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VOIES DEXÉCUTION (PROCEDURES CIVILES DEXECUTION)
La saisie est une procédure d’exécution forcée qui va permettre à un créancier, qui doit
être munis d’un titre exécutoire, de placer un bien appartenant à son débiteur sous main de
justice dans le but de le faire vendre. Dans les procédures civiles d’exécution d’autres moyens
sont offerts au créancier pour la réalisation de son droit comme la procédure d’expulsion par
exemple.
La saisie présente trois caractères :
- La saisie est une procédure, mais n’est pas caractérisée par le judiciaire,
c’est une procédure extra judiciaire.
- La saisie est une mesure d’exécution qui est finalisée, qui répond à
l’objectif particulier de vaincre la résistance opposée à un créancier par le
débiteur d’une obligation civile. Cela permet de distinguer la saisie d’autres
notions voisines comme l’astreinte, qui est un moyen de pression s’exerçant
sur le débiteur afin de l’inciter à exécuter son obligation civile mais on ne
peut pas le forcer à s’exécuter.
- La saisie suppose l’intervention d’une autorité publique dans la mesure où
elle permet l’exécution forcée, le plus souvent qui est l’huissier de justice.
Il ne faut pas négliger les liens entre ces voies d’exécution et le droit substantiel. Le
droit des voies d’exécution s’intéresse au droit des obligations. Le créancier va avoir un
certain nombre de mesures à sa disposition, des saisies, pratiquée sur des biens. On ne peut
pas non plus par exemple concevoir une procédure particulière telle que la saisie vente sans
avoir à l’esprit l’article 2276 du code civil qui dispose qu’en fait de meuble possession vaut
titre. Dans la mesure où les procédures civiles d’exécution dont écho au droit substantiel il est
nécessaire qu’elles soient en phase avec ce droit. Ces procédures d’exécution vont permettre
l’efficacité du droit substantiel.
Trois éléments permettent de mettre en lumière l’importance des procédures civiles
d’exécution :
- Elles sont essentielles d’un point de vue économique car le ressort essentiel
de l’économie c’est le crédit, qui ne peut fonctionner sans confiance. Toute
crise de confiance entraîne une crise du crédit et une crise économique
subséquente. Un des ressorts des voies d’exécution est de dire à un
opérateur financier qu’il pourra voir la réalisation de son droit.
- D’un point de vue social l’importance des voies d’exécution ne réside pas
tellement dans son efficacité car quand on envisage des voies d’exécution
d’un point de vue social il s’agit d’élargir le point de vue et d’examiner la
relation entre le créancier et le débiteur, et non pas seulement les intérêts du
créancier. Un droit qui ne serait orienté que vers l’efficacité économique ne
pourrait pas être accepté, car tous les droits du créancier ne pourraient pas
tout justifier en matière de contraintes pesant sur le débiteur.
- D’un point de vue politique (au sens large) : considérer les procédures
civiles d’exécution c’est considérer la réalisation effective d’un titre
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exécutoire (décision de justice par exemple). Si on ne peut pas réaliser
concrètement les énoncés du titre exécutoire on aura donc une décision de
justice rendue au nom du peuple français restée lettre morte. Ce qui est en
cause ici c’est l’état de droit, la réalisation effective de la justice. Il s’agit
donc de satisfaire cette composante de l’état de droit et un droit
fondamental de l’être humain.
Il est nécessaire de réviser périodiquement les procédures civiles d’exécution pour
qu’elles ne soient pas coupées du reste du système juridique. Pendant longtemps les voies
d’exécution avaient fait l’objet d’une codification dans le CPC et les voies d’exécution du
début du XIXe sont restées en l’état jusqu’à la fin du XXe. Le droit français des procédures
d’exécution était donc devenu inutile et obselette. Une réforme d’ensemble des procédures
d’exécution a alors été réalisée en deux temps : la réforme des saisies mobilières par la loi du
9 juillet 1991, complétée par le décret du 31 janvier 1992 ; et la réforme des saisies
immobilières réalisée par l’ordonnance du 21 avril 2006, complétée par le décret du 27 juillet
2006.
I - La loi du 9 juillet 1991 et le décret du 31 janvier 1992 (les saisies mobilières)
A) Les objectifs poursuivis par le législateur
Les objectifs poursuivis par le législateur sont des objectifs de 3 ordres : un objectif
économique, un objectif judiciaire et un objectif social. En 1991 le législateur était en
présence d’un droit des voies d’exécution qui datait du XIXe donc il était nécessaire de
l’adapter aux réalités contemporaines, dans ces trois directions.
1] L’objectif économique
Si l’économie suppose le crédit et que l’un des éléments de la confiance est d’offrir
aux créanciers des voies d’exécution efficace encore faut il que ces procédures correspondent
à la réalité économique d’un système à une époque donnée. Le décalage apparaissait à deux
points de vue :
1/ Ces procédures civiles d’exécution étaient inadaptées à la nouvelle
composition des patrimoines. Au début du XIXe la propriété foncière domine mais au
XXe apparaît le développement des moyens bancaires, le développement des valeurs
mobilières, des propriétés incorporelles. De nouveaux biens se sont aussi généralisés
dans un grand nombre de patrimoine comme la voiture mais aucune procédure
d’exécution n’était prévue pour la voiture. Face à la diversification des biens il était
crucial qu’intervienne une diversification des moyens d’action, de contrainte à la
disposition du créancier. On a alors vu apparaître de nouvelles saisies en 1991 comme
la saisie des parts sociales et des valeurs mobilières, des saisies spécialement conçues
pour les voitures, l’amélioration de la saisie appréhension (qui permet à un individu de
récupérer physiquement le bien entre les mains d’un autre individu). La saisie des
créances (saisie arrêt) était coûteuse, longue et faisait intervenir deux fois l’institution
judiciaire. Cette saisie est devenue ensuite la saisie attribution correspondant aux
réalités économiques actuelles (plus attractive et plus efficace).
2/ Le décalage se laissait aussi observer du point de vue du changement de
nature du patrimoine. Tout au long du XIXe la caractéristique majeure est la
dématérialisation des patrimoines. Cette dématérialisation s’est accompagnée d’une
opacité des patrimoines, d’une perte de transparence. Si on veut intenter une saisie des
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biens d’un individu il faut avoir des infirmations, mais la recherche est compliquée
d’un point de vue de l’opacité des patrimoines et de celui de la démographie avec une
population de plus en plus urbaine, ce qui favoriser l’anonymat. A la fin du XXe siècle
la recherche d’informations sur la localisation et la composition des patrimoines est
devenue capitale et le législateur a créé une procédure de recherche d’informations. A
l’origine cette procédure faisait intervenir le ministère public mais une loi de décembre
2010 relative à l’exécution des décisions de justice a supprimé le ministère de cette
procédure de recherche d’information, c’est désormais l’huissier de justice qui mène
seul la recherche d’informations avec les pouvoirs qui étaient autrefois ceux du
parquet. Ce progrès dans l’efficacité des voies d’exécution s’est fait au détriment de
l’équilibre entre les intérêts du créancier et ceux du débiteur.
2] L’objectif judiciaire
Le législateur s’est attaqué à la déjudiciarisation des procédures civiles d’exécution car
dans la philosophie des voies d’exécution de l’ancien CPC de 1806 elles étaient conçues
comme des procès, avec dans le rôle du demandeur le créancier et dans le rôle du défendeur le
débiteur. A la fin du XXe on s’est demandé s’il n’y avait pas un excès de judiciaire dans ces
procédures civiles d’exécution.
L’exemple caractéristique de cet excès est l’ancienne saisie des créances, la saisie
arrêt. Dans cette saisie il y avait deux instances judiciaires pour permettre le paiement du
créancier. L’une des interventions du juge avait lieu au cours de l’instance en validité, qui
permettait au juge de s’assurer que le créancier était effectivement titulaire d’une créance.
Cette instance en validité s’appliquait dans toutes les hypothèses de saisie arrêt, que le
créancier soit dépourvu d’un titre exécutoire ou déjà titulaire d’un titre exécutoire. Le
créancier même muni d’un titre devait attendre tout le développement de la saisie arrêt et
risquait de ne toucher qu’un faible partie de ce qui lui est du car d’autres créanciers se seraient
manifestés entre temps.
L’objectif judiciaire suivi par le législateur a donc été double avec la déjudiciarisation
et la revalorisation du titre exécutoire.
3] L’objectif social
Il est question de l’équilibre qui doit régner entre les intérêts du créancier et ceux du
débiteur, c’est un traitement social, humain de la situation du débiteur. Ces objectifs sociaux
ont été guidés par principalement deux considération, une évolution des mentalités collectives
quant à la situation de débiteur, et un renouvellement des valeurs dans le système juridique
français.
1/ Une évolution des mentalités quant à la condition de débiteur : la condition
du débiteur était au XIXe assez mal vu (voir parallèle avec la situation du failli au
XIXe en droit des procédures collectives), mais s’est aujourd’hui banalisée. Du jour où
l’endettement est devenu quasiment pathologique le regard que l’on porte sur le
débiteur a changé, il est considéré davantage, c’est un personne qu’on va aider à se
sortir d’une société de consommation qui s’est quelque peu emballée. Les voies
d’exécution doivent prendre dûment en compte les intérêts du débiteur pour lui
permettre de se sortir d’une situation délicate.
2/ Le renouvellement de l’échelle des valeurs : parmi les éléments
fondamentaux du système juridique les voies d’exécution n’avaient pas pu anticiper la
montée en puissance des droits fondamentaux, et particulièrement le droit au respect
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de la vie privée et le droit au respect du domicile. Par exemple la saisie vente implique
qu’un huissier se rende au domicile du débiteur pour saisir ses biens meubles
corporels. Que le débiteur le veuille ou non cela suppose que l’huissier puisse entrer
chez le débiteur. Pour autant cet objectif légitime de la protection des intérêts du
créancier ne peut pas être mis en œuvre par n’importe quel moyen, il répondra à des
conditions strictes protégeant le domicile du débiteur.
B) Les moyens retenus par le législateur pour atteindre ses différents objectifs
Ces moyens tournent autour des méthodes misent en œuvre pour parvenir à
l’exécution forcée. Quand on parle de procédure civile d’exécution il n’y a à priori qu’une
seule méthode, la contrainte. Mais la contrainte, si elle est une méthode unique, peut être mise
en œuvre de plusieurs façons.
La contrainte originelle telle que conçue dans les voies d’exécution de 1806 peut être
qualifiée de matérielle, en ce sens que c’est une contrainte qui fait appel à la force. Dans la
société contemporaine de la fin du XXe cette contrainte quasi physique était de plus en plus
mal ressentie et de plus en plus mal vécue car elle était le théâtre de drames humains. Cette
contrainte état jugée trop brutale et son expression s’est à la fois diversifiée et adoucie. Tout
en gardant à l’esprit le souci de l’efficacité des voies d’exécution, le législateur a développé
des formes alternatives de voies d’exécution.
1] La contrainte immatérielle
C’est une contrainte qui se veut moins traumatisante que la contrainte matérielle. Elle
va s’exercer en douceur sur le débiteur comme par exemple avec la saisie attribution. Cette
contrainte juridique a eu toutes les faveurs du législateur en 1991, pour deux raisons : c’est
une saisie qui est de loin la plus efficace de toutes les voies d’exécution et qui bénéficie d’une
certaine priorité.
- L’efficacité : dès lors qu’elle est mise en œuvre la saisie attribution emporte
attribution immédiate de la créance saisie au créancier saisissant. Si la
créance est de 100 le créancier obtiendra 100 au jour de la saisie.
- La priorité dont bénéficie dans certains cas la saisie attribution : quand il
s’agit d’obtenir le paiement d’une petite créance (535 € ou moins : chiffre
fixé par décret) alors que ce n’est pas une créance alimentaire, le créancier
doit d’abord mettre en œuvre une saisie attribution.
2] La contrainte comminatoire
C’est une contrainte adoucie qui prévoit des mesures de contraintes destinées à faire
impression sur le débiteur, afin de signaler au débiteur que le créancier est prêt à aller
jusqu’au bout dans le but d’inciter le débiteur a s’exécuter spontanément. Les techniques
développées au soutien de cette contrainte sont par exemple celle de l’astreinte (ce n’est pas
une voie d’exécution mais une mesure comminatoire), la vente amiable (le débiteur peut dans
le mois qui suit l’acte de saisi vendre les biens saisis à l’amiable). Avec cette dernière
technique le débiteur peut vendre les biens à l’amiable en négociant de gré à gré le prix pour
désintéresser le créancier ou attendre le hasard de la vente aux enchères publiques. On peut
encore citer la création d’une saisie qui entraîne l’immobilisation du véhicule terrestre à
moteur, ce qui peut fortement inciter le débiteur à s’exécuter rapidement.
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3] La contrainte de sauvegarde
La contrainte de sauvegarde n’a pas pour but immédiat de vendre le bien saisi ou de
procéder à l’attribution immédiate de la créance. L’objectif ici c’est d’assurer la conservation
des biens dans le patrimoine du débiteur. En d’autres termes, il s’agit pour le créancier de
sécuriser son gage. Il faut citer ici la saisie conservatoire. Là aussi, on retrouve le soucis
d’efficacité qui a animé le législateur, soucis d’efficacité qui se rencontre ici par la rapidité
avec laquelle le créancier peut recourir à ces saisies conservatoires.
Au terme de l’art. 67 de la loi du 9 juillet 1991, le créancier n’a pas à attendre d’être
titulaire d’un titre exécutoire. Les conditions pour mettre en œuvre la saisie conservatoire sont
doubles : il suffit que la créance paraisse fondée dans son principe et que le créancier justifie
de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de sa créance. Cela préserve son
droit de gage général parce que la saisie conservatoire va avoir pour effet d’entraîner
l’indisponibilité du bien qu’elle frappe. Le débiteur, au jour de la saisie conservatoire, perd
donc le droit de disposer de son bien. Il ne peut plus le céder. Néanmoins, l’art. 67 précise que
lorsque le créancier n’est pas muni d’un titre exécutoire, la saisie conservatoire devra être
autorisée par le juge de l’exécution. Et donc le soucis d’efficacité en matière de saisie
conservatoire et de préservation du droit de gage général apparaît encore à l’art. 68 de la loi
de 1991 puisque dès lors que le créancier est muni d’un titre exécutoire ou dès lors qu’il a
obtenu une décision de justice et même si celle-ci n’a pas force exécutoire, il peut mettre en
œuvre directement une saisie conservatoire, sans solliciter du juge l’autorisation de procéder à
une saisie conservatoire. Concrètement, cela veut dire que dès lors que le créancier relève de
l’art. 68 de la loi de 1991, il peut aller voir directement un HJ à qui il présentera le titre
exécutoire ou la décision de justice et l’HJ, à al seule vue de ces documents, pourra procéder à
une saisie conservatoire.
Comme toujours lorsque l’on recherche la satisfaction des intérêts du créancier, cette
satisfaction ne peut pas se faire à n’importe quel prix, et tout particulièrement au prix du
sacrifice des intérêts d’un débiteur. En matière de saisie conservatoire, si la rapidité de leur
mise en œuvre va dans le sens des intérêts du créancier, la prise en compte des intérêts du
débiteur lui permet en retour de pouvoir contester la saisie conservatoire et d’en obtenir main-
levée parce qu’en effet, vue la facilité avec laquelle cette saisie conservatoire peut être mise
en œuvre, on ne peut pas exclure l’hypothèse d’un créancier abusant de ses droits. Quels types
d’abus ? L’hypothèse sur laquelle a raisonné le législateur c’est l’hypothèse dans laquelle le
créancier va mettre en œuvre la saisie conservatoire alors qu’il n’a pas encore de titre
exécutoire. Dans ce cas on permet au créancier d’agir par la voie de la saisie conservatoire
mais cette saisie va réaliser une importante immixtion dans le patrimoine du débiteur parce
que, d’une part, une fois que la saisie est mise en œuvre le débiteur ne peut plus dispose de ses
biens et que, d’autre part, cette indisponibilité va intervenir à un moment où le créancier ne
peut rien exiger de son débiteur. Où peut se situer le risque d’abus ? Simplement, en utilisant
la saisie conservatoire comme un moyen de pression, voire d’étranglement, du débiteur. En
réponse à cette stratégie de la part du créancier qui consisterait à gêner le débiteur dans la
gestion de ses affaires, le débiteur pourra toujours saisir le juge de l’exécution pour obtenir
main-levée de cette saisie, cad retrouver la libre disposition de ses biens. Même dans cette
hypothèse, le législateur a recherché une solution d’équilibre entre les intérêts du créancier et
ceux du débiteur puisqu’au terme de l’art. 72 al. 2 de la loi de 1991, le juge de l’exécution, en
toute hypothèse (soit au moment où il est saisi par le créancier pour autoriser la saisie
conservatoire (en amont de la saisie), soit en aval de la saisie au moment de la contestation de
la saisie par le débiteur), il peut substituer à la mesure conservatoire sollicitée ou autorisée
toute autre mesure propre à sauvegarder les intérêts des parties (une sûreté judiciaire, une
hypothèque prise sur des immeubles appartenant à l’entreprise, etc).
Donc cette réforme opérée en 1991 est extrêmement importante qui a cherché à donner
une arme et une efficacité aux procédures civiles d’exécution mais une réforme qui en son
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temps a été critiquée. Quelles critiques ? La première critique c’est que l’on a regretté le
domaine limité de cette réforme puisque la loi ne concerne que les saisies mobilières. Cette
critique n’a plus lieu d’être puisqu’avec l’ordonnance de 2006 les saisies mobilières ont été
réformées. La deuxième critique c’est qu’on a regretté que le traitement des personnes
publiques dans la perspective des saisies se soit limité à retranscrire sans aucune évolution les
solutions existantes, tout particulièrement ont été conservées l’affirmation de principe de
l’immunité des personnes publiques et l’insaisissabilité des biens des personnes publique. La
troisième critique c’est que l’on a regretté également que l’autorité publique ait la possibilité
de refuser le concours de la force publique pour aboutir à une exécution forcée et donc à une
réalisation concrète des droits du créancier.
II – L’ordonnance du 22 avril 2006
L’ordonnance du 22 avril 2006 a procédé à la réforme des saisies immobilières. Et, en
France, c’est une question de droit civil, ce qui explique pourquoi les dispositions relatives
aux saisies immobilières durent dans le CC.
Cette réforme prolonge ou s’inscrit dans le prolongement de la loi du 9 juillet 1991
puisque l’un des apports fondamentaux de cette loi c’est d’avoir constitué un droit commun
des saisies. On retrouve une certaine communauté d’esprit en ce sens que le législateur a été
animé par un souci d’efficacité de ces saisies immobilières. Ce souci d’efficacité a constitué
pour l’essentiel à simplifier la procédure et on remarque un effort qui s’est porté sur une
réduction des coûts et des lenteurs de cette saisie immobilière. On doit néanmoins observer
une différence essentielle puisque les procédures civiles d’exécution présentent la
caractéristique d’être des procédures extra-judiciaires. On peut donc avoir une saisie
mobilière qui n’implique pas l’ombre d’un juge. En revanche, la saisie immobilière reste par
principe une procédure judiciaire.
Mais cette procédure s’est néanmoins simplifiée est rapprochée de l’esprit de la loi de
1991. Pourquoi ? Parce qu’il s’agisse des saisies mobilières ou immobilières, désormais c’est
le même juge qui va en connaître, cad que le juge compétent est le juge de l’exécution. De la
même façon, le législateur s’est employé à réduire le domaine de la vente forcée. Si le
domaine de la vente forcée a été restreint, cela veut dire que le domaine de la vente amiable
s’est élargi. Donc cette vente amiable peut toujours être autorisée par le juge (audience
d’orientation) (art. 2201 CC). Toujours dans l’équilibre qu’il convient d’instaurer entre les
intérêts du créancier et ceux du débiteur, les droits du débiteur ont été sensiblement renforcés,
notamment la possibilité qui est offerte au débiteur de contester le montant de la mise à prix
de l’immeuble lorsque l’immeuble est destiné à être proposé aux enchères publiques. Si le
juge accueille cette contestation, c’est lui qui fixera le montant de la mise à prix et ce prix il le
fixera en fonction de la valeur vénale de l’immeuble et en fonction des conditions du marché
de l’immobilier au lieu de situation de l’immeuble. Cette disposition était attendue ou du
moins quelques rapporteurs avaient créé cette attente parce que cette possibilité de contester la
mise à prix permet d’entraver les opérations spéculatives. Pourquoi ? Parce que paraît-il, du
moins c’est ce qui figure dans un rapport pour solliciter la réforme des saisies immobilières,
que la très grande majorité des immeubles étaient revendus moins de trois ans après
l’adjudication pour un prix majoré en moyenne de 70%. Il se dit néanmoins que ce chiffre a
été avancé sans aucune justification et que les éléments qui permettaient d’établir cet élément
factuel ont été présentés. Toujours dans le sens d’une protection des droits du débiteur, le
législateur a maintenu la prohibition de la clause de voie parée (art. 2201 al. 2 CC), cad la
clause par laquelle le débiteur autoriserait le créancier à vendre à l’amiable l’immeuble en
évitant une procédure judiciaire. Ce maintien de la prohibition de la clause de voie parée est
tout à fait remarquable puisque dans le même temps, par l’ordonnance du 23 mars 2006, le
législateur avait autorisé sous certaines conditions la conclusion des pactes commissoires qui
permet au créancier titulaire d’une sûreté de devenir automatiquement propriétaire du bien sur
lequel porte la sûreté. L’art. 2459 CC autorise la convention par laquelle le créancier titulaire
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d’une hypothèque devient de plein droit propriétaire de l’immeuble de son débiteur si ce
débiteur n’acquitte pas sa dette sous certaines conditions puisque l’art. exclue le pacte
commissoire lorsque l’immeuble sur lequel porte l’immeuble constitue la résidence principale
du débiteur. La logique de tout cela est difficile à percevoir. Ici, il y a une articulation qui se
fait difficilement entre la prohibition de la clause de voie parée d’un côté et l’admission des
pactes commissoires de l’autre.
La première caractéristique essentielle c’est de constater qu’il existe depuis 1991 un
corps de règles communes à l’ensemble des saisies, cad qu’il y a un droit commun des
procédures civiles d’exécution mais cela n’empêche pas la pluralité des saisies. Et, au-delà de
ces différentes saisies, il faut s’intéresser à l’aboutissement de la procédure qui bien souvent
génère une somme d’argent qu’il faut attribuer et le plus souvent distribuer. Se dégage donc
trois masses : un premier pôle qui va regrouper les règles communes aux différentes PCE, un
corps de règles spéciales qui détermine et organise chaque PCE particulière et enfin des règles
s’intéressant à l’issue de la procédure et à la procédure de distribution des deniers.
Partie 1 : LES REGLES COMMUNES AU
DIFFERENTES SAISIES
Titre 1 : LES CONDITIONS
Chapitre 1 : LES CONDITIONS RELATIVES AUX PERSONNES
Ces personnes sont désignées par les art. 22 et s. de la loi du 9 juillet 1991 qui sont
regroupés dans une section IV qui s’intitule « les parties et les tiers ».
SECTION 1 : Le créancier saisissant
Il bénéficie d’un authentique droit de saisir et ce droit de saisir n’est pas absolu. Il
connaît certaines limites.
I - L’affirmation du droit de saisir
On rencontre cette affirmation dans l’ordre juridique interne mais c’est aussi un droit
fondamental qui s’appuie sur les textes internationaux relatifs aux droits de l’Homme, et tout
particulièrement sur la CEDH.
A. Dans l’ordre interne
Dans l’ordre interne, ce droit de saisir est affirmé non seulement en matière mobilière
mais également en matière immobilière. Pour les meubles, cette affirmation figure à l’art. 1
er.
Cette affirmation vaut également pour la matière immobilière et a été rappelé dans le CC à
l’art. 2191.
Cela veut dire que toute personne qui a la qualité de créancier peut procéder à une
saisie. Du point de vue de la mise en œuvre des PCE, de l’exercice du droit de saisir, il n’y a
aucune distinction à faire entre les créanciers, qu’ils soient privilégiés ou de simples
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chirographaires. L’affirmation d’un droit de saisir n’est rien de plus que le corollaire d’un
droit de gage général. S’il faut maintenir des distinctions entre les créanciers, c’est
uniquement à l’issue de la procédure cad au moment de la distribution des deniers.
B. Dans l’ordre international
Ce droit de saisir va trouver un renfort dans les stipulations de la CEDH telle
qu’interprétée par la CourEDH. A cet égard, la convention va consacrer un droit de saisir de
manière à la fois indirecte et directe.
La consécration indirecte n’aboutit pas à l’expression d’un droit de saisir mais
indirectement le créancier peut bénéficier de la convention parce que, dans la mesure où le
créancier va être titulaire d’un titre exécutoire qui constate une créance certaine ou actuelle,
liquide et exigible, ce créancier se trouve titulaire d’un bien au sens de l’art. 1
er du Protocole
n°1 additionnel à la CEDH. Le fait qu’un bien ne renvoie pas simplement au monde des biens
corporels mais qu’il s’étende également aux biens incorporels résulte d’une interprétation
fournie par la Cour dans un arrêt du 9 déc 1994 rendu dans l’affaire « Raffinerie grecque
STRAN et STRATIS ANDREADIS ». Puisque le créancier titulaire d’une créance certaine ou
actuelle, liquide et exigible est titulaire d’un droit, toute entrave à la réalisation de son droit
s’analysera comme une restriction à l’usage de son bien, voire comme une privation de son
bien. Dans la mesure où le débiteur refuse d’honorer sa créance, le débiteur prive le créancier
d’un de ses biens. Donc reconnaissance indirecte puisque l’exécution effective n’est
proclamée ici que par le détour du droit au respect des biens.
La CourEDH est allée bien au-delà puisqu’elle a très directement consacré un droit de
saisir. Cette consécration directe d’un droit de saisir procède d’une recherche d’effectivité des
droits garantis par la CEDH puisque selon la formule récurrente du contentieux strasbourgeois
issu d’une affaire « AIREY c/ Irlande » : « la CEDH garantie des droits non pas théoriques et
illusoires mais concrets et effectifs ». Cette recherche d’effectivité va la conduire à livrer une
interprétation amplifiante de l’art. 6 de la CEDH, lequel art. 6 s’intitule « droit au procès
équitable ». Si on regarde le contenu de cet art., on rencontre des garanties institutionnelles et
procédurales.
Dans un premier temps, la CourEDH, au milieu des années 70, avait considéré que ces
garanties procédurales seraient vides de sens si l’on ne protégeait pas ce qui seul permet d’en
bénéficier. Qu’est-ce-qui permet de bénéficier d’un tribunal impartial et indépendant ? Cela a
conduit la Cour à prononcer la garantie du droit d’accès au juge en 1975 dans l’arrêt
« GOLDER c/ RU ».
Quelques années plus tard, la CourEDH a appliqué ce même raisonnement à l’issue de
la procédure dans un arrêt rendu le 19 mars 1997 dans une affaire « HORNSBY c/ Grèce ».
Le raisonnement adopté par la Cour est celui-ci : pour des considérations tirées de l’effectivité
du droit à un tribunal, la Cour va reconnaître officiellement l’existence d’un droit à
l’exécution des décisions de justice, un droit qui vise une variété de titres exécutoires
(décisions de justice) mais ce droit à l’exécution ne se limite pas aux décisions de justice
puisque, peu de temps après l’arrêt « HORNSBY », la CourEDH a étendu ce droit à
l’exécution à l’égard d’un acte notarié exécutoire. Cela a été notamment réalisé par un arrêt de
la Cour du 21 avril 1998 dans une affaire « ESTIMA JORGE c/ Portugal ». Puisqu’on est
passé des décisions de justice aux actes notariés, la doctrine a tendance à considérer qu’au
terme de cette dernière JP, que ce droit à l’exécution vaut plus généralement pour l’ensemble
des titres exécutoires et qui constitue directement l’affirmation d’un droit de saisir au profit
des titulaires de ce titre exécutoire. Qu’est-ce-que cela implique du point de vue du droit
européen des droits de l’Homme ? Ce droit à l’exécution est envisagé comme un droit
classique au sein du droit européen des droits de l’Homme puisqu’il génère à la charge de
l’Etat à la fois des obligations négatives et des obligations positives. Les obligations négatives
cela signifie que l’Etat doit s’abstenir d’entraver l’exécution d’un titre exécutoire. Mais au-
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delà de cette obligation d’abstention, l’Etat a également à sa charge une obligation positive,
cad l’obligation de mettre en œuvre des moyens raisonnables et adéquats pour assurer
l’exécution effective des titres exécutoires. L’existence de cette obligation positive a suscité
quelques inquiétudes. Là encore, la CourEDH s’est employée à limiter les conséquences pour
l’Etat de la reconnaissance de ce droit à exécution parce que, au lendemain de l’arrêt
« HORNSBY », l’une des premières craintes formulées consistait à dire que le droit à
exécution allait aboutir à contraindre les Etats à généraliser le système de l’exécution
immédiate car une décision de justice constitue un titre exécutoire dès lors qu’elle a la force
exécutoire. Si l’on reconnaît ce droit à l’exécution, est-ce-que cela signifie la mort de l’effet
suspensif des voies ordinaires de recours (appel) ? Cette crainte a été de courte durée puisque
la CourEDH a précisé que ce droit à l’exécution ne valait que pour les décisions de justice
définitives et obligatoires. Cela résulte d’un arrêt rendu le 18 avril 2002 dans une affaire
« OUZOUNIS c/ Grèce ». Le droit européen des droits de l’Homme reste un minimum qui
n’empêche pas les Etats d’aller au-delà dans la protection des droits de l’Homme. La Cour a
encore précisé que ce droit à l’exécution supposait encore une décision ferme, rendue en des
termes clairs, ne prêtant aucune discussion quant à son contenu. Concrètement, cela implique
que tout Etat membre du Conseil de l’Europe et donc parties à la CEDH mette en place un
système accessible à tous de nature à assurer l’exécution, le cas échéant par la force, des titres
exécutoires. En d’autres termes, il faut que chaque Etat instaure dans son ordre juridique des
procédures civiles d’exécution efficaces. Cette obligation va avoir des incidences, à la fois à
l’égard des débiteurs personnes publiques et à l’égard des débiteurs personnes privées. A
l’égard des débiteurs personnes publiques, la CourEDH se montre particulièrement
intransigeante puisqu’elle estime « qu’une autorité de l’Etat ne saurait prétexter du manque de
ressource pour ne pas honorer une dette fondée sur une décision de justice » (CEDH, 6 sept
2005, « BURDOV c/ Russie »). Lorsque le débiteur est une personne privée, les choses sont
différentes parce qu’au lendemain de l’arrêt « HORNSBY », la doctrine s’est interrogée sur
les conséquences de ce droit pour l’Etat lorsque le débiteur personne privée est défaillant. Si
le débiteur personne privée n’a pas acquitté sa dette et que les voies d’exécution sont
inefficaces car il est insolvable, ne pourrait-on pas imaginer que l’Etat aurait l’obligation
d’indemniser le créancier ? Cette conséquence, la CourEDH l’a exclu en des termes très
clairs, notamment dans une décision sur la recevabilité prononcée le 6 juin 2000 dans une
affaire « DACHAR c/ France ». Dans cette décision, la CourEDH prend le soin de préciser
que ce qui s’impose à l’Etat en revanche c’est d’offrir au créancier un système d’exécution
forcé accessible à tous (à tous les créanciers). Si un créancier n’a pas accès à ce système parce
qu’il n’en a pas les finances, une question pourrait se poser sur le terrain de l’art. 6 CEDH.
Cela suggère que l’Etat doit prévoir une aide financière pour les créanciers impécunieux pour
leur permettre de profiter du système d’exécution forcée. Et, dans la mesure où en droit
français l’aide juridique peut être sollicitée par les créanciers pour mettre en œuvre une
procédure civile d’exécution, la CourEDH a reconnu que l’Etat avait satisfait aux obligations
qui pèsent sur lui au titre du droit à exécution (CEDH, 27 mai 2003, « SANGLIER c/
France »).
II - L’exercice du droit de saisir
Pour exercer ce droit de saisir, encore faut-il la capacité juridique suffisante pour
accomplir une saisie.
Pour les PCE, l’art. 26 de la loi du 9 juillet 1991 va expressément qualifier la saisie et
la classer parmi les actes juridiques : « sauf disposition contraire, l’exercice d’une mesure
d’exécution et d’une mesure conservatoire est considérée comme un acte d’administration
(…) ». Autrement dit, l’acte de saisie, qu’il s’agisse d’une saisie d’exécution ou d’une saisie
conservatoire, est expressément qualifié d’acte d’administration. Puisque l’on a souhaité
déjudiciariser les PCE, il aurait été excessif d’imposer aux créanciers la capacité d’ester en
9
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justice pour intenter une saisie. La seule capacité exigée pour les PCE est la capacité
d’administrer, de gérer son patrimoine.
Cet art. 26 de la loi de 1991 repose sur une articulation classique qui va du principe à
l’exception. Le principe c’est la capacité d’administrer mais ce principe est assorti de deux
types d’exceptions. En tête de l’art. 26, il apparaît l’expression « sauf disposition contraire ».
Parmi ces dispositions contraires, à quoi pourrait-on penser ? On peut entendre par exemple
les dispositions relatives aux saisies immobilières. La seconde catégorie d’exceptions apparaît
à la fin de l’art. 26 par l’expression « sous réserve des dispositions du CC relatives à la
réception des deniers ». La réception des derniers à l’issue de la PCE est un acte de
disposition.
Une fois ces actes qualifiés, on peut déterminer les personnes pouvant intenter une
PCE. A priori, il faut être capable majeur ou mineur émancipé. La question peut se poser dès
lors que le créancier saisissant va être un majeur bénéficiant d’un régime de protection. Sous
sauvegarde de justice, il ne va alors y avoir aucune conséquence, mise à part la possibilité
d’obtenir plus facilement les actes juridiques passés ou une réduction des actes pour excès.
Mais le majeur sous sauvegarde de justice pourrait très bien accomplir seul une saisie
exécution ou conservatoire. Pour le majeur placé sous curatelle, en principe le curateur va
accompagner le majeur sous curatelle dans l’accomplissement des actes juridiques mais
uniquement pour les actes les plus graves, cad les actes de disposition. Autrement dit, le
curateur doit contresigner l’acte passé. Donc or réception des deniers, le majeur sous curatelle
peut accomplir seul une saisie conservatoire ou d’exécution. Pour le majeur placé sous un
régime de tutelle, le tuteur représente le majeur dans tous les actes de la vie civile. Sauf
configuration particulière décidée par le juge, c’est le tuteur qui devra agir au nom et pour le
compte du tutélaire en matière de PCE. Donc l’exercice du droit de saisir suppose d’abord la
capacité.
Ce créancier, une fois que sa capacité juridique est vérifiée, dispose d’une très grande
liberté dans la mise en œuvre des PCE. Cette très grande liberté apparaît à l’art. 22 al. 1
er de la
loi de 1991 puisque ce texte précise que « le créancier a le choix des mesures propres à
assurer l’exécution ou la conservation de sa créance ». Cela veut dire que le créancier peut
tout d’abord choisir entre la voie d’exécution ou la voie conservatoire. En ce sens, il n’y a
aucune hiérarchie qui s’impose au créancier. Une fois qu’il a fait ce choix, le créancier
dispose encore d’une très grande liberté quant à la mesure à mettre en œuvre. Par exemple s’il
décide de recourir à l’exécution forcée, a priori il peut choisir entre les différentes saisies que
lui offre le droit français des différentes PCE (saisie-vente, saisie-attribution, saisie
immobilière, etc). Cela étant, cette liberté de choix n’a rien d’absolue. Cette liberté rencontre
certaines limites, limites qui par exemple vont restreindre le choix de la mesure à mettre en
œuvre par le créancier ou qui vont restreindre également le choix des biens sur lesquels va
porter la saisie. A titre d’illustration de la première limite, on peut prendre un exemple déjà
cité qui est l’exemple de la saisie qui va être intentée en vue du recouvrement d’une créance
modeste (inférieure à 535 €) dès lors qu’elle a une nature autre qu’alimentaire. Dans ce cas là,
il y a une véritable priorité pour la saisie-attribution et ce n’est qu’à titre subsidiaire (cad
lorsque la saisie-attribution est impossible) que le créancier pourra se reporter sur la saisie-
vente. Le créancier n’a pas toujours le choix des biens à saisir. Ce type de limitation se
rencontre essentiellement en matière de saisie immobilière (
Ex tirés de l’art. 2192 CC : L’al.
1
er précise qu’un créancier ne peut intenter une nouvelle procédure de saisie immobilière
qu’en cas d’insuffisance des biens déjà saisis ; L’al. 2 dispose que « le créancier ne peut saisir
les immeubles qui ne sont pas hypothéqués en sa faveur que dans le cas où l’hypothèque dont
il bénéficie ne lui permet pas d’être rempli de ses droits ». L’al. 2 cherche à réaliser un
équilibre entre les intérêts du débiteur et les intérêts du créancier saisissant mais ce texte vise
également à assurer un certain équilibre entre les différents créanciers d’un même débiteur, ce
qui fait que le créancier privilégié doit d’abord poursuivre la réalisation de sa créance sur
l’immeuble sur lequel il détient des droits. Si le créancier hypothécaire fait le choix de la
saisie immobilière, le bien objet de la saisie sera le bien grevé par l’hypothèque). Au-delà de
10
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ces restrictions ponctuelles, l’exercice du droit de saisir connaît une limitation générale parce
que toute saisie, qu’elle soit mobilière ou immobilière, est soumise à une exigence de
proportionnalité. Cette exigence de proportionnalité figure également à l’art. 22 de la loi du 9
juillet 1991. Une exigence de proportionnalité en ce sens que la saisie mise en œuvre ne doit
pas excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation. A côté de
cette exigence de proportionnalité, il existe formellement une autre limite générale. La loi
précise également à l’art. 22 al. 2
nd que l’exercice du droit de saisir ne doit jamais dégénérer
ou révéler un abus. Si le juge est convaincu que l’exercice du droit de saisir est abusif, il peut
ordonner la main-levée de la saisie et une condamnation à DI. Formellement, il y a donc deux
limites générales : le principe de proportionnalité et la réserve de l’abus de droit. Si ces deux
limites existent formellement, il est douteux qu’elles aient véritablement une autonomie,
indépendance l’une par rapport à l’autre. A la lumière de la JP, on a bien l’impression qu’il y a
une superposition de l’abus et de la proportionnalité. Pourquoi « superposition » ? Parce
qu’on a l’impression qu’est abusive la saisie disproportionnée, comme sera jugée
disproportionnée toute saisie abusive. On peut donc penser que l’abus va notamment
s’apprécier au regard de la proportionnalité. Dans un arrêt rendu par la 2
ème chambre civile de
la Ccass le 10 mai 2007, la Ccass va préciser que « la saisie ne doit pas excéder ce qui est
nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation ». Mais la Ccass va ajouter que pour
l’appréciation de cet excès, de cette proportionnalité, « il faut tenir compte du montant de la
créance et de l’attitude du débiteur ». Et là la Ccass ajoute au texte. Et donc on en arrive à un
glissement entre la proportionnalité et l’abus. Pourquoi ce glissement ? En l’espèce, il
s’agissait d’un copropriétaire qui s’obstinait à ne pas payer certaines charges de la
copropriété, charges qui avaient été fixées par deux délibérations de l’AG des copropriétaires.
Pour lui, ces décisions étaient irrégulières et donc privaient de fondement les charges qui lui
étaient réclamées. Face à ce refus, le syndicat des copropriétaires a engagé une saisie
immobilière qui a abouti à la vente forcée de l’appartement du débiteur. Mais postérieurement
à la vente forcée, le débiteur a obtenu en justice une décision définitive prononçant la nullité
des deux délibérations de l’AG des copropriétaires et donc les charges n’existaient pas et donc
la saisie immobilière a été intentée pour recouvrer une obligation totalement inexistante. Ce
copropriétaire a rechargé la responsabilité du syndicat de copropriétaires. Les juges du fond
ont rejeté la demande et la Ccass a annulé cette décision parce qu’elle a estimé que les juges
du fond auraient du rechercher si le principe de proportionnalité avait été respecté, « d’autant
que le créancier saisissant avait fait pratiquer une saisie sur les rémunérations du prétendu
débiteur ». Donc on voit distingue mal l’abus du droit de saisir de la saisie disproportionnée.
SECTION 2 : Le débiteur saisi
§ 1 : Le principe
A priori, les PCE ont à l’égard du débiteur la même généralité qu’à l’égard du
créancier donc tout débiteur peut faire l’objet d’une saisie. C’est ce que rappelle l’art. 13 de la
loi de 1991 qui précise que « les saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au
débiteur, alors même qu’ils seraient détenus par des tiers ».
Si tout débiteur peut faire l’objet d’une PCE, dans certaines situations la procédure ne
sera pas forcément dirigée contre ce débiteur. Cela vise tout particulièrement les cas dans
lesquels le débiteur est soumis à un régime de représentation. Dans ces cas là, la procédure
sera dirigée contre son représentant. Cela vise le mineur sous administration légale ou sous un
régime de tutelle, le majeur placé sous tutelle. Pour le majeur placé sous curatelle, la
procédure peut être dirigée contre le débiteur mais il faut lui signifier tous les actes de
procédure et de saisie et faire cette signification également au curateur. Ce principe
d’apparence très simple peut néanmoins, dans certaines situations, susciter de particulières
difficultés sur le point de savoir contre qui on peut intenter une saisie. A titre d’illustration, on
peut citer l’incidence que peut avoir le droit des régimes matrimoniaux sur la mise en œuvre
11
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d’une PCE. Lorsqu’une dette a été contractée par un époux marié, le créancier peut surement
agir contre cet époux mais la question qui va se poser c’est de savoir quels biens saisir. En
outre, n’y-a-t’il pas également lieu d’informer le conjoint de la procédure ? Ne faut-il pas
même intenter une procédure contre les deux époux ? Ce qui vaut pour les époux vaut
également pour les débiteurs qui seraient liés par le PACS par exemple.
II – Les exceptions
Les plus significatives concernent la reconnaissance d’une immunité d’exécution au
profit de certains débiteurs. Elles sont reconnues dans leur principe par l’article 3 al. 1 de la
loi du 9 juillet 1991. Ces immunités vont bénéficier principalement à deux catégories de
débiteur : les PM de droit public françaises et les PM de droit public étrangères.
Les personnes morales françaises de droit public
: l’Etat, les régions, les départements,
les communes et les établissements administratifs (autres que EPA et EPIC). Cette immunité
est attachée à la personne du débiteur même si elle n’est pas affirmée directement. Elle trouve
une reconnaissance indirecte par l’affirmation de l’insaisissabilité des biens appartenant à une
personne publique. Ce n’est pas la nature particulière des biens qui justifie cette
insaisissabilité mais elle est commandée par la personne qui en est propriétaire. A l’origine ce
principe trouvait sa source dans la jurisprudence : Tribunal des conflits du 8 décembre 1899
Association communale du canal de Gignac qui précise que les voies d’exécution du droit
privé ne peuvent pas être diligentées contre les établissements publics ; et cette règle est
devenue un PGD par un arrêt 1
e Civ. 21 décembre 1987 Bureau de recherche géologique et
minière qui affirme le principe selon lequel les biens des personnes publiques sont
insaisissables. Aujourd’hui ce principe, d’où découle l’immunité en question, figure dans la
loi et dans l’article L. 2311-1 du CG3P (code général de la propriété des personnes publiques).
Cette insaisissabilité des biens appartenant aux personnes publiques s’explique par 3 raisons :
o 1er argument qui consiste à dire que la personne publique est toujours
solvable donc cela ne sert à rien de lui appliquer une voie d’exécution
du droit privé. Mais cet argument ne tient pas car ces voies d’exécution
vise à briser la réticence du débiteur donc la solvabilité ne justifie en
rien cette insaisissabilité.
o Le respect des règles de la comptabilité publique, la séparation de
l’ordonnateur et du comptable et l’idée qu’une personne publique ne
peut payer que pour service fait. Là encore ce ne sont pas ces règles de
comptabilité qui pourraient justifier la mise à l’écart de la voie
d’exécution de droit privé.
o Ce qui permet en réalité d’expliquer cette immunité c’est l’idée de
puissance publique qui fait que contre l’Etat, les personnes publiques,
on ne saurait appliquer des dispositions de droit privé car en principe il
n’y a pas d’égalité entre une personne de droit privé et une personne de
droit public. La clause exorbitante de droit commun est un indice de la
qualification du contrat administratif.
Cela étant on peut s’interroger de la compatibilité de cette immunité avec la CEDH car
un rapport établit par la Commission EDH (faisait partie du Conseil de l’Europe et supprimée
en 1998). Dans une affaire du 6 mars 1990 Dierckx c/ Belgique la Commission a été appelée à
se prononcer sur la compatibilité de l’immunité d’exécution de l’Etat Belge au regard des
articles 1 du Protocole n°1 (droit au respect des biens) et 13 de la Convention (droit au
recours effectif). Dans cette affaire le requérant était titulaire d’un titre exécutoire, d’une
décision de justice, qui constatait une créance exigible mais qui n’était pas encore liquide (pas
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encore d’expression monétaire). La liquidation de la créance était suspendue à un acte
volontaire de la part des autorités publiques belges. Cette opération de liquidation qui
dépendait de la seule volonté du débiteur n’est jamais intervenue, le requérant se plaignait
alors de cette inaction en méconnaissance de son droit au respect des biens. La Commission a
considéré que cette situation emportait méconnaissance de l’article 1 du Protocole n°1 et que
« compte tenue de l’immunité d’exécution dont bénéficie l’Etat Belge il y a lieu de conclure,
en l’absence de contestations du gouvernement belge, que les requérants ne disposaient
effectivement d’aucunes voies de recours pour contraindre l’Etat à s’exécuter », donc
violation de l’article 13 de la Convention. L’immunité est visée comme une violation du droit
au recours effectif. Mais cette décision mérite d’être relativisée à deux points de vue : elle a
été acquise en l’absence d’objections du gouvernement belge qui ne s’est pas défendu donc ce
qui laisse en suspend l’hypothèse où un Etat va essayer de défendre son immunité. D’autre
part et surtout si l’immunité d’exécution française exclue le droit commun des voies
d’exécution et plus précisément les voies d’exécution du droit privé, cette immunité ne fait
pas obstacle au développement de procédures spécifiques au profit du créancier contre le
débiteur personne publique. Ces procédures résultent de la loi du 16 juillet 1980 (astreinte
contre les personnes publiques) et de la loi du 8 février 1995 (reconnaissance du pouvoir de
prononcer des injonctions à l’égard de l’administration au profit du JA). Le dispositif de la loi
de 1980 figure à l’article L. 911-9 du CJA, il prévoit un dispositif de paiement forcé des
créances dont l’administration est débitrice. Le comptable qui ne s’exécuterait pas encourt une
amende d’un minimum 150 euros et au maximum un an de salaire à la date de l’inexécution.
L’immunité d’exécution des personnes morales de droit public étrangères
(ambassades, consulats, etc.) : cette immunité se justifie par l’idée que l’exercice d’une saisie
contre un Etat étranger serait attentatoire à la souveraineté étrangère. Cela signifie que tant
que la personne étrangère en cause n’a pas renoncé à son immunité il y a un obstacle absolu à
la mise en œuvre d’une procédure civil d’exécution. L’immunité bénéficie d’un régime
procédural particulièrement efficace puisqu’elle constitue une fin de non recevoir. La fin de
non recevoir peut être soulevée en tout état de cause et même devant la Cour de cassation
pour la première fois. Un débiteur jusqu’à l’ultime audience devant la Cour de cassation peut
opposer son immunité d’exécution. Si le juge prononçait une voie d’exécution ou ordonnait
une voie d’exécution contre un Etat étranger ce serait une méconnaissance de son pouvoir
juridictionnel, et cela ouvre un REP judiciaire afin de sanctionner le juge qui a méconnu
l’étendu de son pouvoir juridictionnel.
Mais la Cour de cassation en entrepris de limiter le domaine de l’immunité de
l’exécution à certains biens pour améliorer le sort des créanciers privés. C’est remarquable car
au regard de l’immunité traditionnel ce n’est pas le bien qui réalise l’atteinte à la souveraineté
de l’Etat créancier mais l’acte de saisi en lui-même. La Cour a distingué deux catégories de
biens pour concilier ces deux objectifs d’amélioration du sort du créancier et d’immunité de
l’Etat créancier : les biens affectés à l’exercice de la souveraineté ou une activité de SP et pour
cela l’Etat étranger bénéficie d’une immunité pleine et entière ; et les biens affectés à une
activité économique ou commerciale développé par l’Etat étranger qui sont saisissables. Dès
lors que l’Etat se comporte comme une personne privée il n’y a aucun obstacle de principe à
entreprendre une saisie. Cette restriction du domaine de l’immunité résulte d’un arrêt 1
e Civ.
14 mars 1984 Affaire Eurodif. Néanmoins cette distinction qui se conçoit concrètement assez
difficilement avec d’un côté les activités de puissance publique et de l’autre les activités
économiques et commerciales. Quand ces dernières concernent des entreprises dont le seul
actionnaire est l’Etat étranger et qui vont exploiter des biens pas très éloignés de l’idée de
souveraineté (ressources de compagnies pétrolières par exemple) cela pose difficulté.
Cette question d’immunité a été portée devant la Cour de Strasbourg qui a rendu une
décision du 12 décembre 2002 dans une affaire Kalogero Poulou et c/ Grèce et Allemagne. Un
ressortissant grec titulaire d’une créance contre l’Etat allemand a voulu saisir des avoirs
13
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allemands situés en Grèce. Mais en Grèce il fallait d’abord recueillir l’autorisation du
Ministre de la justice grec qui a refusé. Le requérant a estimé que cette décision emportait
violation de l’article 1 du Protocole n°1 et de l’article 6§1 de la Convention sur l’exécution
des décisions de justice. La CEDH a estimé que l’impossibilité de saisir les avoirs du fait de
l’immunité n’emportait pas violation ni de l’article 6 de la Convention ni de l’article 1 du
Protocole n°1. Selon la Cour l’immunité est une règle généralement communément admise
dans l’ordre internationale et la CEDH est aussi un élément du droit international, donc
puisqu’il existe en DIP une règle d’immunité il faut considérer qu’elle considérer qu’elle
constitue une limitation inhérente au droit à l’exécution des décisions. Mais la créance des
requérants sur l’Etat allemand n’était pas perdue parce que on peut supposer que le Ministère
grec autorisera les saisies et les créanciers peuvent toujours agir en Allemagne.
D’autres mécanismes peuvent bloquer une procédure civile d’exécution : procédure
collective : emporte suspension des poursuites individuelles, délai de grâce de l’article 244-1
du code civil : retarde l’exigibilité de la créance.
Section III – Les tiers
Ils sont mentionnés à l’article 24 de la loi du 9 juillet 1991 sans autres précisions.
I – La notion de tiers
Puisque la loi de 91 comporte une section intitulée « les parties et les tiers » on va
suppose que ce sont tous ceux qui ne sont pas partie (donc autre débiteur et créancier).
2 illustrations sur les tiers :
Dans la loi de 91 ils apparaissent d’abord à l’article 13 : ici ce sont les personnes entre
les mains de qui une saisie va être pratiquée, étant précisé que la procédure civile d’exécution
n’est pas dirigée contre ces tiers mais contre le débiteur saisi. Il y aura ici un tiers saisi parce
qu’il va détenir des biens appartenant au débiteur. Tous les biens du débiteur ne sont pas
nécessairement en sa possession. Ce tiers saisi peut avoir à sa disposition des biens corporels,
mais il peut aussi être débiteur du débiteur saisi. Dans ce dernier cas cela signifie qu’à l’égard
de ce tiers le débiteur saisi est son créancier et le tiers saisi a dans son patrimoine des sommes
qui normalement doivent revenir au débiteur saisi. La saisie attribution est une procédure qui
impliquera toujours un tiers.
Au-delà de cette première catégorie il y a toutes les personnes qui vont jouer un rôle
dans le déroulement des opérations de saisie. Ces personnes sont par exemple celles dont le
concours est indispensable à l’exécution de la mesure. Par exemple si l’huissier doit dresser
l’inventaire des biens saisis au domicile du débiteur saisi et que celui-ci n’est pas saisi,
l’huissier peut entrer de force dans son domicile en faisant appel à un tiers dont le concours
sera indispensable à la saisie, un serrurier. A côté de ces personnes il y a aussi des personnes
qui vont intervenir dans le déroulement général de la procédure civile d’exécution, ce sont les
personnes qui vont aider à la recherche d’informations sur le débiteur et sur la composition de
son patrimoine.
Chercher à identifier les tiers c’est cherché des personnes qui vont être soumises à
certaines obligations dans le cadre de la procédure civile d’exécution.
II – Les obligations des tiers
A) La nature des obligations
14
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Pour l’essentiel les obligations qui pèsent sur le tiers sont de deux ordres, et cette
dualité résulte de l’article 24 de la loi du 9 juillet 1991. il prévoit à la fois des obligations
d’abstention à la charge des tiers, et des obligations d’action.
L’obligation d’abstention apparaît à l’alinéa 1 de l’article 24 qui énonce que « les tiers
ne peuvent faire obstacle aux procédures engagées en vue de l’exécution ou de la
conservation des créances », nulle personne ne doit entraver, empêcher ou rendre plus difficile
l’exécution d’une saisie. Au-delà de ce devoir général qui vise tout le monde il y a aussi à la
charge des tiers des obligations d’agir : ils doivent y apporter leur concours quand ils en sont
légalement requis. Autant l’obligation d’abstention est générale, celle d’action ne vise que des
personnes en particulier. Ces devoirs de concourir au déroulement de la procédure d’exécution
vont se concrétiser par un grand nombre d’informations de renseignements, pour essayer de
découvrir l’adresse du débiteur, son débiteur, mais aussi des informations à la charge du tiers
saisi, qu’il doit donner à l’huissier sur le champ.
Ces différentes obligations qui s’imposent aux tiers sont assorties de sanctions plus ou
moins efficaces en cas de méconnaissance.
B) La sanction des obligations
Ces sanctions qui peuvent frapper les tiers sont de 3 ordres :
L’exécution forcée, contraindre le tiers à exécuter les obligations que la loi fait
peser sur lui : article 24 al. 2 de la loi du 9 juillet 1991. Il peut y être contraint
par le juge de l’exécution qui va enjoindre au tiers de s’exécuter. L’article
précise encore que le juge peut assortir son injonction d’une astreinte.
La responsabilité civile délictuelle, la condamnation a dommages et intérêts sur
le fondement de 1382.
Ces deux premiers remèdes ne sont pas exclusifs l’un de l’autre, il est possible de
prononcer les deux. Même si l’injonction est assortie d’une astreinte elle est juridiquement
distincte des dommages et intérêts donc les deux sanctions sont alors possibles.
Une sanction qui vise spécifiquement les tiers saisis : l’article 24 al. 3 de la loi
du 9 juillet 1991 prévoit une sanction de nature à inciter fortement le tiers saisi
à s’exécuter et à respecter l’intégralité des obligations mises à sa charge. Le
tiers saisi s’expose à être condamné au paiement des causes de la saisie en cas
de manquement à ses obligations. La cause de la saisie c’est la dette impayée
dont est titulaire le créancier saisissant. Cette sanction n’agit que sur
l’obligation à la dette mais ne modifie pas la contribution. Le tiers devra payé
la dette d’autrui, ce qui signifie que logiquement puisqu’il l’a fait il pourra agir
contre le débiteur, pour exercer une action récursoire. Si le débiteur est
insolvable le gagnant de l’opération sera dans tous les cas le créancier
saisissant. S’agissant de cette sanction elle manque de généralité puisque la
jurisprudence lui assigne un domaine limité, ce paiement des causes de la saisie
ne peut venir sanctionner qu’une seule catégorie de fautes des tiers saisis,
quand ils refusent purement et simplement de coopérer. Cela signifie que si le
tiers manque à son obligation d’information en raison d’une déclaration
mensongère ou d’une déclaration inexacte les seules sanctions concevables
sont la 1
e et la 2nde, mais pas la 3e. C’est ce qu’a rappelé la 2e chambre civile
dans un arrêt du 10 septembre 2009.
15



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Concernant les dommages et intérêts il faudra se soumettre au mécanisme classique de
la responsabilité civile, donc démonter la faute, le lien de causalité et le préjudice. La faute ne
sera pas difficile à rapporter dès lors que le tiers commet une déclaration inexacte ou
mensongère. Un juge ne donnerait pas de base légale à sa décision si pour condamner un tiers
saisi à des dommages et intérêts, au titre d’une déclaration inexacte par exemple, il ne prenait
pas soin de caractériser outre la faute, le préjudice et le lien de causalité. Ce n’est pas une
responsabilité objective.
Un tiers, au sens du droit des procédures civiles d’exécution, aura toujours la
possibilité d’échapper à ces sanctions s’il démontre qu’il avait un motif légitime à ne pas
exécuter ses obligations (article 24 al. 2 et 3 de la loi de 1991 : « celui qui sans motif légitime
… »).
Illustration de ce motif légitime a propos de l’obligation de renseignement qui pèse
sur le tiers saisi : le domaine de cette obligation est détaillé à l’article 44 du décret du 31
juillet 1992. Cet article précise que le tiers saisi doit fournir ces renseignements à l’huissier
immédiatement, sur le champ. Donc par exemple quand l’huissier se déplace chez un tiers
celui-ci doit mettre l’huissier en relation avec une personne qui est susceptible de lui fournir
tous les renseignements qu’il demande s’il ne peut pas le faire lui même. La CA de Lyon, dans
un arrêt du 17 février 2005 a été confrontée à une affaire où le tiers saisi était une caisse
d’épargne et parmi les renseignements devant être fournis il y avait communication des pièces
justificatives concernant le compte du client (informations couvertes par le secret
professionnel). La personne qui a reçue l’huissier n’était pas un employé apte à fournir tous
les renseignements sollicités comme les informations sur le compte, le créancier saisissant a
alors chercher une condamnation de ce tiers saisi en dommages et intérêts, mais la banque a
opposé en défense un motif légitime. La CA de Lyon a estimé que cette circonstance ne
caractérisait pas le motif légitime pour se soustraire à ses obligations.
Pourrait en revanche constituer un motif légitime le défaut de réponse à l’huissier alors
que le PV de saisi avait été communiqué à une entreprise en période estivale, qu’il avait
simplement été traité par un assistant. En outre la créance était d’un montant faible et exigible
depuis peu. L’ensemble de ces circonstances ont convaincus les juges qu’il y avait là un motif
légitime pour le tiers à l’inexécution temporaire de ses obligations.
On retrouve la même idée dans un arrêt 2e civ. 7 mars 2002 : dans cette affaire il
s’agissait d’un litige entre un avocat et son ancien cabinet/ L’avocat réclamait paiement de sa
créance et avait intenté une saisie attribution entre les mains de la société d’avocat qui avait
pris le relais de l’ancienne société civile où il était collaborateur et associé. L’huissier a exigé
sur le champ certains renseignements mais quand il est arrivé il n’y avait qu’un seul avocat
qui était en réunion. Le créancier saisissant estimait que pour pouvoir se soustraire
légitimement à ses obligations le tiers saisi aurait eu l’obligation de faire valoir sur le champ
son motif légitime, mais l’huissier n’a vu personne car il était en réunion. La Cour de
cassation estime que le motif légitime n’a pas à être fourni sur le champ, il est invocable en
tout état de cause. Par ailleurs la Cour relève que le tiers saisi n’était pas de mauvaise foi et
que les renseignements attendus par l’huissier lui ont été communiqués au 1
er jour ouvrable
suivant sa visite par un autre avocat, qui présentait l’avantage de mieux connaître le dossier
que son confrère. Il y avait là un motif légitime à l’exécution différée de son obligation de
renseignement par le tiers.
Tout ceci permet d’avoir idée de savoir ce que sont ces motifs légitimes.
Chapitre II - Les conditions relatives aux biens
S’agissant des biens la loi de 1991 s’articule autour d’un principe, celui de la
saissabilité des biens, et des exceptions aboutissant à l’insaissabilité de ces biens.
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Section I – Le principe de saisissabilité
C’est la reconnaissance d’un droit de gage général au profit des créanciers (article
2284 du Code civil). Principe réaffirmé à l’article 13 de la loi de 1991 et à l’article 38 du
décret de 92.
Selon la loi de 1991 les saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au
débiteur alors même qu’ils seraient détenus par des tiers. S’il y a un principe de saisissabilité
il concerne les biens appartenant au débiteur, s’ils sont disponibles.
Les biens dont le débiteur est propriétaire : la saisie dirigée contre un débiteur ne peut
pas porter sur des biens qui ne lui appartiennent pas. Pour assurer l’effectivité de cette règle la
loi de 1991 et le décret de 92 instaurent différentes actions tendant à son respect :
Une action appartenant au débiteur qui peut agir en nullité de la saisie dès lors
qu’elle comprendra dans son assiette des biens qui ne lui appartiennent pas
(article 127 du décret du 31 juillet 1992).
Si la saisie porte sur les biens d’autrui le véritable propriétaire dispose aussi lui
aussi d’une action, une action en distraction (article 128 du décret) qui a pour
but de soustraire de l’assiette de la saisie les biens qui n’appartiennent pas au
débiteur. Cette action peut être encore être exercée quand les biens objets de la
saisie ont été vendus. Une fois que les sommes obtenues de la vente forcée
auront été distribuées l’action en distraction ne peut plus être exercée.
Le propriétaire pourrait aussi agir avec une action en revendication mais il va
se heurter à une possession de bonne foi.
Cette question de la propriété pose parfois des difficultés de mise en œuvre en pratique
parce que le créancier pour avoir du mal à identifier ce qui appartient vraiment au débiteur.
Cette difficulté est parfois accrue par la jurisprudence elle-même qui rend des solutions assez
déroutantes. Par exemple dans une affaire le débiteur était marié et le régime matrimonial était
celui de la séparation de biens. Ces époux avaient ouverts un compte joint, la question se
posait si l’établissement de crédit créancier du mari débiteur pouvait saisir le compte joint des
époux. Les juges du fond avaient apporté une réponse positive mais comme la dette était
propre au mari il appartenait à l’épouse de démontrer que les sommes figurant sur le compte
étaient des sommes lui appartenant. Dans un arrêt de la 1
e chambre civile du 20 mai 2009 la
Cour de cassation censure ce raisonnement car pour elle l’obligation d’identifier les biens du
débiteur pèse exclusivement sur le créancier. La solution retenue ici est très favorable au
débiteur parce que s’il appartient au créancier d’identifier les fonds appartenant à son débiteur
la question se pose de savoir comment il va établir l’origine des fonds concernant un compte
joint. Il faudra avoir accès aux relevés bancaires qui sont couverts par le secret, alors c’est
impossible, donc la propriété des fonds ne peut être faite que par les titulaires du compte.
Quand la communauté aboutie à la confusion des biens sous le régime de séparation on
applique alors une présomption d’indivision. Concernant le compte ici au minimum une
solution équilibrée serait d’appliquer ce principe et d’autoriser une saisie à hauteur de 50%,
sauf pour le créancier à démontrer que la part de son débiteur excède les 50%, ou à démontrer
par l’époux non débiteur que la part de l’époux débiteur est moindre.
Au-delà de ce premier élément seuls seront saisissables les biens appartenant au
débiteur qui sont disponibles. Parmi les cas d’indisponibilité il y a l’existence d’une saisie
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antérieure. L’un des effets principaux d’une saisie est d’entraîner l’indisponibilité des biens
qui en font l’objet. Un nouveau créancier ne pourra pas faire porter la nouvelle saisie sur ces
biens. C’est la traduction de l’adage « saisie sur saisie ne vaut ». Une nouvelle saisie ne peut
pas se faire sans considération de la première saisie, le créancier devra se joindre à la
procédure de la première saisie pratiquée. Le créancier premier saisissant n’a aucun privilège.
Section II – Les biens insaisissables
Le décret de 1992 énonce que « si ce n’est dans le cas où la loi prescrit ou permet leur
insaisissabilité ». Ces biens qui échappent au droit de gage général des créanciers sont
déterminés soit par autorité de la loi soit par permission de la loi.
I – L’insaisissabilité par décision de la loi
Elle est envisagée de deux façons par la loi de 1991, puisque ce texte énonce d’abord
une clause générale qui énonce un renvoi à différents textes qui instaurent des cas
d’insaisissabilité et elle va envisager elle-même certains cas particuliers d’insaisissabilité.
A) La clause générale
Elle est prévue à l’article 14 al. 1° de la loi du 9 juillet 1991 qui dispose que « ne
peuvent être saisis les biens que la loi déclare insaisissables ». Tantôt l’insaisissabilité sera
accessoire et tantôt elle sera affirmée à titre principal.
1] L’insaisissabilité accessoire
Ici l’insaisissabilité n’est pas affirmée en tant que telle mais est la conséquence
naturelle d’une autre règle applicable à tel ou tel type de biens. Les biens sont naturellement
insaisissables parce qu’ils sont directement inaliénables. L’inaliénabilité implique
l’insaisissabilité parce que par exemple dans l’hypothèse d’une saisie vente l’issue est la vente
forcée, donc elle ne peut pas avoir pour objet des biens que la loi déclare inaliénables.
Par exemple tous les biens qui sont hors du commerce juridique au sens de l’article
1128 du Code civil : la finance qui est disponible mais le titre qui est inaliénable car octroyé
par décision de l’autorité publique, l’usufruit de jouissance légale des parents à l’égard de
leurs enfants mineurs est inaliénables, comme le droit d’usage et d’habitation, etc.
A l’inverse on ne peut disposer des droits par lesquels le logement de la famille est
assuré, en vertu de l’article 215 al. 3 du code, sans l’accord des deux conjoints. La question
s’est posée de savoir si ce principe de cogestion entravait la saisie du logement familial. Ce
logement est effectivement saisissable (2
e chambre civile 4 juillet 1978).
2] L’insaisissabilité principale
Ces insaisissabilités sont nombreuses, pourquoi le législateur va-t-il recourir à ce
procédé ? C’est le souci de préserver un intérêt public. Par exemple ce qui peut justifier
l’insaisissabilité des effets de commerce sont les intérêts du commerce et le principale de libre
circulation. De la même façon c’est aussi le souci de protéger les salariés qui a conduit le
législateur a déclarer insaisissable des biens appartenant aux syndicats professionnels : les
immeubles des syndicats et tous les objets mobiliers leur appartenant qui sont nécessaire aux
réunion, aux bibliothèques et au cours d’instruction professionnel dispenser par ces syndicats.
La loi du 9 juillet 1991 décide aussi de certains cas d’insaisissabilité.
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B) Les cas particuliers
Ces différents cas particuliers ont pour but de préserver les débiteurs les plus vulnérables.
Pour éviter que les débiteurs soient plongés dans le plus grand dénouement la loi leur vient en
aide en prescrivant l’insaisissabilité des biens nécessaires à leur vie et à leur travail, et
l’insaisissabilité des créances à caractère alimentaire.
1] Les biens nécessaires à la vie et au travail du saisi et à de famille
Prévu par l’article 14 al. 1er 3° de la loi de 1991 qui vise les biens mobiliers nécessaires
à la vie au travail du saisi et de sa famille. Ce texte a été complété par le décret de 1992 qui
dans son article 39 va dresser la liste des biens visés par l’article 14 d e la loi – 3
observations :
Le but du législateur a été raisonnablement atteint parce que cette liste est adaptée aux
normes de confort moderne. Pour permettre à cette liste une certaine évolution ou adaptation
aux évolutions technologiques des normes de confort on peut constater l’emploi de termes
génériques qui vont renvoyer à des instruments, des objets qui pourront évoluer dans le temps.
Par exemple la référence aux objets de ménage nécessaires à la conservation, à la préparation
et à la consommation des aliments. L’insaisissabilité disparaît quand les objets perdent leur
caractère de nécessité en fonction de leur nombre. Le législateur, s’il a eu ce souci de
l’évolution technologique est quand même resté très conventionnel parce que si on additionne
tous ces biens mobiliers on aperçoit que ce qui est garanti c’est un cadre de vie sans aucun
loisir. Dans la liste de l’article 39 il n’est pas question de télévision, de radio, de chaîne hi-fi,
de dvd, etc. Les livres aussi sont saisissables à l’exception de ceux nécessaires aux études ou
au travail personnel.
Cette protection est une protection avant tout dirigée vers le logement, c’est la vie
privée au sens de l’intimité qui va faire objet de la protection.
Parmi les exceptions à l’insaisissabilité tous les biens décrits par l’article 39
redeviennent saisissables dès lors qu’ils se situent dans un lieu autre que celui où le débiteur
réside. La loi de 91 prévoit 5 hypothèses dans lesquelles les biens a priori insaisissables
redeviennent saisissables :
Quand les biens ne se situent pas dans le logement
Quand les biens perdent leur caractère de nécessité en raison de leur quantité
Quand les biens en question sont des biens de valeur, qui est appréciée en
considération de l’importance, de la rareté, de l’importance, de l’ancienneté ou
du caractère luxueux du bien.
Quand la saisie est pratiquée pour le paiement de leur prix par le vendeur ou
par celui qui aura prêté les fonds pour les achetés, les fabriqués ou les réparés.
Quand les biens saisis concernent un fond de commerce parce que cela ne
participe pas du cadre de vie.
Ces différentes exceptions connaissent elles même deux exceptions qui fait retour au
principe : même dans les 5 cas précédents les biens restent insaisissables s’il s’agit d’objets
indispensables aux personnes handicapées ou nécessaires aux personnes malades, et lorsqu’ils
sont la propriété des personnes bénéficiaires de l’aide sociale à l’enfance en vertu des articles
150 à 155 du Code de la famille et de l’aide sociale.
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2] Les créances à caractère alimentaire
Ce cas est visé par l’article 14 al. 1er 2° de la loi de 1991 qui précise que ne peuvent
être saisi les provisions, sommes et pensions à caractère alimentaire. C’est un minimum vital
qui doit être laissé à la disposition du débiteur : se nourrir, se loger, s’habiller et se soigner. Il
y a des sommes, pensions ou provisions à caractère alimentaires pour lesquels la qualification
ne fait aucun doute : article 205 du code civil, la contribution aux charges du mariage, le
devoir de secours.
Au-delà la loi de 1991 recours à une notion générique, « la somme a caractère
alimentaire », donc il est possible de saisir le juge sur le fondement de l’article 43 du décret de
1992 dès lors qu’il y a un litige sur la nature de telle ou telle somme, provision ou pension. Le
juge de l’exécution pourra déterminer dans toute créance s’il existe une portion à caractère
alimentaire. Le juge pourra se référer en tant que de besoin au barème fixé pour déterminer
l’insaisissabilité des rémunérations du travail. C’est un barème progressif par tranche, plus la
rémunération est haute et plus la part insaisissable est basse et vice versa.
Le juge a été amené à se prononcer sur des créances, ce qui peut l’amener à penser que
la créance à une nature alimentaire ou seulement une fraction alimentaire. Par exemple
concernant la prestation compensatoire : elle posait une difficulté parce qu’avant un arrêt du
10 mars 2005 de la 2
e chambre civile on estimait classique que cette prestation avait une
dualité de nature à la fois indemnitaire et à la fois alimentaire. Cette façon de concevoir la
prestation compensatoire a été modifiée par la loi du 26 mai 2004 qui a réformé le divorce.
Désormais il y a de nouvelles conditions d’octroi. Il n’y a plus de dualité de nature pour partie
indemnitaire et pour partie alimentaire. La Cour a considéré que la prestation compensatoire
est une provision, somme et pension a caractère alimentaire au sens de la loi de 1991.
Une créance de dommages et intérêts a un caractère indemnitaire, malgré tout il est
possible que le débiteur fasse valoir une certaine fraction d’insaisissabilité sur cette créance en
démontrant qu’elle va réparer un préjudice mais aussi un poste de préjudice personnel qui
peut être analysé sous un angle alimentaire.
Cette faculté offerte au juge est importante pour les personnes qui ne sont pas salariés
pour pouvoir garder une partie des revenus de son travail.
Concernant les sommes à caractère alimentaire déposées sur un compte bancaire : le
droit aménage un régime particulier quand ces créances figurent sur un compte. Il y a là
encore une difficulté d’identification parce que les soldes sont fusionnés. Dans l’hypothèse où
le solde est créditeur et qu’une saisie porte sur ce solde, tant la loi de 91 (article 15) que le
décret de 92 (article 92) instaure un mécanisme de report d’insaisissabilité, en ce sens que la
créance alimentaire versée sur un compte ne fusionne pas avec les autres créances, elle
conserve son caractère alimentaire. Sur cette question la Cour de cassation retient une
conception particulièrement large de ce report en vue de protéger les débiteurs. Quand elle
envisage l’insaisissabilité elle ne se limite pas à la dernière échéance de la créance. Une
créance périodique conserve son caractère alimentaire et son insaisissabilité quelque soit le
versement envisagé, pour l’intégralité des échéances. L’insaisissabilité va concerner
l’ensemble des créances insaisissables versées sur le compte. Les seules sommes saisissables
sont les sommes qui ne proviennent pas de créances alimentaires ou alors celles dont le
débiteur ne pourraient pas justifier l’origine. Cette conception est très favorable au débiteur
car on aurait pu considérer que toute économie fait perdre à la somme son caractère
alimentaire par exemple.
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C’est un dispositif dont le législateur a rechercher la pleine effectivité, qui a été
marquée par deux étapes : un décret du 11 septembre 2002 qui a institué un dispositif d’accès
urgent aux sommes à caractères alimentaires figurant sur un compte saisi. Face à cette lacune
où le consommateur est de plus en plus considéré comme un être incapable la seconde étape a
été réalisée par un décret du 30 décembre 2009 qui a modifié le dispositif précédent. Il a
modifié l’acte permettant la mise à disposition de fonds au débiteur. Avec le décret de 2002 il
fallait une démarche positive du débiteur, désormais c’est sans aucune sollicitation de la part
du débiteur que l’établissement teneur de compte doit mettre à disposition du débiteur une
somme à caractère alimentaire. Cette somme à caractère alimentaire est une somme qui sera
égale au montant mentionné à l’article L. 262-2 du Code de l’action sociale et des familles,
donc qui sera égale au plus au montant du RSA pour un allocataire seul. Ce dispositif ne peut
jouer qu’une fois par mois, même en cas de pluralité de saisies, il ne joue qu’avec la 1
e saisie.
Objet de ce décret de 2009 et de ce dispositif protecteur du débiteur – 2 analyses
concevables : c’est un dispositif qui traite avant tout de la saisie des comptes bancaires, donc
on devrait en déduire que tout titulaire d’un compte bancaire objet d’une saisie peut
revendiquer la mise à disposition d’une somme égale au plus au montant du RSA. Mais cette
analyse se heurte à certaines objections. Ce dispositif d’accès urgent, dans sa création, vise
bien l’accès à des sommes à caractère alimentaire donc c’est le titulaire d’une telle créance
portée sur un compte qui est protégé et non le simple titulaire d’un compte bancaire. De plus
au terme de l’article 47-3 du décret du 31 juillet 1992 il est précisé que la fraction mise à
disposition du débiteur doit venir en déduction des sommes que le débiteur pourrait réclamer
en raison de leur nature alimentaire. Cet article pose une interdiction de cumul entre les
créances à caractère alimentaire et la somme mise à disposition par le banquier. Donc une
partie de la doctrine (P. Hoonacker) estime que ce dispositif ne vise que les titulaires de
créances alimentaires. Il est précisé au demeurant dans le décret qu’en cas de trop perçu par le
débiteur il y a lieu à restitution au créancier.
Concrètement la somme qui présente un fond alimentaire et qui se retrouve sur un
compte bancaire est la rémunération du travail, donc toute personne qui pourra justifier une
telle rémunération pourra bénéficier du dispositif. Ceux qui n’ont pas de rémunération de
travail salarié et qui verse sur leur compte des revenus du capital ne pourraient pas solliciter
du banquier la mise à disposition d’une somme objet de la saisie.
Quand le débiteur va être titulaire de plusieurs comptes dans plusieurs établissements
l’huissier de justice va désigner l’établissement teneur de compte qui devra assurer cette mise
à disposition de la somme à caractère alimentaire.
II – L’insaisissabilité par autorisation de la loi
Ici la loi n’affirme pas, n’impose pas l’insaisissabilité mais va simplement offrir aux
individus la possibilité de frapper d’insaisissabilité leurs biens. Cette ouverture vers la volonté
individuelle est affirmée par la loi du 9 juillet 1991 dans son article 14 al. 1
er 3°. C’est une
insaisissabilité qui va être décidée par le donateur ou le testateur. C’est un tiers qui va décider
de cette insaisissabilité et non le débiteur, dans l’acte de donation ou dans le testament.
Cette insaisissabilité se justifie couramment par le fait que les créanciers du débiteur
saisi ne vont pas souffrir un réel préjudice du fait de cette insaisissabilité du bien donné ou
légué, car il existe une prohibition des pactes sur successions futures, ce qui maintient à la
succession un caractère aléatoire. Cet accroissement du patrimoine du bénéficiaire est
totalement aléatoire du fait de la donation. En toute hypothèse celui qui a donné pouvait
disposer autrement de la quotité disponible.
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Il faut faire une distinction entre les créanciers : pour les créanciers antérieurs à la
donation ou au legs il n’y a aucun préjudice car au jour où ils ont contractés avec le débiteur
ils se sont fiées à un certain état de patrimoine. Pour eux la déclaration d’insaisissabilité est
pleinement efficace. Mais pour les créanciers postérieurs à la donation ou au legs ils se sont
fiés à un état du patrimoine du débiteur qui comprenait déjà la donation ou le legs, ils ont pus
légitimement se fier aux apparences. Pour ce créancier il y a un besoin de protection, mais qui
n’est pas automatique. Ces créanciers peuvent toujours saisir le juge de l’exécution pour
obtenir la levée de l’insaisissabilité. Le juge accueille ou rejette la demande. S’il l’accueille il
peut le faire en tout ou partie.
A côté de cette hypothèse il existe d’autres cas qui apparaissent a priori plus
critiquable, où le débiteur lui-même va décider de l’insaisissabilité des biens lui appartenant :
le premier cas est celui de la constitution d’un bien de famille. Une famille peut constituer un
bien de famille selon une procédure particulière, et le bien qui en est l’objet sera frappé
d’indisponibilité et d’insaisissabilité, même cédé à un tiers cela sera considéré comme un prêt
à usage. En pratique cela n’a aucune effectivité, les hypothèses sont très rares. Un second cas
d’application plus fréquente est celui de la déclaration d’insaisissabilité introduite par la loi du
1
er août 2003 relative à l’initiative économique, codifiée aux articles L. 526-1 à 4 du Code de
commerce. Cette loi a pour but de développer l’esprit d’entreprise, et ce qui peut faire hésiter
à se lance dans l’entreprise ce sont les risques liés à l’exercice du commerce. Pour essayer
d’inciter ceux qui hésiteraient le législateur à entrepris de réduire ces risques, ce qui a pris la
forme d’une possibilité offerte à l’EI de frapper d’insaisissabilité l’immeuble qui sert à son
habitation. C’est une déclaration notariée qui sera soumise à un assez large publicité et ce
dispositif a été renforcé par la loi du 4 août 2008 relative à la modernisation de l’économie, en
élargissant l’assiette des biens pouvant être déclarés insaisissables. On est passé de la
résidence à l’ensemble du foncier bâti et non bâti qui n’est pas affecté à l’activité
professionnelle. Cette déclaration a failli disparaître avec la loi instaurant le statut de
l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée qui a créé un patrimoine d’affectation. Mais
la déclaration a été maintenue in extremis.
Mais dans le cas de liquidation où le liquidateur souhaite vendre la résidence de
l’entrepreneur les juges du fonds ont estimés que la déclaration d’insaisissabilité n’était pas
opposable au liquidateur, mais simplement au créancier. De plus la somme que le liquidateur a
récupérée va aller à l’entrepreneur et les juges ont décidés que la déclaration portait sur le
foncier, donc cette somme pourra être récupérée par les créanciers. La déclaration n’a donc
aucune utilité.
Cette insaisissabilité ne vaut qu’à l’égard des créanciers professionnels, dont les droits
sont nés à l’occasion de l’activité professionnelle du débiteur. Du point de vue temporelle ce
sont les créanciers postérieurs qui vont se voir oppose la déclaration d’insaisissabilité. Pour
l’EIRL qui aboutie à priver les créanciers professionnels des biens personnels la constitution
du patrimoine d’affectation sera opposable aux créanciers postérieurs, mais également aux
créanciers antérieurs. Le Conseil constitutionnel a néanmoins maintenu le dispositif sous
réserve que les créanciers antérieurs fassent l’objet d’une information adéquate.
Ces différents cas d’insaisissabilité peuvent offrir parfois aux débiteurs les moyens de
nuire aux droits de leurs créanciers, comme par exemple faire en sorte que son patrimoine ne
soit composé que de biens insaisissables. Dans la CEDH le créancier trouvera réponse à la
mauvaise foi du débiteur. Arrêt de la 2
e chambre civile de la Cour de cassation du 3 mai
2007 : conflit entre ex époux et l’ex femme a souhaité saisir la pension de retraite de son ex
mari qui était marin, donc la pension était visée par l’article L. 30 du Code des pensions de
retraite des marins en vertu duquel leur pension sont incessibles et insaisissables à
concurrence d’un montant fixé par décret. Cette pension n’était saisissable que par certains
créanciers, le créancier d’aliments et le trésor public, ce que n’était pas l’ex épouse. La CA de
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Rennes avait débouté l’épouse de sa demande. Sur pourvoi la Cour a cassé cet arrêt en
précisant que cet article était incompatible avec l’article 6 de la CEDH et l’article 1 du
Protocole n°1 qui garanti le droit au respect des biens. Par cette décision la 2
e chambre civile
ne dit pas que l’article L. 30 est en soi incompatible avec la CEDH mais constate que la mise
en œuvre de ce texte en l’espèce par un débiteur de mauvaise foi aboutissait à nuire aux droits
du créancier. Ponctuellement des textes pourront toujours être écarté dès lors qu’ils auront été
utilisés par le débiteur pour se soustraire frauduleusement à ses engagements. Pour autant la
Cour a considéré que la pension devait être saisie à l’image d’une rémunération du travail,
donc en mettant en œuvre un barème.
Chapitre III – Les conditions relatives aux causes de la saisie
La cause de la saisie c’est la créance qui va justifier la mise en œuvre d’une procédure
civile d’exécution. Pour qu’elle puisse constituer la cause d’une saisie il faut que cette créance
réponde à certaines conditions de forme, de fond, et certains mécanismes vont permettre de
renforcer son efficacité.
Section I – Les conditions de forme
En principe une saisie ne peut être pratiquée qu’à condition que la créance qui en
constitue la cause soit constatée dans un titre exécutoire. Cette condition est posée par l’article
2 de la loi du 9 juillet 1991. Cette condition ne s’impose que lorsque le créancier envisage une
saisie d’exécution, en revanche un tel titre n’est pas nécessaire si le créancier souhaite se
contenter d’une saisie conservatoire.
I – Le contenu du titre exécutoire
La première condition est que le titre exécutoire est un titre devant être revêtu de la
formule exécutoire. C’est une exécution forcée et cette formule doit apparaître sur le titre sous
peine de nullité. Mais récemment la Cour de cassation a précisé que lorsqu’une décision de
justice était notifiée au débiteur et qu’il s’agissait d’une copie, si celle-ci ne comporte pas la
formule exécutoire alors que la décision est exécutoire cela constitue un vice de forme. Les
vices de fond sont limitativement énumérés dans le Code civil donc tout ce qui n’est pas vice
de fond est vice de forme et quand il y a vice de fond l’acte est nul de droit, alors qu’il sera
uniquement annulé si cela fait grief concernant le vice de forme.
Il est indispensable que le titre soit exécutoire à l’égard de la personne qui doit
exécuter, de la personne contre qui on veut diriger une procédure civile d’exécution. Le
créancier d’une société à l’égard de laquelle les associés sont solidairement et indéfiniment
responsables, si le créancier obtient la condamnation de la société il ne pourra pas poursuivre
les biens des associés car le titre est exécutoire uniquement à l’égard de la société. Il faudra
obtenir autant de condamnation, autant de titre exécutoire qu’il y a de débiteur, ou alors que le
titre concerne l’ensemble des débiteurs.
Enfin de la même façon que le titre doit être exécutoire à l’égard de la personne même
qui doit être exécutée ne doit-il pas bénéficier à la seule personne qui l’a obtenue, et qui va
être mentionné dans le titre exécutoire ? Le titre peut bénéficier à un créancier autre que celui
qui a obtenu le titre exécutoire, mais qui va être mentionné dans le titre. Il faudra simplement
justifier de la cession de créance.
II – Les variétés de titres exécutoires
Ces différentes variétés sont définies limitativement par la loi du 9 juillet 1991 (article
3). Cette loi définit 7 titres exécutoires.
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A) Les décisions de justice exécutoires
Cette catégorie doit être entendue dans son sens le plus large puisqu’elle vise toutes les
décisions prononcées par les juridictions françaises, qu’il s’agisse des juridictions de l’ordre
judiciaire ou de l’ordre administration, et quelque soit la décision rendue : jugement, arrêt ou
ordonnance. Encore faut-il vérifier que ces décisions bénéficient de la force exécutoire. Une
décision est exécutoire quand elle est définitive (plus de recours possible), quand elle contient
la formule exécutoire apposée par le greffier et quand elle a été notifiée à la partie condamnée.
Ce n’est qu’une fois ces décisions réunies que la décision sera passée en force de chose jugée
et exécutoire.
Mais il existe des décisions qui seront exécutoires à titre provisoire, avant même que la
décision soit définitive. Une décision de justice peut donc constituer un titre exécutoire dès
lors qu’elle a une force exécutoire, peu important que cette force lui soit attribuée à titre
définitif ou à titre provisoire. Cela signifie que même une décision provisoire, dès lors qu’elle
est exécutoire, peut justifier la mise en œuvre jusqu’à son terme d’une procédure civile
d’exécution, comme par exemple les ordonnances de référés. C’est par exemple ce qu’a
rappelé la 2
e chambre civile dans un arrêt du 28 janvier 1998, une saisie vente peut être menée
jusqu’à son terme sur la base d’une ordonnance de référé. Mais si postérieurement à la saisie
le titre est remis en cause au fond cela signifie que la saisie aura été menée jusqu’à son terme
sur un fondement qui n’existait pas.
Cela explique que des saisies menées sur le fondement d’un titre exécutoire provisoire
s’effectue aux risques et périls du créancier. L’article 31 al. 2 de la loi de 91 précise que si le
titre est remis en cause le créancier devra restituer le débiteur dans ses droits en nature ou par
équivalent. Cela ressemble à une responsabilité civile du créancier. Par un arrêt de l’AP de la
Cour de cassation du 24 février 2006 énonce que le créancier encourt une responsabilité pour
risque, une responsabilité sans faute. Pour autant le défendeur pouvait-il rechercher la
responsabilité du demandeur et l’obliger à réparer toutes les conséquences dommageables de
la décision annulée ? Selon la Cour la seule notification du jugement de condamnation
permettait de retenir la responsabilité du créancier. La seule solution aurait été pour le
créancier de ne pas notifier au défendeur afin de ne pas réparer mais les délais de recours
n’auraient jamais commencés à courir et le demandeur n’aurait jamais pu obtenir la décision
définitive. Tout est donc au désavantage du créancier. Cette décision a été confirmée
ultérieurement par un arrêt de la 2
e chambre civil du 9 septembre 2010.
Face à ce risque qu’encourt le créancier c’est que dès lors qu’il y a un titre exécutoire
provisoire il faut agir et solliciter du juge une mesure qui soit en relation avec le caractère
précaire du titre exécutoire. Il faut solliciter des mesures provisoires, des mesures qui
préservent le gage du créancier.
Le créancier encourt une responsabilité de plein droit pour risques, mais is le titre
exécutoire n’est pas remis en cause mais est frappé de caducité.
B) Les transactions auxquelles le Président du TGI a conféré force exécutoire
Cette variété apparaît à l’article 3 1° de la loi de 91. C’est un ajout qui a tiré les
conséquences d’une évolution affectant la procédure civile. Un article 1441-4 a été inséré
dans le CPC. On peut suppose que le président du TGI va au moins faire un contrôle
minimum sur l’acte qui lui est présenté, qu’il ai au moins l’apparence d’une transaction. Il
faut aussi vérifier que la transaction n’ait rien de contraire à l’ordre public. Malgré tout le
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président du TGI qui va conférer la force exécutoire à la transaction n’est pas juge du fond. Il
est appelé à donner force exécutoire mais sur la transaction emporte la nullité.
Une autre difficulté est de savoir quel est la nature de l’acte conférant force exécutoire.
Derrière cet enjeu de qualification se cache les voies de recours. Ces difficultés ont été levées
par la 2
e chambre civile par un arrêt du 24 mai 2007, elle a estimé que cet acte par lequel le
président du TGI va donner la force exécutoire à un accord de volonté privé était une
ordonnance sur requête. Mais si on dit que cette décision est une ordonnance sur requête cela
signifie que c’est un acte juridictionnel, mais pour trancher quel litige ? L’ordonnance sur
requête est provisoire, or l’octroi de la force exécutoire par le président du TGI est définitif.
On peut recourir à l’ordonnance sur requête puisqu’il existe des raisons de ne pas appeler
l’autre partie à la cause. Cette ordonnance n’a donc aucun sens concernant la transaction.
L’ordonnance sur requête permet néanmoins de résoudre le problème des voies de
recours. La voie de recours n’est pas l’appel mais la rétractation.
C) Les actes et jugements étrangers et sentences arbitrales rendues exécutoires
Cette variété apparaît à l’article 3 de la loi de 91, les jugements rendus au nom d’un
jugement étranger, les sentences arbitrales, ont une force exécutoire soumis en France à la
procédure d’exequatur. Il s’agit d’intégrer, de recevoir en France l’ordre émanant d’un
souverain étranger, et dès lors qu’il est intégré dans l’ordre juridique français, c’est le
commandement du souverain français qui sera mis en place.
Cette procédure a pour but de vérifier, du point de vue de la France la régularité
internationale du jugement. Ces conditions ont été précisées récemment par l’arrêt
Cornelissen du 20 février 2007. La régularité internationale d’un jugement étranger s’apprécie
au regard de la compétence du juge étranger (compétence indirecte), que le jugement étranger
ne soit pas contraire à l’ordre public international français.
Une évolution très nette se dessine au sein de l’UE et tend à abolir les frontières. Se
développe dans le droit de l’union les titres immédiatement exécutoires dans l’ensemble des
Etats membres. C’est par exemple le titre exécutoire européen pour les créances incontestées,
le jugement rendu à l’issu d’une procédure européenne d’injonction de payer, ou un jugement
issu d’une procédure européenne des petits litiges institué par un règlement de 2007. La
décision rendue va faire l’objet d’une certification et celui-ci peut être mis à exécution
n’importe où dans un Etat membre de l’Union. Exercice en commun de souveraineté, de
pouvoir public. Le règlement de Bruxelles I est en cours de révision et parmi les
modifications phares envisagées il y a une suppression pure et simple de l’exequatur.
D) Les extraits de procès verbaux de conciliation signés par les parties et le juge
Cette catégorie est mentionnée par l’article 3 3° de la loi de 91. Ces PV ressemble à la
transaction mais ici la conciliation ne s’est pas déroulée en dehors du prétoire, elle s’est
déroulée devant le juge. Il a eu la possibilité de constater la conciliation et la réalité de
l’accord des parties. Le juge va constater cette conciliation par un PV, dès lors qu’il sera signé
par les parties et le juge peut valoir titre exécutoire.
E) Les actes notariés revêtu de la formule exécutoire
Article 3 4°, ce texte confirme que les notaires ont la possibilité de délivrer des titres
exécutoires dès lors qu’une partie sollicitera une copie, une expédition d’un acte authentique
établi par le notaire. Cette copie pourra être revêtu de la formule exécutoire par le notaire et
ces actes notariés pourront alors être mis à exécution. Cette compétence s’explique par le
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statut particulier du notaire et les garanties de fiabilité, de sécurité et d’exactitude qu’un
notaire est censé offrir. L’acte authentique va reprendre des éléments que le notaire a pu
personnellement constater et vérifier, donc cette créance pourra être mise à exécution sans
qu’il soit nécessaire de solliciter un juge.
Si les actes authentiques peuvent bénéficier de la force exécutoire cela signifie a
contrario que les actes sous seing privé ne peuvent pas bénéficier de cette disposition et avoir
une force exécutoire. Mais il est possible que ces actes bénéficient de la force exécutoire par
l’intermédiaire du notaire. La 1
e condition c’est que les parties à l’acte reconnaissent le
contenu de leur contrat devant notaire et que ensuite cet acte soit déposé au rang des minutes
de l’étude de ce notaire. Le notaire pourra délivrer des copies de cet acte et il s’agira d’un titre
exécutoire s’il revêt les copies de la force exécutoire.
F) Le titre délivré par l’huissier de justice en cas de non paiement d’un chèque (art.
3 5° de la loi de 91)
Une personne est bénéficiaire d’un chèque sauf que celui-ci n’a pas pu être honoré
pour défaut de provisions. Le porteur de ce chèque peut alors obtenir un certificat de non
paiement, qui doit être porté à la connaissance du tireur (celui qui a émis le chèque) afin de
l’informer de l’incident. Dans les 15 jours suivant la notification au débiteur de ce certificat
de non paiement si l’huissier n’a pas reçu justification du paiement il peut délivrer un titre
exécutoire, le protêt exécutoire (article L. 131-73 du CMF).
G) Les titres délivrées par les personnes morales de droit public
Cette faculté laissée à l’administration correspond à une prérogative exorbitante du
droit commun puisqu’il s’agit de reconnaître à l’administration le pouvoir de se délivrer à
elle-même des titres exécutoires. Cette prérogative est appelée le privilège du préalable de
l’administration, c’est une prérogative essentielle de l’administration, nettement affirmée dans
un arrêt du CE Huglo du 2 juillet 1982. Contrairement aux autres titres vus précédemment il
s’agit ici d’une catégorie de titre exécutoire.
Pour savoir si un acte d’une PM de droit public constitue un titre exécutoire il fait se
référer au texte de droit public. Ce sont les textes fiscaux et les textes relatifs à la comptabilité
publique.
Les personnes qui bénéficient de ce privilège sont toutes les PM de droit public, Etat,
CL, établissements publics. Un établissement administratif qui ne relève pas des règles de la
comptabilité publique ne dispose pas des règles du préalable. Il n’y a pas que les PM de droit
public qui bénéficient de ce privilège, peuvent aussi en bénéficier des PM de droit privé, si
elles gèrent un SP ou accomplissent une mission de SP, et que leur gestion relève des règles de
la comptabilité publique.
Concernant les créances quelles sont celles qui peuvent être constatées par ces titres
exécutoires. Aucune restriction ne s’impose, toutes les créances dont son titulaire les
personnes précédentes peuvent faire l’objet d’une exécution forcée. Les titre exécutoires ne
sont pas exclusifs, si une personne est créancière en vertu d’une transaction elle n’est pas
obligée d’aller saisir le président du TGI pour obtenir la force exécutoire. Celui qui est
créancier peut choisir de recourir à l’établissement d’un acte authentique, et la copie de
l’acte, dès lors qu’elle sera revêtue de la formule exécutoire vaudra titre exécutoire.
Section II – Les conditions de fond relatives à la créance cause de la saisie
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Elles apparaissent à l’article 2 de la loi du 9 juillet 1991 sur les saisies mobilières, et à
l’article 2191 du Code civil qui traitera des saisies immobilières. Pour pouvoir diligenter une
procédure civile d’exécution le créancier doit des prévaloir d’une créance liquide et exigible.
Si la créance doit être liquide et exigible elle doit être actuelle.
I – Une créance actuelle
Actuelle plutôt que certaine parce que ni les textes relatifs à la saisie mobilière ni ceux
relatifs à la saisie immobilière ne mentionnent le caractère certain de la créance. Pour mettre
en œuvre une saisie conservatoire on ne trouve pas cette condition d’une créance certaine.
L’article 2 de la loi de 91 est censé préciser les conditions de mise en œuvre d’une
saisie d’exécution. L’omission du caractère certain doit donc trouver une autre explication que
celle consistant à dire que le texte cherche à englober les saisies exécution et les saisies
conservatoires. Est-il possible de recourir à l’exécution forcée d’une créance qui ne serait pas
certaine ? La loi admet l’exécution forcée de créance qui ne sont pas certaines car constatées
dans un titre précaire et révocable. De plus l’article 13 de la loi de 91 mentionne l’hypothèse
de l’exécution forcée d’une créance conditionnelle, donc incertaine car son existence est
subordonnée à la réalisation d’un évènement futur mais incertain. La condition peut être soit
suspensive soit résolutoire. En rapprochant ces deux hypothèses on comprend pourquoi la loi
de 91 ne pose pas le caractère certain de la créance comme condition de fond de la saisie.
II – Une créance liquide
C’est une créance qui a réussie une expression monétaire, comme le rappelle l’article 4
de la loi de 1991. Cette condition s’impose puisque si la créance n’était pas liquide il ne serait
pas possible de savoir si une procédure civile d’exécution peut être mis en œuvre et d’arriver
au dénouement de la procédure civile d’exécution. Cette condition s’impose rationnellement
tout au long de l’exécution forcée. Cependant, si elle s’impose dans la perspective de
l’exécution forcée, elle est en revanche écartée dès lors que le créancier souhaite simplement
préserver ses intérêts. Es opérations de liquidation des créances peuvent être lentes. Dès lors
qu’est envisagée une saisie conservatoire la condition de liquidité est écartée, mais pas pour
les saisies exécution.
III – L’exigibilité de la créance
C’est celle qui doit s’exécuter immédiatement. Cette condition est imposée pour les
saisies d’exécution parce que cette modalité particulière de l’obligation que constitue le terme
s’impose au créancier. Ce terme doit être respecté quelque soit sa source, légale (créance de
loyer par exemple), conventionnelle ou judiciaire (délai de grâce par exemple). Ce terme
s’impose au créancier, avant qu’il ne soit échu ou que le débiteur n’ait été déchu du bénéfice
du terme, comme par exemple la faute du débiteur de l’article 1188 du Code civil.
Le créancier s’expose au risque que le débiteur ne puisse pas acquitter sa dette au
moment de l’échéance du terme. Mais pour une saisie conservatoire la créance n’a pas à être
exigible.
Section III – Le renforcement de l’efficacité du titre exécutoire : l’astreinte
C’est par la loi de 91 que l’astreinte a trouvé son régime juridique. C’est une
condamnation qui frappe un débiteur, à payer une somme d’argent dont le montant augment
périodiquement et cette périodicité est définie par le juge, donc l’astreinte à laquelle le
débiteur a été condamné augmente selon cette périodicité jusqu’à exécution complète de
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l’obligation pesant sur ce débiteur. L’astreinte est un accessoire d’une condamnation
principale.
Cette astreinte peut a priori accompagner toute sorte d’obligation (donner, faire et ne
pas faire).
I – Le prononcé de l’astreinte
Le prononcé d’une astreinte est un pouvoir qui appartient à tout juge (article 33 de la
loi de 1991). Donc l’astreinte se rattache à l’imperium, et non pas à la juridictio, ce qui
explique pourquoi le prononcé de l’astreinte peut être soir à l’initiative du créancier soit à
l’initiative du juge lui-même. Il existe deux sortes d’astreinte, la loi de 91 a consacré cette
dualité puisqu’il existe l’astreint provisoire classique, et l’astreinte définitive, création à
l’origine jurisprudentielle.
L’astreinte provisoire présente 3 caractères : elle est comminatoire, destinée à inciter le
débiteur à s’exécuter, provisoire puisqu’elle peut être modifiée à tout moment, et arbitraire en
ce sens que le juge fixe son montant sans considération pour le préjudice que le créancier
pourrait éventuellement subir du fait de l’inexécution de l’obligation principale. La loi de 91
exprime clairement en son article 34 que l’astreinte est indépendante des dommages et
intérêts. Les dommages et intérêts ne sont pas comminatoires mais indemnitaires, ils ne sont
pas provisoires mais définitifs et ils sont équitables, par opposition au caractère arbitraire de
l’astreinte. Ils sont fixés en considération du principe de réparation intégrale du préjudice
subie, alors que l’astreinte est fixée indifféremment du préjudice subi.
L’astreinte définitive est comminatoire et arbitraire. A la différence de l’astreinte
provisoire elle est définitive. On ne pourra donc pas tenir compte des circonstances entourant
l’exécution de la condamnation principale, on la distingue mal des dommages et intérêts. Par
conséquent la doctrine s’était interrogée sur la licéité d’un tel procédé, mais il a été consacré
par l’article 34 de la loi du 9 juillet 1991. Il existe néanmoins une hiérarchie entre les deux
astreintes. L’astreinte définitive est un mécanisme d’exception et subsidiaire. Elle ne peut être
prononcée qu’après une astreinte provisoire, et ce n’est qu’en cas d’échec de celle-ci que le
juge peut être de nouveau saisi par le créancier et prononcer une astreinte définitive. Caractère
également d’exception parce que toute astreinte définitive dont le caractère définitif ne serait
pas expressément mentionnée par le juge serait liquidée comme une astreinte provisoire.
Au moment du prononcé de l’astreinte les pouvoirs du juge sont considérables : il fixe
en toute liberté le taux de l’astreinte (son montant initial) et sa périodicité. Le tout sera
apprécier au regard des capacités de résistance du débiteur afin qu’il comprenne qu’il a plus à
gagner à exécuter la condamnation qu’à ne pas le faire. Le juge peut par exemple recourir à
une fonction exponentielle. Le juge n’a pas à motiver sa décision, elle est totalement
arbitraire. Le juge a aussi un pouvoir considérable pour déterminer la date de prise d’effet de
l’astreinte, sans avoir là encore à motiver sa décision. La seule limite c’est qu’il ne peut pas
fixer une date antérieure à celle fixant la condamnation principale.
II – La liquidation de l’astreinte
Cette liquidation interviendra en cas d’inexécution de la condamnation principale, elle
doit être obligatoirement sollicitée par le créancier, parce que l’astreinte du contentieux
judiciaire revient au créancier, contrairement à celle du contentieux administratif. L’astreinte
est l’une des rares expressions en droit français d’une peine privée. Les modalités de
liquidation sont différentes selon les deux types d’astreinte.
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Pour l’astreinte provisoire, selon l’article 36, elle est liquidée en tenant du
comportement de celui à qui elle a été adressée et des difficultés d’exécution qu’il a rencontré.
Le juge peut estimer que l’astreinte provisoire sera liquidée à moindre taux que celui fixé
initialement, la seule limite à ne pas dépasser est le taux maximum de l’astreinte. Pour éviter
d’enrichir le créancier le juge pourra exercer un pouvoir modérateur au moment de la
liquidation de l’astreinte. La Cour de cassation a d’ailleurs entrepris de canaliser le pouvoir du
juge car autant il n’a pas à motiver le prononcé d’une astreinte, autant il doit motiver la
décision opérant liquidation de l’astreinte.
Concernant la liquidation de l’astreinte définitive le juge liquidateur de l’astreinte n’a
aucun pouvoir d’appréciation (article 36 al. 2 de la loi du 9 juillet 1991).
Quelque soit l’astreinte envisagée sa suppression totale ou partielle s’impose au juge
dès lors qu’il constate que l’inexécution de la condamnation principale provient non pas du
débiteur mais d’une cause étrangère. C’est une exception générale prévue par l’article 36 al. 3
et qui vise par exemple le cas où une personne est condamner à restituer des documents sous
astreinte et que l’inexécution est liée à la perte des documents.
Titre II – Les opérations de saisie
Chapitre I – Le personnel des procédures civiles d’exécution
Ce personnel correspond d’abord à l’autorité judiciaire, ensuite à un agent chargé de
l’exécution et enfin à la force publique.
Section I – L’autorité judiciaire
C’est l’autorité judiciaire au sens de l’article 66 de la Constitution, c'est-à-dire le juge
judiciaire et le ministère public. Chacune de ces branches de l’autorité a un rôle important
dans le déroulement des procédures civiles d’exécution.
I – Le juge de l’exécution
Il constitue de manière paradoxale l’un des apports majeurs de la loi du 9 juillet 1991,
puisque l’un des objectifs poursuivis par le législateur de 91 était de procéder à une
revalorisation du titre exécutoire, de renforcer son efficacité par une déjudiciarisation des
procédures civiles d’exécution, mais il a créé un juge spécialisé dans ces procédures.
Les idées accompagnant la création de ce juge sont que si l’on créé un juge de
l’exécution son intervention doit être strictement nécessaire et lorsque cette intervention est
nécessaire autant qu’elle soit la plus simple et la plus rapide possible. Ces idées se sont
traduites par une concentration des compétences entre les mains du JEX et par l’élaboration
d’une procédure simplifiée.
A) La compétence du JEX
Il y a une concentration de tout le contentieux de l’exécution entre les mains du juge
de l’exécution, qui va bénéficier d’un bloc de compétence et exercer une multiplicité de
fonctions.
1] Un bloc de compétences
Ce bloc revient à évoquer la compétence d’attribution du JEX qui figure à l’article L.
213-6 du COJ.
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a) Les différentes compétences
Ces compétences, certaines lui appartiennent en propres mais d’autres vont être
partagées avec d’autres juges.
a.1) Les compétences propres
Elles sont de 3 ordres :
Les difficultés relatives au titre exécutoire : cette formule est très large, puisque le
texte se contente d’évoquer des difficultés, notion juridique assez floue, la nature de la
difficulté n’est pas précisée, et il suffit que celle-ci soit relative à. Le juge va pouvoir
interpréter le titre exécutoire s’il est ambigu, il sera aussi difficile de savoir si le titre est
réellement exécutoire. Il pourra se prononcer sur l’étendu de l’obligation mais la vraie
difficulté c’est de savoir s’il peut remettre en cause les droits et obligations constatées par ce
titre. Cette question se pose parce qu’une limite est posée par l’article 8 du décret de 92 qui
précise que le JEX ne peut pas modifier le dispositif d’une décision de justice. Pour les titres
exécutoires particuliers deux se distinguent, à savoir la décision de justice rendue par des
juridictions françaises et les décisions rendues par les juridictions étrangères. Cela s’explique
dans la mesure où le JEX n’est pas une nouvelle voie de recours offerte aux parties. Le JEX
ne remet pas en cause le dispositif d’une décision qui sert de fondement aux poursuites s’il
accorde au créancier des intérêts au taux légal puisque ces intérêts sont dus de plein droit en
vertu de 1153 du Code civil. Le JEX pourrait statuer sur l’assujettissement de cette créance
d’indemnité à certaines contributions fiscales comme la CSG. Le JEX pourrait aussi, toujours
sans remettre en cause ce dispositif, statuer sur l’exception de compensation que pourrait
soulever le débiteur pour faire échec à une saisie. Là où l’exception de compensation ne
pourrait être examinée par le JEX c’est si elle a déjà été examinée par le juge du fond.
Dans un arrêt 2e Civ. Du 13 septembre 2007 était en cause la vente d’un véhicule qui
avait faire l’objet d’une résolution judiciaire et le JEX était invité à se prononcer sur les frais
de gardiennage du véhicule. Dans cette affaire le vendeur avait été condamné à restituer le
prix et l’acquéreur devait remettre au vendeur le véhicule objet de la vente. La restitution du
prix par le vendeur était subordonnée à la remise du véhicule par l’acquéreur. Mais
l’acquéreur refusait de remettre le véhicule tant que n’avait pas été réglé la question des frais
de gardiennage. Le JEX a accepté se statuer sur ces frais et condamner le vendeur au paiement
de ces frais. La question se posait de savoir si le JEX avait ici modifié le dispositif de la
décision. La Cour de cassation a considéré que le JEX en se prononçant sur les frais de
gardiennage avait excédé ses pouvoirs. Il peut statuer sur les taxes et impôts, sur l’exception
de compensation mais pas sur une question connexe non encore rentrée dans le débat comme
des frais de gardiennage.
Mais ces cas avec la réserve de l’article 8 ne concernent que les décisions de justice.
Pourrait-on imaginer une compétence sur le fond du JEX quand le titre exécutoire n’est pas
une décision de justice ? La cour de cassation s’est montrée hostile à cette possibilité par un
avis du 16 juin 1995. Elle précise que le JEX n’est pas compétent pour connaître des
demandes tendant à remettre en cause le titre dans son principe ou la validité des droits et
obligations qu’il constate. Cet avis réalise une extension de l’article à toutes les variétés de
titres exécutoires. Mais ne peut-on pas concevoir une autre solution ? Si l’article 8 isole la
décision de justice c’est parce qu’elle dispose de l’autorité de la chose jugée mais tous les
titres n’en disposent pas forcément. La Cour de cassation est récemment revenu sur cet avis
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de 95 a fait évoluer sa position par un arrêt du 18 juin 2009. Etait ici en cause un titre
exécutoire qui était un engagement de caution, le débiteur avait été défaillant et le créancier a
voulu actionner la caution, en diligentant une saisie attribution. En réponse la caution a
demandé la main levée de cette saisie en invoquant la nullité de son engagement. Le JEX a
rejeté cette nullité et le pourvoi a été rejeté parce que la Cour a précisé que le JEX pouvait se
prononcer sur la nullité d’un engagement d’un acte notarié dès lors que celle-ci était invoquée
pour absence prétendue de l’une des conditions requises par la loi pour la validité de sa
formation. La validité de l’acte a été envisagée au regard de l’article 1108 du Code civil. La
Cour de cassation ne vise ici que la nullité, que les difficultés nées de la formation de l’acte.
Le JEX peut il se prononcer sur des difficultés d’exécution ? Cette extension concerne-t-elle
que l’acte notarié ou tous les titres exécutoires relevant de la compétence du JEX qui ne sont
pas des décisions de justice ?
Les contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée : cette formule est
là encore extrêmement souple et générale. Toutes les contestations qui prendront source dans
l’exécution forcée relèveront de la compétence du JEX. Les contestations les plus fréquentes
sont celles qui auront trait à la régularité de la saisie, les contestations sur les suites de la
saisies avec notamment la répartition des deniers et l’imputation des frais de la saisie. Ces
contestations vont opposer les parties à la procédure ou mettre en cause des tiers comme le
tiers saisie. Par exemple le JEX connaître des contestations formulées par le tiers quand celui-
ci va invoquer à son profit un droit de rétention, l’enjeu du débat sera de savoir si le bien est
saisissable ou non. Si le tiers saisi est un établissement bancaire, pour déterminer le solde des
comptes il existe un délai de 15 jours pendant le quel on procède aux régularisations encours,
le solde sera alors celui qui reste à l’issue du délai, le compte sera bloqué durant cette période.
En cas de contestation c’est le JEX qui se prononcera.
Les demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageable
des mesures d’exécution forcée ou des mesures conservatoires : il s’agit du contentieux de la
responsabilité qui prend sa source dans les procédures civiles d’exécution, avec par exemple
la responsabilité civile du créancier pour abus du droit de saisir, la responsabilité du débiteur
saisi pour résistance abusive à l’égard du créancier, ou encore la responsabilité des tiers quand
ils font obstacle à la saisie ou n’exécutent pas les obligations d’information que la loi met à
leur charge. Le JEX pourra également être amené sur le fondement de ce chef de compétence
à se prononcer sur la responsabilité de l’huissier. Si le JEX peut de prononcer sur les relations
entre l’huissier et le tiers saisi ou le débiteur concernant une faute commise dans l’exécution
des mesures, en revanche le JEX ne pourrait pas se prononcer sur les relations entre l’huissier
et le créancier : Civ. 2
e 21 février 2008 – un JEX excédait ses pouvoirs dès lors qu’il
examinait une action intentée par le créancier saisissant à l’encontre de l’huissier pour
exécution fautive du mandat.
a.2) Les compétences partagées
Ces compétences concernent les mesures conservatoires, les astreintes et les délais de
grâce.
S’agissant des mesures conservatoires il y a une compétence de principe du JEX
(article L. 213-6 al. 2 du COJ) mais tant la loi du 9 juillet 1991 que le Code de commerce
réserve la compétence du président du tribunal de commerce. Il peut, comme le JEX,
ordonner ou autoriser une saisie conservatoire. Mais cette compétence n’est pas aussi étendue
que celle du JEX, parce qu’il a une compétence pour autoriser une telle saisie mais encore
faut il que la créance relève de la juridiction commerciale et que cette demande de saisie
conservatoire ai été formulée avant tout procès. Si ces conditions ne sont pas réunies c’est le
JEX qui sera compétent.
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En matière d’astreintes le partage de compétences s’opère entre le JEX et le juge qui
s’est prononcé au fond (l’astreinte est un pouvoir appartenant à tout juge). Cette ligne de
partage se déplace selon le prononcé de l’astreinte ou sa liquidation.
Pour le prononcé de l’astreinte c’est une répartition chronologique. Dès lors qu’un
juge est saisi aux fins de prononcer une condamnation principale il a compétence
pour prononcer une astreinte (article 33 al. 1 loi de 91). Mais une fois la décision
rendue si elle n’est pas assortie d’une astreinte le juge du fond n’a pas de session
de rattrapage pour le faire, il est dessaisi de l’affaire car a épuisé le lien juridique
d’instance. Mais le JEX a une compétence générale et toujours disponible pour
compléter la condamnation principe d’un prononcé à astreinte (article 33 al. 2 de la
loi de 91). Néanmoins il prononcera l’astreinte si les circonstances en font
apparaître la nécessité.
Concernant la liquidation de l’astreinte il y a là aussi un partage mais différent de
celui du prononcé. L’article 35 de la loi du 9 juillet 91 attribue une compétence de
principe au JEX. Cette compétence souffre de tempéraments, qui font que le JEX
ne connaîtra pas de cette question de la liquidation de l’astreinte : 1/ Quand le juge
qui a prononcé l’astreinte n’est pas dessaisi, comme le juge de la mise en état. Ce
juge peut assortir ces décisions d’une astreinte et le juge compétent pour la liquider
sera le juge du fond. 2/ Quand le juge qui a prononcé l’astreinte s’est expressément
réservé le pouvoir de la liquider. Sur cette question il y a un problème avec la Cour
de cassation qui a fait une application trop rigide de cette réserve de compétence. Il
s’agissait d’un litige en matière de droit du travail, le conseil de prud’hommes
avait assorti sa décision d’une astreinte et s’était attribué le pouvoir de la liquider.
Mais cette décision a été frappée d’appel et la CA a entrepris de liquider l’astreinte,
confirmant la décision de 1
e instance. Suite au pourvoi l’arrêt a été cassé estimant
que c’est le conseil de prud’hommes et pas le juge d’appel qui s’est expressément
réservé le pouvoir de liquider l’astreinte, malgré l’effet dévolutif de l’appel. Avoir
une conception aussi rigide n’est pas une solution favorable au créancier.
Concernant l’octroi de délais de grâce au profit du débiteur sur le fondement de
1244-1 du Code civil : c’est une compétence qui appartient au juge du fond qui
prononce la condamnation, et s’il ne le fait pas le débiteur aura toujours la
possibilité de saisir le JEX pour obtenir ce délai de grâce.
b) La nature des compétences du JEX
Cette compétence d’attribution présente la particularité d’être exclusive et d’ordre
public. Cette question a été troublée par le jeu de différentes réformes du COJ. La question se
pose de savoir si ce caractère exclusif de la compétence déroge encore au droit commun de la
compétence d’attribution, puisque l’article 92 du CPC indique qu’un juge incompétent peut
relever d’office son incompétence (si la règle de compétence est d’ordre public ou si le
défendeur ne comparaît pas). Dans la version de l’ordonnance du 8 juin 2006 il était précisé
que le JEX devait relever son incompétence alors que ne c’est qu’une simple faculté pour le
juge de droit commun. Mais depuis la seule indication qui reste est que le JEX exerce ses
compétences de manière exclusive. Le décret du 31 juillet 1992, à propos de la compétence
particulière en matière de liquidation de l’astreinte précise que pour l’application de l’article
35 de la loi de 91 l’incompétence est relevée d’office par le juge saisi d’une demande en
liquidation de l’astreinte. Si en matière de liquidation la compétence du JEX est exclusive et
que tout autre juge doit relever son incompétence on pourrait penser qu’encore aujourd’hui,
contrairement au droit commun, tout autre juge que le JEX saisi d’une question relevant de sa
compétence, doit relever d’office son incompétence.
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2] La multiplicité des fonctions
a) Une fonction juridictionnelle
Ce JEX, sur les contestations dont il est saisi, va statuer au fond avec autorité de la
chose jugée. Cette fonction ne fait aucun doute, et l’article 24 du décret de 92 précise que le
JEX statue comme juge du principal.
b) Une fonction juridictionnelle d’urgence
Au titre de l’urgence le JEX peut intervenir au provisoire ou de manière définitive. En
urgence il peut exercer la juridiction du provisoire. Par exemple en matière de saisie
attribution, si l’urgence le justifie, le JEX a le pouvoir d’accorder une provision au profit du
créancier s’il lui apparaît que ni la créance ni la dette ne sont sérieusement contestables. Le
JEX peut aussi exercer sa juridiction définitive. Par exemple en matière de saisie
appréhension, qui va concerner les obligations de faire dont est débiteur le débiteur saisi, le
créancier dépourvu de titre exécutoire peut obtenir du JEX une injonction de faire et celle-ci
pourra être convertie en titre exécutoire permettant de diligenter une telle saisie. C’est
l’urgence qui va solliciter une telle intervention, mais celle-ci sera à titre définitif.
c) Une fonction modératrice
Le JEX va être investi du pouvoir d’atténuer, de modérer la rigueur de la loi, pour des
raisons d’humanité et d’équité. Cette modération peut autant s’adressée au créancier saisissant
qu’au débiteur saisi. Le débiteur saisi peut obtenir du JEX des prorogations de délais, un
rééchelonnement de la dette, en matière de paiement de la dette et en matière d’expulsion par
exemple (trêve hivernale). De la même façon le débiteur saisi peut saisir le JEX afin d’obtenir
la main levée de l’immobilisation de son véhicule. L’huissier à titre principal ou incident peut
procéder à cette immobilisation. Cette bienveillance peut aussi s’adressée au créancier
saisissant, par exemple en matière d’expulsion. Selon l’article 62 de la loi du 5 juillet 1991
permet au JEX, à la demande du créancier, de réduire les délais de la procédure d’expulsion,
voire leur suppression dès lors que l’occupant du logement est entré dans le local par une voie
de fait.
d) Une fonction conservatoire
Elle peut s’exercée ou à titre principal ou à titre incident. A titre principal il s’agit des
saisies conservatoires. A titre incident le JEX, d’office ou à la demande de l’une des parties,
peut ordonner la consignation ou le placement sous séquestre des biens corporels ou
incorporels qui ont fait l’objet d’une saisie, en attendant le dénouement de la procédure civile
d’exécution.
Toutes ces fonctions du JEX peuvent se manifester au cours d’une même procédure,
elles ne sont pas cloisonnées.
e) Une fonction régulatrice
Si la procédure civile d’exécution a été voulue en 1991 extra judiciaire il n’en reste pas
moins que le juge sera toujours disponible pour permettre le bon déroulement de cette
procédure civile d’exécution. Et pour ce faire cela suppose un JEX toujours disponible pour
donner des autorisations s’il y a lieu ou lever des obstacles s’il y en a.
33
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Donner des autorisations : pour l’exercice d’une saisie conservatoire quand le
créancier n’est pas titulaire d’un titre exécutoire par exemple. Lorsque la procédure civile
d’exécution doit se réaliser dans des circonstances potentiellement attentatoires aux intérêts
du débiteur saisi. Il peut y avoir atteinte aux intérêts du débiteur saisi parce que le législateur a
estimé qu’une procédure civile d’exécution ne peut pas avoir lieu tous les jours de la semaine,
et ne peut s’effectuer qu’à certaines heures. Mais dans le cas contraires il faudra que le juge
accepte.
Lever des obstacles (entravant l’accomplissement de la procédure civile d’exécution) :
cela conduit le législateur a instaurer une procédure particulière régit par les articles 34 et
suivants du décret du 31 juillet 1991, une procédure dite de difficultés d’exécution, qui est à la
disposition de celui qui a compétence pour accomplir tous les actes d’exécution, l’huissier.
Saisi de ces difficultés par l’huissier le JEX va les trancher par une décision ayant autorité de
la chose jugée au principal. Ce sont des difficultés d’ordre matériel, comme par exemple des
individus qui s’opposeraient à l’exécution d’une mesure d’expulsion.
Cette compétence du JEX et ces différentes fonctions n’auraient aucun sens si l’accès
au JEX n’avait pas été conçu de manière simple par le législateur.
B) Les aspects procéduraux de la procédure de l’exécution
Ces fonctions de JEX sont assurées par le président du TGI. Néanmoins le président a
la possibilité de déléguer ses fonctions a un ou plusieurs juges d’instance dépendant de son
ressort. Au titre de cette délégation par un souci de simplicité le législateur a appliquer ici le
principe selon lequel allait suivre le juge, donc en matière de délégation ce sera le greffe du TI
et pas du TGI. Cette délégation de compétence va faire l’objet d’une large publicité dans le
ressort du TGI concerné. Cette délégation sera communiquée aux professionnels du droit, au
bâtonnier de l’ordre des avocats et à la chambre des huissiers. Cette publication sera affichée
dans toutes les mairies du ressort du TGI. C’est une procédure simplifiée sans représentation
obligatoire qui permet de rapprocher le juge du justiciable.
L’effectivité a été également recherchée dans la procédure devant le JEX. S’agissant
de la procédure ordinaire la demande est formée par une assignation. Normalement celle-ci
devrait être déposée au greffe du TGI, mais la fonction du JEX a pu être déléguée à plusieurs
juges d’instance. Donc par faveur pour le créancier si l’assignation a été déposée au greffe du
TGI alors que la compétence a été déléguée à un juge d’instance le tribunal est réputée
valablement saisi. A priori c’est le président du TGI qui va exercer les fonctions de JEX donc
on devrait suivre la procédure de droit commun qui est écrite avec une représentation
obligatoire, mais même lorsque la compétence n’a pas été déléguée à un juge d’instance la
procédure est sans représentation obligatoire et n’est pas écrite, c’est une procédure orale. S’il
n’y a pas de représentation obligatoire néanmoins toute personne peut se faire représenter ou
assister devant le JEX par son conjoint, son partenaire pacsé ou son concubin. Quand à
l’oralité de la procédure elle n’est pas exclusive de tout écrit, mais ici les écritures sont quand
même recevables, dès lors qu’elles auront été communiquées à la partie adverse, et cette
communication sera valable si elle a été faite par LRAR.
S’agissant de la procédure sur requête, procédure unilatérale, il existe une adaptation
en matière de mesures conservatoires et de sûreté judiciaire. En cette matière la procédure sur
requête est ouverte au créancier et la voie de recours est la rétractation, recours devant le
même juge que celui qui a pris la décision et qui va réexaminer l’affaire cette fois à la lumière
d’un débat contradictoire. Mais les procédures civiles d’exécution mettent généralement en
cause des personnes qui sont dans une situation difficile et qui n’auront pas toujours la
possibilité de défendre leurs droits. De plus le JEX peut être saisi par n’importe qui et
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puisqu’il n’y a pas le filtre de l’avocat il peut aussi être saisi de n’importe quoi. Pour éviter de
prendre une décision sans avoir entendu le débiteur le JEX, saisi sur requête, peut se réserver
le droit soit de réexaminer la question en provoquant un débat contradictoire, soit en différant
la décision et en organisant avant toute prise de décision un débat contradictoire. En pratique
cela se fera quand le juge a des doutes sur la solidité du dossier présenté par le créancier.
II – Le ministère public
Ce ministère public, en matière d’exécution et jusqu’à récemment avait 2 rôles
essentiels, un rôle classique qui était de veiller à l’exécution, et une autre mission consistant à
la recherche d’informations sur le débiteur saisie. Le ministère public a été totalement dessaisi
de ce second rôle par une loi du 22 décembre 2010.
Sa mission principale d’exécution est rappelée par l’article 11 de la loi de 91 qui
précise que le procureur veille à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires.
Dans l’exercice de cette mission générale il peut ou provoquer l’exécution ou engager des
poursuites.
Il peut provoquer l’exécution en adressant une injonction à l’huissier, soit que
l’huissier à refuser de prêter son concours à un créancier, soit que l’huissier manque des
diligences attendues dans l’accomplissement de sa mission.
Il peut encore engager des poursuites et ces poursuites seront soit de nature pénale, soit
de nature disciplinaire. Du point de vue pénal le ministère public pourra engager des actions à
l’encontre de personnes qui auraient commis des infractions au préjudice de l’huissier (délit
d’outrage, délit de rébellion, ou violences voire meurtre). Le ministère public a aussi la
mission d’engager des poursuites à l’encontre des auteurs d’infractions au préjudice du
créancier (détournement de biens, délit d’entrave à la liberté des enchères, violation du
domicile par l’huissier) ou à l’encontre du débiteur saisi pour organisation frauduleuse de son
insolvabilité. Du point de vue disciplinaire les poursuites sont celles qui vont visées l’huissier
de justice, qui aurait manqué à ses obligations professionnelles, et plus particulièrement aux
obligations définies par le code de déontologie de la profession. Ce manquement expose
l’huissier à des poursuites pouvant être initiées par le ministère public lui-même s’il a
connaissance de ce manquement, dans ce cas il y aura soit citation directe de l’huissier devant
le TGI statuant au disciplinaire soit demande au syndic de dénoncer ces manquements à la
chambre départementale des huissiers. Mais si le ministère n’a pas connaissance de ces
manquements le syndic pourra prendre l’initiative des poursuites disciplinaires, il devra en
informer le ministère public, qui se trouvera alors devant la même alternative que
précédemment.
Section II – Les personnes chargées de l’exécution
Les opérations d’exécution ne pourraient pas être confiées au créancier saisissant lui-
même. La personne chargée de l’exécution, dans la loi de 1991, est l’huissier de justice
(article 18 de la loi). Seuls peuvent procéder à l’exécution forcée et aux saisies conservatoires
les huissiers de justice chargés de l’exécution. Les huissiers ont un véritable monopole, ils ont
la qualité à la fois d’officier public et ministériel. Cela étant les huissiers ne sont pas les seuls
à intervenir pour assurer l’exécution forcée, l’article 81 de la loi de 1991 réserve la
compétence d’autres autorités définies par la loi. Ces autres autorités sont par exemple le
greffe du TI en matière des saisies des rémunérations du travail, les agents d’exécution du
trésor pour les actes des personnes de droit public.
Ce monopole entraîne des obligations à la charge de l’huissier, et notamment une
obligation d’agir, qui se comprend dans la mesure où il est le seul habilité par la loi à mener
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une procédure civile d’exécution. Cette obligation est énoncée à l’article 18 al. 2 de la loi de
91 qui énonce le principe, qui est immédiatement tempéré par une exception. Les huissiers
peuvent se soustraire à cette obligation de prêter leur ministère ou leur concours dès lors que
la mesure sollicitée par le créancier leur paraît revêtir un caractère manifestement illicite, ou si
le montant des frais paraît manifestement susceptible de dépasser le montant de la créance
réclamé, en application du principe de proportionnalité, sauf dès lors qu’il s’agit d’exécuter
une condamnation symbolique.
Quant au contenu de l’obligation qui pèse sur l’huissier, il est défini en termes
généraux par l’article 19 de la loi de 1991. Dans la mesure où l’huissier à un monopole
d’exécution c’est à lui qu’incombe la conduite des opérations d’exécution. Il doit accomplir
toutes les diligences nécessaires pour mener à bien sa mission, c’est à lui et non au créancier
de saisir le JEX s’il a besoin d’une autorisation par exemple. La relation juridique qui se noue
entre l’huissier et le créancier saisissant est un mandat, l’huissier va agir au nom et pour le
compte du créancier saisissant. Ce mandat doit être exécuté personnellement par l’huissier, ce
qui signifie qu’aucune délégation n’est possible. Par exemple dans un arrêt de la 2
e chambre
civile du 28 juin 2006 était en cause la signification d’un acte de saisie attribution qui avait été
accompli non par l’huissier lui-même mais par un clerc assermenté. L’acte a été annulé par la
Cour de cassation, ce qui paraît rigoureux car dans cette affaire l’acte avait été rédigé par
l’huissier.
S’agissant de la responsabilité de l’huissier, il encourt une responsabilité contractuelle
à l’égard du créancier saisissant, et une responsabilité délictuelle à l’égard du débiteur et du
tiers saisi. La loi du 22 décembre 2010 relative à l’exécution des décisions de justice a
contribué à un renforcement des pouvoirs de l’huissier. Cette loi a contribué à renforcer la
force probante des constats d’huissier, qui font foi jusqu’à preuve contraire. Une autre
amélioration est relative à la signification des actes puisque désormais l’huissier à accès au
dispositif d’appel et aux boîtes aux lettres particulières des habitations en copropriété. C’est le
propriétaire de l’immeuble ou le syndic de propriété qui aura compétence pour autoriser
l’huissier à accéder aux parties communes de l’immeuble.
Section III – La force publique
L’huissier doit solliciter, en cas de besoin, le concours de la force publique si par
exemple il a besoin de renfort pour entrer dans un local dont on lui refuserait l’entrée, ou pour
procéder à une expulsion. Dans ces cas c’est l’article 17 de la loi de juillet 1991 qui lui donne
la faculté de « requérir le concours de la force publique », auprès d’une autorité administrative
(maire, préfet ou commissaire de police). La loi du 9 juillet 1991 s’est contentée d’inscrire
dans la loi les solutions jurisprudentielles adoptées par le CE puisque l’article 16 précise que
l’Etat est tenu de prêter son concours à l’exécution des jugements et des autres titres
exécutoires. C’est la transcription dans la loi de la jurisprudence Couiteas, qui précise que le
refus opposé par l’Etat ouvre droit à réparation. Il peut y avoir refus quand l’autorité
administrative estime qu’entre deux morts il y a eu lieu d’éviter le plus important, c'est-à-dire
l’exécution de la décision de justice. Il a 2 troubles potentiels à l’ordre public, l’inexécution
d’une décision de justice ou un trouble ponctuel. Cette atteinte à des intérêts permet d’obtenir
l’engagement de la responsabilité de l’Etat pour rupture de l’égalité devant les charges
publiques et ouvre droit à une compensation financière.
Chapitre II – Le déroulement des opérations d’exécution
Le déroulement de la procédure civile d’exécution dépend de la procédure qui va être
engagée par l’huissier, mais il existe tout de même un tronc commun, certains actes qui se
retrouvent nécessairement dans tout PCE. Il y a trois moments dans la procédure civile
36
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d’exécution : la recherche d’informations sur le débiteur, l’acte de saisi, et le respect des
droits fondamentaux.
Section I – La recherche d’informations
C’était une question importante en 1991 du fait des mutations sociales et économiques,
c'est-à-dire l’opacité des patrimoines (moins visibles qu’auparavant), la mobilité des
personnes et l’urbanisation qui conduit à l’anonymat. Pour lever le voile entourant toutes les
informations sur le débiteur il a paru nécessaire d’instaurer une procédure spécifique de
recherches d’informations, parce que le débiteur peut un certain secret sur sa situation et parce
que le créancier saisissant ne dispose pas toujours des informations qui permettraient à
l’huissier de mener à bien ses mesures d’exécution. C’est connaître l’adresse de son débiteur,
celle de son employeur et l’établissement bancaire qui va gérer ses comptes.
Dans cette recherche d’informations il y a des informations qui sont publiques et qui
peuvent concernées autant les biens que les personnes.
S’agissant de celles relatives aux biens il y en a qui concernent les immeubles et
d’autres les meubles.
Pour les immeubles :
o Il y a toujours la possibilité pour l’huissier de consulter le cadastre, mais cette
consultation présente l’inconvénient que le cadastre peut contenir des erreurs et
celui qu’il n’est pas centralisé (tenu par chaque commune), donc sans l’adresse
du débiteur cette consultation est veine. Il y a eu une entreprise de
centralisation du cadastre par Internet mais elle n’est d’aucune utilité puisque
cette version n’est pas nominative, du fait de la CNIL.
o C’est la même chose pour la consultation des registres tenus par les
conservations des hypothèques qui ne sont pas centralisés.
Pour les meubles : cela va concerner tous les meubles qui font l’objet d’une
immatriculation, mais c’est une catégorie de meubles rares dans le patrimoine des
débiteurs (bateau, navire et aéronef). Il existe d’autres biens meubles incorporels qui
font l’objet d’une immatriculation, comme tous les droits de propriété industrielle qui
vont être enregistrés dans les registres de l’INPI (institut national de la propriété
industrielle). Un autre bien meuble pourrait être intéressant, il s’agit du véhicule
automobile, mais le registre tenu par la préfecture n’est pas public.
Les informations publiques relatives aux personnes existent mais vont être d’un intérêt
relativement limité. On songe à la consultation des listes électorales qui permettraient de
localiser le débiteur, mais cette inscription n’est pas obligatoire et peut ne pas être à jour. Il y a
aussi le RCS quand le débiteur est tenu de s’immatriculer, on trouvera des informations sur lui
par ce registre qui fait l’objet d’une centralisation par l’INPI. C’est une information publique
mais depuis 2007 les informations portées sur le RCS ont diminués, il n’y a plus
d’informations relativement au conjoint du commerçant et relativement à son régime
matrimonial. Les informations les plus pertinentes ne sont pas publiques (adresse, lieu
d’ouverture des comptes, etc.).
Face à ce secret dont peut s’entourer le débiteur saisi on comprend la nécessité
d’organiser une procédure de recherche d’informations. Les informations pertinentes vont être
détenues par les administrations, notamment l’administration fiscale, les organismes sociaux,
et les établissements bancaires. Tous ces professionnels sont tenus au secret et pour les
amener à collaborer il faut une loi qui les oblige à ne pas pouvoir opposer le secret
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professionnel à l’huissier. Cette procédure est inscrite à l’article 39 de la loi de 1991 pour le
droit commun, et jusqu’à la loi du 22 décembre 2010 la procédure établissait une
collaboration entre l’huissier et le ministère public, parce que on allait contraindre certains
professionnels à lever le secret et les obliger à livrer des informations qui concernent la vie
privée d’un individu. La Cour de cassation estime que les informations patrimoniales relèvent
de la sphère privée. Face à ceci le système élaboré était de permettre à l’huissier de saisir une
autorité judiciaire, le ministère public, pour contrôler cette intrusion. Cet équilibre a été
supprimé par la loi de 2010, avec laquelle on a assisté à un renforcement considérable des
pouvoirs d’investigation de l’huissier, qui avait déjà commencé en 2004 puisque l’huissier a
eu la possibilité d’avoir un accès indirect au fichier des comptes bancaires (FICOBA). A
partir de 2010 toutes les infirmations qui ne pouvaient être obtenues qu’en passant par le
ministère public peuvent l’être par l’huissier. L’huissier interroge directement les
administrations, les organismes publics pour obtenir l’adresse du débiteur, de son employeur,
voire l’identité de tiers qui détiendraient des sommes pour le compte du débiteur saisi (comme
un locataire). L’huissier a la possibilité de solliciter les établissements bancaires, qui doivent
révéler à l’huissier s’ils gèrent un ou plusieurs comptes au nom de tel ou tel individu.
L’huissier de justice dispose dans le droit commun des mêmes pouvoirs que ceux dont
il disposait en matière de recouvrement des créances alimentaires. La Commission
européenne a lancé un livre vert relatif à la transparence des patrimoines des débiteurs dans
l’UE. Il a été adopté le 6 mars 2008 pour faciliter la recherche d’informations au sein de l’UE,
et il doit être mis en parallèle avec le livre vert sur la saisie conservatoire des avoirs bancaires.
Section II – L’acte de saisi
C’est la formalité essentielle de la PCE, c’est un acte qui obéit à un formalisme
rigoureux et qui a un effet décisif dans le déroulement de la PCE.
I – L’établissement de l’acte de saisi
Cet acte est celui qui va être accompli par l’agent chargé de l’exécution, c'est-à-dire
l’huissier de justice. C’est un acte d’huissier dont le formalisme est prévu par les articles 648
et suivants du CPC. L’article 648 précise quelles sont les mentions qui doivent
obligatoirement figurées sur cet acte. Il faut la date, des éléments d’identification pour savoir
qui va être intéressé par cette PCE : la personne qui a saisie l’huissier, la personne requise
(l’huissier) et des éléments d’identification sur les personnes à qui cet acte doit être notifié.
Au-delà de ces infirmations le contenu de l’acte de saisi contient des mentions envisagées
dans le décret de 1992.
C’est un acte qui doit être régulier. S’il est irrégulier le traitement de cette irrégularité
sera celui qui est généralement réservé aux actes de procédure, on retrouve la distinction entre
les irrégularités de fond qui entraînent une nullité automatique de l’acte de saisi (irrégularités
précisément et limitativement énumérés par l’article 117 du CPC : défaut de pouvoir et défaut
de capacité), et irrégularités de forme, qui n’entraîneront nullité que si l’irrégularité fait grief à
celui qui la recherche.
II – Les effets de l’acte de saisi
Ils sont décrits en termes généraux par l’article 29 par la loi du 9 juillet 1991. Cet
article va d’abord indiqué un effet général commun à toutes les saisies, et deux effets
généraux propres à certaines PCE.
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Concernant l’effet général de l’alinéa 1er l’acte de saisi rend indisponible les biens qui
en font l’objet. Cela entraîne une conséquence pour le débiteur qui perd la libre disposition du
bien, et une pour les autres créanciers pour lesquels l’indisponibilité fait obstacle à la mise en
œuvre d’une nouvelle saisie portant sur ce même bien.
Concernant les deux effets particuliers : le premier (alinéa 2) vise toute saisie d’un
bien meuble corporel et indique qu’à compter d’un acte de saisi le saisi, débiteur ou tiers, est
institué gardien du bien. Il assume à l’égard de celui-ci les obligations d’un dépositaire, la
conservation du bien et serait pénalement responsable en cas de dégradation ou de destruction
du bien. Néanmoins le tiers n’est pas obligé d’assumer la charge de gardien et tout en étant
saisi le débiteur pourra quand même continué à utilisé ce bien le temps de la PCE. Le
deuxième effet spécial (alinéa 3) envisage le cas de la saisie qui porte sur une créance et
indique que si la saisie porte sur une créance elle en interrompt la prescription. Dès lors que
cette créance est visée par un acte de saisie elle n’est plus soumise au délai de prescription.
Section III – Le respect des droits fondamentaux
Ces opérations de saisie sont placées sous l’influence de deux grands principes, le
premier qui va intéresser toutes les parties à la procédure est le principe du contradictoire, et
suivant le second les PCE doivent s’attacher à respecter les droits fondamentaux du saisi qu’il
soit débiteur ou tiers.
I – Le principe du contradictoire
L’application du contradictoire dans les PCE est suggérée par le décret du 31 juillet
1992 puisque l’article 1
er précise qu’il comporte les dispositions relatives au principe du
contradictoire. Ce principe va s’appliquer devant de juge de l’exécution puisque les PCE sont
extra judiciaires alors qu’en principe le contradictoire ne s’applique que dans les procédures
judiciaires. Malgré tout il semble que ce principe n’ait pas vocation à demeurer dans
l’enceinte des tribunaux et il a vocation à rayonner dans toutes les procédures. Ce principe va
se refléter tout au long des PCE où le législateur s’est attaché à permettre l’information des
parties à tout stade de l’exécution, à assurer la communication des informations détenues par
une partie à l’autre et ce souci de communication concourt à placer dans la procédure le
débiteur saisi et le créancier sur un pied d’égalité (par exemple dans la loi du 9 juillet 1991
l’article 27 ou article 5 du décret de 1992). Cela fait penser au principe de l’égalité des armes.
Du point de vue de cet article 5 on se place d’abord du point de vue du débiteur qui doit une
information à l’huissier en cas de saisie antérieure. L’alinéa 3 se place du point de vue du
créancier saisissant dans l’hypothèse ou d’autres créanciers se sont joints à la procédure qu’il
avait initiée. Dans ce cas le créancier qui avait initié la PCE conserve la maîtrise des
opérations. Il doit informer tous les autres créanciers qui se sont joints à la procédure. mais les
autres créanciers peuvent prendre la conduite des opérations si le créancier initial n’est pas
diligent.
Mais le respect des droits fondamentaux c’est aussi la protection du saisi.
II – La protection du saisi
Qu’il s’agisse du débiteur ou du tiers il y a une protection du saisi. Une PCE souvent
réalisera une ingérence, une atteinte à la vie privée du débiteur, et elles peuvent aussi
constituer une atteinte au droit du respect du domicile. Traditionnellement deux dispositions
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sont invoquées concernant le respect de la vie privée du saisi, et qui tendent à limiter les
perturbations que peut causer le créancier saisissant dans la vie du saisi. C’est pourquoi il y a
un moment pour pratiquer des PCE, l’article 28 al. 1 de la loi du 9 juillet 1991 précise
qu’aucun mesure d’exécution ne peut être effectué un dimanche ou un jour férié sauf en cas
de nécessité avec une autorisation spéciale du juge. Il faudra convaincre le juge d’une réelle
nécessité. L’alinéa 2 de cet article précise encore qu’aucune mesure ne peut être commencée
avant 6h et après 21h, avec les mêmes limitations qu’à l’alinéa 1
er. Là encore une exception
est possible, mais elle ne pourra jamais conduire à l’exécution d’une mesure dans un local
servant à l’habitation du débiteur.
Cela montre le lien qu’il peut y avoir entre la protection de la vie privée et la
protection du domicile. Ce dernier a d’ailleurs développé certaines dispositions spécifiques.
L’article 21 de la loi de la loi de 1991 vise l’hypothèse où l’huissier se présente à un local
mais que son occupant est absent. L’article précise que dans ce cas l’huissier ne peut y
pénétrer qu’en présence du maire, d’un conseiller municipal, d’un fonctionnaire délégué, etc.
pour aboutir à la conciliation entre les différents intérêts que l’huissier peut entre mais il ne
peut pas le faire seul, il doit être accompagné de témoins neutres, il peut s’agir d’une autorité
publique ou à défaut de témoins majeurs neutres. L’huissier pourra effectivement entrer au
domicile du débiteur mais les opérations seront sous surveillance pour protéger les intérêts du
débiteur. Une fois que l’huissier est entré en cas d’absence de l’occupant l’article 30 de la loi
dispose que l’huissier assure la fermeture de la porte ou de l’issue par laquelle il aurait
pénétrer dans les dits lieux.
DEUXIÈME PARTIE – LES RÈGLES PROPRES AUX DIFFÉRENTES SAISIES
TITRE I – LES SAISIES MOBILIÈRES
Ce sont les saisies statistiquement le plus pratiquées, notamment en raison de leur
simplicité. On explique cette simplicité en raison du faible enjeu de la procédure puisque
traditionnellement les biens meubles n’ont que peu de valeur. Mais aujourd’hui on évoque
cette simplicité au regard de la complexité de la saisie immobilière, ce qui est donc relatif. La
différence entre les deux tient essentiellement à la protection des tiers et à la nécessité de les
informer en matière immobilière, parce que les mesures de publicité en matière immobilière
conditionnent l’opposabilité des droits et le créancier saisissant a tout intérêt a être informé de
l’existence de tiers titulaires de droits réels sur un immeubles. Ce sont encore aujourd’hui ces
caractéristiques qui expliquent la popularité des saisies mobilières.
Certaines saisies tendent à sauvegarder les droits du créancier (saisies conservatoires)
et d’autres ont pour objet l’exécution des droits du créancier (saisies exécution). Dans la loi de
1991 il y a explicitement des dispositions qui traitent de l’exécution et d’autres qui traitent des
saisies conservatoires.
Chapitre I – Les saisies d’exécution
Ce sont les saisies qui ont pour finalité l’exécution forcée d’un titre exécutoire. Ces
différentes saisies se distinguent selon la nature du bien meuble qui va faire l’objet de la
saisie. C’est une distinction classique qui reprend l’opposition entre bien meuble incorporel et
bien meuble corporel.
Section I – La saisie de biens meubles incorporels
Sur cette question la loi du 9 juillet 1991 prévoit de manière large la possibilité
d’intenter une PCE sur des biens meubles incorporels. Mais le décret du 31 juillet 1992 ne
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prévoit que des cas spéciaux, seuls sont organisés les saisies de créances de somme d’argent,
et les saisies portant sur les droits de l’associé et les valeurs mobilières. Néanmoins cela ne
comprend pas tous les biens meubles corporels ayant une valeur patrimoniale, donc la
jurisprudence a organisé la saisie de ces autres biens meubles incorporels.
I – Les saisies relatives aux créances de sommes d’argent
Dans le droit antérieur une saisie de créances de somme d’argent existait, la saisie
arrêt. Cette saisie est devenue depuis la loi de 1991 la saisie attribution. De la saisie arrêt à la
saisie attribution s’est opéré un changement radical de procédure, de mesures, puisque la
saisie attribution apparaît beaucoup plus rapide et plus efficace que l’ancienne saisie arrêt.
Cette saisie attribution n’implique pas une intervention systématique du juge. L’exécution
forcée suppose un titre exécutoire donc pour recourir à la saisie des créances il est
indispensable d’être titulaire d’un tel titre, alors que la saisie arrêt était ouverte à tout
créancier. La saisie attribution est aussi plus efficace parce que la saisie attribution entraîne
dès l’établissement de l’acte de saisie attribution immédiate de la créance objet de la saisie au
créancier saisissant. Cela signifie que le créancier saisissant n’a pas à redouter un quelconque
concours avec d’autres créanciers. L’ancienne saisie arrêt ne conférait aucun droit immédiat
au créancier saisissant sur la créance objet de la saisie, donc si d’autres créanciers saisissaient
la même créance le 1
er saisissant devait saisir le juge pour obtenir un cantonnement des autres
saisies. Mais ce système n’a plus lieu d’être.
Cette saisie attribution n’est pas la seule procédure applicable en matière de saisie des
créances, c’est en quelque sorte la procédure de droit commun, mais qui va coexister avec des
procédures particulières.
A) La saisie de créances de droit commun – la saisie attribution
Elle est envisagée par les articles 42 et suivants de la loi de 1991, et les articles 55 et
suivant du décret de 1992. Selon tant la loi que le décret la saisie attribution est une procédure
permettant à un créancier munit d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et
exigible de saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une
somme d’argent. 3 personnes sont donc concernées sur cette procédure, le créancier qui va sur
le fondement d’une créance dont il est titulaire à l’égard du titulaire saisi pratiquer une saisie
entre les mains d’une autre personne, un tiers, laquelle étant débiteur du débiteur saisi. Dans
ce rapport tripartite il y a donc deux créances, la créance qui unie le saisissant et le débiteur
saisi, c’est la créance cause de la saisie, et la créance qui existe entre le débiteur saisi et le
tiers saisi, c’est la créance objet de la saisie.
1] Les conditions de la saisie attribution
a) Les conditions relatives aux personnes
Cf première partie du cours. Des précisions doivent être apportées à l’égard du tiers
entre les mains de qui la saisie sera pratiquée. Ce tiers est toujours tiers au regard du débiteur,
cette appellation peut paraître étrange dans la mesure où il n’est pas étranger au débiteur saisi
puisque c’est son débiteur. On utilise ce terme pour insister sur le fait que ce tiers, pour avoir
la qualité de tiers saisi dans une saisie attribution, doit détenir des sommes dues au débiteur en
vertu d’un pouvoir propre et indépendant. On trouvera par exemple le dépositaire (d’un
établissement bancaire), le mandataire, ou le représentant légal. Concrètement ces personnes
seront par exemple des banquiers, des notaires, un séquestre, les avocats, le locataire, un
tuteur du débiteur saisi, etc. Cela exclut de la catégorie des tiers saisis dans une saisie
attribution un préposé par exemple.
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Cette appellation de tiers saisi se justifie encore au regard du créancier saisissant,
puisque a priori il n’existe aucun lien de droit entre le créancier saisissant et le tiers saisi avant
la mise en œuvre de la saisie attribution. Mais le tiers saisi ne sera pas toujours totalement
étranger au créancier saisissant puisqu’il est envisageable que le créancier saisissant soit le
tiers saisi. Une personne peut pratiquer une saisie attribution entre ses propres mains et avoir
ces deux qualités. Par exemple un banquier qui aurait octroyé un prêt à une personne dont elle
gère les comptes, en cas de non remboursement des échéances la banque pourrait pratiquer sur
elle-même une saisie attribution. L’avantage c’est que le créancier saisissant pourra opérer
une compensation entre les dettes, éteindre la dette du débiteur saisi par compensation de sa
dette à l’égard du débiteur saisi.
b) Les conditions relatives aux créances
Dans la saisie attribution deux créances sont nécessairement en jeu, la créance cause
de la saisie et la créance objet de la saisie.
La créance cause de la saisie : elle doit être actuelle, liquide et exigible. Du point de
vue de la forme elle doit être constatée dans un titre exécutoire. Par exemple si la créance
cause de la saisie est une créance à exécution successive comme une créance de loyer, seuls
les loyers échus et non payés peuvent motiver la mise en œuvre d’une saisie attribution.
La créance objet de la saisie : la saisie attribution ne va concerner que les créances
de somme d’argent. Il fait vérifier que cette créance est saisissable au jour de la saisie, elle
doit donc être certaine, c'est-à-dire figurer dans le patrimoine du débiteur. La loi de 1991
permet malgré tout la saisie de créances conditionnelles. La saisie attribution ne sera pas
possible dès lors que la créance aura fait l’objet d’une cession de la part du débiteur saisie.
Encore faut-il vérifier que cette créance est disponible, parce que dans certaines hypothèses
on peut avoir une créance figurant dans le patrimoine du débiteur qui sera frappé
d’indisponibilité et donc d’insaisissabilité.
Certains mécanismes contractuels vont aboutir à l’indisponibilité d’une créance
figurant pourtant dans le patrimoine du débiteur saisi, comme par le mécanisme de la
délégation imparfaite. Une personne le déléguant, va donner l’ordre à un délégué de payer
une tierce personne bénéficiaire de la délégation, le délégataire. Il y a normalement un rapport
de créance entre le délégataire et le délégant. En payant le délégataire le délégué va éteindre la
dette du délégant envers le délégataire. Si le délégué ne paie pas le délégataire pour demander
le paiement au déléguant. Dans la délégation imparfaite le délégué est lui-même débiteur du
déléguant. En payant le délégataire le délégué va alors éteindre sa propre dette à l’égard du
déléguant et dans la proportion de sa dette la dette du délégant envers le délégataire. AU
regard des PCE, la question se pose de savoir ce que devient dans ce type de délégation la
créance du délégant sur le délégué, parce que tant que le délégué n’a pas payé le délégataire
sa dette à l’égard du délégant demeure. On peut rencontrer l’hypothèse d’un conflit entre un
créancier du délégant et le délégataire. Le délégataire va demander le paiement au délégué et
le créancier du déléguant veut pratiquer une saisie attribution entre le déléguant et le délégué.
Le délégué doit il payer le délégataire ou le créancier du délégant ? La chambre commerciale
a précisé par un arrêt du 14 février 2006 que si la créance du délégant sur le délégué s’éteint
seulement par le fait de l’exécution de la délégation, ni le délégant ni ses créanciers ne
peuvent avant la défaillance du délégué envers le délégataire exiger le paiement. Les juges
privilégient donc le délégataire.
Si cette créance est à exécution successive est-il indispensable de renouveler
périodiquement la saisie attribution ? Non puisque dans ce cas la saisie vaut pour l’intégralité
de la créance jusqu’à l’extinction de la créance cause de la saisie.
42
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Il y a encore des dispositions particulières qui concernent la créance objet de la saisie
quand celle-ci est un solde de compte bancaire. Ce qui fait l’objet de la saisie c’est le solde
sous réserve qu’il soit positif. Une fois la saisie pratiquée le compte est frappée
d’indisponibilité dans son intégralité pendant 15 jours pour permettre au banquier de
régulariser les opérations en cours, de les imputer. On va déterminer le solde le jour où la
saisie est réalisée, tout ce qui excède le montant de la créance cause de la saisie va échapper à
l’attribution immédiate. Une fois les régularisations effectuées deux situations peuvent se
présenter : celle dans laquelle le total cumulé des opérations en cours fait apparaître un crédit,
cela va alors s’ajouter au sole positif qui avait été arrêter au jour de l’établissement de l’acte
de saisi. Mais si le total cumulé fait apparaître un débit va se poser une question d’imputation,
doit-on imputer ce débit sur la fraction du solde créditeur qui fait l’objet de la saisie ou sur la
fraction du solde positif excédant la cause de la saisie ? La réponse va en faveur du créancier
saisissant puisque le débit sera imputé par priorité sur la partie du solde créditeur excédant le
montant de la créance cause de la saisie. Le débiteur pourra quand même obtenir du banquier
la mise à l’écart immédiate d’une somme à caractère alimentaire. Le solde débiteur de la
saisie attribution correspond donc au solde au jour de la saisie moins cette somme mise à
l’écart comme le montant du RSA par exemple.
2] La procédure de saisie attribution
a) Les règles générales
La procédure de saisie-attribution, d’une manière générale, se dissocie en trois phases :
l’acte de saisie, la dénonciation de la saisie au débiteur, et enfin le dénouement de la saisie-
attribution.
: la saisie proprement dite : On peut déceler deux temps :
1 ère phase
1/ L’établissement de l’acte de saisie : c’est un acte d’huissier devant contenir un
certain nombre d’éléments prescrits à peine de nullité. Au-delà de ces précisions générales, les
différentes mentions de l’acte de saisie sont plus ou moins tributaires de la mesure pratiquée.
Et pour la saisie-attribution, les mentions devant obligatoirement figurer dans l’acte de saisie
sont mentionnées à l’art. 56 du décret de 1992. Une fois cet acte établi et signifié aux tiers, cet
acte va emporter un certain nombre de conséquences… ;
2/ Les conséquences emportées par cet acte de saisie : 1) Parmi les plus importantes
conséquences, on trouve un effet interruptif de la prescription de la créance cause de la saisie
(effet général). Il y a également l’effet particulier d’interruption de la prescription de la
créance objet de la saisie ; 2) L’établissement de cet acte de saisie emporte attribution
immédiate de la créance objet de la saisie au créancier saisissant. Cette attribution est prévue
par l’art. 43 al. 1
er de la loi de 1991. Ce qui résulte de ce texte c’est une distinction à opérer
dans ce mécanisme de l’attribution immédiate entre la créance saisie et les sommes saisies. La
saisie-attribution vise une créance déterminée dont est titulaire le débiteur saisi. En revanche,
l’attribution immédiate, cet effet là, ne vise pas nécessairement la créance dans sa totalité. Le
mécanisme de l’attribution immédiate est claqué sur la créance cause de la saisie. L’attribution
immédiate ne se fait qu’à concurrence de la créance cause de la saisie. L’attribution
immédiate opère dans cette double limite et ne concernera que la plus faible de ces deux
sommes. C’est une attribution immédiate, qui s’opère immédiatement, cad que dès
l’établissement de l’acte de saisie, la créance dont est titulaire le débiteur saisi sur le tiers saisi
est sortie du patrimoine du débiteur saisi et est entrée dans la patrimoine du créancier
saisissant. Cela explique pourquoi en matière de saisie-attribution toute idée de concours entre
créanciers est exclu. La seule hypothèse de concours pouvant être envisagée c’est le cas de
saisies-attribution simultanées ; 3) L’indisponibilité de la créance saisie. Cette indisponibilité
peut se décliner tout d’abord dans les rapports entre le tiers saisi et le créancier saisissant.
Pourquoi parle-t-on ici d’ »indisponibilité » ? Parce que si la créance est immédiatement
attribuée au créancier saisissant, le paiement en revanche est différé. Cela veut dire que
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jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois, le tiers saisi ne peut pas payer le créancier
saisissant. Alors pourquoi attendre entre l’attribution immédiate et le paiement ? Pour
permettre aux différentes parties, intervenants de former d’éventuelles contestations à
l’encontre de cette saisie-attribution (contestations émanant du tiers ou du débiteur saisi).
Cette indisponibilité se vérifie également dans les rapports entre le tiers saisi et le débiteur
saisi (= créancier du tiers saisi). A compter de l’établissement de l’acte de saisi, le tiers saisi
ne peut plus valablement payer le débiteur saisi. Cette interdiction est tout à fait logique
puisque par l’effet de l’attribution immédiate, la créance dont était titulaire le tiers saisi à
l’égard du débiteur saisi ne figure plus dans son patrimoine. Plus concrètement, le tiers saisi,
s’il paie malgré tout le débiteur saisi, ce tiers saisi ne serait pas libéré de sa dette car il paierait
la mauvaise personne. Et selon la règle, « qui paie mal, paie deux fois ». Le tiers saisi devrait
donc payer une seconde fois le tiers saisissant qui lui est le véritablement créancier du tiers
saisi. Cette indisponibilité interdit dans les relations entre le tiers saisi et le débiteur saisi le
paiement mais aussi toute opération sur la créance (pas de compensation, pas de novation, pas
de cession, pas de remise de dette, pas de délégation). Mais il faut reporter dans les relations
entre le tiers saisi et le débiteur saisi la distinction entre la créance objet de la saisi et les
sommes qui sont saisies attribuées. On va retrouver l’indisponibilité que sur la créance cause
de la saisie-attribution. En raison de cet effet d’indisponibilité, il peut en résulter une situation
relativement contraignante, gênante pour le créancier saisissant, pour le tiers saisi et pour le
débiteur saisi. Une situation gênante pour le tiers saisi car à compter de la signification de
l’acte de saisie, il ne peut pas se libérer de sa dette : il ne peut pas encore payer de tiers saisi et
il ne peut déjà plus payer le débiteur saisi. Situation gênante également pour le créancier saisi
car le risque à attendre pendant un certain délai le paiement c’est l’insolvabilité. Situation
gênante également pour le débiteur saisi car il avait un élément d’actif qui lui aurait permis de
se libérer… si bien que de l décret de 1992, dans son art. 57 prévoit des alternatives pour
sortir de cette situation, et notamment le paiement immédiat mais surtout l’art. 57 prévoit que
les sommes saisies et donc comprises dans l’attribution immédiate peuvent faire l’objet d’une
consignation entre les mains d’un séquestre qui sera désigné à l’amiable ou, à défaut d’accord
entre les parties, qui sera désigné par le juge. Ce séquestre peut être un huissier, un notaire ou
encore la caisse des dépôts et des consignations. Entre ces deux alternatives, pourquoi la
consignation plutôt que le paiement ? La consignation sera préférée lorsque l’issue est
incertaine et qu’une personne veut contester la saisie (lorsque la situation est litigieuse,
incertaine).
La saisie proprement dite comprend un autre élément, à savoir la déclaration du tiers
saisi. Cette déclaration est une obligation que la loi met à la charge du tiers et qui a pour fait
générateur la signification de l’acte de saisie. S’agissant du contenu de cette déclaration, dès
la signification de l’acte de saisie, le tiers doit préciser à l’huissier quelle est la nature est
l’étendue (montant) du lien juridique qui le relie au débiteur saisi. Et éventuellement le tiers
doit dire toutes les modalités affectant l’obligation (à terme ou conditionnelle). Le but de la
communication de ces éléments est double : 1) S’assurer que la personne à qui l’acte de saisie
a été signifié est réellement débitrice du débiteur saisi ; 2) Prévenir toute collusion entre le
tiers saisi et le débiteur saisi. Pourquoi cette déclaration est-elle si importante ? Parce que
l’exactitude de cette déclaration est une condition pour le tiers pour échapper à une éventuelle
responsabilité. Ces sanctions sont des DI en cas de déclaration mensongère ou inexacte et, en
cas de refus d’opérer la déclaration (refus de collaborer), la sanction est que le tiers est exposé
à payer les causes de la saisie (le tiers devra payer la créance cause de la saisie et non plus
seulement la créance objet de la saisie).
Illustration de cette exécution défectueuse par un
tiers
: Civ. 2, 14 février 2008 : dans cette affaire, le créancier saisissant avait fait une saisie-
attribution. Le tiers saisi était BNP Paribas. Le créancier saisissant avait assigné le débiteur
saisi, donc la banque, en paiement des causes de la saisie parce qu’elle estimait que la banque
avait refusé de coopérer à la mise en œuvre de la saisie-attribution. L’acte de saisie avait été
signifié au siège de la banque. Et quand elle a reçu l’acte de saisie, la banque a déclaré
l’intégralité des sommes qu’elle détenait pour le compte du débiteur saisi. La particularité
c’est que le débiteur saisi détenait des fonds à la fois en France (dans une agence BNP) mais
44
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également à l’étranger, plus particulièrement dans une agence BNP située dans la principautés
de Monaco. Et la banque avait déclaré tous les avoirs détenus par le débiteur. La difficulté est
intervenue au moment de la mise en œuvre de l’attribution immédiate des sommes saisies
parce que la banque a opposé le caractère strictement territorial des voies d’exécution. La
banque, s’appuyant sur cette stricte territorialité des voies d’exécution, a dit qu’il fallait faire
une distinction entre le contenu de sa déclaration et le contenu de l’attribution immédiate. Du
point de vue de la déclaration, elle doit mentionner tous les avoirs du débiteur. En revanche,
du point de vue de l’attribution immédiate, ne peuvent être concernés que les avoirs détenus
sur le territoire français. et donc, au moment de l’attribution immédiate, la banque n’a
considéré comme frappés d’indisponibilité que les avoirs détenus en France. Et donc le
créancier saisissant a agi en paiement des causes de la saisie. La Ccass saisie sur pourvoi du
créancier saisissant a refusé cette distinction entre la déclaration et l’attribution immédiate des
fonds détenus par le tiers saisi. La Ccass estime au contraire que tous les avoirs qui sont
détenus par le tiers saisi, quelque soit leur localisation, sont susceptibles d’être compris dans
l’attribution immédiate. D’un côté, la solution se justifie certainement puisqu’en l’occurrence
ce qui était en cause c’était une succursale de la BNP à Monaco. Contrairement à une filiale,
la succursale ou l’agence n’a pas la personnalité juridique. Donc contrairement à une filiale,
l’agence n’est pas réputée détenir personnellement les fonds déposés. Qui a la seule qualité de
dépositaire ? C’est la banque qui elle seule a la personnalité morale et cette banque est en
France. Donc les avoirs détenus à Monaco ont pour seul dépositaire la banque qui a son siège
social en France. Cela veut dire que pour les banques cette solution a des conséquences assez
importantes. Si les banques veulent véritablement protéger leurs clients et donc faire échapper
une partie de leurs avoirs aux voies d’exécution pratiquées en France, elles doivent renoncer à
ouvrir des succursales à l’étranger pour privilégier l’implantation d’une filiale. Concrètement,
économiquement et financièrement, ce n’est pas tout à fait la même opération entre ouvrir une
filiale et une succursale. Ou alors, deuxième possibilité (mais il n’est pas certain que cette
possibilité soit admise par le juge), le tiers peut échapper à la sanction s’il peut justifier d’un
motif légitime à la mauvaise inexécution de son obligation. Alors là quel pourrait être le motif
légitime invoqué par la banque ? La banque pourrait invoquer que si elle rapatrie les fonds
cela serait considéré à Monaco comme une violation du secret professionnelle, bancaire et
donc s’exposerait à des sanctions pénales. Donc elle pourrait invoquer la façon dont est conçu
la sanction de la violation de ce secret bancaire. A priori, il n’y a aucune distinction à faire
entre le contenu de ce qui est déclaré et de ce qui va faire le contenu de l’attribution
immédiate.
2 ème phase
: la dénonciation de la saisie : elle s’inscrit dans le soucis d’assurer le
respect du contradictoire et de l’égalité des armes puisqu’à ce stade seuls le créancier
saisissant et le tiers saisi sont informés de la procédure. Et il faut donc assurer l’information
du débiteur saisi. Cette information passe par la dénonciation de la saisie.
Cette information du débiteur saisi est indispensable à un triple titre : 1/ Il faut lui
signifier qu’un de ses créances est d’ores et déjà sortie de son patrimoine (car attribution
immédiate) ; 2/ le débiteur doit savoir que tout paiement qui émanerait de son débiteur (tiers
saisi) ne serait pas libératoire ; 3/ Permettre au débiteur saisi de former d’éventuelles
contestations à l’encontre de cette procédure.
Cette information se réalise par un acte d’huissier qui doit être signifié au débiteur
saisi dans les huit jours suivants la signification de l’acte de saisie au tiers saisi. Si le délai de
huit jours n’est pas respecté, n’importe quel juge prononcera la caducité de la saisie-
attribution et le créancier va donc perdre rétroactivement le bénéfice de la créance objet de la
saisie-attribution. Comme il s’agit d’un acte d’huissier, c’est un acte formaliste qui, à peine de
nullité, doit comprendre certaines mentions et ces différentes mentions sont décrites à l’art. 58
du décret du 31 juillet 1992.
3 ème phase
: le paiement du saisissant par le tiers saisi : Ce paiement, par rapport à
l’acte de saisie, est en principe différé. L’attribution est immédiate mais le paiement différé.
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Mais le débiteur saisi peut, par écrit, renoncer à former toute contestation et dans ce cas le
paiement du tiers saisi au créancier saisissant peut avoir lieu immédiatement. Mais en principe
le paiement est différé. Il faut attendre l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la
dénonciation de la saisie pour pouvoir prétendre au paiement. Pourquoi ce délai d’un mois ?
Pour permettre au débiteur saisi, une fois informé de la saisie-attribution, de former un
recours contre la procédure, contre le créancier saisissant. Trois hypothèses : 1/ Soit, pendant
le délai d’un mois, le débiteur saisi ne forme aucun recours et dans ce cas le créancier
saisissant peut réclamer le paiement de la créance saisie, sous réserve que cette créance soit
certaine, liquide et exigible. Ce paiement va produire un effet extinctif et cet effet extinctif va
se produire à la fois dans les relations entre le débiteur saisi et le créancier saisissant et entre
le tiers saisi et le débiteur saisi. Le paiement effectué par le tiers s’effectuera toujours dans
double limite de la créance cause de la saisie et de la créance objet de la saisie ; 2/ Le débiteur
saisi va former un recours dans le délai d’un mois : dès lors, le paiement, en principe,
n’interviendra qu’après le règlement du litige, qu’après l’examen du recours par un juge.
Mais, par exception, afin d’éviter d’éventuelles manœuvres dilatoires de la part du débiteur
saisi pour retarder le paiement, le juge de l’exécution aura toujours la possibilité d’ordonner le
paiement immédiat d’une somme qu’il va déterminer ; 3/ Le débiteur va former un recours
mais au-delà du délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie : normalement, le
débiteur ne dispose que d’un délai d’un mois. Sauf que ce délai ne vise qu’une catégorie de
contestations, cad les contestations portant sur la régularité de la procédure. Au-delà de ce
délai, le créancier est en droit d’exiger le paiement et la régularité de cette procédure ne peut
plus être remise en cause par le débiteur saisi. Sauf que les recours qui sont à la disposition du
débiteur saisi ne concernent pas seulement la régularité de la procédure. A quel autre type de
recours peut-on songer ? A un recours au fond sur la créance et, au-delà de la créance, à un
recours en contestation du titre constatant la créance. Donc un recours est alors toujours
possible au-delà du délai d’un mois et les prescriptions applicables seront celles permettant de
contester soit l’existence, soit la régularité de la créance, à savoir cinq ans. Les actions
personnelles et mobilières se prescrivent en effet par cinq ans. Si le débiteur saisi est entendu
par un juge et la contestation de la créance ou du titre exécutoire est accueillie, l’art. 45 al. 3
de la loi de 1991 permettra à ce débiteur d’agir contre le créancier sur le fondement d’une
action en répétition de l’indu au profit du débiteur saisi.
b) Les règles particulières
Elles concernent deux catégories de créances : les créances à exécution successives et lorsque
la créance objet de la saisie est un compte bancaire.
S’agissant des créances (objet de la saisie) qui ont un caractère successif : ici, la
particularité des règles s’exprime lors de la dernière phase de la procédure, cad au moment de
la phase de paiement par le tiers saisi au profit du créancier saisissant. S’ouvre alors le délai
de trente jours. Deux hypothèses à envisager :
1/ S’il n’y a pas de contestation dans ce délai, el tiers saisi va payer le créancier
saisissant au fur et à mesure des échéances. Le paiement s’effectue directement entre les
mains du créancier saisissant, lequel va remettre une quittance au tiers saisi pour établir le
caractère libératoire du paiement et le fait que le paiement a bien eu lieu et ce créancier
saisissant doit également informer le débiteur saisi du paiement qui a été effectué par le tiers
saisi. Les paiements qui vont être effectués ainsi par le tiers saisi s’arrêteront soit lorsque la
créance cause de la saisie sera éteinte, soit lorsque le tiers saisi aura lui-même éteint la dette
qu’il avait contractée à l’égard du débiteur saisi ;
2/ S’il y a des contestations formées par le débiteur saisi à l’encontre de la procédure
(sur la régularité de la procédure), le tiers saisi, au fur et à mesure des échéances, va quand
même se dessaisir d’une somme d’argent mais non pas entre les mains du créancier saisissant
mais entre les mains d’un séquestre, séquestre qui sera désigné à l’amiable par les parties ou
par le juge. Tout dépend le temps qui sera nécessaire à régler la ou les contestations soulevées.
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Mais si les sommes qui sont confiées au séquestre apparaissent suffisantes pour éteindre la
créance cause de la saisie, le juge ordonnera la main-levée de la saisie et là peu importe
l’issue de la contestation. Le débiteur saisi s’acquittera alors de sa dette entre les mains du
créancier saisissant.
S’agissant de la créance objet de la saisie lorsqu’il s’agit d’un solde de compte
bancaire : les adaptations qui sont prévues ici par les art. 73 et 76 du décret de 1992 ont pour
finalité de remédier aux inconvénients liés à la saisie-attribution du compte bancaire. C’est
l’inconvénient d’indisponibilité. Si le débiteur saisi possède plusieurs comptes de dépôt dans
un même établissement bancaire, ce sont les trois comptes qui vont être frappés
d’indisponibilité. C’est une situation extrêmement gênante pour le débiteur saisi qui ne pourra
plus faire fonctionner ces comptes alors que peut-être qu’un seul de ces comptes permettrait
de désintéresser le créancier. Plusieurs règles :
1/ La première permet au créancier saisissant de limiter l’assiette de la saisie-
attribution à certains comptes du débiteur saisi ;
2/ La seconde adaptation, qui a pour objet de libérer totalement le fonctionnement des
comptes du débiteur saisi, c’est que le décret de 1992 permet, par un accord de volonté entre
le créancier saisissant et le débiteur saisi, ou, à défaut d’accord de volonté, par décision du
juge de l’exécution, de mettre un terme à l’indisponibilité des comptes en contrepartie de la
constitution d’une garantie irrévocable au profit du créancier saisissant.
3) Les incidents
Les incidents au cours de cette procédure seront relativement peu nombreux en raison
de la rapidité et de l’efficacité de ce mécanisme.
Un incident que l’on retrouve avec la saisie-vente mais ici exclu : incident par la
manifestation de nouveaux créanciers qui créerait une hypothèse de concours.
Les incidents de la procédure proviendront donc soit du débiteur saisi, soit du tiers
saisi. Et les contestations qui pourront être soulevées par le débiteur saisi ou par le tiers saisi
porteront soit sur le fond du droit (remise en cause de la créance même, de son existence ou
de son montant), soit sur la régularité de la saisie. Toutes ces contestations relèvent de la
compétence du juge de l’exécution qui pourra adopter trois types de décisions : 1/ Des
décisions provisoires qui n’auront pas autorité de la chose jugée : des décisions qui vont
ordonner le paiement s’il apparaît que la créance cause de la saisie et que la créance objet de
la saisie ne sont pas sérieusement contestables. C’est du contentieux de l’apparence là ; 2/
Une décision définitive (ayant autorité de chose jugée) qui va rejeter la contestation portée
devant lui par le débiteur saisi ou par le tiers saisi : la décision de rejet devra être notifiée au
demandeur et au défendeur mais également au tiers saisi. Et dès la notification de la décision
au tiers saisi, ce tiers devra immédiatement payer le créancier saisissant ; 3/ Une décision
définitive (ayant autorité de chose jugée) qui va accueillir la contestation portée devant lui : le
juge annulera la procédure et ordonnera la main-levée de la saisie et mettra donc un terme à
l’indisponibilité.
B. Les procédures particulières
Ces procédures particulières de saisie de créance sont déterminées soit à raison de
l’objet de la saisie et il s’agira alors d’envisager la saisie d’une créance particulière que sont
les rémunérations du travail, soit à raison de la créance cause de la saisie et il s’agira
d’envisager ici principalement la créance fiscale et la créance alimentaire, soit à raison de la
qualité du tiers saisi et là en l’occurrence le tiers saisi est une personne publique.
1) Les procédures particulières en raison de l’objet de la saisie : la saisie des
rémunérations du travail
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Historiquement, il n’existait pas de procédure particulière pour saisir les rémunérations
du travail. La rémunération du travail était considérée comme des créances qui pouvaient être
saisies par la procédure de droit commun, cad la saisie-arrêt. Et ce raisonnement logique avait
conduit les tribunaux à accepter la mise en œuvre d’une saisie-arrêt sur les rémunérations du
travail mais sans aucune adaptation particulière et donc les rémunérations du travail étaient
intégralement saisissables.
Mais, très rapidement, les juges ont estimé qu’une telle solution était humainement et
individuellement peu acceptable car c’est priver l’individu totalement de ses ressources, de
l’argent nécessaire pour assurer sa survie. C’est la raison pour laquelle, statuant en pure
équité, des tribunaux ont considéré que lorsque l’objet de la saisie de créance était les salaires,
il convenait de laisser un minimum vital au débiteur saisi. Cette solution, sans doute
opportune, ne reposait sur aucune justification juridique. Malgré tout, la Ccass avait approuvé
une telle solution. Mais la Ccass n’a pas voulu faire la loi à la place du législateur.
Simplement, elle estimait qu’il relevait du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond
d’évaluer la fraction insaisissable des revenus du travail. Donc tout dépendait alors de la
politique JP des juges du fond puisque la Ccass refusait toute unification en cette matière.
Cela conduisait à une inégalité de traitement et à un manque d’uniformité sur le territoire
puisque la part insaisissable dépendait de la juridiction saisie sur le territoire.
Ce manque d’uniformité était une source de discrimination et le législateur s’est
décidé à intervenir à la fin du 19
ème siècle. En 1895, le législateur, dans un soucis de
protection, a pris en charge ce problème de la saisie des rémunérations du travail et a fixé lui-
même la portion insaisissable. Il avait utilisé les modalités de calcul les plus inégalitaires qui
soit : 1/10
ème des rémunérations du travail. Pour parvenir à plus d’égalité, le système a évolué.
En 1930, il y avait toujours une fraction insaisissable variant en fonction d’une échelle
fractionnée et progressive (à chaque tranche on appliquait une quotité saisissable).
a) Les fondements
Cette procédure de saisie des rémunérations du travail relève des dispositions du CT et
du juge de l’exécution.
b) Le domaine
Cette procédure vise la saisie des rémunérations du travail. Mais alors qu’est-ce-
qu’une rémunération du travail ? Cela concerne évidemment le salaire mais, au-delà du
salaire, sont visées par cette procédure toute rémunération versée en contrepartie d’un travail
effectué pour la compte d’autrui établissant un rapport de dépendance avec l’employeur.
Cela dit, ce n’est pas parce que l’on a identifié une relation de travail, de dépendance
rémunérée entre deux personnes, que nécessairement toutes les sommes versées à l’occasion
de cette rémunération de travail soient visées par cette procédure particulière. Pour savoir si
ces sommes relèvent bien de la procédure spécifique à la saisie des rémunérations du travail,
l’élément essentiel à démontrer est leur caractère rémunératoire, cad de savoir si elles
constituent bien al contrepartie d’un travail. Cette nécessité d’établir leur caractère
rémunératoire a été récemment rappelée par la Chambre sociale de la Ccass dans un arrêt du
30 janvier 2008 dans une affaire « Guyot c/ Banque populaire Bourgogne Franche Comté ».
ce qui était en cause dans cette affaire était l’indemnité de départ à la retraite. En l’occurrence,
il s’agissait d’une saisie qui avait été pratiquée par la Banque populaire sur un compte ouvert
par Mr Guyot, débiteur saisi, auprès du Crédit Agricole, tiers saisi. Et le débiteur saisi avait
formé une contestation parce qu’il estimait que la somme inscrite sur ce compte n’était qu’une
indemnité de départ à la retraite ne relevant donc pas de la saisie-attribution de droit commun
mais de la procédure des rémunérations du travail. Les juges du fond ont débouté le débiteur
saisi parce qu’ils ont estimé que cette indemnité de départ à la retraite ne s’analysait pas
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comme la contrepartie d’un travail fourni par le débiteur saisi et donc ne pouvait pas être
analysée comme une rémunération du travail. Cet arrêt a été cassé par la Chambre sociale. Au
regard de la motivation de l’arrêt, on peut en tirer deux enseignements : il apparaît que la
Chambre sociale ne cherche pas à définir positivement ce qu’est un rémunération du travail.
Elle renonce à définir cette notion extrêmement fuyante qu’est le salaire. C’est donc
négativement que vont apparaître les rémunérations du travail : sont des rémunérations du
travail toutes les sommes versées à l’occasion de la rémunération du travail et qui n’ont pas
un caractère indemnitaire. Et donc ici la distinction que semble opérer la Ccass c’est de savoir
si ce départ à la retraite est volontaire ou forcé. S’il est volontaire, l’indemnité de départ à la
retraite n’a pas de caractère indemnitaire. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une mise d’office à
la retraite, il y a également lieu de verser une indemnité de départ à la retraite. Cette indemnité
est calculée comme l’indemnité de licenciement.
Donc il faut, pour résumer sur le domaine de cette procédure de saisie de rémunération
du travail, identifier une relation de travail instituant un lien de dépendance entre le débiteur
et le créancier et ensuite, parmi toutes les sommes versées à l’occasion de la relation de
travail, identifier celles qui ont un caractère indemnitaires, autrement dit celles qui n’ont pas
de caractère indemnitaire.
La procédure particulière de saisie des rémunérations n’est pas applicable aux
professions libérales, professions commerciales, tous les revenus obtenus par des
professionnels indépendants (agents), les droits d’auteurs et enfin tous ceux exerçant un
travail pour le compte d’autrui mais qui sont rémunérés par des dividendes en leur qualité
d’associé. On leur applique alors le système de la saisie-attribution.
c) La procédure
Cette procédure se distingue des règles applicables à la saisie-attribution de droit
commun parce que la rémunération du travail est présumée avoir au moins pour partie une
nature alimentaire et les créances alimentaires sont insaisissables. Quatre règles particulières
de cette saisie des rémunérations du travail :
1/ Le mécanisme de l’attribution immédiate est exclu en matière de saisie des
rémunérations du travail. Pourquoi ? Pour permettre le concours entre les créanciers d’un
même débiteur par faveur pour le débiteur qui va pouvoir continuer à avoir un minimum de
crédit et qui va pouvoir contracter ;
2/ Contrairement à la saisie-attribution de droit commun, la saisie des rémunérations
du travail est exclusivement une saisie d’exécution, ce qui veut dire qu’il n’est pas possible de
pratiquer une saisie conservatoire sur les rémunérations du travail qui a pour objet
d’indisponibilité des biens objet de la saisie. Il faut avoir le titre exécutoire constatant une
créance liquide et exigible ;
3/ En cette matière, l’exécution forcée est toujours perçue comme un remède ultime
qui ne doit intervenir qu’en dernier lieu. Ainsi, avant d’envisager la saisie des rémunérations
du travail, le créancier doit se soumettre à une tentative de conciliation. Cette tentative de
conciliation n’est imposée qu’au premier saisissant, ce qui veut dire que lorsque d’autres
créanciers souhaitent également être désintéressés sur les rémunérations du travail de leur
débiteur, ils n’ont pas à se soumettre à cette tentative de conciliation préalable ;
4/ Cette saisie des rémunérations du travail ne peut jamais être intégrale. En toute
hypothèse, le débiteur saisi doit pouvoir conserver une part de son salaire, de sa rémunération
qui correspond à la part alimentaire du salaire (les créances alimentaires sont insaisissables) et
cette fraction que le débiteur saisi peut conserver jouera même à l’encontre d’un créancier
traditionnellement privilégié, cad le créancier d’aliments. Donc le calcul de cette fraction
insaisissable relève depuis les années 30 d’un barème progressif et proportionnel qui fait que
plus la rémunération est élevée et plus la part insaisissable est faible et plus la rémunération
est faible et plus la part insaisissable sera élevée. Il s’agit de fractionner les rémunérations du
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travail en trois parts : 1) Une première part absolument insaisissable, y compris par le
créancier d’aliments, et cette part correspond à la part irréductible, alimentaire du salaire. Ce
sont les barèmes applicables au RSA qui sont transposés ici pour savoir la part insaisissable ;
2) ; Une fraction saisissable que par une seule catégorie de créanciers : les créanciers
d’aliments ; 3) La troisième fraction est celle normalement saisissable par l’ensemble des
créanciers du débiteur, en notant que le créancier alimentaire bénéficie d’un traitement
privilégié puisque s’il n’est pas totalement désintéressé sur la deuxième part, il est prioritaire
sur la troisième part.
2) Les procédures particulières en raison de la cause de la saisie
Il y a deux créances qui vont déterminer la cause de la saisie mais la réforme de 1991 a
considérablement réduit l’écart entre ces procédures particulières et la saisie-attribution
puisque cette dernière a été conçue sur le modèle de l’une de ces deux saisies particulières :
lorsque la créances cause de la saisie est une créance alimentaire ou lorsque c’est une créance
fiscale.
a) Les créances alimentaires
Prévoir une procédure spécifique pour assurer le recouvrement des créances
alimentaires participe de ce mouvement de faveur au profit du créancier d’aliments parce que
le créancier d’aliments est une personne particulièrement vulnérable d’un point de vue
humain et social car celui qui réclame une créance est celui qui est dans le besoin. Le
législateur a prévu deux procédures spécifiques :
a.1) Le paiement direct des pensions alimentaires
Cette procédure de paiement direct a été instituée par une loi du 2 janvier 1973 et
l’objectif affiché par le législateur était d’offrir au créancier d’aliments une procédure
d’exécution simplifiée permettant un paiement rapide de sa créance. Comment cet objectif a-t-
il concrètement été traduit dans cette procédure ?
S’agissant des conditions, il faut vérifier qu’on est bien dans le domaine de cette
procédure et donc il faut tout vérifier :
1/ Que le créancier est bien titulaire d’une pension alimentaire au sens de la loi de
1973. Une pension alimentaire c’est par exemple la contribution aux charges du mariage, la
créance alimentaire fondée sur les art. 203 et s. CC, la prestation compensatoire, le devoir de
secours ;
2/ Que la créance soit constatée dans une décision de justice exécutoire. La loi limite
les titres en vertu desquels cette procédure peut être mise en œuvre : les décisions de justice
exécutoires ;
3/ Vérifier la défaillance du débiteur d’aliments : et il suffit d’une seule défaillance, du
non paiement d’un seul des termes de la pension alimentaire pour que le créancier puisse
mettre en œuvre cette procédure. Notons toutefois que cette procédure ne permet le
recouvrement que des termes à échoir et des termes échus sous les six derniers mois. Cela
veut dire que pour un créancier d’aliments non payé depuis plusieurs mois, s’il veut recouvrer
par la force des termes échus depuis plus de 6 mois, il devra utiliser la procédure de saisie-
attribution de droit commun, le délai de prescription étant de cinq ans, sous réserve qu’un juge
ne fasse pas application de l’adage « aliments ne s’arréragent pas ». Cela veut dire que les
aliments ne font pas d’arriérés, les aliments dont le terme est échu sont perdus sauf si le
créancier démontre qu’il était dans l’impossibilité de demander les aliments.
b) Les éléments de procédure de cette saisie
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Puisque c’est une saisie d’exécution qui nécessite une décision de justice ayant force
exécutoire le créancier va s’adresser à un huissier mais il faut tenir compte de la particularité
de la situation, qui est notamment économique. Pour le créancier d’aliments encore faut-il que
la PCE ne coûte pas trop cher, donc l’huissier ne va pas procéder comme à son habitude par
voie d’exploit, d’acte d’huissier, mais par LRAR. Il va notifier la saisie au tiers saisi, quoi doit
à l’huissier certaines informations qui portent sur la nature et l’étendu du lien qui l’unit au
débiteur saisi. Dans cette première phase de la procédure et préalablement à la mise en œuvre
de la saisie l’huissier bénéficiait de pouvoirs importants dans la recherche d’informations sur
le débiteur. Cette phase de recherche d’informations a été modifiée par la loi de décembre
2010 qui a bouleversé le système initial en droit commun qui instaurait une collaboration
entre l’huissier et le ministère public. Avant cette loi il y a avait une réelle spécificité du
recouvrement des créances alimentaires, où l’huissier bénéficiait de pouvoirs plus étendus
qu’en droit commun. Mais tous les pouvoirs antérieurement dévolus au ministère public ont
été transférés à l’huissier, soit un alignement du droit commun sur les prérogatives de
l’huissier en la matière. La conséquence a été l’abrogation par la loi de 2010 des dispositions
de la loi de 73 sur la recherche d’informations.
Une fois que la saisie a été notifiée au tiers elle vaut attribution immédiate de la
créance au profit du créancier d’aliment saisissant. Le tiers saisi doit alors payer sa dette à
l’égard du créancier d’aliment saisissant. Cette obligation est sanctionnée pénalement par une
amende. Le débiteur d’aliment qui se dérobe à son obligation s’expose lui aussi à des
sanctions pénales, c’est cette fois ci un délit, celui d’abandon de famille. Si le tiers saisi est
débiteur d’une créance à exécution successive le créancier d’aliment saisissant n’a pas à
réitérer la saisie, mais l’obligation du tiers saisi se manifeste à chaque échéance.
Toutes contestations de la part du tiers ou de la part du débiteur ne produisent de plein
droit aucun effet suspensif. Au final cette procédure est donc plus simple, son ouverture est
plus restreinte que pour une saisie attribution par exemple et quant au mécanisme le paiement
comme l’attribution sont immédiats (pas de délai d’un mois pour attendre d’éventuelles
contestations).
2] Le recouvrement public des pensions alimentaires
Cette seconde procédure a été prévue puisque la procédure de paiement direct avait
fondé énormément d’espoirs et que 2 ans après sa mise en place elle a suscitée énormément
de déceptions, d’où l’idée d’une nouvelle procédure pour renforcer la position du créancier.
Elle a été instituée par la loi du 11 juillet 1975. Elle fait intervenir dans le recouvrement de la
pension alimentaire les autorités publiques, et particulièrement les agents du trésor, ils vont
accomplir leur mission à l’aide de moyens de droit public (PPP exorbitantes de droit
commun).
Les conditions
Ce sont les mêmes que pour la procédure de paiement direct de la pension alimentaire,
ce qui s’explique par le fait que cette procédure de recouvrement public a un caractère
subsidiaire par rapport à la procédure de paiement direct. Le créancier ne peut la mettre en
œuvre qu’à la condition qu’il n’ai pu obtenir le recouvrement de sa créance en recourant aux
voies d’exécution du droit privé. Cette impossibilité sera attestée soit par l’huissier chargé de
l’exécution soit par le greffier.
La procédure
Elle débute par la saisine du procureur qui va vérifier les conditions de mise en œuvre
de la procédure et s’il estime qu’elles sont satisfaites il va notifier sa décision au débiteur pour
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lui indiquer que le paiement de la pension,à compter de la notification, devra avoir lieu non
plus entre les mains du créancier mais entre les mains d’un comptable public. A côté de cette
notification au débiteur le procureur va émettre un état exécutoire qu’il transmettra au
trésorier payeur général du département. Le trésorier payeur général (TPG), une fois qu’il a
reçu l’état exécutoire, il va le confier au comptable public qui va ensuite être chargé des
opérations de recouvrement, ce qui signifie que les voies d’exécution qui seront mises en
œuvre sont les procédures de droit public applicable en matière de contribution directe.
Les effets
Dès lors que l’on sollicite l’administration pour régler un litige privé on considère
qu’elle effectue une prestation de service, donc la pension alimentaire sera majorée de 10%.
Le créancier est totalement dessaisi du recouvrement de la pension, c’est le trésor
public qui est subrogé dans ses droits, et qui une fois qu’il aura récupéré les sommes les
transfèrera au créancier d’aliment.
Le débiteur doit payer le comptable et s’il acquitte de son obligation pendant 12 mois
consécutifs il peut demander au procureur de mettre un terme à cette procédure de
recouvrement public de la pension alimentaire et de pouvoir se libérer entre les mains du
créancier d’aliment. Si le procureur accède à cette demande le débiteur sera placé sous
surveillance pendant un délai de 2 ans, et à la moindre défaillance la procédure de
recouvrement public des pensions sera réactivée.
Avec cette loi il y a aussi eu beaucoup de déception, puisqu’on abouti à un paiement, à
une exécution peu effective des pensions alimentaires. Cela s’explique car en cette matière ce
ne sont pas simplement des considérations économiques qui entrent en jeu mais aussi des
considérations affectives, humaines et sociologiques. Si le créancier n’obtient pas paiement il
pourra se tourner vers des organismes sociaux, afin d’obtenir l’allocation de soutient familial,
vers par les CAF. Les conditions d’octroi sont régies pour partie par le code de la sécurité
sociale et l’organisme social qui va verser cette prestation va être subrogé dans les droits du
créancier d’aliments, pour obtenir un paiement à hauteur de la prestation versée ou dans les
limites de la dette d’aliment.
b) Les créances fiscales
: l’avis à tiers détenteur
C’est une procédure d’exécution simplifiées qui permet au trésor public de saisir les
créances de somme d’argent dont un redevable d’imposition, le tiers saisi est titutlaire à
l’égard d’un tiers qui est le tiers saisi.
Les conditions : s’agissant de la créance cause de la saisie cette procédure ne vise que les
créances de nature fiscale, ce qui inclus les contributions de toute nature, les impôts, les
pénalités, ainsi que les frais et les accessoires. Conformément au droit commun ces créances
de nature fiscale doivent être liquides, exigibles et constatées par un titre exécutoire. Les
personnes publiques se délivrent à elles même des titres exécutoires. Quant à la créance objet
de la saisie il suffit que celle-ci ait vocation à appartenir au débiteur, et il faut y inclure les
rémunérations du travail. De ce point de vue l’avis à tiers détenteur à un objet plus large que
la saisie attribution. Concernant la procédure c’est la notification d’un avis au tiers, qui doit
payer à l’administration fiscale une fois qu’il l’a reçu. Le tiers devra payer directement le
comptable public.
Les effets : ils sont les même qu’en matière de saisie attribution de droit commun puisque les
sommes saisies sont attribuées immédiatement à l’administration fiscale, en revanche comme
en matière de droit commun le paiement sera différé. Par rapport à la saisie attribution de droit
commun le délai entre la dénonciation de la saisie et le paiement effectif est normalement
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d’un mois, ici il est porté à 2 mois. Cela s’explique par le fait qu’en matière administrative il
faut d’abord un recours gracieux et ce n’est qu’en cas de refus qu’il pourra exercé un recours
contentieux. Dans cette saisie le tiers saisi est relativement préservé dans cette procédure
puisque même en cas de défaut de collaboration il ne pourra pas être condamné au paiement
des causes de la saisie. En toute hypothèse le tiers saisi n’est jamais tenu que dans les limites
de sa propre obligation à l’égard du débiteur saisi. S’il refuse de collaborer, s’il ne paie pas,
l’administration doit normalement saisir le JEX et préalablement devrait obtenir des juges
judiciaires un titre exécutoire. Il n’y a pas lieu de mettre en œuvre le privilège du préalable
puisque le débiteur ici n’est pas débiteur de l’administration. En pratique l’administration
fiscale émettait un titre exécutoire et procédait par les voies de contrainte du droit public pour
obtenir le paiement, mais elle ne repose sur aucun fondement puisque l’administration ne peut
se délivrer des titres exécutoires que quand elle est créancière.
II – La saisie des droits d’associés et des valeurs mobilières
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