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POLITIQUES DE
DÉVELOPPEMENT

DU CAPITAL
HUMAIN
TUNISIE
AN ETF TORINO PROCESS
ASSESSMENT
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Ce rapport a été rédigé par Evelyn Viertel, Thierry Foubert et Francesca Rosso (ETF).
Le contenu de ce rapport relève de la seule responsabilité de la Fondation européenne pour la
formation et ne reflète pas nécessairement les points de vue des institutions de l’Union européenne.
© Fondation européenne pour la formation, 2021
Reproduction autorisée, moyennant mention de la source.
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PREAMBULE
Dans le cadre du processus de Turin, la Fondation européenne pour la formation (ETF) propose une
analyse externe et prospective des enjeux liés au développement du capital humain et des réponses
politiques apportées dans les pays en matière d’enseignement et de formation professionnels (EFP),
dans une perspective d’apprentissage tout au long de la vie. Elle identifie les défis liés aux politiques
et aux pratiques en matière d’éducation et de formation qui entravent le développement et l’utilisation
du capital humain. Elle fait le point sur ces défis et fournit des recommandations concernant les
solutions possibles pour les surmonter.
Ces analyses sont un élément clé du processus de Turin, initiative lancée en 2010 par l’ETF afin de
mener un suivi périodique des systèmes d’EFP dans le contexte plus large du développement du
capital humain et d’une croissance économique inclusive. En fournissant une analyse de haute qualité
de la politique d’EFP dans une perspective d’apprentissage tout au long de la vie, le processus
s’appuie sur quatre principes clés: l’appropriation, la participation, l’analyse holistique et l’analyse
fondée sur des données probantes.
Pour l’ETF, le développement du capital humain consiste à aider les pays à élaborer des systèmes
d’apprentissage tout au long de la vie qui offrent des opportunités et des incitations aux personnes
pour leur permettre de développer leurs aptitudes, leurs compétences et leurs connaissances tout au
long de leur vie et pour les aider à s’insérer sur le marché du travail et à réaliser leur potentiel, dans le
but de contribuer au développement de sociétés prospères, innovantes et inclusives.
L’objectif de ces analyses est de fournir une source d’information fiable pour la planification et le suivi
de politiques nationales d’éducation et de formation axées sur le développement du capital humain,
ainsi que pour la programmation et le dialogue stratégique menés à l’appui de ces politiques par
l’Union européenne et par d’autres bailleurs de fonds.
Les rapports d’analyse de l’ETF s’appuient sur des données probantes provenant des pays eux-
mêmes et qui sont recueillies à l’aide d’un questionnaire standardisé (cadre analytique). Cette
démarche s’inscrit dans un processus participatif faisant appel à un large éventail d’acteurs avec un
niveau d’appropriation élevé de la part du pays. Les conclusions et recommandations de cette analyse
ont été partagées et examinées avec les autorités nationales et les bénéficiaires.
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TABLE DES MATIERES
RESUME ANALYTIQUE
Contexte
Tendances et défis liés au capital humain
Recommandations quant aux mesures à prendre
Conclusion
1.
INTRODUCTION
1.1 À propos de cette analyse
1.2 Aperçu du pays
1.3 Cadres stratégiques nationaux
2.
DEVELOPPEMENT ET DEFIS DU CAPITAL HUMAIN
2.1 Développements économiques
2.2 Évolution et prévisions démographiques
2.3 Évolutions du marché du travail
2.4 Éducation: Budget, accès, participation et qualité
2.5 Enseignement et formation professionnels
3.
ÉVALUATION DES ENJEUX CLES ET DES REPONSES POLITIQUES
3.1 Les systèmes de développement des compétences de la Tunisie et leur
manque partiel de cohérence externe et d’alignement avec les besoins
économiques et sociaux
Recommandations quant aux mesures à prendre
7
7
9
13
19
21
21
22
22
25
25
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38
42
47
48
56
3.2 Les systèmes de développement des compétences en Tunisie et le manque
de cohérence interne ou de qualité de l’offre
Recommandations quant aux mesures à prendre
4.
CONCLUSION
ANNEXE 1. RÉSUMÉ DES RECOMMANDATIONS
ANNEXE 2. LE SYSTÈME D’ÉDUCATION ET DE FORMATION EN TUNISIE
ABRÉVIATIONS
REFERENCES
59
65
69
71
75
77
79
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RESUME ANALYTIQUE
Le present rapport, preparé par la Fondation européenne pour la formation (ETF) propose une
analyse externe et prospective des enjeux liés au développement du capital humain et des réponses
politiques des pays en matière d’enseignement et de formation professionnels (EFP), dans une
perspective d’apprentissage tout au long de la vie. Elle est basée sur des données probantes tirées
d’un rapport national et de huit rapports régionaux du processus de Turin pour la Tunisie (2020),
élaborés à l’aide d’un questionnaire standardisé (cadre analytique), ainsi que sur des sources
d’information supplémentaires.
Contexte
En 2011, des milliers de Tunisiens sont descendus dans la rue pour exprimer leur insatisfaction face à
la pauvreté, au chômage et à la corruption. Des millions de personnes ont nourri l’espoir que ce
mouvement entraînerait des changements en Tunisie. Depuis lors, la Tunisie mène avec succès une
transition démocratique qui englobe à la fois la politique et les institutions du pays. Une nouvelle
Constitution a été adoptée en 2014 (JORT, 2015). Cependant, les difficultés liées à la situation
socioéconomique du pays, les préoccupations en matière de sécurité et les changements politiques
fréquents risquent aujourd’hui d’éclipser les progrès significatifs réalisés jusqu’ici.
La Tunisie est un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. Le pays est engagé dans un
processus d’intégration dans l’économie mondiale, notamment au travers d’accords d’association et
de négociations avec l’Union européenne (UE) en vue d’un accord de libre-échange approfondi et
complet, de l’Accord d’Agadir et des discussions menées avec l’Organisation mondiale du commerce.
Toutefois, l’impact de ces initiatives sur l’économie du pays reste à ce jour faible. Le produit intérieur
brut (PIB), qui s’établissait à 2,5 % en 2018, est passé à 1,0 % en 2019 (Institut National de la
Statistique – INS).
Balghouthi (2018) affirme que l’économie tunisienne souffre de divers dysfonctionnements structurels,
au rang desquels figurent les inégalités, la corruption, la désindustrialisation ou encore la
prédominance de secteurs à faible valeur ajoutée. Selon l’indice de compétitivité mondiale de 2019,
qui classait la Tunisie au 87
e rang sur 140 pays, la bureaucratie et l’instabilité politique sont des
facteurs qui ont une incidence négative sur le climat des affaires. La très grande majorité des grandes
entreprises demeurent aux mains de l’État et l’administration publique est surdimensionnée. En
dehors du secteur public, l’économie tunisienne se caractérise par un niveau d’informalité élevé et par
un très grand nombre de micro, petites et moyennes entreprises (MPME). Ces entreprises offrent des
emplois peu qualifiés et ont une faible capacité de croissance et d’innovation. La création d’emplois
reste insuffisante, même lorsque le PIB affiche une croissance soutenue (de 2,5 % à 5 % par an
avant 2019).
L’économie tunisienne a été frappée très durement par l’épidémie de COVID-19. Le secteur du
tourisme, qui pèse lourd dans l’économie tunisienne, et les exportateurs qui fournissent les industries
automobiles et textiles européennes ont ressenti un fort impact négatif. Ces tensions devraient
s’aggraver au fur et à mesure que la crise se propage dans l’économie nationale. Les transferts de
fonds des migrants ont diminué à cause de la crise économique que traverse l’Europe. Les ménages
ont dû puiser dans leurs économies et réduire leur consommation. L’activité économique a enregistré
une contraction sans précédent (-21,6 %) au cours du deuxième trimestre 2020 (INS). En juillet 2020,
l’inflation était en hausse de 5,7 % par rapport à l’année précédente (INS). Le chômage devrait
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poursuivre sa hausse, les revenus diminuer, et les prix des importations augmenter. De nombreuses
entreprises sont confrontées à un manque de liquidités en raison des fermetures temporaires et de la
baisse des recettes tirées de la consommation et des exportations. Les perspectives de l’économie
mondiale du Fonds monétaire international (FMI) d’octobre 2020 tablent sur une baisse du PIB de 7 %
en 2020, soit la pire récession depuis l’indépendance de la Tunisie en 1956 (TAP, 2020b).
Selon l’Oxford Business Group (2019), le secteur des technologies de l’information et de la
communication (TIC) dispose du plus grand potentiel de croissance et d’attraction des investisseurs
étrangers, suivi des secteurs de l’énergie et des mines, de l’industrie et du tourisme.
La population tunisienne est jeune. Les moins de 25 ans représentaient ainsi 39 % de la population
en 2018 (Eurostat, 2020, p. 19). Un enjeu essentiel pour la Tunisie est d’aider ses jeunes, hommes et
femmes, à suivre un parcours professionnel dans lequel ils puissent s’épanouir et exercer une activité
économique rémunérée. La faiblesse de l’économie constitue un obstacle à la participation des
Tunisiens au marché du travail et entraîne une hausse du chômage, du secteur des emplois informels
et des migrations, qui touchent de façon disproportionnée les jeunes et les femmes (CEA, 2019). En
raison du taux de chômage élevé, plus de 100 000 jeunes ont quitté la Tunisie depuis la révolution.
La stratégie globale de la Tunisie s’articule autour du Plan national de développement 2016-2020
(MDICI, 2017). Les stratégies pour le secteur de l’éducation et de la formation se déclinent en
plusieurs plans: le plan stratégique sectoriel pour l’éducation 2016-2020 (ministère de l’éducation,
2016), la stratégie nationale de réforme de l’EFP 2016-2020 (ministère de la formation professionnelle
et de l’emploi – MFPE
1) et le plan stratégique de réforme de l’enseignement supérieur et de la
recherche scientifique 2015-2025 (ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche
scientifique – MESRS). En mai 2019, le MFPE et les partenaires sociaux, en collaboration avec
l’Organisation internationale du travail (OIT), ont lancé des discussions en vue de l’élaboration d’une
nouvelle stratégie nationale pour l’emploi pour la période 2020-2030. Une première analyse de fond
avait été publiée au préalable (OIT, 2018a).
Les institutions publiques adhèrent à ces stratégies. Toutefois, malgré le soutien financier important
de l’UE et d’autres bailleurs de fonds, la mise en place d’actions concrètes avance lentement. Les
changements fréquents de gouvernements et de leurs priorités politiques constituent autant
d’obstacles à une mise en œuvre cohérente des réformes. La capacité des acteurs locaux à
contextualiser les nouveaux concepts et pilotes mis en place, avec l’aide des bailleurs de fonds,
représente également un enjeu important.
La plupart des stratégies nationales sont proches de leur date d’expiration, ce qui offre l’opportunité
d’entreprendre des analyses approfondies de la situation et de redéfinir les priorités politiques de la
Tunisie pour l’après-2020. C’est aussi l’occasion de s’interroger sur ce que les budgets et les
capacités locales peuvent absorber. Pour les bailleurs de fonds, le passage d’une coordination à une
coopération plus étroite (par exemple par le biais d’exercices de programmation et de mise en œuvre
conjoints) pourrait entraîner des difficultés.
1 Les fonctions du MFPE ont été transférées entre-temps au ministère de la jeunesse, du sport et de l’intégration
professionnelle (MJSIP).
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Tendances et défis liés au capital humain
Les emplois du secteur public sont rares et le secteur privé ne crée pas suffisamment d’emplois pour
absorber le nombre croissant de jeunes diplômés entrant sur le marché du travail. La croissance sans
emploi s’est soldée par un déficit annuel d’environ 19 000 emplois entre 2011 et 2017 (OIT, 2018a).
Avec la poursuite de la désindustrialisation, la structure de l’emploi en Tunisie a opéré un
déplacement vers le secteur des services. En 2019, ce secteur concentrait la majorité des emplois
(54 %), suivi de l’industrie (33 %) et de l’agriculture (13 %) (estimations de l’OIT, 2018a). Les
différences régionales sont considérables. Ainsi, les gisements d’emplois se trouvent surtout dans la
capitale, Tunis, et dans les zones côtières, au détriment de l’intérieur du pays.
Défi nº 1: Les taux d’activité et d’emploi, notamment des femmes et des jeunes, sont
faibles malgré des niveaux d’éducation en hausse
Le marché du travail tunisien se caractérise par un taux annuel de population active faible et en légère
baisse – 51,3 % en 2019 contre 52,5 % en 2015 pour les personnes âgées de 15 à 64 ans (Eurostat,
2020, p. 38) –, mais aussi par une part croissante de personnes diplômées de l’enseignement
supérieur, en particulier des femmes. Malgré l’augmentation du niveau d’éducation des femmes, leur
participation au marché du travail reste l’une des plus faibles au monde. Avec seulement 39,7 % en
2019 (INS), le taux d’emploi des plus de 15 ans est faible. Les femmes (et surtout les jeunes femmes)
ont généralement moins de possibilités d’emploi que les hommes. Cependant, de nouvelles
tendances se font jour: les jeunes femmes sont désormais plus présentes sur le marché du travail que
leurs homologues plus âgées. De plus, la part des femmes sur le marché du travail augmente en
fonction du niveau d’éducation. Ainsi, les taux d’emploi des femmes ayant suivi des études
supérieures sont systématiquement plus élevés que ceux des femmes ayant un faible niveau
d’éducation (mais ils sont similaires à ceux des femmes ayant des qualifications de niveau moyen). Il
est important que ces tendances se consolident et que l’augmentation des taux d’activité féminins se
traduise par plus d’emplois et par moins de chômage pour les femmes.
Défi nº 2: De nombreuses personnes occupent des emplois précaires, sans salaire
décent ni protection sociale
Des emplois sont créés dans l’agriculture, l’industrie manufacturière, la construction et les secteurs
des services, tels que le tourisme et le commerce. Toutefois, nombre de ces emplois relèvent du
travail informel ou vulnérable. L’OIT estime que 20 % des Tunisiens salariés occupaient un emploi
vulnérable en 2019, un chiffre qui inclut les «personnes travaillant à leur compte» (c’est-à-dire les
travailleurs indépendants) et les travailleurs familiaux. Cette précarité touche également les femmes,
qui travaillent le plus souvent dans l’agriculture, l’industrie textile ou le commerce. On estime que
l’emploi informel, qui concerne davantage les hommes et les jeunes, représente près des deux tiers
de tous les emplois. Dans l’ensemble, 84 % des emplois occupés par des jeunes de 15 à 19 ans, et
42 % de ceux occupés par des jeunes de 20 à 24 ans, étaient informels (OIT, 2018b, à partir de
données de 2014). Ces emplois, qui sont souvent peu qualifiés, se caractérisent par de mauvaises
conditions de travail, par de faibles rémunérations et par un manque de protection sociale, ce qui
entraîne, à terme, une dégradation du capital humain.
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Défi nº 3: Le chômage touche particulièrement les jeunes, et plus singulièrement les
femmes et les personnes instruites, ce qui met en évidence des inefficacités dans le
développement et l’utilisation du capital humain
Bien qu’il se soit légèrement résorbé au cours des dernières années (15,3 % en 2019 contre 18,3 %
en 2011, INS), le chômage représente un défi persistant en Tunisie. Les progrès les plus importants
ont été enregistrés dans le domaine du chômage des jeunes (15-24 ans), qui est passé de 42,3 %
en 2011 à 34,4 % en 2019. Le chômage continue toutefois de toucher de façon disproportionnée les
jeunes et les femmes. Il affecte également les personnes ayant un niveau d’éducation moyen et élevé,
en particulier les femmes. Compte tenu du faible niveau technologique de la plupart des MPME, les
employeurs préfèrent souvent embaucher de la main-d’œuvre semi-qualifiée ou non qualifiée.
En 2019, 36,7 % des femmes très qualifiées étaient à la recherche d’un emploi (contre seulement
16,2 % de leurs homologues masculins), mais cet indicateur s’est amélioré depuis le pic atteint
en 2012. Le chômage qui touche de nombreux diplômés universitaires est particulièrement inquiétant,
dans la mesure où il semble y avoir un problème avec le type d’études suivies (mais aussi avec le
faible niveau des emplois offerts), avec pour conséquence un faible retour sur l’investissement public
et privé dans la formation du capital humain.
Le niveau de chômage varie fortement selon les régions. Le centre est du pays affichent le taux de
chômage le plus faible (9,9 %) et le sud-ouest le taux le plus élevé (26,2 %) (ETF, 2017; OIT, 2018a
2).
Les facteurs géographiques déterminent également les disparités entre les sexes. Ainsi, si les
différences entre les jeunes femmes et les jeunes hommes sont peu visibles dans les zones urbaines
dynamiques, elles sont beaucoup plus fortes dans les zones rurales moins dynamiques. Les jeunes
femmes qui vivent dans le nord ou dans les régions centrales ou intérieures du pays sont plus
exposées au risque de chômage, tandis que celles vivant dans les régions méridionales sont souvent
totalement exclues du marché du travail (Mansuy et Werquin, 2015).
Défi nº 4: Les jeunes vivent une transition difficile entre l’école et le travail – un jeune
sur trois ne travaille pas, ne suit pas d’études ou de formation (NEET)
Les jeunes Tunisiens font généralement l’expérience d’une transition difficile entre l’éducation et le
travail. De nombreux primo-demandeurs d’emploi sont confrontés au chômage pendant plusieurs
mois, voire plusieurs années. La faiblesse du tissu économique, les disparités territoriales, le manque
de compétences élémentaires et techniques des jeunes, ainsi que la faiblesse des services de
recrutement et d’information en matière d’emploi, sont autant de facteurs qui compliquent l’intégration
des jeunes sur le marché du travail. Une transition lente et difficile vers le marché du travail peut avoir
un impact négatif durable sur le parcours professionnel, les compétences et les futurs revenus des
jeunes. Des études de suivi montrent cependant que les jeunes diplômés de centres d’EFP
bénéficient de meilleures perspectives d’emploi. Parmi les diplômés de 2012 deux tiers des personnes
interrogées sont en emploi quatre ans après l’obtention de leurs diplômes, tandis qu’un peu moins
d’un tiers de tous les diplômés de l’EFP étaient au chômage (ONEQ, 2017). En 2018, seuls 22,1 %
des diplômés de l’EFP interrogés affirmaient être au chômage (ONEQ, 2020).
Fait inquiétant: en 2019, un tiers des jeunes âgés de 15 à 24 ans et n’ayant pas terminé leurs études
secondaires (soit 32 % au total; taux masculin: 31,0 %; taux féminin: 33,0 %, INS) ne travaillaient pas
et ne suivaient pas d’études ou de formation (NEET). Le taux de NEET ne s’est pas amélioré ces
2 Données de l’INS pour 2016 citées par l’ETF (2017), mais en grande partie confirmées par les données de l’INS
pour le deuxième trimestre de 2017 utilisées par l’OIT (2018a).
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dernières années. Traditionnellement, il est plus élevé chez les femmes. Toutefois, en 2019, les
femmes ont considérablement réduit leur écart avec les hommes, le taux de NEET féminin
s’améliorant de 5,1 points de pourcentage par rapport à l’année précédente.
Défi nº 5: L’inadéquation des compétences témoigne d’une utilisation inefficace du
capital humain
Les inadéquations de compétences existantes sont étroitement liées à la situation décrite plus haut.
En effet, le taux de chômage élevé coexiste avec un très grand nombre d’emplois vacants. Trois
entreprises sur quatre ont fait état de difficultés à trouver des candidats suffisamment qualifiés
(ITCEQ, 2018). Les employeurs sont à la recherche de travailleurs qualifiés et de techniciens
spécialisés, notamment dans les secteurs du textile, de l’hôtellerie et de la restauration, du bâtiment et
des TIC. Les profils moyennement et hautement qualifiés sont également particulièrement touchés par
le phénomène de «fuite des cerveaux» (migration des personnes à haut niveau de qualification).
L’inadéquation entre les compétences des travailleurs et celles recherchées sur le marché du travail
tunisien, dans ses multiples dimensions, continue de peser sur le développement économique et
empêche une utilisation plus efficace du capital humain. Un certain nombre d’initiatives ont été
lancées pour favoriser l’emploi des jeunes diplômés. À cet égard, on peut citer le plan Tunisie Digitale
2020, qui vise à développer les infrastructures de TIC et les services liés aux TIC dans tout le pays.
Le ralentissement spectaculaire provoqué par la pandémie de COVID-19 devrait encore aggraver les
difficultés auxquelles sont confrontés l’économie et le marché du travail tunisiens. Afin de contenir le
budget de l’État, le gouvernement tunisien a annoncé un gel des recrutements dans le secteur public,
à l’exception de certaines professions prioritaires (TAP, 2020a). Le Programme des Nations unies
pour le développement (PNUD, 2020) estime que la récession pourrait mettre en péril jusqu’à 275 000
emplois dans les micro et petites entreprises, tandis que le chômage pourrait atteindre 21,6 %. Au
deuxième trimestre 2020, le taux de chômage s’élevait à 18 % (INS). Les Tunisiens pourraient
renoncer à chercher un emploi et s’éloigner encore plus du marché du travail, en particulier dans les
régions défavorisées, ce qui pourrait déboucher sur une sous-utilisation accrue du capital humain
existant.
Défi nº 6: Bien que les niveaux d’éducation s’améliorent, le niveau des compétences
de base reste très préoccupant
La Tunisie, qui a réussi à maintenir un niveau élevé de dépenses publiques dans l’éducation – avec
6,1 % du PIB en 2017 (INS) –, a considérablement amélioré les taux d’alphabétisation et de
scolarisation de sa population. Une grande partie de la jeunesse tunisienne est instruite, avec un
nombre considérable de jeunes diplômés de l’enseignement supérieur. Néanmoins, cette tendance
positive contraste avec la persistance d’un taux élevé de décrochage scolaire, qui concerne plus d’un
jeune sur trois âgé de 18 à 24 ans (37,1 % en 2019). L’abandon scolaire est dû à un manque de
programmes, d’installations, de transports et de soutien pédagogique et familial adaptés. Comme
évoqué plus haut, il existe un lien étroit entre le taux de décrochage et le taux de NEET. Le système
éducatif tunisien demeure sélectif et offre moins de choix aux élèves issus d’un milieu culturel et
familial défavorisé.
En outre, la qualité de l’éducation suscite des inquiétudes. En 2017, le nombre d’années de
scolarisation corrigées de l’apprentissage s’élevait à seulement 6,3 (indice de développement humain
de la Banque mondiale, 2018). En 2015, le test du Programme international pour le suivi des acquis
des élèves (PISA) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a mis
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en évidence une forte baisse des compétences en lecture. Ainsi, pas moins de 71,6 % des élèves
âgés de 15 ans ont obtenu de mauvais résultats dans ce domaine (contre 50,2 % en 2009). Le taux
de mauvais résultats en sciences et en mathématiques s’élevait respectivement à 65,9 % (contre
53,7 % en 2009) et 74,8 % (contre 73,6 % en 2009). Cette situation est préoccupante car le manque
de compétences de base empêche les jeunes de poursuivre leur apprentissage et d’acquérir des
compétences de haut niveau. De plus, les personnes peu qualifiées sont généralement plus
vulnérables aux retournements de conjoncture économique.
Défi nº 7: Le nombre d’inscriptions dans l'EFP est faible en raison du manque
d’offres d’EFP attrayantes et de l’absence de passerelles vers l’enseignement
supérieur
L’EFP est généralement considéré comme conduisant à des emplois à faible statut social et à basse
rémunération. Malgré les tentatives passées de créer des passerelles entre l’EFP et l’enseignement
supérieur, la formation professionnelle est toujours perçue comme une voie de garage. En Tunisie, la
part des étudiants de l’EFP dans l’enseignement secondaire a diminué, passant de 13,9 % en 2011 à
9,1 % en 2016. Le faible nombre de jeunes s’inscrivant dans des filières d’EFP est accentué par le
niveau élevé d’abandon en EFP, qui s’élève à 22,3 % (ITCEQ, 2018, p. 16).
La Tunisie ne s’est toujours pas dotée d’un dispositif de formation professionnelle de qualité qui, plutôt
que de produire un grand nombre de diplômés universitaires dans des domaines offrant des
perspectives d’emploi limitées, s’attacherait à former des travailleurs qualifiés et des techniciens très
demandés sur le marché du travail. Des mécanismes financiers de formation continue (comme, par
exemple, le droit de tirage ou le crédit d’impôt) et de programmes actifs de l’emploi ont été mis en
place pour les salariés et les demandeurs d’emploi au chômage. Pour autant, les possibilités de
mettre à niveau ses compétences ou de se reconvertir dans des domaines recherchés sur le marché
du travail sont limitées, notamment pour les jeunes diplômés sans emploi. En dépit de la
reconnaissance par le MFPE des faiblesses générales de la formation professionnelle, de l’existence
de l’ambitieuse Stratégie nationale de réforme de l’EFP 2016-2020 et des légères améliorations
enregistrées dans des domaines pilotes, l’EFP n’a toujours pas fait l’objet d’une réforme globale. Cette
difficulté à réformer s’explique en partie par la mauvaise image dont est victime l’EFP au sein de la
population et des élites politiques.
Défi nº 8: Les opportunités de formation professionnelle continue sont sous-utilisées
Il existe une demande de formation continue, de mise à niveau des compétences. Parmi la population
active âgée de 25 à 64 ans, 2,9 % ont participé à une formation en 2019 contre 1,3 % en 2015, ce qui
représente une augmentation significative (INS, Enquête sur les forces de travail – EFT). Il existe une
politique de formation professionnelle continue précisée au niveau de la réforme comme suit :
La gouvernance au niveau du système de financement,
Efficacité et efficience : approche qualité/ label et professionnalisation des acteurs.
Outre ces aspects, le Centre National de Formation Continue et Promotion Professionnelle (CNFCPP)
œuvre pour :
Digitaliser le traitement des dossiers de formation,
Développer les métiers de conseil et d’assistance au profit des entreprises, des partenaires
sociaux et aux prestataires de formation,
Favoriser une formation tout au long de la vie par le biais des Instituts supérieurs de travail.
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Malgré des réformes structurelles et l’existence d’un système de taxe de formation professionnelle 3, le
dispositif de la formation continue présente plusieurs lacunes. La bureaucratie et la complexité des
procédures d’inscription sont les principales raisons de la sous-utilisation du fonds de formation pour
l’enseignement et la formation professionnels continus, seuls 10 % des fonds disponibles ayant été
utilisés en 2018 (OIT, MFPE et CNFCPP, 2017). Des discussions sont en cours sur la manière de
simplifier l’utilisation des mécanismes de financement afin d’améliorer l’accès à l’apprentissage tout
au long de la vie.
Recommandations quant aux mesures à prendre
Le chapitre 3 se concentre sur le secteur de l’EFP car bon nombre des professions qui constituent
l’épine dorsale du développement économique et social dépendent des qualifications professionnelles
(voir, par exemple, OCDE, 2020). De plus, on sait que les compétences professionnelles améliorent
les chances des diplômés tunisiens de trouver un emploi. Le terme «EFP», tel qu’il est utilisé dans le
contexte du présent rapport, désigne un domaine plus large englobant aussi bien la formation initiale
que continue pour les jeunes et les adultes, à différents niveaux de qualifications, et intégrant les
aptitudes et les compétences de base essentielles à l’exercice d’une profession et à la poursuite de
l’apprentissage.
Des stratégies et des plans d’action pertinents ont été mis en place pour réformer en profondeur le
secteur de l’EFP. Pourtant, les réformes nécessaires n’ont pas été menées à bien dans la mesure
souhaitée. Les principaux défis et priorités qui pourraient permettre de réformer le système, dans le
but ultime de mieux servir l’économie, les individus et la société, sont analysés dans ce chapitre. Ces
défis sont résumés sous les termes de «cohérence externe» et de «cohérence interne», qui sont des
concepts clés de toute réforme systémique.
Amélioration de la cohérence externe et de la pertinence de l’EFP grâce à ...
Le premier grand défi auquel est confronté le système tunisien d’EFP concerne le manque de
cohérence externe, c’est-à-dire que, dans une certaine mesure, le système ne répond pas aux
attentes et aux besoins de ses usagers. La cohérence externe passe par la mise en place d’un
système structuré d’identification des compétences, par une révision de la gouvernance et des
modalités de financement à tous les niveaux, mobilisant l’ensemble des acteurs concernés, par une
approche plus globale de la révision de la législation et des pratiques de mise en œuvre, et par un
ajustement progressif du réseau des prestataires et des offres de formation en fonction des besoins
de compétences actuels et futurs.
... l’anticipation des compétences et à l’orientation professionnelle pour obtenir de
meilleurs résultats sur le marché du travail
Les données démographiques, sociales et relatives au marché du travail et aux compétences
devraient être recueillies de manière plus systématique aux niveaux national, sectoriel et régional, et
devraient éclairer la réflexion sur une restructuration du réseau des prestataires et des programmes
d’EFP. Les fonds publics destinés à la formation pourraient être utilisés plus efficacement en
3 Il est à noter qu’il existe « un système de taxe de formation professionnelle » et aussi les droits de tirage pour
les entreprises privées : i) Nouvellement créées (moins que 3 années d’activité) ; ii) Exonérées ou non soumises
à la TFP ; iii) Petites et moyennes entreprises appartenant à des secteurs définis annuellement ; iv) Dont la TFP
due est strictement inférieure à 1000 D.
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préparant les apprenants à leur future intégration dans la société et sur le marché du travail. En
l’absence d’un système avancé – certes plus coûteux – de veille du marché du travail à l’échelle
nationale et régionale, il pourrait être utile d’engager des discussions constructives avec des groupes
de réflexion économiques, des experts et des employeurs sur les besoins futurs de l’économie aux
niveaux national, sectoriel et régional. L’objectif final serait de concevoir et de mettre en œuvre, de
façon progressive, un plan d’ajustement progressif, à moyen et long terme, du réseau des prestataires
de formations et des filières de formation (financés par des fonds publics) afin de mieux répondre aux
besoins identifiés. La collecte régulière d’informations sur les niveaux de satisfaction et les parcours
professionnels des diplômés de l’EFP pourrait également apporter des éclairages précieux. Par
ailleurs, le fait d’offrir davantage de possibilités (en ligne) d’information, de conseil et d’orientation
professionnelle dans les écoles, et en dehors de celles-ci, aiderait les jeunes à déterminer leurs futurs
choix éducatifs et professionnels. Les efforts de numérisation mis en œuvre en ce sens par les
agences pour l’emploi sont un pas dans la bonne direction et pourraient, de ce point de vue, constituer
une source d’information utile.
... la mise en place de nouveaux dispositifs de gouvernance cohérents, multi-niveaux
et multi-acteurs, aux niveaux central, sectoriel et régional/local
Il est admis que la gouvernance et le financement de l’EFP, qui sont actuellement fortement
centralisés, sont parmi les principaux facteurs qui font obstacle à la prestation d’une offre d’EFP plus
pertinente en Tunisie. Le taux élevé de chômage des jeunes et les écarts considérables entre les
régions exigent de nouvelles dispositions dans le domaine de la gestion des politiques d’éducation, de
formation et d’emploi, qui intègrent les notions de «décentralisation» et de «régionalisation». Il faut
une approche globale et cohérente, à même de répondre plus efficacement aux attentes
socioéconomiques et aux besoins connexes en matière de compétences, pour favoriser l’émergence
d’un système de gouvernance et de financement multi-acteurs aux niveaux national, sectoriel et
régional/local.
Avec le Contrat social, une structure tripartite globale a été mise en place pour fournir des conseils sur
les politiques d’EFP. Toutefois, la mise en œuvre des dispositions du Contrat social et la création de
différents partenariats public-privé ne sont pas sans difficultés. Les organisations patronales et
syndicales, aux niveaux national et sectoriel, devraient pouvoir participer au dialogue sur les politiques
de développement des compétences sur un pied d’égalité avec le gouvernement. Des conseils
sectoriels bipartites sur les compétences, réunissant employeurs et experts en programmes d’EFP,
pourraient être mis en place pour les secteurs prioritaires, afin d’analyser les besoins en compétences
et en formation et de développer les qualifications et les programmes respectifs. Bien entendu, les
partenaires participant aux différentes formes de dialogue et aux travaux d’experts devront se
familiariser avec leur nouveau rôle et renforcer leurs capacités.
Les rôles et responsabilités dans la conception de la stratégie globale et la planification, la gestion, le
suivi et l’évaluation du système du ministère de la jeunesse, du sport et de l’intégration professionnelle
(MJSIP), de l’Agence tunisienne de la formation professionnelle (ATFP),des partenaires sociaux, le
Ministère de la Défense Nationale (en tant que opérateur de formation professionnelle) et le secteur
privé de formation, devraient être renforcés. Le MJSIP, qui assume désormais des fonctions relatives
à l’EFP, devrait faciliter la réforme globale et accroître la pertinence et la qualité de l’EFP pour les
jeunes et les adultes en Tunisie. En outre, il est nécessaire que le MJSIP, l’ATFP et leurs partenaires
conçoivent et mettent en œuvre des cadres nationaux communs pour les qualifications, l’assurance
qualité, la transparence et la responsabilisation, dans lesquels les organismes de formation sectoriels
– tels que l’Agence de formation dans les métiers du tourisme (AFMT), l’Agence de la vulgarisation et
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de la formation agricoles (AVFA) et tous les acteurs régionaux et locaux – puissent agir de manière
autonome.
La participation active d’acteurs régionaux et locaux à la conception et à la mise en œuvre des
politiques d’EFP et d’emploi, comme l’illustre, par exemple, le Programme d’appui à la formation et à
l’insertion professionnelle (PAFIP) ou l’Initiative régionale d’appui au développement économique
durable (IRADA) financée par l’UE, est essentielle pour libérer le potentiel de développement
économique, social et d’emploi des régions. En d’autres termes, les rôles et les responsabilités des
différents acteurs, notamment ceux de la Direction régionale de la formation professionnelle et de
l’emploi, des bureaux locaux de l’Agence nationale pour l’emploi et le travail indépendant (ANETI) et
des partenaires sociaux, doivent également être redéfinis aux niveaux régional et local. Des
ressources, des approches et des outils adéquats sont nécessaires pour renforcer les capacités des
acteurs régionaux et permettre une gestion efficiente et efficace des nouvelles missions, ainsi qu’un
suivi et une évaluation des politiques (voir, par exemple, ETF et MFPE, 2017).
Toutefois, l’une des principales conditions préalables au bon fonctionnement d’un système
décentralisé de gestion des politiques d’EFP et d’emploi est l’intégration de ces mêmes politiques
dans une réforme administrative globale et bien préparée à l’échelle du pays. Une telle réforme
supposerait de réduire les structures administratives actuelles, peu efficaces, et de les regrouper en
unités autonomes plus importantes et potentiellement autosuffisantes. Cela nécessiterait d’attribuer
plus de responsabilités, mais aussi plus de ressources, aux administrations régionales et locales.
Cette réforme doit s’appuyer sur un plan national et sur une nouvelle législation qui définisse la
répartition des fonctions entre l’État, les gouvernorats, les districts et les municipalités dans le cadre
d’un futur système décentralisé, les ressources qui seront transférées par l’État et les différents impôts
locaux qui pourront être prélevés par les autorités régionales ou locales. Sans une assise financière
suffisante, la décentralisation restera lettre morte.
En attendant, l’ATFP et les autres organismes d’EFP peuvent montrer la voie en pilotant de nouvelles
approches de gestion décentralisée de l’EFP, grâce aux projets financés par les bailleurs de fonds.
L’ATFP et les autres organismes d’EFP pourraient promouvoir activement la formation de réseaux
mobilisant toutes les parties prenantes concernées, afin d’identifier les besoins en compétences et de
créer des partenariats pour l’emploi et les compétences aux niveaux régional et local. Les régions
sont encouragées à planifier leurs propres actions en partant de l’identification préalable des besoins
en compétences et en formation d’une région ou d’un gouvernorat donné, ou dans un secteur
d’activité donné (par exemple le tourisme à Médenine).
La population locale, les associations d’employeurs et de salariés et les employeurs individuels sont
des acteurs clés dans tous les aspects mentionnés ci-dessus. Conscients de l’importance de
promouvoir le progrès économique et social au niveau local, ils sont encouragés à participer aux
analyses des besoins en matière d’activité économique, de marché du travail et de compétences,
ainsi qu’à contribuer à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des politiques de formation. La
formation initiale des jeunes joue un rôle tout aussi important que l’apprentissage de la deuxième
chance, la mise à niveau des compétences et les mesures de reconversion pour les adultes. Dans ce
contexte, une édition antérieure du Rapport mondial de suivi sur l’éducation pour tous 2012 (Walther,
2011) souligne l’importance du renforcement des compétences recherchées dans le secteur informel,
qui est très développé en Tunisie.
En s’appuyant sur le décret gouvernemental nº 2019-802, il convient de renforcer l’autonomie des prestataires
d’EFP, qui sont eux-mêmes gérés par des conseils scolaires compétents et collaborent avec des acteurs
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pertinents au niveau régional (voir également ci-dessous). Des efforts supplémentaires pourraient être mis en
œuvre pour transformer certains prestataires en centres d’excellence investis de missions supplémentaires
d’intérêt national ou sectoriel et éventuellement financés conjointement avec le secteur privé.
L’octroi d’une plus grande autonomie aux acteurs régionaux et aux prestataires d’EFP devra
s’accompagner de cadres nationaux fonctionnels garantissant la qualité et la responsabilisation ainsi
qu’une utilisation efficace des fonds publics. Ces cadres comprennent typiquement des qualifications
et/ou des programmes (programmes-cadres) d’assurance qualité qui ont été approuvés par des
organismes nationaux ou des organes sectoriels et auxquels l’offre d’EFP sera adaptée. Divers autres
mécanismes d’assurance de la qualité, comme les autoévaluations ou les inspections des prestataires
d’EFP, devraient être mis en place pour fixer les normes de qualité de l’offre d’EFP et pour
encourager les prestataires d’EFP à se développer et à s’améliorer en permanence. Ces mécanismes
pourraient notamment prévoir de lier partiellement le financement public de l’EFP aux résultats
obtenus en matière de rétention et de compétences des étudiants.
... un système de suivi et d’évaluation pour évaluer les progrès et éclairer
l’élaboration des politiques
En outre, pour permettre le suivi et l’évaluation du système au niveau national, les prestataires d’EFP
et les acteurs régionaux devraient présenter des rapports réguliers sur les progrès réalisés par rapport
à divers indicateurs fixés au niveau national, ce qui nécessiterait de mettre en place un certain
nombre d’outils et de lignes directrices de gestion. Parmi ces outils pourrait figurer un système
d’information de gestion global en matière d’EFP pour aider les niveaux régionaux et nationaux à
suivre les processus et les résultats des prestataires de formation et, plus généralement, à concevoir
et à planifier les politiques d’EFP. Les données respectives devraient être utilisées pour déterminer,
par exemple, le nombre d’inscriptions, l’effectif et les qualifications du personnel, l’achat d’équipement
et de matériel ou encore le nombre de places d’hébergement.
Si le MJSIP et ses partenaires révisaient les modalités de gouvernance et de financement de l’EFP,
l’adhésion aux réformes proposées sera d’autant plus forte que les acteurs concernés auront été
consultés en amont. Un processus de dialogue à grande échelle mobilisant de multiples acteurs devra
être mis en place, ce qui nécessitera des efforts importants en matière de supervision et de
planification stratégique ainsi que des compétences techniques, juridiques et de communication, mais
aussi et surtout des ressources humaines et financières au sein du MJSIP, de l’ATFP et de leurs
interlocuteurs. Les éventuels changements apportés aux dispositifs de gouvernance et de
financement devront se traduire par des modifications législatives. Il est recommandé aux acteurs
tunisiens d’adopter une approche plus globale en ce qui concerne la révision du cadre juridique de la
formation professionnelle initiale et continue, y compris de la législation de base et du droit dérivé. La
nouvelle législation devrait prévoir un modèle de financement qui vienne renforcer les nouveaux
dispositifs de gouvernance et qui favorise l’éducation et la formation dans une perspective
d’apprentissage tout au long de la vie.
Une démarche aussi ambitieuse ne peut pas s’accomplir du jour au lendemain. Même si tous les
acteurs acceptaient et utilisaient les outils et les capacités de gestion appropriés, il faudrait des
années pour préparer et implanter les nouvelles dispositions. Les nouveaux dispositifs nécessitent un
soutien de l’ensemble du spectre politique, une feuille de route claire, un appui financier et technique
ainsi qu’un suivi étroit s’inscrivant dans un cycle constant de conception, de mise en œuvre,
d’évaluation et de révision des politiques.
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Amélioration de la cohérence interne ou de la qualité de l’offre d’EFP grâce ...
Le deuxième grand défi concerne le renforcement de la cohérence interne du système d’EFP, c’est-à-
dire une amélioration et un meilleur alignement des éléments clés, tels que les programmes d’études,
les supports d’enseignement et d’apprentissage, les compétences des enseignants et les opportunités
de formation en milieu professionnel(FmP), afin d’aider les apprenants, jeunes et adultes, à acquérir
les compétences pratiques et professionnelles requises par le marché du travail et précisées dans les
qualifications. Dans ce contexte, les mécanismes d’assurance qualité doivent couvrir tous les
éléments du système.
... au renforcement des capacités et de l’autonomie des opérateurs de formation
Le renforcement de l’autonomie des centres de formation, dans des cadres fixés au niveau national et
avec le soutien de partenaires, pourrait éventuellement permettre d’accroître la pertinence et la qualité
de l’offre d’EFP. Les autorités, les agences, les directions régionales, les centres de formation
professionnelle et leurs partenaires locaux pourraient pratiquer de nouvelles formes de coopération et
d’autorité, grâce à un cadre juridique de l’EFP révisé intégrant la gouvernance et le financement dans
un contexte décentralisé et dans des cadres nationaux de certifications, d’assurance qualité et de
responsabilisation (communication de données). Même avec le cadre juridique existant, la Tunisie
pourrait prendre de nouvelles mesures pour mettre en œuvre l’autonomie des établissements d’EFP,
en déléguant davantage de responsabilités aux centres de formation ainsi qu’à leurs partenaires et en
trouvant des moyens pragmatiques d’encourager l’esprit d’entreprise. Les acteurs locaux pourraient
être chargés de participer aux décisions clés concernant le choix de leurs offres de formation, le
recrutement et la rémunération (supplémentaire) du personnel, la gestion des affaires du centre de
formation de la promotion de ses formations, en passant par les inscriptions et l’élaboration de
programmes intégrant la formation en milieu professionnel (FmP), les activités d’orientation
professionnelle, la signature d’accords avec des entreprises, la conclusion d’autres contrats (par
exemple pour la location de locaux, la fabrication de produits ou la fourniture de services pour les
populations locales), ou encore l’élaboration et l’utilisation du budget. Les partenaires sociaux, les
étudiants et les représentants des familles peuvent apporter une contribution utile à la gestion et au
développement des centres de formation.
Le rôle des directeurs et des enseignants, avec leurs partenaires économiques, doit être renforcé en
ce qui concerne le développement des cursus et de l’enseignement. Les centres de formation des
enseignants pourraient soutenir et coordonner les enseignants afin de les aider à élaborer, d’une
manière collaborative, des supports pédagogiques actualisés. Les pratiques d’évaluation au niveau
des centres de formation devraient également être renforcées.
En diversifiant les sources de financement (État, région/municipalité, employeur, ressources de
l’établissement), les centres de formation pourraient être en mesure de faire l’acquisition de matériel
et de consommables modernes.
... au développement professionnel continu des enseignants et des formateurs d’EFP
Le MJSIP et les différentes parties prenantes devraient travailler ensemble pour convenir de
stratégies de DPC, améliorer le cadre normatif des enseignants et des formateurs de l’EFP, fixer des
objectifs dans le cadre de la stratégie nationale de 2025 pour l’enseignement professionnel et définir
un plan d’action viable. Le Centre national de formation de formateurs et d’ingénierie de formation
(CENAFFIF) pourrait revoir ses programmes, éventuellement en collaboration avec des acteurs
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industriels et d’autres prestataires professionnels de DPC, et introduire des méthodologies modernes
et variées. Il est nécessaire de développer des outils pour identifier les besoins et les mécanismes de
financement de la formation technique des enseignants. Une meilleure coordination entre les
structures régionales et les centres de formation et leurs partenaires est essentielle pour fournir le
matériel et les ressources humaines nécessaires. Les centres de formation ont un rôle important à
jouer dans l’analyse de leurs besoins de formation et dans le partage et l’utilisation de ces
informations pour la planification et la coordination du DPC.
Le MJSIP est également invité à examiner ou à réviser la rémunération, la formation, la
reconnaissance et le statut offerts aux enseignants exerçant des fonctions de mentorat dans les
centres de formation. Le mentorat peut être utilisé de manière plus générale comme une forme de
DPC pour les formateurs et les directeurs d’EFP. Les possibilités de DPC devraient être liées à des
améliorations de l’enseignement, qui sont identifiées grâce aux retours d’information, et à l’évolution
de carrière. Dans la mesure du possible, le DPC devrait être conçu pour préparer les formateurs et les
directeurs à assumer des responsabilités accrues et à obtenir une reconnaissance à travers la
promotion. Des registres nationaux agrégés de la participation au DPC pourraient être publiés (ETF,
2019).
... au développement et à l’amélioration des dispositifs de la formation en milieu
professionnel (FmP)
Les données montrent que, plutôt que de rester sur l’ancien modèle consistant à étudier d’abord et à
travailler ensuite, l’intégration de la formation en milieu professionnel, en tant qu’élément structurel de
l’offre de formation, permet de faciliter la transition entre l’école et le travail (OCDE, 2010, ETF, 2013,
entre autres). Parmi les secteurs dans lesquels ce type de formation est considéré comme présentant
un certain potentiel de développement en Tunisie, on peut citer l’aéronautique, les composants
automobiles, l’informatique, le textile et l’habillement, le tourisme ou l’artisanat. En revanche,
l’agriculture et le brevet de technicien professionnel, secteurs dans lesquels la FmP pose un problème
majeur, nécessitent des mesures de soutien nationales ciblées.
Il est recommandé de compléter l’apprentissage appellé « F0 » par une formation complémentaire
dans le centre de formation. Les employeurs peuvent également contacter des centres de formation
privés qui proposent une formation théorique pertinente complémentaire et des compétences non
techniques
4. Le succès d’une telle approche passe par un mécanisme de financement flexible qui
assure les activités des opérateurs privés. Le financement ne peut être accordé que lorsqu’une
entreprise est prête à prendre en charge le stagiaire pendant toute la durée de la formation. La
participation des professionnels du secteur privé à la gestion des centres de formation, la réduction de
la charge d’enseignement et le remboursement des frais de déplacement des coordinateurs scolaires
sont essentiels pour assurer le succès de la FmP. Les périodes de formation en entreprise devraient
être soigneusement planifiées et devraient, dans l’idéal, faire partie intégrante du programme d’EFP. Il
est nécessaire de faire appel à des tuteurs formés pour l’apprentissage en entreprise. Afin de mettre
en place des unités de soutien à la formation sur le lieu de travail, les organisations patronales et
4 L’apprentissage n’est pas permis actuellement aux établissements privés de formation. Le présent rapport
propose une plus grande implication du secteur privé en général et des opérateurs de formation professionnelle
privés en particulier, pour faire face à la problématique de la formation complémentaire théorique dans un centre
de formation. Le défi de l’apprentissage en milieu professionnel est tellement important et stratégique pour
l’employabilité et la réinsertion des jeunes qu’une réforme profonde de ce mode de formation serait nécessaire et
urgente y compris ses aspects législatifs.
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syndicales pourraient bénéficier de certains financements, ce qui leur permettrait de jouer leur rôle de
supervision des membres et de se poser en intermédiaire crédible et représentatif auprès du MJSIP.
Les unités de soutien à la formation pourraient être rémunérées pour les activités de formation
continue qu’elles organisent.
Conclusion
En conclusion, sans un environnement plus propice à la croissance des entreprises et à la création
d’emplois, la situation de sous-utilisation du potentiel du capital humain de la Tunisie risque de se
perpétuer. Il existe un large consensus national autour du fait que la poursuite de l’intégration de la
Tunisie dans les chaînes de valeur mondiales pourrait contribuer à la génération d’activités à plus
forte valeur ajoutée et à la création d’emplois pour une main-d’œuvre plus qualifiée. Des politiques
devraient être mises en place pour adapter l’environnement des affaires et moderniser les entreprises
afin de les aider à se développer. En même temps, des emplois plus nombreux et de meilleure qualité
exigent des candidats possédant les aptitudes et les compétences professionnelles appropriées. Les
compétences et les qualifications professionnelles sont un pilier essentiel du stock de capital humain
de la Tunisie. C’est pourquoi, la modernisation de l’EFP initiaux et continus doit faire l’objet d’une
attention politique accrue.
La prise en compte, d’une manière soutenue et systématique, des défis et des recommandations
évoqués ci-dessus peut avoir un impact, à moyen et long terme, sur l’efficience et l’efficacité du
système de formation professionnelle initiale et continue. En effet, cela permettra non seulement
d’améliorer la pertinence et la qualité des résultats obtenus en ce qui concerne les compétences
employables des jeunes et des adultes, mais aussi de mieux utiliser les investissements publics,
privés et des bailleurs de fonds. La participation d’un plus grand nombre de personnes aux
programmes de développement des compétences, la prévention des abandons précoces et la
formation des travailleurs aux compétences demandées sur le marché du travail permettront de
renforcer le potentiel de ressources humaines de la Tunisie, d’améliorer la transition de l’école vers le
travail et de contribuer à la réalisation des objectifs du pays en matière de développement
économique, de marché du travail et d’inclusion sociale.
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1. INTRODUCTION
1.1 À propos de cette analyse
Le présent rapport de l’ETF sur le développement du capital humain en Tunisie s’inscrit dans le cadre
du cinquième cycle du processus de Turin de l’ETF. La Tunisie participe à ce processus depuis 2010.
Avant cette évaluation, une série d’autoévaluations ont été effectuées en Tunisie entre 2018 et 2020.
L’Observatoire national de l’emploi et des qualifications (ONEQ) a assuré la coordination nationale,
rassemblant les acteurs de l’EFP tant au niveau national que sous-national. En conséquence, un
projet de rapport national du processus de Turin 2020 (Zaibi, au nom du MFPE et de l’ONEQ,
publication à venir) et huit rapports régionaux du processus de Turin
5 ont été produits. Les rapports
régionaux ont été élaborés en étroite coopération avec le programme IRADA, financé par l’UE.
Le processus d’analyse de l’ETF comprenait une phase approfondie de recherche documentaire
basée sur les rapports nationaux et régionaux, une analyse documentaire des études pertinentes, la
collecte de données statistiques et la rédaction d’un document de réflexion proposant un aperçu des
thèmes à aborder dans le présent rapport.
Dans le cadre du dialogue politique régional, les conclusions et les recommandations de l’analyse du
processus de Turin de l’ETF fournissent des éléments permettant d’éclairer les futures initiatives
régionales dans le sud et l’est de la Méditerranée ainsi que les discussions en cours sur la
programmation post-2020. Les conclusions de ce rapport viendront également alimenter le dialogue
mené actuellement par l’Union pour la Méditerranée et la Commission européenne sur le suivi des
progrès de la déclaration ministérielle sur l’emploi et le travail de 2019, qui met l’accent sur toute une
série d’enjeux, notamment l’importance de réformer les systèmes d’éducation et de formation de
manière à répondre aux défis posés par la garantie d’embauche, l’employabilité et le travail décent
6.
Un rapport transnational consolidera tous les résultats des évaluations du processus de Turin pour la
Méditerranée méridionale et orientale, contribuant ainsi au cadre de suivi et d’évaluation qui doit être
élaboré comme résultat concret de la déclaration
7.
La présente évaluation adopte une perspective plus large du développement du capital humain, sous
l’angle de l’apprentissage tout au long de la vie. Après avoir présenté le contexte général (chapitre 1),
l’évaluation donne un aperçu des principaux défis liés au développement du capital humain en Tunisie
(chapitre 2). Le chapitre 3 se concentre sur le système d’EFP dans un contexte où les employeurs
tunisiens ont besoin de travailleurs et de techniciens qualifiés et où les diplômés de l’EFP sont mieux
armés sur le marché du travail. Il développe les deux principaux défis que sont la cohérence externe
5 Un rapport pour chaque région participant au programme IRADA (http://irada.com.tn/), à savoir Gabès,
Médenine, Gafsa, Kasserine, Sfax, Sidi Bouzid, Bizerte et Jendouba.
6 En ce qui concerne l’importance de l’investissement dans les systèmes d’éducation, d’enseignement supérieur
et de formation, y compris l’EFP, ainsi que la reconversion professionnelle et le perfectionnement des travailleurs
tout au long de leur vie pour les préparer aux évolutions constantes du monde du travail, voir la déclaration
ministérielle sur l’emploi et le travail, avril 2019, p. 4.
7 Les ministres du travail ont demandé au Secrétariat de l’Union pour la Méditerranée de coordonner, avec la
participation des pays volontaires, la mise en place d’un cadre pour les processus de suivi nationaux, notamment
en organisant des réunions, en fournissant des informations pertinentes, en établissant des contacts et des
réseaux et en coopérant avec les parties prenantes des pays et des organisations internationales. Les ministres
ont invité la Commission européenne et les organismes européens concernés, en particulier l’ETF, à apporter
leur expertise à ces travaux. Voir la déclaration ministérielle sur l’emploi et le travail, paragraphe 29, avril 2019.
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et la cohérence interne du système d’EFP et propose des recommandations quant à la manière de les
améliorer à moyen et long terme. Le chapitre 4 formule une conclusion.
1.2 Aperçu du pays
En 2011, des milliers de Tunisiens sont descendus dans la rue pour exprimer leur insatisfaction face à
la pauvreté, au chômage et à la corruption. Des millions de personnes ont nourri l’espoir que ce
mouvement entraînerait des changements en Tunisie. Depuis lors, la Tunisie mène avec succès une
transition démocratique qui englobe à la fois la politique et les institutions du pays. Une nouvelle
Constitution a été adoptée en 2014 (JORT, 2015). Cependant, les difficultés liées à la situation
socioéconomique du pays et les «préoccupations sécuritaires liées à l’extrémisme violent et au
terrorisme» risquent aujourd’hui d’éclipser les progrès significatifs accomplis jusqu’ici (Colombo et
Meddeb, 2018, p. 35).
La population tunisienne est jeune. Les moins de 25 ans représentaient ainsi 39 % de la population
en 2018 (Eurostat, 2020, p. 19). Un enjeu essentiel pour la Tunisie est d’aider ses jeunes, hommes et
femmes, à suivre un parcours professionnel dans lequel ils puissent s’épanouir et exercer une activité
économique rémunérée. La faiblesse de l’économie entrave la participation des Tunisiens au marché
du travail et entraîne une hausse du chômage, du secteur des emplois informels et des migrations, qui
touchent de façon disproportionnée les jeunes (UNECA, 2019). En raison du taux de chômage élevé,
plus de 100 000 jeunes ont quitté la Tunisie depuis la révolution.
En ce qui concerne le développement humain, la Tunisie s’est classée à la 95e place sur 189 pays
selon l’indice de développement humain 2017 du PNUD. Elle remplit donc les critères de la catégorie
des pays présentant un «développement humain élevé». Depuis le Printemps arabe, les conditions
socioéconomiques se sont améliorées, mais la population ne perçoit pas forcément cette embellie car,
contrairement aux salaires, les prix des produits et des services ont augmenté. Comme l’indique le
rapport national volontaire sur les progrès accomplis dans le cadre des objectifs de développement
durable (Forum politique de haut niveau des Nations unies sur le développement durable, 2019), des
progrès ont été réalisés en ce qui concerne l’accès aux services sociaux et de santé. Cependant,
malgré l’accent mis sur les politiques sociales, 3,8 % des Tunisiens entrent dans la catégorie des
personnes extrêmement pauvres (MDICI, 2017). En outre, de grandes disparités subsistent entre les
régions côtières et du nord du pays, d’un côté, et les régions intérieures et rurales, de l’autre.
La Tunisie est l’un des pays arabes les plus avancés en matière de reconnaissance des droits des
femmes. Parmi les initiatives récentes, on peut citer la nouvelle loi sur l’intégration de la dimension de
genre dans les institutions (Dahmani, 2018). Pourtant, les femmes tunisiennes continuent de souffrir
de discriminations, tant sur le plan social que sur celui de leur intégration sur le marché du travail,
alors même qu’elles ont souvent un niveau d’instruction plus élevé.
1.3 Cadres stratégiques nationaux
La Tunisie a adopté un certain nombre de stratégies de réforme ambitieuses. La principale stratégie
s’articule autour du Plan national de développement 2016-2020 (MDICI, 2017).
Les responsabilités des différents sous-systèmes d’éducation en Tunisie sont réparties entre trois
ministères: le ministère de l’éducation, le MESRS et le MJSIP. Ce dernier a récemment repris la
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responsabilité de l’EFP et de l’emploi, qui relevait auparavant du MFPE8. Chaque ministère a analysé
les principaux problèmes et défini des mesures appropriées pour ses sous-secteurs. Les ministères
reçoivent un financement de l’État pour mettre en œuvre les actions qui découlent du Plan national de
développement 2016-2020 (MDICI, 2017). Le plan souligne la nécessité d’une coopération entre les
trois ministères afin de coordonner et de renforcer mutuellement les initiatives dans le contexte de
l’apprentissage tout au long de la vie. Une nouvelle commission de développement du capital humain,
composée de représentants des trois ministères, a été mise en place. Toutefois, son efficacité reste à
démontrer (voir également la section 3.1).
Face à la baisse des niveaux de compétences et au taux de chômage élevé des jeunes diplômés, le
gouvernement souhaite revoir en profondeur les systèmes d’enseignement général et d’EFP en
mettant en œuvre toute une batterie de réformes. L’objectif du Plan stratégique pour le secteur de
l’éducation 2016-2020 (ministère de l’éducation, 2016) est de renforcer la qualité grâce à
l’amélioration de la formation des enseignants, à la modernisation des programmes d’études et des
infrastructures ainsi qu’à la création d’un nouveau cadre pour les partenariats privés. Ces réformes
devraient permettre de relever les principaux défis aux niveaux élémentaire et secondaire, notamment
les taux élevés d’abandon scolaire, le manque d’infrastructures et la mauvaise qualité de
l’enseignement. Pour l’EFP, le MFPE, en collaboration avec les partenaires sociaux, a conçu une
ambitieuse Stratégie nationale de réforme de l’EFP 2016-2020, qui se décline en 14 grands projets
(voir section 2.5.2 pour plus de détails).
Les institutions publiques adhèrent à ces stratégies. Toutefois, malgré le soutien financier important
de l’UE et des autres bailleurs de fonds, la mise en place d’actions concrètes avance lentement. Les
changements fréquents des gouvernements et de leurs priorités politiques constituent de graves
obstacles qui empêchent l’administration tunisienne de faire progresser les réformes d’une manière
cohérente. En outre, il est possible que les nouveaux concepts et méthodologies, tout comme les
projets pilotes introduits par les bailleurs de fonds, aient mis à rude épreuve la capacité des
collectivités locales à soutenir et à intégrer les initiatives de réforme. La plupart des stratégies sont
proches de leur date d’expiration, ce qui offre une excellente occasion de mener des évaluations
approfondies et de redéfinir les priorités politiques de l’après-2020.
Au niveau de l’enseignement supérieur, le Plan stratégique de la réforme de l’enseignement supérieur
et de la recherche scientifique 2015-2025 (MESRS et CNR) établit cinq objectifs principaux: améliorer
la qualité de l’enseignement et l’employabilité des diplômés, promouvoir la recherche et l’innovation,
promouvoir la bonne gouvernance et optimiser la gestion des ressources, réviser la carte universitaire
pour un meilleur équilibre régional, et enfin, promouvoir la formation pédagogique des enseignants.
En outre, en mai 2019, le MFPE et les partenaires sociaux, en collaboration avec l’OIT, ont lancé des
discussions en vue d’une Nouvelle stratégie nationale pour l’emploi pour la période 2020-2030. Une
première analyse de fond avait été publiée au préalable (OIT, 2018a).
Les bailleurs de fonds apportent d’importantes contributions techniques et financières aux réformes.
Des consultations sont organisées dans le cadre de «tables de coordination» dans différents
domaines. Le MFPE a accru ses efforts de coordination des bailleurs de fonds en 2019, en dressant
la carte des programmes de soutien en cours. Pour les bailleurs de fonds, il pourrait être intéressant
8 Le gouvernement technocratique, qui était en cours de négociation au moment de la rédaction du rapport en
septembre 2020, ne prévoyait pas de MFPE, mais un secrétariat chargé de l’insertion professionnelle rattaché au
MJSIP. Toutefois, ce gouvernement ne devrait rester que provisoirement au pouvoir.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 23




Page 24
de passer de la coordination à la coopération, ou de passer de l’échange à l’intégration d’informations
sur leurs plans et leurs projets, par exemple par le biais de processus de programmation et de mise
en œuvre conjoints, dans le respect des priorités et des capacités politiques nationales. Les acteurs
locaux devraient rester aux commandes et identifier les prochaines étapes du processus de réforme
ainsi que les déficits de financement qui s'y rapportent.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 24





Page 25
2. DEVELOPPEMENT ET DEFIS DU CAPITAL
HUMAIN
2.1 Développements économiques
La Tunisie est un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. Le pays est engagé dans un
processus d’intégration dans l’économie mondiale, notamment au travers des accords d’association
avec l’Union européenne (UE), de l’Accord d’Agadir et des discussions menées avec l’Organisation
mondiale du commerce. Mais l’impact de ces initiatives sur l’économie du pays reste à ce jour faible.
Les disparités considérables entre régions, groupes d’âge et sexes pèsent sur le potentiel de
croissance économique et de création d’emplois du pays.
Balghouthi (2018) affirme que l’économie tunisienne souffre de dysfonctionnements structurels,
notamment les inégalités, la corruption, la désindustrialisation et la prédominance de secteurs à faible
valeur ajoutée, tels que l’exportation d’huile d’olive ou de phosphate. Le modèle de développement
économique, qui date des années 1980 et qui divise les entreprises en deux catégories (celles qui
exportent et celles qui vendent leurs produits sur le marché intérieur), n’a quasiment jamais été
réformé. Les accords-cadres régissant les conditions de travail des salariés n’ont pas été révisés
depuis plus de 20 ans. Les secteurs de l’industrie et de la fabrication, qui représentaient 22,7 %
du produit intérieur brut (PIB) en 2018, contre 29,8 % en 2011, sont en déclin. Si l’agriculture
représentait 10,4 % du PIB, les services sont désormais le premier contributeur à la croissance, avec
59,2 % en 2018 (Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde).
La très grande majorité des grandes entreprises demeurent aux mains de l’État et l’administration
publique est surdimensionnée. En dehors du secteur public, l’économie tunisienne se caractérise par
un niveau d’informalité élevé (voir également la section 2.3) et par un très grand nombre de micro,
petites et moyennes entreprises. Ces entreprises offrent des emplois peu ou pas du tout qualifiés et
ont une faible capacité de croissance et d’innovation. La création d’emplois reste atone, même en
période de croissance soutenue comme avant la crise de la COVID-19. Un environnement
macroéconomique favorable est une condition préalable essentielle à la création d’emplois.
Le PIB est passé de 1,0 % en 2019, à 2,5 % en 2018 (INS9 et Banque mondiale, Indicateurs du
développement dans le monde). Ce chiffre est bien inférieur aux 5 % prévus par le Plan national de
développement 2016-2020 (MDICI, 2017). Les prévisions étaient plus optimistes du côté de la Banque
centrale de Tunisie et du Fonds monétaire international (FMI), qui tablaient sur un taux de croissance
du PIB de 2,7 % en 2019 et de 3,2 % en 2020, misant sur la relance du secteur touristique comme
l’un des principaux moteurs de la croissance 10. Après la grave récession qui avait suivi l’attaque
terroriste de 2015, le secteur du tourisme s’était redressé avec 8,3 millions d’arrivées de touristes
en 2018 et près de 9 millions en 2019
11, soit une augmentation de 8 % par rapport à l’année
précédente. Au 10 septembre 2019, les recettes du tourisme s’élevaient à 1,3 milliard de dinars, soit
9 http://www.ins.tn/en/front
10 La Fédération tunisienne de l’hôtellerie a remis en question les statistiques nationales qui estiment la
contribution du secteur au PIB à 4,1 %. Une étude récente de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie chiffre ainsi
la contribution du tourisme à 13,8 %: https://www.jeuneafrique.com/790526/economie/tunisie-tourisme-les-
enjeux-derriere-la-bataille-des-chiffres/
11 https://tradingeconomics.com/tunisia/tourist-
arrivals#:~:text=Tourist%20Arrivals%20in%20Tunisia%20is,according%20to%20our%20econometric%20models.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 25




Page 26
46,6 % de plus que 12 mois auparavant12. Cependant, le confinement lié à la COVID-19 a annulé tous
les gains et ruiné la saison touristique de 2020.
L’économie tunisienne a été frappée très durement par l’épidémie de COVID-19. Les autorités ont pris
des mesures proactives pour contenir la propagation du virus en fermant les frontières de la Tunisie,
en isolant les personnes malades et en imposant un confinement de la population. Elles ont
également agi rapidement pour limiter l’impact social et économique de la pandémie sur les ménages
à faibles revenus et sur les petites et moyennes entreprises, grâce à une série de mesures
d’intervention d’urgence. Le secteur du tourisme, qui pèse lourd dans l’économie tunisienne, et les
exportateurs qui fournissent les industries automobiles et textiles européennes ont ressenti un fort
impact négatif. L’activité économique a enregistré une contraction sans précédent de 21,6 % au cours
du deuxième trimestre 2020 (INS)
13.
Ces tensions devraient s’aggraver au fur et à mesure que la crise se propage dans l’économie
nationale. Les transferts de fonds, qui proviennent principalement de France et d’Italie, ont contribué
de manière significative au PIB (à hauteur de 5,3 % en 2019) (Banque mondiale)
14. Aujourd’hui, les
envois de fonds des migrants diminuent en raison de la crise économique en Europe. Les ménages
sont obligés de puiser dans leurs économies et de réduire leur consommation. Les perspectives de
l’économie mondiale du Fonds monétaire international (FMI) d’octobre 2020 tablent sur une baisse du
PIB de 7 % en 2020, soit la pire récession depuis l’indépendance de la Tunisie en 1956 (TAP, 2020b).
Les données de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement sont plus
optimistes, tablant sur une contraction du PIB de l’ordre de 2,5 % (BERD, 2020). En juillet 2020,
l’inflation était en hausse de 5,7 % par rapport à l’année précédente (INS)
15. Le chômage devrait
poursuivre sa hausse, les revenus diminuer, et les prix des importations augmenter. De nombreuses
entreprises sont confrontées à un manque de liquidités en raison des fermetures temporaires et de la
baisse des recettes tirées de la consommation et des exportations (FMI, 2020).
Une enquête menée en avril 2020 par l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE) auprès de
600 entreprises a révélé que 47 % des entreprises avaient dû cesser leurs activités en raison de la
pandémie. Le commerce et le secteur de la construction ont été particulièrement touchés. Les PME
ont, elles aussi, été frappées, 46 % d’entre elles déclarant avoir réduit leurs effectifs (contre 17 % des
grandes entreprises) (IACE, 2020b). Une enquête de mars 2020 a révélé que 96 % des entreprises
interrogées estimaient que la baisse de leurs recettes entraînerait des difficultés fiscales, une
réduction du temps de travail des salariés ou des licenciements, le report d’investissements ou même
la fermeture de l’entreprise (IACE, 2020a). Les premières données semblent indiquer que les
entreprises situées dans le sud du pays ont été plus touchées qu’ailleurs (CEED, 2020).
Dans l’indice de facilité de faire des affaires 16, qui mesure le climat des affaires dans 190 pays, la
Tunisie est passée de la 88
e place en 2018 à la 80e position en 2019. Elle est cependant encore loin
de la 36
e place qu’elle occupait en 2008, ce qui laisse penser que d’autres pays ont progressé
beaucoup plus rapidement que la Tunisie. Les légères améliorations enregistrées dans ce classement
sont à mettre au crédit des efforts consentis par la Tunisie pour:
12 http://tourisminfo.com.tn/2019/09/19/augmentation-des-recettes-de-466/
13 http://www.ins.tn/en/front
14 http://www.worldbank.org/en/topic/migrationremittancesdiasporaissues/brief/migration-remittances-data
15 ibid.
16 http://www.doingbusiness.org/en/rankings
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 26




Page 27




faciliter la création d’entreprises en mettant en place un guichet d’enregistrement unique;
faciliter l’enregistrement des biens fonciers;
réduire les impôts en mettant fin à l’impôt exceptionnel sur le revenu des sociétés imposé aux
entreprises en 2016, et
renforcer la protection des investisseurs minoritaires
17.
Toutefois, la dernière évaluation des performances de la Tunisie par rapport à l’indice de politique des
PME
18 conclut que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour améliorer le climat des affaires
pour les PME (OCDE, Commission européenne et ETF, 2018). Selon l’indice de compétitivité
mondiale 2019
19, l’inefficacité de la bureaucratie, l’instabilité politique et la corruption sont trois
facteurs majeurs qui ont un impact négatif sur l’activité économique. Dans cet indice, la Tunisie est
classée 87
e sur 140 pays, soit une place de moins qu’en 2017 et très loin de la 40e place obtenue
en 2011 (WEF, 2018). En outre, le pays s’est classé 73
e sur 180 au classement de l’indice de
perception de la corruption 2018 publié par Transparency International
20, soit une place de plus
qu’en 2017.
Le Plan national de développement 2016-2020 (MDICI, 2017) considère les grands travaux
d’infrastructure et les investissements dans l’innovation et les technologies comme autant de vecteurs
de croissance. Le succès de ce plan dépend de la capacité du pays à attirer les investissements, dont
la valeur est estimée à 50 milliards d’euros. Le plan vise à générer 400 000 emplois, notamment pour
les travailleurs hautement qualifiés, ce qui représente une opportunité pour l’EFP et l’enseignement
supérieur
21. Une enquête récente indique que le secteur des technologies de l’information et de la
communication (TIC) présente un certain potentiel de croissance et d’attraction des investissements
étrangers, suivi des secteurs de l’énergie et de l’exploitation minière, de l’industrie et du tourisme
(Oxford Business Group, 2019).
Depuis le mois d’avril 2016, l’UE et la Tunisie négocient les termes d’une zone de libre-échange
approfondie et complète. Un quatrième cycle de négociations a eu lieu en mai 2019. Les discussions
ont porté sur un large éventail de sujets, de l’agriculture aux services en passant par le
développement durable. L’objectif général est de mieux intégrer l’économie tunisienne dans le marché
unique de l’UE et de créer de nouvelles opportunités d’échanges commerciaux et d’investissement, ce
qui devrait contribuer à la reprise économique du pays. En outre, la Tunisie poursuit son intégration
dans les marchés internationaux en participant à des réseaux régionaux arabes et africains.
2.2 Évolution et prévisions démographiques
La Tunisie compte une population de 11,84 millions d’habitants (estimation de septembre 2020), avec
un âge médian de 32,8 ans (données de l’ONU sur la population). La population continue de croître à
un rythme annuel de 1,06 %, soit moins que le taux de croissance démographique des pays voisins
d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. En 2018, la part des jeunes de moins de 15 ans était de 25 %,
tandis que les 15-24 ans représentaient près de 14 % de la population totale. La dernière décennie a
17https://www.doingbusiness.org/en/reforms/overview/economy/tunisia
https://www.doingbusiness.org/en/reforms/overview/economy/tunisia
18 voir: https://www.oecd-ilibrary.org/development/sme-policy-index_24136883
19 https://countryeconomy.com/government/global-competitiveness-index/tunisia
20 https://www.transparency.org/country/TUN
21 https://www.tia.gov.tn/opportunites-investissement
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 27




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vu un recul de la part des jeunes dans la population. En 2008, les jeunes de moins de 15 ans
représentaient ainsi 24,3 % de la population tunisienne et les 15-24 ans 20 % (Eurostat, 2020, p. 19).
La pénurie d’emplois et la pauvreté se sont traduites par des niveaux de migration interne et externe
considérables. La Tunisie est traditionnellement un pays d’émigration puisque près de 6 % de sa
population vit à l’étranger, principalement en Europe (83 %). Au cours des huit mois compris entre
janvier et août 2020, environ 6 500 Tunisiens ont émigré vers la seule Italie
22. Ces dernières années,
la Tunisie est également devenue une destination d’immigration, en particulier pour les Libyens, et un
pays de passage pour les migrants et les réfugiés subsahariens qui tentent de rallier la destination
tant convoitée: l’Europe. Toutefois, les pays de l’UE ayant imposé des règles d’immigration plus
strictes, les migrants se retrouvent souvent bloqués en Tunisie (voir par exemple Afrikyes, 2020).
Malgré l’absence de chiffres exacts sur les migrants, selon les estimations du ministère tunisien du
commerce, le pays accueillerait, au total, près de 1 million de réfugiés, soit 10 % de la population
tunisienne. D’autres sources citent des chiffres plus élevés, proches de 1,8 million de réfugiés
(Karasapan, 2015).
Après la signature d’un accord de partenariat pour la mobilité avec l’Union européenne en mars 2014,
la Tunisie a mis au point une Stratégie nationale migratoire afin de traiter les questions liées à la
migration dans leur globalité. La mise en œuvre de cette stratégie est soutenue par le projet ProGreS,
financé par l’UE (budget: 12,5 millions d’euros, lancé en mars 2019). En plus de soutenir la mise en
œuvre de la stratégie migratoire, ce projet entend stimuler la création d’emplois et les investissements
en mobilisant la diaspora tunisienne, en contribuant à la réintégration des migrants tunisiens de retour
en Tunisie grâce à l’incubation d’entreprises, et en soutenant la gestion locale de la migration.
L’évaluation des compétences et la reconnaissance des diplômes des émigrants et des immigrants
sont censées faciliter l’accès au marché du travail. En outre, ces questions sont abordées par de
nombreux autres projets nationaux et régionaux financés par des bailleurs de fonds.
2.3 Évolutions du marché du travail
2.3.1 Tendances et défis
Le marché du travail tunisien se caractérise par un taux de population active très faible, qui baisse
légèrement chaque année: 51,3 % en 2019 contre 52,5 % en 2015 pour la tranche d’âge 15-64 ans
(Eurostat, 2020, p. 38); pour la population de 15 ans et plus, ce taux était de 46,9 % en 2019, contre
47,1 % en 2015 (INS, voir tableau 1). Dans le même temps, la population active compte une part
croissante de personnes possédant un diplôme de l’enseignement supérieur, en particulier chez les
femmes (voir tableau 2). Le taux d’emploi des 15 ans et plus est faible, à 39,7 % en 2019 (INS), les
femmes ayant généralement moins de possibilités d’emploi que les hommes (voir graphique 1). Les
emplois du secteur public sont rares et le secteur privé ne crée pas suffisamment d’emplois pour
absorber le nombre croissant de jeunes diplômés entrant sur le marché du travail. La croissance sans
emploi s’est soldée par un déficit annuel d’environ 19 000 emplois entre 2011 et 2017 (OIT, 2018a).
Depuis 2011, le nombre de demandeurs d’emploi stagne autour de 600 000.
Avec la poursuite de la désindustrialisation, la structure de l’emploi en Tunisie a opéré un
déplacement vers le secteur des services. En 2019, ce secteur concentrait la majorité des emplois
(54 %), suivi de l’industrie (33 %) et de l’agriculture (13 %) (estimations de l’OIT). Il existe également
22https://www.repubblica.it/cronaca/2020/08/17/news/immigrazione_lamorgese_e_di_maio_in_tunisia_con_loro_a
nche_l_ue-264809620/
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Page 29
de très grandes différences régionales. Le principal bassin d’emplois se trouve dans la capitale
(Tunis) et dans les zones côtières, au détriment des régions intérieures.
Défi nº 1: Les taux d’activité et d’emploi, notamment des femmes et des jeunes, sont faibles
malgré l’augmentation des niveaux d’éducation
Malgré l’augmentation du niveau d’éducation des femmes, leur participation au marché du travail reste
l’une des plus faibles au monde, même si l’on constate une légère amélioration du taux d’activité au fil
des ans (tableau 1). En 2019, un peu plus de 26,6 % des femmes étaient économiquement actives,
contre 68 % des hommes. Le taux d’activité total (pour les personnes âgées de 15 ans et plus)
s’élevait à 46,9 % la même année (INS).
TABLEAU 1: TAUX D’ACTIVITE PAR SEXE (% DES 15 ANS ET PLUS)
1990
1995
2000
2005
2010
2015
2016
2017
2018
2019
Total
45,5
45,6
45,9
46,2
46,5
47,1
47,2
47,0
47,0
46,9
Hommes
Femmes
67,9
23,6
67,3
67,7
24,4
24,5
68,0
24,7
68,7
24,8
68,8
68,5
68,3
68,3
68,0
26,0
26,6
26,5
26,6
26,6
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Comprendre les causes de l’inactivité féminine peut contribuer à l’élaboration de politiques adaptées.
Les normes et les traditions culturelles jouent un rôle important qui pourrait être atténué par une
campagne de discrimination positive. Le faible taux d’activité de la femme peut aussi être la cause des
bas salaires perçues par les femmes surtout non diplômées et les prix trop chers des garderies et des
crèches par rapport au niveau de vie. Parmi les autres contraintes, on peut citer le manque de
possibilités d’emploi, le manque de moyens de transport sûrs pour se rendre sur le lieu de travail, les
préoccupations générales en matière de sécurité, les mauvaises conditions d’emploi et l’absence de
réglementation concernant le congé de maternité et les crèches/garderies d’enfants (Boughzala,
2019). Le traitement de ces questions permettrait d’améliorer l’intégration des femmes sur le marché
du travail.

Néanmoins, de nouvelles tendances se font jour: les jeunes femmes sont désormais plus présentes
sur le marché du travail que leurs homologues plus âgées, avec un taux d’activité de 60,4 % pour la
tranche d’âge 25-29 ans, contre 36,4 % pour les 35-39 ans (Boughzala, 2019). De plus, la part des
femmes sur le marché du travail augmente en fonction du niveau d’éducation (tableau 2). Il est
important que ces tendances se consolident et que l’augmentation des taux d’activité féminins se
traduise par plus d’emplois et par moins de chômage pour les femmes.
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TABLEAU 2: POPULATION ACTIVE PAR NIVEAU D’EDUCATION ET PAR SEXE, 2016-2017
Analphabètes
Élémentaire
Secondaire
Supérieur
Total1
2016
Total
Hommes
Femmes
2017
Total
Hommes
Femmes
7,8 %
7,5 %
8,6 %
7,7 %
7,2 %
8,9 %
33,4 %
38,3 %
21,1 %
32,7 %
37,5 %
20,9 %
37,4 %
39,4 %
32,3 %
37,5 %
40,4 %
30,0 %
21,1 %
14,5 %
37,7 %
22,1 %
14,8 %
40,1 %
100 %
100 %
100 %
100 %
100 %
100 %
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Note
1: la somme des totaux peut ne pas atteindre exactement 100 % car les chiffres sont arrondis.
Le taux d’emploi global en Tunisie reste également à un niveau relativement faible. En 2019, seuls
39,7 % de la population totale étaient employés. Les femmes ont généralement moins de possibilités
d’emploi que les hommes, avec 20,6 % de femmes (15+) employées en 2019 (INS), même si ce taux
est de 30 % pour la tranche d’âge 25-49 ans (INS, 2019), ce qui semble indiquer que les hommes
entrent dans la vie active plus tôt et qu’ils y restent plus longtemps. Les jeunes sont particulièrement
vulnérables à l’exclusion du marché du travail, seul un jeune sur cinq étant employé (INS, 2019).
Outre les problèmes liés à la demande, cette situation est due à l’inadéquation entre les compétences
et les qualifications des jeunes et les compétences requises par le marché du travail, sans compter le
manque d’expérience professionnelle. Là aussi, on constate une forte inégalité entre les sexes. Les
jeunes femmes (15-24 ans) ont ainsi beaucoup plus de difficultés à trouver un emploi que leurs
homologues masculins (seuls 13,3 % des femmes avaient un emploi en2019) (INS).
GRAPHIQUE 1: TAUX D’EMPLOI (%) PAR AGE ET PAR SEXE, 2019
)
%
(
59.6
i
l

o
p
m
e
d
x
u
a
T
39.7
19.4
25.4
20.6
13.3
15+
Jeunes (15-24)
15+
Jeunes (15-24)
15+
Jeunes (15-24)
Population totale
Hommes
Femmes
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 30






Page 31
Défi nº 2: De nombreuses personnes occupent des emplois précaires, sans salaire décent ni
protection sociale
Des emplois sont créés dans l’agriculture, l’industrie manufacturière, la construction et les secteurs
des services, tels que le tourisme et le commerce. Cependant, beaucoup de ces emplois relèvent du
travail informel et/ou non décent
23. L’OIT estime que 20 % des Tunisiens salariés occupaient un
emploi vulnérable en 2019, dont 17 % de personnes travaillant à leur compte (c’est-à-dire des
travailleurs indépendants) et 3 % de travailleurs familiaux. Cette précarité touche également les
femmes, qui travaillent le plus souvent dans l’agriculture, l’industrie textile ou le commerce.
L’informalité est très répandue. Selon Medina et Schneider (2018), le secteur informel représentait
30,9 % du PIB en 2015, l’informalité étant souvent liée à la taille des entreprises. On estime que
l’emploi informel, qui concerne davantage les hommes et les jeunes, représente près des deux tiers
de tous les emplois. Dans l’ensemble, 84 % des emplois occupés par des jeunes de 15 à 19 ans, et
42 % de ceux occupés par des jeunes de 20 à 24 ans, étaient informels (OIT, 2018b, à partir de
données de 2014). Ces emplois, qui sont souvent peu qualifiés, se caractérisent par de mauvaises
conditions de travail, par de faibles rémunérations et par un manque de protection sociale, ce qui
entraîne, à terme, une dégradation du capital humain.
Défi nº 3: Le chômage touche particulièrement les jeunes, et plus singulièrement les femmes et
les personnes instruites, ce qui met en évidence des inefficacités dans le développement et
l’utilisation du capital humain
Malgré de légères améliorations au cours des récentes années, le chômage représente une difficulté
persistante en Tunisie. 15,3 % en 2019 contre 18,3 % en 2011 (INS). Les progrès les plus importants
ont été enregistrés dans le domaine du chômage des jeunes (15-24 ans), qui est passé de 42,3 % en
2011 à 34,4 % en 2019. Cependant, le chômage continue de toucher de façon disproportionnée les
jeunes et les femmes (graphique 2).
GRAPHIQUE 2: TAUX DE CHOMAGE (%) PAR AGE ET PAR SEXE, 2010-2019
Total
Hommes
Femmes
Youths 15-24
)
%
(
e
g
a
m
ô
h
c
e
d
x
u
a
T
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Le chômage touche également les personnes ayant un niveau d’éducation moyen et, plus encore, les
personnes hautement qualifiées, en particulier les femmes (graphique 3). Compte tenu du faible
23 Les lecteurs sont renvoyés à la discussion de l’OIT sur la définition du travail décent:
https://www.ilo.org/global/topics/decent-work/lang--en/index.htm
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 31








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niveau technologique de la plupart des MPME, les employeurs préfèrent encore embaucher de la
main-d’œuvre semi-qualifiée ou non qualifiée et payer de faibles rémunérations.
GRAPHIQUE 3: TAUX DE CHOMAGE (% DES 15 ANS ET PLUS) SELON LE NIVEAU
D’EDUCATION ET PAR SEXE, 2019
36.7%
u
a
e
v
n
i
r
a
p
e
g
a
m
ô
h
c
e
d
x
u
a
T
)
%
(
n
o
i
t
c
u
r
t
s
n
i

d
26.9%
16.1%
15.9%
16.2%
16.5%
9.9%
10.1%
9.4%
Faible
Moyen
Élevé
Faible
Moyen
Élevé
Faible
Moyen
Élevé
Population totale
Hommes
Femmes
Source: base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
En 2019, 36,7 % des femmes très qualifiées étaient à la recherche d’un emploi, contre seulement
16,2 % de leurs homologues masculins, mais des améliorations significatives ont été enregistrées
depuis le pic atteint à cet égard en 2012 (graphique 4). Le chômage qui touche de nombreux diplômés
universitaires est particulièrement préoccupant, dans la mesure où cela semble indiquer un problème
avec le type d’études suivies ainsi qu’un faible retour sur l’investissement public et privé dans la
formation du capital humain.
GRAPHIQUE 4: TAUX DE CHOMAGE DES DIPLOMES DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR (%
DES 15 ANS ET PLUS) PAR SEXE, 2006-2019
Diplômés - Total
Hommes diplômés
Femmes diplômées
50
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
)
%
(
l
i
s
é
m
ô
p
d
s
e
d
e
g
a
m
ô
h
c
e
d
x
u
a
T
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Le niveau de chômage varie fortement selon les régions. Le centre-est du pays affichent le taux de
chômage le plus faible (9,9 %) et le sud-ouest le taux le plus élevé (26,2 %) (ETF, 2017; OIT,
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 32
















Page 33
2018a24). Les facteurs géographiques déterminent également les disparités entre les sexes. Ainsi, si
les différences entre les jeunes femmes et les jeunes hommes sont peu visibles dans les zones
urbaines dynamiques, elles sont beaucoup plus fortes dans les zones rurales moins dynamiques. Les
jeunes femmes qui vivent dans le nord ou dans les régions centrales ou intérieures du pays sont plus
exposées au risque de chômage, tandis que celles vivant dans les régions méridionales sont souvent
totalement exclues du marché du travail (Mansuy et Werquin, 2015).
Défi nº 4: Les jeunes vivent une transition difficile entre l’école et le travail et un jeune sur trois
ne travaille pas, ne suit pas d’études ou de formation (NEET)
Les jeunes Tunisiens font généralement l’expérience d’une transition difficile entre l’éducation et le
travail. En 2019, seuls 32,2 % des jeunes diplômés (15-24 ans) avaient trouvé un emploi trois ans
après l’obtention de leur diplôme (INS, 2019). De nombreux primo-demandeurs d’emploi sont
confrontés au chômage pendant plusieurs mois, voire plusieurs années. La faiblesse du tissu
économique, les disparités territoriales, le manque de compétences élémentaires et techniques des
jeunes, ainsi que la faiblesse des services de recrutement et d’information en matière d’emploi, sont
autant de facteurs qui compliquent l’intégration des jeunes sur le marché du travail. Une transition
lente et difficile vers le marché du travail peut avoir un impact négatif durable sur le parcours
professionnel, les compétences et les futurs revenus des jeunes.
Des études de suivi montrent cependant que les jeunes diplômés de centres d’EFP bénéficient de
meilleures perspectives d’emploi. Parmi les diplômés de 2012 deux tiers des personnes interrogées
sont en emploi quatre ans après l’obtention de leurs diplômes, tandis que 29,7 % de tous les diplômés
de l’EFP étaient au chômage, avec des différences significatives entre les hommes et les femmes.
Dans l’ensemble, 45,5 % des femmes diplômées étaient au chômage, contre 21,7 % de leurs
homologues masculins (ONEQ, 2017). Au troisième trimestre de 2018, seuls 22,1 % des diplômés de
l’EFP interrogés se déclaraient au chômage (ONEQ, 2020).
Le graphique 5 résume la situation des jeunes (15-24 ans) sur le marché du travail. Fait inquiétant:
en 2019, un tiers des jeunes âgés de 15 à 24 ans et n’ayant pas terminé leurs études secondaires
(soit 32 % au total; taux masculin: 31,0 %; taux féminin: 33,0 %, INS) ne travaillaient pas et ne
suivaient pas d’études ou de formation (NEET). En 2019, 79,6 % des femmes âgées de 15 à 24 ans
et 61,4 % des hommes étaient inactifs (total: 70,5 %). Seuls 29,0 % des femmes récemment
diplômées et 37,2 % des hommes diplômés avaient un emploi (total: 32,2 %). Un jeune sur trois (soit
34,4 %) est au chômage (taux féminin: 34,5 %) (toutes les données concernent le groupe d’âge 15-
24 ans; INS, 2019).
24 Données de l’INS pour 2016 citées par l’ETF (2017), mais en grande partie confirmées par les données de
l’INS pour le deuxième trimestre de 2017 utilisées par l’OIT (2018).
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 33






Page 34
GRAPHIQUE 5: TRANSITION DES JEUNES (% DES 15-24 ANS), 2019
Jeunes (total)
Jeunes (hommes)
Jeunes (femmes)
)
%
(
s
e
n
u
e
j
s
e
d
n
o
i
t
i
s
n
a
r
T
80.0
70.0
60.0
50.0
40.0
30.0
20.0
10.0
0.0
Jeunes en
décrochage
scolaire
NEET
Taux d’activité En dehors de la
population
active
Taux d’emploi
des récents
diplômés
Taux d’emploi
Taux de
chômage
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Note: Jeunes en décrochage scolaire (en % des 18-24 ans). Taux d’emploi des jeunes récemment diplômés (en
% des 20-34 ans) ayant atteint les niveaux 3 à 8 de la Classification internationale type de l’éducation (CITE).
Les données sur les tendances ne montrent pas d’améliorations significatives du taux total de NEET.
Ce taux est traditionnellement plus élevé chez les femmes, ce qui peut être attribué au manque de
possibilités d’éducation et d’emploi adaptées et sûres, mais aussi aux normes et aux traditions
culturelles, aux obligations familiales et à d’autres raisons. Toutefois, le graphique 6 montre que,
en 2019, les femmes ont considérablement réduit l’écart avec les hommes, le taux de NEET féminin
s’étant amélioré de 5,1 points de pourcentage par rapport à l’année précédente.
GRAPHIQUE 6: JEUNES NEET (% DES 15 A 24 ANS), 2010-2019
Total
Hommes
Femmes
)
%
(
T
E
E
N
e
d
x
u
a
T
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Défi nº 5: L’inadéquation des compétences témoigne d’une utilisation inefficace du capital
humain
L'inadéquation des compétences de la main-d’œuvre est étroitement liée à la situation décrite plus
haut. Le fort taux de chômage coexiste avec un nombre élevé d’emplois vacants non pourvus, comme
l’ont montré plusieurs études (par exemple, ITCEQ, 2018). Trois entreprises sur quatre ont fait état de
difficultés à trouver des candidats suffisamment qualifiés pour pourvoir les emplois vacants (ITCEQ,
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 34











Page 35
2018). Les employeurs sont à la recherche de travailleurs qualifiés et de techniciens spécialisés,
notamment dans les secteurs du textile, de l’hôtellerie et de la restauration et des TIC. Les profils
moyennement et hautement qualifiés sont également particulièrement touchés par le phénomène de
«fuite des cerveaux» (migration des personnes à haut niveau de qualification).
Une offre excédentaire de diplômés universitaires peut laisser supposer un réel problème de
surqualification, les jeunes très qualifiés pouvant être contraints d’accepter des postes nécessitant
moins d’études. Toutefois, il n’existe pas de preuve convaincante d’une telle surqualification. Une
enquête sur la transition entre l’école et le travail a demandé à des jeunes s’ils s’estimaient
surqualifiés: 75 % ont répondu que leur éducation ou leur formation était utile ou appropriée pour
exercer leur emploi actuel, tandis que 28 % seulement jugeaient qu’ils étaient surqualifiés. En outre,
5 % ont mentionné des lacunes en matière de connaissances et de compétences (OCDE, 2015b). Un
autre rapport (OIT, 2016) a révélé que 16,1 % des jeunes étaient surqualifiés pour les emplois qu’ils
occupaient. La qualité de l’éducation et le fait que les compétences réelles des jeunes ne reflètent pas
leur niveau d’éducation de manière adéquate pourraient expliquer cette situation.
Par ailleurs, un tiers des jeunes interrogés par l’OIT (2016) étaient sous-qualifiés pour leur emploi
(33,3 %), ce qui soulève des questions sur la productivité du travail et sur la qualité des produits et
services proposés.
L’inadéquation entre les compétences des travailleurs et celles recherchées sur le marché du travail
tunisien, dans ses multiples dimensions, continue de peser sur le développement économique et
empêche une utilisation plus efficace du capital humain. Les jeunes titulaires d’un diplôme de
l’enseignement supérieur cherchent à obtenir un emploi sûr et mieux rémunéré dans le secteur public.
En 2016, pas moins de 650 000 personnes étaient employées dans le secteur public, soit 24 % de la
population active totale (FMI). Aujourd’hui, ces espoirs s’évanouissent car la capacité du secteur
public à absorber de nouvelles personnes atteint ses limites (MDICI et PNUD, 2017).
Un certain nombre d’initiatives ont été lancées pour favoriser l’emploi des jeunes diplômés. Il s’agit
notamment du plan Tunisie digitale 2020, qui vise à développer les infrastructures de TIC et les
services liés aux TIC dans tout le pays. Une étude de l’Institut tunisien de la compétitivité et des
études quantitatives (ITCEQ) soutient que les secteurs à plus forte intensité de connaissances sont
l’industrie pharmaceutique, les activités financières, les télécommunications, l’informatique, l’industrie
du papier et du carton, les industries mécaniques et électriques, l’industrie chimique ainsi que la santé
et les services aux entreprises. La part de ces secteurs dans les activités à valeur ajoutée ne cesse
d’augmenter depuis quelques années, atteignant jusqu’à 17 % en 2012 (OIT, 2018a).
Le ralentissement spectaculaire provoqué par la pandémie de COVID-19 devrait encore aggraver les
difficultés auxquelles sont confrontés l’économie et le marché du travail tunisiens. Afin de contenir le
budget de l’État, le gouvernement tunisien a annoncé un gel des recrutements dans le secteur public,
à l’exception de certaines professions prioritaires (TAP, 2020a). Le PNUD (2020) estime que la
récession pourrait mettre en péril jusqu’à 275 000 emplois dans les micro et petites entreprises, tandis
que le chômage pourrait atteindre 21,6 %. Au deuxième trimestre 2020, le taux de chômage s’élevait
à 18 % (INS)
25. Les Tunisiens, en particulier dans les régions défavorisées, pourraient renoncer à
chercher un emploi et s’éloigner encore plus du marché du travail, ce qui pourrait déboucher sur une
sous-utilisation accrue du capital humain existant. En outre, avec 470 000 personnes susceptibles de
25 http://www.ins.tn/en/themes/emploi#1909
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 35




Page 36
tomber sous le seuil de pauvreté et un taux de pauvreté de 19 %, selon les estimations les plus
prudentes, la Tunisie pourrait être propulsée 15 ans en arrière en matière de développement (PNUD,
2020).
2.3.2 Politique de l’emploi et service public de l’emploi
Le MFPE est en charge des stratégies et des politiques pour l’emploi. En décembre 2012, il a adopté
la Stratégie nationale pour l’emploi 2013-2017, qui n’a été mise en œuvre que dans une mesure
limitée. Les discussions ont repris en 2017 et une étude de fond analytique a été publiée en 2018, afin
de contribuer à l’élaboration d’une nouvelle stratégie pour l’emploi (OIT, 2018a). En mai 2019, le
MFPE et les départements compétents d’autres ministères, en collaboration avec la principale
organisation patronale (la Confédération tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat) et la
fédération des syndicats (l’Union générale tunisienne du travail) ont entamé, avec l’aide de l’OIT, la
rédaction de la nouvelle stratégie pour l’emploi couvrant la période 2020-2030. La nouvelle stratégie
se concentrera sur trois axes principaux: i) la création d’emplois, ii) l’employabilité et l’offre de
compétences, et iii) la gouvernance du marché du travail. Au moment de la rédaction de ce rapport, la
version finale de la stratégie était en cours de consultation avec les partenaires sociaux. Il reste à voir
si les deux départements de l’emploi et de l’EFP du MFPE vont réussir à collaborer et à intégrer les
objectifs et les mesures de la nouvelle stratégie pour l’emploi dans ceux de la stratégie d’EFP.
En mars 2021, le Ministère chargé de l'emploi (MJSIP) et les départements compétents d’autres
ministères, en collaboration avec l'organisation patronale et la fédération des syndicats, de l’OIT, ont
achevé la rédaction de la Stratégie nationale de l’emploi à l’international et de la protection des droits
des travailleurs migrants (SNEI), qui s’intègre à la Stratégie Nationale de l’Emploi (SNE), et s’articule
avec son plan opérationnel. La SNEI fournira également un cadre de référence et d’orientation à
l’ensemble des autres politiques publiques et stratégies nationales concernées par la question de
l’emploi à l’international et la protection des travailleurs migrants.
Ce nouveau prisme place le secteur de l’emploi à l’international non seulement comme un
complément du dispositif de régulation du marché du travail national, mais de l’envisager par rapport
aux évolutions futures des dynamiques économiques, des emplois et des formations.
La SNEI puise également dans les opportunités qu’offre l’adhésion de la Tunisie dans des cadres de
coopération internationale visant à promouvoir des voies de migration sûres, ordonnées et régulières
(PMM) et où l’emploi décent, la réduction des inégalités entre les travailleurs, et l’équité en matière de
recrutement constituent les principales cibles que la communauté internationale est amenée à
privilégier.
Les objectifs assignés à cette stratégie portent sur (i) l’adoption d’une logique globale de coopération
internationale en matière de migration portée par une vision claire et coordonnée couvrant toutes les
formes, voies et secteurs associés à la migration de travail et respectant les engagements régionaux
et internationaux de la Tunisie et des normes internationales du travail. (ii) la traduction de l’adhésion
de la Tunisie aux regroupements régionaux ainsi que ses orientations et partenariats économiques
internationaux. (iii) la mise à la disposition du système productif des compétences nationales et
internationales nécessaires au développement du pays, tout en leur garantissant les conditions de
leur épanouissement professionnel, économique et social. (iv) la disposition d’un système de
formation, initiale et continue, adapté aux besoins du marché du travail national et international, ouvert
aux différentes phases du processus migratoire et en harmonie avec les standards internationaux. (v)
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 36



Page 37
le renforcement de la sécurisation des voies d’une migration de travail organisée, existante et
potentielle dans les deux sens, et lutter contre la migration irrégulière.
La SNEI s’articule autour des 05 axes suivants :
Axe 1 : Une gouvernance efficace du marché du travail à l’international,
Axe 2 : Un système d’information et de veille intégrant les impératifs évolutifs du marché du travail
national et international, ainsi que ceux d’une coopération internationale, permettant une gestion
optimale de l’emploi à l’international,
Axe 3 : Un système de formation structurant un capital humain, adapté aux besoins du marché du
travail international et aux différentes phases du processus migratoire,
Axe 4 : Un système d’intermédiation et de placement à l’international efficace,
Axe 5 : Une SNEI au service du développement économique et social du pays.
Avec la création du Conseil national du dialogue social, en novembre 2018, le dialogue tripartite a été
institutionnalisé, comme cela était prévu dans le Contrat social conclu en 2013 entre l’État, la
Confédération tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat, l’Union générale tunisienne du
travail et l’Union de l’agriculture et de la pêche. Cependant, les partenaires sociaux ne peuvent pas
encore agir sur un pied d’égalité avec le gouvernement. Souvent, ils n’interviennent qu’après que les
décisions concernant les budgets ou les politiques du travail ou de l’EFP ont été prises.
En tant qu’agence exécutive du MFPE, l’Agence nationale pour l’emploi et le travail indépendant
(ANETI) est l’organe chargé de la mise en œuvre des politiques publiques de l’emploi. La mission de
l’ANETI est assez large puisqu’elle va de la gestion des politiques actives du marché du travail
(PAMT) au soutien du travail indépendant et de l’entrepreneuriat. Mais malgré l’ampleur de son
mandat, les ressources affectées à l’ANETI sont très limitées, ce qui l’empêche de mener à bien son
rôle de service public de l’emploi pleinement opérationnel.
La Tunisie mène traditionnellement une politique de PAMT qui peuvent être classées en quatre
catégories principales:
1.
formation;
2. subventions à l’emploi;
3. aide à la transition de l’école au travail et du travail à l’emploi; et
4. soutien à l’entrepreneuriat.
Dans le cadre des réformes des programmes actifs d’emploi afin de réduire et unifier certains
programmes d’aides à l’emploi, un nouveau décret a apparu pour annuler et remplacer le décret N°
2369 du 16 octobre 2012 et ce sous le N° 542 du 28 mai 2019 fixant les programmes du fonds
national de l'emploi, les conditions et les modalités de leur bénéfice suivants:
Trois programmes destinés à toutes les catégories des chercheurs d’emploi sont mis à la
disposition des entreprises et des associations leur permettant le bénéfice d’un certain nombre
d'avantages à savoir le :
CIVP initiation contract to professional life,
Karama « DIGNITE » contract
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 37



Page 38
Civil Service contract
Un programme pour la promotion de l’entrepreneuriat,
Un programme d’accompagnement pour les chercheurs d’emploi « Forsati »,
Un programme de formation et d’adaptation pour répondre aux besoins des entreprises des
qualifications et compétences non disponible.
Entre 2012 et 2017, le nombre de bénéficiaires des programmes de l’ANETI a bondi de 44 % pour
atteindre 182 000 en 2017. Le programme Forsati a pris fin début 2018 et a été relancé en 2019, non
sans débat
26.
Malgré l’absence d’un système de suivi et d’évaluation systématique, il est généralement admis que
les PAMT ont eu un certain impact positif en Tunisie, en particulier pour les jeunes. Les PAMT ont en
effet offert des opportunités aux primo-demandeurs d’emploi et aux jeunes souhaitant créer une
entreprise. Cependant, il est également reconnu que les résultats en matière de stages et
d’amélioration de l’employabilité des bénéficiaires auraient pu être meilleurs au regard des
investissements publics considérables réalisés (OIT, 2018a).
Les principales lacunes des PAMT en Tunisie concernent à la fois le public ciblé et la répartition
géographique des programmes. En effet, les PAMT s’adressent principalement aux diplômés de
l’enseignement supérieur, alors que seuls quelques programmes et services viennent en aide aux
personnes peu qualifiées ou défavorisées. De plus, les programmes sont plus facilement accessibles
à Tunis et dans les régions côtières ou le tissu economique est plus developpé. Les régions
intérieures sont moins bien desservies et le tissu economique mois developpé de sorte que le nombre
de bénéficiaires des PAMT parmi les chômeurs de longue durée et les personnes peu qualifiées reste
faible. L’absence d’une assurance chômage entraîne aussi un fort déséquilibre. Les ressources ont
été de facto réparties de manière inégale entre les différents groupes (par exemple, les femmes
titulaires d’un diplôme de l’enseignement secondaire ou supérieur par rapport aux femmes sans
qualifications formelles) et les différentes régions, ce qui aggrave les dichotomies existantes. En outre,
les mesures spécifiques de soutien à l’esprit d’entreprise et aux jeunes pousses se sont révélées
coûteuses et peu efficaces. Ces mesures ont profité à 3 % des jeunes chômeurs, mais seuls 1 %
d’entre eux ont réussi à concrétiser leurs idées de projets (ETF, 2019a).
2.4 Éducation: Budget, accès, participation et qualité
Le développement du capital humain et l’égalité entre les hommes et les femmes sont deux thèmes
qui ont traditionnellement figuré au premier plan des préoccupations du gouvernement tunisien.
Comme avant la révolution, les dépenses publiques d’éducation restent à des niveaux élevés, avec
6,1 % du PIB en 2017 (INS27) et 21,1 % des dépenses publiques totales (Institut de statistique de
l’UNESCO – ISU). Ces chiffres sont supérieurs à la moyenne de l’UE et de l’Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE).
Le système tunisien d’éducation, y compris l’EFP, est majoritairement public et prévoit des bourses
permettant d’accéder à tous les niveaux d’éducation. Toutefois, ces dernières années ont vu un fort
développement de l’offre privée, notamment au niveau universitaire. L’enseignement privé est
26 Voir l’article de HuffPost consultable sur: https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---africa/---ro-abidjan/---ilo-
algiers/documents/pressrelease/wcms_713349.pdf, page 5.
27 Ce pourcentage est égal à la somme des budgets du ministère de l’éducation et du ministère de
l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (en % du PIB).
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 38




Page 39
présenté comme offrant de meilleures opportunités d’emploi. Les centres d’EFP privés ont une longue
tradition derrière eux et dispensent des cours dans des domaines liés principalement au management
d’entreprise.
Défi nº 6: Bien que les niveaux d’éducation s’améliorent, la qualité de l’éducation, y compris le
niveau des compétences de base, reste très préoccupant
Comme le montre le tableau 3, les taux bruts de scolarisation28 sont élevés, avec 115,4 % de
scolarisation dans le primaire en 2018, ce qui représente une augmentation constante par rapport aux
104,8 % enregistrés en 2008. Dans l’ensemble, 93 % des élèves étaient inscrits dans l’enseignement
secondaire (2016), et 31,7 % d’entre eux ont poursuivi leurs études au niveau supérieur en 2018
(ISU).
TABLEAU 3: TAUX BRUTS DE SCOLARISATION PAR NIVEAU D’EDUCATION ET PAR SEXE,
2008-2018 (EN %)
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018
Total
104,8 105,4 107,2 107,8 109,9 111,4 113,3 114,6 114,9 115,6 115,4
Primaire
Femmes
104,1 105,1 107,0 107,7 110,2 111,3 113,4 114,6 115,1 115,4 114,9
Hommes
105,4 105,6 107,4 107,9 109,6 111,5 113,3 114,5 114,8 115,9 115,9
Total
92,4
90,6
90,2
91,8
Secondaire
Femmes
96,8
94,9
94,5
95,3
Hommes
88,3
86,6
86,2
88,6



90,1
87,7
88,2
92,9






99,3
86,9






Total
33,7
35,0
35,4
35,2
35,9
35,0
35,3
35,2
32,8
32,1
31,7
Supérieur
Femmes
40,3
42,2
43,2
43,8
44,0
43,2
44,1
44,1
41,8
41,7
41,2
Hommes
27,4
28,0
27,8
26,8
28,0
27,0
26,8
26,6
24,2
23,1
22,8
Source: Base de données de l’ISU.
Note: «-» indique qu’il manque des informations
La Tunisie a réussi à améliorer considérablement ses taux de scolarisation et d’alphabétisation au fil
des ans. Le taux d’analphabétisme est ainsi tombé à 19,0 % en 2015 (contre 31,7 % en 1994) (MDICI,
2016). Le taux d’alphabétisation des jeunes (15-24 ans) a augmenté pour s’établir à 96,8 %. Les taux
d’alphabétisation de la population adulte (25-65 ans) affichent un écart de 15 % entre les hommes et
les femmes (88,3 % des hommes contre 73,8 % des femmes), mais les 15-24 ans ont réussi à
combler cet écart important pour le ramener à seulement 1 %.
28 Les taux bruts de scolarisation sont calculés comme le total des inscriptions à chaque niveau d’enseignement,
indépendamment de l’âge, et sont exprimés en pourcentage de l’âge d’instruction officiel correspondant. Ce taux
peut parfois dépasser 100 % en raison de l’inclusion des élèves trop âgés ou trop jeunes (élèves inscrits à l’école
de façon précoce ou tardive et redoublants).
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 39





Page 40
Le niveau d’éducation global de la population (15 ans et plus) enregistre également une nette
tendance à la hausse (tableau 4). Bien que les qualifications de niveau moyen, y compris l’EFP, aient
stagné à 20,5 % en 2019 (contre 21,5 % en 2010), le segment de l’enseignement supérieur s’est
amélioré, passant de 12,6 % en 2010 à 16,4 % en 2019. En revanche, une partie importante de ces
diplômes relève des études sociales ou religieuses, et non des domaines techniques recherchés. La
part de la population peu instruite a légèrement diminué, passant de 66,0 % en 2010 à 63,0 %
en 2019. Les femmes ont réalisé des progrès plus importants. En effet, la différence entre les
hommes et les femmes ayant un niveau d’éducation plus faible, qui était de 5,5 % en 2010, n’était
plus que de 1,4 % en 2019. De même, la proportion de femmes ayant un niveau d’éducation élevé
en 2019 dépassait de loin celle des hommes, et l’écart n’a cessé de se creuser depuis 2015 (18,1 %
contre 14,6 %) (INS).
TABLEAU 4: NIVEAU D’EDUCATION DE LA POPULATION TOTALE PAR SEXE (% DES 15 ANS),
2010 ET 2015-2019
Niveau
d’éducation
Total
Faible
Moyen
Élevé
Hommes
Faible
Moyen
Élevé
Femmes
Faible
Moyen
Élevé
2010
2015
2016
2017
2018
2019
66,0
21,5
12,6
63,2
23,6
13,3
68,7
19,4
11,9
64,6
20,7
14,7
62,8
22,4
14,8
66,4
19,0
14,6
64,9
19,9
15,1
64,0
22,0
14,0
65,9
17,9
16,2
64,5
19,9
15,6
63,7
22,3
13,9
65,2
17,5
17,2
64,1
19,6
16,2
63,7
21,9
14,5
64,6
17,5
17,9
63,0
20,5
16,4
62,3
22,9
14,6
63,7
18,2
18,1
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Remarques: faible: CITE 0-2 (inclut les personnes non scolarisées); moyen: CITE 3-4, élevé: CITE 5-6 (niveaux
de la CITE 1997).
Près d’un quart de la population âgée de 30 à 34 ans a terminé avec succès des études supérieures
(24,6 % en 2016 contre 19,0 % en 2010). Les jeunes femmes diplômées de l’enseignement supérieur
sont plus nombreuses que leurs homologues masculins: 28,6 % contre 20,6 % en 2016 (INS; voir
figure 7).
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 40





Page 41
GRAPHIQUE 7: NIVEAU D’ETUDES SUPERIEURES (% DES 30-34 ANS), 2010-2016
Total
Hommes
Femmes
t
n
e
m
e
n
g
e
s
n
e
i

l
e
d
s
é
m
ô
p
D
l
i
)
%
(
r
u
e
i
r
é
p
u
s
30.0
28.0
26.0
24.0
22.0
20.0
18.0
16.0
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
Toutefois, ces tendances positives contrastent fortement avec le taux toujours élevé de jeunes en
décrochage scolaire, c’est-à-dire les jeunes qui quittent l’école avant d’avoir obtenu un diplôme de
l’enseignement secondaire. Malgré des améliorations importantes par rapport à 2010, où le taux
s’élevait à 54,9 % au total, l’abandon scolaire touchait encore 37,1 % des personnes âgées de 18 à
24 ans en 2019 (INS). Avec un taux de 42,6 % en 2019 (contre 54,9 % en 2010), les jeunes hommes
ont été plus nombreux à abandonner l’école que les jeunes femmes (le taux pour les femmes était de
31,6 % en 2019 contre 47,7 % en 2010) (voir graphique 5). Les taux d’abandon scolaire en Tunisie
demeurent élevés en raison des préoccupations constantes en matière de sécurité et du manque de
programmes, d’installations, de transports et de soutien pédagogique et familial appropriés. Comme
nous l’avons vu précédemment, il existe un lien étroit avec le taux de NEET (voir graphique 6).
Un autre sujet de préoccupation est la faible qualité de l’éducation en Tunisie, et notamment le faible
niveau des compétences de base. En 2017, le nombre d’années de scolarité attendues était de
10,2 ans, mais le nombre d’années de scolarisation corrigées de l’apprentissage s’élevait à seulement
6,3 ans (Banque mondiale, Indice de développement humain).
Comme l’illustre le graphique 8, les résultats de l’enquête PISA de l’OCDE de 2015 ont fait état d’une
forte baisse des compétences en lecture. Ainsi, pas moins de 71,6 % des élèves âgés de 15 ans ont
obtenu de mauvais résultats en 2015, chiffre qui tient mal la comparaison avec les 50,2 % enregistrés
par la Tunisie en 2009 et les 19,7 % de moyenne affichés par l’UE en 2015. Le taux de sous-
performances en sciences est passé à 65,9 % en 2015 (contre 53,7 % en 2009) et à 74,8 % en
mathématiques (contre 73,6 % en 2009). Les taux moyens de l’UE en 2015 s’élevaient à 20,6 % et
22,2 % respectivement.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 41










Page 42
GRAPHIQUE 8: ÉLEVES SOUS-PERFORMANTS (% DE JEUNES AGES DE 15 ANS) ECHOUANT
AU NIVEAU 2 SUR L’ECHELLE PISA, 2009, 2012 ET 2015
71.6
2009
2012
2015
73.6
74.8
67.8
50.2
49.3
65.9
53.7
55.3
5
1
%
(
s
t
n
a
s
i
f
f
u
s
n
i
s
t
a
t
l
u
s
é
R
)
s
n
a
Lecture
Mathématiques
Sciences
Source: OCDE, PISA
Les raisons en sont notamment les mauvaises conditions dans les écoles, en particulier dans les
régions défavorisées, mais aussi les programmes et les compétences des enseignants (ETF, 2019a).
La situation est grave car le manque de compétences de base empêche les jeunes de poursuivre leur
apprentissage et d’acquérir des compétences de haut niveau. Ainsi la baisse de la qualité de
l’enseignement primaire et du premier cycle de l’enseignement secondaire contribue à accroître les
niveaux d’exclusion de l’éducation et du marché du travail. Les jeunes peu qualifiés sont également
plus vulnérables à l’évolution des conditions économiques, comme on le voit avec la crise de la
COVID-19.
2.5 Enseignement et formation professionnels
L’EFP constitue un sous-secteur spécifique au sein du système éducatif global, qui relève désormais
de la compétence du MJSIP. En outre, plusieurs ministères et agences sectorielles sont impliqués, ce
qui rend la gestion de l’EFP complexe et la réforme du système difficile (voir section 3.1 pour plus de
détails). Les centres de formation dépendent de différents ministères. Ainsi, 136 centres de formation
sont rattachés au MJSIP, 8 au ministère du tourisme, 39 au ministère de l’agriculture, 18 au ministère
de la santé et 12 appartiennent à l’armée tunisienne. Parmi ces établissements figurent un certain
nombre de centres de formation sectoriels investis d’un mandat national et qui sont parfois situés
dans des endroits reculés. De plus, de nombreux centres de formation privés opèrent en Tunisie dans
un marché en grande partie non réglementé. L’OIT parle de plus de 2 700 centres de ce type, tandis
que l’ONEQ cite le chiffre de 189 centres agréés et de 935 centres non agréés pour la seule année
scolaire 2016/17 (ONEQ, 2016).
Les programmes d’EFP, qui diffèrent par leur contenu, leur lieu d’exécution et leur durée, débouchent
sur des niveaux de qualification différents. En voici quelques exemples: Brevet
de technicien professionnel (BTP), Brevet de technicien supérieur (BTS), Certificat d’aptitude
professionnelle (CAP) et Certificat de compétence (CC).
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 42








Page 43
2.5.1 Accès et participation
Défi nº 7: Le nombre d’inscriptions dans l'EFP est faible en raison du manque d’offres d’EFP
attrayantes et de l’absence de passerelles vers l’enseignement supérieur
En 2016, la part des étudiants de l’EFP dans l’enseignement secondaire en Tunisie s’élevait à
seulement 9,1 % contre 13,9 % en 2011. Ces mauvais chiffres traduisent un manque d’offres d’EFP
attrayantes, ce qui est le cas en particulier pour les filles (6,5 %) (voir tableau 5).
TABLEAU 5: ÉTUDIANTS INSCRITS DANS DES PROGRAMMES PROFESSIONNELS EN
POURCENTAGE DES ETUDIANTS DE L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE, 2011, 2013-2016
2011
2012
2013
2014
2015
2016
Nombre total d’étudiants de l’enseignement
secondaire professionnel (en % du nombre
total d’étudiants de l’enseignement
secondaire)
Nombre total d’étudiants de l’enseignement
secondaire professionnel inférieur (en % du
nombre total d’étudiants de l’enseignement
secondaire inférieur)
Nombre total d’étudiants de l’enseignement
secondaire professionnel supérieur (en % du
nombre total d’étudiants de l’enseignement
secondaire supérieur)
Total
13,9
Femmes
9,1
Hommes 18,8
Total
17,3
Femmes
12,6
Hommes 21,3
Total
10,6
Femmes
5,9
Hommes 15,9









9,3
6,1
6,2


9,0
8,4
9,5
9,6




2,6
1,1
4,0
9,3




2,5
1,0
3,9
9,6


9,1
6,5
11,8
8,5
6,8
10,2
9,6
6,2
13,7
Source: Base de données de l’ISU
Note: «-» indique qu’il manque des informations
Le problème lié au faible nombre d’inscriptions dans des programmes d’EFP est accentué par le fait
qu’un jeune sur cinq abandonne l’EFP (voir section 3.1). L’EFP, qui est considéré comme le deuxième
choix au niveau secondaire, est généralement perçu comme débouchant sur des emplois à faible
statut social et à basse rémunération. En outre, la faible attractivité de l’EFP est attribuée au fait que
l’EFP n’offre pas de débouchés, malgré les tentatives passées de créer des passerelles vers
l’enseignement supérieur. De plus, les préoccupations sécuritaires, qui n’ont cessé de croître depuis
la révolution, expliquent en partie la baisse du nombre d’inscriptions, notamment chez les filles.
2.5.2 Qualité et pertinence
En 2013, le MFPE a procédé à une autoévaluation approfondie afin d’identifier les faiblesses du
système d’EFP. Parmi les faiblesses relevées par le MFPE, on peut citer le manque d’harmonisation
dans la gestion du système, l’absence d’orientations claires en matière de réforme ainsi que la faible
capacité générale du système d’EFP à s’adapter aux besoins de l’économie, des individus et de la
société. L’absence d’instruments permettant d’identifier les compétences et les besoins de formation
et de les traduire en offres d’EFP pertinentes a été reconnue comme l’une des principales carences.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 43





Page 44
Conscient de ces défis, le MFPE a lancé une ambitieuse stratégie de réforme de l’EFP pour la période
2014-2018, qui a été prolongée jusqu’en 2020
29 (MFPE, 2013). Cette stratégie s’est appuyée sur le
Contrat social et sur les enseignements tirés des précédents programmes MANFORME
30 et
PEFESE
31, (co)financés par l’UE.
La stratégie de réforme de l’EFP vise à atteindre les principaux objectifs suivants:
soutenir le développement professionnel des formateurs;
accroître l’attractivité de l’EFP;

mobiliser les parties prenantes régionales;
améliorer la collecte et l’analyse de données et renforcer la fonction de suivi et d’évaluation; et
développer l’esprit d’entreprise dans l’ensemble du système d’EFP.
Cette stratégie rassemble des mesures de réforme dans 14 projets de réforme de l’EFP différents,
chacun avec ses objectifs et ses plans d’action spécifiques et avec les ressources humaines et
financières nécessaires. Le coût total des 14 projets est estimé à 428 millions de TND (environ
132 millions d’euros), dont 369 millions de TND (environ 114 millions d’euros) pour la seule
restructuration et modernisation des centres de formation (projet 8).
Les autorités tunisiennes ont pris en main la réforme de l’EFP et les partenaires sociaux leur
apportent un soutien. Cependant, les ressources humaines et matérielles sont limitées et les ministres
changent fréquemment, ce qui s’accompagne souvent de la définition de nouvelles priorités politiques.
Ces changements ont pour effet de détourner certaines ressources de la mise en œuvre des
14 projets d’EFP et de créer une certaine lassitude chez le personnel administratif et les acteurs de la
réforme. Aussi la réforme de l’EFP ne progresse-t-elle que lentement par rapport à ses objectifs
initiaux. Certains des nombreux volets de la réforme sont pratiquement à l’arrêt, si bien que le
système d’EFP ne fonctionne pas efficacement à l’heure actuelle.
Les bailleurs de fonds fournissent des ressources et une assistance technique essentielles pour la
conception de concepts et de méthodologies et la mise en œuvre de réformes de l’EFP dans des
zones limitées ou des établissements pilotes. Toutefois, leur contribution au renforcement des
capacités des décideurs politiques et des partenaires sociaux et leur participation à la plupart des
projets réalisés à ce jour ne suffisent pas à faire fonctionner le système différemment. Les capacités
nationales sont limitées et les bailleurs de fonds agissent parfois de manière non coordonnée.
Parmi les domaines dans lesquels des progrès ont été réalisés, on trouve notamment la formalisation
du dialogue social tripartite pour l’EFP et l’emploi, l’existence d’un système de taxe de formation
professionnelle (bien que son fonctionnement doive encore être amélioré) ou la réglementation de la
formation en milieu professionnel (FmP).
Conformément à la Constitution adoptée en 2014, les fonctions de l’EFP doivent être décentralisées
aux niveaux régional et local. Il s’agit d’une approche innovante qui pourrait permettre d’améliorer à la
fois la qualité et la pertinence de l’offre d’EFP au niveau local, mais aussi l’employabilité des jeunes.
Dans son édition 2016-2017 du processus de Turin, l’ETF (2017) avait insisté sur l’urgence de mettre
29 La période de la stratégie de réforme de l’EFP 2014-2018 a été rebaptisée 2016-2020 pour coïncider avec la
période de mise en œuvre de la Stratégie nationale de développement 2016-2020.
30 Une synthèse des trois phases du projet MANFORME est consultable ici: http://adapt.it/adapt-indice-a-z/wp-
content/uploads/2014/09/difid-wb_knowledge_skills_Tunisia_2003.pdf
31 Programme d’aide budgétaire de l’UE en soutien à l’éducation.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 44




Page 45
en place un nouveau modèle de gouvernance de l’EFP dans le cadre des réformes globales du
système d’EFP, qui fasse participer les partenaires sociaux et les autorités régionales et locales de
manière beaucoup plus forte. Le décret gouvernemental nº 2019-802, adopté le 15 août 2019,
accorde en principe un peu plus d’autonomie aux centres d’EFP. Il encourage les établissements
d’EFP à mettre en place des «comités de partenariat». Toutefois, le décret ne va peut-être pas assez
loin dans l’autonomie, et ses modalités de mise en œuvre restent à définir. Nous examinerons plus en
détail la question de la décentralisation à la section 3.1.
Défi nº 8: Les opportunités de formation professionnelle continue sont sous-utilisées
Il existe une demande de formation continue, de mise à niveau des compétences et de reconversion
professionnelle. Parmi la population active âgée de 25 à 64 ans, 2,9 % ont participé à une formation
en 2019, ce qui représente une augmentation significative par rapport aux 1,3 % enregistrés en 2015
(INS, EFT; voir graphique 9). Cependant, malgré des réformes structurelles et l’existence d’un
système de taxe de formation professionnelle, le pays ne dispose pas de politiques globales en
matière de formation professionnelle continue, et le système d’EFP reste faible. La bureaucratie et la
complexité des procédures d’inscription sont les principales raisons de la sous-utilisation du fonds de
formation pour l’enseignement et la formation professionnels continus, seuls 10 % des fonds
disponibles ayant été utilisés en 2016 (OIT, MFPE et CNFCPP, 2017). Des discussions sont en cours
sur la manière de simplifier l’utilisation des mécanismes de financement afin d’améliorer l’accès à
l’apprentissage tout au long de la vie.
GRAPHIQUE 9: PARTICIPATION A LA FORMATION DES ADULTES (% DES 25-64 ANS), 2010-
2015 ET 2019
Total
Hommes
Femmes
3.5
3.0
2.5
2.0
1.5
1.0
0.5
0.0
à
t
e
n
o
i
t
a
m
r
o
f
a
l
à
n
o
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p
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g
a
s
s
i
t
n
e
r
p
p
a

l
)
%
(
i
e
v
a
l
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2019
Source: Base de données de l’ETF, données reçues de l’INS, EFT
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 45



















Page 46
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 46





Page 47
3. ÉVALUATION DES ENJEUX CLES ET DES
REPONSES POLITIQUES
Le développement du capital humain peut s’imposer comme la pierre angulaire d’une croissance
inclusive stimulant à la fois la productivité et l’emploi. La Tunisie a considérablement amélioré les taux
d’alphabétisation et d’éducation de sa population. Une grande partie de la jeunesse tunisienne est
instruite, avec un nombre considérable de jeunes diplômés de l’enseignement supérieur. Malgré cela,
la Tunisie affiche un taux élevé de chômage des jeunes et de NEET en raison du manque général
d’emplois, mais aussi de la faible qualité de l’éducation à tous les niveaux, y compris au niveau des
compétences de base et de la formation professionnelle.
Le système éducatif repose sur un système méritocratique qui sélectionne les meilleurs candidats et
laisse la majorité des jeunes suivre des études dans des domaines offrant peu de débouchés
professionnels (OCDE, 2018). Plus d’un tiers des jeunes quittent l’école avant d’avoir obtenu un
diplôme de niveau secondaire (voir graphique 5). La Tunisie ne dispose pas d’un système d’EFP
attrayant et de qualité qui, plutôt que de produire un grand nombre de diplômés universitaires dans
des domaines offrant des perspectives d’emploi limitées, permette de former des travailleurs qualifiés
et des techniciens très demandés sur le marché du travail. Le pays n’a pas encore suffisamment
développé un système d’EFP universitaire qui permette aux jeunes diplômés au chômage de mettre à
niveau leurs compétences ou de se recycler dans des domaines recherchés sur le marché du travail.
Les possibilités de formation professionnelle continue sont sous-utilisées, en raison notamment d’un
système de taxe de formation plutôt restrictif et bureaucratique. En outre, les services d’orientation
professionnelle pour les jeunes en décrochage scolaire sont médiocres (voir aussi: OCDE, 2016,
2017).
Comme mentionné précédemment, les jeunes vivent généralement une transition difficile entre
l’éducation et le travail. Outre la rareté des emplois, il existe une inadéquation entre les compétences
et l’expérience professionnelle des demandeurs d’emploi et les compétences demandées par les
employeurs. Des études de suivi montrent que les jeunes diplômés de centres d’EFP bénéficient de
meilleures perspectives sur le marché du travail que leurs homologues ayant une formation générale
(ONEQ, 2017, 2020). Par ailleurs, avec la complexité croissante des secteurs économiques, tels que
l’industrie pharmaceutique, les activités financières, les télécommunications, les TIC, l’industrie du
papier et du carton, les industries mécaniques et électriques, l’industrie chimique ainsi que les
services de santé et les services aux entreprises, la Tunisie aura besoin de compétences techniques
de pointe aux niveaux secondaire et supérieur.
L’évaluation proposée dans ce chapitre se concentre sur le secteur de l’EFP, même s’il est évident
que d’autres sous-secteurs de l’éducation contribuent également à la formation du capital humain. En
effet, nombre des professions qui constituent l’épine dorsale des évolutions économiques et sociales
dépendent des qualifications professionnelles (voir par exemple OCDE, 2020). Comme indiqué ci-
dessus, les employeurs tunisiens recherchent des travailleurs et des techniciens qualifiés qu’ils ne
trouvent pas facilement parmi la main-d’œuvre existante. L’EFP améliore les chances des jeunes
diplômés de trouver un emploi. Dans ce contexte, l’EFP désigne un domaine plus large allant de la
formation initiale à la formation continue pour les jeunes et les adultes, à différents niveaux de
qualifications (jusqu’à un niveau supérieur), et intégrant les compétences de base essentielles à
l’exercice d’une profession et à la poursuite de l’apprentissage.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 47



Page 48
Des stratégies et des plans d’action pertinents ont été mis en place pour réformer en profondeur le
secteur de l’EFP. Pourtant, les réformes nécessaires n’ont pas été menées à bien dans la mesure
souhaitée. Les principaux défis et priorités qui pourraient contribuer à la réforme du système, dans le
but ultime de mieux servir l’économie, les individus et la société, sont analysés ci-dessous. Ces défis
sont regroupés sous les concepts de «cohérence externe» et de «cohérence interne», qui sont tous
deux essentiels à toute réforme du système.
Le premier grand défi auquel est confronté le système tunisien d’EFP concerne le manque de
cohérence externe, c’est-à-dire que, dans une certaine mesure, le système ne répond pas aux
attentes et aux besoins de ses usagers. La cohérence externe passe par une révision des modalités
de gouvernance et de financement à tous les niveaux mobilisant l’ensemble des acteurs concernés,
par une approche plus globale de la révision de la législation et des pratiques de mise en œuvre et
par un ajustement progressif du réseau des prestataires et des offres de formation en fonction des
besoins de compétences actuels et futurs.
Le deuxième grand défi concerne le renforcement de la cohérence interne du système d’EFP, c’est-à-
dire une amélioration et un meilleur alignement des éléments clés, tels que les programmes d’études,
les supports d’enseignement et d’apprentissage, les compétences des enseignants et les opportunités
de formation en milieu professionnel (FmP), afin d’aider les apprenants, jeunes et adultes, à acquérir
les compétences pratiques et professionnelles requises par le marché du travail et précisées dans les
qualifications. Dans ce contexte, les mécanismes d’assurance qualité doivent couvrir tous les
éléments du système.
3.1 Les systèmes de développement des compétences de la Tunisie et
leur manque partiel de cohérence externe et d’alignement avec les
besoins économiques et sociaux
La lenteur des réformes de l’EFP est due en partie à la faible valeur sociale associée
à la formation professionnelle
Le développement des compétences et la formation professionnelle figurent toujours en tête de
l’agenda politique de la Tunisie. Les réformes qui y sont associées sont considérées comme les
pierres angulaires du développement économique, de la croissance du marché du travail et du
développement social tunisiens. Le Contrat social tripartite, signé en janvier 2013 par le
gouvernement et les principales organisations d’employeurs et de travailleurs, constitue à cet égard
un accord historique. Dans le deuxième pilier de ce document, chacun des partenaires a pris un
certain nombre d’engagements pour améliorer les politiques d’emploi et de formation. La Stratégie
nationale de réforme de l’EFP 2016-2020 a été définie dans la foulée (MFPE, 2013). Ces initiatives
sont considérées comme des modèles dans la région. Les visions ambitieuses, les stratégies de
réforme et les plans d’action ont été mis en place.
En outre, de nombreux bailleurs de fonds bilatéraux et internationaux, dont l’UE, ont fourni une
assistance technique pour la poursuite de la conceptualisation et de la mise en œuvre pilote des
réformes. Toutefois, comme nous l’avons déjà mentionné, les changements fréquents de priorités
politiques et le manque de continuité des politiques publiques empêchent le pays de progresser plus
rapidement et de capitaliser sur les nombreuses initiatives pilotes réussies. Ainsi, la mise en œuvre
des objectifs déclarés et des projets de réforme de l’EFP n’a pas répondu aux attentes.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 48



Page 49
Cet échec relatif s’explique également par le fait que, dans leur volonté de rompre avec le passé et
pour des raisons en partie compréhensibles, les autorités tunisiennes ont remis en question certaines
des mesures qui dataient d’avant la révolution. Ainsi, par exemple, l’un des objectifs du programme
d’aide budgétaire PEFESE de l’UE, qui visait à soutenir la réforme de l’éducation et de la formation
(avec un budget de 63 millions d’euros), était d’orienter un pourcentage élevé de jeunes étudiants
vers des filières techniques
et des instituts de formation professionnelle. Le but était de répondre aux
besoins du marché du travail. Or, ces indicateurs ont été remis en question car ils s’inspiraient
directement des anciens axes du programme présidentiel de Ben Ali (et de sa fixation sur les chiffres).
Plutôt que d’essayer d’atteindre le nombre de diplômés de l’EFP visé, les autorités tunisiennes ont
ainsi préféré renoncer aux fonds PEFESE de l’UE (Fontana, 2017). En outre, les travaux menés sur
d’autres initiatives de réforme de l’EFP engagées avant la révolution, avec d’assez bons résultats, ont
été interrompus ou temporairement suspendus, comme le cadre d’assurance qualité, les partenariats
avec le secteur privé ou les mesures visant à accroître l’efficacité des prestataires d’EFP et des
politiques actives du marché du travail.
L’EFP véhicule toujours une image plutôt négative. Le nombre d’inscriptions dans des filières
professionnelles est très faible et ne représentait que 9,1 % des élèves du deuxième cycle du
secondaire en 2016 (voir tableau 5).
Malgré les efforts déployés pour promouvoir les spécialisations prioritaires, de
nombreux programmes d’EFP restent peu attrayants pour les apprenants et les
employeurs
Les programmes d’EFP proposés, le nombre limité de places dans certaines filières (domaines
professionnels), l’attractivité pour les apprenants et la pertinence des formations par rapport à la
demande du marché du travail (même si celle-ci est généralement faible) posent problème. Les
inscriptions dans l’EFP public en Tunisie suivent une logique largement axée sur l’offre. Chaque
année les jeunes peuvent s’inscrire en mars ou en septembre. La plupart des inscriptions se font au
mois de septembre (en 2018, par exemple, près 24 000 places étaient disponibles, contre 13 000 en
mars 2019) (Ferchichi, 2019). Les chiffres des deux cycles d’admission annuels dépendent de la
capacité disponible des centres de formation et des différents programmes pour chaque niveau de
formation. Plutôt que de suivre une approche systématique axée sur la demande, chaque centre de
formation indique le nombre de places de formation dont il dispose.
Les «taux d’occupation» des centres de formation et des programmes spécifiques qui en résultent
servent d’indicateurs pour mesurer l’efficacité du système et l’attractivité des formations pour les
étudiants. Selon une enquête réalisée par l’ITCEQ en 2018, seul un centre de formation sur quatre
(24 %) fonctionnait à pleine capacité. Des analyses plus détaillées ont révélé que 50 % des
établissements situés dans le nord-ouest du pays fonctionnaient en dessous de leur capacité, tandis
que, dans le nord-est, le taux d’occupation dépassait 100 % de la capacité des centres. Les
établissements qui ne fonctionnaient pas à pleine capacité ont cité comme raison principale les
travaux de restructuration en cours, mais aussi les problèmes logistiques et l’infrastructure actuelle
des centres, ainsi que le manque de logements, de formateurs pour certaines spécialisations et/ou
d’intérêt de la part des jeunes. Les centres de formation ont parfois suspendu certains programmes en
raison d’un manque de formateurs et/ou d’intérêt (ITCEQ, 2018, p. 18). Si les travaux de
reconstruction peuvent être de nature temporaire, toutes les autres raisons citées sont de nature
structurelle et exigent une profonde réforme du système.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 49



Page 50
L’ATFP tente depuis plusieurs années de s’ouvrir au secteur privé. Elle a modifié sa stratégie de
communication en faveur de la promotion de l’EFP dans les secteurs et les métiers offrant de
meilleures perspectives d’emploi. L’ATFP a sélectionné des spécialités dites prioritaires, qui
s’inscrivent dans une logique économique plutôt que dans une logique scolaire. Par exemple, à
l’époque du mégaprojet «Sama Dubaï», les autorités nationales voulaient attirer les jeunes vers le
secteur du bâtiment et les secteurs connexes. Les programmes liés à ces secteurs ont ensuite été
révisés. À la demande de l’AVFA, l’agriculture figure désormais sur la liste des spécialités prioritaires,
tout comme les industries du textile et du tourisme.
Ainsi, lorsqu’un secteur exprime une certaine demande, l’ATFP encourage les jeunes à s’inscrire dans
les filières correspondantes en leur versant une bourse mensuelle. Les spécialisations qui ne sont
plus demandées sont retirées de la liste. Sur les 250 spécialisations qui composent actuellement la
liste de l’ATFP, 50 sont particulièrement demandées (Ferchichi, 2019). Cependant, malgré les
incitations financières offertes par l’État, il est difficile de faire en sorte que les jeunes s’inscrivent dans
certaines spécialisations. En effet, le travail dans l’agriculture ou la construction, par exemple, est
considéré comme difficile et peu gratifiant. Ceux qui ont appris un métier du bâtiment ont tendance à
aller à l’étranger, où ils peuvent bénéficier de meilleures possibilités d’emploi. Les spécialités liées aux
métiers de l’industrie du cuir et de la chaussure figurent toujours sur la liste des offres d’EFP, mais
elles sont considérées comme peu intéressantes par les jeunes. L’ATFP espère que le secteur
montrera bientôt des signes de reprise (Ferchichi, 2019).
En conclusion, le système d’EFP continue à offrir un certain nombre de spécialisations
professionnelles qui ne suscitent pratiquement pas de demande sur le marché du travail et qui
n’attirent qu’un nombre limité d’étudiants. Si les acteurs gouvernementaux peuvent craindre les
conséquences politiques des transferts d’enseignants et de la fermeture d’établissements ou de
programmes, il n’existe pour autant aucun plan pour résoudre ce problème à moyen ou long terme.
Les centres d’EFP sont confrontés à des taux d’abandon élevés
Le système d’EFP remplit des fonctions sociales importantes en (ré)intégrant les étudiants plus faibles
et issus de milieux défavorisés. Un cours préparatoire au programme de CAP, conçu conjointement
avec le ministère de l’éducation, vise à réintégrer les jeunes décrocheurs dans le système scolaire
(Ferchichi, 2019). Un autre objectif social de la Stratégie nationale de réforme de l’EFP 2016-2020
consistait à ramener les taux d’abandon de 35 % à 15 % d’ici la fin de 2018. En 2018, malgré des
améliorations significatives, les centres de formation étaient toujours aux prises avec un taux
d’abandon moyen de 22,3 % (ITCEQ, 2018, p. 16). Ce taux est généralement plus élevé pour les
programmes de CAP, où il atteint 25,5 %. Dans 45 % des centres de formation proposant des
diplômes de CAP, le taux de décrochage était supérieur à 30 %. Certains apprenants abandonnent
pour des raisons personnelles. Toutefois, près de la moitié (47 %) des directeurs de centres de
formation interrogés ont affirmé que les formations ne répondaient pas aux attentes des apprenants,
d’où le risque d’échec et d’abandon scolaires. Près d’un tiers (28 %) des directeurs d’établissements
ont mentionné le manque d’équipements adéquats pour l’apprentissage. Parmi les autres raisons
évoquées, on retrouve les conditions d’hébergement inadaptées (surtout pour les filles) ou le fait que
les apprenants n’ont pas automatiquement droit à un hébergement à partir de la deuxième année
d’inscription lorsque la formation se déroule sur plus d’une année scolaire. Certains directeurs ont
également évoqué comme facteur d’abandon le manque de qualifications techniques et pédagogiques
des formateurs (ITCEQ, 2018).
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Les mécanismes de communication entre l’EFP et le marché du travail ne fonctionnent pas
pleinement
Les facteurs combinés de la faible attractivité des formations de l’EFP proposées, de la participation
limitée, de l’abandon des étudiants et du faible nombre de diplômés qui en résulte laissent penser que
le système public d’EFP est encore mal adapté aux besoins des apprenants et du marché du travail.
Cette situation appelle des réformes plus larges du système, afin de le rapprocher des besoins de ses
principaux usagers: les personnes, les employeurs et la société dans son ensemble.
Il n’existe aucun mécanisme structuré, aux niveaux national, sectoriel et régional, permettant de
recueillir systématiquement des données démographiques, sociales et sur le marché du travail et les
compétences, et de mieux définir les modifications à apporter au réseau de prestataires et de
programmes d’EFP (financés par les pouvoirs publics). Par ailleurs, il n’existe pas de système
d’information de gestion complet en matière d’EFP permettant de traduire la demande en éléments
chiffrés (tels que les inscriptions, les effectifs et les compétences du personnel, les besoins en
équipements et en matériel, les places d’hébergement ou le suivi de l’état du système). De même, les
activités d’information, de conseil et d’orientation, qui aident les jeunes à déterminer leurs futurs choix
éducatifs et professionnels, sont largement absentes.
Les dispositifs nationaux de gouvernance sont fragmentés et font intervenir plusieurs
ministères et agences qui ne travaillent pas forcément sur des objectifs, une législation et des
cadres communs
La réforme de l’EFP pourrait être facilitée par la mise en place d’un leadership clair, bien coordonné et
doté de ressources suffisantes. Toutefois, la gouvernance de la formation professionnelle initiale et
continue au niveau national en Tunisie est complexe. Comme mentionné précédemment, l’institution
la plus importante est désormais le MJSIP, qui élabore, met en œuvre et évalue la politique
gouvernementale en matière d’EFP. L’agence exécutive du ministère, l’ATFP, gère le plus grand
nombre de centres de formation, couvrant la plupart des secteurs. Le Centre national de formation de
formateurs et d’ingénierie de formation (CENAFFIF) s’occupe de la formation des enseignants et de
l’élaboration des programmes, tandis que le Centre national de formation continue et de promotion
professionnelle (CNFCPP) est chargé de la coordination de la formation continue. L’ANETI est, quant
à elle, responsable de la formation des demandeurs d’emploi au chômage, parmi d’autres mesures
actives du marché du travail.
En outre, l’AFMT et l’AVFA – en tant qu’agences relevant des ministères sectoriels respectifs –, ainsi
que le ministère de la Santé et l’armée tunisienne, gèrent un certain nombre de centres de formation
dans leurs domaines de compétences respectifs. Enfin, il existe de nombreux prestataires privés de
formation initiale et continue. Il s’agit notamment des centres de formation non agréés, où la qualité
des prestations n’est pas contrôlée.
Le MJSIP est responsable de la coordination générale des différentes institutions publiques et de la
supervision de l’EFP. Un comité permanent coordonne toutes les activités avec les partenaires
sociaux et les administrations concernées. Enfin, un Conseil supérieur à caractère consultatif réunit
une à deux fois par an les partenaires sociaux et les ministères en charge de l’éducation et de la
formation. L’efficacité réelle de ces structures de coordination reste néanmoins à démontrer.
L’organisation des structures de gestion de l’EFP par secteur (en partie) est le vestige d’un modèle de
gouvernance de l’EFP qui cherchait à relier étroitement les centres de formation aux secteurs
d’activité en proposant des formations spécifiques. De plus, la formation initiale et la formation
continue constituent des systèmes différents, avec des prestataires, des modèles de financement, des
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qualifications, des personnels enseignants et des supports pédagogiques différenciés. Or, ce modèle
et la multitude d’acteurs qu’il implique apparaissent aujourd’hui comme inefficaces, en particulier à
l’aune de la volonté de développer et de réformer l’ensemble du système d’EFP afin de l’adapter aux
évolutions du marché du travail et de la demande sociale. La formation initiale et continue proposée
dans les différents secteurs devrait s’orienter vers de nouveaux cadres nationaux établis d’un
commun accord en matière de politiques et de législation, de dispositifs de financement, de
qualifications, de qualité et d’assurance qualité, de transparence ainsi que de responsabilisation.
Par conséquent, l’ajustement des modalités générales de gouvernance pourrait constituer une étape
majeure dans l’avancement de la réforme du système. Ces nouvelles modalités doivent permettre de
rationaliser ou de renforcer les mécanismes de:
planification, financement, gestion, développement, suivi et évaluation du système global dans le
cadre d’une politique, d’un territoire, de cadres et de lignes directrices nationales communs; et
elles doivent permettre une implication plus structurée des partenaires sociaux dans les décisions
stratégiques et les aspects opérationnels respectifs.
Le rôle des acteurs régionaux et locaux dans l’EFP est actuellement limité mais est appelé à
changer
Le changement et la réforme de l’EFP ne peuvent pas être décrétés d’en haut. La base du
changement – et le nombre d’acteurs du changement chargés de la mise en œuvre de la réforme au
niveau local – doit être considérablement élargie, y compris en Tunisie.
L’OCDE (2015a) et l’OIT (2018), entre autres, affirment que les politiques mises en œuvre par le
passé en Tunisie ont contribué à la polarisation régionale et à la pauvreté rurale. Ce constat suggère
que la nouvelle politique de développement régional mise en place prévoyait un certain niveau de
décentralisation. La Constitution tunisienne de 2014 pose en effet la «décentralisation» comme le
principal concept (au chapitre 7 sur les Pouvoirs locaux) définissant le cadre d’un changement aussi
fondamental en matière de gouvernance. Dans le contexte de la stratégie de développement régional
de la Tunisie, les autorités ont prévu un plus grand transfert de responsabilités aux gouvernements
élus aux niveaux régional et local (municipal) (ce qui représente une «déconcentration» plutôt qu’une
décentralisation des pouvoirs).
La décentralisation de la gestion des politiques d’EFP et d’emploi n’est pas un sujet nouveau en
Tunisie. Elle est inscrite à l’agenda politique depuis plus de 20 ans, avec la mise en place du
programme MANFORME en 1996 et la priorité accordée au développement de formations
professionnelles axées sur la demande. Depuis 2011, le MFPE et les bailleurs de fonds mettent en
œuvre des efforts plus importants, bien qu’irréguliers, pour soutenir ou modifier les dispositifs de
gouvernance. La réforme nationale de l’EFP 2014-2018 a fait de la «bonne gouvernance du système,
en cohérence avec le Contrat social, l’économie nationale et la décentralisation», l’une de ses
principales priorités (MFPE, 2013). Parmi les mesures de réforme proposées figure la prise en compte
des spécificités régionales et l’institutionnalisation des partenariats. En outre, la gouvernance
décentralisée figurait déjà parmi les thèmes abordés par le projet PEFESE mis en œuvre de 2013 à
2016, ainsi que par le projet GEMM de l’UE et de l’ETF entre 2012 et 2018 (voir ETF, 2016, 2017).
Toutefois, comme mentionné ci-dessus, bon nombre des projets de réforme envisagés n’ont pas
abouti. L’attribution de pouvoirs plus importants aux acteurs régionaux et locaux pour répondre aux
besoins locaux demeure un problème majeur.
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La lente mise en œuvre du programme de décentralisation s’explique par un faisceau de facteurs. Les
tensions politiques et les changements fréquents d’acteurs ministériels ont sans doute entravé la
poursuite d’une vision à plus long terme et la réalisation de changements plus profonds. En outre,
dans un système traditionnellement centralisé comme l’est le pouvoir tunisien, il existe encore une
certaine réticence à renoncer aux pouvoirs de décision et à la maîtrise des ressources. L’ATFP, par
exemple, «souhaite conserver ses compétences au niveau central en ce qui concerne la sélection des
formations proposées par les centres de formation» (GOPA, 2019). Cependant, il est également vrai
que les entités au niveau local manquent parfois de la capacité et de la motivation nécessaires pour
assumer de nouvelles missions et responsabilités.
Les administrations locales sont aujourd’hui dans une position de faiblesse. En 2015, les budgets
locaux en Tunisie ne représentaient que 3,6 % du budget du gouvernement national, contre 10 % au
Maroc et 20 % en Turquie (Banque mondiale, 2015). Les budgets municipaux, qui sont consacrés à
hauteur de 70 à 90 % au paiement des salaires des fonctionnaires, couvrent les coûts de
fonctionnement et non les investissements (OCDE, 2018).
Le 16 mars 2019, le MFPE a présenté un plan de réorganisation de l’offre d’EFP dans les régions. Ce
plan énumère les objectifs suivants:
aligner tous les acteurs sur les méthodologies développées par le MFPE et ses agences, par
exemple en ce qui concerne la collecte de données, le suivi et l’évaluation;
mettre en place des modalités de gouvernance plus souples qui s’appuient sur des systèmes

d’information fiables;
renforcer la capacité des directions régionales de la formation professionnelle et de l’emploi en
leur confiant l’offre d’EFP dans les régions; et
attribuer des niveaux croissants d’autonomie aux structures régionales d’EFP (GOPA, 2019).
L’ATFP a également porté l’idée d’organiser la gouvernance régionale à travers cinq macrorégions.
Ce projet soulève la question de savoir si ces macrorégions auraient le potentiel nécessaire pour
devenir des unités autonomes et autosuffisantes, sur le plan du développement économique et social,
et pour gérer la formation et l’emploi au sein de leur territoire, grâce à l’alliance de financements
nationaux et locaux. La question de savoir si la gouvernance de l’éducation et de la formation devrait
être plus étroitement liée aux structures territoriales existantes doit encore être discutée.
Les projets IRADA et PAFIP financés par l’UE [et cofinancés avec l’Agence française de
développement (AFD)] fournissent des ressources substantielles pour créer une réelle dynamique et
expérimenter de nouvelles approches décentralisées, en faisant participer les acteurs régionaux à des
initiatives axées sur le développement économique, social, et des ressources humaines.
Le projet IRADA (budget: 32 millions d’euros, durée prévue jusqu’en 2022) s’appuie en partie sur le
projet GEMM UE/ETF, de plus petite taille, auquel ont participé quatre régions pilotes tunisiennes et
qui a été réalisé entre 2012 et 2018. Les partenariats dans ces gouvernorats ont contribué à
l’élaboration de projets de plans directeurs régionaux pour l’EFP. Ils ont conçu et approuvé un certain
nombre de projets de développement de l’EFP, qui ont ensuite été évalués au niveau national.
Le projet IRADA vise à renforcer les capacités des acteurs régionaux en impliquant également le
secteur privé dans le développement des compétences et de l’économie locale. Pour cela, IRADA
aide les acteurs régionaux à concevoir des projets qui répondent aux spécificités et aux besoins de
huit gouvernorats: Gabès, Médenine, Gafsa, Kasserine, Sfax, Sidi Bouzid, Bizerte et Jendouba. Ces
régions sont considérées comme ayant le potentiel nécessaire pour mettre en œuvre leurs propres
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plans d’action et pour promouvoir les investissements et l’innovation grâce à des approches
décentralisées et participatives. En 2019, dans le cadre du projet IRADA, des évaluations régionales
des systèmes d’EFP ont été menées dans les huit régions suivant le modèle du processus de Turin
de l’ETF. Le projet IRADA fournit une assistance à 4 des 14 projets de la Stratégie de réforme de
l’EFP pour 2014-2018.
Le projet PAFIP se concentre, quant à lui, sur quatre bassins d’emploi dans le nord et l’est du pays
ainsi que sur le secteur industriel. Il aspire à créer un ancrage territorial et à susciter un saut qualitatif
des réformes du système d’EFP, grâce à la création de partenariats et en combinant l’éducation et la
formation avec des mesures d’intégration sur le marché du travail. Les 17 centres de formation
concernés sont invités à travailler en réseau avec des partenaires locaux et régionaux et à développer
des débouchés régionaux pour les personnes qualifiées, en se structurant en véritables pôles de
développement économique et social.
Dans certaines régions, comme Sfax ou Sousse, les projets avancent bien. Mais les premières
initiatives ont également montré que les acteurs régionaux tunisiens ne sont pas toujours tout à fait
prêts à adopter les nouvelles approches.
D’autres régions ne disposent pas encore:
de l’expérience nécessaire pour travailler en partenariat et poursuivre des objectifs communs;
de dispositifs de collecte et d’analyse systématique des données leur permettant d’acquérir une
connaissance solide des grandes questions et des enjeux régionaux spécifiques liés aux
conditions économiques, sociales et du marché du travail, ainsi que des priorités pour leur
développement;
de la capacité et des ressources nécessaires pour évaluer le potentiel de croissance de certains
secteurs ou métiers, notamment la capacité de certaines industries à exporter des produits à
l’étranger (ce qui nécessite notamment une connaissance des marchés internationaux et des
normes de qualité);
de la capacité de raisonner selon une logique de pôles économiques ou régionaux et de chaînes
de valeur associant les activités de production ou de récolte à la transformation, à la préservation,
à la commercialisation, à la vente et au transport ainsi qu’aux compétences techniques,
informatiques et de coordination connexes; et
de la compétence nécessaire pour concevoir des projets pertinents en partenariat avec, par
exemple, des entreprises, des groupes professionnels, des organisations de la société civile ou
des chercheurs.
Par conséquent, le renforcement des capacités des parties prenantes (y compris les représentants
des partenaires sociaux et les employeurs) aux niveaux national, régional et local, est essentiel à tout
programme de décentralisation. Cet élément fait déjà partie intégrante des projets financés par les
bailleurs de fonds. En outre, cette démarche doit s’accompagner d’une définition claire du mandat et
des rôles des différents acteurs, qui favorise une certaine autonomie des régions, et de l’allocation de
ressources suffisantes.
La nécessité d’accroître les niveaux d’autonomie des institutions locales d’EFP
En août 2019, un nouveau décret gouvernemental a été promulgué qui accorde plus d’autonomie aux
prestataires de formation, comme mentionné à la section 2.5.2. Toutefois, les dispositions concrètes
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n’ont pas encore été mises en œuvre. Selon une enquête de l’ETF (2019) 32, dans la plupart des
centres d’EFP, la prise de décision était considérée comme participative. Les conseils d’administration
des centres de formation ont une certaine influence sur le programme d’études, le recrutement et
l’utilisation interne du budget. Néanmoins, les décisions relatives au recrutement, au licenciement ou à
la suspension des formateurs et à leurs salaires (y compris la fixation des barèmes et des
augmentations de salaire) sont généralement prises au niveau national. À l’inverse, les directeurs et
les conseils d’administration des centres de formation privés jouissent de pouvoirs plus larges,
notamment en ce qui concerne les salaires et le recrutement. Seuls 42 % des conseils
d’administration des centres de formation comptent des représentants d’entreprises. Cela est
également dû au fait que les employeurs n’ont qu’un rôle consultatif. Dans l’ensemble, 90 % des
directeurs d’établissements ont signalé que «l’inadéquation du budget et des ressources des centres
de formation» et «la réglementation et la politique du gouvernement» étaient les principales
contraintes limitant leur efficacité (ETF, 2019, p. 3). L’ATFP travaille sur une nouvelle approche qui
vise à classifier les centres d’EFP selon les niveaux A, B et C et à leur attribuer différents degrés
d’autonomie. Toutefois, pour l’instant, il s’agit plutôt d’une approche administrative visant à définir le
montant des fonds alloués aux centres d’EFP en fonction du nombre d’étudiants et d’autres
paramètres. Par ailleurs, l’ETF travaille avec le MFPE et avec divers organismes et centres d’EFP
pour développer le concept de «centre entrepreneurial».
Bien que l’EFP semble disposer de financements suffisants, le système reste fragmenté et
leure efficacité encore limitée
Le financement de l’EFP provient principalement du budget de l’État et est soit transféré directement
aux centres de formation, soit mis en œuvre par le biais de deux fonds: i) le Fonds de promotion de la
formation professionnelle et de l’apprentissage et ii) le Fonds de promotion de l’emploi. Le premier
finance la formation continue et une partie des centres de formation. Les fonds sont collectés par le
prélèvement d’une taxe spéciale sur les entreprises qui n’investissent pas dans d’autres formes de
formation (1 à 2 % de la masse salariale de l’entreprise). Ce fonds est globalement sous-utilisé. Le
second fonds, financé par le budget de l’État, assure le financement des PAMT. L’État subventionne
une partie du coût de la formation (publique ou privée) par le biais du «Chèque formation
professionnelle» pour certains secteurs considérés comme une priorité nationale. Il s’agit d’un outil
pertinent, mais dont l’utilisation reste limitée. Parmi les raisons de cette sous-utilisation figurent
notamment des rigidités dans l’utilisation du fonds, des procédures complexes, un manque de
communication à propos du fonds et l’absence d’offres de formation pertinentes dans certaines
régions.
Bien que l’EFP semble bénéficier d’un financement suffisant en Tunisie, la question se pose, ici aussi,
d’un système fragmenté, bureaucratique et partiellement efficace. Une analyse complète serait utile
pour aborder le financement de l’EFP de manière plus globale. Les outils juridiques et de financement
pourraient adopter une approche plus complète et englober un plus large éventail de mesures de
formation initiale ou continue pour différents groupes cibles, en associant des acteurs non étatiques à
la gestion des fonds et en réalisant des économies d’échelle.
Les centres de formation tirent également leurs propres recettes des frais d’inscription, des activités
de formation continue et de la vente de produits de formation. Toutefois, celles-ci ne représentent
32 Une enquête menée par l’ETF en Tunisie en 2017 a permis d’interroger tous les enseignants et directeurs de
179 centres de formation. Au total, 117 centres de formation et 386 formateurs ont répondu à l’enquête, soit un
taux de réponse de 65 % et de 9 %, respectivement.
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qu’une petite fraction de leur budget. Certains font valoir que les centres d’EFP pourraient générer des
niveaux plus élevés de recettes propres, mais les incitations et les mécanismes pour y parvenir sont
soit absents, soit insuffisamment utilisés. Le coût de la formation dans les centres privés est pris en
charge par les bénéficiaires eux-mêmes.
Recommandations quant aux mesures à prendre
Amélioration de la cohérence externe et de la pertinence de l’EFP grâce à ...
Un système de développement des compétences qui ne répond pas suffisamment aux aspirations des
individus, des employeurs et de la société dans son ensemble nécessite de mettre en place de
nouveaux mécanismes de communication entre le système et ses principaux usagers et de remettre à
plat les fondements de la gouvernance générale, du financement et de l’assurance qualité du
système.
... l’anticipation des compétences et à l’orientation professionnelle pour obtenir de
meilleurs résultats sur le marché du travail
Les données démographiques, sociales et relatives au marché du travail et aux compétences
devraient être recueillies de manière plus systématique aux niveaux national, sectoriel et régional, et
devraient éclairer la réflexion sur une restructuration du réseau des prestataires et des programmes
d’EFP. Les fonds publics destinés à la formation pourraient être utilisés plus efficacement en
préparant les apprenants à leur future intégration dans la société et sur le marché du travail. En
l’absence d’un système avancé – certes plus coûteux – de veille du marché du travail à l’échelle
nationale et régionale, il pourrait être utile d’engager des discussions constructives avec des groupes
de réflexion économiques, des experts et des employeurs sur les besoins futurs de l’économie aux
niveaux national, sectoriel et régional. L’objectif final serait de concevoir et de mettre en œuvre, de
façon progressive, un plan d’ajustement progressif, à moyen et long terme, du réseau des prestataires
de formations et des cours (financés par des fonds publics) afin de mieux répondre aux besoins
identifiés. La collecte régulière d’informations sur les niveaux de satisfaction et les parcours
professionnels des diplômés de l’EFP pourrait également apporter des éclairages précieux.
Par ailleurs, le fait d’offrir davantage de possibilités (en ligne) d’information, de conseil et d’orientation
professionnelle dans les écoles, et en dehors de celles-ci, aiderait les jeunes à déterminer leurs futurs
choix éducatifs et professionnels. Les efforts de numérisation mis en œuvre en ce sens par les
agences pour l’emploi sont un pas dans la bonne direction et pourraient, de ce point de vue, constituer
une source d’information utile.
... la mise en place de nouveaux dispositifs de gouvernance cohérents, multi-niveaux
et multi-acteurs, aux échelons central, sectoriel, régional et local
Il est admis que la gouvernance et le financement de l’EFP, qui sont actuellement fortement
centralisés, sont parmi les principaux facteurs qui font obstacle à la fourniture d’une offre d’EFP plus
pertinente en Tunisie. Le taux élevé de chômage des jeunes et les écarts considérables entre les
régions exigent de nouvelles dispositions dans le domaine de la gestion des politiques d’éducation, de
formation et d’emploi, qui intègrent les notions de «décentralisation» et de «régionalisation». Une
approche globale et cohérente est nécessaire pour favoriser un système de gouvernance et de
financement multipartite aux niveaux national, sectoriel et régional/local, qui soit à même de répondre
plus efficacement aux réalités socioéconomiques et aux besoins en compétences qui y sont associés.
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Avec le Contrat social, une structure tripartite globale a été mise en place pour fournir des conseils sur
les politiques d’EFP. Toutefois, la mise en œuvre des dispositions du Contrat social et la création de
différents partenariats public-privé ne sont pas sans difficultés. Les organisations patronales et
syndicales, aux niveaux national et sectoriel, devraient pouvoir participer au dialogue sur les politiques
de développement des compétences sur un pied d’égalité avec le gouvernement. Des conseils
sectoriels bipartites sur les compétences, réunissant employeurs et experts en programmes d’EFP,
pourraient être mis en place pour les secteurs prioritaires, afin d’analyser les besoins en compétences
et en formation et de développer les qualifications et les programmes respectifs. Bien entendu, les
partenaires participant aux différentes formes de dialogue et aux travaux d’experts devront se
familiariser avec leur nouveau rôle et renforcer leurs capacités.
Le rôle et les responsabilités du MJSIP, de l’ATFP et des partenaires sociaux dans la conception de la
stratégie globale, la planification, la gestion, le suivi et l’évaluation du système devraient être
renforcés. Le MJSIP devrait faciliter la réforme globale et accroître la pertinence et la qualité des
systèmes de développement des compétences en Tunisie. En outre, il est nécessaire que le MJSIP,
l’ATFP et leurs partenaires conçoivent et mettent en œuvre des cadres nationaux communs pour les
qualifications, l’assurance qualité, la transparence et la responsabilisation, dans lesquels les
organismes de formation sectoriels, tels que l’AFMT et l’AVFA, ainsi que l’ensemble des acteurs
régionaux et locaux, puissent agir de manière autonome.
La participation active des acteurs régionaux et locaux à la conception et à la mise en œuvre des
politiques d’EFP et d’emploi est essentielle pour libérer le potentiel de développement économique,
social et de l’emploi des régions. En d’autres termes, les rôles et les responsabilités des différents
acteurs, notamment ceux des directions régionales de l’EFP et de l’emploi, les bureaux locaux de
l’ANETI et les partenaires sociaux, doivent également être redéfinis aux niveaux régional et local. Des
ressources, des approches et des outils adéquats sont nécessaires pour renforcer les capacités des
acteurs régionaux et permettre une gestion efficiente et efficace des nouvelles missions ainsi qu’un
suivi et une évaluation des politiques (voir, par exemple, ETF et MFPE, 2017).
Toutefois, l’une des principales conditions préalables au bon fonctionnement d’un système
décentralisé de gestion des politiques d’EFP et d’emploi est l’intégration de ces mêmes politiques
dans une réforme administrative globale et bien préparée à l’échelle du pays. Une telle réforme
supposerait de réduire les structures administratives actuelles, faibles et inefficaces – composées de
6 régions, 24 gouvernorats, 264 «délégations» ou districts et de nombreuses municipalités –, et de les
regrouper en unités autonomes plus importantes et potentiellement autosuffisantes. Cela nécessiterait
d’attribuer plus de responsabilités, mais aussi plus de ressources, aux administrations régionales et
locales. Cette réforme doit s’appuyer sur un plan national et sur une nouvelle législation qui définisse
la répartition des fonctions entre l’État, les gouvernorats, les districts et les municipalités dans le cadre
d’un futur système décentralisé, les ressources qui seront transférées par l’État et les différents impôts
locaux qui pourront être prélevés par les autorités régionales ou locales. Sans une assise financière
suffisante, la décentralisation restera lettre morte. À cet égard, la Tunisie peut s’inspirer d’autres pays,
tels que les pays d’Europe centrale qui ont rejoint l’UE en 2004 ou, plus récemment, l’Albanie. Ces
derniers ont en effet adopté un nouveau cadre juridique et modifié leurs structures administratives
pour renforcer la gouvernance locale.
En attendant, l’ATFP et les autres organismes d’EFP peuvent montrer la voie en pilotant de nouvelles
approches de gestion décentralisée de l’EFP, grâce aux projets financés par les bailleurs de fonds.
L’ATFP et les autres organismes d’EFP pourraient promouvoir activement la formation de réseaux
mobilisant toutes les parties prenantes concernées, afin d’identifier les besoins en compétences et de
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créer des partenariats pour l’emploi et les compétences aux niveaux régional et local. Les régions
sont encouragées à planifier leurs propres actions en partant de l’identification préalable des besoins
en compétences et en formation d’une région ou d’un gouvernorat donné, ou dans un secteur
d’activité donné (par exemple, le tourisme à Médenine).
Parmi les approches innovantes qui visent à améliorer le développement et l’utilisation du capital
humain dans les régions et qui sont déjà mises en œuvre par des projets de bailleurs de fonds, on
peut citer:

la formation d’un partenariat durable, ou «plateforme de dialogue public-privé», impliquant les
parties prenantes concernées dans chaque gouvernorat;
une analyse et un dialogue structurés sur les besoins et le potentiel de développement du secteur



privé dans chaque région;
l’élaboration de plans d’action pour le développement des secteurs et des domaines concernés;
le financement, avec l’aide de bailleurs de fonds, de projets de développement régional intégré
(adapté de GOPA, 2019); et
l’adaptation de la conception et de l’offre de formations et de programmes d’EFP en fonction des
besoins régionaux et en accord avec le niveau central, en mettant l’accent sur la participation des
employeurs (voir également ETF, 2017).
La population locale, les associations d’employeurs et de salariés et les employeurs individuels sont
des acteurs clés dans tous les aspects mentionnés ci-dessus. Conscients de l’importance de
promouvoir le progrès économique et social au niveau local, ils sont encouragés à participer aux
analyses des besoins en matière d’activité économique, de marché du travail et de compétences,
ainsi qu’à contribuer à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des politiques de formation. La
formation initiale des jeunes joue un rôle tout aussi important que l’éducation de la deuxième chance,
la mise à niveau des compétences et les mesures de reconversion pour les adultes. Dans ce
contexte, une édition antérieure du Rapport mondial de suivi sur l’éducation pour tous 2012 (Walther,
2011) souligne l’importance du renforcement des compétences recherchées dans le secteur informel,
qui est très développé en Tunisie.
Dans le sillage du décret de 2019, il convient de renforcer l’autonomie des prestataires d’EFP, qui
sont eux-mêmes gérés par des conseils scolaires compétents et collaborent avec les acteurs
concernés dans la région. Des efforts supplémentaires pourraient être déployés pour transformer
certains établissements de formation en centres d’excellence investis de missions d’intérêt national ou
sectoriel supplémentaires et éventuellement financés conjointement avec le secteur privé.
L’octroi d’une plus grande autonomie aux acteurs régionaux et aux prestataires d’EFP devra
s’accompagner de cadres nationaux fonctionnels garantissant la qualité et la responsabilisation ainsi
qu’une utilisation efficace des fonds publics. Ces cadres comprennent typiquement des qualifications
et/ou des programmes (programmes-cadres) d’assurance qualité qui ont été approuvés par des
organismes nationaux ou des organes sectoriels et auxquels l’offre d’EFP sera adaptée. Divers autres
mécanismes d’assurance de la qualité, comme les autoévaluations ou les inspections des prestataires
d’EFP, devraient être mis en place pour fixer les normes de qualité de l’offre d’EFP et pour
encourager les prestataires d’EFP à se développer et à s’améliorer en permanence. Ces mécanismes
pourraient, par exemple, consister à lier partiellement le financement de l’EFP aux résultats obtenus
en matière de rétention et de compétences des étudiants.
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... un système de suivi et d’évaluation pour évaluer les progrès et éclairer
l’élaboration des politiques
En outre, pour permettre le suivi et l’évaluation du système au niveau national, les prestataires d’EFP
et les acteurs régionaux devraient présenter des rapports réguliers sur les progrès réalisés par rapport
à divers indicateurs fixés au niveau national, ce qui nécessiterait de mettre en place un certain
nombre d’outils et de lignes directrices de gestion. Parmi ces outils pourrait figurer un système
d’information de gestion complet en matière d’EFP pour aider les échelons régionaux et nationaux à
suivre les processus et les résultats des prestataires autonomes et, plus généralement, à concevoir et
à planifier les politiques d’EFP. Les données respectives devraient être utilisées pour déterminer, par
exemple, le nombre d’inscriptions, l’effectif et les qualifications du personnel, l’achat d’équipement et
de matériel ou encore le nombre de places d’hébergement.
Si le MJSIP et ses partenaires dirigent la révision des modalités de gouvernance et de financement de
l’EFP, l’adhésion aux réformes proposées sera d’autant plus forte que les acteurs concernés auront
été consultés en amont. Un processus de dialogue à grande échelle mobilisant de multiples acteurs
devra être mis en place, ce qui nécessitera des efforts importants en matière de supervision et de
planification stratégique ainsi que des compétences techniques, juridiques et de communication, mais
aussi et surtout des ressources humaines et financières au sein du MJSIP, de l’ATFP et de leurs
interlocuteurs. Les éventuels changements apportés aux dispositifs de gouvernance et de
financement devront se traduire par des modifications législatives. Il est recommandé aux acteurs
tunisiens d’adopter une approche plus globale pour la révision du cadre juridique de la formation
professionnelle initiale et continue, y compris de la législation de base et du droit dérivé. La nouvelle
législation devrait prévoir un modèle de financement qui vienne renforcer les nouveaux dispositifs de
gouvernance et qui favorise l’éducation et la formation dans une perspective d’apprentissage tout au
long de la vie.
Une démarche aussi ambitieuse ne peut pas s’accomplir du jour au lendemain. Même si tous les
acteurs acceptaient et utilisaient les outils et les capacités de gestion appropriés, il faudrait des
années pour préparer et implanter les nouvelles dispositions. Les nouveaux dispositifs nécessitent un
soutien de l’ensemble du spectre politique, une feuille de route claire, un appui financier et technique
ainsi qu’un suivi étroit s’inscrivant dans un cycle constant de conception, de mise en œuvre,
d’évaluation et de refonte des politiques.
3.2 Les systèmes de développement des compétences en Tunisie et le
manque de cohérence interne ou de qualité de l’offre
La faiblesse des compétences de base entrave la poursuite de l’apprentissage et la
maîtrise des professions plus qualifiées
Comme mentionné à la section 2.4, les principaux sujets de préoccupation dans le système éducatif
tunisien sont la faible qualité, et notamment le faible niveau des compétences de base, et le problème
de la rétention des apprenants jusqu’à la fin de l’enseignement secondaire. Lors du test PISA 2015,
pas moins de 71,6 % des élèves de 15 ans ont ainsi obtenu de mauvais résultats en compréhension
de la lecture et cette proportion atteint 74,8 % en mathématiques. Or, ces compétences de base sont
considérées comme essentielles sur la plupart des marchés du travail actuels. Les problèmes liés à la
maîtrise de ces compétences de base et aux expériences négatives vécues en milieu scolaire
empêchent souvent les jeunes de poursuivre leur apprentissage. En 2019, plus d’un tiers (37,1 %) des
jeunes âgés de 18 à 24 ans avaient quitté l’école avant d’avoir terminé leurs études secondaires (INS,
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 59



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EFT; voir également le graphique 5). Dans ce contexte, l’éducation de la deuxième chance revêt une
importance cruciale. Conscients de cette réalité, UK Aid, l’AFD et l’Unicef, entre autres, soutiennent
l’amélioration de l’éducation de la deuxième chance.
Les programmes d’EFP, le matériel pédagogique et les compétences des
enseignants posent problème
Bien qu’il soit potentiellement plus facile pour les diplômés de l’EFP d’exercer une activité économique
rémunérée que pour les diplômés universitaires, un grand nombre de diplômés ne possèdent toujours
pas les compétences pratiques, professionnelles et entrepreneuriales nécessaires. L’acquisition de
ces compétences pourrait les rendre plus facilement employables et leur donner les moyens
d’occuper des emplois plus qualifiés ou de créer leur propre entreprise. À cet égard, les qualifications
proposées, les programmes d’études, le matériel d’enseignement et d’apprentissage, les
compétences des enseignants et l’orientation pratique de l’EFP sont des enjeux importants.
Swisscontact met en œuvre, avec d’autres organismes, un programme financé par la Direction du
développement et de la coopération suisse visant à améliorer l’employabilité des jeunes ainsi que la
qualité, la pertinence et l’attrait de la formation professionnelle continue.
L’enquête de l’ETF menée auprès des directeurs et des enseignants permet de mieux comprendre les
conditions qui règnent dans les centres de formation (ETF, 2019). Environ 80 % des enseignants
ayant répondu à l’enquête de l’ETF ont déclaré que pour la planification de leurs cours, ils
s’appuyaient sur les documents des programmes nationaux, mais aussi sur leur connaissance des
besoins des employeurs. Les enseignants participent également activement à l’élaboration et à la
mise en place de leurs propres outils d’évaluation. Par ailleurs, près des deux tiers des enseignants
interrogés ont estimé que la plupart des classes et des élèves n’avaient souvent pas accès aux
ressources nécessaires à l’apprentissage, telles que des manuels scolaires, des outils et équipements
modernes, des consommables, du matériel informatique et des logiciels, Internet et d’autres supports
et ressources pédagogiques (ibid., p. 4).
De même, plus des deux tiers des directeurs de centres de formation ont évoqué les contraintes
suivantes: «matériel pédagogique inadéquat; manque de formateurs qualifiés et/ou performants, de
personnel de soutien; manque de compétences pédagogiques pour les étudiants ayant des besoins
spéciaux; pénurie ou insuffisance de matériel de bibliothèque; manque d’instructeurs pour la formation
pratique, conjugués à une pénurie d’ordinateurs et/ou de logiciels pédagogiques» (ibid., p. 4).
Les faibles niveaux de formation initiale et continue des formateurs pèsent sur la
prestation d’une formation professionnelle moderne
Il est largement admis que le développement professionnel continu des directeurs et des enseignants,
ainsi que les compétences techniques et pédagogiques nécessaires, sont «vitales pour améliorer
l’enseignement et l’apprentissage» (ibid., p. 1). Les directeurs de centres de formation, les
enseignants et les autres membres du personnel sont les principaux acteurs du changement. En tant
que tels, ils doivent être préparés à mettre en œuvre les changements nécessaires au niveau
institutionnel. Tous les aspects du développement scolaire et du processus pédagogique sont
concernés par le besoin de changement: adaptation des programmes, développement des ressources
d’enseignement, d’apprentissage et d’évaluation, introduction de nouvelles technologies, dialogue et
collaboration avec les parties prenantes locales (notamment les employeurs) et services d’orientation
professionnelle.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 60



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Seuls environ 40 % des enseignants ont bénéficié d’un cursus initial intégrant une formation
pédagogique, tandis que 36 % d’entre eux ont suivi une autre formation pédagogique (ibid., p. 2).
21 % des enseignants seulement ont déclaré avoir participé à un programme de développement
professionnel continu (DPC) axé sur leur propre spécialité professionnelle ou sectorielle. Le même
pourcentage a déclaré avoir participé à un programme de DPC dispensé dans les locaux de
l’employeur ou proposé par l’entreprise elle-même (ibid., p. 4).
Conformément à la loi nº 2008-10 du 11 février 2008, le DPC constitue une composante majeure du
système national de développement des ressources humaines. Les responsabilités des principaux
acteurs sont définies dans plusieurs lois et directives. Toutefois, ce cadre existant «ne fait pas du DPC
une obligation ou un droit pour les enseignants, pas plus qu’il n’intègre le DPC dans l’évolution de
carrière. Plusieurs déclarations politiques abordent la question du DPC pour les formateurs
professionnels» (ibid.). Le MFPE est officiellement chargé de coordonner les agences, de valider leurs
programmes et de fixer leur budget, y compris en ce qui concerne le DPC des enseignants des
établissements de formation professionnelle. Mais, à l’heure actuelle, «il n’existe pas encore de
déclaration politique faisant autorité qui guide les améliorations ou les réformes, ni de plan d’action»
qui fixe des objectifs, des normes de qualité et des priorités nationales ou sectorielles en matière de
formation des enseignants (ibid.). La mise en œuvre est également freinée par «la lenteur et la
complexité des procédures administratives au niveau central et par l’absence d’un leadership régional
fort porté par les directions régionales de l’emploi et de la formation professionnelle» (ibid., p. 5).
Le CENAFFIF est le fournisseur principal de DPC pour les enseignants d’établissements
professionnels. Il est difficile de savoir si le CENAFFIF est suffisamment proactif et réactif pour
développer des programmes de DPC qui répondent aux besoins changeants des formateurs et des
directeurs d’établissements professionnels, notamment en ce qui concerne les nouvelles technologies
et les compétences de gestion. Le rapport de l’ETF indique qu’«il n’est pas certain que l’offre de
développement professionnel continu soit régulièrement mise à jour et pertinente pour les besoins des
établissements». Les points suivants semblent indiquer un manque de réactivité:
Le CENAFFIF ne dispose pas d’une analyse récente des besoins des centres de formation.
Le financement, l’élaboration des programmes, le suivi, l’évaluation et la réalisation des
formations sont en grande partie contrôlés par le CENAFFIF et d’autres agences nationales, ce
qui rend difficile pour les établissements et les employeurs d’avoir une influence sur l’offre de
formation.
Les résultats d’apprentissage et la qualité de l’enseignement des prestataires de formation ne
sont pas évalués de manière efficace. De ce fait, aucune pression n’est exercée pour utiliser le
DPC pour améliorer les performances (ibid., p. 3).
Selon le CENAFFIF, 1 100 formateurs professionnels ont participé à l’un des trois différents
programmes de DPC au cours des 12 mois ayant précédé l’enquête de l’ETF. Cependant, aucune
statistique n’a été publiée sur le nombre de participants à chaque programme de formation, le lieu, la
durée de la formation et le programme d’apprentissage des formateurs. Environ 60 % des formateurs
déclarent que l’absence d’offres pertinentes et d’incitations suffisantes les dissuade de participer aux
programmes de DPC, ce qui pose un problème grave sur le plan de la réforme. Près de 50 % d’entre
eux affirment ne pas bénéficier d’un soutien fort de la part de leur centre de formation. En outre, le
DPC n’est pas conçu pour préparer les enseignants à assumer des responsabilités supplémentaires
ou particulières, telles que le mentorat, l’élaboration de programmes d’études ou encore le
développement de ressources. Les données semblent également indiquer que les enseignants
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 61



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participant aux programmes de DPC et travaillant dans les régions du sud et du centre du pays ont
obtenu moins d’heures de DPC que leurs homologues des régions du nord et du Grand Tunis (ibid., p. 4).
Des programmes de formation alternatifs existent, mais leur mise en œuvre
necessite des ameliorations
Compte tenu des conditions scolaires sous-optimales pour le développement de compétences
pertinentes, la question de l’intégration de la formation en milieu professionnel (FmP) dans les
systèmes de formation des compétences de l’EFP (mais aussi dans l’enseignement supérieur) mérite
une attention particulière. L’ETF définit la formation en milieu professionnel comme «l’apprentissage
réalisé dans un environnement professionnel réel grâce à la participation au processus de travail, que
les apprenants soient jeunes, étudiants, chômeurs ou salariés et qu’ils soient rémunérés ou non»
(ETF, 2013, p. 4).
Parmi les systèmes de formation en milieu professionnel les plus répandus, la Tunisie distingue la
formation en alternance, les stages et les apprentissages. La principale différence tient au statut de
l’étudiant. En formation en alternance, le stagiaire possède le statut d’étudiant inscrit dans un centre
de formation. Dans le cadre d’un stage, l’étudiant est résident dans un centre de formation et effectue
de courtes périodes de stage au sein d’une entreprise. Dans ce cas, le stagiaire se voit accorder un
statut similaire à celui de la formation en alternance. L’apprenti signe un contrat et devient salarié de
l’entreprise. En parallèle, il suit une formation complémentaire dans une école professionnelle, un
centre de formation ou un établissement d’enseignement supérieur. En revanche, les apprentis qui
s’inscrivent dans un établissement d’enseignement secondaire ou supérieur et qui effectuent
simplement des périodes de stage ou de formation en alternance en entreprise ne sont pas salariés.
La probabilité d’être embauché par l’entreprise à la fin de la période de formation est généralement
plus élevée pour les apprentis, en raison de l’intensité de la formation en entreprise et des
compétences pratiques et professionnelles acquises.
La formation en alternance est considérée comme une bonne alternative aux études à temps plein en
centre de formation. En effet, elle aide les étudiants à se familiariser avec la culture du travail et avec
les technologies utilisées par les entreprises, à se lancer dans des projets concrets et à acquérir des
compétences pratiques. L’investissement dans ce système repose sur l’idée d’investir dans les
compétences futures. Cependant, malgré les accords de partenariat conclus avec les entreprises, la
formation en alternance demeure peu développée en Tunisie. Les étudiants ont parfois du mal à
obtenir des places de stage en entreprise. Les secteurs qui offrent des conditions de travail moins
attrayantes, comme l’industrie du cuir, proposent généralement plus de places de formation et les
jeunes trouvent plus facilement un emploi dans ces filières, parfois même avant d’avoir achevé leur
programme d’EFP (Chelbi, 2017).
Avant la crise de la COVID-19, le secteur textile et le tourisme enregistraient des signaux positifs de
reprise. Il y a dix ans, le secteur textile était en déclin: les matériaux et les équipements étaient
tombés en désuétude et les investissements avaient chuté. Mais avec la reprise du secteur, les
investissements avaient repris. Des tendances similaires étaient observées dans l’industrie du
tourisme. Compte tenu du rôle important que la formation en alternance peut jouer dans l’acquisition
des compétences nécessaires des futurs salariés, de nouveaux partenariats ont été développés avec
les entreprises. Cette démarche a débouché sur la signature d’accords avec des centres de formation,
l’organisation de stages, l’attribution de mentors en entreprise et la rémunération du travail des
étudiants (Ferchichi, 2019). La récente crise de la COVID-19 est venue mettre un coup d’arrêt à ces
évolutions positives. Les conséquences pourraient être dramatiques pour le système de formation en
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 62



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alternance, car les secteurs économiques, en particulier le tourisme, sont confrontés à une
surabondance d’effectifs et de demandeurs d’emploi et à une insuffisance de recettes/visiteurs.
En ce qui concerne la répartition des formations dans le système de diplômes de l’ATFP, la formation
en alternance représente un peu plus de 80 % des étudiants, suivie du modèle résidentiel, avec une
période de stage en entreprise (13 %), et de la formation en apprentissage (6 %). L’apprentissage
sans diplôme suppose, par définition, une formation à 100 % sur le lieu de travail (Chelbi, 2017, p. 6).
En ce qui concerne les apprentissages, il convient de distinguer la formation diplômante des autres
types de formation, qui rassemblent le plus grand nombre d’apprentis, à savoir l’apprentissage F0, qui
ne prévoit pas de formation en établissement, et l’apprentissage F4, qui comprend 4 heures de cours
par semaine dans un centre.
Les parties prenantes remettent en cause le chiffre de 80 % de participation à la formation en
alternance. En effet, la formation en alternance présente deux problèmes: la rotation actuelle des
cours entre le centre de formation et l’entreprise et le nombre d’heures passé en entreprise, qui est
généralement inférieur au temps minimum nécessaire pour permettre aux apprenants d’acquérir les
compétences. Les matières générales, telles que les langues, les compétences mathématiques ou les
aspects théoriques qui accompagnent les matières techniques, sont enseignées dans un centre de
formation. Les compétences pratiques devraient être acquises au sein de l’entreprise, suivant un plan
structuré, puis validées par le centre et par l’entreprise. Un nombre important d’apprenants ne devrait
pas être comptabilisé comme étant en formation en entreprise, ce type de formation n’étant ni
structuré ni contrôlé efficacement. En conséquence, le nombre réel de personnes en formation
d’alternance en Tunisie est bien inférieur à 80 %, même si le chiffre précis n’est pas connu.
D’après l’enquête de l’ETF, la plupart des enseignants de l’enseignement professionnel en Tunisie
accordent une grande importance à l’apprentissage par la pratique. Parmi les enseignants interrogés,
70 % ont déclaré que leurs élèves participaient à «au moins 10 % de leur apprentissage dans le cadre
de stages» et que «les interactions directes avec les employeurs et les salariés [sont] peu fréquentes
pour 76 % des étudiants» (ETF, 2019, p. 2).
Le cadre juridique du système d’EFP (loi nº 2008-10 du 11 février 2008) définit la formation en milieu
professionnel comme la norme et la formation en mode résidentiel comme l’exception. Plus
récemment, plusieurs règlements ont été adoptés pour préciser les modalités de la formation sur le
lieu de travail dans le cadre de programmes de formation en alternance ou d’apprentissage. Ces
règlements définissent notamment le statut du stagiaire, les indemnités qui lui sont accordées et la
couverture sociale dont il bénéficie, le contrat régissant la formation ainsi que le suivi.
Depuis le lancement du programme MANFORME, les employeurs du secteur privé sont associés à la
gouvernance de la formation initiale et continue. En revanche, l’Union générale tunisienne du travail
ne participe à l’EFP que depuis la signature du Contrat social tripartite en 2013. Toutefois, à ce jour,
les deux partenaires sociaux n’ont toujours pas réussi à jouer pleinement le rôle qui leur a été attribué.
C’est aussi pour cette raison que la Stratégie nationale de réforme de l’EFP 2016-2020 prévoit des
mesures visant à renforcer les organisations des partenaires sociaux. Le document de réforme met
l’accent sur les partenariats public-privé plutôt que sur la formation en milieu professionnel. Mais il se
fixait aussi un objectif précis: faire en sorte qu’au moins 10 % de tous les étudiants soient en
apprentissage à partir de 2016.
Parmi les défis actuels liés au financement de la formation en milieu professionnel, on peut citer le
manque de rémunération pour les tuteurs et les stagiaires, l’obligation pour les stagiaires de prendre
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 63



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en charge leurs propres frais de déplacement et d’hébergement, ou l’absence de dispositions
spécifiques pour le secteur agricole. On observe également un manque d’incitations qui permettraient
d’encourager les organisations professionnelles et syndicales à jouer un rôle actif dans la formation en
milieu professionnel.
Les contraintes et les défis qui se posent à la formation en milieu professionnel peuvent être
regroupés en cinq domaines.
Le premier domaine concerne les différents enjeux de gouvernance et de financement. Il est
anormal que, dans le cadre du régime d’apprentissage F0, aucune formation complémentaire ne
soit dispensée dans un centre. De plus, l’utilisation du chèque formation dans sa forme actuelle
pose problème et nécessite une révision du dispositif. Enfin, la gouvernance des centres publics
de l’ATFP, qui s’est détériorée depuis la révolution de 2011 avec la suppression des conseils
opérationnels, pose problème.
Le deuxième domaine concerne les formateurs et les conseillers en apprentissage des centres de
formation, qui sont de plus en plus réticents à l’idée de se rendre en entreprise pour suivre les
jeunes. En effet, outre le problème du faible remboursement des déplacements professionnels,
c’est le statut de ces personnels qui pose question, car le nombre d’heures consacré au suivi des
étudiants n’est plus suffisant. En partie à cause de cela, on observe un niveau élevé
d’absentéisme chez les apprenants sur le lieu de travail. On constate également un taux
d’abandon important chez les jeunes qui ne suivent pas un parcours d’apprentissage structuré.
Le troisième enjeu est la communication, domaine dans lequel les centres n’ont pas engagé
d’efforts particuliers et où le contrôle exercé par les organismes publics s’est avéré peu efficace.
Cela concerne en particulier la communication des centres sur des profils ou des programmes qui
ne sont plus proposés aujourd’hui, ce qui explique en partie la baisse des inscriptions. De plus,
les centres ne communiquent pas bien et n’expliquent pas suffisamment aux jeunes les différents
débouchés et métiers, et ils ne les incitent pas à s’inscrire dans des formations.
Le quatrième domaine concerne les entreprises et l’absence de tuteurs formés, à même
d’instruire et de superviser les stagiaires. Les organisations professionnelles et syndicales ne sont
pas suffisamment structurées et ne disposent pas de personnes spécifiquement chargées des
ressources humaines et de la formation.
Enfin, la question de la mobilité doit être abordée sous deux angles: celui de la mobilité entre
régions et celui de la mobilité entre pays. Le problème de la mobilité régionale est
particulièrement aigu lorsque les apprenants sont obligés de suivre une formation dans une
entreprise implantée loin de leur centre d’inscription. Le second problème soulève la question de
la reconnaissance des diplômes. Cependant, la Tunisie a récemment abordé cette question grâce
à la signature d’accords de co-certification (Chelbi, 2017).
Le OIT accompagne la Tunisie avec une action d’analyse et d’accompagnement visant à renforcer le
mode de formation par apprentissage dans le cadre du projet « Rendre les compétences Visibles »,
qui se termine en juin 2021. Une note stratégique ainsi que des lignes directrices ont été conçues et
en cours de validation, en plus d’un diagnostic sur la formation par apprentissage dans les
gouvernorats de Béja, Jendouba, Siliana et le Kef
33.
33 wcmstest4_186509.pdf (skillsforemployment.org) and RCV - Rendre les compétences visibles : améliorer
l'orientation professionnelle, l'apprentissage et la reconnaissance des compétences en Tunisie (ilo.org)
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 64




Page 65
Recommandations quant aux mesures à prendre
Amélioration de la cohérence interne ou de la qualité de l’offre d’EFP grâce ...
... au renforcement des capacités et de l’autonomie des opérateurs de formation
Le renforcement de l’autonomie des centres de formation, dans des cadres fixés au niveau national et
avec le soutien de partenaires, pourrait éventuellement permettre d’accroître la pertinence et la qualité
de l’offre d’EFP. Les autorités, les agences, les directions régionales, les centres de formation
professionnelle et leurs partenaires locaux pourraient pratiquer de nouvelles formes de coopération et
d’autorité, grâce à un cadre juridique de l’EFP révisé intégrant la gouvernance et le financement dans
un contexte décentralisé et dans des cadres nationaux de certifications, d’assurance qualité et de
responsabilisation (communication de données). Même avec le cadre juridique existant, la Tunisie
pourrait prendre de nouvelles mesures pour mettre en œuvre l’autonomie des écoles d’EFP, en
déléguant davantage de responsabilités à la direction, aux conseils des centres de formation ainsi
qu’à leurs partenaires, et en trouvant des moyens pragmatiques d’encourager l’esprit d’entreprise. Les
acteurs locaux pourraient être chargés de participer aux décisions clés concernant le choix de leurs
offres de formation, le recrutement et la rémunération (supplémentaire) du personnel, la gestion des
affaires du centre de formation (de la commercialisation de ses formations aux ressources
d’enseignement et d’apprentissage, en passant par les inscriptions et l’élaboration de programmes
intégrant la FMP), les activités d’orientation professionnelle, la signature d’accords avec des
entreprises, la conclusion d’autres contrats (par exemple pour la location de locaux, la fabrication de
produits ou la fourniture de services pour les populations locales), ou encore l’élaboration et
l’utilisation du budget. Les partenaires sociaux, les étudiants et les représentants des familles peuvent
apporter une contribution utile à la gestion et au développement des centres de formation.
Le rôle des directeurs et des enseignants, avec leurs partenaires économiques, doit être renforcé en
ce qui concerne le développement des cursus et de l’enseignement. Les centres de formation des
enseignants pourraient soutenir et coordonner les enseignants afin de les aider à élaborer, d’une
manière collaborative, des supports pédagogiques actualisés. Les pratiques d’évaluation au niveau
des centres de formation devraient également être renforcées.
En diversifiant les sources de financement (État, région/municipalité, employeur, ressources de
l’établissement), les centres de formation pourraient être mis en capacité de faire l’acquisition de
matériel et de consommables modernes. En outre, les centres de formation devraient être équipés de
matériel, de logiciels et de connexions internet appropriés, et les enseignants devraient être formés à
l’utilisation des TIC dans la conception des cours et dans l’apprentissage en classe. Ces actions
aideraient également les enseignants à développer des tâches d’apprentissage plus différenciées et à
utiliser l’évaluation formative pour mieux accompagner l’enseignement et l’apprentissage. Les
enseignants et les experts pédagogiques pourraient collaborer pour élaborer et partager supports
pédagogiques et manuels scolaires.
... au au développement professionnel continu des enseignants et des formateurs d’EFP
Le MJSIP, les différentes institutions et les parties prenantes devraient travailler ensemble pour définir
des stratégies de développement professionnel initial et continu des enseignants et des formateurs,
améliorer le cadre normatif, fixer des objectifs pour le DPC des enseignants professionnels dans le
cadre de la stratégie nationale de 2025 pour l’enseignement professionnel, et pour définir un plan
d’action réalisable. Le CENAFFIF, éventuellement en collaboration avec d’autres prestataires
professionnels de DPC, pourrait revoir la méthodologie de ses programmes de DPC et, le cas
échéant, introduire des méthodologies modernes et variées. Il est nécessaire de développer des outils
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 65



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pour identifier les besoins et les mécanismes de financement de la formation technique des
enseignants (ou de la formation des formateurs). Le CENAFFIF aurait beaucoup à gagner à travailler
en partenariat avec l’industrie et avec d’autres partenaires pour fournir un DPC professionnel
spécialisé permettant d’améliorer les connaissances et compétences professionnelles et les pratiques
de travail.
Dans le cadre de la réforme globale de la gouvernance de l’EFP, il convient de mettre les directions
régionales en capacité d’exercer pleinement leur rôle décisionnel. Une meilleure coordination entre les
structures régionales et les centres de formation et leurs partenaires est essentielle pour fournir le
matériel et les ressources humaines nécessaires. Les centres de formation ont un rôle important à
jouer dans l’analyse de leurs besoins de formation et dans le partage et l’utilisation de ces
informations pour la planification et la coordination du DPC. Le MFPE est également invité à examiner
ou à réviser la rémunération, la formation, la reconnaissance et le statut offerts aux enseignants
exerçant des fonctions de mentorat dans les centres de formation. Le mentorat peut être utilisé de
manière plus générale comme une forme de DPC pour les formateurs et les directeurs d’EFP. Les
possibilités de DPC devraient être liées à des améliorations de l’enseignement, qui sont identifiées
grâce aux retours d’information, et à l’évolution de carrière. Dans la mesure du possible, le DPC
devrait être conçu pour préparer les formateurs et les directeurs à assumer des responsabilités
accrues et à obtenir une reconnaissance à travers la promotion. Des registres nationaux agrégés de
la participation au DPC pourraient être publiés (ETF, 2019).
... au développement et à l’amélioration des dispositifs de formation en milieu professionnel
(FmP)
Les données montrent que, plutôt que de rester sur l’ancien modèle consistant à étudier d’abord et à
travailler ensuite, l’intégration de la FmP dans les entreprises, en tant qu’élément structurel de l’offre
de formation, permet de faciliter la transition entre l’école et le travail (OCDE, 2010, ETF, 2013, entre
autres). Parmi les secteurs dans lesquels la FmP est considérée comme présentant un certain
potentiel de développement en Tunisie, on peut citer l’aéronautique, les composants automobiles,
l’informatique, le textile et l’habillement, le tourisme ou l’artisanat. En revanche, l’agriculture et le
Brevet de technicien professionnel, secteurs dans lesquels la FmP pose un problème majeur,
nécessitent des mesures de soutien nationales ciblées.
La formation dans le cadre du programme d’apprentissage F0 devrait être complétée par une
formation dans un établissement. L’amélioration du fonctionnement de l’apprentissage non diplômant
devrait passer par la mise en place d’une formation supplémentaire dans des centres de formation
privés. Ainsi, une entreprise qui embauche un apprenti pourrait l’inscrire dans un établissement privé
afin qu’il puisse suivre une formation complémentaire. Les centres privés ont la capacité de prendre
en charge des formations complémentaires théoriques ou centrées sur des compétences non
techniques. Les établissements de formation privés pourraient donc créer des liens étroits avec les
entreprises, contribuant ainsi à la promotion de la culture de l’apprentissage et de leurs propres
formations. L’établissement de partenariats aurait un impact fort sur le développement de ce système
d’apprentissage, qui est en perte de vitesse en Tunisie depuis quelques années. Le succès d’une telle
approche passe par un mécanisme de financement flexible qui assure les activités des opérateurs
privés.
À l’avenir, l’octroi de chèques de formation pourrait être subordonné au fait que l’entreprise exprime la
nécessité et la volonté de prendre en charge le bénéficiaire pendant la formation.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 66



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Les comités de partenariat des centres de formation devraient retrouver leur pleine capacité de
fonctionnement. Le nouveau décret sur l’autonomie de l’EFP de mars 2019 aborde certes cette
question, mais il ne va peut-être pas assez loin dans l’autonomie accordée aux prestataires d’EFP,
comme nous l’avons vu plus haut. La participation des professionnels du secteur privé à la gestion
des centres de formation est essentielle pour rapprocher les mondes de l’éducation et du travail et
permettre le développement de la formation en milieu professionnel.
Le statut, la réduction de la charge d’enseignement et le remboursement des frais de déplacement
sont des éléments essentiels pour les formateurs et les conseillers en apprentissage des centres de
formation qui remplissent des missions en lien avec la formation en milieu professionnel. Parmi ces
missions figurent la planification minutieuse de périodes de formation en entreprise s’inscrivant de
préférence dans le cadre du programme d’EFP, la sélection des étudiants en collaboration avec les
entreprises et un contact régulier avec les entreprises, afin d’assurer notamment le suivi des étudiants
et les évaluations conjointes des progrès accomplis. La réalisation de ces tâches prend beaucoup de
temps et devrait donc être prise en compte de manière adéquate dans le temps de travail des
enseignants.
Les efforts mis en œuvre devraient se poursuivre pour assurer la disponibilité de tuteurs formés, qui
soient à même d’instruire et de superviser les stagiaires en entreprise. Afin de mettre en place des
unités de soutien à la formation sur le lieu de travail, les organisations patronales et syndicales
pourraient bénéficier de certains financements, ce qui leur permettrait de jouer leur rôle de supervision
des membres et de se poser en intermédiaire crédible et représentatif auprès du MJSIP. Il s’agit d’un
aspect très important de la réforme qui a été bloqué. Les unités de soutien à la formation pourraient
être rémunérées pour les activités de formation continue qu’elles organisent.
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4. CONCLUSION
Sans un environnement plus propice à la croissance des entreprises et à la création d’emplois, la
situation de sous-utilisation du potentiel du capital humain de la Tunisie risque de se perpétuer. Il
existe un large consensus national autour du fait que la poursuite de l’intégration de la Tunisie dans
les chaînes de valeur mondiales pourrait contribuer à la génération d’activités à plus forte valeur
ajoutée et à la création d’emplois pour une main-d’œuvre plus qualifiée. Des politiques devraient être
mises en place pour adapter l’environnement des affaires et moderniser les entreprises afin de les
aider à se développer. En même temps, des emplois plus nombreux et de meilleure qualité exigent
des candidats possédant les aptitudes et les compétences professionnelles appropriées. Les
compétences et les qualifications professionnelles sont un pilier essentiel du stock de capital humain
de la Tunisie. C’est pourquoi, la modernisation de l’EFP initiaux et continus doit faire l’objet d’une
attention politique accrue.
La prise en compte, d’une manière soutenue et systématique, des défis et des recommandations évoqués
ci-dessus peut avoir un impact, à moyen et long terme, sur l’efficience et l’efficacité du système de
formation professionnelle initiale et continue. En effet, cela permettra non seulement d’améliorer la
pertinence et la qualité des résultats obtenus en ce qui concerne les compétences employables des jeunes
et des adultes, mais aussi de mieux utiliser les investissements publics, privés et des bailleurs de fonds. La
participation d’un plus grand nombre de personnes aux programmes de développement des compétences,
la prévention des abandons précoces et la formation des travailleurs aux compétences demandées sur le
marché du travail permettront de renforcer le potentiel de ressources humaines de la Tunisie, d’améliorer
la transition de l’école vers le travail et de contribuer à la réalisation des objectifs du pays en matière de
développement économique, de marché du travail et d’inclusion sociale.
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POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 70





Page 71
ANNEXE 1. RÉSUMÉ DES RECOMMANDATIONS
Le problème du
développement
et de l’utilisation
du capital
humain
Recommandations
No.
Action
Description
R.1
Améliorer l’anticipation
des compétences et
l’orientation
professionnelle afin
d’obtenir de meilleurs
résultats sur le marché
du travail
Enjeu nº 1
Manque de
cohérence
externe ou de
pertinence du
système
d’enseignement
et de formation
professionnels
(EFP)
R.2
Mettre en place de
nouveaux dispositifs de
gouvernance
cohérents multi-
niveaux et multi-
acteurs, aux niveaux
central, sectoriel,
régional et local
R.3
Mettre en place un
système de suivi et
d’évaluation pour
évaluer les progrès et
éclairer l’élaboration
des politiques
Enjeu nº 2
Manque de
cohérence interne
ou de qualité du
système d’EFP
R.4
Renforcer la capacité
et l’autonomie des
opérateurs d’EFP




Les données démographiques et sociales et les
données relatives au marché du travail et aux
compétences devraient être recueillies de manière plus
systématique aux niveaux national, sectoriel et
régional. Ces données pourraient servir de base à
l’établissement d’un plan national de restructuration du
réseau de prestataires et de programmes publics
d’EFP. La mise en place de possibilités d’information
professionnelle (y compris en ligne), d’un conseil et
d’une orientation professionnelle dans les écoles, et en
dehors de celles-ci, aiderait les jeunes à déterminer
leurs futurs choix éducatifs et professionnels.
Il convient de mettre en œuvre les dispositions du
Contrat social et d’encourager la conclusion de
différents partenariats public-privé. La création
d’alliances sectorielles pour les compétences bipartites
permettrait d’identifier les compétences et qualifications
pertinentes. Le rôle du ministère chargé de l’EFP dans
la conception de la stratégie globale, la planification et
la gestion du système, le suivi et l’évaluation, devrait
être renforcé. Tous les organismes de formation et
centres d’EFP nationaux ou régionaux devraient
fonctionner dans des cadres nationaux communs pour
les qualifications, l’assurance qualité et la
responsabilisation (communication de données). Les
instances régionales et locales devraient se voir
accorder davantage de responsabilités, et l’autonomie
des prestataires d’EFP devrait être renforcée en
coopération avec leurs partenaires locaux.
Les prestataires d’EFP devraient établir des rapports
réguliers sur les progrès réalisés par rapport à un
ensemble d’indicateurs convenus au niveau national,
ce qui nécessiterait des outils et des directives de
gestion spécifiques. Parmi ces outils pourrait figurer un
système d’information de gestion complet en matière
d’EFP qui permettrait de mieux suivre les processus et
les résultats des prestataires autonomes d’EFP et de
mieux planifier les inscriptions en EFP, les
investissements en personnel et en installations, etc.
Les gestionnaires de centres de formation et leurs
partenaires pourraient être chargés de participer aux
décisions clés concernant le choix de leur offre de
formation, le recrutement et la rémunération
(supplémentaire) du personnel, la gestion du centre de
formation (y compris la commercialisation de ses
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 71





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Le problème du
développement
et de l’utilisation
du capital
humain
Recommandations
No.
Action
Description
propres formations, les inscriptions, l’élaboration des
programmes, l’intégration de la formation en milieu
professionnel et la conception des ressources
d’enseignement et d’apprentissage), les activités
d’orientation professionnelle, la conclusion d’accords
avec les entreprises, la signature d’autres contrats (par
exemple, pour la location de locaux, la fabrication de
produits ou la fourniture de services pour la population
locale), ainsi que la génération et l’utilisation du budget.
Les partenaires sociaux, les étudiants et les
représentants des familles peuvent apporter une
contribution utile à la gestion et au développement des
centres de formation.
Le ministère en charge de l’EFP et les différentes
parties prenantes devraient travailler ensemble pour
convenir d’une stratégie de DPC, améliorer le cadre
normatif des enseignants et des formateurs de l’EFP,
fixer des objectifs dans le cadre de la stratégie
nationale de 2025 pour l’enseignement professionnel,
et pour définir un plan d’action viable. Le Centre
national de formation de formateurs et d’ingénierie de
formation (CENAFFIF) pourrait revoir ses programmes,
éventuellement en collaboration avec des acteurs
industriels et d’autres prestataires professionnels de
DPC, et introduire des méthodologies modernes et
variées. Il est nécessaire de développer des outils pour
identifier les besoins et les mécanismes de
financement de la formation technique des
enseignants. Une meilleure coordination entre les
structures régionales et les centres de formation et
leurs partenaires est essentielle pour fournir le matériel
et les ressources humaines nécessaires. Les centres
de formation ont un rôle important à jouer dans
l’analyse de leurs besoins de formation, et ils devraient
partager et utiliser ces informations pour la planification
et la coordination du DPC.
La formation dans le cadre du programme
d’apprentissage F0 devrait être complétée par une
formation en établissement. Les employeurs pourraient
également nouer des liens étroits avec des centres de
formation privés proposant des formations théoriques
complémentaires ou centrées sur des compétences
non techniques. Le succès d’une telle approche passe
par un mécanisme de financement flexible qui assure
les activités des opérateurs privés.
L’octroi de chèques de formation pourrait être
subordonné à l’engagement de l’entreprise à prendre
en charge le stagiaire pendant sa formation. La
participation de professionnels du secteur privé à la



R.5
Améliorer le
développement
professionnel continu
(DPC) des enseignants
et formateurs de l’EFP
R.6
Étendre et améliorer
les dispositifs de
formation en milieu
professionnel (FmP)
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 72



Page 73
Le problème du
développement
et de l’utilisation
du capital
humain
Recommandations
No.
Action
Description
gestion des centres de formation, la réduction de la
charge d’enseignement et le remboursement des frais
de déplacement des coordinateurs scolaires sont des
éléments essentiels du développement de la FMP. Les
périodes de formation en entreprise devraient être
soigneusement planifiées et devraient, dans l’idéal,
faire partie intégrante du programme d’EFP. Les
tuteurs formés sont encouragés à continuer de former
les stagiaires en entreprise. Les unités de soutien à la
formation sur le lieu de travail pourraient être
rémunérées pour les activités de formation continue
qu’elles organisent.
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 73




Page 74
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 74





Page 75
ANNEXE 2. LE SYSTÈME D’ÉDUCATION ET DE
FORMATION EN TUNISIE
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 75



Page 76
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Page 77
ABRÉVIATIONS
AFD
AFMT
PAMT
ANETI
ATFP
AVFA
BTP
BTS
PAC
CC
Agence française de développement
Agence de formation dans les métiers du tourisme
Politiques actives du marché du travail
Agence nationale pour l’emploi et le travail Indépendant
Agence tunisienne de la formation professionnelle
Agence de la vulgarisation et de la formation agricoles
Brevet de technicien professionnel (BTP)
Brevet de technicien supérieur
Certificat d’aptitude professionnelle
Certificat de compétence
CENAFFIF
Centre national de formation de formateurs et d’ingénerie de formation
CNFCPP
Centre national de formation continue et de promotion professionnelle
DPC
BERD
ETF
UE
PIB
GEMM
IACE
TIC
OIT
FMI
INS
IRADA
CITE
ITCEQ
EFT
Développement professionnel continu
Banque européenne pour la reconstruction et le développement
Fondation européenne pour la formation
Union européenne
Produit intérieur brut
Projet UE/ETF sur la Gouvernance pour l’employabilité dans la Méditerranée
Institut Arabe des chefs d’entreprises
Technologies de l’information et de la communication
Organisation internationale du travail
Fonds monétaire international
Institut national de la statistique
Initiative régionale d’appui au développement économique durable financée par
l’UE
Classification internationale type de l’éducation
Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives
Enquête sur les forces de travail
MANFORME Programme de mise à niveau de la formation professionnelle et de l’emploi
MDICI
Ministère du développement, de l’investissement et de la coopération internationale
MESRS
Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique
MFPE
MJSIP
MPME
NEET
(ex) Ministère de la formation professionnelle et de l’emploi
Ministère de la jeunesse, du sport et de l’intégration professionnelle
Micro, petites et moyennes entreprises (MPME)
Not in Education, Employment, or Training [(jeunes) ne travaillant pas, ne suivant
pas d’études ou de formation]
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Page 78
OCDE
ONEQ
PAFIP
PEFESE
PISA
TND
ISU
Organisation de coopération et de développement économiques
Observatoire national de l’emploi et des qualifications
Programme d’appui à la formation et à l’Insertion Professionnelle
Programme d’appui au système de l’éducation/formation – Enseignement supérieur
et employabilité des diplômés
Programme international (de l’OCDE) pour le suivi des acquis des élèves
Dinar tunisien
Institut de statistiques de l’UNESCO
PNUD
Programme des Nations unies pour le développement
UNESCO
Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture
UNECA
Commission économique des Nations unies pour l’Afrique
EFP
FmP
Enseignement et formation professionnels
Formation en milieu professionnel
POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN - TUNISIA | 78





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