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Synthèse
Désordres et reconstructions du droit sous l’effet
des principes fondamentaux dégagés
par les Cours suprêmes nationales et européennes
Dominique ROUSSEAU (dir.)
Professeur à l’Université Montpellier I,
Membre de l’Institut Universitaire de France, Directeur du C.E.R.Co.P.
CERCOP (Centre d'études et de recherches comparatives
constitutionnelles et politiques), Université de Montpellier I
Septembre 2004
Le présent document constitue la synthèse du rapport scientifique d’une recherche financée par le GIP Mission de
recherche Droit & Justice. Son contenu n’engage que la responsabilité de ses auteurs. Toute reproduction, même partielle,
est subordonnée à l’accord de la Mission.


























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1- Membres de l'équipe
Dominique ROUSSEAU, Professeur à l’Université Montpellier I, Membre de l’Institut
Universitaire de France, Directeur du C.E.R.Co.P.
Alexandre VIALA,Professeur à l’Université Montpellier I
Stéphane BOLLE, Maître de Conférences à l’Université Paul Valéry – Montpellier III
Jordane ARLETTAZ, Doctorante à l’Université Montpellier I
Nicolas DELPIERRE, A.T.E.R. à l’Université Montpellier I
Jérôme FAVRE, A.T.E.R. à l’Université Montpellier I
Carole LOUIS, A.T.E.R. à l’Université Montpellier I
Hector MAMIA, Doctorant à l’Université Montpellier I
Jean-Pierre TRUFFIER, A.T.E.R. à l’Université Montpellier I
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Rappel de la Problématique et objectifs de la recherche
Définition des principes fondamentaux
Les principes fondamentaux sont nécessairement généraux. Les principes généraux
sont issus du droit positif : ils ne se fondent pas sur la simple renaissance du droit naturel, car
ils ne se référent pas à un monde des valeurs existantes en dehors des volontés humaines. Ils
trouvent dans le consensus leur fondement effectif et suffisant. C’est dans la présence d’un
accord, affirmé de façon explicite et argumentée, autour de certaines valeurs, que celles-ci
trouvent une justification. Les principes généraux sont donc engendrés par l’accord sur leur
sens et leur importance en droit. Ces normes qui ne se déduisent d’aucune autre, se produisent
par l’entente des acteurs juridiques qui participent à leur définition. Fondamentaux, ces
principes sont, en outre, des standards qui fondent le droit et sa légitimité : le standard, par sa
référence à l’idée de normalité, suscite l’adhésion de l’auditoire. En passant du normal au
normatif, le juge emporte la conviction spontanée des justiciables. Le principe fondamental
est donc une norme générale qui fonde le droit normal, le droit qui doit avoir lieu. La
normalité juridique dépend, en conséquence, de la normativité juridique des principes
fondamentaux.
Choix du sujet
En novembre 2001, la Mission Droit & Justice indiquait qu'elle attendait des
propositions de recherche sur les principes fondamentaux du droit dégagés par les Cours
suprêmes. Au même moment, le CERCoP s'engageait dans une réflexion collective sur l'ordre
juridique, son évolution et ses descriptions. Les premiers fruits de cette réflexion furent
présentés et discutés lors d'un colloque intitulé « Le droit dérobé », à la Faculté de Droit de
Montpellier les 10 et 11 avril 2003. Les termes de l'appel d'offres lancé par la mission Droit et
Justice furent donc accueillis localement dans un contexte scientifique particulier. Alors que
le CERCoP s'interrogeait sur l'existence d'un fondement au droit, d'un auteur ultime du droit
et, en conséquence, de la possibilité de concevoir un droit sans fondement ni auteur ultimes, il
lui était proposé de mener une recherche sur deux éléments essentiels de l'ordre juridique : les
principes fondamentaux et les Cours suprêmes.
Le pluriel peut-il constituer le singulier, les principes fondamentaux, le fondement de
l’ordre juridique et les Cours suprêmes, l'auteur du droit ? Le principe d’une référence qui
fonde un système semble emporter la nécessité de l’unicité de cette référence. Or, les concepts
de « principe fondamental » et de « Cour suprême » se conjuguent au pluriel en droit
contemporain. Ce paradoxe indiquait alors, certes intuitivement, que l'existence, reconnue
habituellement de tous,
des principes fondamentaux et des Cours suprêmes, portait en elle-
même le germe de tensions susceptibles de fragiliser l'unité de l'ordre juridique.
Dans les réflexions du CERCoP en effet, la pluralité des principes fondamentaux ne
saurait être assimilée à l’unicité de la norme de référence. En termes constitutionnels, la
présence des principes fondamentaux exprime des traditions, des logiques ou des politiques
juridiques, pour le moins différentes et souvent contradictoires. Les normes de référence du
contrôle de constitutionnalité comprennent ainsi des principes de valeur constitutionnelle tirés
des textes de 1789, 1946 et 1958, ou encore issus des exigences démocratiques du moment.
Or, ces textes, produits d’une époque et de conditions politiques, sont animés par des
philosophies générales contradictoires. Le contentieux constitutionnel connaît donc à ce jour,
parmi ses normes de référence, une tension permanente que le Conseil résout par une
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conciliation. Les références normatives que sont les différents principes fondamentaux du
droit constitutionnel ne suffisent donc pas, à elles seules, à ordonner la constitutionnalité ;
elles ne constituent pas un point-source du droit constitutionnel. Les principes fondamentaux,
pluriels, sont en conflit. Les conditions de possibilité d’une seule et unique référence de
l’ordre juridique appellent l’intervention d’un acteur, un auteur du droit qui règle ce conflit.
Au sein de l’ordre constitutionnel, ce rôle est joué par la juridiction constitutionnelle,
au sein de l’ordre administratif – lorsque existe une dualité de juridictions – par le Conseil
d’Etat, au sein de l’ordre judiciaire par la Cour de cassation, au sein de l’ordre communautaire
par la Cour de Justice des Communautés européennes et au sein de l’ordre européen des droits
de l’homme, par la Cour européenne des droits de l’homme. Au sein, donc, de l’ordre
juridique actuel pris dans son ensemble, une pluralité de Cours suprêmes nationales et
européennes a la charge de l’ordonnancement du droit. Mais précisément en ce qu’elles sont
suprêmes, ces Cours ne sont pas tenues de s’entendre. Aussi, la doctrine représentant les
différentes branches du droit constate les divergences de jurisprudence. Ces divergences,
surgissant dans la production jurisprudentielle, « font désordre » au plus haut point. Elles
compromettent la dimension « ordre » du droit, dans sa double portée symbolique et pratique.
Les Cours suprêmes nationales et européennes peuvent ainsi apparaître comme des agents du
désordre, dans le système juridique contemporain.
Les principes fondamentaux, comme les Cours suprêmes, sont des éléments
incontournables de la fondation, de la régulation ou encore de l’autoproduction du droit.
L’action de ces principes abstraitement envisagés semble, pourtant, ambiguë. C’est pourquoi
le CERCoP, en raison de sa politique scientifique, a proposé de mener une enquête sur la
problématique des « Désordres et reconstructions du droit sous l’effet des principes
fondamentaux dégagés par les Cours suprêmes nationales et européennes ».
Problématique
La normativité d'un principe fondamental, composée de la signification du principe et
de la force de son caractère fondamental, est un enjeu des interactions des politiques
jurisprudentielles menées par les Cours suprêmes. La détermination de la normalité juridique
est ainsi fonction du rapport de forces entre Cours suprêmes nationales et européennes, dans
leurs entreprises respectives d’attribution d’une signification et d’une force normative aux
principes fondamentaux. Par conséquent, les différents principes produisent du normal ou du
pathologique, en raison d’un accord de forces ou d’un conflit de forces entre Cours suprêmes.
Ordre et désordre se déduisent de la qualité des relations entretenues par les acteurs suprêmes
du droit contemporain.
Il faut alors s’interroger sur la capacité des Cours suprêmes, à construire par elle-
même un ordre pour le droit. La vocation ordonnatrice des principes fondamentaux ne saurait
être effective sans un certain accord entre les différents acteurs juridictionnels suprêmes. Quel
est l’impact sur l’ordre juridique de la maîtrise plurielle des principes fondamentaux ?
Comment réduire les désordres consécutifs aux traitements jurisprudentiels des principes
retenus ? Les autorités juridictionnelles suprêmes ont-elles seules cette capacité ?
Objectifs
Les objectifs consécutifs à l'élaboration de la problématique sont triples :
- Evaluation des désordres jurisprudentiels par le traitement doctrinal qui en est fait. Quelle
est leur nature ? Portent-ils atteinte à l'unité du droit ? Sont-ils conçus par la doctrine comme
autant de phénomènes pathologiques ? Comment sont-ils vécus par les juges ?
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- Présentation des harmonisations jurisprudentielles à l'œuvre et des représentations
doctrinales qui confèrent une cohérence aux phénomènes
juridiques apparemment
désordonnés.
- Présentation des propositions doctrinales qui appellent à la mise en œuvre d'entreprises
normatives de mise en ordre des jurisprudences relatives aux principes fondamentaux.
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Choix méthodologiques
- Comment définir la norme juridique?
Cette définition enregistre une réalité contemporaine : celle de la montée en puissance
des juges. C'est pourquoi elle s'inscrit dans le cadre des théories de l'interprétation. Selon ces
théories, la norme juridique est l'œuvre du juge qui interprète le texte. Autrement dit, dans le
cadre de ce rapport, ce sont les Cours suprêmes qui ont la garde de la normativité des
principes fondamentaux, dont elles créent la signification et la force normative. L'objet de la
recherche porte donc sur les principes fondamentaux jurisprudentiellement conçus par les
Cours suprêmes nationales et européennes.
- Comment identifier les désordres ?
Le désordre s'observe en référence à une représentation de l'ordre juridique issue du
positivisme normativiste kelsénien. La plupart des juristes en effet, partagent une image de
l'ordre juridique dans lequel ils interviennent - celle d'une pyramide des normes qui empêche
tout conflit de règles et offre une solution quasi systématique à tout cas. Les désordres sont
donc identifiés dès lors que la définition ou l'application d'un principe fondamental par une
Cour suprême perturbe le schéma pyramidal des normes.
- Comment envisager les reconstructions ?
Les reconstructions des désordres observés en référence à la vision kelsénienne de
l'ordre juridique, sont envisagées
a priori dans le cadre d'une remise en ordre pyramidale sous
l'effet de la jurisprudence d'une ou de plusieurs Cours suprêmes. Le choix de ce postulat ne
ferme cependant pas la recherche : sans nécessairement convenir au schéma kelsénien, des
logiques de reconstructions du droit peuvent être également inédites et à inventer, voire
émaner du désordre même.
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Les terrains retenus
Les choix méthodologiques retenus pour l'identification des désordres et les tentatives
de proposition de reconstructions ont conduit l'équipe de recherche à privilégier l'étude de
principes fondamentaux particuliers. En effet, sont spécialement représentatifs des
phénomènes constatés dans cette recherche, certains principes fondamentaux qui sont à la fois
créateurs de désordres et facteurs de reconstructions.
C'est pourquoi, ont été retenus :
- Le principe de hiérarchie des normes : des difficultés considérables ressortent de
l’enchevêtrement des droits national, européen et communautaire pour donner lieu à
de véritables désordres au sein du principe de hiérarchie des normes.
Quels sont le
sens et la portée de ce principe ? Le principe de hiérarchie est-il saisi par une anarchie
des jurisprudences des Cours suprêmes nationales et européennes ? Faut-il admettre
que la hiérarchie évolue pour donner naissance à une nouvelle pyramide des normes ?
Faut-il, au contraire, abandonner cette logique hiérarchique ?
- Le principe de sécurité juridique : de substantielles divergences d’appréciation sont
apparues sur les caractères du principe entre la Cour de cassation, le Conseil d’Etat, le
Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l’homme et, s’agissant de
l’application du principe, de manière significative, sur la rigueur du contrôle des
validations législatives. Aux perturbations engendrées dans le système juridique par le
recours fréquent à ces lois rétroactives mettant à l’abri de toute contestation les
rapports de droit public comme de droit privé, s’ajoute désormais le désordre des
jurisprudences et par conséquent l’inégal traitement des justiciables selon l’ordre
juridictionnel sollicité. Néanmoins, se dessinerait-il, en la matière, une implicite mise
en commun d’un unique principe de sécurité juridique ? Mais peut-il y avoir accord
sur la signification d’un principe susceptible de servir les intérêts contradictoires de la
puissance publique et des justiciables ?
- Le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine : en tant que principe,
la sauvegarde de la dignité de la personne humaine semble devoir être absolue et, de
par ce caractère, pouvoir constituer un élément ordonnateur du système juridique.
Cette unité d’apparence est néanmoins démentie par la réalité de son traitement
juridique. Parfois, la dignité sert de matrice à la protection reconnue à des principes
émergents. D’autres fois, elle participe à la limitation de libertés pourtant reconnues
comme fondamentales. Ce désordre est-il symptomatique de l’émergence d’un droit
plus pragmatique, fluctuant, dont la cohérence est soumise à la contingence en raison
de la multiplication des acteurs juridiques ou n’est-il, simplement, que caractéristique
d’une nécessaire acclimatation d’un principe juridique nouveau à un ordre juridique à
la construction duquel il participe ?
- Le principe de sauvegarde de l'intérêt général : l’intérêt général est traditionnellement
invoqué en vue de justifier une restriction des droits des individus. Son caractère
préjudiciable pour les justiciables, qui peuvent se voir retirer le bénéfice d’un droit au
nom de ce
principe, est renforcé par le désordre des jurisprudences constitutionnelle
française et communautaire. Le sort des justiciables dépend alors de l’ordre
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juridictionnel chargé de trancher le litige. Les désaccords sur la nature comme sur
l’utilisation du principe indiquent une particularisation de l’intérêt général, entre
intérêts nationaux et communautaire.
- Le principe de la marge nationale d'appréciation : sa définition et sa mise en œuvre,
tant par le juge national que par le juge européen, formalisent l’ordonnancement entre
contentieux européen des droits de l’homme et ordre juridique interne. Or, la
jurisprudence européenne a parfois conduit certains auteurs à qualifier la marge
nationale d’appréciation, de principe « peau de chagrin », ou encore « à géométrie
variable », d’instrument jurisprudentiel aux limites pour le moins incertaines. Est-il
possible de déterminer précisément les critères du principe dans l’ordre pluraliste
européen des droits de l’homme ? Ce principe fondamental est-il par nature protecteur
d’un irréductible désordre juridique ?
- Le principe de faveur : situé à l’articulation des activités normatives, parfois
conflictuelles, de l’Etat et des partenaires sociaux, il est à la fois perturbateur d’un
ordre et régulateur de désordres. D’une part, il perturbe un ordre : celui de la
hiérarchie formelle des normes. Il permet par définition à une convention collective de
primer sur une loi ou un règlement moins favorable. Il permet aussi en pratique à un
décret de primer sur la loi. Il est en outre indéterminé et fait peser une grande
incertitude sur le choix de la norme applicable. Comment, en effet, apprécier
concrètement l’intérêt du salarié ? D’autre part, il régule des désordres : ceux inhérents
à la coexistence des normes étatiques et sociales. Il permet la réduction des conflits de
normes en encadrant la discussion sur le choix entre plusieurs normes également
valides. L’ordre en la matière ne peut être préétabli. Il semble continuellement
construit par ce principe régulateur.
5-
Le déroulement de la recherche et ses conclusions
La démarche de cette étude a été essentiellement inductive : l'équipe de recherche, au
dernier trimestre 2002, s'est tout d'abord limitée à un recensement de faits jurisprudentiels
après le choix d'un certain nombre de principes qualifiés ordinairement de fondamentaux. Sur
la base de ce recensement jurisprudentiel, ont pu être réunis au premier trimestre 2003, les
éléments de réflexions proposés par la doctrine juridique, dans ses commentaires ponctuels
comme dans ses analyses générales. A l'aune du regard porté par la communauté scientifique
sur les désordres apparents issus des faits jurisprudentiels, sur les logiques de reconstruction
qu'elle leur oppose et sur la place des principes fondamentaux en leur sein, a été effectué un
travail d'enquête auprès de différents acteurs juridictionnels. Ce travail a pris la forme, au
mois de juin 2003, d'une série d'entretiens avec des juges de différentes juridictions nationales
et européennes, sur la base de questionnaires rendant compte des recensements initiaux. En
outre, a été organisée le 8 décembre 2003, une journée d'études rassemblant les représentants
de différentes Cours constitutionnelles européennes dans une perspective comparatiste de
confrontation de leurs expériences et stratégies respectives. Elle a, en particulier, visé à ce
qu'ils rendent compte de la réalité d'un dialogue entre Cours constitutionnelles et de leurs
attitudes respectives face à
la construction européenne et au développement des
jurisprudences communautaire et européenne sur les principes fondamentaux étudiés.
A la suite de cet échange avec ces différents acteurs juridiques, a pu s'amorcer un
travail théorique de compréhension des faits jurisprudentiels et doctrinaux dans la perspective
de la problématique retenue. A cette fin, a été organisé un certain nombre de séminaires
internes au centre de recherche pour que soit menée une réflexion globale sur les données
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collectées et que soit discuté de la validité des hypothèses de travail et des enseignements tirés
de la recherche. Cette évaluation des différentes réponses pratiques comme théoriques aux
phénomènes observés a conduit à l'organisation d'un ultime séminaire théorique le 23 avril
2004, sous forme de débats entre théoriciens du droit.
Au terme de ces différentes étapes, l'équipe a pu distinguer deux types de désordres :
les désordres formels qui affectent l'ordonnancement des normes et ceux matériels qui altèrent
le sens des normes. A chacun de ces désordres peuvent répondre deux logiques de
reconstructions : l'émergence spontanée d'un ordre sous l'effet de l'harmonisation consensuelle
d'une part, l'exigence imposée d'un ordre sous l'effet de la volonté unilatérale d'une autorité,
d'autre part.
6-
Les pistes de réflexion ouvertes
Le texte n'épuise pas la forme du principe d'où une pluralité de politiques
jurisprudentielles. Les désordres sont consécutifs à la coexistence, sans suprématie évidente,
de Cours suprêmes nationales et européennes ou, spécifiquement dans l’ordre interne (droit
social), d’une concurrence ouverte entre acteurs politiques dans la production normative. Les
réponses avancées à ces désordres sont de deux types.
D’une part, apparaît une stabilisation du désordre, temporaire et ponctuelle, par
l’harmonisation du traitement formel des principes sous l’effet de convergences ou de
persuasions jurisprudentielles. Dans l’ordre interne, la force normative du principe peut se
trouver sanctionnée par l’accueil réservé par ses destinataires.
D’autre part, une centralisation de la maîtrise formelle des principes par un retour à la
force des textes (Constitution européenne, Convention européenne ou Loi, selon les cas) et
par le renforcement de la position institutionnelle d’un organe (Cour de Justice, Cour
Européenne des Droits de l’Homme ou Législateur) est doctrinalement souhaitée.

Cependant, le traitement des désordres formels n’épuise pas l’ensemble de la
problématique relative aux diverses perturbations dans l’ordre juridique. La production
jurisprudentielle plurielle affecte en effet également la signification de principes dont la
teneur est, par définition, générale. L’incertitude sur la matérialité des principes implique des
désordres dans l’ordre-commandement du droit, des désordres matériels qu’il s’agit de
réduire.
La normativité de l’ensemble des principes est effectivement frappée d’incertitude.
Indétermination substantielle et dispersion juridictionnelle concourent au développement de
contradictions relatives à la définition et à la portée des principes fondamentaux. Les normes
se trouvent n’être en vigueur que relativement à un ordre juridictionnel particulier.
Des modalités de remise en ordre peuvent cependant être envisagées, selon deux
modes difficilement conciliables. D’une part, apparaît un mode pluraliste et immanent au
désordre, dans lequel la signification du principe s’attribue diversement et se construit
progressivement, par désaccords et accords juridictionnels. D’autre part, s’élabore un mode
unitaire, transcendant le désordre apparent par l’établissement d’une hiérarchie des organes
et/ou d’une hiérarchie des valeurs.
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