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Université de Carthage
Institut des Hautes Etudes Commerciales. Carthage
Matière : L’Introduction à l’Etude du droit
1ère année LSG
Enseignante : ESSID Amel
Année universitaire : 2021/2022
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Introduction à l’étude du Droit
Plan de la matière :
Première partie : Le droit objectif
Chapitre premier : La notion de droit
Section première : Les caractères de la règle de droit
Section deuxième : La distinction de la règle de droit d’autres règles
de conduite
Chapitre deuxième : Les structures du droit tunisien
Section première : La distinction entre le droit privé et le droit public
Section deuxième : Les Branches du droit
Chapitre troisième : Les sources de la règle de droit
Chapitre quatrième : Application de la loi dans le temps
Chapitre cinquième : Les sources d’interprétation
Deuxième partie : Les droits subjectifs
Chapitre premier : Classification des droits subjectifs
Section première : Droits patrimoniaux et droits extrapatrimoniaux
Section deuxième : Classification des biens
- Plus de références et documents sur Legaly DocsChapitre deuxième : La preuve des droits subjectifs
Section première : La charge de la preuve
Section deuxième : L’objet de la preuve
Section troisième : L’admissibilité de la preuve
Section quatrième : Les procédés de preuve
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Introduction générale
L’Homme est par nature un être social. Il ne peut pas vivre seul
et cherche tout naturellement la compagnie des autres pour survivre et
assurer ainsi la pérennité du genre humain.
La vie sociale suppose que les hommes se soumettent à une
certaine discipline. Elle implique l’existence de rapports entre les
individus qui mettent en évidence des volontés contradictoires et des
intérêts antagonistes. Pour résoudre ces contradictions, les membres
de la société doivent obéir à certaines règles de conduite.
Les règles de conduite seraient insuffisantes à produire leur effet
social si leur respect était laissé à l’appréciation de chacun.
Il est donc nécessaire que ces règles soient assorties de mesures
de contrainte et que celui qui enfreint ces règles sache qu’il s’expose à
des sanctions.
Le mot droit recouvre deux sens qui sont à la fois différents et
complémentaires.
*Dans un premier sens, le droit désigne les règles de conduite
applicables aux Hommes vivant en société, assorties du caractère
obligatoire.
C’est le droit objectif envisagé par rapport à son objet qui
est l’organisation de la vie sociale et dont le respect est assuré au
besoin par la contrainte.
*Dans un second sens, le droit désigne les prérogatives
reconnues à une personne et exercées sous la protection de l’Etat.
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C’est le droit subjectif envisagé par rapport aux sujets de
droit qui vont les exercer.
Ainsi par exemple, l’article 99 du code des obligations et des
contrats édicte une règle générale d’interdiction des
troubles
extraordinaires du voisinage, règle obligatoire d’organisation de la
société qui a vocation à s’appliquer à tous. C’est une règle de droit
objectif qui permet à un voisin troublé de réclamer la cessation du
trouble qui lui est causé.
Le voisin troublé exerce un droit subjectif. C’est une prérogative
individuelle.
Les rapports entre droit objectif et droit subjectif sont certains.
En effet, les droits subjectifs trouvent leurs sources dans le droit
objectif qui les reconnait et les réglemente.
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Première partie : Le droit objectif
Chapitre premier : La notion de droit
Section première : les caractères de la règle de droit
La règle de droit se reconnait par la réunion de trois caractères
principaux. Il s’agit d’une règle qui est générale, permanente et
obligatoire.
A/La règle de droit, règle générale
Le caractère général de la règle de droit signifie que celle-ci ne
s’adresse pas à une personne en particulier, mais à tout le groupe
social. Ainsi par exemple, lorsque l’article 82 du C.O.C permet à la
victime d’un dommage d’en exiger la réparation devant le juge, le
législateur ne réserve pas l’application de ce texte à certaines
personnes qui ont souffert d’un dommage.
Toutefois, ce caractère général de la règle de droit n’est pas
absolu. En effet, il existe des règles de droit qui s’adressent parfois à
certaines catégories déterminées de sujets de droit. Tel est par exemple
le cas du code du travail qui s’adresse aux employeurs et aux
employés du secteur privé mais ne s’applique pas aux fonctionnaires
publics (soumis aux textes spéciaux).
De même le cas du code de commerce qui édicte des règles
relatives aux commerçants et à l’exercice de l’activité commerciale.
Cependant, il ne s’agit pas là d’exceptions réelles au caractère
général de la règle de droit puisque l’application de ces règles est
ouverte à tous les sujets de droit qui en remplissent les conditions
d’application.
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Toute personne appartenant à ce groupement a vocation à être
régie par cette règle si elle remplit les conditions et qu’elle se trouve
visée.
Ainsi, le code de commerce régirait tous les commerçants et non
certains commerçants.
B/La règle de droit, règle permanente
Le caractère permanent de la règle de droit signifie que celle-ci
est faite pour durer, qu’elle s’applique du jour de sa naissance
jusqu’au jour de sa disparition. Mais, elle n’est pas éternelle. Elle
s’applique tant qu’elle n’a pas été abrogée, c’est-à-dire tant qu’elle est
toujours en vigueur.
On peut rencontrer des
lois à caractère
temporaire qui
comportent des dispositions applicables pour une période déterminée.
Exemple, la loi constitutionnelle du 16 décembre 2011 relative à
l’organisation provisoire des pouvoirs publics qui prévoit dans son
article premier : « Les pouvoirs publics de la république tunisienne
sont provisoirement organisés conformément à la présente loi et
jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle constitution ».
C/La règle de droit, règle obligatoire
Le caractère obligatoire est le caractère le plus important qui
permet de connaitre la règle de droit. Il signifie que celle-ci s’impose
au besoin par la contrainte. En effet, une règle de droit que les sujets
ne sont pas tenus de respecter, risque de demeurer lettre morte.
Il est vrai qu’en général, la règle de droit est spontanément
respecté (un locataire qui paye ses loyers). Mais, dans la société, il
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existe des individus qui ne respectent pas volontairement la règle de
droit et la contrainte devient alors le moyen nécessaire de l’amener à
s’y conformer.
-La sanction facilite l’application de la règle de droit.
-Les sanctions varient selon l’intérêt protégé par la règle
(châtiment corporel- emprisonnement-nullité…).
-La sanction constitue un monopole qui appartient à l’autorité
étatique.
Section deuxième : Distinction de la règle de droit d’autres
règles de conduite.
Le caractère général et le caractère permanent nécessaires à la
définition même de la règle de droit ne suffisent pas à distinguer le
droit des autres règles de conduite. C’est le caractère obligatoire et
contraignant qui permet la distinction.
A/Règle de droit et règle morale
1-Domaine des deux règles
La règle morale et la règle juridique n’ont pas le même domaine.
En effet, la règle morale envisage tous les devoirs que la conscience
commande. Il n’en est pas de même de la règle juridique dont le but
est de résoudre les conflits d’intérêt et l’organisation sociale.
*La règle de droit peut être conforme à la règle morale. C’est le
cas de la règle juridique qui interdit de porter atteinte à la vie d’une
personne ou à son intégrité corporelle.
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Mais, la règle morale demeure plus étendue que la règle
juridique, car le principe dans les rapports humains est la liberté, et
l’Etat ne prétend pas régir toute l’activité humaine.
*La règle de droit peut être en conflit avec la règle morale. On
peut donner l’exemple de la prescription extinctive. Lorsque passé un
certain délai, une personne ne peut plus agir efficacement pour
recouvrer ses droits. Le débiteur peut refuser de payer son créancier
parce que sa demande en paiement serait tardive.
Cette règle est moralement condamnable parcequ’on ne peut pas
perdre son action par l’effet du temps. Mais, juridiquement, on admet
que le manque de diligence peut faire perdre des droits.
2-sanctions des deux règles :
La morale comporte seulement une sanction interne. Mais cette
sanction peut s’avérer insuffisante et inefficace. Chacun est en même
temps juge et partie pour l’appréciation de la moralité de son
comportement. Et le repentir n’a pas la même signification pour tous.
C’est là qu’apparait l’importance du droit ayant pour objet
d’assurer l’organisation de la vie en société. Le droit ne se contente
pas des sanctions de la conscience, mais applique des sanctions
effectives et matérielles.
Mais, dès fois la règle de droit s’inspire de la morale et la
consacre (notion de bonne foi).
B/La règle de droit et la règle religieuse
Dans la religion, on se trouve en présence d’un ensemble
d’interdictions que dieu exige des Hommes. Ces règles intéressent les
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rapports entre dieu et les hommes, le comportement des hommes vis-
à-vis d’eux même, et les rapports entre les hommes. Ainsi, la religion
a un domaine plus vaste que celui du droit ou de la morale.
Elle se distingue du droit qui ne s’occupe que des relations des
êtres humains entre eux. Et le caractère contraignant lui fait défaut.
*Dans la règle juridique, la contrainte émane de l’Etat.
*Dans la morale, la contrainte émane de la personne elle-même.
*dans la religion, elle intervient dans l’au-delà.
Dans le droit tunisien, le lien entre le droit et la religion est
présent. Le législateur et le juge ne manquent pas souvent de fonder
leurs règles ou leurs décisions sur les principes du droit musulman
(héritage).
C/Règle de droit et règle d’usage
Dans chaque société humaine, on trouve un certain nombre de
règles d’usages que les Hommes suivent et respectent spontanément.
Ces règles d’usage sont diverses et touchent divers aspects de la vie
humaine.
Elles sont héritées de génération en génération et continuent à
être respectées et tirent leurs force de cette adhésion spontanée de la
part des membres de la société. Dès fois, le législateur adopte
certaines de ces règles (interdiction de fumer dans les lieux publics).
Constatation :
La règle juridique se caractérise seule par la sanction qui assure
son respect. Les autres règles, quoique générales et permanentes ne
sont pas pourvues d’une sanction effective. Elles ne sont sanctionnées
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ni par l’action en justice, ni par l’intervention de la puissance
publique.
Chapitre Deuxième : Les structures du droit tunisien
Section première : la distinction entre le droit public et le
droit privé
Le droit tunisien peut être divisé en droit public et droit privé.
Cette distinction est consacrée sur le plan doctrinal et sur un plan
purement pratique. Elle commande dans une certaine mesure la
division des juridictions.
-juridictions de l’ordre judiciaire
-juridictions de l’ordre administratif.
Cette distinction n’est pas nouvelle. Elle remonte même assez
loin dans l’histoire (les romains ont connu cette distinction).
*Le droit public est
le droit dont
les règles régissent
l’organisation de
l’Etat, des collectivités publiques et des
établissements publics.
*Le droit privé c’est le droit qui régit les rapports entre les
particuliers, individus ou groupes.
A partir de ces deux définitions, apparaissent les différences.
1- Différence au niveau du but : Le droit public vise à satisfaire
les intérêts collectifs de la société, alors que le deuxième permet de
satisfaire les intérêts particuliers des sujets de droit.
2- Différence au niveau du caractère : le droit public est
essentiellement impératif, alors que le droit privé laisse une marge
importante à l’autonomie de la volonté des particuliers.
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3- Différence au niveau de la sanction : Le droit privé oblige les
particuliers à s’adresser à la justice pour obtenir une décision qu’il
veillera à exécuter. Le droit public dispose de ses propres moyens de
contrainte permettant d’aboutir au respect de la règle. C’est la
présomption de
la
légalité ou encore
le privilège préalable.
L’administration exécute directement ses actes.
Section deuxième : Les branches du droit
A/Les branches du droit public
1- Le droit constitutionnel
Il s’intéresse à l’organisation de l’Etat, à son régime politique et
à sa structure gouvernementale. Le texte de base en vigueur est la
constitution du 27 janvier 2014.
2- Le droit administratif
Il régit l’organisation et le fonctionnement de l’administration,
ainsi que les rapports entre l’administration et les administrés et les
conflits qui peuvent les opposer. Ces conflits sont de la compétence du
tribunal administratif.
3- Le droit international public
Il régit les rapports entre les Etats, entre les Etats et les
organisations internationales.
B/Les branches du droit privé
1-Le droit civil
Il régit les rapports des particuliers entre eux et s’intéresse aux
droits subjectifs.
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2- Le droit commercial
Il régit l’exercice du commerce. Il contient des règles qui
définissent les commerçants (personnes physiques ou morales), les
actes de commerce, le fonds de commerce.
3- le droit du travail
Il régit les relations entre employeurs et employés liées par un
contrat de travail.
4- Le droit judiciaire privé
Il comporte deux disciplines :
-Les procédures civiles
-Les voies d’exécution (obtenir l’exécution d’une décision en
justice).
5- Le droit international privé
S’intéresse aux litiges dans lesquelles il y a un élément
d’extranéité (nationalité, lieu..).
6- le droit pénal
Il régit les infractions pénales (crimes, délits, contraventions), et
les sanctions qui leur sont applicables à raison du trouble causé à
l’ordre social. Le texte de base est le code pénal. Il protège les
individus dans leur vie, leur honneur, leurs biens.
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Chapitre troisième : les sources de la règle de droit
La notion de sources a deux sens :
-Parfois elle vise les données historiques, économiques, sociales
et politiques qui ont permis la naissance de la règle de droit. Ce sont
les sources matérielles.
-Dans un second sens, elle désigne l’autorité compétente pour
créer la règle de droit ainsi que la forme sous laquelle nait cette règle.
Ce sont les sources formelles.
Section première : Inventaire ou hiérarchie de la règle de
droit
L’idée essentielle à la base de la hiérarchie de la règle de droit
est celle qu’a déjà établie H.Kelsen dans sa « théorie pure du droit »
ou il estime que chaque règle tire sa force de son respect à la norme
qui lui est supérieure jusqu’à ce qu’on aboutisse à la norme suprême
qui est la constitution. Au-dessous de cette norme se situent toutes les
autres règles juridiques.
A/La constitution
Elle occupe le rang le plus élevé dans la hiérarchie des normes
juridiques et émane d’un pouvoir de nature supérieure qui est
l’assemblée constituante ou l’assemblée législative intervenant en tant
que pouvoir constituant.
La constitution tunisienne du 27 janvier 2014 est la norme
suprême qui est entrée en vigueur le 10 février 2014. Par conséquent,
aucune disposition ne doit la contredire. Tout texte doit lui être
conforme si non il serait inconstitutionnel et perd sa légalité. (Selon
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l’article 120 de la constitution, la cour constitutionnelle a une
compétence exclusive en matière de contrôle de la constitutionalité
des lois).
La constitution détermine l’organisation politique du pays,
définit les différents pouvoirs et contient des dispositions qui
intéressent les droits de l’homme et les libertés publiques.
B/ les traités internationaux
Ce sont les conventions entre Etats et peuvent être bilatérales ou
multilatérales. Ces traités touchent des domaines très variés comme
celui des droits de l’Homme, du commerce, des investissements.
L’entrée en vigueur des traités internationaux est soumise à leur
approbation par le pouvoir législatif et qui se fait par une loi organique
(Article 67 de la constitution), et à leur ratification par le président de
la république. Ils ont une force supérieure à celle des lois.
C/ Les lois
Il existe trois variétés de lois:
1- Des lois référendaires
Ce sont les lois soumises pour leur adoption à un referendum,
c’est à dire un vote direct par lequel les citoyens se prononcent sur un
projet ou une proposition de loi. Le referendum est le procédé par
lequel le peuple collabore à l’élaboration de la loi qui ne devient
parfaite qu’avec son consentement.
Le recours au referendum est facultatif, puisque la constitution
du 26 janvier 2014 a prévu la possibilité du recours aux lois
référendaires sans qu’il n’y ait de cas obligatoires.
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2- Des lois organiques
Les
lois organiques constituent un
type de
lois qui se
caractérisent par leur domaine particulier (loi électorale, loi du
budget…). Elles sont votées à la majorité absolue du parlement.
3- Des lois ordinaires
Elles interviennent dans les domaines qui n’ont pas été réservés
à la loi organique. L’article 65 de la constitution détermine le domaine
des lois ordinaires.
L’initiative des lois appartient au président de la république et au
chef du gouvernement qui peuvent présenter des projets de lois.
L’initiative peut aussi être exercée par dix députés. Et c’est le
président de l’assemblée des représentants du peuple qui reçoit les
projets et les propositions de lois dont il veille à l’inscription sur un
registre spécial et qu’il transmet pour examen aux commissions
spécialisées.
Après discussion,
l’assemblée examine
le projet ou
la
proposition et décide par vote. Il sera adopté lorsqu’il recueille la
majorité des présents sans que cette majorité ne puisse être inférieure
au tiers des membres de l’assemblée.
D/ Les décrets lois
Ont une nature mixte car ils traitent une question du domaine de
la loi sans qu’elle soit prise par le pouvoir législatif, mais par le
pouvoir exécutif, et ce en deux hypothèses :
-
Suite à une délégation législative
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-
Suite à une dissolution de l’assemblée des représentants du
peuple.
Leur force exécutoire est provisoire car ils doivent être
approuvés par l’assemblée des représentants du peuple qui détient le
pouvoir législatif.
E/ Les Règlements
Le pouvoir exécutif peut prendre des règlements divers. Les plus
importants sont les décrets, les arrêtés et les circulaires.
1- Les décrets :
Pris par le président de la république (Décret présidentiel), ou
par le chef du gouvernement (décret gouvernemental).
Les décrets sont de deux types :
-Des décrets à caractère individuel. Ne constituent pas de
véritables règles juridiques, mais plutôt des actes administratifs
comme la nomination dans les postes supérieurs.
-Des décrets à caractère réglementaire. Sont de véritables règles
juridiques ayant le caractère général, permanent et obligatoire. Ils
relèvent de la compétence du chef de gouvernement.
Les décrets réglementaires sont :
a-
Soit des décrets autonomes, qui ont un domaine large qui
couvre toutes les matières qui ne relèvent pas du domaine de la loi et
ne sont pas citées dans l’article 65 de la constitution.
Il n’y a pas une hiérarchie, mais une sorte d’égalité entre la loi
ordinaire et le décret autonome.
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b- Soit des décrets d’application, qui ont pour rôle de
permettre l’application de la loi.
Exemple, l’article 13 du code des sociétés commerciales (le
chiffre d’affaire exigé pour désigner un commissaire aux comptes est
fixé par un décret d’application).
2- Les arrêtés :
Les arrêtés en tant que règle juridique peuvent être pris par
diverses autorités administratives
;
les ministres,
les conseils
municipaux et les conseils régionaux. Ils ont un caractère général et
impersonnel lorsqu’ils sont pris en vue de l’exécution de la loi, mais,
peuvent avoir un caractère individuel quand ils visent une personne
particulière.
3- Les circulaires :
Il s’agit de notes et de directives données par un ministre ou une
autre autorité compétente à ses services relativement à l’organisation
ou au fonctionnement de ces services et à la manière d’appliquer la
loi.
Ce sont donc des documents internes comme les circulaires
émanant de la direction générale des impôts, de la douane, de la
banque centrale de Tunisie.
Peuvent être considérées comme des
règles
juridiques
lorsqu’elles en remplissent
le caractère général, permanent et
obligatoire, et lorsqu’elles ont été publiées comme les autres règles
juridiques.
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Section deuxième : La force obligatoire de la règle de droit
La force obligatoire constitue un caractère essentiel de la règle
de droit. Cette force n’est pas éternelle puisque la loi a une naissance
de même qu’elle a une fin et peut être abrogée.
Entre cette naissance et cette fin, la loi est en vigueur. La vigueur
de la loi permet l’application de la règle selon laquelle « nul n’est
censé ignorer la loi ».
A/La vigueur de la loi
1- La promulgation : -Un acte pris par le président de la
république, grâce auquel il constate l’existence et la régularité de la loi
et en ordonne la publication et l’exécution comme loi de l’Etat
tunisien.
-Elle doit intervenir dans un délai maximum de 4 jours à compter
de l’expiration des délais de recours pour inconstitutionnalité.
La promulgation ne suffit pas pour l’entrée en vigueur de la loi.
Encore faut-il porter à la connaissance des sujets de droit pour la
publication.
2- La publication : Se fait par l’insertion du texte de la règle de
droit dans le « journal officiel de la République tunisienne » et donner
un temps minimum aux sujets de droit pour prendre connaissance du
contenu de la règle juridique nouvelle. Ce délai est de 5jours après le
dépôt du journal officiel dans lequel la règle de droit est insérée, au
siège du gouvernorat de Tunis. Le jour du dépôt n’est pas pris en
considération. Il s’agit donc de 5 jours francs.
Il y a deux exceptions à ce délai :
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*Le cas de l’entrée en vigueur accélérée. En effet, en cas
d’urgence, la loi peut comporter une disposition expresse d’exécution
immédiate. Dans ce cas, la loi entre en vigueur même sans sa
publication (les médias constituent un moyen d’information).
*Le cas de l’entrée en vigueur retardée et ce dans le but de
laisser le temps aux personnes à qui elle s’adresse pour prendre
connaissance et accepter son contenu. Exemple, le code de statut
personnel promulgué le 13 Aout 1956 est entré en vigueur le 1
er
janvier 1957.
B/La présomption de la connaissance de la loi
A l’expiration des délais de publication, la loi doit être appliquée
car « nul n’est censé ignorer la loi » (article 545 du C.O.C).
L’ignorance n’est plus une excuse pour commettre un fait
illicite, car il y a une présomption de connaissance de loi qui signifie
que la règle s’applique même aux illettrés. Elle repose sur une
nécessité pratique. Chacun peut se prévaloir de son ignorance à la loi
pour échapper aux sanctions, ce qui viderait la loi de son contenu
essentiel et son caractère obligatoire. Celui qui ignore la loi, reste tenu
par ses effets.
Cependant, cette règle comporte une nuance importante tenant à
la distinction entre les lois impératives et les lois supplétives.
1- la loi impérative est une loi qui s’applique en toute
circonstance dans la mesure où on ne peut pas écarter l’application par
l’expression d’une volonté contraire. Il s’agit d’une règle rigoureuse.
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Exemple, l’article 30 du C.S.P : « Le divorce ne peut avoir lieu
que devant le tribunal ». De même, l’article 18 du C.S.P qui interdit la
polygamie.
Les
lois
impératives
interviennent généralement dans un
domaine où c’est l’intérêt général qui est en jeu. Ce sont des lois
d’ordre public.
2- la loi supplétive , la force obligatoire est moins rigoureuse et
moins stricte. Les sujets de droit peuvent par une manifestation de
volonté écarter les règles des lois supplétives en prévoyant des règles
différentes.
Exemple, l’article 676 du C.O.C exige que le prix de vente soit
payé au comptant. C’est une règle supplétive, et les parties peuvent
contracter une vente à crédit et cela ne constitue pas une atteinte au
caractère obligatoire de la règle.
C/L’abrogation de la règle de droit
L’abrogation est le retrait de la force obligatoire à une règle de
droit, qui marque ainsi son abolition et la fin de son règne. Elle émane
de l’autorité qui a la qualité pour créer la règle de droit ; la loi est
abrogée par la loi, le décret est abrogé par un décret (le parallélisme
des formes). Selon l’article 542 du C.O.C, l’abrogation peut être :
-Expresse, résulte d’un nouveau texte qui déclare expressément
qu’il vient d’abroger un texte ancien.
-tacite, *C’est le cas d’une incompatibilité entre les dispositions
de la loi ancienne et la loi nouvelle (c’est la loi nouvelle qui et
applicable).
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*Ou lorsque la loi nouvelle a réglé toute la matière de la
loi ancienne.
Chapitre quatrième : Application de la loi dans le temps
La loi n’est pas éternelle. Elle est censée être abrogée un jour par
une loi nouvelle. Un conflit peut opposer deux lois qui se sont
succédées dans le temps. C’est-ce qu’on appelle le conflit de lois dans
le temps.
En effet, le besoin de sécurité exige l’application de l’ancienne
loi. En revanche, l’impératif de l’intérêt général peut élargir le champ
d’application de la nouvelle loi, puisqu’elle est présumée réaliser une
amélioration et un progrès.
Mais la loi dispose pour l’avenir et n’a pas un effet rétroactif.
C’est la règle de la non rétroactivité
Section première : Le sens de la règle de la non rétroactivité
de la loi
1- La loi ne dispose pas pour l’avenir. Lorsqu’une loi est entrée en
vigueur, elle doit régir les situations juridiques nées postérieurement à sa mise
en vigueur.
2- La loi nouvelle n’a pas d’effet rétroactif. Elle ne peut pas s’appliquer
aux situations juridiques dont les effets se sont achevés sous le régime de la loi
ancienne. Exemple, celui qui a procédé à la répudiation avant la loi du 13 aout
1956, ne sera pas obligé de procéder de nouveau à un divorce judiciaire car il
s’agit pour lui d’une situation définitivement achevée.
Mais, ainsi présentée, la règle de la non rétroactivité de la loi est
insuffisante pour résoudre tous les conflits. En effet, il existe des situations
juridiques qui nées sous le régime d’une loi ancienne continuent à produire leurs
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effets sous le régime de la loi nouvelle. La doctrine a répondu à cette
problématique :
*La doctrine classique distingue entre :
- Les droits acquis, définitivement entrés dans un patrimoine. La situation
juridique est définitivement crée, le droit acquis doit être sauvegardé même à
l’encontre d’une loi nouvelle.
- La simple expectative, qui ne constitue qu’une espérance d’avoir un
droit au futur. Alors, elle cède devant la loi nouvelle.
Cette doctrine classique a été sévèrement critiquée par les auteurs
modernes.
*La doctrine moderne (Spécialement Paul Roubier) distingue entre :
-La situation non contractuelle en cours, la nouvelle loi s’applique
immédiatement aux effets futurs de cette situation.
-La situation contractuelle en cours, reste soumise à la loi en vigueur au
jour de sa naissance par respect à l’autonomie de la volonté et la liberté
contractuelle.
La loi nouvelle est écartée, car elle risque de perturber l’ordre juridique
établi par les parties. Toutefois, la survie de la loi ancienne reçoit exception
lorsque la loi nouvelle est d’ordre public. Il s’agit d’un intérêt général qu’il faut
protéger.
Section deuxième : Les exceptions à la règle de la non
rétroactivité de la loi
1-1ère exception, concerne la matière pénale. Il s’agit de la loi la plus
douce. En effet, quand une loi d’incrimination ou de détermination d’une peine
est plus douce à l’inculpé, c’est celle-ci qui s’applique, même si le fait incriminé
a été commis avant son entrée en vigueur. L’article 28 de la constitution de
janvier 2014 prévoit que : « La peine est personnelle et ne peut être prononcée
qu’en vertu d’un texte de loi antérieur, sauf en cas de texte plus favorable au
prévenu ».
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2-2éme exception, concerne les lois civiles qui sont expressément
déclarées par le législateur comme étant rétroactives. En effet, le législateur
peut déclarer qu’une loi va rétroagir. Exemple, la loi d’avril 1992 concernant la
suppression de l’autorisation du gouverneur en matière de vente immobilière
entre tunisiens. En vertu de cette loi rétroactive, on considère comme valable la
vente conclue sans autorisation du gouverneur.
3-3ème exception, concerne les lois interprétatives qui interviennent pour
relever une ambiguïté d’une loi précédente. La loi interprétative n’est pas en
conflit avec la loi interprétée. Elle ne fait qu’expliquer une loi obscure
précédente. Elle s’applique et prend effet à la date d’entrée en vigueur de la loi
interprétée.
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Chapitre cinquième : Les sources d’interprétation
Section 1 : L’organisation judiciaire
A. Les règles générales relatives à l’organisation judiciaire
Les juridictions de l'ordre judiciaire accomplissent une double mission,
civile et pénale. La mission civile consiste à juger les différends qui opposent
les particuliers (Annulation de contrat, réparation de dommage, prononcé de
divorce, dissolution judiciaire de société, revendication de droit de propriété).
La mission pénale consiste quant à elle à frapper les auteurs d'infractions de
peines pénales (peine capitale, emprisonnement, amende ... ) .
1. Le personnel judiciaire
Les juges sont répartis en deux catégories :
Les
du siège sont s juges qui ont reçu
mission de
connaître des litiges, de statuer sur les demandes de justice dont ils sont
saisis. Ce sont donc les juges de «jugement », Pour cette raison, ils doivent
accomplir leur mission en toute· liberté, tant à l'égard du pouvoir
politique qu'à l'égard des parties.
Les magistrats du parquet sont des juges qui ont reçu pour mission de
défendre la société et l'ordre public auprès des différentes juridictions. Ils
interviennent en matière civile, notamment lorsque l'ordre public est mis en
jeu et se trouve directement intéressé ( p a r e x e m p l e lorsqu'un mineur
ou un majeur incapable est en cause dans un procès civil).
2. La règle du double degré de juridiction
La règle du double degré de juridiction se manifeste par la possibilité
qui appartient à tout plaideur, insatisfait d'une décision de justice rendue à
son encontre, d'interjeter appel de cette décision devant une juridiction
hiérarchiquement supérieure, la juridiction d'appel.
Ainsi définie, la règle du double degré de juridiction constitue une
garantie de bonne justice à un triple point de vue.
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-Les décisions rendues par les juridictions sont une œuvre humaine, et
peuvent en conséquence être entachées d'erreur. Il est donc nécessaire
qu'un jugement puisse être examiné une seconde fois par des juges différents
et qui soient hiérarchiquement supérieurs.
-Les premiers juges, étant exposés au contrôle des juges du second
degré apporteront plus d'attention et de soin au jugement des causes qui
leurs sont soumises.
- Les juges d'appel bénéficient de tout le travail de leurs collègues du
premier degré et peuvent par conséquent mieux juger l'affaire.
La règle du double degré de juridiction prend l'allure d'un principe
fondamental qui vient d'être renforcé par les lois du 1er septembre 1986 et du
23 mai 1994 modifiant le Code de procédure civile et commerciale.
L'appel s'effectue devant la Cour d'appel lorsque la décision
attaquée émane du Tribunal de première instance, et devant le tribunal de
première instance si la décision attaquée émane du juge cantonal. Cela
signifie que
l'appel doit
toujours être porté devant une
juridiction
hiérarchiquement supérieure.
3. Juridiction de droit commun et juridiction d’exception
-Une juridiction de droit commun est dotée d'une
compétence générale en ce sens qu'elle peut examiner toute affaire,
quelle que soit sa nature ou sa valeur, à moins qu'un texte particulier ne
lui retire compétence, sur une question particulière, pour l’'attribuer à une
juridiction d'exception.
- La juridiction d'exception est donc celle qui n'a pas une
compétence générale, mais une compétence particulière pour des
affaires de nature déterminée (tribunal
immobilier,
le
conseil
de
prud’hommes).
25







Page 26
4. Compétence d'attribution et compétence territoriale
Les règles de compétence d'attribution sont celles qui permettent la
répartition des demandes en justice, suivant leur nature ou leur montant,
entre les différentes catégories de juridictions. Ainsi, telle demande sera de la
compétence du tribunal de première instance, alors qu'une autre relèvera du
juge cantonal, du Conseil de prud'hommes. Les règles de compétence
d'attribution sont d'ordre public.
Les règles de compétence territoriale sont celles qui permettent la
détermination de la juridiction géographiquement compétente
pour
examiner le litige. Généralement, celle-ci est la juridiction du lieu du
domicile du défendeur. Les règles de compétence territoriale sont d'intérêt
privé.
B. Les différentes juridictions de l'ordre judiciaire
L'étude des différentes juridictions de l'ordre judiciaire passe par
une distinction fondamentale entre les juridictions du fond et la Cour de
cassation.
-Les juridictions du fond sont les juridictions qui examinent le litige
dans sa totalité, en fait et en droit. Cela signifie que les juges du fond
examinent les faits, les apprécient, et leur appliquent ensuite la règle de
droit appropriée.
-La Cour de cassation est une juridiction du droit ; unique pour toute la
Tunisie, son rôle se cantonne en principe dans l'appréciation de la
bonne application du droit par les juges du fond. Elle ne réexamine par les
faits car elle n'est pas un troisième degré de juridiction. Ainsi, toutes les
juridictions sont des juridictions du fond sauf la Cour de cassation qui est
juge du droit.
26

Page 27
I. Les juges du fond
1. Les juridictions du premier degré
a. Le tribunal de première instance, juridiction de droit commun
La juridiction de droit commun est celle qui est compétente
pour connaître des litiges d'une manière générale, à l'exception de ceux dont
la connaissance lui a été retirée par un texte particulier et de manière
expresse.
L'article 40 du Code de procédure civile et commerciale
dispose expressément que «le tribunal de première instance connaît
en premier ressort de toutes les actions sauf dispositions contraires
expresses de la loi».
b. Les juridictions d'exception
1. Le juge cantonal
Le législateur a attribué expressément compétence au juge cantonal
pour examiner certaines questions, et ceci dans l'article 39 du code de
procédure civile et commerciale :
-En matière civile pour examiner les actions personnelles et
mobilières.
-En matière commerciale pour examiner les actions en paiement.
Dans ces matières, la compétence du juge cantonal est limitée à l'examen
des demandes dont la valeur n'excède pas 7 000 dinars.
-Une compétence exclusive pour statuer sur les pensions alimentaires
quel qu'en soit le montant, et sur les actions possessoires, c'est à dire les
actions tendant à protéger le possesseur.
2. Le conseil de prud'hommes
D'après l'article 183 du Code du travail, «les conseils de prud'hommes
ont pour attribution de résoudre les différends qui peuvent, à l'occasion
du contrat de travail ou d'apprentissage, s'élever entre les parties
27

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contractantes. Leur compétence s'étend également aux différends nés entre
salariés à l'occasion du travail»
3. Le tribunal immobilier
Le tribunal immobilier constitue une juridiction d'exception dotée
principalement d'une mission particulière, procéder à l'immatriculation des
immeubles.
2. Les juridictions du second degré
Les juridictions du second degré sont des juridictions qui ont reçu
compétence pour réexaminer en appel une affaire qui a déjà fait l'objet
d'un premier examen par les juges du premier degré. Les juridictions du
second degré sont donc la manifestation du principe du double degré de
juridiction.
Les juridictions d’appel sont au nombre de deux :
a. Le tribunal de première instance
C'est la juridiction d'appel compétente pour examiner l'appel
interjeté contre les jugements rendus par le juge cantonal en premier
ressort.
La décision rendue par le tribunal de première instance en tant que
juridiction d'appel est une décision en dernier ressort, c'est à dire qu'elle ne
peut pas être attaquée par la voie de l'appel. Elle n'est susceptible que
d'un recours en cassation.
b. La cour d'appel
La cour d'appel est la juridiction d'appel compétente pour examiner
les demandes d'appel interjetées contre les décisions rendues en premier
ressort par le tribunal de première instance.
II. La cour de cassation
Le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire par
laquelle on poursuit la cassation de décisions rendues en dernier ressort par
les juges du fond.
28

Page 29
l. La composition de la cour de cassation
Unique pour toute la Tunisie, la cour de cassation constitue la juridiction
suprême de l'ordre judiciaire. Son siège est à Tunis. La cour de cassation est
une juridiction collégiale. Elle a à sa tête un premier président, et se compose
de plusieurs présidents de chambres.
2. La mission de la cour de cassation
a. La cour de cassation veille à la bonne application de la règle de
droit
Sont susceptibles d'un recours en cassation :
- des arrêts rendus par la Cour d'appel ;
- des jugements rendus par le Tribunal de première instance en tant
que juridiction d'appel.
Lorsqu'un plaideur est insatisfait d'une décision en dernier ressort
rendue à son encontre, il saisit la cour de cassation en vertu d'un pourvoi en
cassation lorsqu'il reproche à la décision attaquée la mauvaise application
de la règle de droit. En effet, la cour de cassation n'est pas un juge du fait,
c'est un juge du droit. Ainsi, la cour de cassation ne peut pas réexaminer
les faits pour en donner une nouvelle appréciation. Les faits sont
souverainement appréciés par les juges du fond et la cour de cassation doit
considérer ces faits comme définitivement établis par la décision attaquée.
Ce qui rentre en revanche dans le rôle de la cour de cassation, c'est de
vérifier si la règle de droit a été bien appliquée au fait.
Que peut faire la cour de cassation ?
La cour de cassation n'étant pas un troisième degré de juridiction,
-Soit elle rend un arrêt de rejet du pourvoi en cassation lorsque le
moyen du pourvoi n'est pas reconnu fondé. Cela signifie que la décision
attaquée est réputée avoir bien appliqué la loi. Elle conserve alors tous ses
effets et peut être exécutée.
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-Soit elle rend un arrêt de cassation quand elle estime que la loi n'a
pas été bien appliquée par les juges du fond. Dans ce cas, la décision
attaquée et cassée perd sa force juridique. L’arrêt de cassation remet les
parties en l'état où elles étaient avant la décision cassée. La cour de cassation
doit alors renvoyer l'affaire devant les juges du fond pour nouvel examen.
Le renvoi peut être effectué soit devant la même juridiction dont la
décision est cassée, mais qui doit réexaminer l'affaire en étant
«autrement composée (composée de juges différents). Mais, le renvoi peut
aussi être effectué devant une autre juridiction, de même nature et de même
degré. Par exemple, si la décision attaquée émane de la cour d'appel de
Sousse, la cour de cassation, peut renvoyer devant la cour d'appel de
Tunis.
Lorsque la cour de cassation prononce la cassation avec renvoi, la
juridiction de renvoi est libre de la solution qu'elle donne au litige
puisque la décision de la cour de cassation ne s'impose pas à elle. Elle peut
suivre la cour de cassation. Mais elle peut aussi s'opposer et la décision
ainsi rendue par la juridiction de renvoi peut faire l'objet d'un nouveau
pourvoi en cassation. Dans ce cas, une distinction doit être opérée. En effet, le
second pourvoi en cassation peut soulever un moyen qui n'a pas été
soulevé lors du premier pourvoi en cassation. Dans ce cas, c'est l'une des
chambres de la cour de cassation qui examine ce second pourvoi en
cassation. Mais, il est possible que le second pourvoi en cassation soulève
le même moyen que celui qui a été soulevé lors du premier pourvoi. Dans
ce cas, ce sont les chambres réunies de la cour de cassation qui se saisissent
du pourvoi en cassation. Elles siègent en présence du procureur général
auprès de la Cour de cassation.
30

Page 31
b. La cour de cassation veille à assurer l'unité d'interprétation de la
loi
Dans
la mesure où
les
juridictions du fond
sont nombreuses
dans notre pays, il existe un risque certain d'interprétations divergentes de
la loi par chacune d'elles. C'est là un danger certain dans la mesure où les
citoyens étant égaux devant la loi, ce principe peut être remis en cause par la
diversité des interprétations. L a cour de cassation intervient en vue d'assurer
non seulement la bonne application de la loi, mais aussi l'unité de son
interprétation. La cour de cassation étant unique, elle impose par la voie
de la cassation, aux différentes juridictions, la même interprétation de la
loi. Les arrêts de la Cour de cassation orientent aussi les juges du fond sur
l'interprétation de la loi. C'est pour cette raison qu'on attribue à la cour de
cassation l'appellation de «Cour régulatrice». En fait, les juges du fond acceptent
généralement de se conformer à la cour de cassation en raison de l'autorité
morale qu'a cette haute juridiction.
Section 2 : La jurisprudence, source de règle de droit
La jurisprudence peut être définie au sens large du terme, comme étant
l’ensemble des décisions rendues par les juridictions, sur les divers questions
de droit. Au sens strict, la jurisprudence est la manière dont les juges tranchent
habituellement une difficulté juridique.
L'une des grandes questions que se posent les juristes est de savoir si
la jurisprudence est une source du droit, et lorsque la réponse est positive, d'en
déterminer la mesure.
Il faut procéder immédiatement à une distinction entre jurisprudence
source des droits et jurisprudence source du droit. La jurisprudence est une
source des droits subjectifs dans la mesure où le juge applique la règle de
droit aux espèces particulières. Dans cette application, il crée ou constate les
droits subjectifs des sujets de droit, c'est à dire les prérogatives dont les sujets
de droit peuvent se prévaloir sous la protection de l'autorité publique. Bien
31










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différente est la question de savoir si la jurisprudence est une source du droit,
c'est à dire une source de la règle de droit.
En principe, la mission du juge est d'appliquer la loi aux situations
particulières qui lui sont soumises. A l'occasion de l'application de la loi,
il peut être amené à l'interpréter, en fonction de l'intention du législateur.
Mais a priori il n'appartient pas au juge de créer la règle de droit.
A. Le rôle du juge est d'appliquer la loi
Il existe deux raisons qui sont généralement avancées pour écarter
le juge du domaine de la création de la règle de droit. Il s'agit d'une part du
principe de la séparation des pouvoirs, et d'autre pait de l’autorité relative
de la chose jugée au civil.
1 )- Le principe de la séparation des pouvoirs
La constitution du 27 j anvier 2014 a retenu le principe de
la
séparation des pouvoirs en attribuant au pouvoir législatif la compétence
d'élaborer la loi (article 50 et suivant de la constitution), et en donnant au
pouvoir judiciaire le pouvoir de rendre les jugements (article 102 et suivant de
la constitution).
2)- L'autorité de la chose jugée
En principe, l'autorité de la chose jugée est relative en ce sens que la
décision rendue n'a d'effet qu'à l'égard des parties au procès. Elle n'a
lieu non plus qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Si la chose
jugée n'existe qu'entre les parties au jugement, à propos du même objet
contesté, et en se fondant sur la même cause, comment peut-on admettre que
la jurisprudence puisse être une source de droit ? Lorsqu'une juridiction,
quelque soit son rang hiérarchique, a statué sur un litige dans un certain sens,
cela n'oblige nullement une autre juridiction, même inférieure, à
adopter la même solution.
32

Page 33
Ainsi, le jugement, malgré son importance, apparaît bien différent
de la règle de droit qui, elle, est une disposition générale, applicable à
tous.
B. La jurisprudence crée la règle de droit
1. La jurisprudence source conforme à la volonté du législateur
Le juge peut se trouver devant un litige à propos duquel le législateur ne
s'est pas prononcé par voie de disposition générale. De même, il est
possible que la règle générale existe, mais qu'elle soit obscure au point
d'être difficilement applicable en tant que telle.
Le juge peut-il, en se fondant sur la lacune ou l’obscurité de la loi,
refuser de statuer ? La réponse est certainement négative. En effet, d'après
l’article 108 du Code pénal, le juge serait coupable de déni de justice s'il
se refusait à statuer sous prétexte d'obscurité ou de lacune de la loi.
Puisque le juge est obligé de statuer, et que la loi ne lui fournit pas
la solution ou ne la fournit que partiellement, il peut être appelé à faire
œuvre de législateur si les moyens d'interprétation de la loi ne lui
permettent pas de résoudre le litige. En répétant cet agissement, le juge crée
un précédent. Cela signifie que le juge peut se prononcer de la même
manière si le litige vient à se répéter devant lui.
En donnant cette possibilité au juge, le législateur a voulu éviter
qu'un litige ne reste sans jugement.
Cependant, il peut arriver que le juge procède à la création de la règle
de droit.
2. La jurisprudence contraire à la loi
Se basant sur la nécessité d'adapter la règle légale aux besoins de la
société, les juges déforment parfois le sens ou la portée d'une règle de droit. Il
s'agit de l'interprétation des règles du code du statut personnel relatives à
la filiation légitime.
33

Page 34
La cour de cassation a pu affirmer à plusieurs reprises que la promesse
de mariage (tel est le cas des fiançailles) est constitutive de mariage nul, dans
le but de légitimer les enfants issus de relations sexuelles suite à ces
promesses. Il est évident que si on considère la promesse de mariage comme
équivalant à un mariage nul, il s'ensuit l’établissement de la filiation
légitime. En fait, c'est là une déformation de la teneur de la loi car,
juridiquement, la promesse de mariage ne constitue pas un mariage nul.
C'est peut- être pour cette raison que la cour de cassation a révisé cette
jurisprudence, considérant les relations sexuelles en dehors du mariage
comme étant illicites et que l'enfant né de ces relations ne peut être déclaré
légitime.
Section 3 : L’interprétation de la règle de droit
Paragraphe premier : Les méthodes d'interprétation de la règle de
droit devant la doctrine
A. La méthode exégétique
La méthode exégétique est une méthode d'interprétation soucieuse
d'assurer le respect de la règle de droit, et exige par conséquent que
l'interprétation soit orientée vers la recherche de l'intention du législateur.
Ainsi, en interprétant la règle de droit, le juge doit le faire en écartant toute
intervention subjective, mais en s'attelant à découvrir la volonté du
législateur.
1. L'obscurité de la loi
La méthode exégétique utilise principalement deux procédés
d'interprétation. Il s'agit du recours aux travaux préparatoires et aux
précédents historiques.
a.- Le recours aux travaux préparatoires
L'intention du législateur peut être décelée par le recours aux travaux
préparatoires, qui sont des documents publiés par la chambre
des députés
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contenant les travaux préparatoires et les discussions parlementaires qui ont
précédé l'adoption de la loi.
b. Le recours aux précédents historiques
Le recours aux précédents historiques, c'est à dire aux sources
historiques qui ont servi à inspirer le législateur, peut être utile pour aider à
l'interprétation de la règle de droit.
2. La lacune de la loi
La méthode exégétique propose certains procédés de raisonnement
logique.
a. Le raisonnement par analogie
Ce raisonnement permet de prendre la solution donnée par la loi pour
un cas, en vue de l'étendre à un cas voisin en raison du rapprochement qui
existe entre les deux cas. Ainsi par exemple, l'analogie permet parfois
d'étendre aux personnes morales certaines règles prévues pour les personnes
physiques.
b. Le raisonnement a fortiori
C'est une forme de raisonnement analogique qui consiste à appliquer
la solution donnée par le législateur à une situation déterminée à un cas
voisin parce que son application au cas voisin est encore plus évidente (à plus
forte raison).
c. Le raisonnement a contrario
C'est un procédé qui consiste à appliquer la solution inverse de celle
prévue par la loi, à une situation qui serait contraire de celle envisagée par le
législateur.
d. Les maximes juridiques
La méthode exégétique propose aussi, en vue de combler les lacunes
de la loi, de recourir à certains adages, maximes juridiques qui aident à
dégager l'interprétation la plus appropriée. On peut citer à titre d'exemple, la
maxime selon laquelle les exceptions sont d'interprétation stricte, ou bien
35

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encore celle qui prévoit qu'il ne faut pas distinguer là où la loi ne
distingue pas, ou que la bonne foi se présume et c'est à celui qui invoque la
mauvaise foi d'en rapporter la preuve.
B. Les méthodes scientifiques
l. La méthode déformante (méthode historique ou évolutive)
Cette méthode, due essentiellement à l'auteur français Saleilles,
soutient que l'interprète doit adapter librement le texte aux nécessités de son
époque, rechercher ce que serait la pensée du législateur s'il avait légiféré
aujourd'hui et non ce qu'était sa véritable volonté le jour de l'élaboration du
texte. Ainsi, en interprétant un texte pris au début du siècle, il n'est pas
toujours possible de lui donner le sens voulu par son auteur, mais il serait
bon de lui donner la volonté d'un législateur de nos jours.
2. La méthode de la libre recherche scientifique
Cette méthode, proposée par F. GENY part de l'idée que le droit ne
peut pas être entièrement contenu dans la règle de droit écrite. A défaut de
règle, le juge doit chercher librement la solution la plus convenable au litige.
D'après cet auteur, «Un texte ne peut pas être dilaté à l'infini par
interprétation, à partir d'un certain seuil, il n'y a plus de texte à interpréter
mais un vide qu'il s'agit de combler. Le juriste doit alors purement et
simplement élaborer la solution qui lui parait la meilleure, compte tenu du
donné idéal, et faire véritablement œuvre de législateur ».
Paragraphe deuxième : L'Interprétation de la règle de droit en
droit positif
En droit positif, il existe une règle de base selon laquelle il n'y a pas lieu
d'interpréter un texte clair. On ne peut donc interpréter que lorsqu'on est en
présence d'un texte obscur, ou bien en cas de lacune de la loi.
A. La règle de droit est claire
Lorsque la loi est claire, elle doit être appliquée purement et simplement,
car elle ne nécessite pas d'interprétation. C'est le principe même de l'exégèse,
36

Page 37
puisque selon cette école, l'intention du législateur étant claire, il n'y a aucune
raison pour la rechercher ailleurs que dans le texte, sous couvert d'interprétation.
B. L'interprétation en cas d'obscurité et de lacune de la loi
Le législateur a opté expressément pour la méthode exégétique.
L'article 532 du Code des obligations et des contrats qui est le texte de base
relatif à l'interprétation en cas d'obscurité énonce, «en appliquant la loi,
on ne doit lui donner d'autre sens que celui qui résulte de ses expressions,
d'après leur ordre grammatical, leur signification usuelle, et l'intention du
législateur ». D'après cet article, il faut interroger le texte lui- même pour
découvrir la volonté du législateur. Il faut étudier les expressions utilisées par
le législateur, en faire l'analyse grammaticale, s'attacher à la signification
usuelle des termes. De même, en cas de lacune de la loi, le juge n'est pas
totalement libre de créer la règle applicable, puisque l'article 535 du même
code énonce que «lorsqu'un cas ne peut être décidé par une disposition
précise de la loi, on aura égard aux dispositions qui régissent les cas
semblables ou des matières analogues, si la solution est encore douteuse, on
décidera d'après les règles générales de droit».
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Deuxième partie : Les droits subjectifs
Les droits subjectifs peuvent être définis comme étant
l’ensemble des prérogatives reconnues aux sujets de droit par le droit
objectif et dont ils jouissent sous la protection de l’autorité étatique.
Chapitre premier : Classification des droits subjectifs
Section première : Droits patrimoniaux et droits
extrapatrimoniaux
-Les droits patrimoniaux sont les droits subjectifs qui font
partie du patrimoine de la personne, qui ont une valeur marchande et
qui sont dans le commerce juridique : Ce sont des droits appréciables
en argent. Exemple ; droit de la propriété, droit de la créance. Ces
droits sont :
*Cessibles à un nouveau titulaire.
*Transmissibles à cause de mort.
*Saisissables par les créanciers.
*Prescriptibles par
la prescription acquisitive ou par
la
prescription extinctive.
-Les droits extrapatrimoniaux ne figurent pas parmi les
éléments du patrimoine d’une personne. Ainsi, ils ne sont pas
cessibles à une autre personne. Leur titulaire ne peut ni les vendre, ni
les échanger, ni les donner. Ils ne sont pas saisissables par les
créanciers. Ils sont imprescriptibles.
Cependant,
il
faut
remarquer
que
certains
droits
extrapatrimoniaux produisent des conséquences pécuniaires mais
demeurent en dehors du commerce et échappent à l’action des
38

Page 39
créanciers. Comme le droit à la pension alimentaire. C’est un droit
extrapatrimonial qui a une nature pécuniaire. Ou encore, de l’atteinte à
la vie ou à l’intégrité de la personne qui peut justifier le droit à des
dommages-intérêts.
Paragraphe premier : Les droits extrapatrimoniaux
Sont des droits attachés à la personne humaine et qui ne peuvent
pas s’en détacher. Ils consistent dans :
A-Les droits de la personnalité
1-Le droit à l’intégrité physique
Le premier droit fondamental de la personne consiste dans la
protection du corps humain. En effet, ce droit est relatif au droit à la
vie et à l’intégrité corporelle.
L’article 3 de la déclaration universelle des droits de l’homme,
ratifiée par la Tunisie, affirme que : « Tout individu a droit à la vie »,
et l’article 5 ajoute que « nul ne sera soumis à la torture ni à des peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».
Le droit à l’intégrité physique est protégé par la nouvelle
constitution dans l’article 23.
2-Le droit à l’intégrité morale
Le législateur garantit l’intégrité morale de la personne comme
étant une expression des droits de la personnalité.
Il y a plusieurs expressions de la protection de l’intégrité morale.
*Le droit à la liberté intellectuelle, garanti par la nouvelle
constitution et par la déclaration universelle des droits de l’homme
(liberté d’expression, liberté d’opinion).
39

Page 40
*Le droit à l’intimité familiale, la constitution et le droit pénal
protègent la vie privée de la personne et garantissent par exemple
l’inviolabilité du domicile et le secret de la correspondance (article 24
de la nouvelle constitution).
*Le droit au mariage, un droit fondamental de la personne.
Aucune atteinte ne peut lui être apportée. L’article 118 du C.O.C
prévoit que : « Est nulle toute condition ayant pour effet de restreindre
ou d’interdire l’exercice des droits et facultés appartenant à toute
personne humaine, telles que celles de se marier, d’exercer ses droits
civils ».
*Le droit à l’image est un droit de la personnalité qui s’oppose
à la prise de photographie, à sa reproduction et publication sans le
consentement de la personne intéressée. En effet, l’atteinte à ce droit
peut constituer une violation au secret de la vie privée.
*Le droit à l’honneur. Toute personne a le droit de défendre
son honneur. Ce droit est prévu expressément par l’article 12 de la
déclaration universelle des droits de l’homme. Il est aussi protégé par
le droit pénal qui sanctionne la diffamation, la calomnie et la
dénonciation calomnieuse.
B-Les droits familiaux
Ce sont des droits attribués à la personne en tant que membre de
la famille. Il s’agit donc de droits attachés à la famille et qui sont en
dehors du commerce juridique.
40

Page 41
1- La qualité de chef de famille
Cette qualité est attribuée au mari par l’article 23 du code de
statut personnel qui prévoit que : « Le mari en tant que chef de famille
doit subvenir aux besoins de l’épouse et des enfants dans la mesure de
ses moyens et selon leur état dans le cadre des composantes de la
pension alimentaire ». Cependant, la qualité de chef de famille ne
donne pas au mari le pouvoir sur les biens de sa femme.
2- Le devoir de fidélité
Il s’agit d’un devoir qui est de l’essence même du mariage. Il
s’impose aussi bien au mari qu’à la femme. En effet, l’adultère est
incriminé qu’il soit commis par le mari ou par la femme (article 236
C.P), et il y a la possibilité de demander le divorce aux torts du
conjoint fautif (article 31 du C.S.P).
3- L’obligation alimentaire
Prend sa source dans le mariage, la parenté ou l’engagement
volontaire. Le mari est tenu de l’obligation alimentaire vis-à-vis de sa
femme, ses enfants, ses parents et même ses grands-parents.
La pension alimentaire couvre la nourriture, l’habillement, le
logement, l’instruction et tout ce qui est considéré comme nécessaire à
l’existence selon l’usage et la coutume.
Paragraphe deuxième : Les droits patrimoniaux
A/Les droits réels
Le droit réel est un droit qui porte sur une chose et qui confère à
son titulaire un pouvoir direct et immédiat qui s’exerce sur cette
chose. Il constitue un lien de droit entre une personne et une chose.
41

Page 42
Exemple, le droit de propriété confère à son titulaire un pouvoir
direct et immédiat d’usage, de jouissance et de disposition sur la
chose.
Les droits réels se divisent en droits réels principaux et droits
réels accessoires.
1- Les droits réels principaux
Le droit de propriété est le droit réel principal par excellence
parcequ’il est le plus complet. En effet, il comporte les trois pouvoirs
que peut avoir une personne sur une chose, à savoir celui d’en user,
d’en tirer fruits, et d’en disposer matériellement ou juridiquement.
Ainsi l’article 17 du code des droits réels dispose que : « Le droit de
propriété est celui qui confère à son titulaire le droit exclusif d’user de
sa chose, d’en jouir et d’en disposer ». Ces attributs réunis constituent
le droit de propriété, peuvent être dissociés entre plusieurs personnes.
Il s’agit alors des démembrements du droit de la propriété qui sont ;
l’usufruit, le droit d’usage et d’habitation, la servitude.
a*L’usufruit
C’est un droit réel car il donne un droit direct et immédiat sur
une chose d’après l’article 142 du C.D.R. Ce droit confère à
l’usufruitier deux attributs ; l’usage et la jouissance. Mais, le droit de
disposer de la chose demeure entre les mains du propriétaire.
L’usufruit est un droit temporaire, viager (il s’éteint par la mort
de l’usufruitier).
42

Page 43
b*Le droit d’usage et le droit d’habitation
-Le droit d’usage consiste à se servir d’un bien et à en percevoir
les fruits dans la limite des besoins indispensables du bénéficiaire et
de sa famille.
-le droit d’habitation est celui de se servir de la chose pour s’y
loger avec sa famille. C’est donc un droit d’usage limité à l’habitation
familiale. Ce sont deux formes d’usufruit.
c*La servitude
L’article 165 du Code des droits réels prévoit que : « La
servitude est un droit établi sur un immeuble pour l’utilité d’un
immeuble appartenant à un autre propriétaire ». C’est donc une
permission donnée à un propriétaire de se servir d’un fonds voisin.
Exemple, la servitude du passage qui permet à son titulaire de
passer sur le terrain d’autrui lorsque son fonds n’a pas d’issue sur la
voie publique ou n’y a qu’une issue insuffisante.
La servitude est attachée à un fonds et non à une personne.
2- Les droits réels accessoires (les sûretés réelles)
Les droits
réels accessoires sont des droits
réels qui
accompagnent un droit de créance pour garantir son paiement.
a*L’hypothèque ou le gage
Ce sont des sûretés réelles conventionnelles qui sont conférés à
un créancier sur un immeuble (hypothèque) ou sur un meuble (gage)
appartenant au débiteur. Ces sûretés réelles permettent au créancier de
vendre l’immeuble hypothéqué ou le meuble engagé, de se payer sur
43

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sa valeur par préférence à tous les autres créanciers lorsque le débiteur
ne paye pas à l’échéance (insolvable).
b*Le privilège
Défini par l’article 194 du C.D.R. C’est une sûreté réelle légale
qui confère à son titulaire un droit de préférence au paiement.
B-Les droits personnels
Le droit personnel est un droit qui permet à son titulaire d’exiger
d’une autre personne, une certaine prestation. On l’appelle encore
droit de créance ou obligation car il met en présence un créancier et un
débiteur.
Si le droit réel est un droit exercé par une personne sur une
chose, le droit personnel est un droit exercé par une personne à
l’encontre d’une autre personne.
Dans ce rapport juridique, on est en présence d’un sujet actif, le
créancier, d’un sujet passif, le débiteur, et d’un objet qui consiste dans
la prestation due qui peut consister dans une obligation de donner, de
faire, de ne pas faire.
-L’obligation de donner, est celle en vertu de laquelle le
débiteur s’engage à transférer au créancier, le droit de propriété ou un
autre droit réel sur la chose qui lui appartient. Tel est le cas de la vente
qui crée une obligation de donner consistant dans le transfert de la
propriété du bien vendu.
-L’obligation de faire, est celle qui consiste dans l’engagement
du débiteur à effectuer une prestation positive au profit du créancier
(le contrat de transport).
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-L’obligation de ne pas faire, consiste dans l’engagement du
débiteur à s’abstenir de faire quelque chose (ne pas faire une
concurrence déloyale).
C-Comparaison entre
le droit réel et
le droit
personnel
1- Les droits réels sont en nombre limité
C’est la loi qui détermine les droits réels à la différence des
droits personnels qui sont en nombre illimité et sont dus souvent à la
libre volonté des parties.
2- les droits réels confèrent un droit direct sur la chose
Le titulaire du droit réel peut agir directement sur la chose objet
de son droit, alors que le titulaire du droit personnel dispose
simplement d’une action contre son débiteur.
3- Le droit réel est opposable
En effet, une personne ne peut méconnaitre le droit réel sur la
chose. En revanche, le droit personnel est relatif. Il ne s’impose qu’au
débiteur et ne peut créer d’obligations qu’à son encontre.
4- Le droit réel emporte un droit de suite
Le créancier titulaire d’un droit réel accessoire peut suivre la
chose en quelques mains qu’elle passe. C’est le cas du créancier
hypothécaire, il peut suivre l’immeuble là où il se trouve, que ce soit
entre les mains du propriétaire débiteur ou entre les mains de tout
acquéreur ultérieur du bien. Tel n’est pas le cas du droit personnel qui
ne confère aucun droit de suite.
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5- Le droit réel emporte un droit de préférence
S’il y a un conflit entre le titulaire d’un droit réel et le titulaire
d’un droit personnel, c’est le premier qui est préféré au second.
Le droit personnel n’emporte pas, quand à lui, droit de
préférence. Ainsi, sur le bien objet du droit réel qui est vendu, il faut
d’abord désintéresser celui qui est titulaire du droit réel, ensuite sera
désintéressé le créancier chirographaire.
Paragraphe troisième : Les droits intellectuels
Ce sont des droits de nature mixte et qui sont le fruit de l’activité
intellectuelle de son titulaire. Cette nature hybride tient au fait que ces
droits, étant l’œuvre intellectuelle de la personne ont d’abord un
aspect moral attaché à la personnalité de son auteur et se rapprochent
des droits extrapatrimoniaux.
Mais, d’autre part, ils ont un aspect pécuniaire consistant dans le
fait pour l’auteur de ce droit, de pouvoir tirer profit pécuniairement de
son œuvre intellectuelle.
Cet
aspect pécuniaire des droits
intellectuels
répond
naturellement aux caractéristiques des droits patrimoniaux (exemple,
droit d’auteur).
Section deuxième : Classification des biens
On distingue les biens corporels et les biens incorporels.
-Les biens corporels sont les biens qui ont une existence
matérielle et qui tombent sous les sens, alors que les biens incorporels
sont les biens qui n’ont pas d’existence physique, matérielle.
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Le statut juridique des biens varie selon que ces biens sont
mobiliers ou immobiliers. Le législateur retient expressément cette
classification des biens dans l’article 2 du C.D.R qui dispose
que : « Les biens sont meubles ou immeubles ».
Paragraphe premier : La distinction entre les meubles
et les immeubles
A/Les immeubles
Dans l’article 4 du C.D.R, le législateur distingue entre
immeubles par nature, immeubles par destination et immeubles par
objet.
a- L’immeuble par nature, est défini comme étant toute chose
fixe qu’on ne peut pas déplacer sans dommage.
Peuvent avoir la qualité d’immeuble par nature, le sol, les
constructions, les plantations, les installations et canalisations, partie
intégrante du fonds, des récoltes pendantes par les racines et les fruits
non encore cueillis.
Mais bien que la liste semble assez longue, elle se ramène en
réalité à trois rubriques à savoir ; le sol, les constructions et les
plantations.
b- L’immeuble par destination, ce sont les meubles par nature
auxquels le législateur confère le statut d’immeuble et ceci par
exception au critère de fixité qui caractérise l’immeuble. Ceci est
justifié par le lien qui unit l’immeuble par nature et le meuble par
nature. En effet, le meuble est attaché à l’immeuble de manière à lui
être indispensable. On ne peut pas les détacher sans détériorer ou
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abimer la partie de l’immeuble à laquelle ils sont attachés où sans
abimer le meuble-lui-même (chauffage, climatisation, installation
sanitaire, lavabo).
D’autre part, sont immeubles par destination ; les animaux, les
matériels et autres objets que le propriétaire du fonds y a placés pour
le service et l’exploitation de ce fonds. En effet, si une personne vend
sa terre, les meubles destinés à l’exploitation de cette terre comme le
tracteur ou les animaux seront compris dans la vente parcequ’ils sont
considérés comme des immeubles par destination.
A contrario, si ces meubles ne sont pas placés dans l’immeuble
pour le service et l’exploitation de la terre, comme des chevaux que le
propriétaire monte pour son propre plaisir, ils gardent leur nature
première et ne seront pas inclus dans la vente de l’immeuble.
C’est le critère du lien économique entre le meuble et
l’immeuble.
Il existe donc deux conditions pour que l’immeuble par
destination soit retenu :
1- Il faut que les deux biens appartiennent à un même
propriétaire.
2- Il faut qu’un rapport de destination défini par la loi existe
(attache matérielle ou destination économique).
c-L’immeuble par objet, c’est le droit réel immobilier et les
actions fondées sur ce droit. Il s’agit du droit de propriété et ses
démembrements (usufruit, servitude, droit d’usage et d’habitation
ainsi que les droits réels accessoires).
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B/Les meubles
Le législateur distingue entre :
-Les meubles par nature, les corps qui peuvent se transporter
d’un lieu à un autre, soit par eux même (animal) soit par l’effet d’une
force étrangère (voiture, vase, table).
-Et les meubles par détermination de la loi, ou meubles
incorporels, (les parts sociales, les actions émises par les sociétés
commerciales).
Paragraphe deuxième : Les intérêts de la distinction entre les
meubles et les immeubles
1- En matière de possession
-La propriété d’un immeuble non immatriculé s’acquiert par la
possession pendant 15 ans grâce à la prescription acquisitive (10 ans si
le possesseur de bonne foi), et l’immeuble immatriculé ne subit jamais
la prescription acquisitive.
-S’il s’agit de meubles, la simple possession de bonne foi vaut
immédiatement titre de propriété.
2- En matière de vente
-La vente des meubles corporels est parfaite par le simple
échange des consentements.
-Pour les immeubles, le consentement est insuffisant. La vente
doit être constatée par écrit ayant une date certaine et l’inscription sur
le livre foncier (si l’immeuble est immatriculé).
3- En matière d’hypothèque ou de gage
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-L’immeuble peut faire l’objet d’une hypothèque constatée par
écrit et soumis à des conditions de publicité pour être opposable.
-Le meuble fait l’objet d’un gage non soumis à des conditions
similaires (exception le gage du fonds de commerce).
4- En matière de saisie
La saisie immobilière se caractérise par sa complexité, son
formalisme et son caractère judiciaire, alors que la saisie mobilière est
beaucoup plus simple. Elle nécessite seulement l’intervention d’un
huissier notaire.
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Chapitre deuxième : La preuve des droits subjectifs
La preuve est une opération qui consiste à démontrer une
affirmation comme étant vraie et certaine. Et c’est le juge qu’il s’agit
de convaincre de la certitude de la prétention. Pour cela, il faut
rapporter les preuves suffisantes conformément aux règles posées par
le législateur.
Section première : La charge de la preuve
-La charge de la preuve signifie l’obligation d’apporter la preuve
de l’existence des faits prétendus. Elle n’incombe pas sur le juge qui
est neutre et doit se contenter de trancher le litige en fonction des
moyens de preuve présentés. Il ne doit pas s’immixer dans
l’administration de la preuve, ou faire état de sa connaissance
personnelle des faits invoqués.
-la neutralité du juge est un principe fondamental qui trouve son
expression dans l’article 12 du C.P.C.C selon lequel le tribunal n’a pas
l’obligation de constituer, compléter ou produire des moyens de
preuve à l’appui des prétentions des parties.
-Exceptionnellement, le tribunal peut s’il le juge nécessaire faire
procéder par le juge rapporteur toutes mesures d’instruction (enquête,
expertise ou toute autre mesure) utiles à la manifestation de la vérité.
A/La solution du principe
En principe, celui qui prétend qu’une autre personne lui doit
quelque chose doit en rapporter la preuve. Et lorsque la preuve est
établie par le demandeur, la charge de la preuve incombe au défendeur
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qui devient demandeur s’il prétend que l’obligation est éteinte (il a
payé la créance.
Par conséquent, la charge de la preuve pèse tantôt sur le
demandeur, tantôt sur le défendeur car demandeur à la preuve est une
qualité changeante pendant la même instance. Mais, demandeur à
l’action ou défendeur à l’action sont deux qualités qui ne changent pas
tout au long de l’instance.
B/Les exceptions à la solution du principe
-La preuve d’un fait négatif devant la jurisprudence
Une personne peut se prévaloir d’un fait négatif, tel que la
preuve que l’assuré n’a pas fait de déclaration du sinistre ou que telle
personne n’a pas fait de faute, ce qui est difficile à rapporter. Pour
cela, la cour de cassation dans certains cas a renversé la charge de la
preuve en exigeant du défendeur la preuve d’un fait positif.
-la voie des présomptions
Le juge peut établir l’existence de certains faits inconnus à partir
de certains indices. Les présomptions sont donc une technique qui
permet de déduire des faits inconnus à partir des faits connus.
Section deuxième : L’objet de la preuve
-La preuve porte sur les faits contestés et non sur la règle de droit
qui servira à trancher le litige. En effet, nul n’est censé ignorer la loi,
et la connaissance de la loi est encore plus évidente chez le juge.
-Si le fait contesté est difficile à prouver, le législateur procède
par la technique des présomptions légales au déplacement de l’objet
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de la preuve. Cette technique vient en aide à un plaideur lorsque
l’établissement direct du fait à prouver se trouve difficile.
Selon le critère de la force probante, les présomptions légales
sont au nombre de trois :
1- les présomptions légales simples ; qui admettent la preuve
contraire. (Exemple la présomption de l’article 53 du C.D.R, qui pose
la présomption selon laquelle la possession d’un meuble de bonne foi
est une présomption de propriété. Cette présomption peut être
combattue par la preuve contraire).
2- les présomptions légales irréfragables ; qui ne peuvent
jamais être combattues par
la preuve du contraire (exemple
présomption de fraude qui entache un acte de vente s’il est conclu au
profit d’un magistrat ou d’un avocat portant sur un bien litigieux).
3- les présomptions légales mixtes ; qui ne peuvent pas être
classés dans l’une des deux catégories précédentes. Tel que le cas
l’autorité de la chose jugée (le titulaire d’une décision de justice n’a
plus à prouver le droit reconnu dans cette décision -se rapproche donc
des présomptions
irréfragables-, mais, ce
jugement peut être
combattue par la preuve contraire - se rapproche des présomptions
simples-).
Section troisième : L’admissibilité de la preuve
Une distinction fondamentale se fait entre les actes juridiques et
les faits juridiques.
-l’acte juridique est défini comme étant une manifestation de
volonté destinée à produire un effet de droit. (Contrats).
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-les faits juridiques sont des situations auxquelles la loi attache
des conséquences juridiques (décès, naissance).
Cette classification sert de base à la classification des moyens de
preuve.
Paragraphe premier : la preuve des actes juridiques
A/le principe : l’exigence d’un écrit
En présence d’un acte juridique, il est nécessaire de rapporter un
écrit pour en faire la preuve. Dès fois même le législateur exige l’écrit
pour la validité d’un acte juridique (acte juridique solennel, ct de
mariage).
Si la somme de l’obligation excède 1000d, il faut en rapporter la
preuve par écrit (art 475 du C.O.C). Mais la preuve contre un acte
juridique (prétendu être inexact ou incomplet) doit être établie par un
écrit même si la valeur de l’acte est inférieure à 1000d. Par
conséquent, on ne peut pas prouver par témoins contre et outre le
contenu des actes.
-la preuve contre (si on prétend que l’acte est incomplet ou
inexact).
-la preuve outre (si on prétend avoir omis un élément lors de la
rédaction de l’acte).
Cette règle connait deux exceptions :
-En cas de l’obscurité de l’acte, le juge se réfère à tous les
moyens de preuve pour interpréter un texte.
-En cas de détermination de la portée des clauses ou à en
constater l’exécution.
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B/Les exceptions à l’exigence de l’écrit
1- En matière commerciale ; c’est le principe de la liberté de
preuve entre commerçants, ou contre un commerçant si c’est un acte
mixte. (preuve testimoniale, présomptions).
2- Existence d’un commencement de preuve par écrit ; il peut
s’agir d’un écrit sous seing privé vicié (il lui manque une condition de
validité, exp un écrit non signé), et qui émane de celui contre lequel
on l’utilise.
Le commencement de preuve par écrit doit être complété par des
procédés imparfaits de preuve (tel que témoignage et présomptions).
Ainsi le commencement de preuve par écrit, complété par une
preuve imparfaite transforme la vraisemblance en certitude et permet
ainsi de prouver l’acte juridique.
3- Impossibilité de la preuve écrite ; à l’impossible nul n’est tenu.
a*Impossibilité matérielle. Le cas de l’incendie ou autre
événement imprévu ou force majeur qui a mis les parties dans
l’impossibilité de dresser un écrit (contrat de dépôt) vu
les
circonstances (rapidité, danger).
b*Impossibilité morale ; résulte des relations d’affection tel que
les relations parentales entre père et fils, frère sœur, oncle nièce. Ces
relations peuvent être des obstacles psychologiques à l’établissement
d’un écrit.
Certains usages aussi empêchent l’existence d’un écrit (relation
entre l’avocat et son client, médecin et patient).
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c*Perte de l’écrit antérieurement préconstitué ; c’est un cas
d’impossibilité lorsqu’elle est due à un cas fortuit ou force majeur.
d*Les conventions contraires
La question est de savoir si les règles relatives à la preuve sont
d’ordre public ou d’intérêt privé.
-Si elles sont d’ordre public, elles s’imposent à tous et ne
peuvent être écartées d’un commun accord des parties.
-Si elles sont d’intérêt privé, les parties peuvent y déroger par
convention contraire.
La cour de cassation affirme que ce sont des règles d’intérêt
privé.
Paragraphe deuxième : la preuve des faits juridiques
En matière de faits juridiques règne le principe de la liberté de
la preuve. Par conséquent, les parties peuvent recourir aux procédés
imparfaits de preuve et notamment au témoignage.
Exp de faits juridiques, violence, délit, fraude.
Certains faits sont importants et doivent être prouvés par écrit
(la naissance, le décès).
Section quatrième : Les procédés de preuve
Paragraphe premier : Les procédés de preuve parfaits
I-La preuve littérale ou écrite
L’écrit est objectif et ne risque pas d’être altéré par le temps.
Il est crédible, car rédigé avant tout litige. Le code des
obligations et des contrats distingue entre :
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1- L’acte authentique dressé par un officier public compétent
comme le huissier notaire (significations-protêts...), les notaires, les
officiers de l’état civil, le conservateur de la propriété foncière.
Egalement les actes rédigés par les juges, ainsi que les jugements
rendus par les tribunaux.
-L’acte authentique valable, soumis au contrôle de l’officier
public, et dont les énonciations doivent être tenues pour vrai tant que
leur fausseté n’a pas été constatée par l’inscription de faux. Alors que
les déclarations faites par les parties font foi jusqu’à preuve du
contraire, et peuvent être attaquées par tous les moyens de preuve
(témoins- présomptions).
-L’acte authentique nul, pour cause (incompétence de l’officier
public, défaut de forme exigée) ne peut valoir acte authentique, mais,
il peut être considéré comme acte sous seing privé s’il est signé par les
parties, ou comme commencement de preuve par écrit (à défaut de
signature).
2- L’acte sous seing privé, dressé en vue de faire preuve sans
l’intervention d’un officier public et sous la foi de la signature des
parties. Imprimé ou rédigé, l’essentiel qu’il soit signé de la propre
main de la partie signataire (signature manuscrite).
Si l’une des parties est illettrée, l’acte doit être dressé par un
officier public car l’empreinte digitale ne peut pas remplacer la
signature et ne signifie pas que la partie en question a pu prendre
connaissance du contenu de l’acte.
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*Force probante : Si l’acte authentique tire sa force probante du
fait qu’il est dressé par un officier public, l’acte sous seing privé tire
sa force de la simple signature apposée par les parties sur l’écrit
(dépend de sa reconnaissance par les parties).
-Si l’acte est méconnu, il perd toute sa force probante. Celui qui
se prévaut de l’acte, doit en établir l’exactitude (à la différence avec
l’acte authentique qui bénéficie d’une présomption d’exactitude).
-Si l’acte a été reconnu exact, il fait preuve pleine et entière, il
fait la même foi que l’acte authentique envers toutes personnes.
* Contestation : On ne peut remettre en cause le contenu d’un
acte sous seing privé qu’au moyen d’un écrit. Par conséquent, il est
difficile de contester l’acte sous seing privé reconnu par son
signataire.
3- Autres écrits pouvant constituer une preuve littérale
Certains autres écrits peuvent être retenus au titre de la preuve, il
s’agit :
-Des livres de commerce contenant toutes les opérations
conclues entre commerçants.
-Des lettres, registres et papiers domestiques, peuvent faire foi
contre leur auteur s’il n’a pas contesté son écriture ou sa signature.
*Des écrits portant mention de libération. En effet, lorsqu’un
créancier reçoit un paiement, il peut dresser une quittance régulière ou
bien faire mention de ce paiement sur le titre de créance lui-même.
-Les copies d’actes authentiques et d’actes sous seing privé. La
copie ou la photocopie étant la reproduction du titre, ne présentent pas
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les mêmes garanties probatoires que
l’original. Le risque de
falsification est notamment possible. Cependant, lorsque la copie
remplit les conditions de fidélité nécessaires, le législateur lui attribue
la même force probante que l’original. Tel est le cas lorsque la
conformité à
l’original est certifiée par
les officiers publics
compétents.
II- L’aveu judiciaire
-C’est un acte judiciaire, acte de justice qui doit être fait devant
le juge et au cours d’une instance en justice. C’est la reine des
preuves ; la déclaration par laquelle une personne reconnait les faits
allégués par son adversaire. Il ne peut être fait que par personne ayant
la capacité totale d’exercice. La volonté de procéder à l’aveu doit être
libre et éclairée.
-L’aveu judiciaire fait pleine foi. Il est indivisible. En effet, il
constitue un tout qui doit être pris dans son ensemble ou rejeté dans
son ensemble. Il est irrévocable.
III- Le serment décisoire
Lorsque celui sur qui pèse la charge de la preuve ne trouve pas
les moyens nécessaires pour démontrer l’évidence de ses allégations,
il peut mettre son adversaire au défi en lui proposant de jurer que sa
version des faits est véridique et accepte ainsi de prendre le procès s’il
ose le faire.
Le serment décisoire est donc l’affirmation solennelle de la
vérité faite au cours d’une procédure judiciaire par une des parties au
litige qui prend dieu à témoin.
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Le serment doit être personnellement prêté et par une personne
qui a la capacité d’exercice. Il doit toujours être prêté à la mosquée le
vendredi ou dans tout autre lieu religieux qui sera indiqué par la partie
qui le défère.
Paragraphe deuxième : Les moyens de preuve imparfaits
I-Le témoignage
C’est la déclaration faite par une personne qui n’est pas partie au
procès et qui relate ce qu’elle a personnellement vu ou entendu.
Le témoin doit surtout être neutre. Il ne doit pas avoir un intérêt
personnel ou pécuniaire dans le litige ou une inimité (sentiment de
haine) à l’égard de l’une des parties, ni un lien de parenté ou un
rapport de subordination avec cette dernière.
II- Les présomptions de l’homme
Sont des déductions de fait inconnues à partir de faits connus.
Ces déductions sont l’œuvre du juge et correspondent à son intime
conviction. En effet, c’est à partir d’indices présentés par les parties
que le juge va forger sa conviction quant au bien fondé ou non de la
demande.
Toutefois, et pour admettre la présomption comme procédé de
preuve, il faut qu’elle soit confirmée par le serment supplétoire de la
partie qui l’invoque. Il ne s’agit pas là, évidemment du serment
décisoire mais du serment supplétoire.
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III- Le serment supplétoire
Il s’agit du serment déféré par les juges à l’une ou à l’autre des
parties. Il est appelé supplétoire parcequ’il n’a pas une force probante
importante. Il complète l’intime conviction du juge
IV- L’aveu extra-judiciaire
Cet aveu n’est pas fait devant le juge. C’est pourquoi il constitue
un procédé imparfait de preuve qui ne lie pas le juge. Il est laissé à
l’appréciation souveraine des juges du fond.
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