’est le président du tribunal qui détermine les pouvoirs de l’AJ dans le cadre de
la décision de l’ouverture du RJ. En effet, et d’après l’article 24
« la décision
d’ouverture de la procédure de RJ est inscrite au registre du commerce, une
copie en est transmise à la CSEE et insérée au JORT à la diligence du
greffier du tribunal et aux frais du débiteur »
.
Par ailleurs, l’article 27 prévoit que sont inscrites au registre du commerce, les
décisions confiant à l’AJ la gestion ou l’obligeant de co-signer avec le débiteur. Il
s’agit ici de la publicité du jugement qui est nécessaire pour informer les tiers
qui doivent être au courant de la restriction ou même de la suppression des
pouvoirs du débiteur. De même, la publicité est indispensable aux créanciers qui
doivent faire valoir leurs droits dans la procédure.
C- le rôle du tribunal
Le tribunal va avoir lors du déroulement de la PO un rôle de haute autorité ainsi
qu’une mission juridictionnelle. En effet, c’est le tribunal qui va déterminer les
actes soumis à la co-signature de l’AJ (art 26), c’est lui qui décide également de
l’éviction du débiteur et de soin remplacement par l’AJ(art 28) et c’est le
tribunal qui peut interdire au dirigeant de réaliser toute opération de cession ou
de gage sur ses actions ou parts sociales sans l’autorisation du tribunal ( art 28).
C’est également, le tribunal qui peut annuler certains actes ou certaines
décisions prises par le dirigeant antérieurement à sa saisine. En effet, l’article
30 prévoit «
le tribunal peut annuler les décisions du dirigeant de l’entreprise
antérieures à sa saisine et qui constituent un obstacle à l’exécution du plan
de redressement ainsi que tout acte d’aliénation à titre onéreux ou gratuit
pouvant porter préjudice aux intérêts de l’entreprise en difficulté ou toute
opération de nature à privilégier un créancier à un autre et tout paiement
d’une créance non encore échue à condition que ces actes soient effectués
après la date de la cessation de paiements »
Il s’agit ici des actes et des opérations pris pendant la période suspecte. Ces
derniers sont qualifiés de suspects parce qu’ils risquent de porter préjudice à
l’entreprise en difficultés ou bien peuvent privilégier un créancier par
rapport à
un autre.
L’article 30 prévoit comme sanction la possibilité d’annulation de ces actes.
Néanmoins, l’article 56 de la loi de 95 renvoie aux articles 462 et 463 du CC qui
prévoient l’inopposabilité à la masse des créanciers des actes de la période
suspecte de la faillite. Dés lors, on est en droit de s’interroger sur la sanction à
retenir étant donné les interférences entre les deux textes. On dira simplement
que l’inopposabilité ne peut pas se maintenir dans le cadre du RJ et la sanction la
plus appropriée est la nullité.
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Paragraphe2- la situation des créanciers
Elle se caractérise par l’idée de leur sacrifice qui se manifeste dans le gel de
leur situation, l’obligation de l’inscription de leurs créances et le recul de leurs
sûretés.
A- l’obligation d’inscription des créances
La décision d’ouverture du RJ étant inscrite au RJ et insérée au JORT, elle est
censée être portée à la connaissance de tous et surtout des créanciers
antérieurs à l’ouverture de la procédure pour les informer sur la nouvelle
situation de l’entreprise.
L’article 25 a exigé de la part des créanciers antérieurs à la PO l’inscription de
leurs créances pour participer aux différentes modalités d’apurement du passif
qui résulte du plan de redressement. C’est donc le passif antérieur qui doit être
défini puisque les créanciers postérieurs bénéficient d’un traitement de faveur
qui les dispense de cette obligation
L’article 25 prévoit «
le juge commissaire arrête dés sa désignation la liste
des créanciers….Les créanciers doivent s’assurer de l’inscription de leurs
créances antérieurs à la date d’ouverture de RJ et ce dans 30 jours à
compter de la publication au JORT.Aucune créance révélée après ce délai ne
peut être inscrite sauf sur autorisation du tribunal et dans tous les cas
aucune dette ne peut être inscrite après l’expiration d’une année »

Il ressort de cet article, qu’en réalité, les créanciers doivent s’assurer de
l’inscription de leurs créances puisque c’est le juge commissaire qui est chargé
d’établir le passif de l’entreprise par le biais des informations contenues dans la
demande du RJ. C’est donc, seulement, s’il s’avère que la créance n’est pas
inscrite que le créancier doit en demander l’inscription dans un délai de30 jours.
Le législateur excepte les créances fiscales et celles de la caisse nationale de la
sécurité sociale (CNSS)qui peuvent être inscrites en dépassant le délai d’un an.
Mais le texte prévoit que leur inscription doit dans tous les cas être faite dans
un délai ne dépassant pas 2 mois à partir de la date à laquelle la créance est
devenue certaine.
Quelle est la sanction du défaut d’inscription ?
Le créancier qui ne demande pas son inscription n’encourt pas la forclusion c’est-
à-dire que sa créance n’est pas éteinte puisque le créancier conserve son droit
de réclamer sa créance à l’encontre du débiteur mais sans que cela «
n’ait
d’effets sur la procédure du RJ
» selon l’expression de l’article 33 alinéa
dernier.
Les créances inscrites ne sont pas toutes incontestables. En cas de contestation
portant sur le fond ou le montant de la créance, le tribunal peut ordonner son
inscription mais à titre conservatoire si les justificatifs présentés la rendent
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probable. Dans ce cas son montant sera consigné lors de la distribution
(art33).
« Par contre si la créance n’est pas justifiée,son inscription sera
refusée et le créancier conserve son droit de la réclamer sans que cela n’ait
d’effet sur la procédure de règlement »
B- le sacrifice des créanciers
Cette situation se vérifie sur trois niveaux :
-La suspension des procédures individuelles et des voies d’exécution : Par
application de l’article 32 alinéa 1
er « au cours de la PO seront suspendues
toutes poursuites individuelles et tout acte visant le recouvrement d’une
créance antérieure et la récupération de biens meubles ou immeubles en
raison du non paiement d’une créance ».
Cet article a un champ d’application
large puisque la suspension va s’appliquer à tous les créanciers antérieurs, les
créanciers chirographaires ainsi que ceux munis d’une sûreté réelle sauf les
créances salariales. En effet, les poursuites relatives aux droits des salariés ne
sont pas suspendues et les voies d’exécution doivent être autorisées par le
tribunal qui doit vérifier que l’exécution n’est pas susceptible d’empêcher le
redressement de l’entreprise.
L’article 32 ordonne la suspension des actions en revendication en raison de non
paiement d’une créance antérieure ce qui veut dire que le recouvrement d’une
créance antérieure n’est pas suspendue cela veut uniquement dire qu’aucune voie
d’exécution ne peut être entreprise par le créancier antérieur et les voies
d’exécution déjà entamées ne peuvent plus être poursuivies.
Il faut signaler que les actions qui ne sont pas prévues par l’article 32 ne sont
pas concernées par la suspension telle que les actions en nullité ou encore en
résolution.
-la suspension des cours des intérêts et des dommages et intérêts
moratoires :
Par application de l’article 32, seront suspendus, le cours des
intérêts et dommages et intérêts moratoires. Ceci s’explique facilement étant
donné que la loi veut limiter les droits des créanciers antérieurs pour favoriser
le redressement de l’entreprise. Cette solution se justifie également par le
principe de l’égalité des créanciers car si les intérêts continuent à courir à des
taux différents, la prolongation de la procédure profitera à certains aux
dépends des autres.
Par ailleurs il est important de fixer le passif de l’entreprise à un moment donné.
Si les intérêts continuent à couri, il sera modifié chaque jour.
- L’absence de la déchéance du terme à cause du non paiement d’une
créance échue:
L’article 31 prévoit que « le non paiement d’un terme ne rend
pas exigible les autres termes non échus de la dette pendant la durée de RJ
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et ce nonobstant toute clause contraire ». Cet article consacre la règle suivant
laquelle le RJ ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son
prononcé. La solution s’impose logiquement puisque l’exigibilité immédiate des
créances à terme constitue un obstacle au redressement de l’entreprise car elle
est de nature à aggraver le passif exigible de l’entreprise.
C- la priorité de paiement des créances nouvelles
La nécessité d’assurer la survie de l’entreprise a exigé la règle de l’article 34 de
la loi de 95 qui accorde la priorité de paiement aux créanciers titulaires d’une
créance née après l’ouverture de la PO.
Cet article prévoit «
la priorité sera accordée aux dettes nouvelles de
l’entreprise nées à partir de l’ouverture de la période d’observation et qui
sont en relation directe et nécessaire avec la poursuite de l’activité de
l’entreprise. Les dettes nouvelles seront payées avant les précédentes
créances même si elles sont assorties de privilèges »

Cette règle constitue l’instrument essentiel de financement de l’entreprise
pendant la PO. Le législateur accorde la préférence aux créanciers postérieurs à
l’ouverture de la PO, c’est –à- dire ceux qui acceptent de soutenir l ‘entreprise
malgré le risque qu’ils courent. En effet, puisqu’ils ont accepté de participer à la
tentative de sauvetage, le législateur leur a accordé la priorité au paiement.
Toutefois, les créances prévues pour les articles 544 et 566 du CC et par les
alinéas 1, 2 et 3 de l’article 199 du CDR bénéficient d’un super privilège et seront
payées avant toute autre créance.
Il faut, cependant, préciser que suite à la réforme apportée par la loi 2003
certaines créances antérieures ont bénéficié de la priorité accordée par l’article
34. Il s’agit selon l’expression de l’article des «
loyers des biens et équipements
objet d’un contrat de leasing dont les procédures de poursuite et d’exécution
visant leurs récupération ont été suspendues et dont l’échéance est
antérieure à l’ouverture de la période d’observation »

Bien que cette inégalité entre les créanciers antérieurs ne se défende pas, elle
s’explique par l’objectif d’encourager et de soutenir les établissements de
crédit- bail.
En accordant la priorité aux dettes nouvelles, c’est-à- dire celles nées après
l’ouverture de la PO, le législateur consacre le recul des sûretés de droit commun
puisque les créanciers postérieurs vont devancer, et les créanciers munis de
privilèges et de sûretés, et l’état qui renonce à son super privilège au profit de
ces créances nouvelles.
A la fin de la PO, l’administrateur judiciaire soumet le plan de redressement qu’il
a élaboré à l’avis de la CSEE et au juge commissaire dès qu’il en achève
l’élaboration. A la fin de la PO et d’après l’article 38 de la loi
« le tribunal
statue en chambre de conseil avec l’assistance du ministère public sur le plan
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de redressement après avoir entendu le débiteur, le représentant des
créanciers, les cautions, les garants, et les co-débiteurs solidaires .
Le
tribunal décide le rejet de la demande chaque fois qu’il s’avère que
l’entreprise n’a pas cessé ses paiements. En cas d’admission de la demande,
le tribunal fixe la date de CP, à défaut le dépôt de la demande de RJ sera
retenu comme date de la CP. Le tribunal homologue le plan de redressement
en envisageant soit la poursuite de l’activité de l’entreprise, soit la location
gérance, soit la cession à un tiers. »
Section3- les solutions de la période d’observation : les plans de
redressement
Selon l’art 41 de la loi, le plan de redressement peut être, soit un plan de
continuation, c’est–à-dire un plan de poursuite de l’activité, soit un plan de
cession. Le législateur de 2003 a ajouté deux autres types de plan par
l’introduction d’une section 5
ème dans la loi de redressement qui réglemente le
plan de location et le plan de location gérance de l’entreprise.
Paragraphe 1- le plan de continuation ou le plan de poursuite de l’activité
Il est prévu par les articles 41 à 46 de la loi. Il s’agit d’un plan prioritaire parce
que l’art 47 prévoit que la cession de l’entreprise à un tiers n’a lieu que «
lorsque
son redressement conformément aux articles 41 et 46 de la loi se révèle
impossible ».
Il en résulte que le plan de cession ne doit être envisagé qu’en
second recours, c’est- à dire, lorsque la continuation n’est plus possible.
Il faut, toutefois, remarquer que la continuation de l’activité n’est pas une fin en
soi. Autrement dit, le plan de continuation ne doit être adopté que «
s’il s’avère
que l’entreprise a des possibilités sérieuses de poursuivre son activité avec le
maintien de tout ou partie de l’emploi et le paiement de ses dettes »
A- le contenu du plan de continuation
L’administrateur judiciaire n’est pas lié par la loi quant au contenu du plan de
poursuite. En effet, ce dernier peut recourir à plusieurs modalités prévues par
l’article 36 de la loi et peut, en effet, proposer la continuation de l’exploitation
avec le rééchelonnement des dettes, le changement de la forme de l’entreprise,
l’augmentation du capital, la baisse du taux d’intérêt principal des dettes ect…. Il
faut signaler que toutes ces modalités sont données à titre indicatif et que
l’administrateur judiciaire, peut, en fonction de la situation de l’entreprise, en
prévoir d’autres.
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Page 36
- l’augmentation du capital
L’augmentation du capital donne à l’entreprise une possibilité d’avoir la liquidité
qui lui manque à court terme pour faire face à ses besoins au quotidien. C’est
pour cela que la loi exige dans l’article 44 alinéa 3 que «
les nouvelles
souscriptions doivent être immédiatement et intégralement libérées ».
Les créanciers peuvent être intéressés par l’augmentation de capital en
participant à l’augmentation par incorporation de leurs créances au capital.
Cette modalité a pour objectif d’alléger les dettes sociales.
La souscription des créanciers dans le capital est ouverte à tout créancier dont
la créance est inscrite dans le passif sans contestation et à condition quelle soit
exigible.
Les créanciers qui détiennent une créance non encore échue peuvent aussi
souscrire à l’augmentation de capital mais à condition de renoncer à une partie de
la créance que le tribunal détermine (article44 alinéa 4
ème)
Lorsque le plan de continuation prévoit une augmentation de capital, c’est le
commissaire à l’exécution du plan qui se charge de la procédure.
- le changement de la forme de la société
Cette possibilité consiste dans la restructuration de l’entreprise. Elle a pour
conséquence, comme d’ailleurs, l’augmentation de capital, le changement des
statuts qui ne peut se faire que dans le cadre d’une décision collective prise par
l’assemblée générale extraordinaire. Dans ce cas, le tribunal donne mandat au
commissaire à l’exécution du plan et lui fixe un délai pour convoquer l’assemblée
la
générale compétente pour décider de
modification se fait d’une SARL vers une SA ou inversement.

la modification. Généralement,
- le rééchelonnement des dettes
Il faut préciser que le rééchelonnement des dettes rentre dans le cadre de
l’apurement du passif. En effet, l’article 43 dispose que «
le plan peut contenir
un report des délais de paiement des créances après avis des créanciers ».
Pour ordonner le rééchelonnement, il ne faut pas exiger le consentement des
créanciers mais leur simple avis. L’administrateur judiciaire dispose d’un large
pourvoir d’appréciation quant à la possibilité de rééchelonnement.
Néanmoins, il existe un contrôle exercé par le tribunal lors de l’homologation du
plan pour adopter des délais raisonnables pour le paiement.

Par ailleurs, seules sont exclues de la possibilité de report « les dettes visées
dans l’art 564 et 566 du CC et l’art 199 du code de droit réels à l’exception
du quatrième alinéa »
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Page 37
-la remise des dettes
Pour aboutir à l’apurement du passif, le plan de continuation peut prévoir la
remise de dettes. En effet, et contrairement au rééchelonnement qui peut se
faire sans l’accord expresse du créancier, l’article 43 prévoit que
« le tribunal
ne peut remettre une créance qu’avec le consentement des créanciers »
Par ailleurs, et pour assurer l’efficacité et la faisabilité du plan de continuation,
le tribunal peut interdire l’aliénation de certains biens sans son autorisation.
Cette décision est facultative, mais si elle est prise par le tribunal, elle vaut
insaisissabilité. Elle a pour objectif de protéger les tiers, en l’occurrence, les
créanciers. Lorsque la décision d’interdiction est prise, elle doit être publiée par
l’inscription au registre de commerce et au titre foncier pour les biens
immatriculés. Toute cession faite en violation de l’interdiction peut être annulée.
B- les effets de l’élaboration du plan
Le plan de continuation produit ses effets, à la fois sur le débiteur et sur les
créanciers. En effet, le débiteur va retrouver sa liberté de gestion de son
entreprise avec comme seule limite le respect des dispositions du plan et
l’impossibilité de cession de certains biens.
L’adoption du plan met fin à la mission de l’administrateur judiciaire.
Pendant la période d’exécution du plan, les contrats en cours se poursuivent
normalement tel que le contrat d’assurance, de fourniture, ou encore le contrat
d’ouverture de crédit.
Pendant cette période les biens considérés insaisissables par le tribunal restent
insaisissables et incessibles. Pour les autres biens qui rentrent dans le
patrimoine de l’entreprise, ils sont librement aliénables.
En ce qui concerne les biens grevés d’un privilège spécial, d’un nantissement,
d’une hypothèque ou d’un gage, l’article 45 de la loi prévoit qu’ «
en cas de vente
de l’un de ces biens, la partie du prix correspondant à la créance garantie
est versée au créancier après paiement des créances prévues par l’art 564
et 566 du CC et 199 du CDR »
Au cas où le débiteur ne respecte pas les engagements pris dans le cadre du plan
de continuation et notamment ses engagements financiers, l’article 46 élimine
l’application automatique de la résolution et propose deux autres solutions aux
créanciers :
- D’abord, et par application de l’article 46 de la loi, le créancier a le droit de
contraindre le débiteur a le payer par tous les moyens légaux à l’exception de la
cession des biens jugés inaliénables.
- Ensuite, l’alinéa 2 de l’article 46 donne la possibilité au procureur de la
république, au commissaire à l’exécution, au créancier ou aux créanciers détenant
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15% de la dette globale de demander la résolution du plan de continuation.
En cas de résolution, on assiste à la réouverture de la procédure de RJ en vue de
la cession de l’entreprise si les conditions de la cession sont réunies. A défaut, le
tribunal prononce la faillite ou la mise en liquidation de l’entreprise (article 46
Alinéas 3 et 4)
Paragraphe 2- le plan de cession de l’entreprise
Avec la modification de la loi en 2003, le président du tribunal peut décider la
cession
de l’entreprise au moment où il se prononce sur la demande de règlement
et ce sans passer par la P0, s’il est évident que c’est l’unique solution pour le
redressement de l’entreprise et ce en vertu de l’article 19 dernier alinéa.
Ainsi, la cession peut être décidée en amont ou en aval de la procédure, c’est-à-
dire avant ou à la fin de la PO. La loi de 2003 a également prévu la possibilité de
faire précéder la cession d’une location ou location gérance de l’entreprise. En
effet, l’article 52 bis prévoit à cet effet que «
nonobstant toute clause
contraire, y compris les clauses insérées dans les contrats de location, le
tribunal peut décider que la cession de l’entreprise sera précédée par sa
location au cessionnaire ou qu’elle lui sera donnée en location gérance pour la
période que le tribunal déterminera… ».
Contrairement à
la cession n’est pas une
restructuration de l’entreprise mais c’est une transmission de l’entreprise à un
tiers. Cette transmission doit constituer une garantie pour le maintien, en tout
ou en partie de l’emploi, la poursuite de l’activité et l’apurement du passif.
La cession peut concerner selon l’alinéa 2 de l’article 47 l’ensemble de
l’entreprise ou une branche ou plusieurs branches complémentaires de son
activité. Ainsi, la cession peut être totale ou partielle.
- La cession totale : elle porte sur la totalité de l’actif de l’entreprise. Quand il
s’agit d’une entreprise sociétaire, la cession ne porte pas sur les droits sociaux
mais sur l’actif de la société.
-La cession partielle : lorsqu’elle est décidée, la cession doit porter sur
l’ensemble d’éléments d’exploitation formant une ou plusieurs branches
complémentaires ou une branche autonome d’activité. La cession partielle ne doit
pas se transformer en une liquidation déguisée.
la continuation de
l’activité,
L’étude de la cession implique l’étude de sa mise en œuvre et de ses effets.
A- La mise en œuvre de la cession
Il ressort de la combinaison des articles 47 et 48 qu’un jugement ordonnant la
mise en cession de l’entreprise est pris par le tribunal. Sur la base de ce
jugement, les offres de rachats seront présentées.
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a-La décision de mise en cession
« S’il s’avère que la cession constitue la solution adéquate pour le
redressement de l’entreprise, le tribunal ordonne sa cession par une décision
de mise en cession. Cette décision est publiée par voie d’insertion au JORT,
et par tout autre moyen décidé par le juge commissaire et ce dans le délai
de 20 jours qui suivent la prise de la décision »
. La particularité de cette
publicité tient, non seulement aux moyens utilisés, mais aussi, à ses brefs délais.
Elle vise, en effet, à assurer une information répandue et ce le plus rapidement
possible.
La décision de mise en cession comprend la désignation d’un contrôleur de
l’exécution, qui dispose d’un délai de 20 jours à compter de la prise de sa mission
pour établir le cahier des charges et ce par application de l’article 48 de la loi.
b- la recherche des candidats repreneurs
Le plan de cession ne peut se réaliser sans le concours des éventuels candidats à
la reprise de l’entreprise. Ces derniers, avant de présenter leurs offres, doivent
être informés sur la situation de l’entreprise. C’est pour cela que le législateur
de 2003 a innové en prévoyant que le cahier des charges, élaboré par le
contrôleur de l’exécution sous le contrôle du juge commissaire, est mis à la
disposition des soumissionnaires d’offres.
1-le cahier des charges
Le législateur a prévu, dans l’article 48 alinéa 2, à titre indicatif, les mentions
contenues dans le cahier des charges dont notamment, l’objet de la cession, les
principaux biens et éléments de l’actif de l’entreprise, le nombre des salariés et
leurs catégories professionnelles…..
L’appel d’offre est publié dans un journal quotidien paraissant en Tunisie et par
tout autre moyen jugé adéquat par le contrôleur de l’exécution, ainsi que par tout
autre moyen ordonné par le juge commissaire. Cette publicité doit être
effectuée dans un délai de 20 jours à compter de l’élaboration du cahier des
charges
.
2-le soumissionnaire d’offre
Il doit indiquer dans son offre le nombre des emplois qu’il compte conserver, son
plan relatif au futur développement de l’emploi et des investissements. Il en
résulte que le législateur insiste sur les objectifs de la loi. Par ailleurs,
l’indication du prix de cession n’est pas une mention obligatoire, ce qui veut dire
que l’objectif premier du législateur à travers la cession, n’est pas le paiement
des créanciers mais plutôt le maintien de tout ou partie des emplois. D’ailleurs,
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et d’après l’article 48 alinéa 5 « le tribunal retient l’offre qui permet le plus
le maintien de l’emploi et le paiement des créances ».
Par ailleurs, l’article 50 prévoit une interdiction concernant les soumissionnaires
d’offres. En effet, «
le dirigeant de l’entreprise objet de la cession, son
conjoint, ses ascendants et descendants, ses parents jusqu’au deuxième
degré et ses alliés, ne peuvent, ni directement, ni par personnes
interposées, présenter une offre d’achat de l’entreprise »
Le contrôleur de l’exécution notifie la décision du tribunal au soumissionnaire
choisi et il procède à l’accomplissement des procédures de cession dans les plus
brefs délais et dans tous les cas dans délai ne dépassant pas un mois à compter
du choix de l’offre.
B- l’exécution du plan de cession
Il s’agit d’examiner les effets de la cession qui sont au nombre de quatre :
a- Le transfert de la propriété
Par application de l’article 49 de la loi « la propriété de l’entreprise est
transférée au cessionnaire dés qu’il ait exécuté tous ses engagements et
payé l’intégralité du prix ».
Cet article contient une dérogation au droit
commun de la vente dans la mesure où il conditionne le transfert de la propriété
au respect par le cessionnaire de ses engagements et au payement du prix alors
qu’en droit commun, le transfert de la propriété se fait automatiquement et
systématiquement avec la conclusion du contrat, et ce indépendamment du
payement du prix et de la livraison.
En cas de non payement du prix dans les délais prévus dans le cahier des charge,
ou à défaut de payement, l’article 48 in fine prévoit l’application d’une sanction à
l’encontre du cessionnaire puisqu’il dispose «
il est réputé fol enchérisseur. Il
résulte de la folle enchère la reprise de la procédure d’appel d’offre et de
choix d’une nouvelle offre, sauf si le tribunal décide de choisir le
cessionnaire parmi les précédents soumissionnaires. Le fol enchérisseur
répond du dommage dû à sa folle enchère, il ne peut récupérer les sommes
qu’il a avancé ou consigné à n’importe quelle étape de la procédure, et qui
seront affectées au paiement des créanciers selon leurs rangs respectifs. »
b-l’assainissement de l’entreprise cédée
D’après l’article 49 de la loi, « par dérogation aux dispositions de l’article 292
du CDR, l’entreprise sera assainie lors de sa vente de toutes les dettes e
t
les inscriptions précédentes y compris celles qui sont privilégiées ». Il
ressort de cet article, que la cession purge l’entreprise de ses dettes.
Autrement dit, le cessionnaire acquiert une entreprise nette de dettes y compris
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des inscriptions privilégiées. Par conséquent, elles ne permettent plus à leurs
titulaires d’exercer un droit réel, très important à savoir le droit de suite, mais
leurs permettent, d’avoir un droit de préférence au payement.
c-la continuation des contrats en cours
La poursuite de l’activité de l’entreprise cédée ne saurait être envisagée que si
certaines de ses anciennes relations contractuelles sont maintenues. C’est pour
cette raison que la loi a prévu dans son article 47 alinéa 2 que «
le tribunal
détermine les contrats en cours conclu avec l’entreprise et nécessaires à la
poursuite de son activité, et ce à la demande des soumissionnaires
d’offres ».
Ce faisant, le législateur, détermine les conditions de cession des
contrats. Il faut que le contrat soit nécessaire à l’activité de l’entreprise, et que
sa continuation ait été voulue par le nouveau propriétaire. Ceci est différent du
droit français qui prévoit que le législateur détermine une liste limitative des
contrats en cours.
L’article 49 alinéa 2 envisage les effets de la cession des contrats en cours
quand il prévoit «
pour les contrats en cours dont le tribunal a ordonné la
continuation de l’exécution conformément à l’article 47, le cessionnaire est
subrogé au cocontractant cédé dans ses droits et obligations acquis ou
devenus exigibles à partir de la date de cession ».
Il s’en suit que le contrat
cédé doit être exécuté tel qu’il a été conclu et que la cession n’opère pas
novation.
d-la distribution du prix et l’apurement du passif
C’est le commissaire de l’exécution du plan qui procède à la distribution du prix.
En l’absence de contestations, cette distribution doit intervenir dans le délai
d’un mois à partir du recouvrement du prix de la cession. En cas de contestations
entre les créanciers concernant le montant de la créance ou le rang dans le
paiement, l’article 51 prévoit l’application de l’article 464 du CPCC, lequel article
prévoit la procédure de consignation à la caisse de dépôt et de consignation.
Cette distribution n’entraîne pas toujours le désintéressement total de tous les
créanciers. Si tel est le cas, l’article 49 alinéa 2 donne la possibilité aux
créanciers de recevoir le payement intégral de leur créances chez le débiteur,
les coobligés «
les créanciers auront le droit d’agir
les cautions ou
individuellement contre le débiteur, les cautions et les coobligés solidaires
pour la partie de leur créance demeurée impayée »
Le recours contre le débiteur qui est censé en état de cessation de payements
et qui vient de céder son bien au tiers, n’offre pas beaucoup de chances de
recouvrement sauf si on attend que ce débiteur soit en meilleure forme.
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LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS
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- CSEE : Commission de suivie des entreprises économiques
- CNSS: Caisse nationale de sécurité sociale
- CAC : Commissaire aux comptes
- RA : Règlement amiable
- RJ : Règlement judiciaire
- CP : Cessation des paiements
- PO : Période d’observation
- AJ : Administrateur judiciaire
- JC : Juge commissaire
- JORT : Journal officiel de la république tunisienne
- CC : Code de commerce
- CDR : Code des droits réels
- CPCC : Code des procédures civiles et commerciales
- CSC : Code des sociétés commerciales
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