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VOLUME II
Les partenariats public-privé en
Tunisie: Analyse des cadres
Les partenariats public-privé en
juridique, institutionnel et
Tunisie: Analyse des cadres
budgétaire
juridique et institutionnel
VERSION PRÉLIMINAIRE : MARS 2015
VERSION PRÉLIMINAIRE : AOUT 2015







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Les partenariats public-privé (PPP) peuvent jouer un rôle important dans la croissance
inclusive et durable de la Tunisie si les bonnes conditions sont en place. Le présent rapport,
composé de trois volumes, part de l’analyse des cadres juridique, institutionnel et budgétaire
existants afin d’émettre des recommandations visant à améliorer les pratiques, les structures,
et les capacités régissant les PPP. Il assistera notamment les autorités tunisiennes à
opérationnaliser sa future loi sur les PPP en améliorant la transparence, l'efficience et
l'efficacité des dépenses publiques, et aidera le gouvernement à atteindre ses objectifs de
politique publique. Ce rapport a été réalisé par deux équipes au sein de l’OCDE – la Division de
l’Investissement et la Division du Budget et des Dépenses Publiques – à la demande des
autorités tunisiennes dans le contexte du Partenariat de Deauville.
Les opinions exprimées et les arguments avancés dans le présent rapport sont ceux des
auteurs et sont publiées pour stimuler le débat sur un large éventail de questions sur
lesquelles travaille l'OCDE. Tous commentaires à ce rapport sont bienvenus et peuvent être
adressés à: carole.biau@oecd.org; selim.guedouar@oecd.org; ihssane.loudiyi@oecd.org.
Pour plus d’informations sur le travail de l’OCDE sur l’investissement et la budgétisation
veuillez consulter : www.oecd.org/fr/investissement; www.oecd.org/fr/gov/budgetisation
© OCDE 2015
Cet ouvrage est publié sous la responsabilité du Secrétaire général de l’OCDE. Les opinions et les
interprétations exprimées ne reflètent pas nécessairement les vues de l’OCDE ou des gouvernements
de ses pays membres.
Ce document et toute carte qu’il peut comprendre sont sans préjudice du statut de tout territoire, de la
souveraineté s’exerçant sur ce dernier, du tracé des frontières et limites internationales, et du nom de
tout territoire, ville ou région.




























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Les partenariats public-privé en
Tunisie: Analyse du cadre
institutionnel
www.oecd.org/fr/investissement
TABLE DES MATIÈRES
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TABLE DES MATIÈRES ........................................................................................................................3
SIGLES ET ABRÉVIATIONS ................................................................................................................5
INTRODUCTION ....................................................................................................................................9
CHAPITRE 1 : REVUE DU CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL EN TUNISIE................12
Le Cadre juridique pour les projets PPP en Tunisie : introduction .....................................................12
Le Cadre institutionnel pour les projets PPP en Tunisie : introduction ..............................................18
Recommandations principales du chapitre .........................................................................................22
CHAPITRE 2 : PREMIÈRE PHASE - ÉLABORATION DE PROJET ................................................23
Conceptualisation et planification.......................................................................................................25
Évaluation approfondie et choix du mode de passation ......................................................................27
Liens entre la planification et le processus budgétaire .......................................................................36
Renforcement des capacités et fonds de préparation de projet ...........................................................38
Financement des projets PPP – rôle de la Caisse des Dépôts et des Consignations ...........................41
Recommandations principales du chapitre .........................................................................................42
CHAPITRE 3 : DEUXIÈME PHASE – APPEL D’OFFRES ET OCTROI DU CONTRAT ................43
Préparation du dossier d’appel d’offres ..............................................................................................46
Élaboration et négociation du contrat .................................................................................................58
Recommandations principales du chapitre .........................................................................................65
CHAPITRE 4 : TROISIÈME PHASE - EXÉCUTION ET CLOTURE DU PROJET ..........................66
Suivi des PPP pendant la phase d’exécution du projet .......................................................................66
Renégociations éventuelles du contrat ................................................................................................68
Clôture des contrats PPP .....................................................................................................................73
Recommandations principales du chapitre .........................................................................................74
CHAPITRE 5 : STRUCTURE ET CAPACITÉS DES UNITÉS DES PPP ...........................................75
Rôle des unités des PPP ......................................................................................................................75
Coordination interministérielle dans le cadre de projets PPP .............................................................83
Nécessité d’élaboration d’un « pipeline » de projets PPP ..................................................................84
Renforcer les institutions au niveau des régions .................................................................................85
Recommandations principales du chapitre .........................................................................................87
GLOSSAIRE ..........................................................................................................................................93
ANNEXE 1: PROJET DE LOI RELATIF AUX CONTRATS DE PARTENARIAT PUBLICS PRIVÉS,
VERSION DE SEPTEMBRE 2014 .......................................................................................................97

ANNEXE 2 : L'OPTIMISATION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE ....................................................109
BIBLIOGRAPHIE ...............................................................................................................................112
3












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4


Page 5
ACN
AE
AELE
AFIN
APAL
ARABOSAI
ASFL
AT
BAD
BEI
BERD
BNDES
BOT
CABRI
CCP
CDC
CDMT
CEPR
CET
CFG
CGSP
CGABE
CIRDI
CNUDCI
CPSL
CP
CSP
DAC
DBSA
DEPP
DGASGP
DGCPR
DGDP
DGGDPCF
DGES
DGI
DGPPP
SIGLES ET ABRÉVIATIONS
Assemblée nationale constituante
Autorisation d'engagement
Association européenne de libre-échange
l’Association pour la promotion de l’infrastructure nationale
Agence de Protection et d’Aménagement du Littoral
Organisation arabe des Institutions supérieures de contrôle des finances
publiques
African Legal Support Facility
(Facilité africaine de soutien juridique)
Approbation du Trésor
Banque africaine de développement
Banque européenne d’investissement
Banque européene pour la reconstruction et le développement
Brazilian Development Bank
(Banque nationale brésilienne de développement)
Build-Operate-Transfer
(Construction-exploitation-transfert)
Collaborative Africa Budget Reform Initiative
(Initiative concertée africaine sur la réforme budgétaire)
Code de la comptabilité publique
Caisse des Dépôts et des Consignations
Cadre des dépenses à moyen terme
Centre for Economic Policy Research
(Centre de recherche de politique économique)
Construction-exploitation-transfert
Contrôle général des finances
Comité du contrôle général des services publics
Comité général de l’administration du budget de l’État
Centre international pour le règlement des différends relatifs aux
investissements
Commission des Nations Unies pour le droit commercial international
Caisse des prêts et de soutien des collectivités locales
Crédits de paiements
Comparateur du secteur public
Development Co-operation Directorate
(Direction de la coopération pour le développement)
Development Bank of Southern Africa
(Banque de développement d'Afrique australe)
Direction des entreprises publiques et de la privatisation
Direction générale de l'audit et du suivi des grands projets
Direction générale de la comptabilité publique et du recouvrement
Direction générale des dépenses publiques
Direction générale de la gestion de la dette publique et de la coopération
financière
Direction générale de l'évaluation et du suivi
Direction générale des infrastructures
Direction générale des PPP
5

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DGRE
DGRP
DOE
DT
EPEC
EPNA
ERG
ESSF
EUR
FEMIP
FIT
FMI
GBO
GPOBA
GFP
HAICOP
HCCAF
IBP
IFC
IFRS
IFRIC
IIPDF
IPPF-NEPAD
INTOSAI
INS
IPSAS
ISC
LOB
MAPPP
MDCI
MED 5P
MOSPI
Direction générale des ressources et des équilibres
Direction générale de la rémunération publique
Department of Energy
(Ministère de l'Énergie)
Dinars tunisiens
European PPP Expertise Centre
(Centre européen d’expertise PPP)
Établissements publics à caractère non administratif
Efficiency and Reform Group
(Groupe de l’Efficience et de la Réforme)
l’Équipe spéciale inter-institutions des statistiques des finances
Euro
Facilité euro-méditerranéenne d’investissement et de partenariat
Feed in tariffs
(Tariffes « feed-in »)
Fonds monétaire international
Gestion budgétaire/du budget par objectifs
Global Partnership on Output-Based Aid
(Partenariat mondial pour l’aide basée sur les résultats)
Gestion des finances publiques
Haute Instance de la Commande Publique
Haut Comité de Contrôle Administratif et Financier

International Budget Partnership

(Partenariat budgétaire international)
International Financial Corporation
(Société financière internationale)
International Financial Reporting Standards
(Normes internationales d'information financière)
International Financial Reporting Interpretations Committee
(Comité d’interprétation des normes internationales d’information financière)
India Infrastructure Project Development Fund
(Fond de développement de projets d’infrastructures de l’Inde)
New Partnership for Africa's Development Infrastructure Project Preparation
Facility

(Fonds de préparation des projets d’infrastructures du Nouveau Partenariat
pour le Développement de l'Afrique)
International Organisation of Supreme Audit Institutions
(Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des
finances publiques)
Institut National de la Statistique
International Public Sector Accounting Standards
(Normes comptables internationales du secteur public)
Institut supérieur de contrôle
Loi organique du budget
Mission d’Appui au PPP
Ministère du Développement, de l’investissement, et de la coopération
Internationale
Préparation de projets en partneriat public-privé dans les pays du sud et de
l'est de la Méditerranée
Ministry of Statistics and Programme Implementation
(Ministère de la statistique et de la mise en œuvre de programmes)
6
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MOSF
MPT
MdF
MEF
MFSP
NAO
OCDE
OGC
NPD
ONAS
OMB
OMMP
ONMP
ONU
P-FRAM
PAD
PAP
PDMF
PBB
PBP
PEFA
PFI
PF2
PIB
PIC
PIMAC
PME
PND
PPA
PPIAF
PPP
PPP-IRC
PSPI
REIPPP
SCN
Ministère de la Stratégie et des Finances
Marché Public Traditionnel
Ministère des Finances
Ministère de l’économie et des finances

Manuel de Statistiques de Finances Publiques
National Audit Office
(Office national d’audit)
Organisation de coopération et de développement économiques
Office of Government Commerce
(Bureau du commerce du gouvernement)
National Development Plan
(Plan national de développement)
Office National de l'Assainissement
Office of Management and Budget
(Bureau central de gestion budgétaire)
Office de la marine marchande et des ports
Observatoire National des Marchés Publics
Organisation des nations unies
PPP Fiscal Risk Assessment Model
(Modèle d’Évaluation des Risques Budgétaires des PPP)
Programmation annuelle des dépenses
Projets annuels de performance
Project Development and Monitoring Facility
(Fonds de développement et de suivi de projets)
Performance-Based Budgeting
(Budgétisation sur base de performance/d’objectifs)
Performance based procurement
(Prestation basée sur la performance)
Public Expenditure and Financial Accountability
Programme de dépenses publiques et responsabilité financière
Private Finance Initiative
(Initiative de financement privé)
Private Finance 2
(Financement Privé 2)
Produit intérieur brut
Plan d’investissement communal
Public and Private Infrastructure Investment Management Centre
(Centre de gestion des investissements d’infrastrcuture publics et privés)
Petites et moyennes entreprises
Plan national de développement
Power Purchase Agreement
(Contrat d’achat d’énergie)

Public-Private Infrastructure Advisory Facility
(Fonds de conseil en infrastructures public privé)
Partenariats public-privé
PPP Infrastructure Resource Centre
(Centre de ressources d’infrastructures PPP)
Programme d'investissement du secteur public
Renewable Energy Independent Power Producer Procurement Programme
(Programme de développement des énergies renouvelables sud-africain)
Système de comptabilité nationale
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SEC
SFP
SONEDE
SPV
STEG
UE
UEMOA
USC
VAN
Système européen des comptes
Statistiques de finances publiques
Société nationale d'exploitation et de distribution des eaux
Special Purpose Vehicle
(Société de projet)
Société tunisienne de l'électricité et du gaz
Union européenne
Union économique et monétaire ouest-africaine
Unité de suivi des concessions
Valeur actualisée nette
8
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INTRODUCTION
La participation accrue des acteurs privés dans le secteur des infrastructures et dans la gestion des
services publics impose de nouvelles contraintes aux organismes publics et responsabilise de multiples
acteurs. En raison de cette multiplicité d’acteurs et de parties prenantes, ainsi que de la complexité et du
transfert de risques que comporte la transition vers une participation plus importante du secteur privé
dans les services publics, il est indispensable d’établir des cadres juridique et institutionnel très précis.
La clarté et l’efficacité du cadre juridique régissant la participation privée (lois et décrets relatifs aux
PPP au sens large y compris les contrats de partenariats et les concessions) sont d’une importance
évidente aussi bien pour attirer les investisseurs, que pour garantir le succès dans la durée des projets
d’investissement dans les infrastructures.
Les autorités chargées de la passation des marchés, les Unités des PPP, l’autorité budgétaire
centrale, l’institution supérieure de contrôle des finances publiques et les autorités de tutelle sectorielles
doivent toutes avoir des mandats appropriés et clairs ainsi que les ressources adéquates pour garantir la
fiabilité de la procédure de passation de marché et une coordination efficace et transparente entre
différentes entités responsables et intervenantes. Il est également important que la population soit
consultée dès les premières étapes de tout projet, et qu’elle prenne connaissance des coûts, avantages et
risques relatifs des PPP par rapport aux modes traditionnels de passation de marché. Par ailleurs, en ce
qui concerne l’application de la politique budgétaire de l’État, les pouvoirs publics doivent veiller à ce
que l’enveloppe budgétaire globale allouée aux investissements et aux projets d’infrastructure (qu’ils
prennent la forme de contrats PPP ou de marchés publics plus traditionnels) soit optimisée.
Au vu de ces éléments, ce rapport analyse les dimensions législatives et institutionnelles prévues
pour les PPP en Tunisie, s’appuyant sur les phases principales du cycle de vie d’un projet. Différents
organismes et instituts de recherche identifient les principales phases des procédures de PPP et de
passation de marchés de manière légèrement distincte – par exemple le FMI énumère les phases
suivantes : (i) lancement, (ii) évaluation, (iii) sélection, (iv) conception, (v) exécution, et (vi) évaluation
ex-post du projet; alors que UKAID se limite à l’élaboration de projet, la passation de marché, la mise
en exécution (y compris le suivi des performances), puis enfin en phase de maturité (qui comprend le
transfert du PPP et la sortie ou la clôture du contrat). Néanmoins, les grandes lignes de ces étapes se
recoupent
trois phases principales qui requièrent chacune des capacités
largement, selon
institutionnelles bien précises:
Dans la première phase, concernant essentiellement la planification et l’élaboration du projet,
les autorités publiques doivent : identifier les projets prioritaires en fonction des besoins
nationaux et régionaux ; pour chaque projet identifié, justifier l’intérêt économique que
représente la délégation (et dans quelles conditions) du service public concerné à un partenaire
privé ; et réaliser un ensemble d’études préalables justifiant l’équilibre économique du projet
ainsi qu’un taux de rendement interne permettant d’attirer des soumissionnaires de qualité.
Ceci requiert des capacités d’évaluation des différents types de contrat (PPP ou autre), et de
calcul de l’optimisation de la dépense publique ainsi que de la viabilité financière du projet.
La sélection d’une équipe pour le suivi du projet, l’identification de consultants experts, et la
définition d’un calendrier (voir l’exemple du calendrier australien, présenté ci-dessous) sont
autant d’éléments essentiels à mettre en place avant d’organiser la procédure d’appel d’offres.
9

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La deuxième phase concerne les étapes précises du processus d’appel d’offres et de passation
de marché : identification et évaluation initiale, puis déroulement de la procédure de
contractualisation, y compris l’octroi du projet et la conclusion du contrat. Ces fonctions
nécessitent une expertise en matière de gestion des transactions, de suivi des appels d’offre, et
d’analyse comparative poussée des offres reçues.
Enfin, la troisième phase comprend l’exécution et la clôture du contrat PPP conformément aux
obligations du partenaire privé en termes de services à fournir qui doivent être clairement
définis. Cette phase requiert des capacités de conseil technique, de suivi de projets, de
vérification des résultats, et plus largement de gestion de contrats (y compris pour faire face à
d’éventuels besoins de renégociation). Elle se clôture normalement par le transfert de l’actif
en question au gouvernement.
Le schéma ci-dessous illustre ces trois grandes étapes, y compris les principales agences
impliquées.
Graphique 0.1. Principales étapes de préparation et de mise en exécution des projets d’infrastructure en
mode PPP
Source : OCDE 2013
Les PPP impliquent différentes disciplines et expertises (juridique, comptable, financière,
technique, etc.) et nécessitent une coopération solide entre les institutions impliquées dans leur
développement. Les schémas institutionnels et juridiques visant à gérer et encadrer ces projets, lors de
leurs différentes phases, différent d’un pays à l’autre. À la lumière de cette diversité d’expériences
internationales, et à partir du régime tunisien existant et prévu relatif aux PPP (y compris le projet de loi
PPP, dans sa version de septembre 2014 et les projets de décret d’application), ce volume vise à
examiner le rôle et les interactions entre les différents acteurs impliqués tout au long du cycle de vie des
projets d’infrastructure réalisés en mode PPP en Tunisie (au sens large). Le Graphique 2.2 résume ce
panorama d’acteurs dans le contexte tunisien actuel. Quant aux cadres institutionnels et juridiques des
marchés publics et des PPP, ils ne seront traités qu’à titre de comparaison.
10
UnitéPPP Agences régulatrices sectoriellesAutorités de la concurrence Supervision et approbation par les autorités chargées des procédures de PPP Phase 1: identification du projet et lancement des procédures d’appel d’offre Phase 2: Octroi, négociation & préparation du contrat Phase 3: Suivi de la gestion de la performance de l’opérateur privé Mise en opération du projetOctroi du PPP



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Graphique 0.2. Panorama tunisien des institutions publiques intervenant dans les projets d’infrastructure
et de services
Source : OCDE 2015
L’introduction présente tout d’abord : (i) les grandes lignes du cadre juridique pour les PPP en
Tunisie et (ii) le cadre institutionnel prévu pour le suivi des projets d’équipement, y compris sous forme
de PPP, à savoir les institutions assurant l’expertise technique mais aussi la bonne gouvernance et la
transparence des trois étapes. Les chapitres qui suivent s’intéressent ensuite aux capacités et interactions
des organes impliqués dans chacune de ces trois phases, ainsi que les dispositifs juridiques y afférant.
Enfin, le dernier chapitre de ce volume analyse plus en détail les capacités et fonctions des Unités PPP à
l’échelle internationale. Les recommandations pratiques découlant de cette analyse, s’appuyant sur les
exemples de bonne pratique à l’échelle internationale et visant à informer le gouvernement Tunisien
dans la mise en œuvre d’un cadre juridique et institutionnel robuste pour les PPP, sont résumées dans le
volume introductif de cette étude.
Il est à noter que les intervenants et les procédures à suivre lors des différentes étapes des projets
PPP sont essentiellement décrits dans ce rapport sur la base de l’actuel projet de loi sur les PPP (version
de septembre 2014, voir Annexe I), son projet de décret d’application de 2013 ainsi que dans la loi de
2008 sur les concessions. Le cadre juridique pour les PPP étant encore en phase de finalisation et
d’approbation par les autorités tunisiennes, l’analyse ne s’attarde pas sur des articles de loi précis. Ce
chapitre vise surtout à mettre en lumière les avantages et les contraintes possibles qui pourraient
apparaître une fois la loi PPP approuvée. Lors de la mise en œuvre concrète du régime PPP (au sens
large), il faudra, par ailleurs, tenir compte des spécificités de chaque mode contractuel (concession et
contrats de partenariat), et de leurs différences dans la pratique.
11
1-Identification du projet (plan de développement) 2 -Évaluation du projet 3 -Sélection du mode de passation 4 –Passation, attribution et exécution du projet 5 -Clôture du projetMDCITous les niveaux du gouvernement (ministères, gouvernorats, municipalités, etc.)Comité spécial au sein de la chambre des députés du parlementMinistère des financesAutorité contractanteUnité de suivi des concessions (USC)Etc.Ministère des financesAutorité contractanteUnité de suivi des concessionsHaute instance pour la commande publique (HAICOP)USCCommission spéciale créée pour chaque projetConseil de la concurrence (souhaitée)USCAutorités contractantesCommission spéciale créée pour chaque projetEtc. 4 –a Élaboration du contrat PPP 4 –b Budgétisation du projet PPP 4 –c Suivi et Exécution du projet 4 –d Régulation et audit USCMinistère de tutelle/autorité contractanteMinistère des financesMinistère de tutelle/autorité contractante USCMinistère de tutelle/autorité contractanteMinistère des financesProjet de partenariatCorps d’audit et de contrôleAutorité contractante Agences de régulation sectoriellesConseil de la concurrence



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CHAPITRE 1 : REVUE DU CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL EN TUNISIE
Le Cadre juridique pour les projets PPP en Tunisie : introduction
Un cadre général et une multiplicité de lois sectorielles
Le cadre juridique relatif aux PPP en Tunisie a une longue histoire (voir Volume I). Comme décrit
dans l’introduction, des lois sectorielles ont été appliquées afin de faciliter de grands projets de
concession et de partenariat, bien avant l’élaboration de lois génériques consacrant le cadre des
concessions ou des contrats de partenariat. Le premier secteur en Tunisie (et le seul à ce jour) à avoir
une législation sectorielle sur les contrats PPP est celui qui concerne les biens immatériels et l’économie
numérique. La loi d’orientation n° 2007-13 du 19 février 2007 relative à l’établissement de l’économie
numérique – avec ses nombreux décrets d’application – établit un cadre institutionnel spécifique de
suivi des conventions de PPP, qui reste toujours applicable mais qui sera abrogé par le projet de loi sur
les PPP. Par ailleurs, certaines lois sectorielles comportent des dispositions concernant la participation
du secteur privé (voir encadré 2.2). Ce cadre a connu beaucoup de limites dans sa mise en application,
par exemple : la non constitution du comité d’experts prévu dans le décret d’application de cette loi, qui
serait chargé notamment de l’évaluation des projets et du choix de leur mode de réalisation ; et
l’insuffisance des compétences en matière de modélisation économique, de structuration financière, et
d’élaboration juridique des contrats PPP, dans les structures institutionnelles dédiées à l’économie
numérique. L’ensemble des textes relatifs à l’économie numérique n’a donc eu qu’un impact modéré
sur le développement de projets PPP.
Ce contexte historique a produit un cadre juridique sectoriel non exhaustif, dispersé et relativement
limité. Certains textes sectoriels annoncent le principe de l’octroi des concessions mais sans préciser les
modes d’octroi, de suivi et d’exécution de ces contrats. Par ailleurs, certains textes ne traitent ni des
droits et des obligations, ni des garanties à fournir par les parties publiques et privées. En pratique, la
plupart des grands projets de concessions ont nécessité la mise en place de décrets spécifiques pour
règlementer leurs procédures de passation et d’attribution. Les autorités tunisiennes ont reconnu que le
cadre juridique était insuffisant pour promouvoir le développement des PPP. Elles ont débuté par
l’élaboration d’une loi-cadre sur les concessions (la loi n°2008-23 du 1er avril 2008, encadré 2.1). Cette
évolution juridique a été accompagnée par un changement du cadre institutionnel qui a marqué une
évolution en termes de pouvoirs, de garanties et de structures responsables des contrats de partenariat et
des concessions.
Encadré 1.1 Régime des concessions en Tunisie évolution de 2008 à 2013
L’instrument fondamental du cadre juridique régissant les concessions en Tunisie est la loi n°2008-23 du 1er avril
2008. Celle-ci avait pour but de :

Fournir un cadre juridique clair et exhaustif précisant les principes de base régissant les contrats de
concessions ;
Motiver les investisseurs privés et garantir la réussite des projets réalisés dans le cadre des
concessions ;
Unifier les concepts, les principes et les procédures appliqués dans le domaine des concessions ;
12

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S’appliquer dans des domaines pas expressément traités par les textes sectoriels ; et
Unifier les procédures de préparation et de suivi des dossiers relatifs aux projets réalisés sous forme
de concession.
Renforcer et compléter les textes existants tout en préservant les spécificités de chaque secteur, en
gardant les textes
sectoriels applicables d’une part, et en fournissant d’autre part un cadre général
régissant les différents aspects des concessions (définitions, principes de base, l’initiative de concéder,
procédures d’octroi, droits et obligations, mentions obligatoires
des contrats de concession, les biens
de la concession, le droit réel, etc.).
Sources : OCDE, 2012 et BERD, 2012 et 2013.
European Commission (2014). “Public procurement reform: the EU Single Market”. Available at :
http://ec.europa.eu/internal_market/publicprocurement/modernising_rules/reform_proposals/index_en.htm
L’article 43 de la loi n°2008-23 du 1er avril 2008 stipule que « les dispositions de la présente loi
s’appliquent à toutes les concessions sans préjudice des textes sectoriels en vigueur y afférents ».
Toutefois, malgré le souci de préserver les spécificités de chaque secteur, la référence à deux ensembles
de lois (générales et sectorielles) a accru la complexité et réduit la lisibilité du cadre juridique
notamment en créant des ambiguïtés par rapport à la durée des concessions dans différents secteurs.
Cette expérience illustre le risque des chevauchements avec les lois sectorielles, et il est d’ailleurs prévu
que certaines d’entre elles (par exemple concernant l’économie numérique) soient abrogées lors de
l’approbation du projet de loi relatif aux PPP.
L’ensemble du régime de 2008 relatif aux concessions n’a eu qu’un impact limité sur le
développement des projets de partenariat, en partie en raison de l’absence de mécanismes encourageant
les autorités publiques à procéder systématiquement à l’évaluation du projet pour le choix de son mode
de réalisation (concessions, contrats de partenariat, marchés publics). De plus l’intérêt pour le secteur
public de recourir aux contrats de type concession ou contrats de partenariat n’a pas été démontré dans
la majorité des secteurs. Le décret n° 2013-4631 modifiant et complétant le décret de 2010 et fixant les
conditions et procédures d’octroi des concessions, apporte davantage de clarté à cet ensemble juridique.
Il s’articule de manière efficace avec le projet de loi de 2012 relatif aux PPP. Ce processus de
rationalisation législative pourrait également être renforcé grâce à la mise en place de documents
contractuels normalisés, éventuellement mentionnés dans les instructions et directives sur la préparation
de projet à l’intention des entités publiques. Il serait également utile de préciser dans quelle mesure les
régimes relatifs aux contrats de partenariat et aux concessions s’articulent entre eux, et avec les
différentes dispositions sectorielles si celles-ci ne sont pas abrogées (voir l’encadré 2.2). Enfin, ce
processus devra également prendre en compte les activités des entreprises publiques ainsi que la
réglementation – y compris tarifaire – des marchés d’infrastructure (questions abordées brièvement
dans le chapitre introductif de ce volume).
Encadré 1.2. Lois sectorielles relatives aux PPP en Tunisie
Il existe en Tunisie un certain nombre de lois sectorielles antérieures au régime actuel comportant des
dispositions relatives aux PPP, qui sont toujours en vigueur et qui interviennent dans la structure et à la mise
en œuvre des PPP en Tunisie. Les secteurs suivants en sont des exemples :


La promotion des activités à haute valeur ajoutée basées sur les technologies de l’information et de la
communication : la loi d’orientation n° 2007-13 du 19 février 2007 relative à l’établissement de
l’économie numérique
Le financement, la réalisation et l’exploitation des ouvrages d’assainissement : la loi n° 93-41 du 19
13

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avril 1993 relative à l’office nationale de l’assainissement tel que modifiée et complétée par la loi n°
2004-70 du 2 aout 2004 et la loi n° 2007-35 du 4 juin 2007. Cette loi a servi à l’exploitation des
infrastructures d’assainissement tel que le projet en cours des stations d’épuration El ATTAR et EL
AALLEF.
La production d’électricité par les privés : le décret-loi n°62-8 du 3 avril 1962 portant création de la
STEG tel que modifié par la loi n° 70-58 du 2 décembre 1970 et complété par la loi n° 96-27 du 1 avril
1996. La centrale électrique de Rades est par exemple régie par ce cadre juridique. La loi n°12 du 11
mai 2015 relative à la pr
oduction d’électricité à partir des énergies renouvelables.
La réalisation et l’exploitation des aéroports sont régies par le code de l’aéronautique civile promulgué
par la loi n °99-58 du 29 juin 1999 et ses textes d’application ainsi que la loi n° 98-110 du 28 décembre
1998 relative à l’office de l’aviation civile et des aéroports et ses textes d’application. Ce cadre juridique
a permis la concession de la construction et de l’exploitation de l’aéroport d’Enfidha ainsi que de
l’exploitation de l’aéroport
de Monastir.
L’occupation du domaine public routier et les concessions relatives à la construction, l’exploitation et la
maintenance des autoroutes
: la loi n° 86-17 du 7 mars 1986 portant refonte de la législation relative au
domaine public routier de l’État.
Le transport public en commun : La loi n° 2004-33 du 19 avril2004 relative à l’organisation du transport
terrestre a permis l’exploitation par des privés des lignes de bus (TUT, TUS, etc.)
L’exploitation des zones d’activités économiques : la loi n° 92-81 du 3 aout 1992 portant création des
zones franches économiques tel que modifiée et complétée par la loi n°2001-76 du 17 juillet 2001.
Cette loi a notamment servi à la construction des zones économiques franches de Zarzis et de Bizerte.
L’exploitation du domaine public maritime : la loi n°95-73 du 24 juillet 1995 relative au domaine public
maritime telle que modifiée par la loi n° 2005-33 du 4 avril 2005. et la loi n° 95-72 du 24 juillet 1995
portant création d’une Agence de Protection et d’Aménagement du Littoral (APAL). Ceci a donné lieu à
plusieurs complexes de loisir et touristique, parcs aquatiques, ports de plaisance, etc.
L’exploitation du domaine public dans les ports est régie par le code des ports maritimes promulgué
par la loi n° 2009-48 du 8 juillet 2009, permettant les concessions pour la construction et la réparation
navale, la manutention, l’acconage, etc. Par ailleurs, la loi de 1998 relative à l’Office de la marine
marchande et des ports (OMMP) donne la possibilité à l’office de concéd
er certains services ou
l’exploitation de certains biens sans prévoir des règles et procédures spécifiques de passation de ces
concessions - cela avait pour conséquence la passation de gré à gré la plupart des concessions avant
la parution de la loi de 200
8 et de ses textes d’application.1
Le Décret n° 2007-362 du 19 février 2007, déterminant les conditions et modalités de l’occupation
temporaire et de la concession du service public dans le domaine public municipal.
L’aménagement, la réalisation et l’exploitation des parcs urbains : la loi n° 2005-90 du 3 octobre 2005
relative aux parcs urbains, encadrant par exemple les concessions des parcs urbains de Ibel Mayana
au gouvernorat de Manouba, de Lassouda au gouvernorat de Sidi Bouzid, ou d’Ellamsiet à Médenine.
Le domaine public forestier : Le code forestier tel que modifié par la loi n° 88-20 du 13 avril 1988, la loi
n° 2001-28 du 19 mars 2001 et la loi n° 2005-13 du 26 janvier 2005, qui ont permis des projets éco
touristiques, le développement sylvo-pastora
l, l’aménagement du territoire de chasse, la gestion des
pépinières et la production de plans forestiers.










Ciblage de la modalité de contrat (marchés publics, concessions, contrats de partenariat) dans le
cadre juridique
Il existe, d’un pays à l’autre de nombreuses approches à la définition d’un contrat PPP. En effet, la
participation du secteur privé aux infrastructures peut intervenir sous plusieurs formes allant d’une
14

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privatisation totale ou partielle (c’est-à-dire cession au secteur privé de parts ou d’actifs détenus par les
entreprises publiques) à la passation de marchés publics, qui peut ou non prendre la forme d’accords de
PPP. D’une manière générale, la principale distinction entre les partenariats public-privé et les formes
de passation de marchés publics traditionnels réside dans la répartition des risques (
voir la section
introductive)
. En raison de la diversité de définitions, il est essentiel que tout régime national visant à
encadrer la participation privée dans les infrastructures et les services publics définisse clairement et
différencie les principales catégories de contrat.
Comme le résume l’encadré 2.3, différents pays ont choisi d’établir des distinctions entre les
contrats de partenariat, les concessions, et les marchés publics. Les contrats de partenariat sont par
exemple traités comme une sous-catégorie des marchés publics par les nouvelles directives de l’Union
européenne, alors qu’ils sont placés dans la même catégorie que les concessions dans beaucoup de pays
africains (Botswana, Tanzanie…), ou encore qu’ils ne bénéficient pas d’une loi dédiée au Royaume Uni
(Régime juridique de
Common law où le type prévalant de PPP n’est classé ni dans les marchés publics
ni dans les concessions, mais est plutôt couvert par le « Private Finance Initiative » (PFI)). En Tunisie
les marchés publics resteront encadrés par un régime juridique distinct (résumé à l’encadré 2.4), tandis
que les contrats de partenariat et les concessions, au-delà de leurs lois cadres qui leur sont propres,
partageront certains décrets d’application ainsi que certaines structures institutionnelles (par exemple
l’Unité de suivi des concessions, qui serait la future Instance nationale des PPP). Cette fluidité peut
permettre de mieux traiter les cas où les concessions et les contrats de partenariat se recoupent, leur
différence principale provenant simplement de leur source de revenus. Il est à noter qu’il n’existe pas de
meilleures pratiques dans la matière, du moment que le cadre est prévisible et clair pour les
investisseurs autant que pour les autorités contractantes ; et qu’il veille à minimiser les chevauchements
des agences régulatrices, dans un souci d’efficacité institutionnelle.
15

Page 16
Encadré 1.3. Distinction entre régimes des partenariats, des concessions et des marchés publics :
Réformes européennes relatives à la distinction entre régimes des concessions et des marchés publics
Suite aux réformes de l’Union Européenne en matière de marchés publics (votées en janvier 2014 et adoptées
par le Conseil européen le mois suivant), il existe maintenant deux directives distinctes, relatives aux marchés
publics d’une part et aux concessions de l’autre.
Selon la Commission européenne, « les caractéristiques spécifiques des concessions par rapport aux marchés
publics justifient un ensemble dédié et plus souple des règles relatives à leur attribution ». Les concessions sont
généralement des contrats, complexes à long terme avec des implications financières lourdes qui exigent de la
souplesse
au cours de la procédure d'attribution afin d’assurer le meilleur résultat possible. Une législation
spécifique pour les concessions permet donc, selon la Commission, de distinguer entre les règles applicables aux
concessions et les règles plus détaillées applicables aux marchés publics, ce qui rendrait la directive relative aux
concessions plus simple à utiliser.
Ces nouvelles directives envisagent par ailleurs, à la différence cette fois du régime tunisien, de placer les
contrats de partenariat sous le régime des marchés publics et de traiter les concessions de manière séparée. Il
n’existe pas de meilleure pratique internationalement reconnue sur cette question, les trois schémas types ci-
dessous représentant les modalités les plus courantes (cas tunisien, européen, et de droit anglo-saxon).
Les états membres de l’UE devront transcrire ces nouvelles règles dans leur cadre juridique national avant avril
2016.
Graphique 1.3.1. Structures juridiques et institutionnelles pour les marchés publics, les contrats de
partenariat
et les concessions à l’international
Sources : OCDE, 2012 et BERD, 2012 et 2013.
European Commission (2014). “Public procurement reform: the EU Single Market”. Available at :
http://ec.europa.eu/internal_market/publicprocurement/modernising_rules/reform_proposals/index_en.htm
16
Participation publique-privée (modèle tunisien) Marchéspublics PPPs Concessions Participation publique-privée (modèle européen) Marchéspublics Concessions Contratsde partenariat Participation publique-privée (cas de nombreux pays africains) Marchéspublics Contratsde partenariat& Concessions
1
2
3


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La définition de la concession en Tunisie est assez large, couvrant non seulement la concession «
traditionnelle » (la délégation d’un service public) mais aussi les BOT (construction, exploitation et
transfert). La concession est donc considérée aussi bien comme une opération de délégation de la
gestion d’un service public, que comme une opération d’utilisation et d’exploitation du domaine ou des
outillages publics. Elle peut également porter sur les constructions et les ouvrages nécessaires à
l'exécution de l’objet du contrat. L’affermage est lui aussi assimilé à une concession dans cette
définition large.
En raison des similarités, à certains égards, entre les contrats de partenariat et les concessions, le
régime tunisien prévoit un décret d’application (décret n°2014-1039 du 13 mars 2014) qui couvre aussi
bien les contrats de partenariat que les concessions, dans des sections différentes du texte ; les sections
relatives aux concessions ont d’ailleurs été approuvées en 2014, celles relatives aux contrats de
partenariat restant actuellement en attente. Ce décret d’application (de 2013) énonce de manière claire
le raisonnement et les objectifs de politique publique sous-tendant le choix entre les contrats de
partenariat et les concessions, en raison de leurs différentes formes de rémunération (sous la forme de
redevance de la part de l’État pour les contrats de partenariat, et auprès des usagers pour les
concessions). Toutefois le projet de loi relatif aux contrats de partenariat (loi PPP) autoriserait aussi la
rémunération directe de la part de l’autorité contractante (tout en excluant la délégation de gestion de
service public en soi), dans certains cas2. En effet selon l’actuel projet de loi PPP (voir Annexe), une
dérogation peut être accordée au partenaire privé en vue de fournir des services et de percevoir des
droits auprès des usagers pour son propre compte, à condition que cela n’affecte pas le bon
fonctionnement du service public.
Bien que les deux modalités de contrat soient surement, à l’avenir, gérées par une même unité
(l’Instance nationale des PPP, que préfigure l’unité de suivi des concessions), les autorités tunisiennes
prévoient donc que la future loi PPP existe en parallèle avec le régime actuel (y compris les décrets
d’application de 2013) relatif aux concessions. Les conditions d’évaluation préalable du projet varient
aussi entre les concessions et les contrats de partenariat. Le régime des marchés publics ainsi que celui
des concessions ne sont donc que brièvement abordés ici, afin de se focaliser plus précisément sur les
cadres juridique et institutionnel prévus pour les contrats de partenariat.
Encadré 1.4. Régime des marchés publics en Tunisie
L’instrument fondamental du cadre juridique régissant la passation des marchés publics en Tunisie est le décret
n°2014-1039 du 13 mars 2014 (qui remplace le décret n° 2002-3158 du 17 décembre 2002 et les décrets qui en
découlaient). Ce décret a été préparé dans le cadre du projet de réforme structurelle du système des marchés
publics réalisé en collaboration avec les principaux bailleurs de fonds notamment la Banque Mondiale et la
Banque Africaine de Développement (BAD), et ce en référence aux principaux standards et critères
internationaux dans ce domaine
notamment la méthodologie d’évaluation OCDE/DAC. Ce décret, exhaustif,
résume et remet à jour les bases du régime des marchés publics en Tunisie. Les objectifs de cette réforme sont
les suivants :

La consolidation des textes régissant les achats publics ;
Une révision du cadre juridique régissant les procédures de passation et d’exécution des marchés
publics ;
L’amélioration de l’efficacité dans les achats publics ;
Le développement de procédures souples et transparentes qui respectent les spécificités
nationales et qui s’inspirent des bonnes pratiques et des standards internationaux ;
La mise en place des règles de la bonne gouvernance dans le domaine de la passation et du
contrôle des marchés publics ; et



17

Page 18

L’instauration des règles d’éthique et d’intégrité dans le système des marchés publics.
En ce qui concerne les derniers points (gouvernance et intégrité), le Décret n° 2014-1039 du 13 mars 2014,
portant sur la réglementation des marchés publics, dispose que les commissions suivantes soient mises en place
afin d’assurer l’ouverture, l’évaluation et la proposition d’octroi des marchés: (i) une commission d’ouverture des
offres - commission permanente créée par l’acheteur public; et (ii) une commission d’évaluation des offres -
commission ad hoc créée par l’acheteur public, qui est chargée d’évaluer les offres et de présenter une
proposition d’attribution du marché.

Quant au choix de la méthodologie d’évaluation des offres, l’article 64 le place sous la responsabilité de l'acheteur
public lui-même et ce en se référant aux conditions fixées par les cahiers des charges et à un ensemble de
critères non discriminatoires liés à l'objet du marché. Par contre en ce qui concerne l’étape de négociation des
prix, l’acheteur public n’est pas habilité à négocier les prix sauf si la commission de contrôle des marchés
compétente l’y autorise et ce vers la baisse.
Sources : OCDE, 2012 et BERD, 2012 et 2013.
European Commission (2014). “Public procurement reform: the EU Single Market”. Available at :
http://ec.europa.eu/internal_market/publicprocurement/modernising_rules/reform_proposals/index_en.htm
Le Cadre institutionnel pour les projets PPP en Tunisie : introduction
Par rapport aux marchés publics, les PPP impliquent un transfert de la construction et de
l’exploitation du bien vers le partenaire privé, et engagent donc ces derniers sur des périodes plus
longues. Cela suppose un engagement et un suivi eux aussi plus soutenus de la part du partenaire public.
Étant donné la durée et la complexité de ces projets, qui ont notamment des implications budgétaires
importantes pour le pays, il est important d’inscrire dans un cadre clair les rôles institutionnels pour leur
gestion et leur suivi. Un certain nombre de compétences doivent être réunies afin d’assurer une dépense
publique optimale en ce qui concerne: la passation du marché d’un PPP ; la mise en œuvre du PPP
retenu ; les questions budgétaires ; et l’audit ainsi que le suivi des PPP. Ces rôles peuvent être assurés
dans le cadre de dispositifs institutionnels divers, mais il est important d’éviter toute confusion entre les
principales attributions de chaque acteur et d’assurer une répartition claire de leurs responsabilités.
Dans de nombreux pays en développement et émergents, les institutions les plus fréquemment
impliquées dans les procédures de passation des contrats de PPP comprennent: (i) des autorités
centrales d'achat, qui approuvent la passation de marché et/ou l’octroi du PPP par les autorités
contractantes, et qui centralisent et redirigent les appels d'offres et les soumissions y correspondant vers
les ministères de tutelle et les gouvernements locaux concernés ; et (ii) les autorités de recours, qui
traitent les plaintes et le règlement de différends avec les soumissionnaires.
Certains pays mettent également sur pied des entités chargées de veiller à la transparence des
processus de préparation et d’octroi de contrat, y compris pour ce qui concerne les PPP – en vue de
conseiller le gouvernement sur les réformes à mettre en place pour accroître leur efficacité. Enfin, en
plus de ces organismes centraux, le traitement des offres et l’octroi de contrat proprement dits sont
effectués par les entités situées dans les ministères de tutelle, ou parfois au sein des établissement et
entreprises publiques concernés (autorités contractantes). Ces dernières conservent la responsabilité
générale d’identifier, de développer, et de mettre en œuvre la gestion et le suivi de projets
d'infrastructure dans leurs domaines respectifs de compétence en s'appuyant sur les unités PPP (ou des
unités des concessions). L’appui de ces unités pourrait prendre la forme de conseil technique et/ou de
validation en cas d’avis conforme.
Le cadre institutionnel des PPP a évolué considérablement en Tunisie depuis la loi du 1er avril
2008 relative au régime des concessions, et relève actuellement de l’Unité de suivi des concessions
(USC):
18

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L’USC a été créée au sein de la Présidence du gouvernement par le décret 2013-4630 du 18
novembre 2013 pour remplacer la structure mise en place en 2008. L’USC est principalement
chargée d’apporter aux autorités publiques un appui à la préparation, à la passation et au suivi
des concessions, notamment en préparant des lignes directrices et des modèles de cahiers des
charges, en renforçant les capacités des fonctionnaires, et en encourageant les projets de
concession au niveau des régions
3. L’USC devrait précéder l’Instance nationale des PPP.
Celle-ci pourrait alléger les tâches incombant à l’administration, surtout lors de la préparation
de projet (OCDE 2014). L’USC compte actuellement un directeur général et une équipe de
cinq membres.
L’USC est appuyée par un comité interministériel, dont les six membres sont nommés tous les
trois ans par arrêté du chef du gouvernement. Il comprend entre autres des représentants du
ministère des Finances, de la banque centrale, du ministère du Développement de
l'investissement et de la coopération internationale, de la Haute instance de la commande
publique relevant de la Présidence du gouvernement, et un membre du comité représentant la
présidence du gouvernement. Le comité est présidé par le directeur de l’USC. Il est chargé
d’examiner tout projet relatif aux concessions en offrant l’appui nécessaire à l’USC pour
suivre l’ensemble des étapes d’octroi des concessions, de la réception des dossiers d’appel
d’offres jusqu’à la négociation du contrat, et ce répondant aux questions qui lui sont soumises
par le président de l’USC.
4 Ces questions peuvent couvrir : tous les documents soumis à
l’USC pour avis ; les consultations émanant des autorités publiques sur l'attribution des projets
et le respect des procédures ; et toute question relative à l'exécution des projets de concession.

Sous la législation actuelle, le ministère des Finances abrite également la Direction générale
des partenariats public-privé (DGPPP).
Son rôle consiste principalement à concilier l’aspect
financier des projets PPP avec la dépense publique, y compris les risques y afférant. La
DGPPP contribue également à l’élaboration de la législation applicable aux PPP, et à la
préparation et la négociation des projets de PPP.
Au sein du ministère des Finances se trouve la Direction générale d’audit et de suivi des
grands projets (DGASGP
, voir l’encadré 2.5). Cette dernière a de vastes prérogatives en ce
qui concerne la passation de marchés et le suivi des grands projets d’infrastructures. La
DGASP participe à la détermination du coût et des schémas de financement des projets dont la
réalisation et le financement sont à la charge du budget de l’État. Le
ministère du
Développement, de l’investissement, et de la coopération internationale
(MDCI) joue lui aussi
un rôle dans l’approbation des projets et le choix du mode de passation de marché (voir
deuxième chapitre de ce volume). Il existe aussi une direction dans le MDCI qui se charge du
suivi des grands projets, à savoir la Direction générale de l'évaluation et du suivi (DGES). La
DGES élabore la méthodologie et les instruments d’évaluation et du suivi des projets,
coordonne les travaux d’évaluation et de suivi des politiques et programmes, et en tire des
conclusions et des enseignements afin de les transmettre aux services concernés.
5
Avec le projet de loi sur les PPP, ce schéma institutionnel évoluera de manière significative au
cours des prochaines années. Pour l’heure le décret de création de l’USC prévoit uniquement que celle-
ci « appuie le gouvernement dans l’élaboration de sa stratégie en matière des PPP ». Il serait utile de
placer également la DGPPP, dépendant actuellement du Ministère des finances, au sein de l’Instance
nationale des PPP
(l’encadré 2.5 résume leurs fonctions respectives actuelles). En effet plusieurs pays
en développement qui avaient choisi d’établir deux instances séparées chargées des PPP (c’est le cas,
par exemple pour la Tanzanie, qui avait placé une unité dans le ministère des finances pour gérer les
risques budgétaires et l’évaluation financière des projets, et une autre au sein du premier ministère
19

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chargée de la promotion des projets et la communication avec les investisseurs) sont revenus sur ce
choix. Pour des raisons de clarification et de simplification de la procédure administrative, la Tanzanie a
ensuite fusionné en 2015 ces deux entités, au sein d’un « Centre national pour les PPP ». L’Instance
nationale pourrait aussi utilement entretenir des liens étroits avec (ou bien éventuellement comporter en
son sein) une unité chargée du suivi et de l’audit des projets
(voir plus bas), ainsi qu’un observatoire des
PPP qui serait chargé de tirer les leçons, en matière de politique publique et des projets entrepris
jusqu’alors.
Encadré 2.5. Les institutions actuellement en place pour les PPP en Tunisie
L'Unité de Suivi des Concessions (USC) conseille le gouvernement en matière de concession et établit des
avis qu'elle transmet au gouvernement. Elle est chargée notamment de :
Assurer la coordination nationale des opérations de concession,
Assurer aux autorités publiques concédantes et à leurs organes techniques, un appui à la préparation,
à la négociation, et au contrôle de l'exécution des concessions et des nouvelles formes de partenariat
entre le secteur public et le secteur privé,
Émettre des avis sur : les contrats de concession et leurs avenants, notamment les documents relatifs
à l'évaluation, l’octroi, l'exécution, au contrôle et au suivi des concessions ; et (après avis du comité
consultatif de suivi des concessions) sur la conformité des procédures suivies par rapport à la
législation et la réglementation en vigueur,
Appuyer les concédants en vue de l'évaluation et de la conformité des contrats de concession en
cours,
Assister les autorités publiques dans la promotion des concessions au niveau des régions,
Mettre à la disposition des autorités publiques des guides, fiches explicatives, informations et
recommandations après avis du comité consultatif,
Publier sur son site web les avis de l’USC et tous les éléments utiles à la transparence des opérations
en matière de concession,
Constituer une base de données concernant les concessions en cours,
Contribuer à la consolidation des capacités des autorités publiques dans le domaine des concessions,
Diffuser toute information et document relatif aux concessions et PPP,
Appuyer le gouvernement dans l'élaboration d’une stratégie sur les nouvelles formes de coopération
public-privée, et
Assurer le secrétariat permanent du comité consultatif de suivi des concessions.
L'USC assure ses missions en coordination avec les services compétents du ministère des Finances, et ce,
pour les aspects financiers relatifs aux concessions. Sous ce ministère, la
Direction Générale des
Partenariats Public-Privé
(DGPPP) a pour responsabilité:




Le développement d'une législation fiscale, comptable, financière, et la mise en concurrence
appropriée pour l’octroi de partenariats entre secteurs public et privé.
Le renforcement de la coopération internationale et régionale dans le domaine des PPP, et le
renforcement de mécanismes de financement dans ce domaine.
Le suivi et le pilotage de la préparation et de l'attribution des projets programmés entre les secteurs
public et privé.
La création d'une banque de données et l'élaboration des statistiques pour les PPP.
Enfin la Direction Générale d'Audit et de Suivi des Grands Projets (DGASGP), placée dans le Ministère des
Finances tunisien, assure les fonctions suivantes:


La mise en place d’un système de suivi des grands projets et des grands programmes à partir de la
préparation des termes de références des études s’y rapportant ;
Le suivi des différentes phases de l’élaboration des études ;
20

Page 21







La participation à la détermination du coût et des schémas de financement des projets dont la
réalisation et le financement sont à
la charge du budget de l’État,
L’étude des requêtes de financement extérieur des grands projets proposées par les ministères,
La coordination avec les ministères chargés des affaires étrangères et de la coopération
internationale pour la sélection des projets éligibles à des financements extérieurs et la détermination
de leurs coûts et schémas de financement,
Le suivi de la réalisation physique et financière de ces projets, y compris l’identification des
problèmes et obstacles imprévus au cours de l'exécution et la proposition de solutions adéquates en
collaboration avec les ministères et les organismes concernés,
Le suivi des obligations et engagements institutionnels et financiers de l’État prévus par les
conventions et accords de prêts lors de la réalisation de ces projets,
La participation à l’établissement des normes et ratios pour l'allocation des crédits budgétaires, et
L’audit de l’exécution des différents programmes, projets, et incitations octroyées par l’État.
Sources: décret n° 2013-4630 du 18 novembre 2013, portant création d'une unité de suivi des concessions au sein de la Présidence du
gouvernement ; site officiel du ministère des Finances, Tunisie.

En sus des institutions où se concentrent les compétences PPP du gouvernement, une commission
spéciale ad hoc chargée de l’élaboration des étapes préparatoires sera créée pour chaque contrat de type
PPP concerné. Cette commission est d’abord apparue dans les décrets 2010-1753 et 2013-4631 relatifs
aux concessions, qui ont fixé son rôle et instauré certaines règles relatives à sa composition, avant d’être
reprise dans le projet de décret d’application relatif aux PPP.
6 Le décret de 2010 précise que cette
commission comportera le contrôleur des dépenses publiques (pour les concessions octroyées par l'État
ou les établissements publics), et le contrôleur d'État pour les concessions octroyées par les entreprises
publiques ou les établissements publics n'ayant pas un à caractère non administratif. Toutefois les
décrets laissent un peu de souplesse à la composition de la commission selon la spécificité de chaque
projet et les organismes concernés. Ils renvoient à cet égard à une décision du concédant qui
déterminera également le mode de fonctionnement de chaque commission ; ils insistent par contre sur la
règle de non cumul pour les membres exerçant au sein de l’USC pour éviter des conflits d’intérêt.
L’article 13 de la nouvelle Constitution tunisienne apporte une autre dimension institutionnelle
pars la création d’un
comité spécial au sein de la Chambre des députés du Parlement. Le comité sera en
charge d’inspecter tout projet d’investissement touchant aux ressources naturelles du pays. Ces
dernières étant de droit la propriété des citoyens tunisiens, les accords contractuels les affectant devront
obtenir l’accord préalable du comité. Cette nouvelle clause inscrit le développement durable dans la
Constitution comme une des préoccupations majeures du gouvernement, et veille à l’assurer dans tous
types de contrats, y compris les PPP. Les secteurs de l’eau et des énergies renouvelables, où les projets
PPP sont susceptibles de jouer un rôle important, pourraient être lourdement affectés par ce
change ment. Dans ce cadre, il est à noter que la loi n°12 relative à la production d’électricité à partir
des énergies renouvelables a été adoptée et promulguée le 11 mai 2015.
Il n’est pas encore facile de situer à quel stade du cycle de projet de concession ou de contrat de
partenariat interviendra ce
comité spécial, mais son inscription dans la Constitution tunisienne semble
sous-entendre l’implication du parlement dans un certain nombre de PPP à venir. Bien que cette mesure
vise à limiter les abus dans les secteurs d’intérêt national, compte tenu notamment d’expériences
négatives de participation privée dans des projets d’équipement d’envergure qu’a connues la Tunisie
avant 2011, elle risque de créer, en raison de sa terminologie assez vague, un manque de prévisibilité
pour les investisseurs et une charge administrative supplémentaire pour les autorités contractantes. Ce
niveau supplémentaire de contrôle pourrait aussi rallonger les délais dans la préparation des contrats.
Pour éviter ce scénario, le gouvernement pourrait utilement veiller à l’incorporation de ce
comité
spécial
au sein des procédures et institutions déjà en place (par exemple au sein de l’Instance nationale
21

Page 22
des PPP, une fois dotée des capacités pour entreprendre des évaluations d’impact environnemental pour
tout projet proposé).
À partir des bases législatives et institutionnelles présentées ci-dessus, les chapitres qui suivent
porteront sur les trois principales phases de cycle de vie d’un projet de concession ou de PPP
(identification et élaboration ; passation de marché ; puis exploitation et clôture du projet). Enfin, le
dernier chapitre abordera les implications de ce type de projet en termes de compétences et outils dont
devra se doter la future Instance nationale des PPP tunisienne, ainsi qu’en termes de capacités et prise
de décision au niveau des régions en Tunisie.
Recommandations principales du chapitre
Réviser certaines dispositions prévues dans l’actuel projet de loi afin de :
Préciser dans quelle mesure les régimes relatifs aux PPP et aux concessions s’articulent entre
eux, et
avec les différentes dispositions sectorielles préexistantes (infrastructure portuaire ou
ferroviaire, télécommunications, économie numérique, etc.)
Clarifier les rôles des multiples acteurs impliqués dans les projets PPP en Tunisie et mettre
en place les mécanismes adaptés pour renforcer leur capacités et leurs coopération (voir
chapitre 5 pour plus de détail)
22



Page 23
CHAPITRE 2 : PREMIÈRE PHASE - ÉLABORATION DE PROJET
Tout projet de PPP doit, en principe, s’aligner avec les politiques économiques et sociales du pays.
La première phase du projet est l’élaboration du projet lui-même en se basant sur des plans et des études
stratégiques. Cette phase comporte trois étapes principales qui sont présentées ci-dessous. La phase
suivante du projet qui est le processus d’appel d’offres, ne peut commencer qu’après l’approbation du
projet par les autorités impliquées dans ces trois étapes :
Conceptualisation
et planification : L’élaboration de projet
la
conceptualisation du projet par l’autorité concernée
7 sur la base des besoins sectoriels et
régionaux. Ceci s’accompagne d’études qualitatives et quantitatives afin d’évaluer la
faisabilité et l’utilité du projet proposé. En Tunisie, il est nécessaire d’étudier comment les
projets s’inscrivent dans les plans quinquennaux. Le plan est, en effet, un exercice exhaustif
permettant aux autorités publiques d’identifier et de gérer ses priorités en termes de projets.
commence par
Évaluation approfondie et choix du mode de passation : La passation des PPP fait l’objet
d’une évaluation plus poussée que pour les passations de marchés traditionnels, car il est
nécessaire d’établir leur «
business case » et de démontrer leur soutenabilité budgétaire par
rapport à des modes plus classiques de prestation de service public. Le «
business case » est
une évaluation du projet qui, entre autres, vise à justifier le choix de ce mode précis de
passation de marché, et à démontrer sa faisabilité financière et commerciale. Dans le cas d’un
PPP, cette évaluation est un processus itératif revisité à plusieurs reprises par les parties
prenantes et complété au fur et à mesure que le projet proposé obtient les approbations
requises.

Lien entre la planification et le processus budgétaire : Le projet est suivi et étudié par les
services compétents au sein du ministère des Finances dès la phase de développement pour ses
aspects budgétaires (y compris une estimation des coûts). Il est ensuite soumis à l’approbation
de l’autorité nationale de planification, avant d’être inscrite dans le budget national une fois
effectué le mode de passation et le lancement de la procédure d’appel d’offres.
La préparation du lancement d’un marché PPP représente souvent un défi majeur pour de
nombreux pays. Des guides comme celui du Centre Européen d’Expertise PPP (EPEC 2011) sur la
préparation de projets pourraient s’avérer utiles pour les autorités tunisiennes désirant entamer un projet
PPP. Il existe en effet un nombre de risques pouvant survenir dans la phase d’élaboration d’un projet
d’investissement. Au moment de la conceptualisation, les autorités publiques doivent d’abord s’assurer
que le projet proposé est appuyé par un argumentaire stratégique et réalisable. Les risques liés à la
phase d’évaluation des besoins sont jugés comme étant particulièrement élevés du fait de l’influence
potentielle d’acteurs extérieurs, par exemple d’hommes politiques ou de consultants, sur les décisions
des agents chargés de l’attribution des marchés d’infrastructures (OCDE 2007). Une fois l’utilité d’un
projet établie, il est de plus important d’éviter les risques de débordements budgétaires en établissant un
budget réaliste et vérifiable. Ceci est valable pour le budget qui sera utilisé pour financer le PPP
pendant sa phase opérationnelle, autant que pour les ressources internes que nécessitent les ministères
contractants pour la préparation du projet.
En tant que gardien des finances publiques, le ministère des Finances doit donc jouer un rôle
important à toutes les étapes de la phase d’élaboration de projet, comme le souligne le projet de décret
d’application de la loi PPP tunisienne (
voir volume 3 sur le cadre budgétaire pour les PPP). C’est aussi
le cas dans la majorité des pays membres de l’OCDE, par exemple en Corée du Sud ou au Royaume
23

Page 24
Uni, où il incombe au ministère des Finances de donner un accord définitif aux projets (OCDE 2010).
Le ministère se doit aussi d’approuver les projets d’équipement des ministères de tutelle en raison des
obligations budgétaires qu’impliquent les PPP (subvention à la construction, garantie de revenu ou
paiement par l’État, par exemple). L’autorité contractante doit, elle, veiller à allouer les ressources
financières et humaines nécessaires pour la gestion administrative du projet.
Par ailleurs, l’identification et la préparation de projet devrait également impliquer des
consultations et dialogues appropriés avec les utilisateurs finaux et les autres parties prenantes (y
compris le secteur privé) avant le lancement du projet mais de préférence au stade de la planification.
La participation privée dans les infrastructures et les services publics a sinon de faibles chances de
réussir, car les autorités doivent impérativement s’assurer au préalable que les projets servent bien
l'intérêt public, et que leurs modalités (y compris en matière de tarification) sont acceptées et comprises
par les consommateurs et la société civile, surtout dans les régions concernées. Comme le requiert le
premier principe de la
Recommandation de l’OCDE pour la Gouvernance publique des PPP (OCDE
2012),
le grand public doit prendre connaissance des coûts et bénéfices relatifs des PPP à travers une
démarche active permettant la participation des utilisateurs finaux à l’identification et la définition du
projet, puis au suivi de la qualité du service fourni. L’encadré 2.6 résume les travaux de l’OCDE sur la
participation de la société civile dans la gestion des services d’eau potable et d’assainissement en
Tunisie. Ce travail fait apparaitre que l’engagement des parties prenantes n’est pas une fin en soi mais
un instrument de gouvernance qui peut contribuer à de meilleurs résultats en termes d’efficience, de
transparence, de participation et d’équité dans les contrats de service public.
Une participation accrue de la société civile à toutes les étapes de vie d’un projet, et notamment
lors de son élaboration, permettra notamment plus de transparence et d’efficacité dans l’implication du
secteur privé, à travers les PPP ou autres, dans les infrastructures et les services publics. De plus cette
participation peut mener à une conception de projet plus réaliste et plus propice à tirer parti des
avantages comparatifs potentiels d’une coopération publique-privée. Par exemple au Pérou,
l’Association pour la promotion de l’infrastructure nationale (AFIN) réunit 48 concessionnaires actifs
dans les services publics et dans divers secteurs d’infrastructure, qui collaborent de manière régulière
avec le gouvernement ainsi qu’avec l’agence de promotion des investissements privés (
Pro Inversión)
dans l’élaboration de politiques publiques et la conceptualisation de projets relatifs aux secteurs
d’infrastructure. Ces éléments sont à prendre en compte tout au long de l’analyse qui suit sur les trois
étapes d’élaboration de projet PPP en Tunisie.
Encadré 2.1. Faciliter la participation de la société civile dans les projets PPP le cas de l’eau et de
l’assainissement

Dans le secteur de l’eau, l’engagement des parties prenantes est un outil efficace pour réduire la fragmentation
territoriale et institutionnelle, aligner les objectifs divergents, responsabiliser les décideurs et les prestataires de
services et soutenir des actions orient
ées sur les résultats (OCDE, 2011). Entre autres, renforcer l’engagement
des parties prenantes (entre les secteurs public, privé et la société civile) peut aider les gouvernements à
sécuriser l’acceptabilité politique et publique de la participation du secteur privé, là où elle est envisagée, à
travers une meilleure communication des tenants et aboutissants de telle ou telle autre modalité de gestion,
comme des limites qu’elle présente.
Il existe plusieurs degrés d’engagement des citoyens, allant du partage d’informations aux différentes modalités
de consultation jusqu’à une contribution plus significative au processus décisionnel. Le dialogue avec les parties
prenantes doit se fonder sur des principes de clarté, de priorisation, de représentativité et de transparence. Ce
processus demande du temps et des moyens, et doit faire l’objet d’une planification stratégique lors des étapes
importantes de l’élaboration des politiques, et débuter de préférence dès les premiers stades des projets
24

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(OCDE, 2009). assainissement.

Une diffusion plus large des données de base sur les services d’eau et d’assainissement (coûts,
performance des opérateurs, accès, qualité, etc.) permettrait de renforcer les cadres de transparence
nécessaires à l’implication des usagers ainsi qu’une meilleure connaissance de la réalité de la situation
du secteur de l’eau en Tunisie, à différentes échelles, dans les zones rurales, urbaines et périurbaines.
Des indicateurs de performance des services d'eau et d'assainissement doivent être développés
(désagrégés par régions pour permettre un suivi local des performances) et divulgués au public (sur un
site unique et facilement disponible) pour favoriser une collecte d'information plus complète,
comparable et pérenne. Ces données comparatives pourraient ensuite servir de base pour comparer
les prestations publiques et privées en la matière.
La communication envers les usagers et différentes parties prenantes doit devenir une activité
stratégique et transversale
à l'agenda du gouvernement tunisien, et une priorité des opérateurs pour
améliorer leur relation avec les clients. Le dialogue avec les parties prenantes devrait être un axe
fondamental de la nouvelle Stratégie secteur eau à 2050, s'inscrire dans le cadre d'une revue
sectorielle annuelle qui est cruciale pour fixer le cap et les objectifs de politique de l'eau de la Tunisie,
et reposer sur des outils et financements conséquents, par exemple dans le cadre de programmes
d'assistance technique des bailleurs de fonds. Le renforcement des capacités des prestataires de
services en matière de communication est aussi une nécessité pour une plus forte implication des
usagers.
La société civile a un rôle important à jouer pour une approche plus ouverte et inclusive des
services d’eau et d’assainissement en Tunisie. Des structures plus officielles telles que l’Organisation
Tunisienne de Défense du Consommateur (ODC) devrait également jouer un rôle de vecteur entre les
consommateurs et les prestataires de services, y compris privés, pour assurer une meilleure prise en
compte des plaintes et des inquiétudes des usagers, mais aussi soutenir les prestataires pour qu’ils
répondent à ces attentes de façon adéquate.

Une meilleure prise en compte des spécificités territoriales est nécessaire pour que les politiques
de l’eau soient en phase avec les besoins et capacités à l’échelle locale et régionale, notamment dans
le cadre de la réflexion en cours vers la décentralisation. Les autorités infranationales (régionales et
municipales) devraient se voir allouer des prérogatives, ainsi que les ressources humaines et
financières correspondantes, pour jouer un rôle plus actif dans la définition des politiques de l’eau et la
régulation des services d’approvisionnement. Une meilleure
représentation des autorités
infranationales au sein du Conseil national de l’eau et l’expérimentation de cas d’étude-pilote dans
certaines villes choisies pour tester le transfert de responsabilités sont autant d’options qui peuvent
être envisagées par le gouvernement tunisien.
Source : OCDE, 2014.
Conceptualisation et planification
En Tunisie, le lancement de projets d’infrastructure commence au niveau des secteurs et des
régions, à partir des besoins socio-économiques observés dans le pays. À ce stade, l’autorité
contractante effectue les études de faisabilité nécessaires qui traitent de plusieurs aspects clés du projet
proposé. Lors de ce processus, l’autorité contractante peut également faire appel à l’assistance d’experts
externes à l’administration. La rentabilité socio-économique du projet est évaluée quand cela est jugé
nécessaire. Les projets à caractère régional, par exemple, peuvent en être exempts compte tenu de
l’importance de leur intérêt socio-économique. Une étude de faisabilité technique est aussi obligatoire.
Ce type d’étude énumère les différents éléments techniques correspondant aux objectifs du projet
d’infrastructure, notamment les spécificités de conception et d’ingénierie, ainsi que leur coût comparatif.
Cette première étape permet aux
autorités contractantes d’avancer sur la décision d’entreprendre un
projet spécifique, et d’évaluer le coût initial y afférant. L’utilisation systématique d’analyses coûts-
avantages pour évaluer les grand projets, surtout ceux candidats aux PPP, renforcerai le cadre d’analyse
de ces derniers.
25

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Par rapport à la plupart des contrats de marchés publics, qui précisent principalement les intrants
requis pour la réalisation du contrat, la préparation initiale d’un projet PPP laisse davantage de
souplesse quant aux intrants mais nécessite une vision claire des livrables du secteur privé. Ceci
implique une méthodologie différente quant à la préparation des projets en laissant davantage la
conception technique à la charge de l’acteur privé (EPEC 2011). Dans ce cadre, le secteur public doit
veiller à développer ses compétences techniques et managériales afin de pouvoir superviser les projets,
et s’assurer que les extrants sont livrés conformément aux modalités du contrat. La phase d’évaluation
de projet requiert que les autorités explorent de manière itérative les dimensions du projet, depuis les
premières phases d’identification des besoins jusqu’à sa soumission pour appel d’offres. À titre
d’exemple, l'estimation initiale du coût et du caractère abordable des projets devrait être revue à la
lumière du test d’optimisation de dépense publique, afin de déterminer s’ils sont encore abordables, et
pour reconsidérer la priorisation initiale des projets qui a été réalisée lors de l’estimation initiale.
Les projets d’infrastructure en Tunisie sont normalement conçus dans le cadre d’un document de
planification préparé tous les cinq ans par le ministère du Développement, de l’Investissement, et de la
coopération internationale (MDCI). Ce plan quinquennal de développement économique et social
bénéficie d’une collaboration étroite entre le ministère des Finances, les ministères techniques, et les
autorités régionales afin de définir les priorités du pays et ses besoins en investissements. Des stratégies
sectorielles à long terme existent aussi ou sont en cours de préparation pour plusieurs secteurs de
l’économie tunisienne, telle que la Stratégie secteur eau à 2050, la Stratégie énergétique horizon 2030,
ou encore la Stratégie de développement de l'agriculture à l'horizon 2025 qui est en cours de préparation.
Des commissions sectorielles nationales élaborent chacune des plans quinquennaux qui sont ensuite
regroupés dans le Plan national de Développement (PND) tunisien (OCDE 2013). Les projets
d’investissement des municipalités sont quant à eux inscrits dans le Programme d’Investissement
Communal (PIC), lui aussi quinquennal, et dans les contrats programmes pour les entreprises publiques.
Tout en veillant à limiter la multiplication de ces différents plans et stratégies et à éviter les
chevauchements, leur formulation reste importante pour guider la planification fiscale et la priorisation
des projets de PPP pour les infrastructures publiques. Lors de l’inscription des projets dans le PND,
ceux qui sont susceptibles d’être réalisés en mode PPP pourraient inclure une note le précisant même si
le choix final du mode de prestation n’a donc pas encore été arrêté. Ceci permettrait d’assurer une
transparence et visibilité accrues pour les citoyens ou encore les secteurs public et privé.
Lors de la préparation des plans quinquennaux, les projets d’équipement identifiés par les autorités
contractantes sont soumis à la Direction générale des infrastructures (DGI) au sein du MDCI,
accompagnés de leurs études préalables de faisabilité, afin de déterminer s’ils figureront dans le PND.
La DGI a de vastes prérogatives par rapport aux politiques publiques et à la mise en œuvre des projets
d’infrastructure en Tunisie, à l’élaboration du PND, et à l’analyse continue de l’évolution des secteurs
d’infrastructure.
8 La DGI travaille de près avec les administrations publiques et les régions pour la
programmation, le suivi et l’évaluation des projets d’infrastructure financés sur les ressources internes
et externes. Le classement des projets par ordre de priorité est aussi déterminé par le Plan, sous la
supervision de la DGI, en fonction des stratégies économiques et politiques du pays. Les projets ne
figurant pas sur le PND ne peuvent en principe pas passer aux étapes suivantes (évaluation poussée,
inscription dans le budget, et passation de marché), sauf en cas de situation exceptionnelle comme dans
le cas d’une proposition spontanée (voir section concernant le traitement des propositions spontanées).
Des dispositifs précis concernant les propositions spontanées sont prévus par la dernière version en date
du projet de loi relatif aux PPP, comme évoqué plus bas.
L’interruption des plans quinquennaux et le manque global de vision stratégique pendant la
période de transition affectent différents secteurs, comme l’illustre le rapport de l’OCDE sur La
Gouvernance des services de l’eau en Tunisie
(OCDE 2014). Dans ce secteur, l’arrêt des plans
quinquennaux et des contrats-programme pour les deux entreprises publiques chargées de l’eau et
26

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l’assainissement (l’ONAS et la SONEDE), et l’absence de vision stratégique à long terme qui en résulte,
ont eu pour conséquence de restreindre le champ d’acquisition d’outils et de mécanismes disponibles
pour assurer la cohérence des projets dans le secteur. Cependant, malgré l’arrêt de la préparation des
PND depuis 2011, le MDCI a continué à examiner les projets propices à être inclus dans le prochain
plan, et le gouvernement a repris le travail sur un nouveau plan quinquennal 2016-2021 qui précisera les
grandes lignes de la stratégie de développement économique de la Tunisie. La remise en place de cet
élément fondamental du processus de planification en Tunisie est prévue pendant le 2ème semestre de
2015.
La Colombie et l'Ile Maurice présentent des exemples utiles sur la façon d'intégrer les projets
d'infrastructure dans les plans d'investissement du secteur public. Le Plan national de développement de
la Colombie (NPD) comprend un plan d'investissement pluriannuel, qui est l'outil principal pour
déterminer les besoins du pays en termes d’investissements en infrastructures. Pour mesurer le progrès
par rapport aux objectifs du NPD, un système informatique dédié assure le suivi du cycle de vie de tous
les projets d'investissement public. De même, le Programme de l’Ile Maurice d'investissement du
secteur public (PSPI) sert de base à la préparation des budgets des organismes gouvernementaux, sur la
base d’objectifs de performance chiffrés (
Performance-Based Budgeting, PBB). Le PSPI mauricien
identifie les domaines possibles d'investissements privés, nationaux et internationaux, et souligne les
réformes politiques nécessaires pour stimuler les flux d’investissement dans ces zones. Au-delà du suivi
des dépenses publiques, une telle programmation des investissements d'infrastructure, organisée et
échelonnée dans le temps, assure la cohérence à long terme des plans de développement et permet de
délimiter les rôles respectifs des acteurs publics et privés dans les marchés d’infrastructures. Ceci
pourrait présenter un modèle intéressant pour les autorités tunisiennes dans la phase d’identification de
projets prioritaires.
Évaluation approfondie et choix du mode de passation
Les gouvernements devraient baser leurs décisions d’investissement sur des critères objectifs et
clairement définis et sans biais institutionnels, administratifs ou comptables en faveur ou en défaveur
des PPP. Une fois que l’administration publique a décidé de poursuivre un investissement, il convient
de procéder à des analyses supplémentaires pour choisir le mode de passation du marché. En Tunisie,
après l’inscription du projet d’infrastructure dans le plan national de développement, il est nécessaire
d’identifier la modalité de contrat la plus appropriée (marché public, concessions, contrats de
partenariat, etc.) à travers une évaluation à plusieurs étapes.
Une évaluation comparative des PPP et des marchés publics traditionnels (MPT) permet de
sélectionner l’option qui maximise les bénéfices pour le gouvernement et les usagers. L’optimisation de
la dépense publique (
Value for Money) peut être définie comme ce que le gouvernement estime être la
combinaison optimale de la quantité, de la qualité, des caractéristiques et du prix (c'est-à-dire du coût),
anticipée (et quelquefois, mais pas toujours, calculée) pour la durée de vie totale d'un projet (Burger et
Hawkesworth, 2011). Ces analyses sont généralement menées par les autorités contractantes avec la
participation occasionnelle de l’unité des PPP ou de conseillers externes. Plus de détails sur le concept
et les modalités pour évaluer l’optimisation de la dépense publique se trouvent en Annexe 2 de ce
volume.
Le concept d'optimisation de la dépense publique comporte à la fois des aspects qualitatifs et
quantitatifs. En outre, il implique un élément de jugement de la part du gouvernement. De ce fait, il
n'existe pas d'indicateurs précis pour mesurer l’optimisation de la dépense publique. La section suivante
présente des expériences en matière d’optimisation de la dépense publique qui peuvent renseigner le
gouvernement tunisien lors du développement de son approche.
27

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Expériences internationale en matière d’optimisation de la dépense publique (« value for money »)
Comme dans bien d’autres pays, il n’existe encore de critères pour guider le choix entre la
passation de marché traditionnelle et le PPP en Tunisie. Il n’est pas pour autant nécessaire de créer
ex
nihilo
une méthodologie pour calculer l’optimisation de la dépense publique durant la phase de
l’évaluation poussée. Les méthodologies de base, utilisées au Royaume-Uni, en France, ou encore en
Afrique du Sud devraient fournir un bon point de départ (voir encadré 2.7 dans l’Annexe 2).
Encadré 2.2. Évaluer l’optimisation de la dépense dans les projets de partenariat public-privé proposés
Avant d’entreprendre un partenariat public-privé les autorités publiques doivent examiner si celui-ci permet
ou non d’optimiser la dépense publique par rapport aux marchés publics traditionnels. De manière générale, il est
possible d’appliquer quatre méthodes pour évaluer l’optimisation de la dépense pour les différents modes de
prestation :




une analyse coûts-avantages complète de tous les autres modes de prestation dont disposent
les pouvoirs publics et le secteur privé
c’est la plus complexe des quatre méthodes présentées
dans cet encadré ;
le calcul d’un comparateur du secteur public (CSP) avant la procédure d’appel d’offres afin
d’évaluer si les partenariats public-privé, en général, permettent d’optimiser la dépense (Afrique du
Sud, par exemple) ;
l
e calcul d’un comparateur du secteur public après la procédure d’appel d’offres afin d’évaluer
si un partenariat public-privé, en particulier, permet d’optimiser la dépense ; et
le recours uniquement à la procédure d’appel d’offres sans faire de comparaison entre les
modes de fourniture publique et privée (France, dans le passé).
Si l’optimisation de la dépense publique est difficile à évaluer au début d’un projet, c’est parce qu’elle
dépend, en dernière analyse, d’une combinaison de facteurs interdépendants tels que le transfert des risques, les
incitatives
spécifications relatives au service attendu,
correspondantes, la concurrence sur et pour le marché, les compétences de gestionnaire de l’intervenant privé et
les avantages du dispositif pour les utilisateurs finaux et pour la société dans son ensemble.
l’évaluation des performances et
les mesures
La valeur du CSP, quant à elle, peut varier considérablement en fonction du taux d’actualisation choisi ou
de la valeur attribuée aux risques transférés. Certains observateurs mettent donc en question la solidité de ce
comparateur, invoquant une manipulation permanente en faveur des partenariats public-privé.
Le Royaume-Uni, par exemple, a remplacé le comparateur du secteur public par la prise en compte
d’éléments quantitatifs et qualitatifs dans l’évaluation de l’optimisation de la dépense publique. Les éléments
quantitatifs comprennent un projet de référence, le rapport coûts-avantages et des critères de faisabilité. Les
éléments qualitatifs concernent notamment la visibilité du projet, son caractère opportun et réaliste (Wall et
Connolly, 2009).
Partnerships Victoria, l’unité consacrée depuis l’an 2000 aux PPP dans l’état de Victoria en Australie, utilise
un CSP qui permet de comparer le coût actualisé des offres déposées pour le projet de partenariat public-privé
par rapport au mode de fourniture respectant les spécifications de production le plus efficace (projet de
référence). Le comparateur prend en compte les risques transférables à la partie privée supposée ainsi que les
risques conservés par les pouvoirs publics. Ainsi, le CSP public permet de calculer un coût hypothétique ajusté
en fonction des risques pour la fourniture publique selon les spécifications de production d’un projet type
Partnerships Victoria. La méthode permettant d’établir le CSP est rendue publique par Partnerships Victoria.
Source: OECD 2010, OCDE 2012, OCDE 2013
Les différentes étapes pour l’évaluation de la faisabilité des projets PPP par l’Unité PPP sud-
africaine sont représentées ci-dessous (voir graphique 2.3). Le Trésor national sud-africain, qui
comprend l’unité PPP, fourni des «Approbations du Trésor » (AT) à plusieurs étapes du cycle de
28

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préparation et d’exécution des PPP (OCDE 2010). Plusieurs dimensions (le coût du projet, les
dimensions socio-économiques, ou encore une vérification générale des données initiales) sont prises en
compte au début du processus puis révisées plus en détail lors des étapes suivantes afin d’informer le
choix final du mode de passation. Un résultat ne pouvant démontrer l’utilité et la faisabilité du projet
mène à son rejet automatique. D’ailleurs, selon le projet de loi relatif aux PPP, dans le cas où une fiche
descriptive de projet (ou évaluation préalable) serait refusée par l’instance chargée des PPP dans le
cadre d’un contrat de partenariat, l’avis de l’instance comporte obligatoirement une proposition sur la
forme contractuelle la mieux adaptée.
Graphique 2.1. Processus d’étude de faisabilité en Afrique du Sud
AT : Approbation du trésor
Source : Manuel PPP de l’Afrique du Sud, Module 4
Au Royaume-Uni, une analyse économique complète est effectuée avant qu’un projet
d’infrastructure ne soit entamé. Cette analyse fait partie d’un processus d’évaluation qui comporte cinq
dimensions distinctes : stratégique, économique, commerciale, financière, et managériale (pour plus de
détails voir
Green Book du Trésor britannique)9. La France a récemment changé d’approche pour
mieux incorporer les aspects quantitatifs et financiers des projets dans son évaluation de l’optimisation
de la dépense publique, compte tenu de leurs impacts sur la valeur socio-économique des projets. La
Mission d’Appui au PPP (MAPPP) a, par ailleurs, développé et mis en ligne un outil de modélisation
des coûts et de valorisation des risques pour la partie quantitative de l’évaluation préalable des projets
(Bergère et Bezançon 2014).
10 La mise en place d’une méthodologie pour la préparation du
comparateur du secteur public (voir Annexe 2) ou autre outil d’optimisation de la dépense publique peut
s’avérer assez longue et nécessitera probablement le soutien de bailleurs de fonds et de conseillers
29
1. Analyse des besoins
Objectifs stratégiques
Budget
Environnement institutionnel
Spécifications de sortie
Définition du projet 2. Analyse des options/solutions
3. Due diligence du projet 4. Évaluation de la valeur 5. Évaluation économique 6. Plan de passation Étude de faisabilité pour AT:I Étude de faisabilité pour AT:III
Analyse des options
Sélection des options
Juridique
Site
Socio-économique
CSP de base
CSP ajusté aux risques
PPP de référence
PPP ajusté aux risques
Analyses de sensibilité
Abordabilité
VfM
Choix de passation
Vérification d’info


Page 30
externes au stade initial. Elle devra s’accompagner de la préparation de guides méthodologique par
l’Instance des PPP pour les autorités contractantes, ainsi qu’un important renforcement de capacités, en
termes de ressources et de connaissances, au sein de l’administration tunisienne.
Cadre législatif et institutionnel pour l’évaluation des PPP en Tunisie
Le projet de loi relatif aux PPP précise que les contrats de partenariat ne peuvent être conclus
qu’après réalisation d’une évaluation comparative entre différentes solutions possibles, dont des
éléments justifiant son exécution dans le cadre d’un contrat de partenariat à l’exclusion des autres
formes contractuelles. Les principaux facteurs à prendre en compte sont le coût global du projet, les
modes de financement possibles, le partage des risques et l’efficacité du rendement. Des comparaisons
entre les options du secteur public et du secteur privé sont prévues en large mesure par les articles 5 et
13 du projet de loi relative aux PPP, ainsi que par le décret d’application qui en découle, et par le décret
d’application à la loi de 2008 sur les concessions n° 2013-4631 du 18 novembre 2013 modifiant et
complétant le décret 2010-1753 et fixant les conditions et procédures d'octroi des concessions. Il s’agit
de progrès notables dans le cadre juridique tunisien, qui visent à fournir des précisions et une ligne
directrice fort utile pour choix du modèle de passation des marchés (aussi bien dans les infrastructures
que dans d’autres secteurs de l’économie).
Le Décret n° 2013-4631 du 18 novembre 2013 (modifiant et complétant le décret n° 2010-1753 du
19 juillet 2010, fixant les conditions et procédures d'octroi des concessions) modifie l’article 3 de façon
à habiliter l’USC à procéder à une évaluation des aspects financiers, environnementaux, techniques,
judiciaires et sociaux de tout marché. Fort utile, cette analyse serait obligatoire pour les marchés qui
présentent un « intérêt national » comme ceux relatifs aux infrastructures publiques
11. De plus, le projet
de décret fixant les conditions, procédures et modalités de passation des contrats de concessions et de
partenariat (dont les dispositions relatives aux concessions sont déjà en vigueur) apporte des avancées
notables dans l’évaluation en amont des projets d’infrastructures. La partie du décret spécifique aux
contrats de concession propose six critères que doivent remplir à un seuil déterminé les contrats
d’intérêt national : la taille de l’investissement ; la capacité de création d’emplois ; le taux d’intégration
et le développement de chaines de valeur ; le taux d’usage de technologies sophistiquées ; le
développement de l’infrastructure ; et le niveau d’exploitation de ressources naturelles et ses
répercussions. Il est par ailleurs requis que l’évaluation préalable comporte, entre autres éléments : une
comparaison des coûts dans les deux hypothèses où l’objet de la concession est assuré soit par le
concessionnaire, soit par la personne publique (donc une forme de CSP, voir le volume sur le cadre
budgétaire des PPP) ; et une prise en compte du risque et des performances, présentant notamment une
répartition des risques entre les acteurs public et privé et leur valorisation monétaire (recensée sous
forme de matrice).
Quant à la section du projet de décret qui est spécifique aux contrats de partenariat (toujours en de
finalisation), elle prévoit que ces-derniers soient soumis en général à une évaluation préalable plus
prolongée, qui se délimite en deux volets. Avant le lancement de toute procédure de passation d’un
contrat de partenariat, l’autorité publique exemple présenter à l’Instance nationale des PPP une fiche
descriptive d’évaluation préalable, pour vérifier l’éligibilité du projet au régime de contrat de
partenariat. Cette fiche présente notamment une estimation de tous les coûts et recettes à survenir lors
des phases de conception, de préparation et d’exploitation du projet, concernant tant le partenaire public
que le partenaire privé, ainsi que leur évolution dans le temps. C’est uniquement suite à un avis
favorable de l’Instance que sont menées et présentées les études approfondies des aspects économiques,
techniques, financiers, juridiques et sociaux du projet. Les critères se rapportant à ces études sont aussi
plus strictes, en particulier en ce qui concerne le chiffrage complet et l’actualisation des coûts, y
compris les coûts d’entretien-maintenance-exploitation, et l’analyse des risques qui doit être assujettie à
des tests de sensibilité en fonction de leurs principaux paramètres. Ces études doivent de plus être
30

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transmises aux autorités chargées de la programmation budgétaire, des affaires foncières et de
l’aménagement du territoire. En cette mesure, les conditions d’évaluation préalables comprises dans le
projet de décret se rapprochent davantage du concept de l’optimisation de la dépense publique (voir le
volume sur le cadre budgétaire). Enfin et afin de faciliter la préparation de contrats de partenariat dans
des cas d’urgence précis, le projet de décret propose que soit élaborée par l’Instance nationale des PPP
un « modèle standard » de fiche descriptive qui guiderait l’évaluation préalable des projets concernés
(Zeno 2011).
L’introduction de ces aspects d’évaluation quantitatifs et qualitatifs pour les contrats de partenariat
pour déterminer si le projet permet une optimisation de la dépense publique représente une nette
amélioration par rapport à la loi de 2007 relative à l’économie numérique. Elle est également moins
restrictive que la version de 2013 du projet de loi PPP, qui à l’article 14 posait un « trio » de conditions
préalables excessivement strictes, sans lesquelles (et indépendamment de tout calcul d’optimisation de
la dépense publique) le recours aux PPP ne pouvait être justifié. L’ex article 14 disposait qu’il ne
pouvait y avoir recours, quels que soient les cas de figure, à la conclusion d’un contrat de partenariat
que lorsque l’une des conditions suivantes était remplie : si le projet revêtait un caractère complexe tel
que l’autorité publique n’était pas en mesure de le réaliser et exigeait un montage financier complexe ;
ou s’il s’avérait qu’il existe des difficultés importantes dans des projets similaires ayant été réalisés sous
d’autres formes contractuelles. Cette disposition avait essentiellement pour but de limiter les risques de
recours abusifs aux contrats de partenariat comme un moyen de dépenser hors budget12 (comme cela a
été le cas dans certaines collectivités locales au Royaume Uni), mais elle aurait également eu pour effet
de réduire les possibilités de contrats de partenariat. Par ailleurs, ces restrictions auraient fait passer un
message assez mitigé auprès des investisseurs quant à la volonté des pouvoirs publics de faciliter la
participation du secteur privé dans des projets de partenariat.
Les mesures citées ci-dessus pour la préparation de projet, qu’elles prennent en compte ou non les
besoins des soumissionnaires de petite taille, permettraient de mener une évaluation robuste de l’option
contrat de partenariat sur des bases tant qualitatives (ex : aspect social) que quantitatives (ex : coûts du
projet), mais elles requièrent des capacités institutionnelles solides afin d’assurer une mise en place
adéquate des projets. Elles permettraient de vérifier que les contrats de partenariat sont choisis pour les
bonnes raisons, aideraient à sensiblement réduire les risques d’abus des fonds publics, et conduiraient à
la mise en place d’une structure financière optimale pour le projet.
En Tunisie, le choix du mode de passation de marché nécessiterait une coordination rapprochée
entre les ministères techniques, les municipalités, le ministère du Développement, de l’investissement et
de la coopération internationale, et le ministère des Finances pour les aspects budgétaires (voir le
volume III portant sur le cadre budgétaire des PPP). Ce travail permettrait d’entamer la préparation du
projet, et de voir s’il y a lieu de procéder à la phase suivante, à savoir un test d’optimisation de la
dépense publique. L’Instance chargée des PPP interviendrait à ce stade pour superviser, étudier les
évaluations des projets, et fournir les approbations nécessaires s’il y a lieu, en coordination rapprochée
avec les acteurs clés au sein du gouvernement. Le test VfM peut s’effectuer par le biais de plusieurs
outils qui existent déjà dans plusieurs pays tels l’Australie ou l’Afrique du Sud, comme un comparateur
du secteur public, avec l’apport du ministère des Finances. En cas de résultat positif du test VfM pour
les PPP, ce mode serait retenu pour la mise en œuvre du projet.
Développer une méthodologie pour évaluer l’optimisation de la dépense publique
À la différence de certains pays de la région qui utilisent des comparateurs du secteur public pour
l’évaluation des soumissions de type PPP (par ex. l’Égypte; FEMIP 2011), la Tunisie ne dispose pas
aujourd’hui d’un outil clairement défini pour évaluer l’optimisation de la dépense publique des projets
PPP par rapport aux projets traditionnels de concession. Pourtant il s’agit d’un élément essentiel pour
31

Page 32
informer le choix du mode de contrat. Les expériences PFI au Royaume Uni ont par exemple souffert
par le passé d’un recours insuffisant à l’optimisation de la dépense publique. Le gouvernement central a
mis à la disposition des bénéficiaires des « crédits PFI » grâce auxquels les collectivités locales ont eu
recours au PFI de manière quasi systématique entre 2006 et 2011, sans évaluation poussée de
l’optimisation de la dépense publique. Il en résulte que de nombreux PFI anglais n’ont pas atteint les
objectifs escomptés, poussant le gouvernement à restreindre son appui aux PFI, et partant, alimentant
l’incertitude des investisseurs potentiels concernant le pipeline de projets (Foster 2011). Il est donc
important d’avoir des critères prédéfinis pour informer le choix du mode de contrat.
Avant d'examiner en plus de profondeur l’option PPP en tant que mode de prestation d’un service
ou d’une infrastructure publique, chose qui peut être fastidieuse et coûteuse, il serait utile de filtrer les
projets qui n’ont pas lieu de procéder en tant que PPP. En réalité, dans la plupart des pays de l’OCDE, il
n'y a pas de manière structurée pour établir si oui ou non un projet devrait être considéré pour le mode
de prestation PPP (Burger et Hawkesworth 2011). La sélection des projets à prendre en considération
pour le mode PPP se produit sur une base plutôt ad hoc. Par conséquent, conformément au cinquième
Principe de la
Recommandation du Conseil sur les principes de la gouvernance publique des
partenariats public-privé
(OCDE 2012), les gouvernements peuvent utiliser un pré-test pour déterminer
le mode de passation à suivre. Ce pré-test considère un ensemble de conditions qui sont des préalables
pour un PPP réussi (Burger et Hawkesworth 2011 ; voir encadré 2.8). Il s’agit inter alia d’une
concurrence suffisante dans et pour le marché en question, de la possibilité de quantifier et de définir la
quantité et la qualité des sortants, et la possibilité de transférer une quantité suffisante de risques au
partenaire privé. Si ces conditions ne peuvent pas être satisfaites, il est peu probable qu'un PPP puisse
aboutir à une meilleure optimisation de la dépense publique qu’un MPT.
Encadré 2.3. Test préalable du choix de mode de passation d’un marché d’infrastructure
Une fois la décision prise de lancer un investissement, tout projet devrait être soumis à un test préalable
des différentes options envisageables pour la passation du marché. Ce test viserait à aider les autorités à
déterminer le mode de passation du marché le plus propice à l’optimisation de la dépense publique. Les
éléments suivants devraient être pris en compte afin d’éclairer les décideurs publics sur les possibles avantages
de l’option PPP :

Quels sont, sur l’ensemble de la durée du projet, les coûts comparatifs de financement, de
construction et d’exploitation associés à chacun des m
odes de passation du marché envisagés?





Les risques liés au projet peuvent-ils être clairement définis, identifiés et mesurés?
Est-il possible de transférer les risques appropriés au partenaire privé afin d’assurer l’optimisation de
la dépense publique ?
Le projet implique-t-il un transfert de risques vers d’autres parties prenantes, y compris la main-
d’œuvre ou la population locale ?
Les partenaires privés potentiels ont-ils suffisamment d’appétit pour le risque et de capacité à
l’assumer pour pouvoir envis
ager un PPP ?
Les partenaires privés potentiels affichent-ils des résultats satisfaisants en matière de prestation de
service de qualité, de conduite responsable des affaires et d’expérience des PPP ?
Quel est le niveau potentiel de concurrence sur le marché ? Surtout en cas de concurrence
insuffisante, la procédure de soumission d’offres est-elle concurrentielle?
32

Page 33


L’intérêt suscité par le projet est-il suffisant pour produire une concurrence vigoureuse assurant
l’optimisation de la dépense publique ?
Sur la durée totale du projet, les retombées liées à la possibilité de rassembler dans le même contrat
la phase de construction et la phase d’exploitation sont-elles importantes ?
Quels sont les risques d’échec du projet, à la lumière de PPP semblables? Pour l’autorité publique,
quels sont les coûts associés à un échec de ce type ?
Quels sont les passifs éventuels (garanties qui sont mobilisées et autres obligations indirectes dont la
mise en œuvre dépend de l’occurrence d’un événement futur) associés au projet ?



Les arbitrages sur le plan des risques, des coûts et de la qualité peuvent-ils être quantifiés et gérés
par le secteur public ?
Le résultat souhaité peut-il être clairement énoncé a priori ? Le projet prévu s’inscrit-il dans un
contexte d’évolution rapide de l’action publique ou de la demande ? Les actifs sous-jacents devant
être utilisés pour livrer le résultat relèvent-
ils d’un secteur connaissant une évolution technologique
rapide ?
Le projet concerné est-il d’une ampleur suffisante pour justifier les coûts de transaction liés à la
préparation d’un PPP?
Qui effectuera les paiements prévus par le contrat au bénéfice du partenaire privé ? L’intégralité ou
une partie de ces paiements peuvent-ils provenir de redevances versées par l’utilisateur final ?

Si l’utilisateur final est appelé à verser des redevances, la demande sera-t-elle suffisante, sur toute la
durée du projet, pour assurer au partenaire privé des recettes suffisantes? Les partenaires privés
potentiels seraient-ils disposés à épauler le risque lié à la demande, en plus du risque de disponibilité
?
Si elle s’avère pertinente, une analyse supplémentaire de l’intérêt d’un PPP devrait être réalisée à partir de
renseignements tirés d’un comparateur du secteur public prudent, ou d’un dispositif équivale
nt visant à
comparer l’intérêt de diverses options sur le plan de l’optimisation de la dépense publique, surtout quand
l’exploitation représente une composante importante du projet. Diverses méthodes existent pour évaluer l’intérêt
relatif de différents montages contractuels et financiers, pour assurer l’optimisation de la dépense publique.
Source: OECD 2012
Il est cependant important de préciser que la mise en place d’une méthodologie complexe pour
assurer l’optimisation de la dépense publique ne devrait pas être au centre des priorités du
gouvernement ou de l’Instance des PPP tunisienne dans l’immédiat. Dans un premier temps, le
gouvernement devrait se concentrer sur l’accumulation d’expérience et de capacité en matière de PPP.
Ceci commencera par la construction d’un pipeline robuste de projets basé sur les priorités du pays,
mais aussi sur les expériences passée de la Tunisie et d’autres pays en termes de projets et de secteurs
qui sont propices à la prestation en mode PPP. Se concentrer sur ces catégories pour les projets PPP à
mettre en œuvre et accumuler de l’expérience en la matière contribuera non seulement à démontrer
l'engagement du gouvernement, mais permettra aussi d'améliorer sa capacité à évaluer les projets PPP
potentiels à l'avenir. Une bonne préparation des projets est essentielle au succès de cette étape.
L’adoption d’une procédure compétitive pour l’appel d’offre des contrats PPP ne devrait pas être
contournée non plus durant cette phase initiale, et contribuera elle-même à optimiser la dépense
publique.
33

Page 34
Cette approche n’est pas purement spéculative. Elle se baserait sur les priorités tunisiennes, ainsi
que les expériences couronnées de succès et les leçons tirées en matière de PPP de la Tunisie et d’autres
pays. Le gouvernement pourrait d’autant plus en soumettant les projets candidats au mode PPP au pré-
test préalable décrit ci-dessus (encadré 2.8). Tout en continuant à élaborer une méthodologie plus
complète pour l’optimisation de la dépense publique, qui prenne en compte des éléments tant
quantitatifs que qualitatifs, le pré-test aiderait le gouvernement à renforcer son cadre d’analyse de
l’optimisation de la dépense publique. Cette analyse préliminaire peut s’appliquer en amont d’un test
d’optimisation de dépense publique plus complet lorsque celui-ci sera développé.
Autres éléments déterminants dans le choix entre PPP et marchés publics traditionnels
Idéalement, et sur le long terme, des données par rapport aux coûts réels d’un projet traditionnel,
tout au long de son cycle de vie, fourniraient la base pour développer une comparaison quantitative
entre les coûts d’un PPP et d’un MPT. Il demeure qu’à la différence des coûts de construction, les coûts
d’exploitation des projets d’investissement sont le plus souvent inconnus, et il n’existe pas d’outil qui
permette de les calculer. Le gouvernement pourrait commencer par développer une stratégie de collecte
des données pour les projets déjà en cours d’exploitation en Tunisie, dans les secteurs où les PPP sont
envisagés. Néanmoins, ce type d’exercice de collecte de données représente un défi pour nombre de
pays de l’OCDE. Par ailleurs, l’aspect quantitatif est un aspect parmi d’autres dans la sélection du mode
PPP et ne devrait pas être mis en avant et à part des autres critères de sélection. Il convient
effectivement de développer un cadre d’analyse pour les projets d’investissement qui prendrait en
compte des considérations tant quantitatives que qualitatives.
Un facteur critique de différenciation entre les types de projets pourrait s’avérer être le temps
nécessaire aux procédures d’évaluation et d’approbation. En effet, si le choix du recours aux PPP
implique une période de préparation de projet bien qui peuvent souvent être plus longue que le marché
traditionnel, les autorités contractantes aussi bien que les partenaires privés potentiels pourraient bien se
reporter sur les modalités plus expéditives (marchés publics), même si celles-ci conviennent moins au
projet en question. Il est donc indispensable de mettre en place des équipes compétentes et
suffisamment étoffées au sein de l’Instance nationale des PPP et aussi des autorités contractantes, qui
puissent éviter les goulets d’étranglement administratifs et fluidifier le processus de préparation de
projet. Il est également essentiel de développer un processus administratif jalonné et des délais serrés
(tout au moins prévisibles) pour les approbations, on ne peut réussir la phase de préparation du PPP
La prévision d’un calendrier précis d’échéances et le respect des délais (notamment pour les
premiers PPP) pour les différentes étapes du projet peut aussi rassurer les investisseurs et aider à assurer
la fluidité du processus. Un exemple typique d’un calendrier de projet d’investissement, suivi en
Australie, figure au tableau 2.1 ci-dessous.
34

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Tableau 2.1. Phases du cycle de vie d’un projet PPP en Australie
Phases du projet
Étapes
Élaboration/développement du
projet
Appel d’offres et passation de
marché
Conception, construction et mise en
service
Assemblement des ressources
Développement d’un plan de projet
Développement d’un plan de probité
Examen des questions de site et d'approbation
Expression d'intérêt
Demande de proposition
Évaluation et négociation
Exécution du contrat
Conception (technique)
Construction
Mise en service
Prestation de services d'exploitation Gestion continue de contrat
Maintenance et mises à niveau
Expiration du contrat ou résiliation
Restitution au secteur public
Durée (approx.)
+ 3mois
12-18 mois
1 - 5 ans
25+ ans
6-12 mois
Source : Infrastructure Australia (2011), National Public Private Partnership Guidelines - Volume 2: Practitioners’ Guide,
Australian Government, March 2011
Enfin, la disponibilité de compétences techniques dans le secteur privé, et un niveau de
performance et d’efficacité élevé en ce qui concerne l’entretien et la prestation de services, sont souvent
cités parmi les avantages procurés par les PPP. Or certains autres facteurs peuvent également influencer
le choix du mode de passation de marché, et orienter celui-ci vers des marchés publics traditionnels. En
Tunisie, l’importance politique et stratégique de certains projets et le scepticisme général du public
envers la participation du secteur privé dans les infrastructures pourraient favoriser l’adhésion à une
procédure de passation de marché public traditionnel,
13 même si celle-ci ne mène pas systématiquement
à une optimisation de la dépense publique. C’est surtout le cas dans les secteurs dits ‘sensibles’ tels que
le secteur de la santé ou l’électricité, où la récupération des coûts est peu probable en raison des prix
maintenus à des niveaux artificiellement bas notamment à travers des subventions, ce qui rend difficile
une participation du secteur privé.
En résumé, un cadre simplifié pour l’évaluation et le choix du mode de passation des projets, en
trois phases principales, est comme suit (Allen et al. 2013) :
Une étude de préfaisabilité détermine s’il y a lieu de poursuivre l’option PPP. Ici, l’emploi
d’un test préalable pour évaluer les différentes options de passation de marché possibles
permettrait aux autorités de déterminer s’il y a lieu d’entamer un examen plus approfondi de
l’option PPP. Cette étape permet d’analyser les coûts et les bénéfices du projet pour
l’économie nationale avant d’entamer la prochaine étape de l’évaluation, et pousse aussi
l’autorité contractante à prendre de l’avance dans la préparation du projet.
Une analyse plus approfondie permettant de fonder le choix entre les options de PPP et de
« marché public traditionnel » à travers par exemple, un comparateur du secteur public (CSP)
et d’autre outils quantitatif et qualitatif (voir l’encadré 2.7 et l’annexe 2).

S’il s’avère que l’option PPP n’est pas à même d’optimiser la dépense publique, il convient de
poursuivre le projet d’infrastructure sous un autre mode de passation. Sinon, l’autorité
contractante peut procéder à l’appel d’offre.
35

Page 36
Liens entre la planification et le processus budgétaire
La budgétisation de tout projet d’équipement passe nécessairement par le ministère des Finances,
même si le projet est déjà inscrit dans le PND tunisien. Dans le cadre du processus budgétaire annuel, le
lien entre la planification des projets d’investissements et le budget est notamment assuré par le MDCI
et le Comité général de l’administration du budget de l’État (CGABE) au sein du ministère des
Finances. Pour les projets traditionnels d’infrastructures, l’évaluation des différentes demandes de
crédits budgétaires passe par une collaboration entre le CGABE et les départements concernés dans les
ministères de tutelle. L’évaluation des demandes de crédit prend en compte les aspects techniques mais
également les politiques de développement définies par le MDCI ainsi que des considérations
stratégiques nationales, avant l’inscription du projet dans le budget de l’année suivante (
voir le volume
III sur le cadre budgétaire pour les PPP
).
La budgétisation des PPP devraient suivre un processus similaire et s’inscrire dans les stratégies
sectorielles à long terme et dans les PND de la Tunisie. L’évaluation des PPP, coordonnée par
l’Instance nationale des PPP, devrait idéalement se faire en collaboration avec les services compétents
du ministère des Finances pour les aspects financiers et budgétaires des PPP. Le décret 2013-4630
relatif à la création l’USC stipule que l’unité « assurera ses missions en coordination avec les services
compétents du ministère des finances, et ce, pour les aspects financiers relatifs aux concessions »
(article 2). Ce décret stipule également qu’un représentant du ministère des Finances doit
systématiquement être inclus dans les commissions chargées de l’élaboration des étapes préparatoires
des concessions. Il serait logique d’étendre cette coordination aux contrats de partenariat lorsque leur
schéma juridique et institutionnel sera mis en place en Tunisie. La DGPPP pourrait être l’interlocuteur
principal de l’Instance nationale des PPP au sein du ministère des Finance. Elle serait chargée de
l’évaluation de la soutenabilité budgétaire des projets, en collaboration étroite avec la CGABE et les
autres directions correspondantes au sein du ministère des Finances. L’organisation de la future
Instance des PPP ainsi que le rôle du Ministère des Finances sont abordées plus en détail dans le dernier
chapitre de ce volume et dans le volume III sur le cadre budgétaire.
Au Royaume Uni, comme dans plusieurs pays membres de l’OCDE, la sélection des projets
d’investissement se décide au cours d’un processus réservé au plus haut niveau politique, et fait partie
intégrante du processus budgétaire (Cangiano et al. 2013). Tout programme ou projet voulant bénéficier
de fonds publics doit être soumis à un processus central d’évaluation (
programme or project appraisal-
à droite dans le graphique 2.4)
14, mené par et nécessitant l'approbation finale du Trésor (l’autorité
budgétaire centrale). Le Royaume Unit inscrit ensuite les projets PPP retenus dans son budget après ce
processus d’évaluation. Le gouvernement tunisien devrait également développer une méthodologie
transparente, non-biaisée, et consultative pour évaluer l’optimisation de la dépense publique en se
basant sur des critères autant quantitatifs que qualitatives (voir plus haut) et inscrire les projets dans le
processus budgétaire après le choix du mode PPP.
36

Page 37
Graphique 2.2. Intégration du processus budgétaire et du choix des projets d’investissement
au Royaume Uni
Source : (Cangiano et al. 2013), IMF’s Public Financial Management and its Emerging Architecture, extrait du UK Green Book
Au-delà du processus central d’évaluation de projets, un examen indépendant servirait à renforcer
d’avantage le cadre de budgétisation des PPP. Un examen indépendant et ciblé de projets, dit
Évaluation Portail (
Gateway Review), est mené en parallèle par le Cabinet du Gouvernement
britannique au sein du Groupe de l’Efficience et de la Réforme (
Efficiency and Reform Group – ERG)
pour certaines catégories de projets.
15 Ce processus a été initialement introduit en 2001 par l'agence
gouvernementale britannique du commerce, qui a ensuite intégré l’ERG en 2010.
16 L’ERG travaille en
partenariat avec le Trésor et les ministères de tutelle pour apporter de l’efficience, des économies, et des
réformes au nom des contribuables. Comme le montre le graphique 2.5 ci-dessus, le
Gateway Review
fait office de portail pour l’inclusion de certains projets d’envergure, comme les PPP, dans le budget
central de l’État britannique.
Iv La Tunisie pourrait peut-être s’inspirer du Gateway Review, qui est
effectué par des experts indépendants de l’équipe du projet chargés d’évaluer le progrès et la probabilité
de succès du projet. Les risques et les enjeux critiques y sont mis en évidence. Le Gateway Review
37


Page 38
évalue le progrès du projet selon cinq étapes (voir le Graphique 2.5 ci-dessous). En particulier, la
première étape, Justification Commerciale (
Business Justification), permet de s’assurer du caractère
abordable du projet et de confirmer qu’il s’appuie sur une stratégie robuste, et la deuxième, Stratégie de
Prestation (
Delivery Strategy), se focalise sur un plan clair pour sa mise en œuvre, y compris le mode de
passation de marché (OGC 2007). Cette étape examine, en particulier, la viabilité et le caractère
abordable du projet, l’optimisation de la dépense publique, et l'approche proposée pour sa réalisation.
Elle aborde également l’approbation des dépenses à venir par les parties concernées. Ces deux étapes
surviennent avant le lancement des procédures d’appel d’offres et avant toute inclusion du projet dans le
budget de l’État. Il est à noter que le
Gateway Review et un processus d’assurance de qualité et se fait
en sus des procédures d’évaluation que doit mener l’autorité contractante concernée.
Graphique 2.3. Étapes principales : Approbations et contrôle de qualité pour les grands projets au
Royaume Uni
* BC : business case
Source : Traduit de IUK (2014), ‘Transparency, Control and Audit of PPPs: Base Principles and UK Practice’, Presentation by
James Ballingall, 4 June 2014
Renforcement des capacités et fonds de préparation de projet
Afin de minimiser les risques et les coûts, et d’assurer la qualité des PPP, il est clair que de fortes
capacités administratives et institutionnelles sont nécessaires dès la phase d’élaboration du projet.
D’après le questionnaire de l’OCDE sur le cadre des PPP en Tunisie, la capacité du gouvernement à
entamer des analyses de coût-bénéfice pourrait être davantage développée, y compris pour mesurer
l’effet environnemental des projets d’investissement. Ces analyses, une fois entamées, sont pour
l’instant commissionnées à des consultants privés. Un renforcement d’effectifs de soutien aux PPP,
notamment au sein de la future unité des PPP, est en cours et contribuera assurément à guider les
autorités contractantes dans la préparation de contrat, qui peut être particulièrement complexe. Il est
également de bonne pratique de soumettre le processus d’évaluation de tout projet à des avis externes et
indépendants capables d’équilibrer tout biais pour ou contre les PPP. Le ministère des Finances ou
l’instance de Planification (le MDCI, dans le cas tunisien) peuvent jouer ce rôle d’évaluateur
indépendant (Allen et al. 2013), par exemple à travers un processus semblable au
Gateway Review
38
Évaluation stratégique Justification commerciale Stratégie de prestation Décision de l’investissement Opérationnalisa-tion Évaluation des bénéficesApprobations du Trésor : BC* stratégique BC* de synthèse BC* complet Portail 0Portail 1Portail 2Portail 3Portail 4Portail 5Confirmation de stratégieConfirmation de la justificationAppel d’offrecompétitifAttribution du marchéPhased’exploitationConfirmation des bénéfices
Capacité à influencerle résultat0%100%


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britannique. Le rôle du MDCI dans ce cadre, pour assurer que les projets d’investissement sont
poursuivis pour des raisons d’intérêt national, est d’autant plus important compte tenu de l'engagement
de la Tunisie pour le développement de ses régions, ce qui requiert des projets à forte utilité socio-
économique. Ce rôle serait complémentaire à celui de l’instance nationale des PPP qui se situera au sein
de la Présidence du gouvernement, et dont le mandat comprendra la promotion et la facilitation des PPP
(Allen et al. 2013).
La clarification des rôles des différentes parties prenantes dans ces étapes de préparation de projet
rendrait également le cadre institutionnel tunisien plus robuste. Les acteurs institutionnels clefs tels que
la présidence du gouvernement, le ministère des Finances, et le MDCI doivent assurer l’évaluation et le
suivi des projets proposés par les autorités contractantes, au niveau des résultats d’exécution mais aussi
des obligations de l’État y afférant. À titre d’exemple, le projet de concession pour la construction d’un
port en eau profonde à Enfidha, un projet d’une valeur socio-économique importante pour la Tunisie, a
souffert d’un manque de transparence et de coordination institutionnelle suffisante, au stade du
développement de projet aussi bien que lors de l’identification des risques ou l’analyse commerciale. Il
en a résulté qu’un premier processus d’appel d’offres a été infructueux, ce qui a retardé le projet. Plus
récemment, l’inscription du rôle du ministère des Finances dans le décret de 2013 relatif à l’USC
témoigne d’une volonté de coordonner le travail des parties prenantes clés, ce qui permettra d’instaurer
un cadre plus solide pour l’encadrement des PPP dans les dépenses publiques. Ce travail d’ouverture, de
communication, et de consultation devrait se renforcer plus encore dans les années à venir, et favoriser
la création d’une mémoire institutionnelle basée sur les expériences en la matière.
Compte tenu de l’importance de ces efforts de coordination, de communication et de renforcement
des capacités, des sources de financement dédiées peuvent être mobilisées précisément pour ce type de
dépenses (voir l’encadré 2.9). L'Inde, par exemple, a créé un fonds national pour l’élaboration des
projets d'infrastructures (IIPDF), un fonds de roulement avec une dépense budgétaire initiale de 1
milliard de roupies (USD 16 400) réunis grâce à des contributions perçues auprès des soumissionnaires
retenus. Ce fonds couvre en général jusqu'à 75% des frais de développement de projet, sous la forme de
prêts sans intérêt. D’autres options possibles pour financer les dépenses nécessaires à l’évaluation en
amont des projets incluent les soutiens financiers des bailleurs de fonds pour une assistance technique,
et le recours à des fonds d’assistance pour la préparation de projets, tels que : le fonds de conseil en
infrastructures public privé de la Banque Mondiale (PPIAF) ; la facilité africaine de soutien juridique
(ASFL) ou le tout récent fonds « Africa 50 » de la Banque africaine de développement ; l’initiative
MED 5P de la Banque européenne d’investissement, lancée en 2014; et le partenariat mondial pour
l’aide basée sur les résultats (GPOBA).
Encadré 2.4. Les fonds dédiés à la préparation de projets d’infrastructure
De nombreux pays ont établi des fonds dédiés à la préparation de projets d’infrastructure (notamment des
PPP et des concessions) pour répondre à la complexité de ce type de projets et des coûts d’études et de
préparation relativement considérables qui y sont reliés pour les autorités contractantes et les autres parties
prenantes (unités PPP, unités de concession etc.) chargées d’entreprendre les études de pré-faisabilité et de
faisabilité pour ces projets. Ces fonds offrent en général un dispositif spécial de financement des activités
préliminaires de préparation des projets, par exemple: services consultatifs, études, et assistance technique se
rapportant à des services préalables au marché, notamment la préparation et
la révision des dossiers d’appel
d’offres. L’Asie du sud-est connait actuellement un essor de fonds nationaux de préparation de projet, par
exemple :

Le Facilitation Fund de la Malaisie fournit une allocation budgétaire pour permettre la préparation des
projets d’investissement privé d’envergure, selon des catégories sectorielles et fonctionnelles. Ce fonds
comporte des équipes techniques chargées d’aider les autorités contractantes dans l’évaluation et la
structuration des contrats, ainsi qu’une unité ch
argée de veiller à la bonne gouvernance des projets
39

Page 40
concernés, et un « centre d’excellence » qui collecte les bonnes pratiques en la matière.

Le gouvernement des Philippines retient quant à lui avec le Strategic Support Fund un montant
forfaitaire dans le budget annuel des autorités engagées dans les projets de type PPP, pour la
préparation de ces projets. Ce budget peut aussi être destiné à l’acquisition nécessaire de terrains et
de droits de passage en vue de projets PPP, à condition que ces coûts ne dépassent pas 50% des
coûts globaux du projet. De plus, les gouvernements Australien et Philippin ont mis en place un
Project
Development and Monitoring Facility
(PDMF) sous forme de fonds renouvelables qui vise à améliorer
l'environnement d'investissement pour le PPP et de développer un portefeuille solide de projets
d’infrastructures PPP viables et bien préparés. Le PDMF, qui sera mis à la disposition des autorités
contractantes, permettra de financer les activités de pré-investissement, y compris la préparation des
études de préfaisabilité du projet, des études de faisabilité et des modèles financiers, le
développement d'options PPP, la structuration du projet, fournissant des services de conseil
transactionnel pendant le processus d'appel d'offres et la préparation des documents contractuels. Les
projets d'infrastructure sont ceux qui figurent sur la liste de projets prioritaires du gouvernement et
comprendront, entre autres, les aéroports, les autoroutes, l'approvisionnement en eau, les transports
urbains de masse, l'éducation, la santé et les installations agricoles, etc. Il aidera également à
développer et à renforcer la capacité des autorités contractantes à identifier, formuler et mettre en
œuvre des projets PPP bancables (projets financièrement viables : disposants de suffisament de
garanties ou de cashflows futurs et de chances de réussite pour acceder aux financements des
investisseurs institutionnels).
Au Brésil, le fonds de développement des PPP (Brazilian PPP Development Fund) a été créé
conjointement avec la Banque nationale brésilienne de développement ("BNDES») et la Société
financière internationale de la Banque mondiale («IFC»). L'objectif du fonds sera de promouvoir le
développement des concessions et des projets de PPP en finançant la préparation des projets.
Enfin la Thaïlande compte mettre en place un Private Investment Promotion Fund au sein du ministère
des finances afin de pourvoir un capital de départ pour les nouveaux projets, notamment les PPP. Ce
fonds sera également employé pour la
préparation d’un plan stratégique pour les PPP, et pour
accompagner les gouvernements locaux dans leur préparation d’appels d’offre et d’études de
faisabilité.
Certains fonds ont aussi été établi au niveau régional, comme c’est le cas, par exemple, pour le Fonds
spécial IPPF-NEPAD qui vise à aider les pays africains, les communautés économiques régionales à préparer
des projets d’infrastructures de qualité et viables, susceptibles d’attirer les ressources financières publiques et
privées. La mise en place d’un fond pour soutenir non seulement la préparation mais aussi l’opérationnalisation
des projets PPP est donc une bonne pratique internationale qui a été soutenue par plusieurs organismes
internationaux et pays, y compris des pays membres et partenaires d
e l’OCDE.
Certains fonds de préparation ont toutefois connu un succès mitigé, surtout au niveau régional. Par le
passé certains problèmes ont fait surface à la suite de l’emploi inefficace de tels fonds, notamment : des
modèles financiers peu viables, qui dépendent souvent de dons ou de financement de la part des banques
multilatérales de développement ; un manque de transparence quant à la gestion des fonds ; une implication
trop tardive de ces fonds, une fois les toutes premières étapes de préparation de projet passées ; et peu de
capacité de gestion pérenne et interne à ces fonds. Il s’en est suivi un appel international lancé par le groupe de
travail du G20 sur le développement, pour améliorer l’efficacité de ces fonds. Pour ces raisons, des fonds
dédiés au niveau national peuvent s’avérer plus utiles à conditions qu’ils soient gérés de manière transparentes,
financés de manière plus innovante et durable, et pourvus des ressources humaines nécessaires. En ce qui
concerne le financement, le fonds national indien (
India Infrastructure Project Development Fund, IIPDF) prélève
par exemple un certain pourcentage du contrat conclu par tout soumissionnaire retenu dans les procédures
d’appel d’offres pour les contrats d’infrastructure, à la destination du fonds de préparation de projet.
Les rapports du G20 analysant l’efficacité de différents fonds de préparation de projet pourraient s’avérer
pertinents pour les autorités tunisiennes, par exemple :

Le rapport de 2014 sur l’efficacité des fonds de préparation de projet asiatiques (https://g20.org/wp-
content/uploads/2014/12/assessment-effectiveness-ppfs-in-asia-15092014.pdf)

Le
rapport de 2013 sur
l’efficacité des
fonds de préparation de projet africains
40

Page 41
(http://www.icafrica.org/en/knowledge-publications/article/ica-assessment-of-project-preparation-
facilities-for-africa-197/, disponible en français et en anglais).

Sources: ERIA (2014). “PPP in 10 ASEAN countries at a glance”. Economic Research Institute for ASEAN and East
Asia.
http://www.eria.org/projects/%28Final%29PPP_Comparative%20Table_ASEAN%2010%20Countries_2014_as%20of%20Sept
ember%202014.pdf ; ICA (2012).
« Évaluation des Facilités de Préparation des Projets pour l’Afrique », Consortium pour les
infrastructures
http://www.icafrica.org/fileadmin/documents/Knowledge/ICA_publications/ICA-PPF-
Study%20Report-FRENCH-VOL%20A.pdf ; PPP Centre Philippines site: http://ppp.gov.ph/?page_id=688
IADB,
title,1303.html?id=BR-T1046
http://www.iadb.org/en/projects/project-description-
Development
"BR-T1046:
Brazilian
Afrique.
Fund",
PPP
en
Financement des projets PPP – rôle de la Caisse des Dépôts et des Consignations
Le manque de profondeur du système financier tunisien constitue un obstacle important pour le
développement de ce type de projets (voir le volume 1 de ce rapport). En effet, le pays souffre d’un
manque de financements au long terme qui pourraient être alloués à des projets d’infrastructures et des
PPP. Cette situation est principalement due à la haute fragmentation du système bancaire tunisien, un
niveau élevé de créances douteuses qui est encore plus lourd pour les banques publiques (actuellement
en cours de restructuration) et un marché financier de taille relativement modeste.
Conscient de ces défis et de l’importance des projets à long terme notamment dans les régions, le
gouvernement tunisien a créé en 2011 une nouvelle institution financière : la Caisse des Dépôts et des
Consignations (CDC). Construite sur la base du modèle de caisses de consignations
[1] qui ont fait leur
preuve (notamment celles du Maroc et de la France), la CDC a pour but de servir de bras financier de
l’État étant chargée de soutenir sa politique en matière d’investissement pour les projets d’intérêts
nationaux notamment dans le secteur de l’infrastructure. La CDC a un capital qui s’élève à 150 millions
de dinars tunisiens (71 millions d’euros) et compte près de 50 professionnels dans son effectif.
Depuis sa création, la CDC a pris part à un certain nombre de réalisations notamment grâce à la
création de huit fonds dotés de 250 millions de dinars dédiés au financement des PME. Cependant, cette
institution n’a pas encore les moyens de s’acquitter des objectifs ambitieux qui lui ont été fixés en
termes de développement de grands projets stratégiques et de renforcement des infrastructures. La
comparaison avec sa consœur marocaine la Caisse de Dépôt et de Gestion (CDG) est révélatrice. En
effet, cette institution financière créée en 1959 dispose de capitaux propres qui s’élèvent à 16,8
milliards de dirham (1,6 milliards d’euros) et compte près de 5.000 professionnels dans son effectif.
Le Maroc dispose également d’un système bancaire plus robuste que la Tunisie et qui est
davantage capable de financer des projets à long terme. Des banques marocaines ont en effet déjà
participé au financement de projets PPP dans leur pays. Le pays dispose également d’un certain nombre
de fonds dédiés au développement des infrastructures ; nous citerons à titre d’exemple le Fonds Hassan
II (disposant de près de 1,4 milliards d’euros pour la période 2011-2014) et le fonds Infra-Med
infrastructure (qui est géré conjointement par la CDC et EFG Hermes et dont la taille s’élève à près
d’un milliard d’euros).

[1].Il existe dans le monde une vingtaine d’institutions qui ont le même format et mandats que la Caisse des
consignations et des dépôts aussi bien dans des pays développés notamment en Italie, France, Portugal, Belgique
que dans des pays en voie de développement tels qu’au Brésil, Maroc, Mauritanie, et Sénégal
41


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Recommandations principales du chapitre
Revoir certaines dispositions prévues dans l’actuel projet de loi sur les PPP:
Préciser davantage les dispositifs se rapportant aux éléments à prendre en compte pour :
l’optimisation de la dépense publique ; la rupture de contrat en raison « d’intérêt public » ou de
« force majeure » (en se rapportant de manière explicite, par exemple, aux définitions
contenues dans le Code des Obligations et des Contrats); et la « modification substantielle »
d’un contrat, qui gagnerait par exemple à être chiffrée (en fonction de la taille du contrat initial
par exemple, comme le fait la directive européenne de 2014 relative aux concessions).
Développer une méthodologie à même de favoriser une évaluation approfondie des projets
d’investissements
et de renseigner le choix du mode de passation en se basant sur l’expérience
internationale en la matière.

Mettre à disposition les fonds nécessaires à la préparation et/ou la gestion des projets PPP, qui
nécessitent des ressources humaines et financières conséquentes.
Cela pourrait passer par la mise en place d’un fonds qui serait financé, par exemple, par les
frais des soumissionnaires dont les offres ont été retenues (ex : Inde), en co-financement avec
les bailleurs de fonds (ex : Philippines).

Il serait aussi utile d’envisager le recours à des fonds d’assistance internationaux pour la
préparation de projets, tels que (entre autres): le fonds de conseil en infrastructures public privé
de la Banque Mondiale (PPIAF) ; la facilité africaine de soutien juridique (ASFL) ou le tout
récent fonds « Africa 50 » de la Banque africaine de développement ; l’initiative MED 5P de la
BEI, lancée en 2014; et le partenariat mondial pour l’aide basée sur les résultats (GPOBA).
Veiller à une participation accrue de la société civile à toutes les étapes de vie des projets PPP, et
notamment lors de leur élaboration.
Cette participation pourrait être renforcée par la mise en place d’une plateforme de
communication
, telle que celle développée au Pérou par l’Association pour la promotion de
l’infrastructure nationale (AFIN) qui réunit 48 concessionnaires actifs dans les services publics
et dans divers secteurs d’infrastructure, qui collaborent de manière régulière avec le
gouvernement, les usagers et l’agence de promotion des investissements privés.
Cela nécessitera également l’amélioration des mécanismes de consultation publique, et la mise
à disposition de plusieurs clés de compréhension et leviers d’action, par exemple : une
diffusion plus large des données de base sur les services et les infrastructures objets des PPP;
des indicateurs de performance de ces services ; et une intégration stratégique et transversale de
la communication envers les usagers et différentes parties prenantes dans l’agenda du
gouvernement tunisien, et parmi les priorités des opérateurs publics et privés.
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CHAPITRE 3 : DEUXIÈME PHASE – APPEL D’OFFRES ET OCTROI DU CONTRAT
Une fois le projet élaboré, inclus dans le budget national, et lorsque la modalité de
contractualisation a été identifiée, l’appel d’offres peut être ouvert. Cette phase exige une plus grande
interaction entre partenaires privés et publics (notamment lors des soumissions d’offres de projet et de
la négociation du contrat). Les risques liés au manque de transparence et à la mauvaise gestion y sont
souvent naturellement élevés. La clarté et la transparence dans les processus d’appel d’offres
concernent notamment les questions suivantes : dans quelles conditions l’appel d’offres peut-t-il
accélérer ou comment peut-on contourner les procédures habituellement prévues (dans les cas par
exemples de contrats négociés ou suivant une procédure d’urgence) ; quels critères déterminent le degré
d’ouverture de l’appel d’offres (restreint ou ouvert à l’international); la gestion des propositions
spontanées ; et la possibilité, pour les soumissionnaires insatisfaits, de faire appel à la décision de
l’autorité chargée de l’octroi du contrat (sous forme de recours administratif). Tout au long des
principales étapes de la procédure d’appel d’offres, et au-delà de l’implication des autorités
contractantes, certaines agences de contrôle sont donc habituellement impliquées de près dans le suivi et
l’audit des procédures. Ces phases, dont les composantes juridiques et institutionnelles sont analysées
plus bas dans le contexte tunisien, sont les suivantes:
Préparation du dossier d’appel d’offres et choix de procédure. Une fois le projet lancé et les
études de faisabilité ainsi que le plan d’exécution complétés et approuvés par les instances
supérieures compétentes (l’USC par exemple en Tunisie) l’équipe chargée du projet au sein de
l’autorité contractante doit préparer le dossier d’appel d’offres et le projet de contrat, qui
peuvent ou non passer pour approbation par le ministère des Finances (comme c’est le cas en
Afrique du Sud). Ces documents informent par la suite un appel de qualification. La procédure
d’appel d’offres peut être internationale, ou plus ou moins restreinte selon le projet concerné.
Dépouillement, évaluation et sélection des offres. Le dossier d’appel d’offres est ensuite
publié et les soumissions évaluées par l’équipe chargée du projet, en fonction du cahier des
charges. Cette évaluation est habituellement technique et financière, impliquant diverses
agences ou comités spécialisés. Dans le cas d’un appel d’offres à deux étapes, il est possible
de sélectionner un certain nombre de soumissionnaires pré-qualifiés pour participer au
deuxième tour de l’appel d’offres.
Négociation et octroi du contrat. Après la négociation du contrat de PPP, la proposition ainsi
que le projet de contrat sont publiés et les offres évaluées au regard de l’étude de faisabilité
pour désigner le soumissionnaire retenu. La préparation du contrat comporte d’habitude la
finalisation d’un certain nombre de contrats de sous-traitance entre la société de projet et
différentes entreprises assurant les services de conception, de construction ou de maintien des
infrastructures relatives au projet. Il peut donc s’agir d’un champ particulièrement prometteur
pour la participation des PME locales.

Traitement éventuel des recours. Enfin, il est possible que la décision d’attribution du projet
soit contestée par certains soumissionnaires non retenus, ce qui peut nécessiter des procédures
de recours administratif précontractuel.
L’expérience tunisienne souligne l’importance de procédures claires et normalisées pour les
procédures d’appel d’offres, quelle que soit la modalité PPP du contrat (contrat de partenariat ou
concession). Par le passé de nombreuses concessions ont en effet été octroyées selon des procédures
d’appel à la concurrence distinctes, établies dans le contexte de projets précis plutôt que selon des
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normes standardisées. Il s’agit surtout de grands projets lancés avant 2008 et l’introduction du régime
relatif aux concessions. En l’absence de procédures claires d’octroi des concessions dans les textes
sectoriels, l’appel à la concurrence a dans ces cas été lancé conformément à des décrets spécifiques qui
détaillent les procédures et créent des commissions pour le suivi de l’octroi de la concession concernée.
Ce fut par exemple le cas de la concession de l’aéroport d’Enfidha, pour laquelle a été voté le décret n°
2004-1342 du 7 juin 2004, un texte réglementaire spécial ayant pour objet la réglementation des
conditions et des procédures d’attribution du projet. Les volets de ce décret portaient sur : l’appel à la
concurrence (par appel d’offres international précédé d’une présélection) ; et sur la création d’une
commission spéciale chargée de l’adoption du règlement applicable à l’attribution de la concession, de
l’approbation du Dossier d’Appel D’Offres, et de l’ouverture, du dépouillement, de l’analyse et du
classement des offres. Le résultat très inégal de ces projets met en lumière toute l’importance d’assurer
les fondements de toute procédure d’appel d’offres, et surtout pour les projets complexes, dans un cadre
juridique et institutionnel prévisible et transparent.
En Tunisie et comme cela a été exposé plus haut, l'identification et l’acquisition de projets
d'investissement est en grande partie coordonnée au niveau du gouvernement national, sous la
supervision globale de la Présidence du gouvernement en coordination avec le ministère des Finances et
le MDCI. L’approbation du ministère des Finances est, par exemple, nécessaire pour toute garantie
accordée par les pouvoirs publics, conformément au décret régissant les marchés publics (voir plus bas).
L'achat PPP est quant à lui généralement décentralisé au niveau des autorités contractantes (ministères
compétents ou autorités locales). En effet, celles-ci sont responsables de l'acquisition et du financement
de leurs propres projets (marché public ou PPP). Cela comprend toute la phase d’appel d’offres abordée
dans cette section, qui inclut typiquement (i) l’annonce de l’appel d’offres, (ii) l’évaluation des offres,
(iii) les négociations et (iv) l’adjudication de l’offre, qui sont principalement sous la responsabilité de
l’autorité contractante. Il est prévu que ces fonctions seront plus précisément du ressort des
commissions spéciales liées à chaque projet de PPP. Les projets émanant des autorités locales exigent
toutefois que le ministère compétent soit co-responsable du projet, et nécessitent l’approbation du
ministère de l’Intérieur ainsi que celui des Finances.
En général (en Tunisie mais aussi souvent dans d’autres pays), au cours de ces différentes étapes
les unités spécialisées (unité de suivi des concessions, instance nationale des PPP ou autres) jouent donc
un rôle indirect. Comme l’illustre le Tableau 2.2 ci-dessous, c’est ainsi le cas en Allemagne et en Corée
du Sud. En Afrique du Sud par contre, l’unité des PPP au sein du Trésor a la responsabilité directe de
l’adjudication du projet. Le ministère des Finances quant à lui intervient très rarement, que ce soit de
manière directe ou indirecte. L’exception est dans le cas de la Corée du Sud, dont l’unité des PPP est un
organisme indépendant (voir chapitre 5 de ce volume), et où le ministère de la Stratégie et des Finances
(MOSF) joue un rôle direct au niveau de l’appel d’offres. Les projets de plus de 200 million de Won (€
150.000) sont ainsi classifiés en tant que projets nationaux et placés sous la supervision du MOSF
pendant la phase d’appel d’offres et pendant la phase d’exploitation (PPIAF 2012).
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Tableau 3.1. Fonctions des organismes publics, ministères des Finances et unités consacrées aux PPP
pendant la phase d’appel d’offres
Corée du Sud
Afrique du Sud
Victoria, Australie
Organisme
public
d’exécution
Ministère
de la
Stratégie
et des
Finances
PIMAC
(unité
Dédiée aux
PPP)

Organisme
public
d’exécution
Invitation à
participer à
l’appel
d’offres

Évaluation
des offres

Négociation
Adjudication





-
-
-








● = responsabilité directe; ○ = responsabilité indirecte; - = non existant
Source: OECD (2010), Dedicated PPP Units
National
Treasury
PPP Unit

(unité
dédiée
aux PPP)





Organisme
public
d’exécution
Partnerships
Victoria
(unité dédiée
aux PPP)




-
-
-
-
Dans le cas de l’Australie, un comité de pilotage est établi au sein de l’autorité contractante pour
diriger chaque projet PPP et résoudre les défis survenant au cours de deux phases clé : la passation de
marché et la gestion du contrat (Infrastructure Australia 2011). Pendant la phase d’appel d’offres ou de
passation de marché, le comité guide le développement du projet et se saisit de tout problème éventuel.
Un directeur de projet est au cœur de ce comité. Il possède les compétences nécessaires pour mener à
bien sa mission, y compris en ce qui concerne la gestion de projet, l'élaboration et la négociation de
contrats, et une connaissance des procédés gouvernementaux. Le comité de pilotage comprend une
équipe multidisciplinaire disposant de compétences techniques, commerciales, et opérationnelles.
Étant donné le rôle prépondérant joué par les autorités contractantes à toutes les étapes de la
passation de marché (qu’il s’agisse de marchés publics ou de PPP), une faible performance de la part
ces autorités (surtout au niveau local en Tunisie) peut considérablement entraver le bon déroulement
des processus de passation, d’octroi, et de suivi des contrats en question, et ce malgré le soutien apporté
par l’unité des PPP ou d’autres instances spécialisées. À cet égard, les responsabilités d’élaboration,
d’évaluation et d’octroi des offres, assignées en Tunisie aux commissions spéciales liées à chaque projet
sont peut-être trop lourdes étant donné le manque d’expérience du secteur public tunisien en matière de
participation privée dans les infrastructures sous forme de PPP ou de concessions. Il faudrait songer,
dans un second temps, à développer un appui institutionnel plus soutenu au niveau infranational (en
commençant par les gouvernorats et les grandes villes) afin de s’assurer que les autorités contractantes
concernées puissent elles-mêmes préparer des appels d’offres solides et évaluer correctement les
soumissions. En effet le risque d’évaluation erronée ou de règlements d’appel d’offres et de cahiers des
charges mal conçus est élevé lorsque les autorités contractantes manquent d’expertise dans ce domaine.
Sur ces bases et comme pour le chapitre précédent, l’analyse qui suit s’intéressera principalement
au régime prévu pour les PPP (et à celui relatif aux concessions, dans les cas où les deux régimes se
recoupent – notamment, donc, en ce qui concerne le projet de décret de 2013 fixant les conditions,
procédures et modalités de passations des contrats de concession et de contrats de partenariat). Le
régime relatif aux marchés publics (dont la dernière modification en date est le Décret n° 2014-1039 du
13 mars 2014) ne serait cité qu’en cas d’exemple.
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Préparation du dossier d’appel d’offres
La clarté et la transparence sont essentielles lors de la rédaction du dossier d’appel d’offres, afin de
promouvoir une concurrence plus efficace et non discriminatoire dans l’attribution et le suivi des projets
PPP. A défaut les risques d'abus augmentent et il est possible que l’autorité contractante n’obtienne pas
une contrepartie adéquate en échange des fonds publics dépensés. Pour les mêmes raisons, il est tout
aussi nécessaire de poser clairement les conditions selon lesquelles la procédure d’appel d’offres peut
être menée de manière restreinte – par exemple par négociation directe ou par dialogue compétitif plutôt
que par un appel d’offres pleinement concurrentiel ; ou bien avec une ouverture ou non aux
soumissionnaires internationaux. Il est aussi indispensable d’insérer dans le cadre juridique les
modalités de traitement des propositions spontanées, qui surviennent en dehors de tout processus
d’appel d’offres et qui doivent être très soigneusement encadrées (il s’agit d’une question fondamentale
au succès et à la viabilité des PPP, qui sera abordée dans la section suivante). En effet, de telles
propositions spontanées, lorsqu’elles sont mal encadrées, comportent plusieurs dangers tels que de
détourner les priorités d’infrastructure du gouvernement, de prendre insuffisamment en compte les
impératifs d’optimisation de la dépense publique, de nuire aux principes de concurrence et de
transparence dans la passation des marchés, et par ailleurs peuvent menacer les droits de propriété
intellectuelle du candidat à la source de la proposition spontanée.
L’actuel régime des concessions peut fournir un exemple positif pour le futur régime des contrats
de partenariat en cette matière. L’article 24 du décret n° 2013-4631 relatif aux concessions pose
clairement les conditions exceptionnelles qui permettent le recours à la négociation directe ou une
consultation, plutôt qu’un appel d’offres ouvert. Ces conditions sont les suivantes: lorsque l'appel à la
concurrence a été déclaré infructueux ; pour des raisons de défense nationale ou de sécurité publique ;
lorsqu'il y a urgence à assurer la continuité du service public ; lorsque la réalisation de l'objet du contrat
se rapporte à des prestations dont l'exécution ne peut être confiée qu'à une personne déterminée,
notamment en raison de l'absence de concurrence pour des raisons techniques, économiques et à
condition que l'absence de concurrence ne résulte pas d'une restriction dans les documents d'appel à la
concurrence ; et lorsque l'exécution de l'objet du contrat se rapporte à une activité dont l'exploitation est
exclusivement réservée à un porteur de brevets d'invention. Les neuf sous-parties de l’article 23
précisent plus en détail le déroulement d’une procédure d’appel d’offres par dialogue compétitif
(justifié en raison de la complexité du projet, caractérisée par l'impossibilité pour le concédant de
définir les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins, ou d'établir le montage juridique ou
financier d'un projet). Le projet de loi relatif aux PPP pose des conditions semblables pour un recours
exceptionnel à la consultation et la négociation directe.
L’intensité de la concurrence peut être renforcée grâce aux incitations fournies aux agences
chargées de structurer le processus d’appel d’offres. Au Chili par exemple, le programme national
d’amélioration de la gestion publique conditionne l’augmentation des salaires des fonctionnaires du
Ministère du budget et des finances à des indicateurs de bonne performance. En ce qui concerne la
passation de marchés publics et des concessions, ces indicateurs comprennent entre autres : le taux
d’acquisition réalisé suivant une procédure d’urgence ; la part du budget accordée aux acquisitions
effectuées par des appels d’offres ouverts ; et la différence entre le nombre d’acquisitions prévu dans le
programme d’achat annuel et le nombre réalisé en réalité au cours de l’année (OCDE 2013). Ces
dispositifs sont pertinents pour les projets de type contrats de partenariat également, car ils peuvent
réussir à favoriser la concurrence en incitant les autorités contractantes à ouvrir davantage les
procédures d’appel d’offres (et à limiter leur recours aux procédures d’urgence qui, bien que plus
simples et expéditives, n’ouvrent pas le champ à de nombreux soumissionnaires et sont donc moins à
mêmes d’optimiser la dépense publique).
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En plus d’établir un cadre clair pour le choix de structure pour la procédure d’appel d’offres, il est
important de concevoir les spécifications des cahiers des charges de façon à ne favoriser personne et à
être clairs, complets et non discriminatoires. En effet, la rédaction des conditions imposées aux
soumissionnaires a un impact sur le nombre et le type de fournisseurs qui répondront à l’appel d’offres
et, partant, sur le succès de la procédure de sélection. Les cahiers des charges doivent donc en règle
générale privilégier la performance fonctionnelle, c’est-à-dire le résultat à atteindre, plutôt que les
modalités d’exécution. Cela incite l’innovation tout en optimisant la dépense, et permet d’éviter tout
traitement préférentiel.
La procédure d’appel d’offres devrait par ailleurs être conçue de façon à réduire efficacement la
communication entre les candidats, afin d’éviter le risque de soumissions concertées. Les soumissions
concertées peuvent être particulièrement nocives dans le domaine des infrastructures. Elles coûtent des
ressources aux acquéreurs et aux contribuables, entament la confiance du public dans les procédures
d’appel d’offres et annihilent les effets bénéfiques d’un marché concurrentiel (OCDE 2012 b).
Certaines dispositions du régime de la concurrence peuvent utilement limiter la possibilité d’accords de
collusion entre concurrents ; et une bonne collaboration entre agence chargée de la concurrence et
autorité contractante peut aider à mieux identifier ces cas, comme l’évoque la section suivante.
Dépouillement, évaluation et sélection des offres
Une fois les soumissions récoltées (que ce soit en une ou deux étapes), elles doivent être évaluées
– ce qui pose également des risques de gouvernance prononcés. Cette section porte d’abord sur les
structures chargées de veiller à la transparence et à l’impartialité de cette évaluation (qu’il s’agisse
d’agences chargées de la concurrence, de comités spéciaux établis dans le contexte de chaque projet, ou
d’observatoires créés au niveau national) ; la comparaison au cadre prévu pour le suivi des marchés
publics tunisiens s’avère ici pertinente. Puis en deuxième lieu, seront évoqués les principaux critères
d’évaluation des soumissions, surtout dans le cas des PPP où l’optimisation de la dépense publique
devrait figurer comme un critère prioritaire.
Suivi et impartialité des procédures d’évaluation
L’article 21 du projet de décret de 2013 fixant les conditions, procédures et modalités de
passations des contrats de concession et de partenariat précise que l’intégralité de la procédure d’appel
d’offres doit être confiée à une commission spéciale chargée de l’élaboration des étapes préparatoires
pour l’octroi du contrat concerné. Dans le contexte des concessions, cette commission est elle aussi
prévue par l’article 8 du décret 1753-2010. Certaines instances de contrôle doivent obligatoirement être
représentées dans ces commissions spéciales, dont le contrôleur des dépenses publiques et le contrôleur
d’État. Pour des raisons de transparence, selon le plus récent décret relatif aux concessions (n° 2013-
4631 du 18 novembre 2013), les membres du comité consultatif de l’USC ne peuvent pas faire partie de
ces commissions spéciales. Il s’agit donc d’un cadre de contrôle et de suivi des processus d’appel
d’offres moins institutionnalisé et moins permanent que celui attribué aux marchés publics (voir
l’encadré 2.10), se voyant plutôt reconfiguré au cas par cas dans chaque contrat.
En effet, la multiplication des instances de contrôle et de différentes étapes d’approbation doit être
évitée en vue de fluidifier autant que possible le processus de préparation et de mise en oeuvre des
projets de contrat de partenariat et de concession. L’association péruvienne de concessionnaires actifs
dans les infrastructures (AFIN) souligne en effet comme principal obstacle à l’accélération des PPP au
Pérou la « permisologie » - c'est-à-dire l’accumulation presque maladive de procédures d’approbation et
de demandes de permis nécessaires à la mise en place d’un projet PPP. En matière de transparence, la
multiplication d’agences et de procédures de suivi peut d’ailleurs faire obstacle à l’objectif attendu (un
meilleur suivi de la fonction et des finances publiques) en augmentant le risque de confusion des
chaînes de responsabilité.
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L’approche tunisienne, en prévoyant une plus grande souplesse dans le contrôle et le suivi des PPP
que dans celui des marchés publics et visant à limiter les lourdeurs administratives, tente donc de
favoriser les économies en matière de procédures, de temps, et aussi de ressources humaines. Toutefois,
dans les faits le processus administratif actuel pour les PPP reste insatisfaisant à plusieurs égards. Le
fait de dépendre en très grande partie de commissions spéciales temporaires pour la gouvernance et le
suivi des procédures d’appels d’offres risque notamment d’entraver le développement d’une mémoire et
d’une expertise institutionnelle en ce qui concerne la préparation en amont et l’octroi des contrats de
PPP.
Les expériences rapportées par de nombreux pays membres de l’OCDE indiquent que les
politiques de la concurrence peuvent aussi jouer un rôle important et bénéfique pour améliorer la
gouvernance de l’évaluation des soumissions. Certaines dispositions du régime de la concurrence
peuvent en effet utilement porter sur la façon dont l'offre est retenue, y compris sur son aspect non-
discriminatoire. La Tunisie est dotée d’une loi relative à la concurrence depuis 1991, qui a été modifiée
et mise à jour à cinq reprises, et qui institue trois instances, dont un Conseil de la concurrence
17. Or
selon ces textes de loi, le rôle du Conseil de la concurrence commence à partir de l’attribution de
marché ; celui-ci n’intervient pas au niveau de la passation de marchés. La loi relative à la concurrence
et aux prix (y compris dans la version la plus récente, à l’état de projet de loi depuis 2014) ne cite pas de
manière expresse les mesures à prendre et les pénalités encourues en cas de comportement anti-
concurrentiel dans les appels d’offres de PPP. Toutefois le droit commun s’applique, y compris selon
les provisions du code pénal.
Dans cette perspective, il pourrait être utile d’instaurer une collaboration plus formelle entre les
agences chargées de la préparation et de l’octroi des contrats de PPP (notamment l’USC et/ou la future
instance nationale des PPP, d’une part ; et le Conseil de la concurrence d’autre part). En effet, les
Lignes directrices de l’OCDE pour la lutte contre les soumissions concertées dans les marchés publics
(datant de 2012) conseillent aux autorités chargées de la passation et de l’attribution des contrats de PPP,
ainsi que des marchés d’infrastructure de manière plus large, d’instaurer des relations de coopération
avec les autorités de la concurrence. Cette collaboration pourrait prendre les formes suivantes : un
mécanisme de communication formel ; une liste d’informations à fournir lorsqu’un agent chargé de la
passation de contrats de PPP contacte les agences indépendantes chargées de la concurrence ; une
collaboration institutionnalisée dans la recherche de signaux d’alerte et de schémas révélateurs
concernant le truquage d’offres dans ce type de contrat ; ou encore des activités conjointes de
sensibilisation auprès des autorités contractantes et de l’USC / l’instance des PPP (OCDE 2012 b). Il
serait également opportun de mettre en place des mécanismes permettant à la future unité des PPP de
saisir directement le Conseil de la concurrence en cas de besoin.
Encadré 3.1. Gouvernance des marchés publics en Tunisie
1. La Haute Instance de la Commande Publique (HAICOP), créée par le décret n° 2013-5096 du 22 novembre
2013, est un corps de contrôle et de révision de la commande publique relevant de la présidence du
gouvernement. Cette Instance est composée de deux unités principales, toutes deux prévues aux articles 181 à
184 du décret de 2014. Les contrôleurs et réviseurs de la commande publique (désignés auprès de la Haute
Instance) élaborent des rapports de contrôle portant examen des dossiers soumis à ces deux unités : (i) le Comité
de suivi et d’enquête des marchés publics (considéré comme un organe de recours dans le domaine de la
passation des marchés publics); et (ii) la Commission supérieure de contrôle et d'audit des marchés publics.
2. Cette commission supérieure de contrôle et d'audit des marchés publics, instituée auprès de l’HAICOP,
comporte les instances suivantes :
48

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La commission de contrôle et d'audit spécialisée des marchés de bâtiment, de génie civil et des études
y rattachées ;
La commission de contrôle et d'audit spécialisée des marchés des technologies de communication, de
l'informatique, de l'électricité, de l'électronique et des études y rattachées ;
La commission de contrôle et d'audit spécialisée des marchés des matières premières et des produits
revendus en l'état ;
La commission de contrôle et d'audit spécialisée des marchés relatifs aux commandes diverses ; et
La commission spécialisée chargée du contrôle et du suivi de ministère d’avocat pour représenter les
organismes publics auprès des tribunaux et instances judicaires, administratives militaires, arbitrales et
de régulation.
2. Une commission départementale de contrôle des marchés publics existe auprès de chaque ministère.
3. Une commission régionale de contrôle des marchés publics existe auprès de chaque gouvernorat.
4. Une commission communale de contrôle des marchés publics existe auprès de chaque municipalité pour
traiter les marchés dont budget dépasse un montant fixé par décret (à mesure que le volume du projet proposé
augmente, ils sont d’abord soumis pour décision au niveau local, à la Commission communale, puis au niveau
régional, puis au niveau départemental, et enfin pour les projets les plus importants au niveau national (à la
Commission supérieure des marchés).
18
5. Une commission interne de contrôle des marchés publics existe auprès de chaque entreprise publique.
6. Le Conseil national de la commande publique, dont la création s’insère dans le cadre de la mise en place des
règles de la bonne gouvernance dans le domaine des marchés publics, est un conseil consultatif créé auprès du
chef du gouvernement et composé des personnalités du secteur public et du secteur privé. Il a les missions
suivantes :




Étudier et proposer toute mesure ayant pour but d’améliorer la gouvernance des marchés publics
notamment quant aux procédures, aux modes et aux techniques de passation, d’exécution, de contrôle
et d’évaluation
;
Étudier les réformes et les améliorations du cadre juridique et réglementaire des marchés publics, et
formuler des propositions à ce propos à la présidence de la république, au gouvernement ainsi
qu’au
parlement afin de renforcer la transparence et l’efficacité et l’établissement d’un système d’achat
durable ;
Établir un rapport, à l’attention de la présidence de la république, à la présidence du gouvernement et
au parlement, sur l’attribution et l’exécution des marchés à partir des rapports de contrôle et d’audit
effectués ; et
Présenter toutes les propositions relatives à la prévention et à la lutte contre la corruption dans le
domaine des marchés publics en concertation avec l’autorité en charge de la lutte contre la corruption.
7. L’Observatoire National des Marchés Publics (ONMP) crée au sein de la commission supérieure de contrôle
et d'audit des marchés, est chargé de l'instauration d'un système d'information relatif aux marchés publics de
l'assistance des acheteurs publics.
Source : Haute Instance de la Commande Publique, 2015
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Critères d’évaluation des soumissions de projet PPP
Dans la plupart des pays, les procédures à suivre pour l'évaluation des offres – y compris surtout
les critères d’évaluation ainsi que les calculs d’optimisation de la dépense publique et de viabilité
budgétaire – sont expliquées dans les manuels d'orientation fournis par un organisme central, comme
l’Unité des PPP. Dans l'intérêt de la lisibilité et de la pertinence de ces documents pour les pouvoirs
publics, ils doivent être soigneusement adaptés aux spécificités de chaque pays. En Tunisie ces manuels
n’existent pas encore mais ils devraient être développés dès que l’Instance nationale des PPP sera
constituée.
Il est aussi utile, dans ces manuels mais aussi dans les textes de lois, de préciser l’ossature
institutionnelle chargée de cette évaluation. En Tunisie la sélection des projets et les procédures d’appel
d’offres afférentes sont généralement menées par les ministères de tutelle ou les entreprises publiques,
mais les contrats peuvent également être accordés par les autorités locales sur l'autorisation du
Ministère de l'Intérieur. En ce qui concerne les offres de concession, le Décret n° 2013-4631 du 18
novembre 2013 habilite l’USC à procéder à une analyse de l’évaluation des aspects financiers,
environnementaux, techniques, juridiques et sociaux de tout marché. La modification de 2013 au
régime des concessions ajoute par ailleurs plusieurs clauses à l’article 13 du décret 2010-1753, afin de
décrire plus en détail les critères d’évaluation des offres. Ceux-ci comprennent : le coût du projet et sa
durée ; le montant de la redevance versée au concédant par les autorités contractantes et le montant de
la rémunération que le concessionnaire perçoit en contrepartie des prestations ; la qualité du service
rendu et la qualité des ouvrages ; les qualifications et l'expérience du personnel affecté à l'exécution du
contrat ; les critères de contrôle et de suivi de la concession ; les caractéristiques environnementales du
projet ; et les contributions du projet au développement régional, au transfert de technologie et de
savoir-faire, et à la création d’emplois. Afin de faciliter la mise en pratique de ces procédures
d’évaluation, il serait utile d’accompagner ces textes de loi d’un manuel pratique à l’attention de l’USC
et des autorités contractantes dans différents ministères, qui fournirait des clés d’analyse et des
paramètres précis pour cette évaluation (critères et sous-critères possibles par type de projet PPP ou
concession, pondérations possibles pour chaque critère, choix de méthodes d’évaluation des offres, etc.).
L’USC peut demander au concédant de procéder à une telle évaluation, le cas échéant. Cette
évaluation est obligatoire pour les marchés qui représentent un « intérêt national » comme ceux relatifs
aux infrastructures publiques. De plus, le projet de décret de 2013 fixant les conditions, procédures et
modalités de passations des contrats de concession et de partenariat précise que les offres doivent être
composées d’un dossier administratif, d’une offre technique, et d’une offre financière. Toujours selon
ce décret d’application, les évaluations technique et financière sont par la suite entreprises par la
commission spéciale chargée du contrat concerné, de manière séparée, à la suite du processus d’appel
d’offres et afin d’informer la sélection du partenaire privé. Il n’est cependant fait aucune mention
expresse d’études de faisabilité ni d’analyses de l’optimisation des ressources, domaines qui, dans une
certaine mesure, sont mieux couverts dans le projet de loi relatif aux PPP de 2013 sous la définition de
« l’offre économiquement la plus avantageuse ».
19
En distinguant ainsi les éléments à prendre en compte lors de l’évaluation préalable pour les
contrats de concession par rapport aux contrats de partenariat, le projet de décret témoigne d’une
importante avancée dans la reconnaissance des complexités et risques particuliers que comportent les
projets de partenariat, et l’importance clef d’une évaluation préalable particulièrement fiable et précise.
Dans le même esprit, le projet de décret établit une distinction entre ce que constitue un avis
d’évaluation préalable positif de ce qui se rapporte aux partenariats : l’avis positif, s’il concerne une
concession, doit contribuer à montrer que le recours au contrat de concession offre une solution plus
favorable que l’exécution directe par l’autorité publique. En revanche, s’il concerne un contrat de
partenariat, il doit contribuer à montrer que le recours à cette forme de contrat permet d’offrir à
50

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l’autorité publique une solution alternative moins couteuse et/ou plus avantageuse pour atteindre ses
objectifs. Tout en préservant les mêmes critères de base pour le choix de projet, l’évaluation préalable
pose donc des conditions plus strictes pour le recours au PPP que pour le recours au contrat de
concession.
Enfin, un défi central pour les autorités reste l’impératif de respecter les délais dans les procédures
d’appel d’offres, tout en menant une évaluation rigoureuse des projets et en impliquant toutes les
structures institutionnelles nécessaires à l’approbation des documents contractuels. Dans sa nouvelle
stratégie de PFI (HMT 2012), le Royaume Uni accorde un délai de passation de marché maximum de
18 mois aux autorités contractantes. Il faut néanmoins noter que ce pays a une expérience longue en
matière de PFI et des capacités institutionnelles poussées dans ce domaine. Chaque pays doit mettre en
place une stratégie qui lui est propre et qui convienne à ses conditions.
Traitement des soumissionnaires locaux et évaluation de leur implication aux « petits » PPP
Dans le cas de projets complexes, l’évaluation des offres peut aussi avoir à s’assurer de l’équilibre
entre un régime favorisant les soumissionnaires nationaux (qui peuvent, comme il est mentionné dans le
chapitre précédent, bénéficier de marges préférentielles), et les impératifs de prix et de qualité au
bénéfice des usagers. Ces principes s’appliquent, d’ailleurs, aussi bien aux contrats de concession
qu’aux contrats de partenariat.
En Tunisie, la suppression de l’article 14 du projet de loi PPP (voir plus haut) pourrait permettre
une participation accrue des PME et des entreprises locales dans les contrats de partenariat. En effet, la
version précédente du projet de loi PPP ne fait aucune référence à la participation des PME, alors que
certains pays en développement ou émergents (par exemple les nouvelles dispositions relatives aux PPP
au Maroc et au Sénégal) prévoient différentes mesures pour faciliter et promouvoir le rôle des PME et/
ou aux entreprises locales en tant que soumissionnaires aux contrats de PPP. Ces mesures prennent
souvent la forme de marges préférentielles.
Encadré 3.2. Exemples de pays ayant mis en en place des marges préférentielles pour les
soumissionnaires locaux
Le cas du Maroc
Le Maroc, dans l’article 33 de son projet de décret de 2014 relatif aux PPP, autorise par exemple l’autorité
publique à fixer une majoration ne dépassant pas 15% sur les offres présentées par les entreprises étrangères
pour la comparaison des offres lors de leur évaluation. Les critères suivants devraient être considérés pour
décider s’il y a lieu d’appliquer une majoration :



La part d’exécution du contrat PPP que le soumissionnaire a prévu de confier ou sous-traiter à des
entreprises ou à des PME nationales
L’importance de la compensation industrielle notamment l’utilisation de produits ou de services auprès
du tissu industriel local, sous forme de sous-traitance, de transfert de technologie, et de savoir-faire ou
des emplois crées en faveur des citoyens marocains
Le taux d’utilisation des intrants d’origine nationale (…), comme le niveau d’utilisation des biens, des
services, des moyens humains, techniques d’origine marocaine pour l’exécution du contrat de PPP

Le cas du Sénégal
Le Sénégal, à l’article 21 du projet de loi PPP voté en octobre 2014, prévoit les marges de préférence
suivantes: de 5% à 10% pour les opérateurs ressortissants de l’espace UEMOA (ou pour les group
ements
51

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candidats comptant en leur sein un opérateur ressortissant de cet espace); de 5% à 10% (cumulables avec les
préférences UEMOA) aux candidats s’engageant à sous-traiter au moins 30 % de la valeur globale du contrat aux
« entreprises communautaires »
; et de 2% maximum à tout candidat s’engageant à favoriser la contractualisation
avec les PME de l’espace UEMOA ou avec des associations sénégalaises de petits opérateurs communautaires.

Il est à noter que les marges préférentielles demeurent rares pour les PPP en particulier, et il
n’existe pas à ce jour de meilleure pratique en la matière au vu de la complexité et de la taille de la
plupart des projets de ce type. L’emploi des marges préférentielles est bien plus courant dans le cadre
des marchés publics : le Botswana, dans sa loi relative aux marchés publics, accorde une marge de
préférence de 5% aux entreprises locales dans les services de construction ; marge qui s’élève à 6%
pour les projets de grande taille. Il est par ailleurs prévu qu’un maximum de 30% de la taille de ces
projets soit sous-traité à des entreprises locales et le transfert de compétences vers les entreprises sous-
traitantes est encouragé dans ce cadre. L’Ile Maurice a par ailleurs modifié son régime des marchés
publics en 2013 afin de prévoir, pour les contrats employant plus de 80% de main d’œuvre locale, une
marge de préférence de 15%. De manière semblable des marges préférentielles sont déjà accordées,
dans le cas tunisien, pour les PME et autres entreprises locales participant aux contrats de marchés
publics (variant selon la taille du contrat).
Certains pays vont plus loin en imposant un quota minimum de PME à retenir dans la pré-sélection
de soumissionnaires, ou encore en simplifiant les procédures administratives et la documentation à
fournir pour les concessions et contrats de partenariat de petite taille (voir l’encadré 2.11). Ces mesures
peuvent s’avérer plus efficaces – et plus favorables à l’optimisation de la dépense publique – que les
marges de préférence qui n’ont pas d’incidence sur la qualité ou le coût de préparation de la soumission.
Ceci dit, il est nécessaire d’assurer que toute simplification des procédures à l’attention des PME ne
compromette pas la qualité de l’évaluation préalable des projets. L’Espagne a par exemple a souffert
d’une sur-simplification des procédures d’appel d’offres, dont la sélection du candidat gagnant se basait
principalement sur le critère du moindre coût sans analyse poussée des risques.
20 Par ailleurs
l’efficacité de telles mesures repose aussi évidemment sur des efforts de mobilisation des ressources
humaines et d’accès au financement au niveau local, afin de doter les PME locales de capacités réelles à
concurrencer les autres soumissionnaires pour les contrats qui s’y prêtent (par exemple de petite taille, à
faible complexité technique ou financière, etc.). Afin d’éviter les dangers d’une simplification excessive,
il peut donc être prudent de modérer le degré de simplification en fonction de la taille du contrat
(comme c’est le cas dans le régime des concessions mauricien, voir l’encadré 2.12). Les conditions de
l’article 14 révoquées, le régime tunisien pourrait s’inspirer de telles pratiques, et surtout dans le cadre
des contrats de concession ou des projets de PPP à petite échelle et à faible risque.
Encadré 3.3. Simplification des procédures d’évaluation pour les projets de petite taille
La participation des PME aux PPP est compliquée compte tenu de la taille et de la complexité des projets.
Parmi les freins à cette participation, nous cit
erons à titre d’exemple : le coût de la préparation de l’appel d’offre, la
haute technicité requise, etc. Néanmoins leur concours aux projets d’infrastructures peut être facilitée si les
responsables des marchés publics ainsi que des procédures de concessions réduisent les coûts de
soumissionnement, fixent des conditions de participation qui ne limitent pas déraisonnablement la concurrence, et
trouvent d’autres solutions pour inciter les petites entreprises à participer, même si elles ne peuvent pas
soumissionner pour la totalité du marché.
Jusqu’à présent, la participation des PME aux appels d’offres sur les marchés d’infrastructures en Tunisie
est surtout encouragée en application du décret no 2011-623 du 23 mai 2011 portant dispositions spécifiques
pou
r la réglementation des marchés publics, qui à l’article 6 dispense les PME de la présentation du
cautionnement provisoire lors de leur participation aux procédures d’appel d’offres. À l’article 7 il est réitéré que
les entités publiques acheteuses peuvent réserver jusqu’à 20 % de la valeur prévisionnelle des marchés aux PME
(dispositif déjà en place dans la loi de 2008 sur les concessions). Les plus petits projets (en dessous de seuils
52

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fixés par secteur) sont par ailleurs dispensés d’obtenir l'avis préalable de la commission des marchés compétente
et sont plutôt soumis au
contrôle d'une commission d'achat créée par l’acheteur public pour le marché en
question. De tels dispositifs ne sont pas prévus pour l’heure dans le régime relatif aux concessions tunisie
n, ni
dans les projets de loi et de décret portant sur les PPP.
Afin d’éviter les dangers d’une simplification excessive, il peut donc être prudent de modérer le degré de
simplification en fonction de la taille du contrat. À l’Ile Maurice par exemple, en 2013 les documents d’
appel
d’offres ont été considérablement simplifiés pour les contrats de petite taille en particulier. Quant au projet tunisien
de décret de 2013 relatif aux PPP, il proposerait à son Titre 4 une procédure simplifiée pour les contrats de
concessions et de partenariat se rapportant à des projets de moindre complexité technique, ou dont la valeur
estimée est inférieure à certains seuils (définis eux-
mêmes à l’article 66 du projet de décret). Le recours à cette
procédure simplifiée par la pe
rsonne publique nécessite l’avis favorable de l’Instance nationale des PPP. Les
seuils employés différent entre les contrats de concession et les contrats de partenariat, et en fonction aussi de
leur attribution (à des établissements publics, ou plutôt à des collectivités territoriales).
Ces simplifications peuvent s’avérer d’autant plus efficaces lorsqu’elles sont conjuguées à l’obligation de
veiller à l’inclusion d’un nombre minimum de PME parmi les candidats à l’appel d’offres.
À l’Ile Maurice l’inclusion
d’au moins deux PME dans les procédures d’appel d’offres est obligatoire pour tout contrat de marché public ou
de concession inférieur à 160 000 dollars, et au Botswana la stratégie nationale de diversification, lancée en 2011,
accorde aux PME une marge
préférentielle dans les procédures d’appel d’offres variant en fonction du secteur
concerné, de la taille et de la complexité technique du projet. Cette pratique n’est pas non plus réservée aux pays
en développement : depuis 1996 le Small Business Act américain oblige en effet le gouvernement fédéral des
États Unis à accorder 23% du la valeur totale de ses achats publics aux PME.
21 Les cas semblables portant
exclusivement sur les régimes PPP (lorsque ceux-ci, comme dans le cas tunisiens, ne sont pas regroupés sous le
régime plus large des marchés publics) sont toutefois plus rares dans le contexte international en raison de la
complexité plus élevée des PPP.
Traitement des propositions spontanées
En Tunisie, le projet de loi relatif aux PPP définit une proposition spontanée comme la proposition
émanant de l’initiative de la personne privée et visant à proposer un certain projet et demander son
exécution dans le cadre d’un contrat de partenariat. Les candidatures ou propositions spontanées sont
abordées également dans la loi de 2008 sur les concessions (articles 11 et 12) et un titre a été réservé
pour ces propositions dans le décret d’application 2010-1753 (Titre 3). Mais malgré la mise en place du
régime des concessions de 2008, les structures publiques ont souvent éprouvé des difficultés à appliquer
les règles de la concurrence dans le choix des concessionnaires, surtout dans les cas de propositions
spontanées.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles les gouvernements ont recours aux propositions spontanées.
En tête de liste figure souvent une capacité limitée au sein du secteur public pour entreprendre les stades
de conceptualisation, de développement, et d’appel d’offres des projets. Les propositions spontanées
permettent aussi d’accéder aux idées novatrices et à l’expérience du secteur privé, et aident parfois à
mettre en œuvre les projets plus rapidement sans devoir passer par un long processus concurrentiel.
Bien que les projets proposés n’entrent pas typiquement dans les plans de développement ou dans les
prévisions budgétaires du gouvernement, ils doivent toutefois s’inscrire dans la vision stratégique et
politique du gouvernement en place. Ainsi, et surtout quand leurs ressources financières et techniques
sont limitées, de nombreux gouvernements permettent les propositions spontanées afin de faciliter
l’identification et la préparation de projets représentant une valeur économique, toujours dans le but
d’atteindre un objectif d’optimisation de dépense publique – comme pour tout projet PPP découlant
d’appel d’offres compétitif.
Optimiser la dépense publique constitue toutefois un défi, même lorsqu’il s’agit de projets
sollicités par le secteur public et quand celui-ci a la capacité d’identifier, de prioriser, de développer, et
de mener l’appel d’offres pour les projets. Ce défi est d’autant plus grand pour les propositions
53

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spontanées. Le Public-Private Infrastructure Advisory Facility (PPIAF) de la Banque Mondiale a
effectué une série d’études sur les propositions spontanées dans les PPP. La plus récente de celles-ci est
arrivée à la conclusion que la gestion des propositions spontanées est plus complexe et risquée que celle
de projets préalablement identifiés par les gouvernements (PPIAF 2014). Au vu de ces risques perçus,
les propositions spontanées ont été interdites par plusieurs gouvernements, dont celui du Royaume Uni.
En effet, elles sont souvent associées à un manque de transparence et à une concurrence limitée qui
favorisent la corruption et les comportements opportunistes, surtout lorsqu’elles entrainent une
procédure de négociation directe.
Néanmoins, par rapport à la situation en 2007, davantage de pays permettent aujourd’hui au
secteur privé de soumettre des propositions spontanées de projets. Quelques pays membres de l’OCDE
cherchent même à redynamiser leur marché de propositions spontanées, comme la Corée du Sud. Une
analyse qualitative des quelques pays qui fournissent des informations suffisantes et transparentes sur le
sujet indique que les propositions spontanées peuvent s’avérer être un facteur important dans la
réalisation de projets d'investissement public (PPIAF 2014). Elles sont plus fréquentes dans les secteurs
de l'énergie, de l'eau et de l'assainissement que dans le transport.
Afin d’inciter le secteur privé à soumettre des propositions spontanées, les gouvernements
concernés tentent de développer des règles claires et prévisibles en la matière, surtout ces dernières
années. Ces efforts s’inscrivent dans un cadre plus général d’amélioration de la gouvernance et de la
transparence des dépenses publiques. À titre d’exemple, plus de 70% des pays étudiés par PPIAF ont
mis en place un cadre législatif formel pour les propositions spontanées (PPIAF 2014). La Tunisie,
aussi, prévoit un cadre législatif pour les propositions spontanées à travers le projet de loi sur les PPP,
ainsi qu’un décret d’application prévu pour ce cas particulier. Celui-ci permettra de clarifier le statut et
les procédures associés aux propositions spontanées dans un cadre juridique clair, dont l’instance des
PPP sera sans doute le point focal de coordination.
L’établissement d’un cadre réglementaire pour les propositions spontanées est recommandé mais il
n’est pas suffisant pour encourager le secteur privé à présenter des propositions solides de projets, ou à
assurer une optimisation de la dépense publique à travers les projets proposés. Il est essentiel que le
gouvernement mette en place les moyens et les capacités à appliquer les procédures, prescriptions
minimales, et autres aspects liés aux propositions spontanées. Pour les pays dont les capacités et
l’expérience en matière de PPP restent à développer, comme dans le cas pour la Tunisie, il faut tout
d’abord mettre en place un cadre clair pour recevoir, étudier et gérer les propositions spontanées reçues.
Ceci devra s’accompagner d’un développement de capacités dans le secteur public, sans toutefois sous-
estimer le rôle initial que peuvent jouer les banques de développement et les conseillers externes. Dans
un deuxième temps, lorsque les capacités en matière d’expérience et de gestion de différentes formes de
PPP (y compris ceux qui découlent de propositions spontanées) seront plus aiguisées, il conviendra
d’imposer des critères minimums stricts pour les propositions spontanées soumises ainsi qu’un cadre
clair et compétitif pour la mise en place de ces projets. Il est conseillé d’avoir en place une unité des
PPP habilitée, avec des conseillers internes et potentiellement externes spécialisés dans la gestion des
propositions spontanées, qui peuvent aider à élaborer des règles du jeu claires et une stratégie de
communication autour des propositions spontanées pour toutes les parties prenantes (PPIAF 2014).

La décision d’entamer une négociation directe ou de soumettre la proposition spontanée à un appel
d’offres compétitif, comme le prescrit les meilleures pratiques, reste le choix du gouvernement. Il existe
un compromis entre garder le caractère innovant des projets proposés et maintenir une procédure
transparente et compétitive. Les projets possédant des attributs importants de propriété intellectuelle
sont plus à mêmes de bénéficier de négociations directes. Mais il faut noter qu’un recours systématique
à une procédure compétitive d’appel d’offres accroitra la transparence du projet et sa capacité à
optimiser la dépense publique, tout en limitant les propositions opportunistes. De manière semblable,
54


Page 55
bien que la mise en place d’une procédure spécifique pour récompenser la proposition spontanée puisse
inciter le partenaire privé à innover, cela fournit un avantage par rapport aux autres soumissionnaires
potentiels, ce qui peut entraîner un manque de transparence et une réduction de la pression
concurrentielle (CEPR 2014). C’est le risque encouru par l’article 17 du projet de loi tunisien relatif aux
PPP (
voir annexe) selon lequel, si la proposition spontanée comporte une idée innovante ou innovatrice,
l’autorité publique peut conclure un marché négocié avec le titulaire de la proposition. Surtout en
l’absence d’une définition claire d’idée « innovante », ce dispositif risque d’entrainer des abus et
mériterait d’être clarifié.
Toutefois, il est possible et même conseillé de mettre en place un système pour récompenser la
proposition initiale, mais si possible de telle manière à ne pas affecter la procédure d’appel d’offres (ce
qui n’est pas le cas dans les actuelles dispositions du projet de loi tunisien). Le Chili ou encore la Corée
du Sud ont par exemple mis en place un système de bonus pour compenser le secteur privé pour sa
proposition spontanée. Il existe plusieurs méthodes parmi lesquelles le gouvernement tunisien pourrait
choisir lors de l’élaboration de procédures détaillées concernant les propositions spontanées, qui ont
chacune des avantages et des inconvénients (résumées au Tableau 2.3). Dans le cas spécifique de la
Tunisie et compte tenu de son classement du Forum Économique Mondial en termes de protection de la
propriété intellectuelle du secteur privé, il serait important d’instaurer une politique claire et
contraignante à ce sujet.
55


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Tableau 3.1. Mécanismes de compensation pour les soumissionnaires initiaux de propositions spontanées
(liste non exhaustive)
Mécanisme
Définition
Avantages et inconvénients
Défi suisse (Swiss
challenge
)
Un processus d'appel d'offres
ouvert est mené, dans laquelle
le soumissionnaire initial a le
droit d'égaler l'offre gagnante
pour remporter le contrat.
Système
bonus/prime
de
offres,
Un processus d'appel d'offres
ouvert
Dans
est mené.
le
des
l'évaluation
soumissionnaire initial reçoit des
points de bonus (généralement
cinq à dix pour cent des points),
qui lui donne un avantage sur
les autres soumissionnaires.
Des règles relativement claires fondées sur des
critères d'évaluation des soumissions pour chaque
projet, qui ne nécessitent pas une analyse
supplémentaire ou une prise de décision subjective
(lorsque le prix est le seul critère d'attribution). Si les
propositions sont évaluées à la fois par la qualité et
par le prix, le niveau de complexité augmente, rendant
le mécanisme de défi suisse souvent difficile à mener.
De nombreux soumissionnaires sont réticents à
allouer des ressources pour des contre-propositions
parce qu'ils peuvent être jumelés
Un bonus peut être utilisé pour le score technique
(Corée du Sud) ou le score économique (Argentine,
Chili)
Puisque les critères d'évaluation varient par projet,
la définition des primes appropriées est subjective et
potentiellement ouverte à la manipulation
Un grand bonus dissuaderait
les autres
soumissionnaires potentiels et une
faible prime
découragerait la soumission initiale des propositions
spontanées
Short-listing
automatique
étages.
Cette option s’applique à une
procédure d'appel d'offres à
plusieurs
Le
soumissionnaire initial n'a pas à
passer les étapes préliminaires
la procédure, mais est
de
automatiquement
la
dernière étape, dans laquelle les
restants
soumissionnaires
présentent
leur meilleure et
dernière offre.
invité à
Frais
développement
de
Les coûts de développement de
projet du soumissionnaire initial
sont remboursés, soit par le
gouvernement
le
ou
soumissionnaire gagnant
Une approche très simple et transparente, ne
nécessitant
décisions
de
d'analyse
supplémentaires par l'autorité contractante.
pas
ou
Donne peu de récompense au soumissionnaire
initial dans la procédure elle-même.

Il y a encore d'importantes incitations pour la
présentation de propositions spontanées. Tout
d'abord, les termes de référence de l'appel d'offres
ouvert sont basés sur le soumissionnaire initial, ce qui
qui par lui-même donne un avantage. Deuxièmement,
le soumissionnaire initial peut orienter les priorités de
l'autorité contractante à des projets dans son domaine
d'activités.
Reconnaît la valeur de la propriété intellectuelle
développée par le soumissionnaire initial
Encourage les propositions non sollicitées en
réduisant le coût du soumissionnaire initial en cas
d'échec dans le processus d'appel d'offres
Nécessite toutefois une analyse potentiellement
subjective pour s’entendre sur les coûts appropriés et
risque d’encourager les propositions frivoles.
Sources : PPIAF, IFC
56

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Tout gouvernement a une capacité limitée à mener à bien les projets PPP, et celle-ci peut être
consacrée aux projets sollicités ou bien aux propositions spontanées de projets. Idéalement, la capacité
limitée du secteur public devrait être utilisée pour des projets qui lui sont prioritaires et qui bénéficient
d’un fort soutien politique. Ceux-ci devraient provenir d’un « pipeline » clair et priorisé de quelques
projets – trois à cinq, à titre indicatif – qui ont été approuvés au plus haut niveau politique (voir le
dernier chapitre de ce rapport). Les autorités tunisiennes doivent tenir en compte l’importance de ne pas
laisser les propositions spontanées devancer la création d’un cadre robuste de sélection de projets. Ces
propositions ne doivent pas se retrouver directement en tête de file parmi les potentiels projets PPP ;
elles doivent faire partie d’un cadre contrôlé et soucieux de l’optimisation de la dépense publique. Les
autorités tunisiennes peuvent également envisager, dans un premier temps d’interdire les propositions
spontanées, afin de limiter la dispersion des efforts et la confusion quant aux priorités du gouvernement.
Cette mesure a été prise par certain pays notamment le Royaume-Uni.
Si le gouvernement tunisien décide qu’une idée de proposition spontanée mérite d’être poursuivie,
le projet proposé par le secteur privé devrait donc idéalement rejoindre les autres propositions de projets
PPP du secteur public en « liste longue ». A ce stade, le projet passe par le filtre économique et
technique en place (approbation de l’Instance PPP, etc., comme il est décrit plus haut) avant de parvenir
à la
pré-sélection des projets prioritaires. Seuls ces projets feront l’objet d’une évaluation de faisabilité
poussée, ce qui peut constituer un pourcentage important du coût total du projet.
Si une proposition spontanée fait partie de la pré-sélection des projets prioritaires pour l’État, elle
doit ensuite passer par une procédure d’appel d’offres compétitive comme pour tout autre projet PPP, et
ceci afin d’assurer une optimisation de la dépense publique pour le gouvernement tunisien. Il y a peu ou
pas d'exemples dans les pays de l'OCDE de projets ne passent pas par une phase compétitive d’appel
d’offres, qu’ils découlent ou non d’une proposition spontanée. Le gouvernement peut dès lors choisir de
mettre un système compensatoire ou non pour indemniser la proposition initiale si celle-ci ne réussit pas
durant la procédure d’appel d’offres.
Critères et mesures de performance
D’un pays à l’autre, le degré de souplesse quant au contenu des contrats de concession et de
partenariat (en particulier en ce qui concerne les critères de performance) varie d’une juridiction à
l’autre – certains cadres juridiques offrent un maximum de marges visant à favoriser la négociation dans
l’élaboration des contrats, tandis que d’autres précisent des éléments à inclure obligatoirement dans tout
contrat (Meziou 2013). En vue d’un suivi efficace, certains pays structurent leurs contrats selon un
mode de partenariat basé sur la performance (
performance based procurement, PBP) qui peuvent être
adaptés aux PPP. Les paiements des contrats PBP sont effectués en fonction de la qualité et du volume
de rendement du contrat de partenariat suivant un calendrier préétabli. Par rapport à un processus
d'appel d'offres plus traditionnel où les intrants sont clairement identifiés, dans le PBP, il appartient aux
soumissionnaires de préciser comment ils entendent atteindre les résultats souhaités. En revanche, les
formes plus traditionnelles de fourniture d'infrastructures ont tendance à inclure les spécifications
techniques détaillées, avec moins de place pour l'innovation (mais aussi moins de transfert de risques)
vers la partie privée. Par conséquent, les paiements envers les prestataires privés dans les PBP prennent
souvent la forme de paiements mensuels fixes, agrémentés d’un montant variable variant en fonction
des normes de performance fixées dans le contrat de partenariat. Certains contrats prévoient également
le paiement de primes pour récompenser les bons résultats et la rétention des paiements si les résultats
sont en deçà des indicateurs spécifiées.
La législation tunisienne adoptait jusqu’à présent une approche intermédiaire à cet égard:
l’article 20 de la loi de 2008 relative au régime des concessions indique que le contrat doit prévoir
l’examen périodique de l’état d’avancement de son exécution, sans donner davantage de détails ni de
57

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recommandations à ce sujet dans le décret d’application n°2010-1753. Or dans la perspective
d’améliorer la traçabilité des projets, le projet de décret de 2013 fixant les conditions, procédures et
modalités de passation des contrats de concession et de partenariat précise que le contrat doit prévoir :
un programme de performance indiquant précisément les objectifs à atteindre ; les outils de mesure de
la performance ; les pénalités associées en cas de non-respect de la performance ; et les primes que
l’autorité publique doit verser au partenaire privé en cas de dépassement significatif des objectifs. Quant
à la rémunération du partenaire privé, l’article précise qu’elle doit comporter quatre éléments de
rémunération liés aux engagements de performance fixés : financière (intégrant les amortissements des
investissements et les charges financières y afférant) ; exploitation-maintenance ; gros entretien et
renouvellement et frais de gestion. De manière semblable, le projet de loi relatif aux PPP mentionne que
le contrat doit prévoir des « objectifs de performance assignés à la société de projet » ainsi que des
« modalités du contrôle et du suivi exercé par l’autorité publique dans l’exécution du contrat,
notamment la réalisation des objectifs de qualité ».
Le « performance based contracting » a connu un essor aux États-Unis dès 1991, tout d’abord
comme une stratégie administrative entre différents niveaux de gouvernement: une directive du bureau
central de gestion budgétaire, l’OMB, incitait les agences fédérales à employer cette approche dans leur
acquisition de services publics. Dans la foulée, divers pays en développement et économies émergentes
(en particulier en Amérique Latine) ont structuré des contrats en se basant sur le suivi des performances.
D'autres pays ont tenté une forme légèrement différente pour mesurer la performance, en définissant des
objectifs de performance mesurés par l’amélioration par rapport à un indice de référence (plutôt que de
se baser sur des niveaux absolus de rendement). Par exemple dans le secteur de l'eau et de
l’assainissement, la performance des concessions au Chili est mesurée par rapport à une entreprise
modèle, tandis que les contrats urbains à Manille comme à Jakarta ont été segmentés en zones Est et
Ouest, ce qui permet des comparaisons de performance directes. Étant donné le peu d’expérience
accumulée à ce jour par la Tunisie en matière de PPP dans les infrastructures, les autorités pourraient
envisager le recours à de telles approches, fondées sur des mesures relatives plutôt qu’absolues, pour
mesurer la performance (et partant, calibrer la rémunération du partenaire privé) dans les PPP.
Une autre approche – mais souvent plus couteuse en temps et en capacité technique, et de plus
davantage sujette aux incertitudes économiques pouvant influer sur le bon déroulement du projet – est
de s’appuyer sur l’expertise publique pour définir les critères de performance spécifiques à chaque PPP.
En effet, puisque le PPP accorde une plus grande marge de manœuvre au partenaire privé et requiert un
suivi particulièrement rigoureux de la part des autorités contractantes, la préparation de spécifications
fonctionnelles adaptées à chaque projet nécessite une expertise propre au sous-secteur d’infrastructure
concerné. Cela peut exiger le recours à une expertise externe, y compris lors de la phase d’évaluation.
Élaboration et négociation du contrat
Partage des risques entre les secteurs public et privé
Un contrat bien structuré peut permettre de mieux estimer le coût réel des services fournis (voir de
permettre une réduction du prix pour les utilisateurs). La mobilisation de ces avantages techniques et
commerciaux nécessite que les contrats soient négociés de manière transparente et fiable en amont, afin
d’assurer une bonne répartition des risques et des critères de performance pertinents. L’expérience de
l’Australie (qui figure, avec le Royaume Uni, parmi les leaders mondiaux en matière de PPP) démontre
à cet égard que les contrats PPP bien structurés ont souvent une plus haute probabilité d’obtenir les
résultats escomptés à temps et au prix convenu. Parmi les contrats ‘traditionnels’ de concession et les
contrats de partenariat achevés en 2007 dans ce pays, les dépassements de coût sur la durée de vie du
projet (de l’appel d’offres jusqu’à son achèvement) atteignaient en moyenne 35,3% pour les contrats de
type ‘traditionnel’ et seulement 11,6% pour les contrats de type PPP.
58

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Une attention insuffisante accordée aux risques liés aux PPP, par contre, risque fort de
compromettre leur viabilité à long terme, avec des conséquences négatives pour les finances publiques
ainsi que pour les usagers de services de première nécessité. En Inde par exemple, malgré le ‘boom PPP’
que connait le pays ces dernières années, l’inadéquation entre le cadre juridique existant et l’appétit des
investisseurs pose problème car les investisseurs se retrouvent exposés à de nombreux risques. En
particulier, sont cités les risques fonciers, la complexité des procédures d’approbation de la part du
gouvernement, la faible cohérence dans le cadre juridique relatif aux PPP et les risques financiers liés à
la domination du secteur public dans le secteur de la finance (Foster 2011).
Les Principes de l’OCDE pour la participation du secteur privé aux infrastructures et les Principes
de l’OCDE pour la Gouvernances des PPP recommandent tous les deux un partage soigneusement
équilibré des risques de projet entre les partenaires public et privé, en fonction du type de risque et du
cocontractant qui est le mieux à même d’évaluer et de maîtriser chaque risque. Et cela qu’il s’agisse de
prévenir leur matérialisation (gestion du risque a priori) ou de faire face aux conséquences de cette
matérialisation (gestion du risque a posteriori). Ce principe est repris dans le projet de loi relatif aux
PPP (version de septembre 2014) à l’article 8 qui précise que « les contrats de partenariat sont soumis
au principe de l’équilibre économique à travers le partage des risques dans le contrat entre l’autorité
publique et le partenaire privé en fonction de la capacité de chacun d’eux à y faire face ». L’article 30
reprend une terminologie semblable et quant au régime des concessions, il est prévu que le
concessionnaire assume une partie substantielle des risques.
Les risques endogènes peuvent être gérés par l’une des parties. Toutefois, il peut arriver qu’une ou
plusieurs parties à un contrat soient dans l’incapacité de gérer un risque. Pour ces parties, ce risque
devient exogène. Bien que des risques comme les risques politiques soient généralement assumés par
les pouvoirs publics, la répartition des risques varie en fonction du type de projet d’infrastructures. Dans
le cas des concessions et des PPP, les principaux risques incluent : les risques liés à la conception, à la
construction et à l’aménagement (principalement dans les projets immobiliers ou à caractères sociaux);
les risques d’exploitation, commerciaux et de performance ; les risques financiers ; les risques liés aux
obligations de service public ; les risques de déchéance et de fin anticipée ; et les risques juridiques et
élémentaires.
Dans la pratique, la Tunisie parait se conformer aux normes internationales en ajustant les risques
selon les projets, sans disposer encore de lignes directrices standardisées (FEMIP 2011). Cela concerne
les concessions de même que les contrats de partenariat. En effet, en vertu de l’article 4 de la loi de
2008 relative au régime des concessions, le concédant et le concessionnaire doivent veiller au maintien
de l’équilibre financier du contrat en prenant en compte à la fois la rémunération perçue par le
concessionnaire et les impératifs du service public objet du contrat. Selon l’article 4, le concessionnaire
assume une partie « substantielle » des risques découlant de l’exécution du projet (autrement dit la
majorité d’entre eux, les modalités de partage des autres risques avec l’autorité publique étant
déterminées par le contrat). Il s’agit d’un premier pas positif, étant donné que la notion de partage des
risques n’avait jamais été consacrée dans les textes sectoriels avant 2008 – et d’ailleurs de nombreuses
autres législations sur les concessions (par exemple la loi n°54.5 sur la gestion déléguée des services
publics au Maroc, dans son article 24) n’abordent pas ce principe.
Toutefois ces dispositions semblent préconiser un transfert excessif des risques à la personne
privée, indépendamment de la nature du service public à fournir (par exemple dans le cas d’une
infrastructure routière devant être financée par un péage, le risque lié à la demande peut être
particulièrement élevé et bien qu’il soit lié à la mise en œuvre du projet, il ne peut pas être
exclusivement assumé par la personne privée ; l’encadré 2.16 fournit des exemples à ce sujet, tiré des
expériences du Nigeria et de la Malaisie). Bien que les autorités publiques puissent considérer qu’elles
ont intérêt à transférer à l’investisseur privé autant de risques que possible, elles doivent en effet obtenir
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un équilibre entre cet objectif et le prix que le partenaire privé devra percevoir pour que la prise en
charge de ces risques se justifie financièrement. Ce principe est tout aussi valable pour les projets de
type PPP.
Il pourrait être opportun d’adapter la législation tunisienne relative aux contrats de partenariat et
aux concessions de façon à tenir compte des normes internationales et des normes de répartition des
risques telles que celles d’Eurostat ou de l’OCDE, dont les Principes pour la participation du secteur
privé aux infrastructures conseillent un partage plus équilibré des risques de projet entre le partenaire
public et privé, en fonction du type de risque et du cocontractant qui est le mieux à même d’évaluer et
de maîtriser chaque risque. Selon le Principe 3, la répartition des risques entre le secteur privé et le
secteur public devrait donc être effectuée largement en fonction du modèle retenu de participation du
secteur privé, et notamment de la répartition des responsabilités.
Au-delà de la simple définition des modalités de partage des risques dans le contrat proprement dit,
le partage de risques devrait se garder de trop pénaliser l’investisseur privé, et devrait plutôt varier en
fonction de la forme du contrat retenu. Les autorités publiques doivent donc être capables de calculer
les différents risques et d’en influencer l’équilibre. Au Pérou, pour faciliter cet équilibrage, l’agence de
promotion des investissements ProInversión a élaboré des matrices de risque pour identifier, affecter et
atténuer les risques éventuels liés à des contrats de concession. Les autorités tunisiennes pourraient
utilement s’inspirer de cette pratique, en élaborant des matrices adaptées aux divers secteurs
d’infrastructure et en s’appuyant sur des matrices ‘types’ fournies par différentes agences
internationales. Par exemple le PPP Infrastructure Resource Centre (PPP-IRC) de la Banque mondiale
propose une matrice de risque type pour les autoroutes à péage (http://ppp.worldbank.org/public-
private-partnership/library/road-concession-risk-matrix). Or même lorsque de telles matrices sont bien
employées, il est à noter qu’une faible capacité de négociation de la part de l’autorité contractante, ou
encore une communication insuffisante et parfois délibérément opaque entre acteurs publics et privés
22,
peuvent toutefois conduire à un contrat déséquilibré pour le partenaire public ou privé.
La quantification des risques, et leur intégration pour le choix entre les projets de concession
traditionnels et les contrats de partenariat ne sont pas abordés dans le projet de loi tunisien relatif aux
PPP, ainsi que dans le projet de décret fixant les conditions, procédures et modalités de passation des
contrats de concessions et de contrats de partenariat (dont les sections concernant les PPP sont toujours
en attente). Le projet de loi (voir annexe) précise en effet en détail les informations nécessaires en
amont de la préparation et la signature d’un contrat de partenariat. Le risque encouru par la partie privée
est un élément essentiel de tout PPP (contrat de partenariat ou concession), et son évaluation préalable
avec l’autorité contractante doit être correctement réalisée. Le projet de loi précise que les risques
doivent être partagés entre personnes publique et privée « en fonction de la capacité de chaque partie de
faire face à ces risques, en tenant compte de l’intérêt général et des spécificités du projet ». De plus, le
texte cite parmi les mentions obligatoires du contrat, les conditions de rééquilibrage des risques dans le
cas de survenance de circonstances exceptionnelles. Ces clauses correspondent aux bonnes pratiques
internationales, telles que mentionnées dans les Dispositions législatives types de la CNUDCI sur les
projets d’infrastructure à financement privé de la (Recommandation 12 ; CNUDCI 2014), ou encore
dans les Principes de l’OCDE pour la participation du secteur privé aux infrastructures (Principe 3 ;
OCDE 2007).
De plus, le projet de décret fixant les conditions, procédures et modalités de passation des contrats
de concession et de partenariat met l’accent sur la prise en compte obligatoire du partage des risques au
cours de l’évaluation préalable de tout projet PPP. Afin de mieux contrer les éventuels risques
financiers et politiques, ce texte comporte aussi des dispositions gouvernant les cas de cession de
créance dans les projets de contrats de partenariat (voir encadré 2.13 pour plus d’informations sur les
traitements de créances en France). Selon le projet de loi PPP, la cession de créance doit se faire
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conformément aux conditions et procédures de la loi 2000-92 du 31octobre 2000, relative aux actes de
cession ou de nantissement de créances professionnelles et à la mobilisation de crédits rattachés.
Encadré 3.4. Les cessions de créance en France
Une “cession de créances” est un mécanisme par lequel un créancier transfère le bénéfice de certaines
créances directement à ses banques. Les “cessions” sont réglées sous la Loi Daill
y de 1981, qui vise à fournir un
cadre clair pour des techniques simplifiée d’hypothéquant commercial. Selon la Loi Dailly, un créancier peut lever
des fonds de sa banque en transférant les bénéfices des montants qui lui sont dus. Ces montants sont consignés
sur un « bordereau Daily », qui a son tour sert de garantie pour le prêt. Un des avantages du mécanisme est sa
démarcation de la faillite. En cas de faillite, le liquidateur ne peut pas réintégrer les fonds soumis à la cession
dans la dette commune au profit de tous les créanciers.
L'objectif principal de la cession est de sécuriser une partie du remboursement de la dette aux banques.
Pour éviter de porter un risque de performance, la banque doit demander que la cession soit «acceptée»: en
acceptant une cession, le débiteur entreprend de payer les sommes dues au titre des créances recouvrables,
quoi qu'il arrive dans le cadre du contrat sous-jacent. Cet accord crée une très forte obligation de paiement direct
par l'autorité contractante à la banque.
Les cessions et le mécanisme d'acceptation sont utilisés pour le financement des PPP français. L'autorité
publique accordant le contrat de PPP (et, par conséquent, qui responsable pour un flux de paiements de service
à la société PPP sur la durée du contrat) p
eut décider à l'avance d’accepter le transfert du bénéfice d'une partie
de ces paiements aux prêteurs, sous certaines conditions prévues dans le contrat de PPP. Les conditions
principales par lesquelles cet accord devient valide sont que (i) la construction doit être terminée et le projet en
phase d’exploitation et (ii) seulement une partie de la charge de service correspondant à l'investissement et les
coûts de financement peuvent être transférés. Une loi de 2008 plafonne cette portion à 80% de la partie
investissement et financement du paiement. L'avantage du transfert devient alors irrévocable, indépendamment
du fait que les services en vertu du contrat de PPP soient rendus ou non. La justification économique de ce
système est que les prêts garantis par la cession Dailly seront considérés comme des emprunts publics par les
prêteurs, et en tant que tel serviront à attirer des paiements d'intérêt bas, résultant en une charge de service
inférieure pour l'autorité contractante.
Le système a prouvé son efficacité en ce qui concerne l’optimisation du coût de financement des PPP,
sans limiter de manière significative le transfert de risque.
Source : EPEC 2011
Gestion des risques grâce à la structure contractuelle
La structure contractuelle elle-même peut améliorer de manière significative la gestion des risques
et la solidité du contrat. Par exemple, de nombreux contrats allègent le risque lié à la demande et aux
revenus grâce à une clause « take-or-pay » selon laquelle le concessionnaire garantit la mise à
disposition du service (le plus souvent le gaz, l’électricité ou l’eau) auprès de l’acheteur (l’autorité
contractante, souvent l’entreprise publique assurant la distribution et la transmission du service), qui
garantit en contrepartie le paiement d’une quantité minimale du service, qu’il en prenne livraison ou
non. En Tunisie c’est le cas pour les secteurs où les segments de distribution et de transport restent
monopolistiques mais où la production est ouverte aux acteurs privés (comme par exemple pour
l’électricité, l’eau, ou le gaz) : le concédant dans ce cas est assimilé à un « usager unique » qui achète la
quantité produite et se charge de sa distribution à l’usager final.
Le premier contrat PPP conclu pour le dessalement de l’eau de mer à Singapour23 a ainsi ménagé
les risques liés à la demande grâce à des clauses de type « take or pay », tout en maintenant des
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incitations fortes pour la performance du partenaire privé : la clause « take-or-pay » (garantissant au
partenaire privé un revenu de base) était accompagnée d’une rémunération en fonction des rendements,
et d’un accord « step-in » selon lequel, si le rendement du concessionnaire ne s’avérait pas satisfaisant,
l’entreprise publique concernée pourrait prendre la relève et gérer elle-même le personnel et
l'équipement du projet. Les risques de passifs éventuels que l’accord « take-or-pay » allouait à
l’entreprise publique (en raison de l’obligation de paiement) étaient à leur tour allégés par une forte
garantie de l’État, qui a notamment mis à disposition un prêt de soutien pour couvrir 70% de tous les
dépassements de coût.
Dans certains cas, il s’avère aussi souhaitable d’envisager des alternatives innovantes à la structure
PPP. L’encadré 2.14 présente le programme de développement des énergies renouvelables sud-africain
(REIPPP), où le modèle de PPP habituel n’a pas été retenu en raison des caractéristiques spécifiques du
projet – un système d’enchères s’étant révélé plus adéquat. De telles alternatives mériteraient d’être
considérées par les autorités tunisiennes dans certains cas de figure où la structure PPP n’est pas la
mieux à même d’apporter les gains de technologie, l’appui financier et le volume de participation privée
attendus.
Encadré 3.5. Le programme de développement des énergies renouvelables en Afrique du Sud
En 2009, alors que le gouvernement sud-africain avait commencé à explorer la mise en place de tarifs « feed-in »
(FIT) pour le rachat de la production
d’électricité à partir d’énergies renouvelables, il a été décidé de procéder
plutôt par des offres concurrentielles. Le programme de développement des énergies renouvelables (REIPPP) a
été lancé en 2010 sur une période de vingt ans pour réduire la dépendance du pays au charbon. Le REIPPP
présente une option alternative aux contrats PPP pour la participation privée dans les infrastructures. En effet, le
choix de l’approche retenue (par appel d’offres) résulte d’une étude des régulations qui ont exempté le
programme des applications du ‘National Treasury Regulation 16’, le décret posant les conditions d’évaluation et
d’approbation des PPP en Afrique du Sud.
Ce décret, qui impose le respect de 24 étapes différentes, aurait pu
ralentir le processus et ne s’appliquait pas à la structure des contrats envisagés. Suivant l’approche de «
l’acheteur unique
», ceux-ci seraient établis avec l’entreprise publique Eskom, qui détient toujours le monopole
sur la transmission et la distribution d’énergie en Afrique du Sud et qui n’est pas sujette aux applications de la loi
PPP. Toutefois pour veiller au respect de certains principes fondamentaux sur la participation privée dans les
infrastructures, les soumissionnaires eux-
mêmes (plutôt que l’Unité des PPP lors de l’examen du projet) devaient
chacun démontrer l’optimisation de la dépense publique dans leur soumission.
Le PPIAF de la Banque Mondiale identifie les facteurs suivants ayant permis le succès du REIPPP à ce jour :
Système flexible d’appel d’offres :
Le REIPP s'appuie sur un système d'appel d'offres, dont trois tours de table ont déjà été conclus et un quatrième
est à l'étude. Ces tours successifs ont permis aux prix de chuter (réduction de 68% du prix moyen pour le
photovoltaïque, et de 42% pour l’éolien) ; ils ont aussi favorisé une confiance croissante parmi les investisseurs (à
l’origine méfiants à l’ég
ard de cette nouvelle structure et rétifs aussi à établir des contrats de longue durée avec
Eskom) dont le nombre a progressivement augmenté lors des tours de table successifs.
À ce jour, 64 projets (dont éoliens, solaires et solaires thermiques) ont été attribués au secteur privé. Pour
chacun, l’agence nationale (Eskom, qui détient toujours le monopole sur la transmission et la distribution
d’énergie en Afrique du Sud) s'est engagée sur vingt ans selon le modèle de « l’acheteur unique ».

Évaluation des offres :
La soumission d’appel d’offres se produit en deux étapes, afin de ne retenir que les soumissionnaires pré-
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qualifiés (remplissant des critères minimum sur les questions juridiques, commerciales, techniques, financières,
environnementales, et aussi de développement économique). Lors de la deuxième étape les soumissions sont
évaluées selon un barème qui accorde une pondération de 70% au prix de la soumission, et de 30% à un groupe
d’objectifs (la création d'emplois, le contenu local, la propriété et le contrôle de gestion, le régime préférentiel en
matière de marchés publics, le développement des entreprises locales, et de manière plus large le
développement socio-
économique du pays). Il s’agit d’une dérogation accordée au REIPPP, par rapport à la grille
habituelle d’évaluation qui accorde une pondération de 90% aux critères de prix et qui partant, risque de pénaliser
les technologies les plus innovantes. De même le programme n’a pas été soumis aux applications du décret
relatif aux PPP, et a bénéficié de certaines dérogations par rapport à la loi relative aux concessions.
Gouvernance des contrats :
Les efforts antérieurs visant à stimuler la participation privée dans la production d’énergie avaient été gérés par la
compagnie publique Eskom, mais sans succès sans doute en raison d'un manque de capacité ou d'incitations
pouvant persuader Eskom d’affaiblir son monopole sur la production d'électricité. Par contraste, le programme
REIPPP est contrôlé par le ministère de l'Énergie (DOE) avec le soutien technique de l’Unité des PPP. L’équipe
chargée du projet est d’ailleurs menée par un cadre de l’Unité
des PPP. De plus le secteur privé a été impliqué
dès les premières phases du programme,
au moyen d’un dialogue avec les homologues privés sur la conception
et l
a mise en œuvre du REIPPP.
Par conséquent, les contrats étaient bien structurés et contenaient trois accords standardisés : un contrat d’achat
d’énergie (Power Purchase Agreement, PPA), un accord de mise en œuvre, et un accord direct. L’accord de mise
en œ
uvre, établi entre le DOE et le producteur indépendant, fournit une garantie souveraine à ces derniers en
exigeant que le DOE satisfasse les obligations de paiement en cas de défaut d’Eskom. Par ailleurs cet accord
impose des obligations de performance au partenaire privé. Enfin, les accords directs permettent aux prêteurs
d’intervenir en cas de défaut. Ces trois contrats, à l’inverse de la plupart des accords de ce type, étaient surtout
des contrats non négociables élaborés après un examen approfondi des meilleures pratiques mondiales et de
longues consultations avec de nombreux partenaires publics et privés.
Ressources financières :
Parmi les autres facteurs clés ayant permis le succès de ce programme, il est important de mentionner la
disponibilité de re
ssources financières pour payer les experts, ainsi qu’un site Web, diverses bases de données,
et l'un des procédés appel d'offres les plus sophistiqués existants en Afrique. Le financement du programme
résultait à l'origine d'un protocole d'entente signé par le DOE, le Trésor national et la Banque de développement
d'Afrique australe (DBSA). Le programme bénéficia aussi de l'assistance technique mis à disposition par
différents bailleurs de fonds bilatéraux.
Source: PPIAF (Banque Mondiale), 2014
Gestion des risques politiques : protection contre l’expropriation
Parmi les risques les plus importants pour les investisseurs dans les projets PPP (et surtout les
projets d’infrastructure qui s’étendent sur de longues périodes), il faut citer en particulier le risque
politique, et notamment le risque d’expropriation ou de résiliation pour motif d’intérêt général. Il est
nécessaire d’indiquer ici que le motif d’expropriation invoqué par un investisseur en cas de litige peut
désigner non seulement une privation d’un droit foncier (expropriation directe) mais également des
mesures administratives et juridiques qui ont un impact sur ses droits de jouissance (expropriations
indirectes). Aujourd’hui, ces expropriations indirectes représentent la plus large part des litiges
concernant des cas d’expropriation. En raison de son importance et de sa nature, il est important de
prévenir contre ce risque non seulement dans le contrat lui-même, mais aussi dans le cadre juridique de
manière plus large. Le cadre juridique (par exemple le code national relatif à l’investissement, ou bien
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encore la Constitution) doit contenir des dispositions claires et détaillées prévoyant une obligation de la
part de l’État à indemniser l’investisseur privé en cas d'expropriation. Ces dispositions doivent énoncer
clairement les objectifs d'intérêt public qui pourraient justifier le recours juridique à l’expropriation,
ainsi que les délais et les modalités de calcul pour l’indemnisation en question. Quant aux modalités
d’indemnisation correspondant à d’autres risques politiques auxquels s’expose le partenaire privé
(résiliation anticipée du PPP changement de loi, force majeure, etc.), elles peuvent être précisées dans
les clauses contractuelles de chaque projet et ne nécessitent pas forcément des dispositifs précis dans le
texte de loi.
La législation tunisienne relative à l’expropriation date de 1976 et a été modifiée en 2003.
L’amendement de 2003 prévoit la création dans chaque gouvernorat d’une « commission de
reconnaissance et de conciliation » présidée par un magistrat, dont le rôle principal est d’œuvrer pour la
conclusion d’un accord entre les parties concernées par l’expropriation, notamment sur la valeur du bien
à exproprier. Il offre des garanties aux investisseurs, notamment le fait que l’expropriation pour cause
d’utilité publique doit être prononcée par décret, que la valeur de l’indemnité d’expropriation du bien en
question doit être fixée selon sa consistance et son usage effectif, et que la prise de possession par
l’expropriant doit être subordonnée au paiement de l’indemnité d’expropriation ou à sa consignation.
S’il y a un accord sur la valeur du bien, un contrat de vente doit être établi. Si la commission n’arrive
pas à un accord entre l’expropriant et le(s) propriétaire(s), l’indemnité est fixée par voie judiciaire. En
cas de persistance du désaccord, le propriétaire, après la promulgation du décret d’expropriation, a le
droit de recourir à la justice pour revendiquer l’indemnité à laquelle il estime avoir droit. Il existe aussi
une possibilité de rétrocession lorsque le bien n’a pas été utilisé pour la réalisation du projet dans un
délai de cinq ans.
La plupart des 53 accords bilatéraux de promotion et de protection des investissements signés par
la Tunisie jusqu’en 2012 assurent en général aux investisseurs étrangers après établissement, un
traitement juste et équitable et non discriminatoire, le traitement de la nation la plus favorisée, ainsi que
la protection des droits des investisseurs en cas d’expropriation. Les dispositions sur l’expropriation
reconnaissent en général que l’expropriation doit être d’intérêt public et non discriminatoire, garantir la
légalité de la procédure et faire l’objet d’une compensation. En outre, les investissements d’un certain
montant peuvent bénéficier de clauses de stabilité dans le cadre des contrats d’investissement signés
avec les autorités. De plus certains accords de libre-échange, tels celui signé en décembre 2004 avec les
États membres de l’Association européenne de libre-échange (AELE : l’Islande, le Liechtenstein, la
Norvège et la Suisse) stipule que les parties s’accordent mutuellement la protection et la sécurité
complètes des investissements (OCDE 2012 a).
Dans le cas des projets d’infrastructures, surtout les PPP dont la rémunération peut dépendre de la
tarification auprès des usagers, il est également important que de telles dispositions couvrent les formes
d’expropriation indirecte. Celles-ci peuvent se produire par l'ingérence de l'État dans l'utilisation de la
propriété, ou lorsque l'État tire certains avantages de la propriété de l’investisseur – même si celle-ci
n'est pas saisie et si le titre de propriété légale n’est pas affecté. Par exemple les politiques de prix des
services publics, si elles affectent les chances des investisseurs de recouvrir leurs coûts, peuvent aboutir
à une expropriation indirecte contre laquelle les investisseurs doivent pouvoir faire appel devant une
instance administrative indépendante ou un tribunal judiciaire, et pour laquelle ils puissent exiger une
indemnisation rapide, adéquate et efficace, ainsi que le droit de contester l'expropriation. Il est à noter
que le cadre juridique actuel en Tunisie ne traite pas de l’expropriation indirecte de manière expresse.
Bien que les dispositifs favorisant la renégociation des contrats, qui peuvent aussi mieux préparer les
partenaires publics et privés à faire face à des modifications tarifaires imprévues, semblent assez
souples en Tunisie (voir plus bas) ; cette souplesse ne peut pas à elle seule remplacer une garantie
juridique contre le risque d’expropriation indirecte.
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Recommandations principales du chapitre
Revoir certaines dispositions prévues dans l’actuel projet de loi sur les PPP et veiller à :
Rendre plus contraignantes les dispositions prévues pour les propositions spontanées, en
précisant clairement le concept d’ « idée innovante » et en s’assurant que, si une proposition
spontanée fait partie des projets prioritaires pour l’État, elle doit ensuite passer par une
procédure d’appel d’offre compétitive comme pour tout autre projet PPP. Si un système est
prévu pour récompenser la proposition initiale, celui-ci doit tenter d’impacter le moins possible
la procédure d’appel d’offres. Certaines options moins susceptibles de fausser la concurrence
qu’un mécanisme de bonus (par exemple le remboursement ultérieur des coûts de
développement du projet) pourraient être envisagées.
Réviser certains dispositifs institutionnels afin de fluidifier les projets en :
Évitant la multiplication des instances et des procédures de contrôles afin de fluidifier autant
que possible les processus de préparation et de mise en œuvre des projets.
Créant éventuellement des procédures de traitements simplifiés pour les projets de partenariat
de petites tailles
Renfoncer la transparence lors de la phase de l’appel d’offre et d’octroi du marché et veiller à
informer et consulter la société civile et les utilisateurs
tout au long du projet PPP.
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CHAPITRE 4 : TROISIÈME PHASE - EXÉCUTION ET CLOTURE DU PROJET
Une fois le projet en phase d’exécution, les institutions gouvernementales doivent aussi assurer le
contrôle de l’exploitation : contrôle documentaire (l’obligation de déclarer des incidents ou les
difficultés, ainsi que la production de rapports financiers et de rapports annuels sur les conditions
d’exploitation) ; et contrôle sur le terrain (l’autorité publique ayant le droit d’opérer des investigations
sur le terrain pour vérifier le bon respect du contrat) (Zeno 2011). En effet et comme les conditions
économiques sous-jacentes sont susceptibles d’évoluer au cours du déploiement du projet, il est
nécessaire de vérifier régulièrement dans quelle mesure les hypothèses retenues lors de la préparation
du projet correspondent à la réalité. Ce chapitre s’intéresse donc en premier lieu au suivi des
performances lors de l’exécution des projets PPP, puis aux éventuelles renégociations de contrat qui
peuvent survenir au cours du cycle de vie du projet. Enfin, de bonnes pratiques en matière de clôture du
contrat (et de sa restitution au partenaire public) sont brièvement abordées.
Suivi des PPP pendant la phase d’exécution du projet
Assurer le suivi des projets requiert en général un personnel dédié qui peut prendre la forme d’une
équipe temporaire issue de l'entité en charge de l’appel d’offre du projet (l’autorité contractante) ou de
membres d’une unité permanente du gouvernement. Par exemple, l'Inde dispose d'une unité de suivi de
projet placée sous le Ministère de la statistique et de la mise en œuvre de programmes (MOSPI). Cette
unité peut fournir des services de suivi et de contrôle des activités des agences gouvernementales sur la
base de protocoles d'accord. Dans le cas des PPP, le suivi de projet est généralement confié aux
instances dédiées aux PPP. Par ailleurs, des unités de suivi des performances sont aussi placées au
niveau des gouvernements provinciaux.
Compte tenu de ces options, en Tunisie, la commission spéciale au sein de l’autorité contractantes,
et chargée de l’élaboration des étapes préparatoires pour chaque contrat PPP (telle que prévue par le
projet de décret relatif aux PPP, voir plus haut) devrait idéalement être impliquée dans le suivi du
contrat concerné ainsi que dans les renégociations éventuelles. Avec l’appui de la future Instance
nationale des PPP, l’autorité contractante peut donc assurer le suivi du projet directement ou
indirectement à travers les structures spécialisées sous sa tutelle (que ce soit la commission spéciale
spécifique au projet, ou d’autres agences – par exemple l’OACA pour les aéroports ou l’OMMP pour
les ports). En effet les agences sectorielles ont souvent une expertise technique plus poussée dans le
domaine objet du contrat. Ce suivi par l’autorité contractante est parfois accompagné d’un contrôle
exercé par les structures habilitées par la loi, surtout dans le domaine de l’environnement ou de la santé.
Étant donné l’importance de l’autorité contractante dans la gestion des PPP, le gouvernement
tunisien gagnerait à assurer une bonne coordination entre la commission spéciale et l’équipe en charge
de la coordination du projet (si celles-ci sont distinctes) au sein de l’autorité contractante. Le
représentant de l’autorité contractante siégeant à la commission spéciale pourrait, par exemple, faire
partie de l’équipe de suivi du projet PPP constituée par l’autorité ou le ministère chargé du suivi.
La Cour des comptes pourrait également jouer un rôle dans le suivi a posteriori des projets PPP au
moyen des rapports annuels, qu’elle réalise actuellement de façon ad-hoc. Des évaluations plus
systématiques pourraient nourrir la constitution graduelle d’une mémoire institutionnelle, et informer
les futures analyses d’optimisation de la dépense publique qui seront nécessaires à la préparation de
projets similaires. Pour des raisons semblables, le projet de loi PPP précise que l’Instance nationale des
PPP doit préparer un rapport annuel sur ses activités, en conformité avec les principes de bonne
gouvernance et de transparence, et comportant les recommandations de l’Instance sur le développement
66

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des contrats de partenariat et leur bonne exécution. Ce rapport doit être adressé au chef du
gouvernement et soumis aux organes nationaux chargés de l’audit et du contrôle. Il existe des
dispositifs semblables en ce qui concerne les concessions (article 8 du décret 1753-2010). Ces questions,
qui sont abordées plus en détail dans le dernier chapitre de ce volume, concernent de manière plus large
le rôle possible d’un ‘observatoire des PPP’ qui, dans plusieurs pays, existent aux cotés ou bien au sein
de l’unité des PPP.
En ce qui concerne les obligations de rendre des comptes faites au partenaire privé lui-même,
l’article 33 de la loi de 2008 relative au régime des concessions dispose notamment que le contrat
précisera la périodicité et les modes de contrôle des travaux du concessionnaire par le concédant. Un
rapport annuel sur la mise en œuvre du projet doit également être soumis au concédant ainsi qu’à USC,
qui entre autres doit dresser l’inventaire des besoins restant à satisfaire pour que le projet soit mené à
bien. Des dispositions semblables figurent de manière très explicite dans le projet de loi relatif aux PPP
ainsi que dans le projet de décret y afférant (qui dispose que le partenaire privé ou le concessionnaire a
l’obligation de soumettre un rapport annuel à l’autorité contractante, ainsi qu’à l’Instance nationale des
PPP – ou pour l’heure, l’USC).
Cependant, ces textes ne précisent pas de manière claire les liens institutionnels nécessaires au
suivi de ces projets. En dehors de l’USC et de la future Instance nationale des PPP, censées établir des
critères de performance et de réceptionner les rapports annuels concernant la concession, peu d’autres
agences contribuant au suivi de projets en Tunisie sont mentionnées de manière explicite. Bie que le
décret 2013-4631 relatif aux concessions aborde rapidement la relation entre l’USC et les services
compétents du ministère des finances, il n’y a pas par exemple de mention de la Direction Générale
d'Audit et de Suivi des Grands Projets (DGASGP, voir le chapitre précédent) qui est toutefois chargée
de plusieurs fonctions relatives à la phase d’exécution de projets à participation publique ; ni de la Cour
des Comptes, du Parlement, ou de la société civile, qui ont eux aussi un rôle critique à jouer dans le
suivi de l’exécution des projets d’infrastructure et de services publics. Ceci dit, la Cour des comptes et
le Parlement sont habilités à procéder à des audits compte tenu de leur textes de création et ce dans le
cadre de leur mission de supervision générale de la gestion publique.
Il est à noter, enfin, qu’un autre moyen potentiel pour mieux aligner les priorités des secteurs
public et privé, et assurer une plus grande transparence et disponibilité d'information en ce qui concerne
la gestion du contrat PPP et le suivi des performances, consiste pour le secteur public de s’assurer une
participation dans la société de projet (Special Purpose Vehicle/SPV). Néanmoins, ceci n’est pas une
approche fort commune. Elle rajoute un nouveau niveau de complexité dans la structuration du PPP,
implique de potentiels risques budgétaires supplémentaires pour le gouvernement (dans le cas où la
performance du partenaire privé serait insatisfaisante), et peut présenter des conflits d’intérêt si la
participation en capital du secteur public n’est pas gérée par une unité indépendante. Ces conflits
d’intérêt peuvent être néanmoins atténués à travers la séparation des fonctions d’investissement de
celles de supervision et de gestion. En France, les participations publiques sont effectuées par la Caisse
des Dépôts en créant un fonds d’infrastructure dédié tandis que le Royaume uni, suite à sa mise à jour
en 2012 du régime de PFI (PF2), a décidé de créer une nouvelle équipe au sein du Trésor Britannique.
Cette équipe située dans la même division que l’unité des PPP gère les participations minoritaires au
nom de l'autorité contractante. Cette équipe représente l'autorité contractante sur le conseil
d'administration du projet en tant que détenteur d'actions, et réexamine régulièrement la performance
des titres de participation dans le véhicule d'investissement.
67



Page 68
Encadré 4.1. Les sociétés de projet dans les projets de partenariats
Les investisseurs privés (sponsors) ont souvent recours à la mise en place d’une société de projet dédiée (SPV)
dans le cadre de projets PPP. Ce mécanisme est motivé par l’intensité capitalistique requise dans ce type de
projet ainsi qu’aux risques import
ants qui y sont inhérents. Il permet. Ils permettent, en effet, aux investisseurs
privés de limiter
leur niveau d’exposition aux risques associés au projet.
Compte tenu de la taille des projets, de leur complexité et de la multiplicité des compétences requises, les
soumissionnaires ont souvent tendance à constituer des consortiums
afin de répondre à l’appel d’offre. Ce
groupement de société est souvent unique et leur collaboration limitée aux projets. Finalement, ce type de
montage permet d’avoir un recours financier limité dans le cadre du projet et protège ainsi les sociétés-mères
contre les risques d’échec du PPP.
Source: Conseil Économique pour l’Europe (Nation Unis), 2013 ; Manuel des PPP, Nigeria (2012)
Renégociations éventuelles du contrat
Les contrats de type PPP, étant donné leur longue durée ainsi que la variation de leur rentabilité en
fonction de conditions économiques souvent imprévisibles (plus accentué pour les contrats de
concessions que pour les contrats de partenariats), et les nombreux risques qu’ils comportent (liés à la
demande et à tarification; la maintenance; la technologie ; aux taux de change et taux intérêt ; etc.),
peuvent nécessiter une renégociation au cours de la vie du projet. La possibilité de rééquilibrer le
contrat est d’ailleurs une condition cruciale pour la réussite de nombreux projets, surtout dans le cas des
infrastructures de base où les formes de rémunération choisies sont sujettes à de fortes pressions
politiques et sociales (voir l’exemple des routes à péage au Nigéria et en Malaisie, l’encadré 2.16).
L’actualisation de l’accord économique initial tout au long de la durée de vie du contrat est importante
pour le succès de ce genre de contrat. Cependant, pour éviter tout opportunisme de la part du partenaire
privé, et maintenir de bonnes incitations à la performance en-temps et en-délais, il convient cependant
de limiter les clauses de revoyure (en fixant par exemple : un délai clair avant une prochaine rencontre
entre les signataires du contrat ; des critères stricts permettant la renégociation ; des annexes détaillant
comment et dans quelles conditions la rémunération du partenaire privé sera ajustée ; etc.).
Au Royaume Uni, où le programme national de PPP a connu des modifications successives depuis
son introduction en 2006, les coûts de transaction s’élèvent à 2,6% des coûts du capital des projets
conclus entre 2006 et 2012 et les négociations en aval durent en moyenne trois ans (Delmon 2009). Un
examen de 670 contrats de partenariat et de concession entrepris en Amérique Latine entre 1985 et 2000
68
Gouvernement Contrat de PPP Secteur privé(Société de projet/ SPV) Accord de prêt Dette Sous-contractants Actionnaires Capital


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indique quant à lui un taux de renégociation et de modification substantielle du contrat particulièrement
élevé (de 42% pour tous les secteurs – hormis les télécommunications – confondus, dont 75% pour les
projets d’eau, 55% dans les transports, et 10% pour l’électricité). Ces modifications sont en général
intervenues deux ans après la conclusion du contrat, requérant des renégociations de trois à douze mois
de durée. Dans la majorité des cas, l’issue des négociations était à l’avantage du concessionnaire plutôt
que du concédant – que ce soit via l’augmentation des tarifs perçus par le partenaire privé, la réduction
du versement fait au gouvernement (dans 20% des cas), ou bien la prolongation de la durée du contrat
(dans un tiers des cas) (Foster 2011). Bien que le cas latino-américain soit exceptionnellement négatif
(résultant en large partie d’une mauvaise répartition des risques dans ces contrats), cet exemple
démontre néanmoins l’importance clef de faire figurer des clauses de renégociation dans tous les
contrats de concessions et de PPP – en particulier lorsque l’État exerce un pouvoir discrétionnaire sur la
résiliation des contrats, comme c’est le cas en Tunisie (Guasch 2004).
Par le passé la Tunisie a rencontré des difficultés avec des projets d’infrastructures du fait de son
expérience limitée en négociation de concessions et de l’absence de clauses contractuelles bien définies
sur les renégociations.
24 Or aussi bien le régime des concessions (loi de 2008 et décrets de 2010 et 2013)
que le régime prévu pour les contrats de partenariat (Loi PPP) introduisent une plus grande flexibilité
dans la renégociation suite à d’éventuelles modifications dans les hypothèses économiques prévues
dans le contrat. Ces décrets établissent notamment une précieuse distinction entre les modifications
considérées « substantielles », qui nécessitent un nouvel appel d’offres, et les modifications qui peuvent
être prises en compte par une simple renégociation du contrat en cours.
Selon le projet de loi relatif aux PPP (voir Annexe), le contrat doit prévoir « les conditions dans
lesquelles il peut être procédé à la modification de certains de ses articles ou à sa résiliation, notamment
pour tenir compte du changement des besoins de l’autorité publique, ou des conditions de financement
du projet ou de manière générale répondre aux nouvelles exigences du service objet du contrat de
partenariat ». Le projet de loi prévoit qu’il est aussi possible de prolonger la durée du contrat, de deux
ans au plus, dans les cas d’urgence pour assurer la continuité du service public, ou dans un cas de force
majeure - et ce, après avis de l’Instance Nationale des PPP. Enfin le contrat doit prévoir les conditions
garantissant aux parties contractantes le droit de demander le rééquilibrage du contrat dans le cas de
survenance de circonstances exceptionnelles imprévisibles lors de la signature du contrat, ou dans un
cas de force majeure.
Si une révision de la rémunération du partenaire privé s’avère nécessaire, le projet de décret de
2013 fixant les conditions, procédures et modalités de passation des contrats de concessions et de PPP,
définit les modalités de calcul de son actualisation et de révision de sa rémunération. Des révisions
peuvent avoir lieu dans les cas de survenance d’un évènement de force majeure, ou de modifications
unilatérales, en application des stipulations du contrat, apportées au contrat par l’autorité publique en
raison de changements dans ses besoins, de nouvelles exigences du service, ou de modification des
conditions de financement du projet. Par contre dans les cas requérant une « modification
substantielle » des stipulations d’un contrat de concession ou de partenariat, il est nécessaire de
procéder à une nouvelle procédure d’attribution de contrat.
Une modification est considérée comme substantielle si : elle introduit des conditions qui auraient
permis la sélection de candidats autres que celui retenu initialement ; si elle modifie l’équilibre
économique du contrat en faveur d’une des deux parties, publique ou privée ; ou si elle modifie
considérablement le champ d’application du contrat de sorte qu’elle englobe des services ou travaux
non couverts au départ.
La nouvelle directive européenne relative aux concessions (de janvier 2014) adopte une approche
semblable par rapport aux renégociations, introduisant elle aussi la notion de « modification
69

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substantielle » d'un contrat pendant sa durée. La directive précise dans quelles conditions une
modification peut donc être effectuée sans une nouvelle procédure d'attribution, dans le but de fournir
une «sphère de sécurité» aux parties prenantes pour effectuer des changements contractuels mineurs (ne
dépassant pas le seuil de la directive, et inférieurs à 10% du prix du contrat initial). Bien que ces
dispositifs concernent dans ce cas les concessions, une approche semblable serait valable pour les
contrats de partenariat. En effet dans le cas tunisien, le décret n° 2013-4631 du 18 novembre 2013
relatif aux concessions prévoit des dispositions analogues à l’article 33, qui cite les cas précis dans
lesquels les modifications au contrat sont jugées importantes et partant, requièrent un nouveau cycle de
soumission et de passation de marchés.
Ces distinctions permettent d’augmenter la flexibilité des contrats à long-terme, tout en protégeant
le partenaire privé comme le partenaire public d’une modification trop importante du contrat ayant des
répercussions sur la qualité du service fourni, sur sa rentabilité pour le concessionnaire, ou sur son poids
fiscal pour l’autorité contractante. Ceci dit, une définition claire des « cas de force majeure » manque
aussi bien dans le projet de loi relatif aux PPP que dans le projet de décret, afin de garantir un usage
modéré et justifié des clauses l’invoquant. L’Article 283 du Code des Obligations et des Contrats
donnant une définition claire et précise de la force majeure, il serait pour le moins utile d’y référer
25.
Les seuils précis entre modification « mineure » et « substantielle » gagneraient toutefois à être chiffrés
(en fonction de la taille du contrat initial par exemple, comme le fait la directive européenne relative
aux concessions). Selon l’USC, la mesure de la teneur de la modification sera faite en fonction de son
impact au regard des principes fondamentaux régissant les PPP.
Cette approche sous conditions permet donc de préserver d’importants garde-fous pour les
pouvoirs publics. Une flexibilité excessive dans la renégociation (même si elle favorise une plus grande
solidité du contrat) peut sinon être dangereuse, car elle peut encourager les soumissionnaires privés à
sous-estimer délibérément les coûts dans leur soumission afin de remporter la procédure d’appel
d'offres, tout en comptant sur un rééquilibrage lors de renégociations ultérieures. C’est au vu de ces
risques que l’amendement de 2013 du décret sur les concessions ainsi que le projet de 2013 sur les PPP
considèrent les modifications « substantielles » au contrat comme une nouvelle attribution de
concession qui exige une nouvelle procédure d’attribution. Toutefois ceci présuppose un dispositif
institutionnel (commission de suivi de projet, avec l’appui de l’autorité contractante et de l’unité PPP)
prêt à guider les renégociations possibles, et capable de parer à des demandes excessives de la part du
partenaire privé.
Une étude concernant des renégociations de contrats PPP menée en 2009 suggère qu'il s'agit d'une
tendance commune et que plusieurs gouvernements adoptent d’ailleurs une posture trop souple et
imprévoyante par rapport à la renégociation, en délégant la charge des paiements aux administrations et
aux usagers futurs. Ainsi, sur 50 concessions attribuées au Chili entre 1993 et 2006, l'investissement
total a augmenté de près d'un tiers via renégociation (de 8,4 milliards de dollars à 11,3 milliards de
dollars), les coûts en découlant n’étant pas en majorité pris en charge par l'administration à l’origine des
procédures de renégociation (Engel, Fischer et Galetovic, 2009). Il est donc nécessaire d’allier la
capacité de négociation dans le secteur public à une gestion responsable des finances publiques, y
compris d’une administration à l’autre – questions évoquées en détail dans le volume portant sur le
cadre budgétaire.
Une étude réalisée en 2010 par l’Office National d’Audit du Royaume-Uni portant sur 76 projets
PFI d’hôpitaux en phase d’exploitation a montré à quel point il est essentiel de mettre en place une
équipe dotée de bonnes compétences pour la négociation des changements potentiels du contrat, afin de
conserver une dépense publique optimale (Keilthy 2014). Des évènements inattendus pendant la phase
d’exploitation des projets PPP étant quasiment inévitables, l’insuffisance de capacités dans les équipes
70

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de suivi et de gestion de projets pendant leur phase d’exploitation est une difficulté qu’affrontent même
les pays de l’OCDE les plus avancés en matière de PPP.
Règlement des différends
La renégociation ne permet pas de « sauver » tous les contrats, et d’importants différends peuvent
survenir qui requièrent un traitement ciblé et prévisible. Les investisseurs ont besoin d’un système
juridique efficace et transparent pour régler ces différends.
Les clauses contractuelles peuvent par ailleurs être renforcées par les dispositions d’accords
d’investissement bilatéraux signés par le pays hôte et le pays dont est originaire l’investisseur (si tant
est qu’il s’agit d’un investisseur étranger). Dans une étude réalisée sur 28 arbitrages conclus jusqu’en
2006 par le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI)
sur des différends relatifs aux contrats d’infrastructures, cinq des disputes découlaient de la nature du
contrat de concession, six de contrats de construction, et sept de procédures de privatisation. Dans la
majorité des cas, la référence à l’arbitrage international était contenue dans un traité d’investissement
bilatéral (OCDE 2006). Autre exemple, au Chili, parmi les augmentations d’investissement obtenues
grâce aux renégociations effectuées sur les contrats de concession et de partenariat de 1993 à 2006, 83%
(correspondant à 2,3 million de dollars) furent le fruit de 78 renégociations bilatérales, et seulement
27% découlèrent de décisions de panels d’arbitrage selon le droit interne (Engel et al. 2009). Il est donc
important, dans l’élaboration des contrats de concession comme de partenariat, de veiller à une bonne
articulation avec les dispositifs de règlement des différends non seulement dans le droit national, mais
aussi dans le droit international.
Pour parvenir à un règlement à l’amiable des litiges dans le droit tunisien, les secteurs publics et
privés peuvent recourir au Comité de règlement amiable des litiges auprès de la Présidence du
Gouvernement (toutefois réservé aux marchés publics). Au regard du droit international, depuis 1996, la
Tunisie est membre du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux
investissements (CIRDI). Trois cas de règlement des différends impliquant l’État tunisien sont
actuellement en cours de discussion au CIRDI, dont deux cas lancés en 2013 par la société Lundin
Tunisia B.V. et un cas datant de 2007 (ABCI Investments Limited). Toutefois ils ne concernent pas les
projets PPP.
Afin de permettre néanmoins aux petites entreprises nationales une résolution efficiente et
équitable des différends découlant des contrats des concessions et partenariat, les dispositifs d’arbitrage
dans les rapports de droit national pourraient être rendus plus abordables et accessibles en Tunisie. En
effet, selon l’enquête
Doing Business 2014 de la Banque mondiale, il faut en moyenne 565 jours et
59 procédures pour faire appliquer un contrat auprès d’un tribunal en Tunisie, et le coût de ces
procédures représente plus de 20 % de la somme due
26. De même, selon le dernier rapport Investing
across Borders du International Finance Corporation (IFC), l’application d’un jugement arbitral prend
environ 47 semaines en Tunisie, et l’application d’un jugement étranger environ 51 semaines (par
rapport, par exemple, à 12 et 16 semaines au Maroc)
27. Ces chiffres posent la question de l’efficacité du
système de résolution des différends actuellement en place, pour les investisseurs internationaux aussi
bien que pour les investisseurs nationaux.
Le projet de Code de l’investissement de 2013 (en cours de révision) rendrait l’approche
tunisienne envers le règlement des différends plus équilibrée. Il rendrait possible l’arbitrage
international pour les litiges avec des investisseurs étrangers uniquement sur la base d’un accord
intuitu
personae (c’est-à-dire, conditionné à un accord bilatéral préalable via un traité ou un contrat
d’investissement). Cette clause pourrait également utilement indiquer un délai au terme duquel, en
l’absence de conciliation, il serait possible de déposer un recours devant un tribunal arbitral. De son
71

Page 72
côté, l’article 35 du projet de loi relatif aux PPP de 2013 impose que les contrats de PPP prévoient des
modalités de règlement à l’amiable des litiges (y compris en ce qui concerne « la durée nécessaire à leur
épuisement avant d’entamer le recours à la justice ou le cas échéant à l’arbitrage »). En cas de recours
au tribunal d’arbitrage, le contrat prévoit obligatoirement que le droit tunisien est applicable dans tous
les cas.
Encadré 4.2. Exemples de risques liés à une sensibilisation insuffisante des usagers : les routes à péage
au Nigeria et en Malaisie
Les concessions comportent un élément de rémunération de la part des usagers du service fourni. Dans ces cas,
il est imp
ératif d’assurer une bonne campagne de communication auprès de la population d’usagers afin de la
sensibiliser et de la préparer aux éventuelles modifications de tarif que pourraient engendrer la mise en place
d
’un projet de concession. En effet, la fiabilité des recettes perçues (et donc la tarification du service public) a
bien entendu un impact significatif sur le recouvrement des coûts par le partenaire privé. Les exemples qui
suivent (tirés des expériences de routes à péage en Malaisie et au Nigeria) mettent en lumière les risques liés à
la rémunération de la part des usagers, dans les cas où les usagers en question n’auraient pas été suffisamment
informés et préparés aux modifications de tarif au préalable.
Le cas de la Malaisie



En Malaisie, un niveau insuffisant de transparence et de communication avec le public a entravé et
retardé les augmentations prévues dans les montants des péages routiers. La population n’avait pas
été informée des procédures d’appel d’offres suivies dans ces projets, et n’avait
clairement
appréhendé les mécanismes qui seraient employés pour le calcul de la tarification et la mise en place
des péages.
Afin de respecter ses obligations contractuelles et de permettre au partenaire privé de recouvrir
néanmoins ses coûts
d’investissement et de gestion, plutôt que de permettre aux concessionnaires
d’augmenter les tarifs des péages en accord avec les contrats, le gouvernement a choisi de
compenser le concessionnaire à partir des deniers publics. par ce procédé, le gouvernement a de fait
« repris
» le risque transféré au partenaire privé à l’origine, générant donc un certain niveau
d’incertitude quant à la capacité et la détermination du gouvernement de gérer les pressions politiques
et communautaires, et de respecter sa part du contrat sur sa durée.
Les règles régissant l’engagement du gouvernement dans les projets PPP de routes à péage auraient
pu être annoncées de manière plus claire et transparente, ce qui aurait réduit les risques de réaction
négative de la part des usagers.
Le cas du Nigeria


La route à péage de Lekki dans l’état de Lagos au Nigeria a longtemps été un exemple réussi de PPP.
Le premier PPP entrepris au Nigeria, ce projet a bénéficié d’un fort soutien politique et financier au
niveau du gouvernement fédéral comme du gouvernement régional. Les cocontractants ont aussi veillé
à un partage équilibré des risques du projet. En revanche, la communication avec les usagers a été
insuffisante dès le départ : la mise en place des péages en 2010 a suscité une forte contestation parmi
les usagers, conduisant à la suspension des péages pendant plus d’un an pendant que l’accès à des
routes alternatives (plus lentes mais gratuites) était préféré. Entretemps le gouvernement s’est vu obligé
de compenser le concessionnaire à hauteur de 24 millions de dollars.
Les péages ont été remis en place en décembre 2011, mais en aout 2013 le concessionnaire s’est
trouvé contraint de prévenir le gouvernement que suite à l’augmentation des taux d’intérêt au niveau
local, le recouvrement des coûts exigeait une augmentation des tarifs de 20%. Afin de solutionner le
problème, le gouvernement a racheté les droits du concessionnaire et s’est engagé à financer à son
propre compte les étapes suivantes du projet, tout en laissant les éléments de gestion des routes entre
les mains du partenaire privé.

La structure du contrat, permettant un certain degré de flexibilité dans les renégociations, a facilité cette
72

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reprise anticipée du projet par le gouvernement tout en maintenant la participation du partenaire privé
dans les fonctions de gestion. Encore une fois, une meilleure communication avec les usagers au
préalable aurait simplifié la mise en place des péages et évité les risques liés à la demande dans le
contrat.
Source: Ward and Sussman, “Analysis of the Malaysian Toll Road Public-Private Partnership Program and Recommendations
for Policy Improvements”, Massachusetts Institute of Technology Engineering Systems Division Working Paper Series ESD-
WP-2005-
09; et OCDE, Revue des politiques d’investissement du Nigeria.
Clôture des contrats PPP
Les contrats PPP peuvent prendre fin à l’expiration du contrat qui lie la partie privée et l’État –
donnant ainsi lieu à la restitution du bien d’équipement à l’autorité publique, par exemple dans le cas de
projets de construction-exploitation-transfert (CET). Il s’agit dans ce cas de la fin « normale » du projet,
qui devra s’appuyer sur les modalités de préparation du transfert des actifs sous-jacents, le plan de
transfert, la garantie de transfert, etc., tels que précisés dans le contrat. Cependant, les contrats PPP
peuvent également prendre fin lors d’une résiliation par l’une ou l’autre des parties (fin anticipée que ce
soit pour raison de force majeure, motif d’intérêt général, changement de loi, ou déchéance pour faute
du partenaire privé). Afin d’encadrer ces processus et de maintenir une bonne entente parmi les parties
prenantes, les contrats PPP doivent clairement définir : (i) les circonstances dans lesquelles une des
parties peut mettre fin au contrat avant son terme (dans lequel cas il s’agit d’une résiliation) ; (ii) les
indemnités à prévoir dans le cas de résiliation du contrat ; (iii) des règles claires permettant une
restitution en bon état du bien d’équipement, notamment via des contrôles périodiques tout au long du
cycle de vie du projet.
Au cours des vingt dernières années, 5% des PPP entrepris mondialement ont été résiliés. Ces
résiliations découlaient le plus souvent de : propositions de projet trop agressives de la part des
soumissionnaires (coûts sous-estimés et propositions irréalistes dès l’abord, toutefois approuvées par le
partenaire public suite à une mauvaise évaluation) ; de simple opportunisme de la part d’un des
partenaires (public ou privé) impliqués ; de niveau de demande des usagers en deçà des attentes ; ou de
chocs économiques imprévus (Rosenstock et Trebilcock 2013). Afin de minimiser les risques encourus
dans ces cas aussi bien par le concessionnaire que par l’autorité contractante, il est indispensable de
prévoir dans ces contrats des dispositions fiables et équitables pour traiter ces situations. Cela permet
notamment de protéger les autorités publiques du risque de disputes coûteuses lors d’une résiliation
inattendue.
En Tunisie, la loi de 2008 relative aux concessions dispose qu’une résiliation pour intérêt public
prévoie une indemnisation pleine et entière du concessionnaire, sur base de : la valeur non amortie des
biens de retour
28 ; les autres chefs d’indemnisation justifiés ; et une part du bénéfice futur non réalisé
par le partenaire privé (le manque à gagner). Une résiliation pour faute du concessionnaire (déchéance)
doit quant à elle prévoir une indemnisation non amortie des biens de retour, dont est déduite
l’indemnisation dont est redevable le partenaire privé en raison de sa faute (Zeno 2011). Ce dispositif
diffère légèrement dans le projet de loi relatif aux PPP, mais le principe reste celui de ne pas indemniser
le partenaire privé en cas de manquement grave aux obligations prévues dans le contrat. Dans ces cas
les banques peuvent par exemple suggérer la substitution du partenaire privé par une autre personne
pour poursuivre la réalisation du projet (
Step-in right).
Le projet de loi relatif aux PPP précise par ailleurs que « dans le cas où l’autorité publique
envisage la rupture unilatérale du contrat dans les cas autres que celles de manquement de la société de
projet à ses obligations », la société de projet « a droit à la réparation du préjudice qu’elle a subi ». Le
contrat doit aussi prévoir les conditions dans lesquelles il peut être procédé, à la modification de
73

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certains de ses articles ou à sa résiliation, et indiquer les conditions permettant l’indemnisation des frais
supplémentaires encourus par le partenaire privé.
Dans ce cadre, les autorités contractantes doivent notamment être à mêmes de : définir des critères
objectifs précisant sous quelles conditions il est considéré que le partenaire privé fait défaut à ses
obligations ; et participer à la détermination des indemnités liées à la rupture possible du contrat. Les
unités chargées des PPP donnent quant à elles leurs avis concernant les contrats et leurs avenants. Elles
participent également au suivi des projets en collaboration avec les organes de contrôle, ce qui permet
de déterminer l’état des actifs lors de la fin du contrat. Enfin elles jouent un rôle important de
constitution de mémoire institutionnelle en ce qui concerne le traitement de problèmes rencontrés lors
de la fin de différents projets PPP. La fermeture des projets PPP est une occasion unique pour les unités
chargées des PPP de mener une évaluation rigoureuse des projets et d’affiner les schémas institutionnels
ainsi que les procédures y afférant. Ceci est un des rôles typiques des observatoires nationaux des PPP,
qui existent dans plusieurs pays.
Recommandations principales du chapitre
Renforcer les capacités des autorités contractantes en matière des PPP afin de faciliter le
suivi pendant les phases d’exécution.
Préciser les mécanismes institutionnels à mettre en place afin de suivre efficacement
l’exécution et la clôture des projets PPP
Veiller à garantir un traitement ciblé et prévisibles pour les traitements des différents émerger
lors des contrats PPP.
o Veiller à mettre en place des mécanismes efficaces de médiation
o Renforcer les capacités du gouvernement tunisien pour pouvoir gérer les règlements
des différends devant les instances internationales telles que le CIRDI
Veiller à communiquer et sensibiliser les usagers quant aux modifications des conditions des
contrats
74



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CHAPITRE 5 : STRUCTURE ET CAPACITÉS DES UNITÉS DES PPP
Rôle des unités des PPP
La mise en place d’un cadre institutionnel pour les PPP permettant de gérer aussi bien la
complexité des projets que les différents intérêts de nombreuses parties prenantes est essentielle pour
assurer la qualité et la durabilité des projets PPP. Il est dès lors nécessaire que ce cadre puisse ; (i)
assurer l'optimisation de la dépense publique par rapport à des formes plus traditionnelles de
contractualisation ; (ii) veiller au caractère abordable et à la viabilité financière des projets pour le
gouvernement et les utilisateurs ; et (iii) répondre à des objectifs sociaux.
Graphique 5.1. Cadre de gouvernance et éléments des PPP
Source : OCDE
Les chapitres précédents ont mis en lumière le degré de complexité des PPP tout au long de leur
cycle de vie, ainsi que les besoins en termes de ressources humaines et financières pour développer,
soutenir et évaluer ces contrats. Pour faire face à cette complexité, de nombreux pays ont mis en place
une unité consacrée aux PPP. Ceci permet de séparer la formulation des politiques de la mise en œuvre
des projets et de regrouper l’expertise et l’expérience acquise au niveau du gouvernement en matière de
PPP. Une unité des PPP permet également de standardiser les procédures en matière de passation de
marchés et de faciliter une prise en compte appropriée de l’aspect budgétaire des projets. Elle reflète
également la volonté politique d’accroitre la participation privée dans les infrastructures et peut ainsi
contribuer à renforcer la confiance des investisseurs. Toutefois, la création d’une unité de ce type est
tributaire d’un ensemble de facteurs, notamment : le paysage institutionnel existant; la répartition
sectorielle des PPP en cours d’examen et de réalisation; les différentes étapes de la préparation de
projets ; et la volonté politique du gouvernement.
Les fonctions d’une unité consacrée aux PPP varient entre les pays et peut également évoluer dans
le temps. Au moment de la conception, l’accent est mis plus particulièrement sur : (i) guider les
75
LintéretpublicOptimisation de la dépense publiqueCroissance économique Marchés financiers Autorité contractante Société de projet Investisseurs et prêteurs Allocation des risquesStructuration financière Environnement facilitateurClimat des affaires et régulation publique utilisateurs Acheteurs Transport Eau Énergie Éducation, etc.


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politiques publiques en vue de créer les structures juridiques et réglementaires nécessaires ; (ii) susciter
l’intérêt du marché ; et (iii) encourager les projets pilotes afin de vérifier et de démontrer l’intérêt que
présentent les partenariats public-privé. Au fur et à mesure que le programme de partenariats public-
privé d’un pays se développe l’accent est mis de manière croissante sur l’optimisation de la dépense
publique, la mise en place de méthodes d’évaluation des projets plus sophistiquées et le maintien d’un
soutien politique (Hemming 2006). À titre d’exemple, la Turquie qui a une expérience significative en
termes de projets de partenariats continue à faire évoluer son paysage institutionnel (voir encadré 2.17).

Encadré 5.1. Évolution du paysage institutionnel lié aux PPP en Turquie
La Turquie a été un des premiers pays de l’OCDE à adopter les PPP. Son expérience en matière de PPP s’est
concrétisée en 1984 avec la loi 3096 dans le secteur de l’énergie, qui autorisait le secteur priv
é à être impliqué
dans les projets de centrales électriques. Depuis, plusieurs PPP ont vu le jour dans les secteurs du Transport
(Göcek Tunel), de l’énergie (Anka Centrale de Gaz Naturel), ou encore du tourisme (Turgut Reis Marina).
Il n’existe pas actuellement de loi PPP harmonisée en Turquie; à la place, il existe plusieurs lois pour différents
secteurs et modèles PPP. De la même manière
, il n’y pas d’organe central de coordination des PPP. La
responsabilité institutionnelle des PPP en Turquie est partagée entre plusieurs organes publics. Ce sont le
ministère de Développement, le Trésor turque, et le ministère des Finances qui sont au cœur de l’effort PPP en
Turquie, avec le Haut Conseil de Planification (YPK) représentant l’organe d’autorisation principale. L’Agence des
marchés publics joue aussi un rôle important dans la supervision de la procédure d’appel d’offres des PPP.
Les
principales autorités contractantes sont les suivantes: le ministère des Transports, le ministère de la Santé, le
ministère de la Douane et du Commerce, le ministère de l'Énergie, et le ministère de l'Éducation.




Le Conseil supérieur de la planification (YPK), présidé par le Premier Ministre, est l'organe de plus
haut niveau pour la préparation et la mise en œuvre du plan national de développement. Le ministère du
Développement en est le secrétaire. L’YPK est aussi responsable de l’approbation des projets PPP en
Turquie, avec l’apport des autres organismes de supervision ci
-dessous.
Le ministère du Développement remplace l'ancienne Organisation de planification nationale (State
Planning Organisation
). Il est habilité à développer des modèles de financement des investissements
publics, d'analyser les projets PPP, et de définir les procédures et les principes concernant la
planification, le suivi et l'évaluation des projets par les organismes publics, et de soutenir le renforcement
des capacités dans ce domaine.
Le Trésor turc est responsable de fournir des engagements de reprise de dette et de garanties
souveraines aux investisseurs. Il joue aussi un rôle primordial dans la surveillance, la gestion et le
reporting des passifs éventuels des PPP et les risques de crédit auquel est exposé le Trésor. Il contribue
également á l'examen des études de préfaisabilité des PPP avec le ministère des Finances et le
ministère du Développement.
Le ministère des Finances est responsable de toutes questions budgétaires relatives aux PPP.
La future loi PPP compte remédier au manque d’harmonisation réglementaire et institutionnelle. Entre autres, elle
introduira une nouvelle unité centrale des PPP (l’actuel unité des PPP gère principalement le secteur de la santé)
qui aura des responsabilités de supervision mais aussi de renforcement de capacité transversal pour la mise en
œuvre de projets PPP en Turquie.
Source : Gouvernement turc
http://erawatch.jrc.ec.europa.eu/erawatch/opencms/information/country_pages/tr/country?section=Overview&subsection=Basic
Char ; email ; 2 PPTs
Il est important de distinguer les unités nationales consacrées aux PPP (établies au niveau du
gouvernement central et responsables de l’appui à tout projet PPP), des unités créées par les autorités
publiques afin d’assurer la gestion de projets spécifiques. 18 pays de l’OCDE ont ainsi mis en place une
ou plusieurs unités PPP au sein de leur gouvernement central (voir le tableau 2.4; OCDE 2010). Les
76

Page 77
fonctions de ces unités se recoupent dans les catégories suivantes : orientation des politiques, assistance
technique, développement des capacités, et promotion des investissements. Les unités des PPP de
certains pays assument toutes ces fonctions, comme au Royaume-Uni, en Australie, ou en République
tchèque.
Tableau 5.1. Localisation et fonctions des unités des PPP
Localisation
Année de
création
Orientation
des
politiques
Assistance
technique
Développe-
ment de
capacité
Promotion
s
a
c
e
d
s
e
d
u
t
É
1
E
D
C
O

l
e
d
s
e
r
b
m
e
m
s
y
a
p
s
e
r
t
u
A
Afrique du Sud
Allemagne2
Corée du Sud
Royaume -Uni
Victoria, Australie
Danemark
Flandre, Belgique
France
Grèce
Hongrie
Irlande
Italie
Japon
Nouvelle-Galles-
du-Sud, Australie
Pays-Bas
Pologne
Portugal
République
Tchèque
Total
Ministère des
finances
Organisme
indépendant
Organisme
indépendant

Ministère des
finances

Ministère des
finances

Ministère
technique

Ministère des
finances
3
Ministère des
finances

Ministère des
finances

Ministère des
finances

Ministère des
finances

Ministère des
finances

Cabinet4
Ministère des
finances

Ministère des
finances

Ministère
technique

Organisme
indépendant

Organisme
indépendant

2000
2009
1999
1997
2000
2006
2002
2005
2006
2003
2003
1999
2000
2000
1999
2001
2003
2004
n.a.











o

























o



o

o
o
o


o
o
o
o
o

o
o







o


o

o
o
o

17
18
8
11
Cercle noir= oui, cercle blanc= non, n.a.= non applicable
1. Pas d’unités consacrée aux PPP en Autriche, Espagne, États-Unis, Finlande, Islande, Luxembourg, Mexique, Norvège,
Nouvelle-Zélande, république Slovaque, Suède et Suisse
2. Allemagne : seulement au niveau fédéral.
3. Belgique : personnel du gouvernement flamand.
4. Japon : Office chargé de la promotion des IFP, Cabinet.
Note : L’unité des PPP italienne va dorénavant être sous la tutelle du premier ministère
Source : OCDE
77






















































































Page 78
L’assistance technique et l’orientation des politiques sont les principales fonctions des unités
consacrées aux PPP dans tous les pays qui font partie de l’étude OCDE (à l’exception de l’Italie où
l’unité n’est pas responsable de la formulation des politiques). L’unité est normalement responsable de
la promotion des partenariats public-privé dans plus de la moitié d’entre elles (11) et du développement
de capacité dans juste un peu moins de la moitié des unités (8). Au Royaume-Uni, l’unité PPP est
responsable de toutes ces fonctions. L’Instance nationale des PPP en Tunisie pourrait s’inspirer de ces
fonctions (voir encadré 2.18) pour voir quelles sont les plus à même d’apporter un soutien au cadre
actuel des PPP en Tunisie.
Encadré 5.2. Fonctions potentielles d’une unité spécialisée
Orienter les politiques, notamment donner des conseils sur le contenu de la législation nationale,
définir les secteurs éligibles et les méthodes ou dispositifs applicables en matière de partenariats
public-
privé, les processus d'exécution et de mise en œuvre des projets, ainsi que les procédures de
règlement de conflits ou de résiliation ;
Donner le feu vert aux projets, c'est-à-dire décider s'il faut faire avancer le projet. Cette fonction fait
référence au rôle de " garde-fou " que jouent les unités spécialisées à plusieurs stades, qui vont du
lancement du projet à l'approbation définitive du contrat devant être signé par les différents
partenaires ;

Apporter une assistance technique aux organismes publics à différents stades : sélection des projets,
évaluation, exécution et gestion des contrats ;
Développer une capacité PPP, ce qui inclut la formation de responsables du secteur public intéressés
ou participant aux PPP ;

Promouvoir les PPP au sein du secteur public et du secteur privé et éventuellement au niveau
d'instances internationales.
Source : OCDE (2010)
Les institutions sous la tutelle desquelles les unités des PPP se trouvent, varient selon les pays
OCDE. Elles se situent le plus souvent au sein du ministère des Finances, qui a pour rôle d’assurer le
suivi budgétaire, y compris la viabilité des projets PPP entrepris par l’État. Néanmoins, le dessein
institutionnel de chaque pays est influencé par son contexte historique et son modèle économique. En
Tunisie, selon le projet de loi relatif aux PPP, tous les projets de contrats de partenariat devront être
soumis à l’Instance nationale des PPP, sous la tutelle de la Présidence du Gouvernement. A l’instar de
la Tunisie, les unités des PPP italienne, nipponne et malaisienne se situent elles aussi au sein du Premier
Ministère. En général, une localisation de l’unité des PPP dans le ministère des finances permet
d’établir des liens avec les départements en charge du budget de l’état, de la comptabilité et de la
planification. Elle permet généralement d’assurer une meilleure coordination des départements
importants pour les projets PPP tels que les achats publics et les fonctions d’audit (fonctions, qui sont
en Tunisie du ressort de la présidence de la République).
Au-delà de l’expérience de la présidence du Gouvernement en matière de gestion de contrats
publics et d’investissement, et compte tenu des sensibilités politiques et sociales concernant les PPP, la
localisation de la future Instance nationale des PPP tunisienne au sein de la Présidence du
Gouvernement permettra le pilotage de l’agenda PPP au plus haut niveau politique, facilitera une
coordination complexe, et assurera un soutien fort aux projets PPP. De plus, le décret établissant l’USC
note que l’Instance collaborera avec les services compétents au sein du ministère des Finances sur les
78

Page 79
aspects financiers relatifs aux concessions. Il est utile de mettre en place un interlocuteur externe à
l’unité des PPP dédié aux questions de viabilité budgétaire afin de permettre à l’unité de se consacrer à
ses fonctions. La DGPPP pourrait être l’interlocuteur principal de l’Instance au sein du Ministère des
finances, qui pourra servir de relais pour la concertation avec concertera avec d’autres départements
pertinents au sein du ministère des finances tels ceux du budget et de la dette publique. Un
renforcement de capacités pour mener à bien les projets PPP et un partage clair des responsabilités au
niveau institutionnel seront indispensables pour créer un processus de passation de PPP efficace et
robuste en Tunisie.
En s’appuyant sur l’expérience internationale, l’Instance des PPP tunisienne travaillera en
collaboration avec les ministères de tutelle sur le renforcement des capacités et la passation des projets
PPP. Elle assumera ainsi la fonction d’assistance technique que l’on retrouve dans toutes les unités des
PPP des pays de l’OCDE (voir tableau 2.4). Elle aura aussi des fonctions d’orientation de politiques
publiques en ce qui concerne les PPP tunisiens. Selon le projet de décret d’application de la loi PPP de
2013, les autorités contractantes doivent obligatoirement obtenir l’accord de l’Instance des PPP, qui
effectuera une évaluation préalable du projet, avant le lancement de toute procédure d’appel à la
concurrence ou de consultation relative aux PPP (articles 75 et 78 du projet de décret). Le bon
fonctionnement d’une unité consacrée aux PPP nécessite qu’elle soit composée de spécialistes qui
disposent de compétences techniques spécifiques aux secteurs concernés, ou en matières économique,
financière et réglementaire, dans le domaine des marchés publics, de la communication et de la
formation.
Les équipes au sein des organismes publics qui participent à la fourniture d’infrastructures doivent
également avoir accès aux compétences nécessaires à la préparation et l’évaluation des projets. Par
exemple, des compétences techniques liées à des secteurs spécifiques sont nécessaires pour bien
comprendre la nature des projets en cours de préparation. Une expertise en économie est indispensable
pour effectuer l’analyse coûts-avantages des projets, analyser les prévisions liées aux projets de
construction, modéliser la demande de services publics ainsi que le coût des aides et les engagements
conditionnels. Une expertise en matière d’analyse financière est indispensable pour mettre au point des
modèles de flux de trésorerie, effectuer des analyses de sensibilité, évaluer le coût des risques et mettre
au point des modèles de récupération des coûts. Une expertise dans le financement des projets permet
d’évaluer les propositions financières et comprendre à quels risques un partenaire privé est exposé.
L’expertise en matière réglementaire est nécessaire pour comprendre quelles sont les obligations
juridiques que doivent respecter les projets. Une expertise en matière de passation de marchés publics
est indispensable pour établir la documentation des appels d’offres, évaluer la diligence raisonnable
d’une entreprise ainsi que gérer la réception et évaluation des offres présentées. L’expertise juridique
est indispensable pour comprendre les incidences financières des diverses clauses contractuelles
figurant dans les contrats ainsi que pour formuler et négocier ces contrats.
L’Instance nationale des PPP en Tunisie ne doit pas nécessairement être équipée de toutes ces
expertises, mais elle doit développer les compétences nécessaires pour évaluer les projets et apporter le
soutien nécessaire aux autorités contractantes. Ces compétences pourraient être complétées par
l’autorité contractante ou à travers une expertise externe au gouvernement. Le recrutement de trois
conseillers (à titre indicatif) en interne disposant d’expériences solides en matière de financement et de
gestion de projets d’infrastructures (du type financement de projets) pourrait contribuer au renforcement
des rangs de l’Instance des PPP. Un recours à des consultants externes pour des expertises spécifiques
et poussées est une alternative mais qui peut s’avérer coûteuse et limiter la constitution d’une mémoire
institutionnelle si elle n’est pas bien gérée. Néanmoins ce recours peut s’avérer très utile, voir
nécessaire le temps de développer les compétences et l’expertise requises en interne. Un fonds de
développement pourrait dans ce cas participer à couvrir les frais d’un tel recours.
79

Page 80
Encadré 5.3. Les problématiques ressources humaines pour les unités des PPP
Le European PPP Expertise Center (EPEC) a réalisé, en 2014, une étude comparative concernant les
unités des PPP des pays membres de la BEI. Lors de cette étude, la moitié des 18 unités des PPP interrogées
(comprenant à la fois
des pays membres de l’OCDE et non membres) a indiqué qu’il éprouvait des difficultés pour
recruter et retenir les ressources humaines adéquates. Par ailleurs, la Bulgarie, la Croatie, la République
Tchèque, la Lituanie, la Lettonie et Malte
ont confirmé qu’ils rencontrent de graves difficultés dans leurs
recrutements. Cela est principalement dû à des difficultés pour le secteur public à être compétitif pour attirer le
personnel hautement qualifié et nécessaire à la réussite des projets PPP.
Un certain nombre d'unités PPP ont également mis en place des systèmes de détachement de personnel
afin d'acquérir des compétences spécialisées notamment lors de leur phase de démarrage. Cependant, ce mode
de recrutement ne s’est pas avéré pérenne car ces unités de PPP ont eu plus de difficulté pour attirer des
détachements une fois cette phase dépassée. Il e
st également important de ne pas s’appuyer sur des solutions
temporaires qui peuvent avoir une incidence sur le développement d’une mémoire institutionnelle au sein de
l'Unité PPP.
À titre d’exemple, l’unité des PPP Croate, comptait en 2013 neuf employés à temps plein qui disposaient
des expertises suivantes : juridiques, financières, techniques et en matière de
communication. L’unité est
totalement financée par le gouvernement. Son objectif initial, lors de sa création en 2008, était de développer une
équipe de 25 membres. Cependant, cet objectif n’a jamais été atteint compte tenu de la crise financière
Européenne et de son impact sur le budget de l’état ainsi que de ses difficultés de recrutement dans le secteur
privé
. Par ailleurs, l’unité n’a pas réussi à proposer les conditions attractives à même d’attirer des détachements
de personnel du secteur privé, même si la loi le permettait.
Ces différentes expériences illustrent les défis rencontrés par les institutions publiques pour offrir des
salaires compétitifs
susceptibles d’attirer et retenir des personnes ayant des compétences et de l'expérience
spécialisées qui sont essentiels pour la réussite de ses projets.
Elles soulignent également l’importance de
maintenir une certaine flexibilité en matière de politiques des ressources humaines pour s’adapter aux conditions
de marché. Finalement, la position de l'Unité des PPP au sein du gouvernement, et de sa souplesse
opérationnelle peut avoir un impact important sur la capacité de l'Unité des PPP
d’attirer et de retenir le personnel
adéquat dans les secteurs public et privé.
Source : EPEC
Le nombre de personnel des unités des PPP dans les pays membres de l’OCDE varie entre 12 et 20
membres d’équipe, à l’exception de la Corée du Sud (voir tableau 2.5). Il faut noter que l’unité des PPP
en Corée du Sud, PIMAC (
Public and Private Infrastructure Investment Management Center),29 est à la
fois chargée des projets PPP et de la passation de marchés publics traditionnels, ce qui lui confère des
responsabilités supplémentaires et requiert plus de personnel. PIMAC fait partie de l’Institut de
développement de la Corée du Sud, un
think-tank indépendant presque entièrement financé par le
ministère de la Stratégie et des Finances. PIMAC est organisée en 3 divisions : la Division des PPP, la
Division d’Évaluation des Investissement Publics (projets de marchés publics plus traditionnels), et la
Division de Politiques et de Recherche.
30 42 membres du personnel travaillaient dans la Direction des
PPP en 2009. La logique sous-jacente de PIMAC est de combiner la planification et la budgétisation des
PPP et d’autres contrats d’infrastructure sous une seule entité, afin d’assurer une cohérence dans
l'évaluation de tout projet d’équipement, quel que soit son mode de passation, et de maximiser ainsi
l'efficacité dans la gestion des ressources humaines. Ceci pourrait servir d’inspiration à une possible
harmonisation entre les institutions chargées des concessions/PPP et des marchés publics en Tunisie.
80

Page 81
Tableau 5.2. Budget et effectifs dunités consacrées aux PPP
National Treasury PPP unit,
Afrique du Sud
Partnerships Germany,
Allemagne
PIMAC, Corée du Sud3
PPP Policy Team, Royaume-Uni
Partnerships Victoria, Australie
(État de Victoria)
Effectifs1
Budget annuel
approximatif²

Source de
financement

20
21
77
13
12
ZAR35 milliards
(EUR 3,1 milliards)
Budget de l’État
n.d.
Droits d’utilisation
KRW 17065
Budget de l’État et
(EUR 9.56 milliards)
droits d’utilisation
Pas de budget
distinct
Pas de budget
distinct
Budget de l’État
Budget de l’État
1 Les chiffres concernant les effectifs ne font aucune distinction entre cadres, spécialistes et personnels auxiliaires
2 Les taux de change du won coréen (KRW) et du rand sud-africain (ZAR) en euros (EUR) sont calculés à partir des taux au
comptant du 31 aout 2009. Ces taux sont : KRW 1784,32=EUR 1,00 ; ZAR11,1228=1,00 EUR
3 Les chiffres relatifs aux effectifs et au budget de PIMAC
Concernent non seulement les programmes PPP mais aussi les programmes financés par l’Etat
L’Unité des PPP sud-africaine, quant à elle, a été créée par le Trésor national en 2000 pour
simplifier la préparation, la négociation et la gestion en aval de l’adjudication des PPP (voir l’encadré
2.20). Suite aux recommandations d’un groupe de travail interministériel créé en 1997 par le Cabinet
sud-africain, elle est chargée d’élaborer un ensemble de réformes législatives et institutionnelles visant
à soutenir la mise en œuvre de PPP, et de créer une unité chargée des investissements d’infrastructure
municipaux
31. L’Unité des PPP diffuse un large éventail d’outils détaillés, de manuels et d’instruments
normalisés destinés aux ministères ou entités publiques. Elle supervise aussi les projets, de leur
lancement jusqu’à la conclusion du contrat. Elle propose également une assistance technique et un
développement de capacité aux organismes publics et désigne parmi son personnel un conseiller pour
chaque projet chargé d’apporter une assistance technique spécifique depuis la phase d’élaboration du
projet jusqu’à sa phase d’exploitation.
Encadré 5.4. Postes clés de l’équipe chargée des projets PPP en Afrique du Sud



L’Administrateur des comptes ou l’autorité comptable assume la direction générale du projet,
obtient du Trésor toutes les approbations nécessaires et signe le contrat de projet passé avec le
partenaire privé. Il applique également les mesures anti-corruption dans le cadre du projet. Au cours de
la mise en œuvre, il est chargé de veiller à une application en bonne et due forme du contrat de projet.
Le Responsable du projet gère à plein temps le projet depuis son élaboration jusqu’aux premières
années de sa mise en œuvre. Cette obligation est censée assurer une mémoire institutionnelle et
contribuer à la mise en place d’une relation durable avec le client. Le Responsable du projet est un
fonctionnaire appartenant au ministère d’exécution compétent ou à l’entité publique compétente.
Le Conseiller chargé de la transaction se consacre aux aspects juridiques, techniques et financiers du
projet. Sa fonction inclut, entre autres, la supervision
d’une étude de faisabilité du projet, la rédaction des
documents nécessaires à l’approbation du Trésor et le soutien durant les premières années de la
création ou de l’exploitation du projet. Le Conseiller chargé de la transaction ne doit pas être
obligatoirement un fonctionnaire ; il peut être un consultant externe engagé spécifiquement pour le
projet.
81


Page 82

Le Conseiller du Trésor National (de l’Unité des PPP) chargé du projet appuie le ministère compétent
ou l’entité publique compétente pendant tout le cycle d’exécution notamment la préparation et la mise en
œuvre pendant toute la durée du projet. Le Conseiller chargé du projet aide également le responsable
des comptes ou l’autorité comptable à faire les demandes de crédits pour le développement de projets
accordés par le Trésor National, à mettre en place une équipe chargée du projet ainsi que d’autres
activités majeures liées au projet.
Source: OCDE (2010)
Nous présentons ci-dessous dans l’encadré 2.21, à titre d’exemple, l’organisation et le mode de
fonctionnement de la cellule des PPP du Maroc pendant sa phase de démarrage en 2013.
Encadré 5.5. Structure et fonctionnement de la cellule des PPP du Maroc lors de sa phase de démarrage
Création : La cellule PPP a été créée en 2011, suite à une étude approfondie des conditions nécessaires pour la
réussite des PPP menée par l’agence publique d’infrastructure du ministère des finances marocain. britannique.
Mission : La cellule des PPP au Maroc a quatre activités principales :




La contribution à la formulation de la politique PPP du gouvernement marocain, l’identification et
l’examen des bonnes pratiques, et la standardisation progressive des clauses contractuelles ;
L’assistance technique aux ministères et établissements publics qui souhaitent réaliser des projets en
recourant au nouveau contrat de PPP ;
La définition et la mise en place d’un processus d’assurance qualité ; et
La coordination, l’échange et la centralisation de l’information relative aux contrats PPP.
La cellule peut également acquérir d’autres fonctions à moyen terme en fonction des besoins du gouvernement
et du
retour d’expérience.
Financement : la cellule est entièrement financée par l’État marocain.
Localisation : la cellule des PPP est sous la tutelle de la direction des entreprises publiques et de la privatisation
(DEPP) du ministère de l’économie et des finances (MEF).
Effectif : en 2013, la cellule des PPP comptait 6 membres. L’équipe était encore en cours de formation et
renforçait ses capacités à travers des formations en partenariats avec des organisations internationales ainsi que
82


Page 83
des voyages à l’étranger pour acquérir les bonnes pratiques internationales.
L’équipe bénéficie également d’une assistance technique et juridique externe.
Structure organisationnelle :
En 2013, la structure organisationnelle était simple. Les taches sont divisées en projet/contrat de PPP. Chaque
projet est géré par une équipe constituée d’un chef de projet, d’un chef de projet adjoint et d’un rapporteur.
Ce schéma est adaptable aux phases des projets et au rythme de leur mise en œuvre.
Organigramme de la cellule des PPP au stade de démarrage
Source : Gouvernement marocain
Coordination interministérielle dans le cadre de projets PPP
Avec l’adoption imminente de la loi sur les PPP, la présente étude met en relief l’importance de
renforcer les compétences de l’administration dans le domaine des PPP en Tunisie. L’Instance nationale
des PPP devra être capable de guider les politiques publiques, de décider de l’élaboration de projets
sous forme de PPP, d’assurer la coordination entre les parties prenantes et de doter l’administration des
compétences nécessaires. Elle pourra utilement s’appuyer sur les compétences en matière de PPP déjà
acquises au sein de la Présidence du Gouvernement, du ministère des Finances, ou de certains
ministères de tutelles ou organismes publics. Il sera important de regrouper en son sein certaines
compétences déjà existantes, telles que la DGPPP qui serait chargée de l’analyse et de l’évaluation
budgétaire des projets. La création d’un Observatoire national des PPP est également utile pour
consolider la mémoire institutionnelle en la matière et d’informer les projets futurs et veiller à
améliorer les textes de loi portant sur les PPP.
Le gouvernement tunisien met en place un réseau de « point de contact PPP » au sein de chaque
ministère clé afin de faciliter la coopération avec les autorités contractantes et renforcer son expertise
sectorielle. Il est encore trop tôt d’envisager la création d’unités des PPP régionales en Tunisie (le
niveau d’expertise en la matière étant encore trop faible, et le volume de projets envisagés insuffisant).
Cependant, la désignation de points de contact régionaux qui assurent la liaison avec l’Instance
nationale des PPP, et aux conseillers externes auxquels elle a accès, peut favoriser le déploiement des
PPP dans les régions.
83
Responsable de la cellule Chef de projet (1) Chef de projet (2) Chef de projet (3) Co-chef Rapporteur Co-chef Rapporteur Co-chef Rapporteur


Page 84
Afin de renforcer la coopération au sein du gouvernement en matière de PPP et de concessions, un
comité interministériel a été créer pour appuyer l’USC. Il comprend des représentants des principales
parties prenantes en matière de PPP tels du ministère des Finances, de la banque centrale, le ministère
des transports et du MDCI. Ce comité qui réunit des expertises complémentaires pourrait être associé au
processus d’approbation des projets PPP. En effet, plusieurs pays (le Royaume Uni, les Philippines, ou
encore la Corée du Sud) ont mis en place des mécanismes de coordination interministériels pour choisir
les projets PPP. En Corée du Sud, le ministère de la Stratégie et des Finances préside un Comité
d’examen des PPP de haut niveau auquel il incombe de donner un accord définitif aux projets. La raison
pour laquelle ce ministère a le dernier mot est liée aux obligations budgétaires qu’impliquent les PPP
(subvention à la construction, garantie de revenu ou paiement par l’État, par exemple). Ce Comité est
aussi composé des ministres adjoints des ministères d’exécution ainsi que d’experts du secteur privé. La
Division chargée de la planification des participations privées dans les infrastructures, au sein du
ministère, sert de secrétariat de ce Comité d’examen des PPP.
Nécessité d’élaboration d’un « pipeline » de projets PPP
Tout comme les 18 pays de l’OCDE qui ont établi une ou plusieurs unités des PPP dans leur
administration centrale, l’Instance nationale des PPP tunisienne devrait répondre à trois questions
majeures: i) comment mettre en place une procédure garantissant des projets qui optimisent la dépense
publique (y compris dans le cas éventuel d’offres spontanées/ non sollicitées) ; ii) comment vérifier de
manière systématique que les projets s’engagent à fournir des services à des prix abordables pour les
usagers, et viables au point de vue budgétaire ; et iii) comment élaborer un pipeline de projets viables.
Ce dernier point sera primordial pour le succès des PPP dans le contexte tunisien, en raison de la
relative nouveauté des stratégies relatives aux PPP.
Afin de créer un marché attractif pour le secteur privé, il sera donc nécessaire de constituer un
pipeline de projets PPP robustes – à l’instar de plusieurs pays membres de l’OCDE, dont les plans
d’investissement dans les infrastructures sont approuvés dans leur totalité au plus haut niveau politique
(tels que le National Infrastructure Plan au Royaume-Uni, qui a un Top 40
32, ou le plan « Investir pour
la France »). Les fondations d’un tel processus de priorisation sont plus ou moins en place en Tunisie,
mais devront être réaffirmées au vu des changements politiques et institutionnels actuellement en cours.
De plus, il serait utile d’élaborer une
pré-sélection de projets essentiels pour chaque secteur, qui serait
issue de la « liste longue » adoptée par le gouvernement pour son plan de développement. Un scénario
possible pour l’adoption d’une telle pré-sélection est présenté dans l’encadré 2.22. Dans ce modèle, des
propositions de projets à considérer pour la liste sont préparés par le comité interministériel et l’Instance
des PPP à un Cabinet ministériel ou des acteurs politiques de poids, pour arriver à une sélection des
projets ou une
pré-sélection. Un soutien politique fournirait aux projets potentiels la visibilité et la
crédibilité nécessaires vis-à-vis des investisseurs. Cette liste finale serait ensuite inscrite dans le budget
national, en tenant compte des paiements ou des subventions nécessaires pour chaque projet. L’encadré
2.22 présente les intrants nécessaires au processus de planification et de
priorisation, inspiré par le
travail de l’OCDE sur des réformes en matière de participation optimisée du secteur privé dans le
secteur de l’eau tunisien.
84



Page 85
Encadré 5.6. Proposition de processus de priorisation des projets d’infrastructures au plus haut niveau
politique en Tunisie
Acteurs
politiques de
poids
Pré-sélection
Processus
Annuel du
Budget
Secrétariat:
Présidence du Gouvernement
Ministère des Finances
Ministère de Planification
Documents et liste longue fournis par:
Ministères de tutelle
Autorités contractantes (si non-ministères)
Régions (gouvernements locaux)
Une liste longue de projets, et les documents justificatifs les accompagnants, est soumise par les parties
prenantes au niveau des régions et des secteurs à un « Secrétariat » composé de ministères clefs. Ces derniers
entament un processus de discussion entre eux et avec les parties prenantes pour décider des projets
d’infrastructures à inclure dans une liste plus courte. Cette liste est finalisée au plus haut niveau de décision
politique, avant d’être soumise au processus budgétaire. Un conseiller spécial expert peut être commissionné par
l’autorité centrale pour aider différents ministères à composer la liste longue de projets à soumettre au Secrétariat
en début du processus, et participer au renforcement de ce dernier. Cet expert doit posséder une excellente
connaissance de l’administration publique et des principales parties prenantes afin de faire avancer le processus.
Il sera l’interlocuteur principal des membres du Secrétariat et facilitera leurs échanges avec le ministère de tutelle,
les régions, et les autres parties prenantes. Cet expert contribuera également dans un premier temps à produire
au plus vite un pipeline de projets attractifs pour le secteur privé, sous réserve de leur validation en fin du
processus par les acteurs politiques clés.
Source: Adapté de OCDE (2014), La gouvernance des services de l'eau en Tunisie : surmonter les défis de la participation du
secteur privé, Études de l'OCDE sur l'eau, Éditions OCDE, Paris 2014
Renforcer les institutions au niveau des régions
Comme cela apparait tout au long de ce volume, la procédure de passation des marchés et de suivi
de projet exige des compétences spécifiques pour la préparation des contrats, le suivi des appels
d’offres et la sélection du partenaire privé en cas de PPP. Or ces compétences ne sont pas réparties de
façon égale dans tous les secteurs en Tunisie, et restent concentrées au niveau national de
l’administration. Un des objectifs majeurs du nouveau gouvernement est de développer les
infrastructures et services publics dans les régions et en particulier dans les régions intérieures du pays.
Afin de favoriser un processus de développement régional plus inclusif et consultatif, des commissions
régionales de développement ont été créées en 2012 au sein de chaque gouvernorat et comprennent des
représentants de l’Assemblée Nationale Constituante, de partis politiques, de partenaires sociaux et du
secteur privé, entre autres. Ces commissions ont un rôle consultatif et sont destinées à faciliter
85


Page 86
l’identification des projets d’investissement au niveau des régions. Néanmoins, les capacités au niveau
infranational pour exécuter de tels projets restent limitées.
Les autorités locales rencontrent des difficultés à plusieurs stades du processus de passation des
marchés, notamment dans l’identification de leurs besoins, la définition de critères pertinents pour le
choix du partenaire privé, et le respect des délais de dépôt des dossiers ou des traitements des paiements
(Ben Letaif 2013). Les collectivités locales ont notamment besoin de l’approbation des ministères des
Finances et de l’Intérieur pour acquérir des services publics conformément à la réglementation en
vigueur, ce qui peut limiter leur autonomie financière. La lourdeur des procédures administratives
soulève aussi des difficultés, retardant le processus d’appel d’offres et freinant la dépense efficace du
budget de l’État (Ben Letaif 2013). Comme il apparait dans le volume budgétaire de la présente étude,
les régions tunisiennes ont connu une forte augmentation du nombre de projets à gérer entre 2012 et
2013. Durant cette période, 1,300 milliards de dinars tunisiens ont été transférés aux municipalités et
collectivités locales pour les projets d’investissement, mais la majeure partie de cette somme n’a pas
encore été dépensée en raison du manque de capacités et d’effectifs au niveau régional pour exécuter les
projets
33.
L’expérience de l’Inde, pays décentralisé, peut être utile dans ce contexte. En effet, afin de
répondre aux besoins en capacité des institutions publiques pour la préparation d'un pipeline de projets
de PPP viables, et de promouvoir une gestion responsable des processus de passation de marchés et
d’octroi des projets, les gouvernements locaux et les ministères centraux reçoivent une assistance
technique sous la forme d’expertise en risques, en finance, et en systèmes d'information de gestion. Ces
autorités ont également accès à un ensemble de cabinets juridiques. Pour davantage intensifier les
capacités au niveau des états et des municipalités, le gouvernement a aussi lancé un programme de
formation dans les instituts administratifs de l'État ainsi qu’un programme de "formation des
formateurs" (training of trainers) actuellement en cours d'élaboration. Enfin, l'Inde a entrepris la
rationalisation des procédures de passation de marchés et de concessions, et élaboré des accords de
concessions et des documents d'appel d'offres standardisés et adaptés aux spécificités de différents
secteurs d’infrastructures.
Une exécution et une gestion adéquates des projets d’investissements au niveau régional doivent
obligatoirement être complétées par des ressources disponibles au niveau de l’administration centrale,
au moins dans un premier temps, en Tunisie. À cet égard, et suite au retard affiché pour la
concrétisation des projets (dont le taux d’avancement se situe entre 8 et 25% dans les régions intérieures
en 2013/2014), il a récemment été décidé de mettre en place un Comité de suivi des projets sous
l’autorité de la Présidence du gouvernement. Ce Comité a été créé en 2013 afin de surmonter les
obstacles confrontés au niveau de la réalisation des projets de développement dans les régions
intérieures du pays. Le comité a donc pour but d’accompagner chaque région afin de coordonner
l’exécution des projets sur le terrain. Il se superpose aux comités existants propres à chaque projet, et
qui ont été mentionnés plus haut. L’appui de l’Instance nationale des PPP aux régions tunisiennes sera
également primordial au bon lancement de projets de PPP viables au niveau infranational.
Ainsi, la décentralisation telle que prévue par la nouvelle Constitution devra nécessairement être
accompagnée d’un renforcement de capacité aussi au niveau des régions afin de mener à bien les projets
PPP, mais ceci se fera graduellement. Dans un premier temps, le suivi et la préparation de projet
régionaux devront être fortement appuyés par le gouvernement afin de mener à un transfert du savoir-
faire dans le domaine de la gestion des contrats complexe de PPP. Un « point de contact PPP » pour
chaque région permettrait par ailleurs un rapport fluide avec l’Instance nationale des PPP au niveau
central. Un renforcement de capacités au niveau régional doit aller de pair avec un renforcement en
effectifs humains et en ressources financières pour pouvoir gérer et mener à bien leurs responsabilités
accrues.
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Au Royaume-Uni, à titre d’exemple, le département des Communautés et des gouvernements
locaux apporte un soutien à ces derniers dans la préparation de l’évaluation des projets (
project
appraisal
), ainsi que pendant la phase de passation des marchés. Il existe aussi une entité semi-
commerciale et semi-publique, Local Partnerships, qui offre ses services de conseil transactionnel aux
gouvernements locaux tout au long du cycle de vie d’un projet PPP.
Enfin, un cadre institutionnel et juridique robuste est nécessaire mais non suffisant pour attirer
l’intérêt du secteur privé et augmenter les opportunités d’investissement en régions. Comme mentionné
plus haut, la préparation d’une « pipeline » stratégique de projets sur des bases socio-économiques
figure parmi les éléments favorables les plus souvent cités par le secteur privé. Avec le soutien de
ministères clés comme la Présidence du Gouvernement et le ministère des Finances, les ministères de
tutelle et les régions tunisiennes gagneraient à préparer une liste qui serait approuvée au plus haut
niveau politique, pour assurer la promotion des projets. Actuellement, l’USC a notamment pour mission
d’assister les autorités publiques à la promotion des concessions au niveau des régions ; elle pourrait
donc contribuer à cet effort afin de susciter l’intérêt de partenaires privés potentiels.
Recommandations principales du chapitre
Veiller à la mise en place d’un schéma institutionnel clair et efficace pour les PPP (voir le schéma
ci-dessous)
, tout en renforçant la capacité de l’Instance nationale des PPP et en clarifiant son rôle :

l’Instance nationale des PPP qui doit pouvoir : émettre un avis informé, en consultation avec
les parties prenantes clés comme les ministères des Finances et de la Planification, sur
l’éligibilité des projets pour le mode PPP ; gérer un fonds de développement de projet, ainsi
que le recours par les autorités contractantes aux conseillers externes qui seront financés par ce
fonds ; conseiller les autorités publiques pendant les phases de développement, d’appel d’offres,
et d’exécution du projet, y compris pour de possibles renégociations ; guider la politique de
l’État en termes de PPP ; et suivre tous les PPP dans le secteur public à cette fin.
En matière de ressources humaines, l’Instance nationale des PPP devrait s’attacher les
services de conseillers transactionnels expérimentés en interne dans les domaines du
financement et de la gestion de projet pour soutenir la direction de l’unité PPP et faciliter le
processus décisionnel et de supervision. En effet, l’Instance interviendra au cours des
différentes étapes du cycle de vie d’un projet, et ceci pour fournir aux autorités contractantes de
l’expertise technique, de la formation, et de la régulation envers les PPP proposés et entamés.
Des rémunérations concurrentielles devraient être proposées aux agents publics travaillant
dans l’instance nationale des PPP, afin de rassembler et de retenir des équipes aux compétences
requises. À défaut, il pourrait être utile d’établir un registre du personnel public ayant
développé une expertise dans les contrats d’infrastructure et les PPP, afin d’obtenir un soutien
ponctuel lorsque leur expérience s’avère pertinente.
En termes d’organisation, l’Instance nationale des PPP pourrait collaborer de près avec (ou
éventuellement inclure en son sein) des équipes chargées, entre autres: de l’examen, de
manière indépendante, de demandes de recours administratif se rapportant au processus d’appel
d’offres dans les concessions et les PPP ; de l’évaluation financière des PPP ; et du recueil de
meilleures pratiques et de possibles réformes de politique publique découlant des expériences
PPP (par exemple sous la forme d’un observatoire national des PPP).
Renforcer l’implication d’autres ministères et entités publiques dans la prise de décision
concernant les projets PPP à poursuivre :

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Un comité de fonctionnaires de haut niveau représentant les ministères clefs dans la mise
en œuvre des PPP
, notamment le ministère des Finances et le MDCI, est déjà en place au sein
du gouvernement ; son rôle pourrait être étendu pour lui permettre de participer à l’approbation
des projets PPP. Par exemple, l’Instance nationale des PPP pourrait décider des projets qui
seront présentés au Comité et préparer les différents éléments visant à aider leur décision et
leur approbation éventuelle, avant de transmettre la réponse finale à l’autorité contractante.
Cette coordination permettrait aux autorités publiques de mieux s’approprier, de
convenablement préparer, et de mettre en œuvre les projets PPP les plus importants.
Le travail de ce comité serait coordonné avec le comité du Cabinet qui a la charge
d’approuver une « liste courte » de projets PPP
(voir le Figure 1.1). Ce dernier procure de
vastes mandats qui sont interprétés par le comité interministériel pour mener à bien les
politiques publiques de l’État.
Dans ce cadre, un « pipeline » de projets PPP aidera à clarifier
le rôle attendu du secteur privé dans les infrastructures. Ce pipeline servirait, par ailleurs, les
besoins de communication et de promotion des opportunités d’investissement.
Graphique 5.2. Possible schéma institutionnel pour les PPP en Tunisie
Approuve une “liste courte” de
projets PPP qui seront inclus dans
le
budget de l’État
Comité du Cabinet
(hauts décideurs
politiques)
Instance
nationale des
PPP
Comité
interministériel
(Secrétariat)
Observatoire des
PPP
Approuve les projets PPP de la
« liste longue », en collaboration
avec l’Instance nationale des
PPP. Propose une « liste
courte » de projets au Comité du
Cabinet.
Possible unité
chargé du recours
administratif pour
les
soumissionnaires
insatisfaits
Liens étroits avec
le Ministère des
finances et la
DGPPP en ce qui
concerne la
viabilité financière
S’appuie, dans le
cadre de certains
projets, sur un
réseau de
conseillers
externes
Prévoir des mesures pratiques visant à renforcer les capacités institutionnelles requises par les
PPP
au niveau central, mais également dans les régions et dans les entités contractantes :
Dans un premier temps et si cela s’avère nécessaire, chaque ministère et les principales
entreprises publiques pourraient désigner un « point de contact PPP » en liaison avec l’Instance
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nationale des PPP. Il pourrait aussi être souhaitable de commencer par quelques projets
« pilotes » de petite taille et moins complexes dans les régions, avant de passer aux projets de
plus grande envergure.
Développer des manuels d’orientation, à l’attention des autorités contractantes, détaillant les
procédures à suivre lors de l'évaluation des offres de projet dans le contexte tunisien – portant
en particulier sur les critères d’évaluation, les matrices des risques à prendre en compte selon le
type de projet et de secteur, et les calculs d’optimisation de la dépense publique et de viabilité
budgétaire. En plus de ces guides méthodologiques, des documents normalisés pour les
différentes étapes du projet, y compris des contrats-type, peuvent aussi s’avérer fort utiles.
Certaines clauses contractuelles peuvent être envisagées pour faciliter le suivi des
performances de la part des autorités contractantes.
Par exemple et comme c’est le cas
dans le secteur de l'eau à Santiago, à Manille ou à Jakarta, les objectifs de performance
mesurés en fonction de l’amélioration par rapport à un indice de référence,
à un concurrent ou
à une entreprise modèle (plutôt que sur la base de niveaux absolus de rendement) requièrent
moins d’efforts de collecte de données de la part du partenaire public.
1 Selon l’article 2 de la loi de 1998 relative à l’OMMP, “l'office de la marine marchande et des ports peut dans
le cadre de la réglementation en vigueur concéder l'exploitation des différents biens qui lui reviennent et
certains services relevant de ses missions … Les concessions ne portent pas sur les missions concernant le
contrôle, l'autorisation et la police portuaire.” La liste des services qui peuvent être concédés est fixée par
décret.
2 « Le contrat de partenariat est le contrat par lequel un organisme public dénommé personne publique confie,
pour une période déterminée, à une personne privée dénommée partenaire privé, une mission globale portant
totalement ou partiellement sur le financement, la conception, la réalisation ou la transformation, la
maintenance, l’exploitation ou la gestion d’ouvrages ou d’équipements ou d’infrastructures ou de biens
immatériels nécessaires pour assurer les besoins de la personne publique moyennant une contrepartie
versée/payée par la personne publique pendant la durée du contrat et conformément aux conditions qui y sont
prévues. Le contrat de partenariat ne comprend pas la délégation de gestion du service public. Le contrat de
partenariat peut autoriser, d’une manière subsidiaire, au partenaire privé de fournir des prestations de service et
d’en percevoir une contrepartie des usagers à la condition que cela n’affecte pas la bonne marche du service
public et le respect de ses obligations découlant du contrat. »
3 Décret relatif à la création de l’USC
4 Décret n° 2013-4630 du 18 novembre 2013, portant création d'une unité de suivi des concessions au sein de la
Présidence du gouvernement, article 5
5 http://www.mdci.gov.tn/index.php/2012-04-18-14-10-28/presentation-du-ministere/2012-06-22-09-15-
22?layout=edit&id=67
6 Projet de Décret fixant les conditions, procédures et modalités de passation des contrats de concession et de
partenariats public-privés.
7 Le ministère de tutelle, l’autorité régionale, ou encore l’établissement ou l’entreprise publique concernée. Parfois
entre plusieurs intervenants
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8 http://www.mdci.gov.tn/index.php/2012-04-18-14-10-28/presentation-du-ministere/2012-06-22-09-15-
22?layout=edit&id=66
9 Ce processus d’évaluation de chaque projet d’infrastructure, le « business case appraisal », est décrit
dans le
Green Book du Trésor britannique. Cette publication est considérée comme un instrument de
meilleure pratique globale. Une mise à jour du Green Book est prévue en 2015.
10 Voir le site de la MAPPP: http://www.economie.gouv.fr/ppp/evaluation-prealable
11 Conformément au décret n° 2010-3437 du 28 décembre 2010, Fixant les critères de classification des
concessions d'intérêt national
12 L’article 14 du projet de loi relatif aux PPP indique expressément que « le critère de paiement différé ne
pourrait à lui seul motiver le choix ».
13 Questionnaire de l’OCDE
14 Voir Green Book on Appraisal and Evaluation in Central Government de HM Treasury (autorité budgétaire
centrale), dont une révision est prévue pour 2015, pour plus de détails sur ce processus d’évaluation au
Royaume Uni
15 Le processus du Gateway Review est obligatoire pour les programmes d’achats publics, de construction, et
ceux axés sur la TI, ainsi que pour les projets du gouvernement central.
16 http://webarchive.nationalarchives.gov.uk/+/www.dh.gov.uk/en/Managingyourorganisation/Gatewayreviews/D
H_121642
17 La loi no 91-64 du 29 juillet 1991, suivie de cinq révisions (loi no 83 du 26 juillet 1993, loi no 95-42 du
24 avril 1995, loi n
o 99-41 du 10 mai 1999, loi no 2003-74 du 11 novembre 2003 et loi no 2005-60 du
18 juillet 2005).
18 Les seuils de taille des projets varient en fonction du secteur concerné ; par exemple les projets les plus grands
(soumis à l’approbation de la Commission supérieure des marchés) sont supérieurs à 10 millions de dinars
(6 millions USD environ) pour les marchés de travaux, et 4 millions de dinars (2,5 millions USD environ) pour
les TIC et pour la plupart des autres services.
19 Offre économiquement la plus avantageuse : « l’offre dont l’avantage est vérifié sur la base d’un rapport entre
l’aspect financier et l’aspect technique tel que prévu par le règlement d’appel d’offres au vu d’un ratio qui sera
octroyé à chaque critère qui prend en compte sa valeur pondérale. »
20 Foster, Richard (2011), Capacity Building to Enhance Investment in Public Private Partnerships. Foster
Infrastructure, Training Program on Capacity Building to Enhance Domestic and Foreign Investment Flows in
the Asia Pacific Region, 12-18 October 2011, Melbourne.
21 OCDE (2013), Integrity Review of Tunisia
22 Par exemple quant aux coûts de production ou de service du concessionnaire, ou touchant à la qualité des
infrastructures existantes – coût de leur maintien et de leur remise à neuf, etc.
23 Le contrat Sing Spring entre le Public Utilities Board (PUB) du Singapour et l’entrepreneur de traitement de
l'eau, Hyflux.
24 OCDE, entretiens, 2013
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25 Selon le Code des Obligations et des Contrats (Livre Premier : Des Obligations en Général ; Titre Quatre : Des
Effets des Obligations ; Chapitre III : De l'inexécution de l'obligation et de ses effets ; Article 283: De la force
majeure et du cas fortuit) : « La force majeure est tout fait que l'homme ne peut prévenir, tel que les
phénomènes naturels (inondations, sécheresses, orages, incendies, sauterelles), l'invasion ennemie, le fait du
prince, et qui rend impossible l'exécution de l'obligation. N'est point considérée comme force majeure la cause
qu'il était possible d'éviter, si le débiteur ne justifie qu'il a déployé toute diligence pour s'en prémunir. N'est pas
également considérée comme force majeure la cause qui a été occasionnée par une faute précédente du
débiteur. »
26 Banque mondiale (2014), Doing Business 2014, actualisation de l’Examen des politiques de l’investissement
de l’OCDE
27 http://iab.worldbank.org/Data/Explore%20Economies/Morocco#/Arbitrating-disputes
28 La loi de 2008 sur le régime des concessions distingue trois catégories de propriété des biens (les biens de
retour, les biens de reprise et les biens propres). Ce classement des biens en différentes catégories empêche
d’utiliser certains dispositifs de PPP (contrats CEP et CET) car la propriété des actifs – y compris les terrains
et les constructions – doit être transférée à la fin du contrat.
29 http://pimac.kdi.re.kr/eng/main/main.jsp
30 Présentation par le Korea Development Institute (KDI) à la 7ème réunion annuelle des PPP de l’OCDE, le 17-
18 Février 2014
31 Voir la Municipal Infrastructure Investment Unit, créée en 1998 en tant que société privée à caractère non
lucratif au ministère du Gouvernement provincial et local dans le but d’apporter un soutien aux municipalités
participant à des PPP.
32 Le Top 40 représente une liste d'investissements (projets et programmes) qui sont prioritaires pour le
gouvernement du Royaume Uni. Ces investissements prioritaires répondent à trois critères principaux: 1) une
contribution potentielle à la croissance économique - c.à.d. un investissement qui améliore la productivité et
permet l'innovation; 2) d'importants investissements à l'échelle nationale qui offrent un nouveau standard de
qualité, de durabilité et de capacité à l'infrastructure; et 3) des projets qui attirent ou débloquent d'importants
investissements privés. (HM Treasury,
National Infrastructure Plan 2013, December 2013)
33 A la date d’avril 2014
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GLOSSAIRE
Autorité budgétaire centrale : entité de l’administration centrale / fédérale généralement responsable,
entre autres, d’établir le budget et de répartir les ressources aux ministères fonctionnels qui le mettront
en œuvre. Dans la plupart des pays, ce rôle est exercé par le ministère des Finances.
Bénéfice résiduel : bénéfice généré par une entreprise ou un projet après prise en compte du coût réel
du capital. Il s’agit du rendement perçu au-delà du rendement minimum requis.
Biais d’optimisme : tendance des études ex-ante à sous-estimer le coût d’un projet et le temps
nécessaire à sa réalisation.
Capacité / besoin de financement : solde net d’exploitation (voir cette définition) moins les
acquisitions nettes d’actifs non financiers. La capacité / besoin de financement correspond également
aux acquisitions nettes d’actifs financiers moins l’accroissement des passifs financiers.
Comparateur de secteur public (CSP) : en principe, un comparateur de secteur public permet
d’évaluer les offres de partenariat public-privé en les comparant avec un projet de référence. Celui-ci
correspond à la solution publique la plus probable et la plus économique envisageable pour répondre à
tous les éléments du cahier des charges. Ce projet doit répondre aux mêmes exigences de performance
que celles imposées aux soumissionnaires. Le CSP ne part pas du principe que le projet sera
intégralement réalisé par le secteur privé. Souvent la sous-traitance de certains aspects et
l’externalisation de certains services sont pris en compte par le CSP. Les calculs mis en œuvre pour
l’élaboration du projet de référence servent à déterminer les critères de résultat des soumissions. (voir
Partnership Victoria, Public Sector Comparator, Technical Note, juillet 2003).
Comptabilité en base caisse : selon le Manuel SFP 2001 (FMI 2001:32) l’enregistrement en base
caisse « saisit les flux au moment des encaissements et décaissements ».
Comptabilité en base caisse modifiée : à l’instar de la comptabilité en base caisse, elle enregistre les
flux au moment des encaissements et décaissements (règlements, actifs et passifs financiers). Elle
diffère de la comptabilité en base caisse par le fait qu’elle contient un bilan de la situation financière
faisant apparaître les actifs et les passifs financiers. Ainsi, elle enregistre des recettes fiscales à
recevoir et des recettes fiscales à rembourser.
Comptabilité sur la base des droits constatés : selon le Manuel SFP 2001 (FMI 2001:32)
l’enregistrement sur la base des droits constatés « saisit les flux au moment où la valeur économique
est créée, transformée, échangée, transférée, ou éteinte. Cela implique que l’enregistrement de l’impact
des événements économiques doit correspondre à la période durant laquelle ces événements
surviennent, qu’il y ait eu règlement ou non, ou présomption de règlement ». Cette méthode comptable
fait généralement ressortir l’amortissement du capital.
Comptabilité sur la base des droits constatés modifiée : s’apparente à la comptabilité sur la base
des droits constatés, à la différence que les flux sont enregistrés au moment où ils sont encaissés,
mesurables et disponibles, alors qu’avec la comptabilité sur la base des droits constatés, les flux sont
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enregistrés au moment où ils sont encaissés et mesurables. En général, la comptabilité sur la base des
droits constatés modifiée tient elle aussi compte de l’amortissement du capital.

Comptabilité sur la base des engagements : selon le Manuel SFP 2001 (FMI 2001:32) cette
méthode « saisit les flux au moment où l’administration publique s’est engagée à effectuer une
transaction. Normalement, cette comptabilité ne s’applique qu’aux achats de biens et services, y
compris la rémunération des employés. Les flux sont généralement enregistrés au moment où l’ordre
d’achat est émis par l’administration publique. Les flux qui ne peuvent pas être comptabilisés de cette
manière doivent être enregistrés selon une des trois autres méthodes. »
Contrat de concession (dont BOT, BOO, etc.) : l’opérateur privé (le concessionnaire) se voit confier
la gestion complète d’un service dans un domaine spécifique ; il est notamment chargé de la
construction, de l’exploitation, de la maintenance, de la perception des recettes, de la gestion et de la
modernisation du réseau. L’opérateur privé est chargé de fournir les équipements, mais ceux-ci restent
le plus souvent la propriété du secteur public et lui sont retransférés à l’issue de la période de
concession. Il revient à l’administration publique de veiller au respect des niveaux de service par le
concessionnaire et de réguler les prix et la qualité du service. Le concessionnaire collecte les
redevances directement auprès des usagers du réseau selon une grille tarifaire déterminée (il peut
bénéficier d’un soutien public dans certain cas). Il existe différentes formes de contrats de concession :
conception-appel d’offres-
(BOT),
(DBB),
conception–construction–financement–exploitation (DBFO), et construction–exploitation–propriété
(BOO).

construction–exploitation–transfert
construction
Contrat de gérance : contrat de service complet couvrant l’ensemble des aspects de gestion et
d’exploitation assurés par la structure de service public ou le prestataire de service. L’obligation de
service reste du ressort du secteur public, mais le contrôle et l’exercice de la gestion sont confiés au
partenaire privé. La rémunération du prestataire privé est liée aux coûts d’exploitation selon des
modalités fixées à l’avance ; s’y ajoute souvent une rémunération supplémentaire liée à la réalisation
d’objectifs de performance prédéfinis. Le partenaire privé peut apporter une partie du fonds de
roulement, mais le secteur public conserve l’obligation de réaliser les principaux investissements
d’équipement.
Contrat de service : dans le cadre d’un contrat de service, une entreprise ou entité privée se voit
confier la réalisation de certaines tâches ou services pour une période généralement comprise entre un
à trois ans, en contrepartie d’une rémunération forfaitaire. L’administration publique reste le principal
fournisseur des services d’infrastructure et ne confie que quelques aspects de leur exploitation au
partenaire privé. Le partenaire privé doit fournir le service à un coût convenu et répondre aux normes
de performance définies par le secteur public.
Délai de récupération : période nécessaire pour le recouvrement du coût d’un investissement, les
meilleurs investissements ayant les délais de récupération les plus courts. Il s’agit d’un critère
déterminant dans la décision d’entreprendre ou non un projet.
Entité de contrôle : dans le cadre d’une passation de marché public, un projet ne peut être mené à
bien s’il n’est pas validé par une entité de contrôle.
Entreprises publiques : entreprises établies selon le droit des sociétés ou le droit général, dans
lesquelles l’État exerce un contrôle significatif, qu’il soit l’actionnaire unique, qu’il détienne une
participation majoritaire ou une participation minoritaire mais significative. Certaines entreprises
publiques ont une vocation essentiellement commerciale et un but lucratif et constituent une source de
revenu pour les finances publiques (ces entreprises publiques ne sont pas financées / subventionnées
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par le budget central ou fédéral et utilisent pleinement leurs propres sources de revenu). Toutefois, le
plus souvent sur les marchés d’infrastructures où le prix et l’accès pour l’utilisateur final entrent
également en ligne de compte, les entreprises publiques n’opèrent pas toujours selon le principe de la
couverture intégrale des dépenses par les recettes. Elles peuvent bénéficier d’un soutien / d’une
subvention public(que) qui vient compléter leurs propres sources de revenu. Cependant, certains de
leurs objectifs conservent une forte vocation commerciale et se prêtent donc à la concurrence avec / de
la part d’entreprises privées « à but lucratif ».
Évaluation des besoins : procédure systématique visant à identifier les carences du stock
d’infrastructures existantes. Elle se déroule généralement avant le lancement d’une procédure de
passation de marché.
Modèle de l’acheteur unique : Il s’agit de la séparation juridique des activités de production
(électricité, eau), des activités de transport et de distribution (première étape vers le « dégroupage » de
ces secteurs, voir la définition de ce terme). Ce modèle est d’abord apparu dans les années 1990 dans
le secteur de l’électricité des pays en développement, en réponse à l’insuffisance des capacités. Des
investisseurs privés sont autorisés à construire des centrales électriques et à produire de l’électricité –
ce sont des « producteurs d’électricité indépendants » – qu’ils revendent à la compagnie nationale
d’électricité (l’acheteur unique public qui détient le monopole des activités de transport et de
distribution d’électricité). Le modèle de l’acheteur unique préserve un rôle clé au ministère de tutelle
dans les décisions relatives aux investissements en capacité de production ; il contribue également au
maintien d’un prix de gros unifié pour l’électricité, ce qui simplifie la régulation des prix. Ce modèle
présente toutefois plusieurs inconvénients, parmi lesquels : une absence de concurrence dans les
activités de transport et de distribution de l’énergie ; des passifs éventuels reposant sur les pouvoirs
publics engagés dans des accords d’achat d’électricité avec des producteurs indépendants ; et une
inadéquation potentielle entre les prix de l’électricité et la demande.
Optimisation de la dépense publique : l’optimisation de la dépense publique est une notion qui
comporte à la fois des aspects qualitatifs et quantitatifs et induit généralement un jugement de la part
de l’administration. Elle peut se définir comme la combinaison optimale, du point de vue de
l’administration, de plusieurs éléments (qualité, caractéristiques et prix), calculée sur l’ensemble de la
durée de vie du projet.
Optimisation absolue / relative de la dépense publique: l’optimisation absolue de la dépense
publique
porte sur la question de savoir si les avantages du projet sont supérieurs aux coûts encourus,
tandis que
l’optimisation relative de la dépense publique concerne la question de savoir si les PPP
donnent de meilleurs résultats que les passations de marchés d’infrastructure traditionnelles,
notamment en terme d’efficience économique.
Partenariats public-privé (PPP) : la participation du secteur privé aux infrastructures peut intervenir
sous la forme d’une privatisation totale ou partielle (c’est-à-dire cession au secteur privé de parts ou
d’actifs détenus par les entreprises publiques) ou par des passations de marchés publics, qui peuvent
prendre la forme d’accords de partenariat public-privé. Selon la définition de l’OCDE, les partenariats
public-privé sont des contrats à long terme entre une entité publique et un partenaire privé (ou un
consortium de sociétés privées) en vertu desquels ce dernier peut être chargé, à des degrés divers, de la
conception, de la construction, du financement, de l’exploitation et de la gestion d’un bien
d’équipement afin de fournir un service à l’administration ou directement aux usagers.
Dans le cadre d’un partenariat public-privé, le bien est généralement détenu par le partenaire
privé pendant la durée du contrat d’exploitation mais le contrat de PPP prévoit généralement
le transfert de la propriété juridique de ce bien au secteur public à l’échéance du contrat.
95


Page 96
Pour les besoins de ce questionnaire, la notion de partenariat public-privé recouvre à la fois les
PPP « purs » c’est-à-dire les projets dont l’administration publique est la principale source de
revenu des partenaires privés (sous forme de paiements réguliers ou d’un paiement à l’unité)
et les contrats de concession (voir la définition de ce terme – la principale source de revenu est
le prix des services perçu par les partenaires privés auprès des usagers).

Il existe de nombreuses déclinaisons de cette définition, mais d’une manière générale, par
rapport aux passations de marchés publics plus traditionnelles, les PPP supposent une plus
grande participation du secteur privé puisqu’ils impliquent un transfert de la construction et de
l’exploitation du bien, et engage les partenaires privés sur des périodes plus longues.
Par conséquent, la principale distinction entre les partenariats public-privé et les formes plus
traditionnelles de passation de marchés publics réside dans la répartition des risques.
Passation de marchés d’infrastructure traditionnelle : acquisition par
le secteur public
d’infrastructures, telles que des routes et des bâtiments (ou encore des hôpitaux et des écoles). Les
autorités précisent généralement les exigences de conception de l’équipement. Une entreprise privée
construit cet équipement avant de le transférer au secteur public qui en assure l’exploitation (voir la
définition de contrat de service).
Passifs éventuels : engagements qu’une entité a contractés mais dont le règlement et le montant
dépendent de la matérialisation d’une éventualité donnée. Ces éléments ne sont pas encore et ne seront
peut-être jamais des passifs si cette éventualité ne se concrétise pas. Ils seront dus si certains
événements se concrétisent. Exemples : prêts garantis par l’État ; contrats d’assurance souscrits par
l’administration et demandes de réparation adressées à l’administration.
Projets d’infrastructures sur installations existantes : concession accordée à un opérateur du
secteur privé pour l’exploitation, la maintenance et la perception des recettes directes (auprès des
usagers) d’une installation existante, par exemple une route à péage. Par rapport aux projets sur sites
vierges, les projets sur installations existantes présentent des risques (pas de risques liés à la
construction) et une rentabilité moindres.
Taux de rentabilité interne : taux de croissance attendu d’un projet. C’est également le taux
d’actualisation utilisé dans la préparation d’un budget d’investissement pour lequel la valeur actuelle
nette des flux financiers d’un projet d’investissement est nulle.
Unité des PPP : entité créée avec l’appui des pouvoirs publics afin d’exercer l’une des fonctions
suivantes au regard des partenariats public-privé : orientation stratégique, soutien technique,
renforcement des capacités, promotion des PPP, contrôle de la qualité et validation de certains projets
spécifiques de partenariats public-privé.
Valeur actuelle nette (VAN) : la VAN est utilisée dans la préparation des budgets d’investissement
pour analyser la rentabilité d’un projet. Elle représente la différence entre la valeur actuelle des
décaissements et celle des encaissements, à laquelle s’applique un taux d’actualisation reflétant
l’inflation et les rendements.
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ANNEXE 1: PROJET DE LOI RELATIF AUX CONTRATS DE PARTENARIAT PUBLICS
PRIVÉS, VERSION DE SEPTEMBRE 2014

PRINCIPES GENERAUX DES CONTRATS DE PARTENARIAT
Section 1 : Disposions Générales
Article premier : La présente loi a pour objectif d’établir le cadre général des contrats de
partenariats publics privés, de fixer ses principes fondamentaux, leur élaboration, conclusion
et de définir le régime de leur exécution ainsi que les modalités de leur contrôle.
Article 2 : Au sens de la présente loi, on entend par :
Personne publique : l’État, les collectivités locales ainsi que les entreprises et les
établissements publics ayant obtenu l’accord préalable de l’autorité de tutelle pour conclure le
contrat de partenariat.
Partenaire privé : la personne privée avec laquelle un contrat de partenariat est conclu.
Le projet : Les ouvrages, équipements, infrastructures matérielles ou les biens immatériels
nécessaires pour assurer les besoins de la personne publique et dont le financement, la
conception, la réalisation ou transformation, le maintien et l’exploitation ou la mise en
fonctionnement sont confiés au partenaire privé conformément aux conditions prévues par le
contrat.
La société du projet : la société constituée conformément au droit tunisien et dont l’objet
social se limite à l’exécution de l’objet du contrat de partenariat.
Le contrat de partenariat : le contrat conclu entre la personne publique et la personne privée
y compris les cahiers de charges et ses annexes et les contrats subsidiaires ou liés directement
à son exécution.
Offre économiquement la plus avantageuse : l’offre dont l’avantage est établi sur la base
d’un rapport entre plusieurs critères relatifs aux aspects financiers techniques et économiques
définis par le régime d’appel d’offres et ce, sur la base d’un classement préférentiel ou au par
l’octroi d’un ratio à chaque critère retenu qui prend en compte sa valeur pondérale

L’usager
: le bénéficiaire des prestations de service public quel qu’en soit le mode d’usage
avec ou sans contrepartie.
Proposition spontanée : la proposition émanant de l’initiative de la personne privée et visant
à proposer un certain projet et demander son exécution dans le cadre d’un contrat de
partenariat.
Dialogue compétitif : Une procédure spéciale ayant pour objectif de choisir le partenaire
privé parmi les candidats ayant été sélectionnés suite à un appel à la concurrence,
l’établissement d’un dialogue avec eux sur la structuration technique, économique et
financière du projet et leur demander de présenter à eux tous ou un certain nombre d’entre eux,
leurs offres définitives.
97




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Section 2 : Les principes généraux des contrats de Partenariat
Public Privé
Article 3 : Les contrats de Partenariat Publics Privés ont pour objectif le développement et
le renforcement de l’infrastructure. La programmation et la réalisation des projets qui y sont
liés se fait en fonction des orientations de l’État dans les domaines de développement
économiques et sociales et les priorités sectorielles et régionales.
Article 4 : Le contrat de Partenariat Public Privé est le contrat par lequel un organisme public
dénommé personne publique confie, pour une période déterminée, à une personne privée
dénommée partenaire privé , une mission globale portant totalement ou partiellement sur le
financement, la conception, la réalisation ou la transformation , la maintenance, l’exploitation
ou la mise en fonctionnement d’ouvrages ou d’équipements ou d’infrastructures matérielles
ou immatérielles nécessaires pour assurer les besoins de la personne publique moyennant une
contrepartie payée par la personne publique pendant la durée du contrat et conformément aux
conditions qui y sont prévues.
Le contrat de partenariat ne comprend pas la délégation de gestion du service public.
Le contrat de partenariat peut autoriser , d’une manière subsidiaire , au partenaire privé de
fournir des prestations de service et d’en percevoir une redevance des usagers à la condition
que cela n’affecte pas la bonne marche du service public et le respect de ses obligations

découlant du contrat.
Article 5 : Les contrats de partenariat ne peuvent être conclus qu’après réalisation d’une
évaluation comparative entre différents solutions et hypothèses relatives à la réalisation du
projet et les éléments justifiant son exécution dans le cadre d’un contrat de partenariat à
l’exclusion des autres formes contractuelles et ce essentiellement au vu du coût global du
projet , les modes de financement possibles , le partage des risques et l’efficacité du
rendement
Article 6 : L’établissement et la conclusion des contrats de partenariat obéissent aux principes
de transparences des procédures, d’égalité et d’équivalence des chances par recours à l’appel
à la concurrence , l’indépendance, l’impartialité et la non-discrimination entre les candidats
conformément aux dispositions de la présente loi.
Article 7 : Non obstant les dispositions législatives contraires et observant les obligations de
publicité et d’information des candidats et des soumissionnaires qui sont applicables en
matière de contrats de partenariat , la personne publique est tenue de ne pas divulguer les
renseignements qui lui ont été communiqués par la personne privée à titre confidentiel y
compris, les secrets techniques ou commerciaux et les aspects des offres déclarés
confidentiels .
Article 8 : Les contrats de partenariat sont soumis au principe de l’équilibre économique à
travers le partage des risques dans le contrat entre la personne publique et le partenaire privé
en fonction de la capacité de chacun d’eux à y faire face et ce, en tenant compte de l’intérêt
général et des spécificités du projet
Article 9 : Les dispositions de la législation relative à l’organisation des rapports entre
bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux d’immeubles et des
locaux à usage industriel et commercial ne sont pas applicables aux contrats de partenariat.
98



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CHAPITRE II : OFFRE ET PROPOSITION DES PROJETS DE
PARTENARIAT
Article 10 : L’initiative de partenariat appartient à la personne publique. Néanmoins, la
personne privée peut proposer, de manière spontanée, la réalisation d'un investissement dans
le cadre d'un partenariat avec le secteur public
Section1 : l’initiative publique
Article 11 :La personne publique est tenue de présenter à l’instance nationale de partenariat
public privé mentionnée à l’article 57 de la présente loi , une fiche descriptive du projet à
réaliser sous forme d’un contrat de partenariat comportant une présentation du contenu du
projet et les résultats de l’ évaluation prévue par l’article 5 de la présente loi
L’instance Nationale de partenariats Publics Privés émet un avis motivé et contraignant sur
l’éligibilité ou la non éligibilité du projet à réaliser dans le cadre d’un contrat de partenariat.
Article 12 : Dans le cas de refus de l’instance quant à la réalisation du projet dans le cadre
d’un contrat de partenariat, son avis comporte obligatoirement une proposition sur la forme
contractuelle la mieux adaptée avec les spécificités du projet conformément à la législation en
vigueur.
Article 13 : Dans le cas d’un avis favorable sur l’éligibilité du projet à être réalisé
conformément aux dispositions de l’article 11 de la présente loi, la personne publique est
tenue de communiquer à l’instance Nationale de partenariats publics privés une évaluation des
différents aspects financiers, techniques et juridiques du projet, ses implications économiques
et sociales attendues , sa capacité de répondre aux exigences de développement durable et le
cas échéant son rapport avec d’autres projets
La personne publique peut faire appel à des experts conformément à la législation en vigueur,
pour procéder à l’opération d’évaluation précitée.
Section2 : La proposition spontanée
Article 14 : La personne privée peut faire une offre spontanée pour la réalisation
d’investissements dans le cadre de contrats de partenariat avec le secteur public. Elle doit dans
ce cas, présenter à la personne publique compétente et habilitée au sens de la présente loi, une
offre comportant une étude de préfaisabilité financière, technique, environnementale,
juridique, économique et sociale du projet
Les conditions et modalités d’acceptation de la proposition spontanée sont fixées par décret.
Article 15 : La personne publique procède à l’examen de la proposition spontanée présentée,
élabore un rapport motivé sur la faisabilité du projet de partenariat et le mode contractuel
possible et le transmet à l’instance nationale de Partenariats Publics privés. Elle informe le
titulaire de la proposition de la suite qui lui a été donnée.
Article 16 : Dans le cas où la proposition spontanée est retenue et que sa réalisation est
acceptée dans le cadre d’un partenariat, la personne publique se réserve le droit d’utiliser cette
proposition. La personne publique est tenue dans ce cas, d’informer l’auteur
de la proposition
spontanée de son intention d’entamer les procédures d’appel à la concurrence conformément
aux procédures prévues par l’article 18 de la présente loi et de l’inviter à y participer.
99


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Article 17 : Si la proposition spontanée comporte une idée innovante ou innovatrice, et en
fonction des résultats de l’étude de préfaisabilité et des besoins de la personne publique, et
après approbation de l’instance Nationale de Partenariats Publics Privés sur rapport motivé, la
personne publique peut conclure un contrat de partenariat avec le titulaire de la proposition
par marché négocié.
CHAPITRE III :
CHOIX DU PARTENAIRE PRIVE ET CONCLUSION DU
CONTRAT DE PARTENARIAT
Section 1 : Sélection du partenaire privé
Article 18 : Sous réserve des dispositions de l’article 6 de la présente loi, les contrats de
partenariat sont conclus par appel d’offres ouvert ou restreint et exceptionnellement par
consultation ou marché négocié.
Les conditions, procédures et modalités de conclusion des contrats de partenariat sont fixés
par décret.
Article 19 : Le contrat de partenariat est conclu avec le candidat ayant présenté l’offre
économiquement la plus avantageuse compte tenu de critères préétablis par la personne
publique dans l’avis d’appel à la concurrence, dont notamment le critère de capacité du projet
à créer des emplois, la qualité, les spécificités fonctionnelles et techniques du projet, les délais
de réalisation et le coût global du contrat
On entend par coût global du contrat, la valeur actualisée nette des montants perçus par le
partenaire privé pendant la durée du contrat.
Article 20 : Les contrats de partenariats sont passés par consultation dans l’un des cas
suivants :
1- Lorsque l’appel à la concurrence a été déclaré infructueux à la condition que cela ne
soit pas le résultat de manquements tenant à la personne publique dans les procédures
ou dans les documents d’appel à la concurrence et sur la base d’un rapport motivé
assorti de l’approbation de l’instance Nationale de Partenariats Publics Privés
2- Pour des raisons de défense nationale ou de sécurité publique.
3-
Lorsqu’il y a urgence, pour des raisons non imputables à la volonté de la personne
publique, à assurer la continuité du service public.
Article 21 : Les contrats de partenariats sont conclus par marché négocié dans l’un des cas
suivants :
1- si leur objet se rapporte à des prestations qui ne peuvent être confiées qu’à une
personne déterminée
2- si leur objet se rapporte dont l’exploitation est exclusivement réservée au porteur d’un
brevet d’invention.
3- Si leur objet se rapporte à une proposition spontanée ayant été approuvé
conformément aux procédures prévues par l’article 17 de la présente loi
100



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Article 22 : La personne publique peut recourir au dialogue compétitif si elle n’est pas en
mesure de déterminer à l’avance , de manière objective et en raison de la spécificité du projet
objet du partenariat, les moyens et les solutions techniques et financières susceptibles de
répondre à ses besoins de telle façon qu’elle que le contrat ne peut être conclu par recours aux
procédures d’appel d’offres ouvert ou restreint.
Article 23 : La personne publique entame avec les candidats sélectionnés, un dialogue dont
l’objet est d’améliorer et de développer l’aspect technique et le montage juridique et financier
du projet et ce, en fonction de ses besoins et des conditions minimales pour la réalisation du
projet et pour lesquels ils sont invités à remettre leurs offres définitives.
La personne publique garantit au cours du dialogue, l’égalité de traitement entre l’ensemble
des candidats participants et la confidentialité des solutions proposées par chaque candidat.
Les conditions et les procédures du dialogue compétitif sont fixées par décret.
Section 2 : Conclusion du Contrat de Partenariat
Article 24 : les Contrats de Partenariat entre la personne publique et la société du projet
constituée par le partenaire privé sont conclus conformément au droit Tunisien et suivant le
contenu de son offre concernant le capital minimal et la répartition des participations et dont
l’objet se limite à la réalisation du projet de partenariat.
Article 25 : Les participations du partenaire privé dans le capital de la société de projet ne
peuvent être cédés/transférés qu’après obtention de l’accord préalable et écrit de la personne
publique conformément aux conditions et procédures fixées par le contrat de partenariat.
Les conventions signées entre les partenaires lors ou après constitution de la société sont
soumises aux mêmes procédures d’accord préalable et écrit.
Article 26 : Le contrat de partenariat doit prévoir, notamment :
- L’objet du contrat
-
Les délais de réalisation du projet et la durée du contrat
-
Les modalités de partage des risques entre la personne publique et le partenaire privé
-
Les conditions garantissant
l’équilibre du contrat en cas de circonstances
exceptionnelles survenues après sa signature.
- Les obligations des cocontractants
- Les modalités de financement du projet
- Les objectifs de performance assignés à la société du projet, les modalités de leur
détermination et de leur contrôle et la qualité requise dans les prestations fournies,
ouvrages, équipements, infrastructures matérielles et immatérielles objets du contrat.
-
Les modalités de détermination de la rémunération perçue par la société du projet de la
part personne publique et le cas échéant, les modalités de détermination des
redevances qu’elle est autorisée à percevoir des usagers du service si le contrat lui
autorise de fournir subsidiairement des prestations de service.
- Les modalités du contrôle et du suivi exercé par la personne publique dans l’exécution
du contrat notamment la réalisation des objectifs de qualité.
101




Page 102
- Les contrats d’assurance devant être conclus.
-

les procédures de recours à la sous-traitance
-
Le régime juridique des biens, des assurances et des suretés pendant la durée du
contrat et lors de son extinction.
- Les procédures de modification du contrat en cours de son exécution.
-
La détermination des pénalités ainsi que les modalités de leur paiement.
-
Les cas de rupture anticipée du contrat, ses conditions, ses procédures et ses effets
dont la cession et la subrogation
- La résolution à l’amiable des différends découlant de l’exécution du contrat, et la
durée nécessaire qu’elle implique avant de recourir à la justice et le cas échéant à
l’arbitrage. En cas de recours à l’arbitrage, le contrat prévoit obligatoirement que le
droit Tunisien est applicable au litige.
Article 27 : La durée du contrat de partenariat est fixée en fonction des besoins de la
personne publique en tenant compte notamment de la durée d’amortissement des
investissements à réaliser et des modalités de financement suivies.
Les contrats de partenariat ne sont pas renouvelables.
Exceptionnellement, le contrat peut être prorogé pour une durée maximale de 2 ans dans les
cas d’urgence pour assurer la continuité du service public ou dans le cas de force majeure et
ce, après avis de l’Instance Nationale de Partenariats Publics Privés
Article 28 : Le contrat indique les modalités de calcul, d’actualisation et de révision de la
rémunération versée par la personne publique à la société du projet. La rémunération est
constituée notamment par les divers montants correspondants au coût des investissements, de
la maintenance et du fonctionnement, fixés séparément.
Seront pris en considération lors du calcul de la rémunération, l’ensemble des redevances que
peut percevoir la société du projet directement des usagers en contrepartie des prestations
qu’elle fournit de manière subsidiaire conformément aux dispositions du paragraphe 2 de
l’article 4 de la présente loi.
Le versement de la contrepartie par la personne publique est obligatoirement subordonné à la
réalisation des objectifs de performance du rendement assignés à la société du projet.
Les modalités d’application du présent article sont prévues par décret.
Article 29 : Le contrat de partenariat peut prévoir une délégation permettant à la société du
projet de percevoir au nom et au bénéfice de la personne publique les redevances des
prestations de services ou des services publics par les usagers du service.
Article 30 : Le contrat prévoit les conditions de partage des risques entre la personne
publique et la société du projet, y compris ceux qui résultent des circonstances
exceptionnelles ou de force majeure et ce, suivant l’équilibre économique du contrat.
Les risques sont partagés en fonction de la capacité de chaque partie à y faire face au moindre
coût en tenant compte de l’intérêt général et des spécificités du projet.
Article 31 : Le contrat prévoit les conditions garantissant à chacune des deux parties
contractantes le droit de demander le rééquilibrage du contrat dans le cas de survenance de
circonstances exceptionnelles imprévisibles lors de la signature du contrat ou dans le cas de
force majeure.
102



Page 103
Article 32 : Conformément à l’article 26 de la présente loi, le contrat de partenariat doit
prévoir :
-

les stipulations relatives à l’inventaire des biens objet du contrat de partenariat , leur
classification , les droits réels en découlant et les droits et obligations des
cocontractants qui y sont liés
- Les conditions dans lesquelles la personne publique met à la disposition du partenaire
privé les immeubles nécessaires à l’exécution du contrat de partenariat ou les
conditions de son acquisition de ces immeubles
Article 33 : Sauf stipulation contraire, il est constitué pour le partenaire privé, un droit réel
spécifique sur les constructions, ouvrages et installations fixes qu’il réalise en exécution du
contrat de partenariat.
Ce droit réel lui confère pendant la durée du contrat, les prérogatives et obligations du
propriétaire dans les limites prévues par la loi
Article 34 : Les, constructions, ouvrages et installations objets du contrat ne peuvent être
hypothéqués que pour garantir les emprunts contractés par le partenaire privé en vue de
financer leur réalisation ou leur modification ou leur extension ou leur maintenance ou leur
renouvellement
Les effets des hypothèques grevant les constructions, ouvrages et installations fixes prennent
fin à l’expiration de la durée du contrat de partenariat.
Article 35 : Il est interdit, pendant toute la durée du contrat, de céder ou de transférer à
quelque titre que ce soit, les droits réels, les constructions, les ouvrages et les installations
fixes y compris les sûretés portant sur lesdits droits sans l’autorisation préalable et écrite de la
Personne publique.
Les créanciers chirographaires autres que ceux dont la créance est née de l'exécution des
travaux mentionnés au paragraphe premier de cet article, ne peuvent prendre des mesures
conservatoires ou des mesures exécutoires portant sur les droits et biens mentionnés au
présent article.
Article 36 : Lorsque le contrat emporte occupation du domaine public, il vaut autorisation
d’occupation de ce domaine pour sa durée. Le mode d’occupation, les obligations qui y sont
liés et les droits en découlant sont régis par les stipulations du contrat de partenariat et
conformément à la législation en vigueur.
Article 37 : les biens mentionnés dans le présent chapitre peuvent faire l’objet de contrats
de leasing. Dans ce cas, les stipulations du contrat doivent prendre en considération les
exigences du service public.

Article 38 : les droits grevant les constructions, ouvrages et installations fixes objets du
contrat de partenariat , sont inscrits sur un registre spécial tenu par les services compétents
auprès du ministère chargé des domaine de l'État et des affaires foncières.
Les modalités de tenue de ce registre sont fixées par décret.
Les formes et les procédures prévues par la législation en vigueur en matière de droits réels
sont applicables à l’inscription du droit réel ainsi que les droits des créanciers le grevant.
CHAPITRE IV : EXECUTION ET CONTROLE DES
CONTRATS DE PARTENARIAT
103



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Section 1 : Exécution des contrats de partenariat
Article 39 : La société de projet est tenue d'exécuter le contrat de façon directe sauf si le
contrat lui permet de sous-traiter une partie de ses obligations après obtention de l’accord
préalable de la personne publique. Toutefois, La société de projet ne peut en aucun cas sous-
traiter l’intégralité ou la majorité des obligations qui lui incombent en raison du contrat.
Dans tous les cas, la société de projet demeure directement responsable envers la personne
publique et les tiers, de l'accomplissement de toutes les obligations que lui impose le contrat.
Article 40 : La société du projet est tenue, au cours de l'exécution du contrat et jusqu'à son
terme, de sauvegarder toutes les composantes du projet objet du contrat de partenariat et de
procéder à leur maintenance conformément aux conditions stipulées dans le contrat.
Article 41 : La société de projet doit obtenir toutes les autorisations ou se conformer aux
cahiers de charge en rapport avec l’exécution du contrat de partenariat tel qu’exigé par la
législation en vigueur.
La personne publique peut apporter son concours à la société de projet afin de lui faciliter
l’obtention des autorisations ou se conformer aux cahiers de charges précités
Article 42 : Si la bonne exécution du contrat l’exige, tout ou partie des contrats en cours liés
au projet et conclus par la personne publique peuvent être transférés au profit de la société de
projet.
Article 43 : le contrat de partenariat ne peut être transféré aux tiers au cours de son
exécution qu’après obtention de l’accord préalable et écrit de la personne publique, Le
transfert fera l’objet d’un contrat conclu conformément aux conditions et aux procédures
prévues par la présente loi.
Article 44 : en cas de manquement grave du partenaire privé/initial à ses obligations
contractuelles, Le contrat de partenariat peut prévoir la possibilité pour les banques et les
sociétés de leasing qui financent le projet de proposer la subrogation
du partenaire privé par
une autre personne pour poursuivre la réalisation du projet conformément aux mêmes
conditions convenues dans le contrat initial
La subrogation ne peut se faire qu’après accord de la personne publique après avis de
l’instance nationale de partenariats publics privés
Article 45 : Sans préjudice aux conditions et procédures prévues par la législation
concernant la cession ou le nantissement des créances professionnelles, La rémunération
perçue par la société de projet ne peut être cédée ou nantie au profit des banques ou des
sociétés de leasing qui financent le projet.
Les conditions et modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
Article 46 : Le contrat peut imposer à la société de projet de sous-traiter un pourcentage
minimal des activités prévues par le contrat de partenariat aux petites et moyennes entreprises
créées conformément au droit Tunisien.
Ce pourcentage minimal est intégré dans le règlement d’appel d’offres.
Article 47 : Le contrat prévoit les conditions dans lesquelles il peut être procédé, à la
modification de certains de ses articles ou à sa résiliation, notamment pour tenir compte du
changement des besoins de la personne publique, ou des conditions de financement du projet
ou de manière générale répondre aux nouvelles exigences du service objet du contrat de
104





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partenariat.
Dans ce cas, La société de projet a le droit de demander la révision de l’équilibre économique
du contrat ou l’obtention d’une indemnité équitable conformément aux conditions et
procédures prévues dans le contrat.
Article 48 : Conformément à la législation en vigueur, la société de projet est responsable
de la maintenance/entretien et de la conservation des constructions, ouvrages et des
installations
fixes réalisés dans le cadre du contrat de partenariat
Elle doit assurer sa responsabilité civile pendant toute la durée du contrat de partenariat contre
les dangers résultant des travaux qu’elle réalise et de l'exploitation des constructions,
ouvrages et installations susmentionnées en vertu d'un contrat d'assurance comportant une
clause lui interdisant de le résilier ou d'y apporter d’importantes modifications sans l'accord
préalable de la personne publique.
Section 2 : Contrôle de l’exécution des Contrats de Partenariat
Article 49 : Outre le contrôle exercé par l’État et les organismes habilités en vertu de la
législation en vigueur, la personne publique est tenue de contrôler l’exécution du contrat de
partenariat par les moyens suivants :
- Le contrôle de l’exécution des travaux nécessaires à l’exécution de l’objet du contrat
de partenariat par la société de projet
- Le suivi sur terrain des travaux pour vérifier leur état d’avancement
-
Le cas échéant, la désignation d’un expert indépendant afin de contrôler l’exécution du
contrat de partenariat
- L’examen périodique du respect de l’exécution de l’objet du contrat notamment après
réception par la personne publique du rapport annuel mentionné à l’article 52 de la
présente loi.
- La communication régulière et périodique des documents techniques, comptables et
financiers à la personne publique par la société de projet
- Le contrôle du respect des objectifs de performance et des conditions de recours à la
sous-traitance par la société de projet.
- La prise de mesures nécessaires à l’encontre de la société de projet dans le cas
d’entrave aux opérations de contrôle exercées par la personne publique ainsi que dans
le cas de manquement à l’obligation de communiquer les documents prévus par le
contrat dans les délais convenus.
- L’organisation de rencontres périodiques entre la personne publique et la société de
projet pour examiner l’état d’exécution des différents aspects du contrat de partenariat
et d’établir les difficultés rencontrées en vue de retrouver les solutions pour prévenir
les conflits potentiels.
- L’examen d’études techniques, des plans et des normes et leur approbation.
-
La réalisation d’expertises et de l’inspection finale pour l’approbation et l’acceptation
des ouvrages et des équipements réalisés dans le cadre du contrat de partenariat
105




Page 106
Le contrat doit prévoir les procédures de contrôle susmentionnées et peut prévoir d’autres
modalités de contrôle en fonction de son objet.
Article 50 : Le contrat prévoit le droit de la personne publique d’examiner préalablement et
le cas échéant, d’approuver les conventions conclues par le partenaire privé dans le cadre de
l'exécution du contrat de partenariat, notamment les conventions conclues entre la société de
projet et ses participants
Article 51 : La société de projet est tenue de présenter à la personne publique un rapport
annuel détaillé comportant notamment les comptes retraçant la totalité des opérations
afférentes à l'exécution du contrat de partenariat et une analyse de la qualité du service.
Section 3 : Fin des Contrats de Partenariat
Article 52 : La fin normale du partenariat intervient à son terme convenu dans le contrat.
Les deux parties du contrat doivent procéder, dans un délai d’au moins 12 mois avant cette
échéance, à la préparation et l’organisation de l’opération de livraison du projet à la personne
publique. Il peut être mis fin au rapport contractuel avant l’échéance convenue et ce, dans les
cas suivants :
1- La rupture du contrat de manière unilatérale par la personne publique
2-
La déchéance de la société de projet par la personne publique
3-
La résiliation du contrat à la demande de la société de projet
Article 53 : La propriété des infrastructures matérielles et immatérielles objets du projet de
partenariat revient à la personne publique conformément aux conditions indiquées dans le
contrat. Ces infrastructures comprennent les droits de propriété intellectuelle dont notamment
les brevets d’invention, les marques, les autorisations, les franchises et les droits d’auteur liés
à l’exploitation du projet.
Article 54 : Dans le cas où la personne publique envisage la rupture unilatérale du contrat
dans les cas autres que celles de manquement de la société de projet à ses obligation, la
personne publique est tenue d’en informer celle-ci conformément aux délais et procédures
prévues par le contrat.
La société de projet a droit à la réparation du préjudice qu’elle a subi en raison de la rupture
anticipée du contrat conformément aux conditions contractuelles convenues.
Dans ce cas, les créanciers dont les créances sont inscrites sur le registre mentionné à l’article
38 de la présente loi subrogent à la société de projet pour le recouvrement de leurs créances,
dans la limite de l’indemnité due.
La personne publique peut subroger le partenaire privé suite à la rupture du contrat, dans la
charge des emprunts conclus pour réaliser le projet objet du contrat de partenariat et, le cas
échéant, les contrats non détachables.
Article 55 : La société de projet peut être déchue de ses droits par la personne publique en
cas de manquements graves à ses obligations contractuelles et ce, après lui avoir accordé le
délai fixé par le contrat afin de remplir ses obligations.
Le contrat prévoit les cas de manquements graves entrainant la déchéance du droit et fixe les
conditions de poursuite de son exécution et assure la continuité du service public
Dans ce cas, les créanciers dont les créances sont inscrites sur le registre susmentionné en sont
informés par lettre recommandée avec accusé de réception et ce dans un délai fixé par le
106


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contrat précédant la date de prise de la décision de déchéance, et ce, pour leur permettre de
proposer la subrogation d’une autre personne à la société de projet déchue. Le transfert du
contrat de partenariat à la personne proposée est soumis à l’accord de la personne publique.
Article 56 : Le contrat peut être résilié à la demande de la société de projet en cas de
manquement de la personne publique à ses obligations contractuelles substantielles et ce,
après l’avoir mise en demeure et après lui avoir accordé un délai fixé par le contrat pour
remplir ses engagements.
Les créanciers dont les créances sont inscrites sur le registre susmentionné en sont informés,
Dans ce cas, la société de projet est indemnisée du préjudice qu’elle a subi du fait des
manquements de la personne publique l’ayant poussé à demander la résiliation du contrat.
CHAPITRE V : INSTANCE NATIONALE DE PARTENARIATS
PUBLIC PRIVE
Article 57 : Il est créé « une instance nationale de partenariats publics privés » placée sous
la tutelle de la présidence du gouvernement, jouissant de la personnalité morale et de
l’autonomie financière. Son budget est rattaché pour ordre au budget de la présidence du
gouvernement.
L’organisation administrative et financière de l’instance est fixée par décret.
Article 58 : L’instance est chargée, au niveau national, de la coordination dans le domaine
de partenariats publics privés et ce par :
- Le conseil au gouvernement sur les questions relatives aux différentes formes
contractuelles de partenariat public privé
- La coordination des propositions de partenariats publics privés au niveau national
-
L’appui technique des personnes publiques habilitées à conclure les contrats de
partenariat public privé
- L’émission d’avis favorable ou défavorable concernant la faisabilité de réalisation des
projets qui lui sont soumis dans l’une des modalités de contrat.
- L’émission d’avis concernant les documents qui lui sont soumis et qui sont relatifs aux
différentes étapes d’élaboration et de conclusion des contrats de partenariat public
privé conformément à la législation les régissant.
- L’assistance de la personne publique pour assurer la conformité des contrats de
partenariats qu’elle a conclus à la législation en vigueur.
- Le suivi de l’exécution des projets réalisés dans le cadre des contrats de partenariat.
-
La collecte, la conservation et l’établissement d’une base de données concernant les
documents relatifs aux contrats de partenariat
- La promotion des compétences nationales dans le domaine des partenariats publics
privés notamment à travers les cycles de formation.
- L’établissement de guides de procédures et de guides de bonnes pratiques dans le
domaine des contrats de partenariats et leur mise à la disposition des organismes
publics.
- La présentation de propositions en vue de promouvoir la législation relative aux
partenariats publics privés et l’émission d’avis sur les projets de texte y afférant
- L’établissement de périodiques et de publications sur ses activités ou en rapport avec
des questions afférents au partenariat public privé
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- La publication d’un rapport annuel sur ses activités, l’avancement de l’exécution des
projets de partenariat et les engagements des personnes publiques au titre de ces
projets.
CHAPITRE VI : DISPOSITIONS FINALES
Article 59 : sont abrogées toutes les dispositions contraires à la présente loi et notamment la
loi n 2007-13 relative à l’établissement de l’économie numérique. Toutefois, les dispositions
de la loi précitée demeurent applicables aux contrats de partenariat en cours ainsi qu’aux
projets de partenariat déclarés qui ont fait l’objet d’un appel à la concurrence avant sa
publication.
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ANNEXE 2 : L'OPTIMISATION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE
Concept et définition
Le concept d'optimisation de la dépense publique comporte à la fois des aspects qualitatifs et
quantitatifs. En outre, il implique un élément de jugement de la part du gouvernement. C'est pourquoi
il n'existe pas d'indicateur précis pour la mesurer. L’optimisation de la dépense publique peut être
définie en termes généraux comme ce qu'un gouvernement estime être la conjonction optimale de la
quantité, de la qualité, des caractéristiques et du prix (c'est-à-dire du coût) anticipée (et quelquefois,
mais pas toujours, calculée) pour la durée de vie totale d'un projet. (Burger et Hawkesworth, 2011).
La définition de l'optimisation de la dépense publique que l'on trouve habituellement dans les
études économiques retient trois éléments: l'économie, l'efficience et l'effectivité (Diamond, 2005:162).
L'économie consiste à minimiser le coût des intrants. L'efficience quant à elle minimise les intrants
utilisés pour obtenir un nombre donné de produits, ou maximise les produits obtenus avec un nombre
donné d'intrants. L'efficience est à la fois de nature technique et économique. On parle d'inefficience
technique ou d'inefficience X lorsque des ressources ne sont pas employées techniquement de manière
optimale; cela signifie en général que l'on peut réduire certains intrants et obtenir pourtant les mêmes
produits (Diamond, 2005:161). L'exemple typique est celui des programmes appliqués avec des
sureffectifs que l'on peut diminuer sans devoir réduire le niveau de la production. L'inefficience
économique résulte d'une conjonction non optimale d'intrants compte tenu de leurs prix relatifs. Il est
généralement possible d'obtenir le même niveau de production avec différentes combinaisons
d'intrants (on peut, par exemple, remplacer des enseignants par des outils informatiques d'aide à
l'enseignement et vice-versa). Toutefois, compte tenu des prix des intrants, une seule de ces
combinaisons réduit le coût global au minimum. Par conséquent, si l'on peut abaisser le coût de
prestation d'un service en modifiant la combinaison des intrants, la nouvelle combinaison représente
une amélioration de l'efficience économique. L'efficience économique est maximisée quand il n'est
plus possible de réduire davantage les coûts en changeant la composition des intrants. L'effectivité se
réfère à l'incidence d'une mesure, c'est-à-dire au fait que les produits obtenus (par exemple un certain
ratio enseignants/élèves) aboutissent ou non aux résultats recherchés (amélioration des résultats
éducatifs mesurée par des indicateurs tels que le taux de réussite). Selon Diamond (2005:163), il y a
deux formes d'ineffectivité, technique et économique. Même lorsque la prestation d'un service est
techniquement et économiquement efficiente, il se peut que le service lui-même ne réponde pas
techniquement aux besoins qu'il est censé satisfaire. On dit alors qu'il est alors techniquement
ineffectif. Il y a ineffectivité économique quand il est possible d'améliorer l'effectivité globale des
ressources publiques par redéploiement des ressources.
Les arguments exposés ci-dessus sont parfois résumés comme suit:



l'économie dans l'emploi des ressources consiste à maximiser les intrants par dollar, euro, livre
sterling, yen, etc.
l'efficience consiste à maximiser le rapport entre produits et intrants.
l'effectivité consiste à maximiser le rapport entre résultats et produits.
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Á partir de ces trois éléments, on définit l'optimisation de la dépense publique comme la
maximisation des résultats obtenus pour chaque dollar, euro, etc., dépensé en intrants. On ne peut y
parvenir que si les résultats sont maximisés par rapport aux produits (effectivité) et que si les produits
sont maximisés par rapport aux intrants (efficience), lesquels sont à leur tour maximisées pour chaque
dollar, euro, etc., dépensé (économie).
Le concept paraît simple quand il est exprimé sous forme de ratios à maximiser, mais
l'apparence est trompeuse. En définissant l'optimisation de la dépense publique par référence aux
résultats obtenus par dollar, euro, etc., dépensé en intrants, on se limite à l'efficience et à l'effectivité
de l'offre en laissant de côté l'efficience au regard de la demande; celle-ci est plus connue sous la
dénomination d'efficience «
allocative » ou optimum de Pareto. Cette forme d'efficience est peut-être
la plus difficile à mesurer, mais elle est essentielle pour savoir si un service représente ou non un bon
usage de l'argent public. Quand on s'intéresse à l'optimisation de la dépense publique, il faut se
demander pour qui il y a optimisation? La réponse n'est sans doute pas pour l'État, mais pour le
destinataire final du service ou le contribuable.
34 Comme sur les marchés de biens privés, l'efficience
allocative se réfère à l'affectation du pouvoir d'achat des consommateurs à divers biens et services
d'une manière qui maximise leur bien-être (utilité), c'est-à-dire au bien-être des destinataires d'un
service. Il y a amélioration de l'efficience
allocative s'il est possible d'améliorer le bien-être d'un agent
(le destinataire du service) sans porter atteinte au bien-être d'un autre agent. On y parvient en
redéployant les ressources dépensées en services de façon à offrir la quantité et la qualité de
différentes catégories de produits (présentant les caractéristiques désirées) qui maximisent le bien-être.
Quand aucun redéploiement ne peut améliorer le bien-être d'un agent sans nuire à celui d'un autre, on
dit que l'allocation des ressources est efficiente ou que l'optimum de Pareto est réalisé.
Il n'est malheureusement pas possible de mesurer directement le bien-être procuré aux
particuliers par la consommation de biens et de services. Ce n'est pas un problème sur un marché de
biens privés, parce qu'ils sont alors obligés de traduire leur attente de bien-être découlant de la
consommation d'un produit par une demande de ce produit (on dit qu'ils « révèlent leur demande »).
Or, comme beaucoup de produits offerts par l'État souffrent du problème du « resquillage », la
demande (et donc ce qui maximise le bien-être) n'est pas révélée. Par conséquent, il est possible qu'un
service soit offert de façon techniquement efficiente, et dans le respect des objectifs de produits et de
résultats, mais qu'il ne s'agisse pas de quelque chose que la société souhaite et à quoi elle était
désireuse d'affecter des ressources. Cela rend ce service inefficient sur le plan de l'allocation et signifie
que, même si tous les objectifs de production et de résultats ont été atteints (efficience et effectivité de
l'offre), il représente un usage nul ou sans grand intérêt de l'argent public (faute d'efficience sur le plan
de la demande). Cette situation est bien sûr aggravée par les contraintes budgétaires qui obligent les
gouvernements à fixer des priorités ainsi qu'à effectuer des arbitrages entre les avantages et les
améliorations du bien-être résultant de différents programmes de dépenses.
Le problème fondamental est que la composition des produits qui maximisent le bien-être ne
peut être appréhendée qu'approximativement à l'occasion des scrutins où les électeurs révèlent leurs
préférences -- et c'est une approximation parfois très imparfaite, comme l'ont démontré les études
économiques sur les choix publics. En outre, l'efficience
allocative dépend de la demande qui est elle-
même fonction de la richesse et du revenu (entre autres). Dès lors, si un gouvernement a aussi des
objectifs de redistribution, cela influe indirectement sur l'efficience
allocative de ses programmes et
rend encore plus difficile la décision sur ce qui constitue un usage optimal de la dépense publique.
Tous les développements ci-dessus montrent en définitive qu'un exercice quantitatif ne suffit
pas pour déterminer ce qui optimise la dépense publique. Compte tenu de toutes les difficultés
exposées ci-dessus, le gouvernement doit aussi en général porter un jugement qualitatif. Il lui faut
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appréhender la demande non révélée de divers services. Il doit donc se faire une idée des services qu'il
faut offrir et, pour chacun d'entre eux, de ce qui constitue la conjonction optimale de quantité, de
qualité et de caractéristiques. Il lui incombe ensuite de procurer ces services avec économie ainsi
qu'avec efficience et effectivité techniques et économiques.
Outils pour évaluer l’optimisation de la dépense publiques
Une analyse coûts-avantages porte à la fois sur les coûts sociaux et les avantages d’un projet. Par
conséquent, la présente analyse ne porte pas de manière étroite sur la question des coûts et avantages
pour le gouvernement, mais plutôt les coûts et avantages pour la société. Une analyse coûts-avantages
peut également être faite pour un PPP, mais dans de nombreux pays de l’OCDE, le gouvernement ne
procède à cette analyse que pour les MPT. Les analyses coûts-avantages comprennent généralement
aussi une évaluation des options alternatives du projet (par exemple quand une route est prévue,
l'évaluation peut également envisager d'autres solutions possibles, comme une ligne de chemin de fer).
Ainsi, les analyses coûts-bénéfices sont utilisées pour établir à la fois l’optimisation absolue et relative
de la dépense publique. L’optimisation absolue de la dépense publique porte sur la question de savoir
si les avantages du projet en dépassent les coûts, alors que l’optimisation relative de la dépense
publique concerne la question de savoir si le choix fait (par exemple, une route) supporte
favorablement la comparaison en termes d’optimisation de la dépense publique par rapport aux autres
choix possibles (par exemple, une ligne de chemin de fer). Ainsi, dans le cas d'une analyse coût-
bénéfice, la question d’optimisation relative de la dépense publique se réfère à une comparaison des
différents extrants (la route et le chemin de fer) qui pourraient fournir les mêmes résultats. Toutefois,
l'analyse coûts-avantages se concentre surtout sur l’optimisation relative de la dépense publique.
L’analyse coûts-avantages ne comprend pas typiquement une évaluation de l’optimisation absolue
de la dépense publique, qui implique une comparaison des différents modes permettant d’obtenir les
mêmes résultats. Généralement, elle ne compare pas la prestation à travers un PPP et un MPT. Pour
examiner s’il convient ou non d'utiliser un PPP au lieu d’un MPT, les gouvernements peuvent utiliser
un comparateur du secteur public (CSP). Le CSP compare les offres faites par les soumissionnaires
privés sur un projet de référence hypothétique entrepris de manière traditionnelle par le secteur public.
Le but est d'établir si oui ou non la livraison par le biais d'un PPP supporte favorablement la
comparaison à un MPT. Il convient de noter qu’un CSP ne porte pas sur les coûts et bénéfices
généraux pour la société. Il a une vision plus étroite et porte seulement sur les coûts directs et les
revenus attendus au titre du projet. Comprendre les coûts et avantages sociétaux plus larges ne devrait
pas être nécessaire si une analyse coûts-avantages a déjà indiqué que le projet représente à la fois une
optimisation absolue et relative de la dépense publique (par rapport aux options alternatives de sortie).
Cependant, dans de nombreux pays, les projets candidats au PPP ne passent pas par une analyse coûts-
avantages avant d'être sélectionnés comme projets potentiels de PPP. Les détracteurs de ces deux
techniques feront aussi valoir que le niveau d'incertitude ne permet pas de réaliser des projections de
coûts et de revenus sur 20 à 30 ans précises rendant ce types d'évaluations fragiles et les décisions qui
en découlent arbitraires.
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Société d’avocats Frilet, 11 juin 2011. http://cmimarseille.org/_src/TL_wk3/TL_wk3_Atelier_3-3.pdf
34 Le fait que l'optimisation ne soit évoquée que sous l'angle de l'efficience et de l'effectivité de l'offre pourrait
aussi expliquer que certains critiques des PPP ciblent ce concept. En ignorant l'efficience du point de vue de
la demande, on risque de donner l'impression que la réponse à la question « optimisation pour qui? » est l'État.
L'inclusion de l'efficience au regard de la demande nous rappelle à qui l'action publique est en fait destinée,
c'est-à-dire au contribuable/électeur/citoyen.
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Les partenariats public-privé en
Tunisie: Analyse des cadres juridique
et institutionnel
www.oecd.org/fr/investissement
www.oecd.org/fr/gov/budgetisation
Les partenariats public-privé en
Tunisie: Analyse des cadres juridique
et institutionnel
www.oecd.org/fr/investissement
www.oecd.org/fr/gov/budgetisation




























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