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Rapport des élections

ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES ET LEGISLATIVES 2019
EN TUNISIE
RAPPORT FINAL












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Rapport des élections

ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES ET LEGISLATIVES 2019
EN TUNISIE
RAPPORT FINAL
One Copenhill
453 Freedom Parkway
Atlanta, GA 30307
(404) 420-5100
www.cartercenter.org

















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Table des matières
Carte de la Tunisie ................................ 6
Élections législatives ...................... 56
Conclusion ...................................... 58
La Haute Autorité Indépendante de
Communication Audiovisuelle (HAICA)
............................................................ 59
Résumé ................................................. 7
Conclusion ...................................... 61
Contexte ........................................... 9
Candidats, partis et campagnes ......... 62
Cadre juridique ............................... 10
La gestion des élections ................. 10
Inscription des électeurs ................ 11
L’éducation des électeurs .............. 11
L’observation citoyenne ................. 12
L’inscription des candidats ............. 12
La campagne électorale ................. 13
Le vote et le dépouillement ........... 16
Campagne au premier tour de
l'élection présidentielle
................. 62
Conclusion ...................................... 65
Les campagnes pour les élections
législatives
...................................... 66
Campagne au deuxième tour de
l'élection présidentielle
................. 68
Financement des campagnes
électorales
.......................................... 70
Compilation des résultats .............. 17
Observation des réseaux sociaux ...... 72
Règlement du contentieux électoral
........................................................ 18
Les résultats .................................... 19
Recommandations ......................... 21
Cadre juridique ............................... 72
Méthodologie ................................. 73
Élection présidentielle - Premier tour
........................................................ 75
Le Centre Carter en Tunisie ................ 23
L’élection législative ....................... 76
La méthodologie d'observation
électorale
............................................ 26
Élection présidentielle - second tour
........................................................ 78
Contexte politique .............................. 30
Les efforts d’observation locale .... 79
Cadre juridique ............................... 35
Facebook ........................................ 79
Système électoral ........................... 39
Conclusion ...................................... 80
La délimitation des circonscriptions
électorales
.......................................... 41
Conclusion ...................................... 43
Administration électorale .................. 44
Inscription des électeurs .................... 48
Éducation des électeurs ..................... 51
Conclusion ...................................... 53
Enregistrement des candidats ........... 54
L’élection présidentielle ................. 55
La société civile .................................. 81
Règlement du contentieux électoral . 85
Enregistrement des candidats à
l'élection présidentielle
................. 85
Enregistrement des candidats à
l'élection législative
....................... 86
Jour d'élection .................................... 88
Premier tour de l’élection
présidentielle : 15 septembre
........ 89

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Les élections législatives du 6
octobre
............................................ 90
Deuxième tour de l’élection
présidentielle le 13 octobre
........... 91
Le processus de comptage ............. 92
Situation sécuritaire pendant la
période électorale
.......................... 93
Développements postélectoraux ....... 94
Résolution du contentieux des
résultats
.......................................... 94
Le contentieux des résultats de
l'élection législative
........................ 95
Le contentieux des résultats de
l'élection présidentielle
.................. 95
Les développements politiques ..... 96
Conclusions et Recommandations ..... 99
A l'Assemblée du Représentant du
Peuple :
........................................... 99
À l'ISIE ........................................... 101
Au pouvoir judiciaire .................... 102
Au gouvernement ........................ 102
Aux partis politiques .................... 102
Aux organisations de la société civile
...................................................... 103
Annexe A : Remerciements .............. 104
Annexe B. Population et quotients
électoraux
......................................... 106
Annexe C. Candidatures ................... 108
Annexe D. Résultats des élections ... 109
Annexe E. Délégation et liste du
personnel .......................................... 112
Annexe F. Termes et abréviations ... 115
Annexe G. Tableau de liens aux
déclarations et rapports électoraux des
observateurs nationaux
................... 116
Annexe H. Lettre d’invitation .......... 119
Annexe J. Le Centre Carter en un coup
d'œil
.................................................. 120







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Carte de la Tunisie
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Résumé
Les élections présidentielles et
législatives de 2019 représentent la
première transmission pacifique du
pouvoir d'un président démocratique
ment élu à un autre, et
d’un premier parlement démocratiqu
ement élu du pays sous la Deuxième
République vers un deuxième. Bien
que la transition démocratique et les
réformes fondamentales ont stagné
depuis les élections de 2014, les
Tunisiens ont réaffirmé leur
engagement envers la démocratie
naissante du pays en assurant une
bonne organisation de trois élections
en moins d'un mois : une élection
présidentielle le 15
septembre, une élection législative le
6 octobre et un second tour d’une
élection présidentielle le 13 octobre.
Les autorités électorales tunisiennes
méritent d'être félicitées pour
avoir réussi à gérer les élections de
2019 dans un délai serré causé par la
mort prématurée du président Béji
Caïd Essebsi. Les trois élections ont
été bien organisées et pacifiques,
Les observateurs
Anitra Jankevica
(Lettonie) et Tidiani
Togola (Mali), et
leur traducteur,
utilisent la
technologie ELMO
du Centre pour
évaluer les
processus
électoraux dans un
bureau de vote lors
du premier tour des
élections
présidentielles.




















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avec seulement de légères
irrégularités. L’Instance Supérieure
Indépendante pour les Élections
(ISIE) a mené avec succès une
campagne d'inscription des
électeurs qui a enregistré
1.455.898 nouveaux
électeurs. L'enregistrement des
candidats a été réalisé d’une manière
professionnelle et efficace par
l'administration des
élections. Cependant, cela a été
marqué par un manque de
transparence au sujet des motifs du
refus de demandes de candidature
et parrainages pour les candidats
présidentiels.
Le processus électoral a été entaché
par des tentatives de dernière minute
de restreindre le droit de se présenter
à la course présidentielle. En juin, le
Parlement a voté pour amender la loi
électorale et restreindre rétroactivem
ent la candidature des dirigeants
d’organisations caritatives et des
propriétaires d’organismes de
presse. Bien que le projet de loi ait
été adopté et jugé constitutionnel par
l’Instance provisoire, le Président de
la République n'a pas signé le texte
législatif, et les restrictions n’ont pas
été appliquées à l'élection.
Les électeurs, les jeunes en particulier, ont placé
massivement leur espoir dans les acteurs politiques
non conventionnels, y compris le nouveau Président
de la République, pour relancer la transition
politique et stimuler la reprise économique du pays.

Le candidat à
l’élection présidentielle et
le propriétaire d'une chaîne de
télévision Nabil Karoui, l’un des
8 | The Carter Center Rapport des élections
candidats qui était une cible
présumée des amendements, a été
arrêté en Août 2019, peu avant le
début de la période de campagne
électorale. Le timing de
l’incarcération de Karoui pour
des accusations, qui sont en suspens,
depuis 2016 a suscité des
interrogations sur l'interférence du
politique dans le système judiciaire,
étant donné qu'une juridiction
inférieure lui avait permis de rester
libre alors que l'enquête était
en cours.
Tandis que le taux de participation
aux élections du 15 septembre et du
6 octobre était inférieur à celui des
dernières élections, la participation
des électeurs a augmenté au cours du
second tour du 13 octobre. Les
électeurs, les jeunes en particulier,
ont placé massivement leur espoir
dans les acteurs politiques non
conventionnels, y compris le
nouveau Président de la République,
pour relancer la transition politique
et stimuler la reprise économique du
pays. Le résultat des élections a
reflété, à bien des égards, la
désillusion du peuple tunisien vis-à-
vis des institutions politiques
existantes, et l'impatience populaire
face à l'incapacité de l'État à produire
un progrès économique tangible, à
protéger les droits fondamentaux des
citoyens et à lutter à tous les niveaux
contre la corruption.
Les Tunisiens sont, à juste titre, fiers
de leur rôle de catalyseur du
Printemps Arabe et de continuer à
servir de phare à la démocratie dans
la région. Afin de renforcer leur
transition démocratique et leurs
institutions , les nouveaux dirigeants






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tunisiens doivent prendre des
mesures concrètes pour démontrer
que la démocratie peut et doit
bénéficier au peuple, en renforçant
les institutions du pays, en
introduisant des réformes
économiques qui améliorent la vie
quotidienne des Tunisiens ordinaires
et en veillant à ce que
les institutions essentielles, telles que
la cour constitutionnelle, soient
mises en place, sans plus tarder, pour
garantir leurs libertés.
Le besoin urgent d’une cour
constitutionnelle est également
devenu évident avec le décès du
Président Essebsi, vu que c’est la
seule institution habilitée par la
constitution à déclarer une vacance
définitive. Néanmoins, une crise
constitutionnelle a été évitée lorsque
l'Instance provisoire de contrôle de la
constitutionnalité des projets de loi
(IPCCPL) est intervenue et a procédé
à un transfert pacifique du pouvoir
au président du Parlement, qui est
devenu président par intérim le jour
du décès du Président Essebsi.
Contexte
Depuis les élections de 2014,
la Tunisie a fait des progrès dans sa
transition démocratique, mais
en raison de l'absence de volonté
politique, de nombreuses réformes
essentielles nécessaires pour rompre
avec l'ancien régime et répondre aux
aspirations du peuple tunisien après
la transition vers la démocratie, ont
été bloquées. Le partenariat Nidaa-
Ennahda qui a caractérisé la vie
politique sous la première législature,
a été considéré par beaucoup de
parties comme inefficace. Leur
coalition au pouvoir s'est finalement
affaiblie et ils ont perdu la confiance
de bon nombre de leurs partisans.
Le premier Parlement n'a pas été en
mesure de mettre en place des
institutions essentielles qui
garantiraient les droits et libertés
individuels pour lesquels les
Tunisiens s'étaient battus, tel que la
Cour Constitutionnelle et les
instances constitutionnelles
indépendantes1. Les Tunisiens ont
été désillusionnés par les partis
politiques et la politique en général,
car ils ne voyaient aucun progrès
tangible. Beaucoup espéraient que
les élections de 2019 permettent le
lancement des réformes, tant
attendues.
La mort soudaine en juillet 2019 du
Président en exercice Mr Essebsi, a
radicalement changé la compétition
pour la présidence. Des
amendements à la loi électorale, qui
auraient interdit rétroactivement à
certains candidats de se présenter aux
élections, n'ont pas été adoptés car le
président ne les a pas promulgués
avant sa mort. Le calendrier électoral
a été considérablement avancé et
l'élection présidentielle a eu lieu
deux mois plus tôt que prévu. Ce
changement de séquence - couplé à
un environnement politique affecté
par des conflits entre les partis, y
compris des divisions internes au
sein de Nidaa Tounes, une crise
d'identité interne à Ennahda sur la
1 L’Instance de la bonne gouvernance et de
la lutte contre la corruption, l’Instance du
développement durable et des droits des
générations futures, l'Instance de la
communication audiovisuelle et l’Instance
des droits de l’Homme.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 9








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montée du
conservatisme dans certaines parties
de sa base, et
l’affaiblissement des partis de
gauche - a défini le contexte
des élections générales de 2019.
Cadre juridique
Le processus électoral en Tunisie est
régi par la constitution de 2014, la loi
électorale de 2014, la loi sur l'ISIE et
le décret-loi relatif à la liberté de la
communication audiovisuelle et
portant création d’une Haute
Autorité Indépendante de la
Communication Audiovisuelle
(HAICA). Le cadre
juridique national pour les élections
présidentielles et législatives est
généralement conforme aux normes i
nternationales et fournit une base
adéquate pour la conduite des
élections, conformément aux
instruments internationaux ratifiés
par la Tunisie ainsi qu'aux meilleures
pratiques
internationales. Néanmoins, certains
aspects du cadre juridique pourraient
être améliorés, notamment
l'établissement de délais définitifs et
adéquats pour les différentes étapes
du processus électoral; la révision
des règles relatives à la campagne, y
compris les plafonds de
Malgré le délai serré pour la tenue des élections,
l'ISIE et ses organes subsidiaires, les Instances
Régionales Indépendantes pour les Élections
(IRIE), ont rempli leurs fonctions en gérant
efficacement l'ensemble du processus.
2 Article 74 de la constitution tunisienne de
2014 ; Article 40 de la loi électorale.
10 | The Carter Center Rapport des élections
financement de la campagne et
les autres dispositions trop
restrictives relatives à
la campagne; la
clarification des dispositions de la loi
électorale qui accordent à l'ISIE le
pouvoir de modifier les résultats
préliminaires des élections en
s’appuyant sur les violations
signalées; et la révision
du découpage des circonscriptions
électorales et de l’utilisation du
parrainage des électeurs dans
le processus d'inscription
des candidats aux élections
présidentielles. Les efforts de
dernière minute du Parlement pour
modifier la loi électorale et
restreindre le droit de présenter les
candidatures à l'élection
présidentielle, ont été contrecarrés
lorsque le président n'a
pas promulgué la loi. Les
amendements adoptés n'étaient pas
conformes aux obligations
internationales de la Tunisie en
matière d'élections démocratiques et
auraient gravement restreint un droit
fondamental en matière de
participation politique, le droit des
citoyens tunisiens de se porter
candidats.
2
La gestion des élections
Malgré le délai serré pour la tenue
des élections, l'ISIE et ses organes
subsidiaires, les Instances Régionales
Indépendantes pour les Élections
(IRIE), ont rempli leurs fonctions en
gérant efficacement l'ensemble du
processus. En particulier,
l’administration des aspects







Page 11
opérationnels de l'élection a été gérée
d’une manière professionnelle.
Le processus électoral a été,
cependant, entaché par un manque de
transparence et marqué par l'échec de
l'ISIE à assurer une
communication efficace. L'ISIE n'a
tenu aucune réunion publique, ni
publié des procès-verbaux qui
reflètent leurs délibérations internes
et le processus de prise
de décision en temps
opportun, et, parfois, fait des annonc
es contradictoires au public. Bien
que l'ISIE ait géré la plupart des
aspects du processus
convenablement, son incapacité à
informer le public et les acteurs
électoraux des détails et de la
motivation de bon nombre de leurs
décisions, a réduit la confiance du
public dans le processus électoral.
Cela comprenait le défaut de
révélation des motifs pour lesquels
l’Instance a rejeté
plusieurs candidatures à
la présidence ; la non-divulgation
des informations sur les violations
des règles de la campagne
et les mesures adoptées en réponse à
ces infractions ; l’absence de
communication de comptes rendus
détaillés de ses réunions, ou
d'explication des modalités de prise
des décisions. L’absence d’une
stratégie de communication globale
a, parfois, conduit les membres
du conseil de l'ISIE à diffuser des
messages contradictoires.
3 Le 26 juin, le directeur des opérations de
l'ISIE a informé Centre Carter qu'il n'y avait
que 10 demandes de corrections.
Inscription des électeurs
Les efforts d'inscription des
électeurs ont été menés
conformément à la loi et de manière
efficace. L'ISIE a mené une
campagne d'inscription des électeurs,
vigoureuse et réussie, à l'approche
des élections de 2019, qui a abouti à
l'inscription de 1.455.898 nouveaux
électeurs sur un nombre estimé
de 3,5 millions d'électeurs potentiels,
portant le nombre total d'électeurs
inscrits à 7.074.655. L'ISIE a accordé
suffisamment de temps à l'inscription
des électeurs, et a affiché la liste
préliminaire des électeurs pour
permettre d’éventuelles réclamations
du public. Le public a pu demander
des corrections ou faire des
réclamations ou recours. L'ISIE
a informé le Centre Carter
qu'un nombre négligeable de
demandes de correction ont
été déposées auprès d’elle et
qu'aucun recours relatif à
l'inscription des électeurs n’a
été déposé auprès des tribunaux de
première instance.
3
L’éducation des électeurs
Les activités d'éducation
des électeurs établies par
l'ISIE étaient suffisantes, mais pas
exhaustives. Bien que les IRIE aient
élaboré une campagne significative
d’éducation des électeurs au cours
de la période d'inscription des
électeurs, la campagne de l'ISIE
relative à l'éducation des
électeurs, s’est limitée à informer les
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 11







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électeurs inscrits sur les procédures
de vote et à expliquer l'importance de
la participation des électeurs. Les
activités de la campagne comptaient
sur l'utilisation des médias
électroniques et de radiodiffusion
ainsi que sur les médias
imprimés. Les Organisations de la
Société Civile (OSC) ont indiqué
qu'ils ne disposaient pas des fonds
nécessaires pour mener une
campagne d'éducation
électorale significative, précédant le
jour de l'élection.
Les électeurs ont été affectés
à des bureaux de vote, à tous
les tours des élections, en
fonction de leur âge, De
nombreux bureaux de vote
ont été assignés aux
électeurs les plus âgés.
L’observation citoyenne
Dans l'ensemble, les organisations de
la société civile Tunisienne ont
participé activement à l'observation
des processus électoraux en 2019,
mais pas réédités les efforts fournis
pour les élections de 2014. Beaucoup
d’organisations ont souffert d'un
manque de financement, car les
élections présidentielles
anticipées et le calendrier serré pour
les trois élections, les ont empêchés
de mobiliser rapidement des fonds.
4
Cependant, ils ont effectué leur
travail de manière professionnelle
avec les moyens disponibles.
L’inscription des candidats
Élection présidentielle
L'enregistrement des candidats a été
effectué en temps opportun et d’une
manière professionnelle.
Cependant, le fait que l'ISIE n'ait pas
informé le public des raisons de
l'exclusion de certains candidats de
l'inscription
a eu un impact négatif sur la
transparence du processus. Le dépôt
des candidatures pour les élections
présidentielles a eu lieu du 02
jusqu’au 09 Août, sept jours après la
mort du Président Essebsi. Malgré
les délais serrés, le personnel de
l'ISIE a mis en œuvre les procédures
d’inscription et a informé les
candidats potentiels, d’une manière
professionnelle, de toute lacune dans
leur dossier de candidature. Quatre-
vingt-dix-sept candidats ont postulé,
dont 11 femmes. 26 candidatures ont
été approuvées et 71 ont été rejetées.
L'ISIE a publié la liste définitive des
candidats le 31 août, deux jours
seulement avant le début de la
campagne électorale. La liste finale
comprenait deux femmes.
L'ISIE n'a jamais fourni de
justification détaillée pour le rejet
des trois quarts des candidats
potentiels, même ceux qui avaient
déposé le nombre requis de
4 L'ISIE a accrédité environ 13 000 citoyens
observateurs pour le premier tour de
l'élection présidentielle. Ce nombre est passé
à 17 500 pour les élections législatives et à
plus de 17 500 pour le second tour de
l'élection présidentielle.
12 | The Carter Center Rapport des élections









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parrainages. Le fait de ne pas avoir
informé le public, d’une manière
complète, des raisons de l'exclusion
de nombreux candidats potentiels a
conduit le public à des spéculations
qui les ont menés à penser que les
refus étaient fondés sur des
considérations autres qu'une
application stricte de la loi et
sapaient la confiance du public
envers l'administration des élections.
Après que les organisations de la
société civile ont exhorté à le faire,
l'ISIE a introduit un service SMS
pour les électeurs afin de vérifier si
leurs noms figurent sur l'une des
listes des parrainages électoraux. Ce
service a permis de recueillir plus de
245 plaintes d'électeurs qui ont
déclaré que leurs parrainages avaient
été utilisés à leur insu.
5
Les élections législatives
Les Instances Régionales
Indépendantes pour les Élections
(IRIE) ont procédé à l'inscription des
candidats aux élections législatives
du 22 au 29 juillet. Le personnel de
l'IRIE était bien préparé et tous les
intervenants ont fait l'éloge de leur
professionnalisme et leur travail
acharné. Bien que la loi exige que
toutes les listes doivent alterner des
candidats masculins et féminins,
malheureusement, les femmes ont été
placées en tête de seulement 217 sur
un total de 1 506 listes. Le processus
d'inscription des candidats était
inclusif et géré de manière efficace et
professionnelle.

La campagne électorale
Les droits à la liberté d'expression et
de réunion ont été respectés dans tout
le pays pendant les périodes de
campagne pour les élections
présidentielles et législatives. À
l'exception du candidat à l’élection
présidentielle Nabil Karoui, qui est
resté en détention jusqu'au 9 octobre
et n'a donc pas pu mener
personnellement sa campagne
électorale, les candidats ont été
autorisés, lors des trois tours des
élections, à mener leurs campagnes
librement dans les limites de la loi
tunisienne qui est quelque peu
restrictive. Les médias sociaux ont
joué un rôle important dans la
campagne ; cependant, le manque de
responsabilisation concernant le
financement des campagnes sur les
réseaux sociaux a entaché le
processus. En outre, le manque de
clarté de la loi, concernant
l'utilisation des médias sociaux
comme outil de campagne et le
déficit, s’agissant de la définition des
règles garantissant l'égalité des
chances pour tous les candidats, a eu
un impact négatif sur la campagne.
Élection présidentielle, premier tour
Bien que la mort du président ait
entraîné une période de campagne
électorale raccourcie à deux
semaines, tous les candidats ont eu la
possibilité de se faire connaître aux
Tunisiens et de leur présenter leurs
programmes électoraux.
6
5 L'ISIE a annoncé qu'elle traiterait ces
plaintes ; cependant, elle n'a pris aucune
mesure à ce jour. Selon les médias, un juge
d'instruction a convoqué plusieurs candidats
pour les interroger à propos des parrainages
présumés frauduleux.
6 La détention de Karoui signifiait qu'il
n'était pas en mesure de mener une
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 13









Page 14
La campagne officielle pour les
élections présidentielles a commencé
le 2 septembre ; certains candidats
étaient des personnalités bien
connues, tandis que d'autres
relativement étaient nouveaux. La
campagne a été marquée par
l'absence d'un candidat, Nabil
Karoui, un homme d'affaires et
propriétaire de médias qui a été
emprisonné le 23 août pour évasion
fiscale et blanchiment d'argent. Bien
que Karoui n'ait pas pu mener une
campagne personnellement, à cause
de son emprisonnement, il est
demeuré une personnalité publique
de premier plan dans la couverture
par les médias sociaux et
traditionnels, et ses partisans ont
mené la campagne en son nom. Le
candidat le plus populaire au premier
tour était Kaïs Saïed, enseignant
universitaire en droit constitutionnel
et homme politique indépendant,
sans parti politique.
Les partis et les candidats ont également utilisé
d'autres stratégies de campagne, notamment des
affiches, des activités de porte à porte et les médias
sociaux (principalement Facebook).

La campagne a commencé lentement
dans tout le pays, avec
principalement des panneaux
d'affichage et des publicités sur les
réseaux sociaux apparus le premier
jour. Au cours de la deuxième
semaine, la campagne s'est
intensifiée. Le plus souvent, les
candidats ont organisé des
rassemblements, érigé des tentes de
campagne et distribué des brochures.
Les partis et les candidats ont
également utilisé d'autres stratégies
de campagne, notamment des
affiches, des activités de porte à
porte et les médias sociaux
(principalement Facebook). Les
candidats ont abordé des questions
de sécurité nationale et de politique
étrangère, qui relèvent des
prérogatives Présidentielles.
Cependant, certains candidats ont
également mené des campagnes sur
des questions qui dépassent les
prérogatives du Président.
Pour la première fois, la période de
campagne comprenait des débats
télévisés en direct. Trois séries de
débats ont été organisés sur trois
jours consécutifs, dont deux
comprenant neuf candidats et un
avec seulement huit. Deux candidats
n'ont pas participé, l'un d'eux étant en
détention (Nabil Karoui) et l’autre
(Slim Riahi) était à l'étranger.
L'ISIE a identifié environ 440
violations et a reçu plus de 20
plaintes concernant des infractions
aux règles de la campagne. Les
violations se sont principalement
concentrées sur la campagne
précoce, les activités de campagne
non déclarées, la pose d'affiches en
dehors des emplacements désignés et
l'utilisation d'enfants dans les
campagnes. Les observateurs à long
terme du Centre Carter ont confirmé
qu'il existait une atmosphère positive
entre les principaux partis politiques
dans différentes régions du pays,
même lorsqu'ils organisaient des
campagne personnellement ; cependant, ses
partisans ont mené une campagne en son
nom et il avait suffisamment de ressources
pour le faire.
14 | The Carter Center Rapport des élections






Page 15
Pour la première fois, la période de campagne comprenait des débats télévisés en direct.
Trois séries de débats ont été organisés sur trois jours consécutifs, dont deux comprenant
neuf candidats et un avec seulement huit.

événements de campagne le même
jour et dans la même zone. Aucun
incident majeur, altérant la sécurité,
n'a été signalé.
Les élections législatives du 6
octobre
La campagne pour les élections
législatives a commencé le 14
septembre, jour de silence électoral
pour la campagne des présidentielles,
et a duré 22 jours. Elle a été éclipsée
par les résultats du premier tour des
élections présidentielles, les électeurs
se concentrant davantage sur les
résultats du premier tour de scrutin et
le déroulement du deuxième tour des
élections présidentielles. De
nombreux candidats, indépendants
ou appartenant à des partis
politiques, ont violé les restrictions
imposées aux activités de campagnes
précoces.
La plupart des partis politiques
reconnus ont mis du temps à entamer
leur campagne pour les élections
législatives alors qu'ils évaluaient
leurs stratégies de campagne, tandis
que les listes indépendantes ont
rapidement mené leurs campagnes
pour profiter de l’élan antisystème
qui a émergé lors du premier tour de
l'élection présidentielle. Les partis
établis ont réévalué leur stratégie
d'organisation de grands
rassemblements et d'événements
publics, qui n'ont apparemment pas
réussi à influencer les électeurs lors
de la campagne pour les élections
présidentielles. Les observateurs à
long terme du Centre Carter ont
indiqué que la plupart des partis
avaient mené des campagnes
discrètes, distribué des brochures et
mené des activités de porte à porte.
Certains partis se sont concentrés sur
la communication via les réseaux
sociaux pour se rapprocher des
électeurs qui ont soutenu le candidat
à la présidentielle Kaïs Saïed. En
général, les listes indépendantes et
certains partis ont eu du mal à
financer leurs campagnes et ont
utilisé des fonds personnels.
Le deuxième tour des élections
présidentielles
La campagne pour le deuxième tour
a officiellement commencé le 3
octobre, le lendemain de l'annonce
par l'ISIE des résultats définitifs du
premier tour. Le candidat Kaïs Saïed
a annoncé qu'il ne ferait
pas
personnellement campagne car cela
créerait 1un avantage injuste sur son
adversaire, qui est resté en détention
jusqu'à sa libération le 9 octobre,
affirmant que c'était le comportement
« éthique » à adopter. En raison de la
détention de Nabil Karoui et du
caractère innovant et non
conventionnel de la campagne de
Saïed, les deux candidats à la
présidentielle étaient constamment
évoqués dans l'actualité et la
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 15









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Un homme trempe son
index dans l'encre lors
de l'élection
présidentielle, avant de
voter conformément
aux procédures de vote
établies par l'ISIE.
couverture médiatique n'a jamais
vraiment cessé. Les partisans de Kaïs
Saïed ont continué à mener la
campagne pour lui sur le terrain et
dans les réseaux sociaux.
Les observateurs à long terme du
Centre Carter ont indiqué que, bien
qu'aucun des candidats n'ait organisé
de grands événements de campagne
dans les régions, les volontaires,
engagés en faveur des deux
candidats, ont distribué des
brochures et se sont livrés à des
campagnes de porte à porte. La
plupart des activités de campagnes
ont eu lieu sur les réseaux sociaux.
Les partisans des deux candidats ont
tenu les derniers rassemblements à
Tunis le 11 octobre à l’avenue Habib
Bourguiba. Bien que les deux
groupes se soient mélangés, aucune
altercation n'a été signalée.
Le 11 octobre, la chaîne de télévision
publique a organisé un débat
historique avec Saïed et Karoui. Les
organisateurs ont sélectionné quatre
thèmes pour le débat : la défense et
la sécurité nationale, la politique
étrangère, les relations du Président
de la République avec le Parlement
et le chef du gouvernement et les
affaires publiques. Pour chaque sujet,
ils ont demandé aux candidats de
répondre à trois questions. Les
candidats ont eu du temps à la fin de
chaque thème pour étayer leurs
promesses électorales. Malgré les
efforts des modérateurs pour
encourager les candidats à interagir
l’un avec l’autre, ils se sont abstenus
de le faire.
Le vote et le dépouillement
Les trois jours des élections ont été
bien administrés et le vote s'est
déroulé dans un environnement
paisible et calme. Le vote et le
dépouillement ont été jugés
raisonnables ou excellents par les
observateurs du Centre Carter, dans
tous les bureaux de vote observés
pour les trois élections. Quelques
irrégularités mineures ont été
signalées, notamment le fait que le
personnel électoral n'a pas donné
16 | The Carter Center Rapport des élections






Page 17
Compilation des résultats
Le processus de compilation des
résultats des deux premiers jours des
élections a été entravé par l'arrivée
tardive du matériel électoral en
provenance des centres de vote, qui a
provoqué des retards importants. De
plus, les observateurs n'ont pas eu la
possibilité d'effectuer des
observations significatives dans les
centres de compilation des résultats,
car l’emplacement d'où ils ont été
contraints d'observer était loin des
activités menées, et ils n'ont pas eu
accès au personnel de compilation
des résultats afin de lui poser des
questions. Le processus de
compilation des résultats s’est
amélioré de manière significative
lors du second tour de l'élection
présidentielle, après que l'ISIE a
effectué une évaluation pour les
présidents, les coordinateurs, les
juristes et les administrateurs des 33
IRIE et a remédié à ces lacunes.
L'ISIE a mené une
campagne vigoureuse et
fructueuse d’inscription
des électeurs à l'approche
des élections de 2019,
aboutissant à l'inscription
de 1455898 nouveaux
électeurs.
d'instructions aux électeurs sur la
façon de voter, comme l'exige la
réglementation, lors du premier tour
des élections présidentielles. Les
électeurs, en particulier les personnes
âgées, ont eu du mal à voter lors des
élections législatives, en raison du
nombre de listes et de gros bulletins
de vote.

Le secret du vote a été respecté dans
une majorité écrasante des bureaux
de vote visités. Les observateurs de
Centre Carter n'ont signalé aucun cas
d'ingérence des représentants des
candidats, ou de citoyens
observateurs dans le processus de
dépouillement. Aucune plainte
officielle n'a été déposée dans les
bureaux de vote, où le Centre Carter
a observé.
Des représentants des candidats
étaient présents dans presque tous les
bureaux de vote observés lors du
premier tour de l'élection
présidentielle de septembre - 309 sur
un total de 317 bureaux de vote -.
Des représentants des candidats
Abdelfattah Mourou d'Ennahda,
Youssef Chahed de Tahya Tounes et
de Nabil Karoui de Qalb Tounes
étaient présents dans la majorité des
bureaux de vote observés. Des
représentants des partis étaient
présents dans 373 des 392 bureaux
de vote observés lors des élections
législatives, principalement ceux des
grands partis politiques. Les
observateurs de Centre Carter ont
noté une présence réduite des
représentants des candidats et
d'observateurs citoyens lors du
second tour de l'élection
présidentielle.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 17









Page 18
Le personnel a reçu une formation
supplémentaire sur l'utilisation d'une
application logicielle qui calcule
automatiquement les données au
niveau du centre de compilation des
résultats. L'armée a également
changé les itinéraires qu'elle utilisait
pour collecter et livrer le matériel
électoral aux centres de compilation
des résultats. Avec ces changements,
le personnel a mené le processus de
compilation des résultats de manière
plus efficace et transparente que lors
des deux élections précédentes. Les
centres de compilation des résultats
ont reçu le matériel électoral des
centres de vote plus rapidement et,
par conséquent, ont pu compiler les
résultats plus rapidement. Les
observateurs internationaux ont eu
un meilleur niveau d’accès au
processus et ont été mieux en mesure
de mener une observation
significative du processus dans la
plupart des centres de comptage.
7
Tout au long du cycle électoral, les
observateurs de Centre Carter ont
noté que les centres de compilation
des résultats différaient dans leurs
procédures de réception du matériel,
de compilation des résultats et
d’octroi de l’accès aux observateurs.
Le défaut de publication par l'ISIE de
règles détaillées relatives aux
procédures de compilation des
résultats est, en partie, responsable
de ces incohérences.
Règlement du contentieux
électoral
Malgré les délais serrés disposés par
la loi, le Tribunal Administratif
Tunisien a traité toutes les plaintes et
les contestations préélectorales en
temps opportun. Le tribunal a fait
preuve d'impartialité et de respect
d'une procédure régulière dans ses
décisions. Bien que les auditions se
soient déroulées de manière
ordonnée et que les avocats aient eu
la possibilité de présenter leurs
affaires, les plaideurs ont critiqué les
contraintes de temps comme
menaçant le droit de demander
réparation et l’examen par le juge.
8
Les avocats se sont plaints de
l'impossibilité de rassembler
suffisamment de preuves, pour
établir devant le tribunal que les
violations avaient affecté les résultats
électoraux d’une manière
substantielle et déterminante, dans
les délais raccourcis pour le dépôt
des recours.

Bien que l'article 124 de la loi
électorale permette aux représentants
des candidats et aux observateurs de
consigner leurs remarques sur le
déroulement du vote dans un
mémorandum obligatoirement joint
au procès-verbal de l’opération de
vote, la loi électorale ne permet pas
aux électeurs de porter plainte pour
d'éventuelles fraudes électorales ou
irrégularités, les privant ainsi de leur
droit à un recours effectif.
9 En outre,
7 Cela n'était pas le cas pour les observateurs
nationaux, qui ont continué à se heurter à
des obstacles faute d'accès suffisant pour
effectuer des observations significatives.
8 CDHNU, paragraphe 19 de l’observation
générale 32
9 PIDCP, paragraphe 20 de l’observation
générale 25 et la Déclaration de l'UA sur les
principes régissant les élections
18 | The Carter Center Rapport des élections









Page 19
les électeurs ne sont pas autorisés à
contester les résultats des élections
devant les tribunaux.
10
Les tribunaux judicaires de première
instance n'ont pas permis aux
observateurs du Centre Carter, dans
la majorité des cas, d'observer
pleinement les processus de
règlement des litiges électoraux. En
dépit de plusieurs demandes écrites
officielles, les observateurs n'ont
reçu aucune information sur les
litiges électoraux, n'ont pas été
autorisés à assister aux audiences
publiques, ni à recevoir des copies
des jugements.
11
Dans le même sens, l'ISIE a refusé
de fournir au Centre des informations
sur les litiges électoraux, ou de
partager des informations détaillées
sur les raisons pour lesquelles
plusieurs candidats avaient été
disqualifiés de la course à l’élection
présidentielle. En revanche, le
tribunal administratif a autorisé le
Centre à assister à toutes les
audiences et lui a parfois fourni des
copies électroniques de certaines
décisions, quoiqu’avec un certain
retard.
Le processus de règlement des litiges
électoraux par l’ISIE demeure
opaque. L'ISIE n'a pas partagé les
informations recueillies par ses 1,500
contrôleurs de campagne, ni annoncé
publiquement comment elle traiterait
des infractions électorales. Bien que
démocratiques en Afrique, section IV,
Article 7.
10 Nations unies, PIDCP, Article 2 ; Charte
Africaine de la Démocratie, des Elections et
de la Gouvernance, Article 17 (2)
11 L’article 252 du Code de procédure civile
et commerciale tunisien donne le droit à
les tribunaux n'aient pas
communiqué les recours ou les
décisions en temps opportun, ils ont
donné aux plaideurs la possibilité
d'être entendus et ont pris leurs
décisions dans le court délai qui leur
était imparti.
Les résultats
Le taux de participation aux élections
de 2019 a été décevant. Les élections
législatives ont enregistré un taux de
participation de 42,8%, soit une
baisse de plus de 26% par rapport
aux élections législatives de 2014,
tandis que le taux de participation au
premier tour de l'élection
présidentielle a baissé de sept points
par rapport à 2014. Le taux de
participation au deuxième tour est
passé à 56,3% ; cependant, le taux de
participation et le choix, par les
électeurs, de deux nouveaux
Les Tunisiens attendent
l'annonce des résultats des
élections après avoir
sélectionné deux
nouveaux venus dans le
monde de la politique
pour briguer la présidence
de la République, au
second tour.
toute personne qui en fait la demande,
d'obtenir des copies des décisions de justice.
Le Centre a adressé plusieurs demandes
officielles en ce sens au Conseil Supérieur
de la Magistrature et aux tribunaux.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 19








Page 20
arrivants en politique pour la
compétition pour le siège de
Président de la République lors du
second tour, suggèrent que les
électeurs tunisiens n'étaient pas
satisfaits des réalisations des partis
politiques, qui les représentaient au
Parlement, et de leur incapacité à
réaliser les objectifs de la Révolution
et les aspirations des citoyens depuis
les élections de 2014.
Alors que l’atmosphère entourant les
élections était largement ouvert et
compétitif, les élections législatives
ont engendré un Parlement émietté,
où aucun parti n'a remporté
suffisamment de sièges pour former
un gouvernement. En outre, plusieurs
partis qui avaient excellé en 2014 ont
perdu la majorité de leurs sièges et
certains n'ont remporté aucun siège.
12 Avec l'élection d'un Parlement
plus diversifié sur le plan politique et
d'un nouveau Président, il est
essentiel que les dirigeants politiques
tunisiens travaillent ensemble pour
trouver des solutions inclusives aux
défis politiques et économiques
difficiles du pays qui ont été à
l'origine de la Révolution de 2011.

L’élection présidentielle du 15
septembre
Deux candidats « outsiders », Kaïs
Saïed et Nabil Karoui arrivent en tête
du premier tour
de l'élection
présidentielle, parmi les 26
candidats. Kaïs Saïed s'est classé
premier avec 18,4% des voix et
Nabil Karoui deuxième avec
15,58%. Plusieurs politiciens
expérimentés n’ont pas pu parvenir
au deuxième tour, dont le vice-
président et candidat officiel
d’Ennahda, Abdelfattah Mourou, qui
s'est classé troisième avec 12,88%, le
ministre de la Défense Abdelkarim
Zbidi, un indépendant qui a été
appuyé par Nidaa Tounes et Afek
Tounes, s’est classé quatrième avec
10,73%, et Youssef Chahed,
président de Tahya Tounes et Chef
du gouvernement, a obtenu la
cinquième place avec 7,38%. L’ISIE
a annoncé un taux de participation de
49,8%.
L’élection législative
Bien qu'Ennahda ait remporté le plus
grand nombre de sièges - 52 sur un
total de 217 - ce résultat représente
une baisse constante par rapport aux
89 sièges remportés par le parti lors
des élections à l'Assemblée
Nationale Constituante de 2011 et
aux 69 sièges obtenus aux élections
parlementaires de 2014. Sa victoire
était moins due à sa popularité,
qu'aux divisions entre les partis
laïques. Le parti de Nabil Karoui,
Qalb Tounes, s'est classé deuxième
avec 38 sièges.
Nidaa Tounes, le parti de l'ancien
Président Béji Caïd Essebsi, s'est
pratiquement effondré,
principalement en raison de ses
divisions continues depuis 2014. Il
n'a remporté que trois sièges. En
outre, les différents partis issus de la
division de Nidaa Tounes ont soit
obtenu très peu de sièges (Machrou’
Tounes a obtenu quatre sièges) ou
aucun (Amal Tounes). Tahya
Tounes, qui est le parti du Chef du
12 Seize partis politiques, quatre coalitions et
11 listes indépendantes sont désormais
représentés au Parlement. Sur un total de 16
partis politiques, 7 sont nouveaux.
20 | The Carter Center Rapport des élections









Page 21
gouvernement et une ramification de
Nidaa Tounes, a remporté 14 sièges.
Le parti destourien libre d'Abir
Moussi a considérablement
progressé, passant de zéro siège en
2014 à 17 sièges. La rhétorique
radicale anti-Ennahda, adoptée par le
parti et son discours élogieux pour la
situation socioéconomique sous le
régime de Ben Ali, semblent avoir
attiré des électeurs nostalgiques de la
stabilité passée du pays. Al Tayyar
Al Dimokrati (Courant
démocratique) de Mohamed Abbou a
remporté 22 sièges et s’est classé
troisième, ce qui constitue un progrès
par rapport à 2014, quand il n'avait
remporté que trois sièges.
Les élections législatives ont
également induit l’émergence de
nouveaux acteurs politiques tels que
la coalition El Karama et le
mouvement panarabe Harakat
Echaab. Seize partis politiques, dont
trois n'ont remporté qu'un seul siège ;
quatre coalitions, dont deux n'ont
remporté qu'un seul siège ; et 11
indépendants ont été élus au
Parlement.
Le deuxième tour des élections
présidentielles

La réussite réalisée par Saïed et
Karoui au second tour de l’élection
présidentielle reflète le rejet par les
électeurs des partis politiques
traditionnels tunisiens. Les deux
étaient perçus comme des candidats
antisystème et apolitiques. Saïed a
mené une campagne non
traditionnelle et a, parfois, déclaré
qu'il ne dirigerait pas
personnellement sa campagne parce
que son adversaire était demeuré en
détention jusqu’à la veille des
élections. Karoui a été libéré de
prison le 9 octobre, le jour de
l'annonce des résultats préliminaires
des élections législatives, et
seulement deux jours avant la fin de
la période de la campagne du
deuxième tour des élections
présidentielles.
Saïed a remporté une victoire
catégorique au deuxième
tour, récoltant 72,71% des voix
contre 27,29 % pour Karoui. Le taux
de participation a augmenté en
passant de 49,8 % au premier tour à
56,3 % pour le deuxième tour.
Recommandations
Afin d'améliorer le processus
électoral pour les futures élections, le
Centre Carter recommande au
Parlement les actions suivantes : (1)
Agir rapidement pour établir la Cour
Constitutionnelle et les Instances
indépendantes mandatées par la
constitution; (2) Effectuer une
révision transparente et inclusive du
découpage des circonscriptions
électorales à tous les niveaux des
élections, et (3) Amender et
harmoniser la loi électorale en se
basant sur les enseignements tirés
des élections de 2018 et de 2019.
Le Centre recommande à l’ISIE : (1)
d'accroître la transparence dans tous
les aspects de ses travaux ; (2) de
définir plus en détail la structure
précise de l'institution, y compris les
responsabilités de l’administration
exécutive vis-à-vis du conseil ; et (3)
d’accroitre les campagnes
d'éducation des électeurs à travers
une meilleure coordination et
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 21









Page 22
coopération avec les organisations de
la société civile.
En outre, le Centre recommande au
pouvoir judiciaire : 1) d'augmenter
les ressources consacrées aux enjeux
liés aux élections ; (2) d’être plus
transparent en rendant publics, en
temps opportun, à la fois les recours
et les jugements liés aux élections ;
et (3) de réduire le nombre d'affaires
rejetées pour des motifs de forme et
de procédure en fournissant des
guides de procédures, une formation
aux avocats et en créant des modèles
des plaintes électorales à déposer.
Une description détaillée des
recommandations du Centre Carter
se trouve dans la dernière section de
ce rapport.
22 | The Carter Center Rapport des élections











































































Page 23
Le Centre Carter
en Tunisie

Le Centre Carter a procédé à une
évaluation en mars 2011, quelques
mois après la destitution du président
Ben Ali, et a ouvert ses bureaux en
Tunisie peu de temps après. Au cours
d’une période de huit ans, le Centre a
mis en œuvre une grande variété de
programmes, notamment en
effectuant un suivi politique et
électoral à long terme, en évaluant la
période d'élaboration de la
Constitution et en fournissant une
assistance technique aux principaux
partenaires de la société civile sur
des questions connexes. Les travaux
les plus récents du Centre focalisent
sur l'évaluation de la participation
électorale des femmes et des jeunes
dans les zones marginalisées, à
travers une recherche qualitative,
l'élaboration de recommandations
pour une meilleure sensibilisation
des électeurs et l'engagement des
jeunes dans le travail des conseils
municipaux nouvellement élus dans
les régions.
Le Centre a commencé ses activités
avant les élections de l’Assemblée
nationale constituante en 2011.
L'ISIE a invité le Centre à observer
les élections et a délivré des
accréditations à son équipe
d'observateurs. Après l'élection,
Centre Carter est resté en Tunisie
pour suivre le processus de rédaction
de la Constitution et les
développements liés à la mise en
La délégation d'observation
électorale du Centre Carter
avant les élections
présidentielles de 2019.
Depuis 2011, le Centre a mis
en œuvre une grande
variété de programmes en
Tunisie.
place de cadres institutionnels et
légaux pour les élections ultérieures.
Le Centre a évalué ces processus par
rapport aux lois nationales de la
Tunisie et aux obligations prévues
par les traités internationaux ratifiés
par la Tunisie et a émis de fréquentes
recommandations publiques depuis
2012 jusqu'à l'adoption de la
Constitution en 2014 pour aider à
aligner davantage la Constitution et
la législation électorale sur les
obligations internationales de la
Tunisie en matière de droits civils et
politiques.
Le Centre a, de nouveau, mené une
mission d'observation internationale
pour les élections présidentielles et
législatives de 2014, surveillant le
processus d’inscription des électeurs
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 23

















Page 24
et les élections législatives et
présidentielles en octobre, novembre
et décembre. Malgré de légères
irrégularités et des préparatifs
simples, les élections législatives et
présidentielles ont été paisibles,
ordonnées et transparentes. La
mission a adressé plusieurs
recommandations au Parlement, à
l'ISIE et aux partis politiques. Deux
recommandations clés ont été
adoptées pour les élections
municipales : l'octroi du droit de vote
au personnel militaire et de sécurité
lors des élections municipales pour
promouvoir l’extension du suffrage
universel, et l’amendement de la loi
électorale pour aider à promouvoir la
représentation des femmes à travers
le processus de composition des
listes de candidats, contribuant ainsi
à soutenir les objectifs ambitieux de
la Constitution pour l'égalité entre les
sexes.
Durant la période entre les élections,
le Centre a continué à renforcer ses
partenariats avec les organisations de
la société civile et à promouvoir les
principales réformes électorales. Le
Centre et ses partenaires ont fourni
des recommandations conjointes
relatives à la mise en œuvre de la
législation pour les élections
municipales. Avant les élections
municipales, le Centre a fourni une
Le Centre a soutenu l'engagement des jeunes dans le
travail des conseils municipaux élus dans huit
circonscriptions municipales, encourageant une plus
grande implication civique au service du public.
24 | The Carter Center Rapport des élections
assistance technique aux ONG
nationales pour professionnaliser leur
capacité à mener une observation
électorale à long terme.
Le Centre Carter
a également organisé des groupes de
discussion pour comprendre le
comportement électoral et formuler
des recommandations sur la façon
d'améliorer la sensibilisation et la
participation des électeurs. Ce travail
a été motivé par une baisse imprévue
de la participation électorale en
2014. Bien que les électeurs
potentiels aient participé à
l'inscription sur les listes électorales
volontairement et proactivement, ils
se sont abstenus de voter par la
suite. Dans le cadre de cette activité,
le Centre a formé les membres des
OSC partenaires à l'analyse
qualitative, aux techniques de
facilitation et à la méthodologie des
groupes de discussion. Les travaux
du Centre ont offert un aperçu
approfondi du comportement
électoral des femmes et des jeunes et
ont servi de base aux
recommandations partagées avec
l'ISIE en décembre 2018, avant le
début de sa campagne d'inscription
des électeurs en avril 2019. Ces
recommandations ont également été
partagées directement avec les partis
politiques.
Les résultats de la recherche
élaborée par Centre Carter, qui a mis
en évidence la nécessité d’une
éducation civique et d’un
engagement accru des jeunes dans la
vie publique, ont alimenté son
programme de suivi. L'an dernier, le





Page 25
Centre a soutenu l'engagement des
jeunes dans le travail des conseils
municipaux élus dans huit
circonscriptions municipales,
encourageant une plus grande
implication civique au service du
public.
Durant la période entre les élections,
le Centre a continué de suivre les
travaux du Parlement relatifs à la
mise en œuvre de la Constitution de
2014. Le Centre a publié des
déclarations publiques sur
d'importantes questions
constitutionnelles et électorales,
notamment la nécessité
d’implémenter le Conseil Supérieur
de la Magistrature et la Cour
Constitutionnelle.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 25









































































Page 26
La méthodologie
d'observation électorale

Les missions d’observation du
Centre en Tunisie avaient pour
objectif de fournir une évaluation
impartiale de la qualité globale du
processus électoral, de promouvoir
un processus inclusif pour tous les
Tunisiens et de manifester leur
soutien à la transition démocratique
du pays. Le processus électoral a été
évalué à la fois par rapport au cadre
juridique en Tunisie et aux
obligations internationales assumées
par la Tunisie dans le but de réaliser
de véritables élections
démocratiques. Les missions
d'observation de Centre Carter sont
menées conformément à la
Déclaration de principes pour
l'observation internationale des
élections et au code de conduite
adopté sous l’égide des Nations
Unies en 2005 et actuellement
approuvé par plus de 55
organisations.
La Tunisie a signé et ratifié un
certain nombre de traités
internationaux et régionaux dont les
dispositions sont pertinentes pour le
processus électoral. Il s'agit
notamment du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques
(PIDCP), du Pacte international
relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels (PIDESC), de la
Convention sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination
raciale (CEDR), de la Convention
sur l'élimination de toutes les formes
Dan Richardson et
Wyatt Schierman,
assistants de
mission, utilisant le
logiciel open source
de collecte de
données du Centre,
ELMO, pour
soumettre leurs
observations.
26 | The Carter Center Rapport des élections


















Page 27
de discrimination à l'égard des
femmes (CEDAW), la
Convention contre la torture et autres
peines, ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants (CAT), la
Convention relative aux droits des
personnes handicapées et la Charte
africaine des droits de l'homme et
des peuples (CADHP).
La mission de Centre Carter
consistait en une équipe centrale
Traité / Déclaration
Pacte international relatif aux droits civils et politiques
Statut
Ratifié
An
18 mars 1969
La Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale
Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels
La Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination à l'égard des femmes
Ratifiée
13 janvier 1967
Ratifié
18 mars 1969
Ratifié
20 septembre 1985
La Convention sur les droits politiques de la femme
Adhéré *
24 janvier 1968
La Convention relative aux droits de l'enfant
La Convention des Nations Unies contre la corruption
Ratifiée
Ratifiée *
30 janvier 1992
23 septembre 2008
La Convention des Nations Unies relative aux droits des
personnes handicapées
La Convention internationale pour la protection de
toutes les personnes contre les disparitions forcées
Ratifiée
02 avril 2008
Ratifiée
29 juin 2011
La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples
Ratifiée
16 mars 1983
La Convention de l’Union Africaine sur la Prévention et
la Lutte contre la Corruption
Protocole à la Charte africaine des droits de l'homme et
des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique
Signé
27 janvier 2013
Ratifié / Adhéré
30 janvier 2015
La Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et
de la Gouvernance
Signée
27 janvier 2013
La Charte Arabe des droits de l'Homme
Signée
24 mai 2004
La Convention de Vienne sur le Droit des Traités
Ratifiée / Adhéré
23 juin 1971
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 27



Page 28
ainsi que des rapports spécialisés sur
les rassemblements de campagne et
d'autres incidents selon les besoins.
L'équipe centrale du Centre et les
observateurs à long terme ont
rencontré des responsables de
l'administration électorale et du
personnel technique aux niveaux
central et régional, ainsi que des
partis politiques, des organisations
de la société civile, des prestataires
d'assistance technique, des missions
internationales d'observation des
élections et d'autres parties prenantes
clés dans le processus électoral pour
se renseigner sur la préparation des
élections et suivre son déroulement.
L'équipe a suivi les développements
politiques et électoraux au cours des
mois précédant les élections. Sur la
base des évaluations des
observateurs à long terme et de
l'analyse de l'équipe centrale, le
Centre a publié le 9 septembre une
déclaration préélectorale sur
l'inscription des électeurs et des
candidats ainsi que sur d'autres
aspects de la préparation des
élections.
Le Centre Carter a mené une série de
trois missions d'observation à court
terme pour observer les élections
législatives et les deux tours de
l'élection présidentielle. Les
délégations d'observateurs à court
terme étaient composées de militants
de la société civile, de responsables
électoraux, d'experts universitaires,
de spécialistes électoraux et d'autres
représentants de la région du Moyen-
Orient / Afrique du Nord et au-delà.
d’experts basée à Tunis et était
dirigée par un directeur de mission et
un représentant au pays qui a
également servi d’analystes
politiques pour la mission. L'équipe
de base était composée d'une équipe
multinationale d'experts, dont un
responsable de la sécurité et des
opérations, un analyste juridique, un
analyste électoral, un coordonnateur
des observateurs et deux experts de
l’observation des médias sociaux. À
la mi-juillet, ils ont été rejoints par
16 observateurs à long terme, qui ont
aidé à observer les préparatifs dans
27 circonscriptions électorales à
l’intérieur du pays.
Des observateurs à long terme ont
été déployés en équipes de deux dans
tout le pays le 22 juillet après avoir
reçu trois jours de formation sur
l'environnement électoral, juridique
et politique actuel en Tunisie, leurs
rôles et responsabilités, les exigences
en matière de rapports, les normes
électorales démocratiques
internationales, le rôle des droits de
l'homme dans l'observation des
élections et la sensibilisation à la
sécurité. Des équipes ont été
déployées à Sousse, Gafsa, Sfax,
Bizerte, Tunis, Beja, Nabeul et
Médenine. En partant de ces centres,
les observateurs à long terme ont
couvert une zone de responsabilité
assignée qui comprenait de trois à
quatre gouvernorats par équipe. Tous
les observateurs, à long terme,
parlaient le Français ou l’Arabe et
ont été déployés avec un traducteur /
interprète pour soutenir leur travail.
Les observateurs à long terme ont
soumis des rapports écrits à l'équipe
centrale sur une base hebdomadaire
28 | The Carter Center Rapport des élections



Page 29
Les observateurs à
long terme Maria
Laura Salich (Espagne)
et Jean Louis Ouraga
(Côte d 'Ivoire),
briefent les
observateurs à court
terme avant leur
déploiement.
Les observateurs à court terme ont
reçu une formation avant leur
déploiement sur la dynamique
électorale, politique et sécuritaire en
Tunisie ainsi que sur la méthodologie
d'observation de Centre Carter, le
code de conduite des observateurs,
les outils de collecte de données
électroniques et les protocoles de
sécurité. Les observateurs ont utilisé
le logiciel open source du Centre,
relatif à l’observation des élections
(ELMO) pour collecter les données
des bureaux de vote, en temps réel.
Le Centre a déployé 90 observateurs
pour le premier tour de l'élection
présidentielle. Les observateurs ont
visité 317 bureaux de vote et les 27
centres de compilation des résultats
en Tunisie. La mission a été
codirigée par Mr Salam Fayyadh,
ancien Premier ministre de Palestine,
et M
me Tana de Zulueta, ancienne
parlementaire italienne. Plus de 30
nationalités étaient représentées dans
la délégation. Le Centre a présenté
ses conclusions préliminaires lors
d'une conférence de presse tenue le
17 septembre 2019.
Au cours des élections législatives, le
Centre a déployé 90 observateurs qui
ont visité 392 bureaux de vote ainsi
que tous les centres de compilation
des résultats du pays. La mission
était codirigée par M
me Tana de
Zulueta et M
me Karen AbuZayd,
commissaire de la Commission
d'enquête indépendante sur la
République Arabe Syrienne. La
délégation représentait plus de 30
pays. Le Centre a présenté ses
conclusions préliminaires sur
l'élection législative, lors d'une
conférence de presse le 8 octobre
2019.
Lors du deuxième tour de l'élection
présidentielle tenu le 13 octobre, le
Centre a déployé plus de 80
observateurs, qui ont visité 337
bureaux de vote ainsi que les 27
centres de compilation des résultats
du pays. Mr Salam Fayyadh dirigé, à
nouveau, la délégation du Centre
pour évaluer la troisième et dernière
étape du processus électoral. Le
Centre a présenté ses constatations
préliminaires lors d'une conférence
de presse tenue le 10 octobre 2019.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 29



Page 30
Contexte politique
Neuf ans après la Révolution du
Jasmin, la Tunisie reste dans un état
de transition perpétuelle, qui prendra
probablement des années à s'achever.
Les institutions politiques du pays,
remodelées en vertu de la
Constitution de 2014 pour former
une république démocratique
représentative semi-présidentielle,
sont jeunes et l’équilibre des
pouvoirs entre les trois autorités
institutionnelles demeure fragile.

Les élections présidentielles et
législatives de 2019 représentent la
première transmission de pouvoir
dans le pays, d'un président
démocratiquement élu à un autre, et
du premier parlement
démocratiquement élu sous la
Deuxième République à un
deuxième parlement
démocratiquement élu, l'Assemblée
des Représentants du Peuple (ARP).
Les élections législatives et
présidentielles se sont déroulées dans
le contexte d'un paysage politique
turbulent, caractérisé par cinq années
de conflits internes au sein des
principaux partis politiques, de
coalitions gouvernementales faibles
et un processus de transition
interrompu. Il n'y a pas eu de
consensus politique pour mettre en
œuvre les réformes indispensables.
L’alliance entre Nidaa et Ennahda
qui a marqué la vie politique au sein
du premier parlement
démocratiquement élu a été jugé
inefficace par beaucoup de citoyens.
Cette alliance a été l'une des causes
de l'implosion et de la disparition
Chronologie des principaux événements politiques récents en Tunisie
31 décembre 2014 Beji Caïd Essebsi a prêté serment en tant que Président de la République.
5 janvier 2015 Le président Caïd Essebsi nomme Habib Essid à la tête du gouvernement.
2 juin 2016 Le président Caïd Essebsi discute de la formation d'un gouvernement d'union nationale, conduisant à
l'accord de Carthage 1.
30 juillet 2016 Le Parlement retire sa confiance au Chef du Gouvernement Habib Essid et à son gouvernement.
3 août 2016 Le président Caïd Essebsi charge Youssef Chahed de former un nouveau gouvernement.
6 mai 2018 Premières élections municipales démocratiques.
15 septembre 2018 Le Chef du Gouvernement Youssef Chahed est suspendu du parti de Nidaa Tounes.
18 juin 2019 Le Parlement adopte des amendements controversés à la loi électorale.
25 juillet 2019 Décès du président Caïd Essebsi. Le président du Parlement, Mohamed Ennaceur, a prêté serment en
tant que Président par intérim.
15 septembre 2019 Premier tour de l'élection présidentielle.
6 octobre 2019 Élection législative.
13 octobre 2019 Deuxième tour de l'élection présidentielle.
23 octobre 2019 Kaïs Saïed prête le serment en tant que deuxième président, démocratiquement élu, de la Tunisie.
30 | The Carter Center Rapport des élections

















Page 31
éventuelle du parti du président Caïd
Essebsi, Nidaa Tounes, et a
également provoqué des tensions au
sein d'Ennahda. Leur alliance a
également été perçue par les
partisans des deux partis comme une
trahison, dont les effets se reflètent
dans les résultats des élections
législatives de 2019.
Le premier parlement n'a pas pu
mettre en place les institutions
essentielles destinées à garantir les
droits et libertés individuels pour
lesquels les Tunisiens s'étaient battus
pendant la Révolution. La
constitution prévoyait
l’établissement de la cour
constitutionnelle dans l'année suivant
les élections législatives de 2014,
mais le Parlement n'a jamais pu se
mettre d'accord sur ses quatre
candidats. Cinq ans plus tard, la Cour
n'a pas encore été formé. Les
événements de 2019, à commencer
par le décès du Président de la
République, ont reflété la nécessité
absolue de mettre en place une telle
institution. De même, le premier
parlement démocratiquement élu de
Tunisie n’a pas réussi à mettre en
œuvre plusieurs autorités
constitutionnelles indépendantes.
La pratique politique sous la
Deuxième République tunisienne
reflétait une volonté de mettre en
œuvre une centralisation du pouvoir
auprès de la présidence de la
République, qui a été plus grande
que ne le permet la Constitution. Le
président de la République a
sélectionné à plusieurs reprises des
politiciens qui n'avaient pas un solide
soutien des partis politiques pour
servir en tant que Chef du
Gouvernement, ce qui lui a permis de
garder le contrôle sur les affaires de
l'État. Le pouvoir exécutif contrôlait
l'agenda parlementaire en soumettant
des projets de lois pour un examen
urgent. Les représentants du peuple
n'avaient guère le temps de réviser la
myriade d'anciennes lois autoritaires
pour s'assurer qu'elles étaient
conformes à la Constitution de 2014.
La politique politicienne dominait la
conduite des affaires de l'État et de
nombreuses réformes urgentes -
telles que la restructuration de
l'administration, la réforme du
secteur de la sécurité, la lutte contre
la corruption et la mise en œuvre de
réformes économiques sérieuses -
n'ont pas été abordées.
Les Tunisiens sont désillusionnés par
l’action des partis politiques et la
politique en général parce qu'ils ne
voyaient aucun avantage tangible du
nouveau système démocratique qu'ils
avaient adopté. La liberté
d'expression qu'ils avaient acquise et
à laquelle ils étaient si attachés dans
les quelques années qui ont suivi la
Révolution, semblait moins
importante que la nécessité de
trouver un emploi et de nourrir leur
famille. Les Tunisiens en général, et
les jeunes, en particulier, espéraient
que les élections législatives et
présidentielles de 2019 amorceraient
les changements attendus.
De nombreux partis politiques qui
ont dominé la scène politique et les
élections de 2014 ont subi des revers
dans les années qui ont suivi. Le
parti de Nidaa Tounes, victorieux
aux élections législatives de 2014 et
parti du Président de la République,
s'est divisé. Plus de la moitié de ses
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 31



Page 32
Cette mère
tunisienne a
emmené sa
fille aux urnes,
transmettant
fièrement
l'importance
du vote.
Parlement et a prévu une interdiction
aux dirigeants d'organisations
caritatives et aux propriétaires
d’institutions médiatiques de
présenter leurs candidatures. En
outre, le projet de loi a chargé l'ISIE
de contrôler toutes les candidatures
et d'interdire celles de quiconque
ayant rétroactivement fait des
déclarations contre les valeurs
démocratiques ou l’Etat de droit, ou
ceux qui ont fait l’apologie de
l'ancien régime. Le Parlement a
adopté le projet de loi le 18 juin par
une large majorité.
Certains représentants des partis
politiques ont affirmé que
l'amendement visait à garantir des
conditions de concurrence équitables
entre les candidats des partis et les
indépendants. Cependant, le
calendrier et le contenu des
amendements semblaient viser des
candidats potentiels spécifiques et
auraient gravement restreint un droit
fondamental de participation
politique, le droit des citoyens
tunisiens de se porter candidats à des
élections.
13
L'amendement proposé aurait interdit
les candidatures d’un propriétaire de
médias Mr Nabil Karoui de Qalb
Tounes, celle de Mme Olfa Terras
d'Ich Tounsi (qui aurait été éliminée
en raison de l’activité caritative de
son organisation et des avantages
politiques perçus de la publicité
politique) et la candidature d'Abir
Moussi du Parti Destourien Libre
(qui aurait été éliminé pour son
apologie de l'ancien régime). Au
moment où les amendements ont été
représentants de peuple ont choisi de
quitter le parti, le privant d'une
majorité parlementaire. Certains de
ses membres fondateurs sont partis et
ont formé leurs propres partis, tandis
que d'autres loyalistes se sont alliés à
d'autres partis. La Coalition du Front
populaire, acteur principal du
Parlement, s'est également divisée.
Cela a conduit à la création du parti
du Front populaire et, séparément, de
la Coalition du Front. Vers la fin de
la période préélectorale, Ennahda a
également souffert de différends
internes concernant la nomination
d'un candidat à la présidence de la
République et l'intervention du chef
du parti pour placer des candidats qui
lui étaient étroitement liés en tête des
listes du parti pour les élections
législatives.
En juin 2019, le gouvernement a
proposé un amendement à la loi
électorale qui aurait introduit un seuil
de trois pour cent par circonscription
pour chaque parti politique, ou liste
indépendante, qu’il fallait atteindre
pour pouvoir postuler à un siège au
13 Articles 34 et 74 de la Constitution de
2014 ; Article 40 de la loi électorale.
32 | The Carter Center Rapport des élections



Page 33
adoptés, Karoui, Terras et Moussi
étaient en progression constante dans
les sondages d'opinion.
Cinquante et un députés ont déposé
un recours auprès de l'Instance
Provisoire de Contrôle de
la Constitutionnalité des Projets de
Loi (IPCCPL) contestant la
constitutionnalité des amendements.
14 Les amendements ont été jugés
constitutionnels par l'IPCCPL, bien
qu'elle n'ait jamais publié la décision
officielle expliquant ses motifs.
Conformément à l'article 81 de la
Constitution, le président promulgue
les lois et les publie au Journal
officiel dans les quatre jours suivant
une décision relative à leur
constitutionnalité. Il a également la
possibilité de renvoyer un projet de
loi au Parlement peut renvoyer le
projet à l’Assemblée pour une
deuxième lecture accompagné d’une
motivation de ses objections. Le
Président Béji Caïd Essebsi n'a pas
signé le projet de loi, ni l’a renvoyé
au Parlement pour une deuxième
lecture. Le conseiller politique du
Président, Noureddine Ben Ticha, a
publié un communiqué déclarant que
"le Président n’a pas promulgué la
14 En vertu de l'article 18 de la loi relative à
l'Instance Provisoire de Contrôle de
la Constitutionnalité des Projets de Loi, 30
députés peuvent saisir l’Instance pour
contester la constitutionnalité d'un projet de
loi avant que le président ne le promulgue.
Sur les 51 députés qui ont contesté le projet
de loi, 21 étaient de Nidaa Tounes, cinq du
Bloc démocrate, cinq du Bloc allégeance à
la Patrie et 20 non affiliés aux blocs
parlementaires.
15 https://www.tap.info.tn/en/Portal-
Politics/11657744--president-of.
16 https://www.tap.info.tn/en/Portal-
Politics/11660746-failure-to-pass;
loi car il rejette la logique
d’exclusion et des amendements
taillés sur mesure pour certains"
candidats. Il a souligné, à cet égard,
que le Président de la République est
le garant de la Constitution de 2014
et de l'organisation d'élections libres
et transparentes.
15 Par conséquent,
les amendements ne sont jamais
entrés en vigueur et n'ont pas été
appliqués lors des élections de 2019.
De nombreux juristes et partis
politiques ont fait valoir que les
actions du président étaient
inconstitutionnelles, car l'article 81
dispose que le Président « doit »
signer la loi ou la renvoyer au
parlement pour une deuxième
lecture.
16 Par conséquent, certains
ont confirmé que les amendements
devraient être considérés comme des
lois indépendamment du refus du
Président de les promulguer. Le
président par intérim Mohamed
Ennaceur a ignoré les appels à
promulguer la loi après la mort du
président.
L'élection présidentielle de 2019 était
initialement prévue pour le 17
novembre, après l'annonce des
résultats définitifs de l'élection
https://www.businessnews.com.tn/mohsen-
marzouk--bce-a-viole-la-constitution-
,520,89504,3;
https://www.tunisienumerique.com/tunisie-
audio-ennahdha-appelle-a-adopter-la-
nouvelle-loielectoralesans-attendre-sa-
promulgation-par-
bce/;https://www.businessnews.com.tn/bce-
loi-electorale-- mohamed-abbou-demande-
lintervention-duprocureur-de-la-
republique,520,89519,3;
https://www.espacemanager.com/le-projet-
damendement-de-la-loi-electorale-
definitivemententerre.html (Tous les liens
sont consultés le 15 avril 2020)
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 33





Page 34
législative, qui devait avoir lieu le 6
octobre. Cependant, après le décès de
Béji Caïd Essebsi durant l'exercice
de ses fonctions le 25 juillet, le
président du Parlement a prêté
serment en tant que président par
intérim, et la date des élections pour
la magistrature suprême a été
avancée au 15 septembre,
conformément au mandat de 90 jours
prévu par la Constitution pour le
Président par intérim. Malgré
l'absence d'une Cour
Constitutionnelle, seul organe ayant
le mandat constitutionnel permettant
de proclamer la vacance définitive de
la fonction présidentielle et de
superviser la transmission du pouvoir
à un Président par intérim, un
transfert de pouvoir rapide, pacifique
et ordonné a été accompli et une
crise constitutionnelle a été évitée,
lorsque l’IPCCPL est intervenue et a
informé le président du Parlement de
la vacance définitive du poste de
Président de la République.
34 | The Carter Center Rapport des élections



































































Page 35
Cadre juridique et système
électoral

Cadre juridique
Selon les meilleures pratiques
internationales, le cadre juridique
des élections doit être transparent et
facilement accessible au public.
17 Il
devrait également aborder toutes les
composantes d'un système électoral,
nécessaires pour assurer des
élections démocratiques.
18 Le
processus électoral tunisien est régi
par la Constitution de 2014, la loi
électorale de 2014, la loi relative à
l'ISIE et le décret-loi relatif à la
liberté de la communication
audiovisuelle portant création de la
Haute instance indépendante de la
communication audiovisuelle
(HAICA). Le cadre juridique
tunisien régissant les élections
présidentielles et législatives est dans
l’ensemble conforme aux standards
internationaux et fournit une base
adéquate pour la conduite des
élections conformément aux
dispositions des instruments
internationaux ratifiés par la Tunisie
ainsi qu'aux meilleures pratiques
internationales.
Grâce aux efforts
déployés par l’ISIE
pour inscrire les
électeurs, le
nombres des
électeurs inscrits
aux élections
législatives a
augmenté.
Les efforts
d'enregistrement
par l'ISIE se sont
concentrés en
particulier sur les
femmes non
enregistrées, les
jeunes et ceux
vivant à l'étranger.
Néanmoins, certains aspects du cadre
juridique pourraient être améliorés,
notamment en prévoyant des délais
définitifs pour les différentes étapes
du processus électoral ; amender les
dispositions de campagne trop
restrictives ; clarifier les dispositions
de l'article 143 de la loi électorale ;
revoir les plafonds de financement
des campagnes et l'utilisation des
parrainages des électeurs ; et
l'examen du processus et du cadre
juridique du découpage des
circonscriptions électorales.
17 PIDCP, paragraphe 5 de l’observation
générale 25.
18 OSCE / BIDDH, Lignes directrices pour
l'examen d'un cadre juridique pour les
élections, page 4.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 35




























Page 36
d'électeurs inscrits, avec au moins
500, figurant sur les listes électorales
de chacune des 10 des 33
circonscriptions électorales
tunisiennes. De plus, il est interdit
aux électeurs de parrainer plus d'un
candidat. La pratique de l’ISIE
consistant à ne pas notifier aux
candidats en cas d’irrégularités dans
leurs parrainages et à leur accorder
du temps pour corriger lesdites
irrégularités, a été l’un des moyens
soulevés dans la plupart des recours
relatifs au contentieux des
candidatures devant le Tribunal
administratif.
L'ISIE a également reçu des
centaines de plaintes déposées par les
électeurs au sujet de parrainages
frauduleux en leur nom. Plus de 70
enquêtes pénales sont en cours, suite
aux plaintes déposées par les
électeurs. En conséquence, le juge
chargé des enquêtes a convoqué
plusieurs candidats. Pour éviter les
problèmes pratiques et juridiques liés
aux parrainages qui se reproduiront
lors des futures élections
présidentielles, de nombreuses
parties prenantes ont suggéré de
réduire le nombre requis de
parrainages et d'exiger que toutes les
signatures soient légalisées. La
collecte des parrainages pourrait être
effectuée dans les bureaux des
municipalités en coordination avec
les IRIE.
L’égalité des chances pour tous les
candidats
Les bonnes pratiques internationales
et les sources juridiques
Le pouvoir de l'ISIE de modifier
les résultats préliminaires en vertu
de l'article 143 de la loi électorale
L'article 143 de la loi électorale
introduit la notion « de manière
substantielle », qui donne à l'ISIE un
pouvoir discrétionnaire illimité pour
modifier les résultats des élections ;
cependant, le terme n'est pas défini
dans la loi et manque de critères
clairs pour son application. En
conséquence, son application
pourrait engendrer un non-respect de
la volonté des électeurs. Le
Parlement, ou l'ISIE, devraient
développer des critères spécifiques
pour déterminer quand une violation
détectée a affecté « de manière
substantielle » les résultats, dans la
mesure où l'ISIE est autorisée à les
modifier. L’ISIE devrait également
établir des procédures claires
garantissant une procédure régulière
afin que le droit des candidats à un
procès équitable et public par un
tribunal compétent, impartial et
indépendant soit respecté.
19 Ce
problème a été accentué lors des
récentes élections par le fait que
l’ISIE n’a pas divulgué les
informations sur les violations
signalées par ses observateurs et n’a
pas mis ces informations à la
disposition des candidats et des
partis qui ont contesté les résultats.
Parrainage
Selon la loi électorale, chaque
candidat à la présidentielle doit
réunir soit 10 parrainages des
députés du parlement, soit 40
parrainages de présidents de conseils
locaux élus, soit 10000 parrainages
19 PIDCP, Article 14.
36 | The Carter Center Rapport des élections






Page 37
internationales interprétatives
stipulent que tous les partis et
candidats doivent bénéficier de
l'égalité des chances. L'État doit être
impartial et veiller à l'application de
la loi uniformément à tous. L'égalité
doit être garantie pour les partis et les
candidats, et les autorités de l'État
doivent adopter une attitude neutre
envers la campagne électorale et la
couverture médiatique.
20
La question de l'égalité des chances
pour tous les candidats a été au
centre de la période électorale en
raison de la détention de Nabil
Karoui pendant la majeure partie de
la campagne électorale. Nabil Karoui
a fait valoir que l'article 52 de la loi
électorale garantit « l’égalité des
chances » à tous les candidats
pendant la campagne et que sa
détention prolongée le prive de ce
droit. La loi relative à l'ISIE impose
à l’Instance de garantir l'égalité de
traitement des électeurs, des
candidats et de toutes les parties
prenantes.
21 Le décret-loi relatif à la
HAICA exige l'égalité des chances
dans l'exercice des droits et libertés
de la communication audiovisuelle.
22 Cependant, il n’existe pas de
définition explicite de ce que signifie
l'égalité des chances, ou de
traitement, aux fins de la mise en
œuvre de la loi électorale.
La signification de l'égalité des
chances n'est définie dans aucune de
ces lois.
La question de l'égalité des chances pour tous les
candidats a été au centre de la période électorale
en raison de la détention de Nabil Karoui pendant
la majeure partie de la campagne électorale.

La campagne médiatique en ligne
Une simple lecture de l'article 3 de la
loi électorale, qui définit la publicité
politique, conduit à comprendre que
les médias en ligne sont inclus dans
la définition. L'article 57 de la loi
interdit le recours à la publicité
politique pendant la période
électorale. De nombreuses parties
prenantes ne savent pas si
l'utilisation d'annonces sponsorisées
sur les réseaux sociaux serait
considérée comme une publicité
politique sujette à restrictions. Les
médias sociaux, en particulier
Facebook, ont été largement utilisés
tout au long de la période électorale.
L'ISIE n'a pas commenté
publiquement cette ambiguïté, en
même temps elle a exercé un
contrôle des médias sociaux, pour la
première fois, au cours de ces
élections.
23 L'ISIE a émis au moins
10 avertissements aux candidats et
aux partis politiques relatifs à la
20 La commission de Venise, CDL-PI
(3016)006, Compilation concernant les
médias et les élections, l'égalité des chances,
page 8
21 Article 3 de la loi relative à l'ISIE.
22 Article 5 du décret-loi relatif à l'HAICA
23 Il convient de mentionner que l'ISIE s’est
appuyée sur l'article 143 de la loi électorale
pour annuler partiellement les résultats des
élections dans la circonscription électorale
de France 2 et priver la liste de Ich Tounsi
de 207 votes comme sanction pour
l'utilisation de publicités sur Facebook. La
différence entre Ich Tounsi et la liste qui a
obtenu le rang suivant, étant d'environ 120
votes, cette sanction a privé Ich Tounsi d’un
siège.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 37





Page 38
Les leaders de la
mission, Salam
Fayyad et Tana de
Zulueta, et le
directeur de la
mission Don Bisson
Participent à une
réunion à Tunis
avec d'autres
missions
internationales
d’observation.
publicité sur leurs pages Facebook
officielles, menaçant d’appliquer les
dispositions prévues à l'article 143 de
la loi électorale et de modifier les
résultats, si le candidat ou le parti ne
retire pas les annonces mentionnées.
Les infractions électorales
En vertu de la loi en Tunisie, les
infractions électorales sont soumises
aux mêmes procédures judiciaires
que les infractions non électorales, ce
qui entraîne un retard injustifié dans
la résolution du contentieux relatif
aux infractions électorales. 24
L'absence d'une procédure accélérée
pour juger les infractions pénales
électorales affecte le droit à un
recours efficace et en temps
opportun.
25
et législatives soit dans l’ensemble
conforme aux standards
internationaux et fournit une base
adéquate pour la conduite des
élections, cependant certains aspects
du cadre juridique pourraient être
améliorés. Le Centre Carter
recommande d'établir des délais
définitifs et adéquats pour les
différentes étapes du processus
électoral; réglementer les actions des
tiers dans la campagne, y compris
déterminer si leurs activités doivent
être prises en compte dans la
comptabilisation des dépenses de la
campagne; reconsidérer les
dispositions de campagne trop
restrictives, y compris celles qui
restreignent l'utilisation de la
publicité sponsorisée sur les réseaux
sociaux, la publicité politique et les
affiches; clarifier les dispositions de
l'article 143 de la loi électorale qui
confèrent à l'ISIE le pouvoir de
modifier les résultats préliminaires
des élections en se basant sur les
violations signalées; revoir les
plafonds de financement des
campagnes; revoir l'utilisation des
parrainages électoraux dans le
processus de candidatures aux
élections présidentielles; et l'examen
du processus de découpage des
circonscriptions électorales.
Conclusion
Bien que le cadre juridique tunisien
régissant les élections présidentielles
24 Certaines plaintes contre la falsification
des signatures de parrainages pendant les
élections de 2014 sont toujours en suspens.
25 CADHP, article 7, « Toute personne a le
droit… d'être jugée dans un délai
raisonnable…»; Charte africaine de la
démocratie, des élections et de la
gouvernance, article 17.2, «Les États parties
réaffirment leur engagement à… renforcer
les mécanismes nationaux qui règlent les
litiges électoraux en temps opportun.» Voir
également le Code de bonnes pratiques de la
Commission de Venise en matière
électorale, 11.3.3.95 et le Manuel
d'observation des élections de l'OSCE /
BIDDH, p. 36.
38 | The Carter Center Rapport des élections




Page 39
Système électoral
Le but de tout système électoral est
de traduire la volonté du peuple à
travers un gouvernement
représentatif. Les standards
internationaux ne prescrivent pas de
système électoral spécifique. Le
système électoral tunisien respecte
les principes d’élections honnêtes et
périodiques et garantit le suffrage
universel, le secret du vote et
l’absence de toute intimidation, ainsi
que l’égalité du vote et la
représentation équitable de tous les
citoyens. 26
La constitution garantit le droit de
vote à tous les citoyens âgés de 18
ans, ou plus, et qui ne sont soumis à
aucun cas de privation de droit prévu
par la loi électorale.
27 La loi a été
modifiée en 2017 pour permettre au
personnel militaire et de sécurité de
voter aux élections municipales et
régionales, mais elle continue à leur
interdire de voter aux élections
législatives et présidentielles, ce qui
constitue une restriction jugée
26 La Constitution de 2014, articles 55,56 et
75. ONU, Pacte international relatif aux
droits civils et politiques ; Article 25 (b);
Conseil des droits de l'homme des Nations
Unies, Observation générale 25, paragraphe
21, «Bien que le Pacte n'impose aucun
système électoral particulier, tout système
fonctionnant dans un État partie doit être
compatible avec les droits protégés par
l'article 25 et doit garantir et donner effet à
la libre expression de la volonté des
électeurs. Le principe d'une personne, une
voix doit s'appliquer et, dans le cadre du
système électoral de chaque État, le vote
d'un électeur doit être égal au vote d'un
autre. La délimitation des circonscriptions
électorales et la méthode d'attribution des
voix ne devraient pas fausser la répartition
des électeurs, ni discriminer aucun groupe et
incompatible avec les standards
internationaux.
28 La loi ne prévoit
toujours pas un mécanisme
permettant aux citoyens résidant
dans les établissements de santé,
pénitenciers et dans les centres de
détention d'exercer leur droit de vote,
ce qui est contraire aux dispositions
de la constitution tunisienne et aux
standards internationaux.
29
Les résultats des élections
législatives de 2019 mettent en
exergue la nécessité de mettre en
œuvre des modifications
additionnelles pour accroître la
représentation des femmes au
Parlement. Malgré les dispositions
constitutionnelles exhortant l'État à
prendre des mesures pour garantir
l'égalité entre les hommes et les
femmes, et une exigence inscrite
dans la loi électorale imposant la
parité verticale entre les sexes dans
les listes de candidature, le nombre
de femmes élues au Parlement en
2019 a considérablement diminué
par rapport à 2014.
30
ne devraient pas exclure ou restreindre
déraisonnablement le droit des citoyens de
choisir librement leurs représentants. »
27 La constitution de 2014, Article 54.
28 Voir PIDCP, article 25 : « Tout citoyen a
le droit et la possibilité [...] de voter et d'être
élu lors de véritables élections périodiques ...
». Voir aussi, Observation générale 25,
paragraphe 14 : « Les motifs de refus du
droit de vote aux citoyens doivent être
objectifs et raisonnables et prescrits par la
loi.»
29 Droit au suffrage universel sur la base de
l'égalité de traitement devant la loi : PIDCP,
article 25 (b); Charte africaine de la
démocratie, des élections et de la
gouvernance, article 3 (3).
30 La Constitution de 2014, articles 34 et 46.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 39



Page 40
Élection présidentielle
Selon la constitution, le président est
élu pour cinq ans, conformément aux
standards internationaux et aux
meilleures pratiques.
31 Si aucun
candidat n'obtient la majorité absolue
des suffrages exprimés au premier
tour, un deuxième tour entre les deux
candidats ayant recueilli le plus
grand nombre de votes aura lieu dans
les deux semaines suivant l'annonce
des résultats définitifs du premier
tour.
Élection législative
Selon la Constitution tunisienne, le
Parlement est élu pour cinq ans,
conformément aux standards
internationaux et aux meilleures
pratiques.
32 Il existe au total 217
sièges au Parlement, 199 sont alloués
aux députés élus à l'intérieur du pays
et 18 à ceux élus à l'étranger. Aucun
seuil n'est requis pour remporter un
siège.
Afin de parvenir à une participation
plus équitable des femmes au
Parlement, la loi électorale oblige les
partis politiques à maintenir la parité
entre les sexes, en alternant les
candidats hommes et femmes sur
toutes les listes de candidats
Cependant, on n’exigence nullement
qu'une femme candidate soit la
première sur la liste.
33 La loi
électorale requiert également
l'inclusion des jeunes dans les listes
de candidats en exigeant qu'au moins
un jeune candidat, ayant 35 ans, ou
moins, fasse partie des quatre
premiers candidats de toutes les
listes.
Conclusion
Le système électoral tunisien
respecte les principes généraux
requis par les engagements et les
standards internationaux. Dans le but
de réaliser les objectifs ambitieux de
la Constitution, d'équité et de parité
entre les sexes dans les assemblées
élues, la loi électorale devrait être
modifiée pour inclure, non seulement
la parité verticale (alternant entre les
sexes) sur les listes de candidats,
mais également la parité horizontale,
garantissant le placement des
femmes à la tête des listes et
promouvant la représentation des
femmes.
La loi électorale requiert également l'inclusion des jeunes dans les
listes de candidats en exigeant qu'au moins un jeune candidat, ayant
35 ans, ou moins, fasse partie des quatre premiers candidats de
toutes les listes

31 La Constitution de 2014, articles 75 ;
PIDCP, article 25 (b) ; Observation générale
25, paragraphes 9 et 19; Déclaration
universelle des droits de l'Homme, article 21
(3); Code de bonne conduite du Conseil de
l'Europe en matière électorale, section I.1.6.
32 PIDCP, article 25(b); Observation
générale 25, paragraphes 9 et 19;
Déclaration universelle des droits de
l'Homme, article 21 (3); Code de bonne
conduite du Conseil de l'Europe en matière
électorale, section I.1.6.
33 La loi électorale, article 25.
40 | The Carter Center Rapport des élections







Page 41
Le leader de
mission Karen
AbuZayd répond
aux questions
devant un
bureau de vote
à Tunis le jour
des élections
(élections
La délimitation des
circonscriptions électorales
Les traités internationaux et
régionaux stipulent qu'un système
électoral doit respecter le droit de
suffrage égal.
34 La délimitation
des circonscriptions électorales et
la méthode d'attribution des voix
ne devraient en aucun cas fausser
la répartition des électeurs ni
discriminer aucun groupe.
35 La
délimitation actuelle des
circonscriptions électorales en
Tunisie est fixée par les décrets
lois utilisés pour l'élection de
l'Assemblée Nationale
Constituante en 2011. Les
circonstances ont changé depuis
2011 vu que la population continue
de se déplacer. Ces nouvelles
circonstances requièrent une
reconsidération de la délimitation
actuelle des circonscriptions
électorales, afin de prendre en
compte le recensement de la
population de 2014 et la question de
savoir si l’exécution des mesures
discriminatoires prises pour accroître
la représentation des zones
marginalisées, doit se poursuivre.
34 ONU, PIDCP, article 25; OEA, CADH,
article 23, CEI, Convention sur les élections
démocratiques, article 3 (1) (a) ; U.N.,
DUDH, article 21, paragraphe 3.
La délimitation des circonscriptions
électorales tunisiennes est basée sur
des circonscriptions plurinominales
ou l’élection a lieu selon le mode de
scrutin fondé sur la représentation
proportionnelle. Selon les normes
internationales, une répartition claire
et équilibrée des sièges entre les
circonscriptions sur la base de la
population ou du nombre d'électeurs
inscrits, ou fondée sur une
combinaison appropriée de ces deux
critères, doit respecter une
représentation égale. Bien qu'une
véritable égalité dans la délimitation
ne soit pas toujours possible, la
dérogation autorisée à la norme ne
35 Article 25 de l'Observation générale 25 du
PIDCP, paragraphe 21
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 41






















Page 42
doit pas dépasser 10 à 15%, sauf
dans des circonstances spéciales,
telles que la protection d'une
minorité concentrée ou d'une entité
administrative peu peuplée.
36
La délimitation actuelle des
circonscriptions électorales du pays
est régie par un décret-loi qui a été
adopté pour les élections à
l'Assemblée Nationale Constituante
de 2011 et n'a pas été modifié depuis.
Le décret-loi établit une
discrimination positive en faveur des
gouvernorats faiblement peuplés de
l'intérieur de la Tunisie qui étaient
considérés comme historiquement
défavorisés, afin d'augmenter leur
représentation au Parlement. L'article
106 de la loi organique sur les
élections dispose que la délimitation
des circonscriptions électorales et le
nombre de sièges attribués à chaque
circonscription sont déterminés par
une loi adoptée au moins un an avant
la tenue des élections législatives.
Bien que le gouvernement ait
présenté un projet de loi pour réviser
la délimitation des circonscriptions
électorales de la Tunisie en
septembre 2018, la commission
parlementaire du règlement intérieur,
de l'immunité et des lois
parlementaires et électorales a rejeté
le projet de loi en janvier 2019, car il
n'a pas respecté les délais légaux.
37
Jusqu'à l'adoption d'une nouvelle loi
sur la délimitation des
circonscriptions électorales, le
découpage électoral de 2011
demeure en vigueur.
Le Parlement compte 217 sièges au
total, répartis dans 33
circonscriptions ; 199 sièges sont
attribués aux 27 circonscriptions du
pays, qui comptent 6 680 339
électeurs inscrits, et 18 sièges
représentent six circonscriptions à
l'étranger, comprenant 385 546
électeurs inscrits.
38 L'attribution des
sièges à l'étranger n'est pas
proportionnelle au nombre de
résidents domiciliés à l'étranger, ou
dans chaque pays en particulier,
conformément aux normes
internationales. Cela s'explique, en
partie, par le manque d'informations
précises du gouvernement sur le
nombre de citoyens tunisiens vivant
à l'étranger.
Selon le dernier recensement de la
population tunisienne, réalisé en
2014, celle-ci continue de se
déplacer vers le nord-est en
provenance du sud et du nord-ouest.
Les chiffres récents d’inscription des
électeurs confirment ce déplacement
de population, le nombre d’électeurs
inscrits dans les régions côtières du
nord de la Tunisie ayant augmenté
par rapport aux autres régions. Par
conséquent, la répartition des sièges
lors des élections de 2019 ne
respecte pas le principe de l'égalité
de représentation ; par exemple, six
circonscriptions étaient
surreprésentées par un, ou plusieurs,
36 Commission de Venise, Code de bonne
conduite en matière électorale, 2002, p.17.
37 Loi électorale, article 106
38 Sur la base du nombre d'électeurs inscrits,
si chacun des électeurs votait, le quotient
électoral pour l’obtention d’un siège à
l’intérieur du pays serait 33 569 voix, alors
qu’ils seraient de 21 419 voix pour
l'extérieur du pays. Voir l'annexe 1 de ce
rapport pour plus de détails sur le nombre
d'électeurs inscrits par circonscription.
42 | The Carter Center Rapport des élections



Page 43
sièges et d'autres étaient sous-
représentées.
39
Le fait que le Parlement n’ait pas mis
à jour la délimitation des
circonscriptions électorales sur la
base de nouvelles données
démographiques a entraîné un grand
écart dans les quotients électoraux
utilisés pour répartir les sièges entre
les différentes circonscriptions du
pays. Par exemple, un siège à Tunis
II est octroyé grâce à un quotient de
20 947, tandis que le quotient
enregistré à Tataouine, qui est dans
l'extrême Sud, était de 9 057 voix.
Pour les six circonscriptions à
l'étranger, l’écart est encore plus
remarquable, le quotient variant entre
1 933 et 4 800 voix.
40 Cette disparité
dans le critère d'attribution des sièges
porte atteinte au principe de l'égalité
des voix et de la représentation égale.
Conclusion
La délimitation actuelle des
circonscriptions électorales est régie
par le décret-loi utilisé pour l'élection
de 2011 de l'Assemblée Nationale
Constituante, qui prévoyait une
discrimination positive pour
compenser la sous-représentation des
régions défavorisées par le régime de
Ben Ali. Les circonstances ont
changé depuis 2011, et le pays élit
désormais un Parlement censé
légiférer plutôt que de rédiger une
Constitution. Ces nouvelles
39 Tozeur a quatre sièges au lieu de deux ;
Tataouine en a quatre au lieu de trois ;
Kébili en a cinq au lieu de trois ; Zaghouan
en a cinq au lieu de trois ; Siliana en a six au
lieu de quatre ; Le Kef en a six au lieu de
quatre. Sousse en a 10 au lieu de 12 ; Ben
Arous en a 10 au lieu de 11 ; Kairouan en a
neuf au lieu de 10 ; Bizerte en a neuf au lieu
de 10.
circonstances appellent à une
reconsidération de la délimitation
actuelle des circonscriptions
électorales afin de prendre en compte
le recensement de 2014 et les
changements dans la croissance
démographique, ainsi que d'évaluer
si l’application des mesures
discriminatoires prises pour accroître
la représentation des zones
marginalisées, introduites en 2011,
devrait se poursuivre.
41
Le fait que le Parlement n’ait pas mis à jour la
délimitation des circonscriptions électorales sur la
base de nouvelles données démographiques a
entraîné un grand écart dans les quotients
électoraux utilisés pour répartir les sièges entre les
différentes circonscriptions du pays.
40 Une liste de candidats en Italie a remporté
un siège avec seulement 399 voix
41 CoE (Commission de Venise), Code de
bonnes pratiques, section 1.2.b; Voir le
tableau de l'annexe 2 relatif à la répartition
du nombre d'électeurs par circonscription et
le quotient électoral 2019 pour chaque
circonscription.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 43













Page 44
Administration électorale
Une autorité électorale indépendante
et impartiale, fonctionnant de
manière transparente et
professionnelle, est le seul moyen
efficace pour garantir que les
citoyens puissent participer à de
véritables élections démocratiques.
42
La pratique des États suggère que,
lors de la planification des élections,
il faudrait prévoir suffisamment de
temps pour gérer avec succès le
processus électoral.
43 Selon la
Constitution tunisienne, l'ISIE est
mandatée pour assurer la régularité,
l'intégrité et la transparence du
processus électoral et proclamer ses
résultats.
44
L'ISIE a relevé le défi d'organiser trois élections en
moins d'un mois sans défauts majeurs. Les aspects
opérationnels des trois élections ont été traités de
manière professionnelle. L'ISIE a respecté les délais
constitutionnels et légaux.

L'ISIE a relevé le défi d'organiser
trois élections en moins d'un mois
sans défauts majeurs. Les aspects
opérationnels des trois élections ont
été traités de manière
professionnelle. L'ISIE a respecté les
délais constitutionnels et légaux.
45
L’insuffisance majeure de l’ISIE,
tout au long du processus électoral, a
été le manque de transparence dans
tous les aspects de son travail.
Le conseil de l'ISIE est composé de
neuf membres dotés d'un pouvoir de
décision. Ils sont élus par le
Parlement à la majorité des deux
tiers pour une seule période de six
ans. Une administration exécutive
aux niveaux central et régional est
chargée de la gestion administrative,
financière et technique sous la
supervision du président du Conseil
de l'ISIE. Le mandat de chaque
membre du conseil est basé sur la
date de son élection.46
42 PIDCP, Observation générale 25,
paragraphe 20.
43 ONU, Droits de l'homme et élections,
paragraphe 75.
44 Constitution tunisienne de 2014, article
126.
45 L'ISIE a également organisé cinq élections
municipales partielles en 2019 : une à Souk
El Jdid (Sidi Bouzid) le 26 mai 2019 ; une
au Bardo (Tunis) le 14 juillet 2019; et trois
élections partielles le 18 août 2019 à Thibar
(Beja), El Ayoun (Kassrine) et Sers (Le
Kef).
46 Nabil Baffoun (janvier 2014-janvier
2020), Farouk Bouasker (août 2017-janvier
2020), Mohamed Tlili Mansri (janvier 2017-
janvier 2023), Hasna Ben Slimane (janvier
2019-janvier 2025), Anis Jarboui (janvier
2017-janvier 2020), Belgacem Ayachi
(janvier 2019-janvier 2025), Sofiene Abidi
(janvier 2019-janvier 2025), Adel Brinsi
44 | The Carter Center Rapport des élections













Page 45
La loi électorale
tunisienne a été
amendée en 2017
pour permettre aux
militaires et aux
agents de sécurité
de voter lors des
élections
municipales et
régionales ;
Cependant, il leur
est toujours interdit
de voter aux
élections législatives
et présidentielles.
L'ISIE a créé 33 instances régionales,
appelées Instances régionales
indépendantes pour les élections
(IRIE), afin d'assister l'autorité
centrale dans l'accomplissement de
sa mission et d'assurer également la
coordination avec l'administration
régionale de l'ISIE.
47 La direction de
chaque IRIE est composée d'un
maximum de quatre personnes avec
des qualifications professionnelles
différentes.
48 Les IRIE ont assumé
leurs responsabilités de manière
opportune et professionnelle et, avec
le personnel administratif régional,
ont joué un rôle déterminant dans la
gestion efficace des trois élections.
L'ISIE a mis à jour son
organigramme pour la dernière fois
en 2014 ; un organisme qui ne reflète
pas la structure actuelle de
l’administration exécutive. Les
(janvier 2017-janvier 2023) et Nabil Azizi
(janvier 2017-janvier 2023).
47 L'article 21 de la loi de l’ISIE a créé 27
IRIE à l'intérieur du pays et six à l'étranger.
48 Article 3 de la décision réglementaire de
l’ISIE n 5-2017 du 11 avril 2017 relative
aux conditions et modalités de création des
postes de chef du service juridique,
de la formation et de l’informatique
étaient vacants tout au long de la
période électorale et n'étaient
toujours pas pourvus à la date de la
rédaction du présent rapport ; l'ISIE
n'a pas réussi à recruter un chef du
service juridique pendant toute la
période électorale, même si une
annonce de recrutement pour le poste
avait fixé une date limite de
candidature le 20 septembre 2019.
Le Conseil de l'ISIE a discuté à
plusieurs reprises de la question du
recrutement de nouveaux employés
mais n'a jamais finalisé une décision
d'embauche à ces postes. 49 Ces
lacunes dans le recrutement du
personnel de l'ISIE n'ont pas eu
d'impact majeur sur le déroulement
des élections, principalement grâce
au travail supplémentaire effectué
par certains membres du conseil de
IRIE et à ses prérogatives et modes de
fonctionnement.
49 Les procès-verbaux des réunions du
Conseil de l'ISIE montre que le recrutement
de nouveaux employés a été discuté les 9 et
30 juillet.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 45



Page 46
l'ISIE et par d'autres membres du
personnel administratif. Pour mieux
se préparer aux futurs scrutins, l'ISIE
devrait développer une stratégie de
recrutement, à long terme, basée sur
un organigramme actualisé qui
reflète les vrais besoins de
l'administration.
Le Conseil de l'ISIE et
l’administration exécutive n'ont pas
toujours réussi à travailler ensemble
efficacement, durant ces élections.
Parfois, la prise de décision tardive
par le Conseil a rendu difficile pour
l’administration exécutive de mettre
en œuvre les décisions en temps
opportun et de manière cohérente.
Cela a parfois entraîné un manque de
compréhension de la réglementation
de la part des agents des bureaux de
vote et d'autres parties prenantes.
50
L'action de ISIE a été marquée par le
manque de transparence dans tous les
aspects de son travail et, parfois,
d'une communication incohérente
avec le public. L'ISIE a souvent
publié des informations sur sa page
Facebook, au lieu de son site Web
officiel, réduisant ainsi l'efficacité
dudit site en tant que principale
source d'information. En outre, l'ISIE
n'a ni publié les procès-verbaux de
ses réunions, en temps opportun, ni
les résultats des votes du conseil, et
ce, pendant toute la période
électorale.
Les responsables de l'ISIE ont
reconnu que le contrôle des
infractions des règles de la campagne
électorale était l'un des plus grands
défis pour l’Instance. L’ISIE a publié
des règlements de campagne
spécifiques, qui détaillaient ce que
les partis et les candidats pouvaient
et ne pouvaient pas faire, et
interdisait l'utilisation des ressources
de l'État. Pendant la campagne
électorale, l'ISIE a déployé 1500
contrôleurs pour signaler les
infractions aux règles de la
campagne, au niveau des
circonscriptions électorales. Les
observateurs à long terme du Centre
Carter ont indiqué que le travail des
contrôleurs était difficile car, ni les
candidats aux élections
présidentielles, ni les candidats aux
élections législatives n'ont fourni aux
IRIE l'heure et le lieu exacts des
activités des campagnes qu’ils
avaient prévues. Ils ont également,
parfois, annulé des événements sans
en informer les IRIE. L'ISIE n'a
publié aucun rapport sur la base des
conclusions de ses contrôleurs, avant
la fin de la campagne électorale et
n'a pas publié de compilation des
infractions ventilées par parti, ou par
candidat.
L'ISIE n'a pas géré sa
communication publique de manière
cohérente. Les membres de son
conseil ont parfois fait des
déclarations contradictoires. L'ISIE a
relevé le porte-parole de ses
fonctions le 1
er septembre, déclarant
que la loi sur l'ISIE ne prévoyait pas
une telle fonction et que chaque
50 La décision de l'ISIE n° 2019-22, fixant
les règles et procédures d'organisation de la
campagne électorale a été publiée le 22 août
2019, neuf jours avant le début de la
campagne électorale le 1er septembre 2019.
Le manuel destine aux agents des bureaux
de vote n'a été adopté que le 31 août 2019.
46 | The Carter Center Rapport des élections



Page 47
L’ISIE a souffert d'un manque de transparence, tout
au long de la période électorale, ce qui a affecté
négativement la perception du processus par le
public
membre du conseil avait le droit de
faire des déclarations publiques.
51
Malgré le calendrier serré pour les
préparatifs des élections de 2019 et
la vacance de plusieurs fonctions
administratives, l'ISIE a relevé le
défi et a géré le processus électoral
sans irrégularités majeures.
Cependant, l'ISIE a souffert d'un
manque de transparence, tout au long
de la période électorale, ce qui a
affecté négativement la perception
du processus par le public. L'ISIE
devrait procéder à un examen
approfondi de ses besoins en
personnel et de sa structure
organisationnelle et élaborer une
stratégie de communication claire
afin d’informer le public de ses
décisions et activités.
51 L'ISIE n'a pas déclaré publiquement si
cette décision avait fait l’objet d’un vote.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 47






























Page 48
Inscription des électeurs
L'inscription des électeurs et
l'établissement d'un registre
électorale complet, à jour et exacte,
sont les meilleurs moyens pour
garantir le droit de vote à chaque
citoyen. Selon le Comité des droits
de l'homme des Nations Unies,
"lorsque l'inscription des électeurs
est requise, elle doit être facilitée et
aucun obstacle à cette inscription ne
devrait être imposé".
52 Les
procédures d’inscription des
électeurs en Tunisie sont
globalement conformes aux normes
internationales et régionales.
53
La Tunisie dispose d'un système
d'inscription des électeurs actif et
continu. 54 L'inscription est mise en
œuvre par le biais d'un registre
électoral tenu par l'ISIE, qui a pour
mandat de tenir un registre électoral
précis, transparent, complet et mis à
jour. Tous les organes administratifs
sont obligés de fournir à l'ISIE des
données à jour, y compris des
informations sur les personnes
décédées et celles qui ont perdu leur
droit de vote. De son côté, l'ISIE est
52 PIDCP, Observation générale 25, « Le
droit de participer aux affaires publiques, le
droit de vote et le droit a l’égalité des
chances dans l'accès aux fonctions publiques
», paragraphe 11.
53 PIDCP, Observation générale 25,
paragraphe 11.
54 Décision de l’ISIE n 6/2017 du 11 avril
2017.
48 | The Carter Center Rapport des élections
Marie Allegret,
coordonnatrice des
observateurs, discute,
avant les élections
présidentielles, des
détails du
déploiement avec les
observateurs Magda
Osman (Soudan) et
Randa Yassir (Liban).













Page 49
tenue de maintenir la confidentialité
des données personnelles.
Les électeurs qui s'étaient déjà
inscrits aux élections de 2014 ou
2018 n'étaient pas tenus de s'inscrire,
à nouveau, aux élections de 2019.
Les électeurs précédemment inscrits
qui souhaitaient mettre à jour leurs
informations, en changeant la
circonscription électorale ou le
bureau de vote où ils ont voté, ont pu
le faire.
Inscription des électeurs pour les
élections de 2019
Grâce aux efforts d’inscription des
électeurs déployés par l’ISIE, le taux
d’inscription aux élections
législatives a augmenté. L'ISIE a
déployé 600 centres fixes et 206
centres mobiles dans le pays et 106
centres d'enregistrement à l'étranger,
en se concentrant en particulier sur
les femmes, les jeunes et les
personnes non inscrites vivant à
l'étranger. À la clôture du processus
d'inscription le 15 juin, il y avait
1.455.898 nouveaux inscrits sur
environ 3,5 millions d'électeurs non-
inscrits, ce qui porte le nombre total
d'électeurs inscrits pour les élections
législatives à 7.065.885. De ce
nombre, 6.680.339 électeurs ont été
inscrits en Tunisie et 385.546 à
l'étranger.
Chronologie du processus d'inscription des électeurs
10 avril
Début de l'inscription des électeurs aux élections législatives et présidentielles
22 mai
15 juin
23, 24, 25 juin
26, 27, 28 juin
27 juin
4 juillet
Délai initial de la fin de l'inscription des électeurs pour les élections législatives et
décision de prolonger le délai
Nouvelle date limite pour l'inscription des électeurs aux élections législatives
Mise à la disposition du public des listes électorales préliminaires des élections
législatives
Introduction des recours contre les listes électorales préliminaires pour les élections
législatives
Date limite initiale d'inscription des électeurs pour l'élection présidentielle
Nouvelle date limite pour l'inscription des électeurs à l'élection présidentielle (après
modification de la date des élections)
12, 13, 14 juillet
Liste électorale préliminaire pour l'élection présidentielle accessible au public
15, 16, 17 juillet
19 juillet
15 août
Introduction des recours contre les listes électorales préliminaires pour l'élection
présidentielle
Date limite pour annoncer les listes électorales définitives pour les élections
législatives
Date limite pour annoncer les listes électorales définitives pour l'élection
présidentielle
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 49








Page 50
L'ISIE a procédé à un audit interne
du registre électoral après les
élections municipales de 2018. L'une
des tâches de cet audit était de
nettoyer la base de données des
doublant et l’enregistrement des
électeurs non éligibles et des
personnes décédées. Le rapport de
cet audit n'a jamais été rendu public.
L'ISIE a augmenté le nombre
d'électeurs inscrits pour les élections
de 2019 en déployant une nouvelle
stratégie pour atteindre les électeurs
non-inscrits, ce qui a entraîné une
augmentation de plus de 1,4 million
d'électeurs à partir de 2014. Le
processus d'inscription s'est déroulé
de manière professionnelle et
inclusive. L'ISIE a informé le Centre
Carter qu'il y avait un nombre peu
important de demandes de correction
déposées et qu'aucun recours n'avait
été déposé auprès des tribunaux de
première instance concernant
l'inscription des électeurs.
57
L'inscription des électeurs à l'élection
présidentielle a pris fin le 4 juillet
2019. Outre les locaux des IRIE, des
bureaux d’inscription
supplémentaires ont été mis en place
principalement dans les
municipalités et les délégations. Au 4
juillet, il y avait 11.218 nouvelles
inscriptions et 436 mises à jour. Tout
électeur qui s'est inscrit après la date
de clôture des élections législatives
du 15 juin ne figurait que sur la liste
électorale de l'élection présidentielle.
L'ISIE a publié les listes électorales
dans les municipalités, et les
électeurs ont été autorisés à
demander des corrections, ou des
mises à jour, du 26 au 28 juin pour
l'élection parlementaire dans les
différentes 33 IRIE et du 15 au 17
juillet pour l'élection présidentielle.
Les électeurs à l'étranger ont été
autorisés à faire des demandes par
courrier électronique.
55 L'ISIE a
indiqué qu'elle avait reçu un nombre
insignifiant de demandes.
L'ISIE a annoncé que la liste
électorale pour les élections
législatives était de 7.065.885 et
7.074.566 pour les élections
présidentielles.
56 L'ISIE a mis en
place une application mobile pour
permettre aux électeurs de vérifier
leur inscription et de vérifier
l'adresse de leur bureau de vote par
SMS.
55 Le 11 juillet 2019, l’ISIE a publié une
annonce pour informer les citoyens qu'ils
peuvent envoyer des plaintes, en ce qui
concerne les listes électorales pour les
élections présidentielles, par courriel.
56 Lorsque le jour de l'élection présidentielle
était le 17 novembre, le nombre d'électeurs
inscrits était de 7.081 307. Après que la date
a été déplacée au 15 septembre, l'ISIE a
éliminé les inscrits qui n'allaient pas avoir
18 ans à la nouvelle date.
57 Le 26 juin 2020, le directeur des
opérations de l'ISIE a informé le Centre qu'il
y a eu moins de 10 demandes de corrections.
50 | The Carter Center Rapport des élections









Page 51
Éducation des électeurs
Le respect de l'obligation
internationale du suffrage universel
dépend en partie d'une éducation
effective des électeurs.
58 En fait,
l'éducation des électeurs est un
élément important d'un processus
électoral, car elle vise à garantir que
les électeurs sont prêts, désireux et
capables de participer aux opérations
électorales.
59 L'éducation des
électeurs a été particulièrement
importante pour les élections de
2019, compte tenu de la complexité
de la tenue de trois élections
distinctes, en moins d'un mois, en
plus de l'organisation de plusieurs
élections municipales partielles. Bien
qu'elle ait mené une campagne
d'éducation des électeurs dédiée et
bien organisée sur l'inscription des
électeurs, les efforts de l'ISIE en
matière d'éducation relative au vote,
ont été insuffisants.
Pendant la phase d'inscription des
électeurs, l'ISIE a mené une
vigoureuse campagne d'éducation
encourageant les électeurs à
s'inscrire. L'ISIE a déployé 350
coordinateurs locaux répartis dans
les 27 circonscriptions électorales du
pays et ciblant des groupes
marginalisés, tels que les femmes et
les jeunes. En outre, 3.000 agents
d’inscription ont été déployés à
travers le pays. Pendant la campagne,
l'ISIE a utilisé des outils tels que les
réseaux sociaux, les panneaux
d'affichage, les autocollants, les
affiches et les vidéos. Le Centre
félicite l'ISIE pour ses efforts visant
à toucher les électeurs, y compris les
catégories de la population qui ont
été exclues lors des précédents
scrutins, et pour ses efforts visant à
accroître l’inclusivité du registre
électoral.
60
Le Centre félicite l'ISIE pour ses efforts visant à
toucher les électeurs, y compris les catégories de la
population qui ont été exclues lors des précédents
scrutins, et pour ses efforts visant à accroître
l’inclusivité du registre électoral.
58 PIDCP, article 25
59 L'article 3 de la loi organique n 23-2012
du 20 décembre 2012 relative à l'ISIE
comprend « les programmes de
sensibilisation et d'éducation électorales » et
coopère « dans ce domaine avec toutes les
composantes de la société civile actives dans
le domaine électoral aux niveaux national et
international."
60 Parmi les nouveaux électeurs inscrits,
54% étaient des femmes et 46% des
hommes. Parmi les nouveaux inscrits, 16,7%
étaient âgés de 18 à 20 ans ; 22,1% avaient
entre 21 et 25 ans ; et 24,2% étaient âgés de
26 à 35 ans.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 51










Page 52
Un homme trempe son
index dans l'encre lors de
l'élection présidentielle,
avant de voter
conformément aux
procédures de vote
établies par l'ISIE.
La période électorale
comprenait, pour la
première fois, des débats
télévisés diffusés en
direct, qui ont contribué à
informer les électeurs et à
les préparer à voter le jour
du scrutin.
Au cours des trois élections, les
campagnes de sensibilisation de
l'ISIE sur le vote ont principalement
pris la forme de campagnes
numériques et médiatiques, ainsi que
de panneaux d'affichage adaptés à
chaque nouvelle échéance et type
d'élections. L'ISIE a produit
plusieurs vidéos destinées à aviser
les électeurs des informations clés
sur les procédures, les dates et les
heures de vote en Tunisie et à
l'étranger, ainsi que sur les
documents requis pour voter.
D’autres spots visaient à encourager
les gens à voter et à expliquer
l’importance de leur vote.
Bien que ces vidéos soient bien
réalisées et contiennent des
informations utiles et claires, les
campagnes ont été jugées
insuffisantes par les observateurs à
long terme du Centre et d'autres
parties prenantes, en particulier pour
les personnes qui n'ont pas accès aux
médias et aux réseaux sociaux.
61
Contrairement à ce qui a été fait lors
de l'inscription des électeurs, l'ISIE
n'a mené aucune campagne sur le
terrain pour encourager les citoyens à
voter, à l'exception d'une petite
campagne de rue, limitée, lors du
premier tour de l'élection
présidentielle et des élections
législatives. 62
61 Huit voitures et quatre camions ont été
utilisés au cours de chaque campagne, tous
deux avec un habillage rouge et blanc des
véhicules, arborant le logo de l'ISIE et des
informations sur les élections. Pendant la
campagne, l'ISIE a distribué des outils de
sensibilisation tels que des dépliants, des
autocollants, des bracelets et des porte-clés,
afin de tenir les électeurs informés des dates,
des lieux et des heures des élections, des
étapes du scrutin et des conditions requises
pour pouvoir voter.
62 La campagne présidentielle a eu lieu du 2
au 13 septembre et la campagne
parlementaire a eu lieu du 14 septembre au 4
octobre. S’agissant de la campagne pour le
premier tour de l'élection présidentielle, elle
n'a duré, dans certaines circonscriptions,
qu'une journée (à Tataouine, Tozeur, Sidi
Bouzid, Kébili, Zaghouan, Siliana, Le Kef et
Monastir). La campagne la plus longue a
52 | The Carter Center Rapport des élections



Page 53
L'absence d'efforts concertés
d'éducation des électeurs par l'ISIE
ou les OSC a été, en partie, causée
par le calendrier électoral serré et le
manque de financement avéré chez
les OSC. Les observateurs de Centre
Carter ont indiqué que lors des trois
élections, dans certains bureaux de
vote, de nombreux électeurs
n'avaient pas connaissance des
procédures de vote. Certains
électeurs, en particulier les personnes
âgées et les analphabètes, ont dû être
informés de chaque étape du
processus de vote.
Conclusion
Étant donné la complexité de la
tenue de trois élections distinctes en
moins d'un mois, les efforts de
sensibilisation des électeurs de l'ISIE
étaient insuffisants pour garantir que
les électeurs étaient prêts, disposés et
capables de participer aux opérations
électorales. L'ISIE devrait intensifier
ses efforts d'éducation des électeurs
pour les futures élections et accroître
la coopération et la coordination avec
les OSC et les partis politiques.
L’Instance devrait également veiller
à ce que les ressources nécessaires
soient consacrées à ces efforts.
duré cinq jours au total, à Tunis 1 et Tunis 2,
ce qui est insuffisant.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 53





























Page 54
Enregistrement des
candidats
Les traités internationaux et
régionaux garanties le droit et la
possibilité pour chaque citoyen d'être
élu.
63 Le droit d'être élu ne peut être
soumis qu'à des restrictions
objectives et raisonnables. Des
sources interprétatives indiquent que
la suspension ou l'exclusion des
droits de participation est interdite
sauf si la suspension / exclusion est
établie par la loi et est objective et
raisonnable.
64Une tentative du
Parlement de restreindre la
participation de certains candidats
pour des motifs non objectifs et
déraisonnables n'a pas abouti lorsque
le Président de la République a
refusé de promulguer le projet de
loi.
65
63 ONU, PIDCP, article 25 ; UA, CADHP,
article 13 ; Charte arabe des droits de
l'homme, article 24; CEI, Convention sur les
élections démocratiques, article 3; OSCE,
Document de Copenhague, paragraphe 7.5.
64 ONU, PIDCP, Observation générale 25,
paragraphe 4.
65 Le Parlement a voté le 18 juin pour
modifier la loi électorale afin d'interdire
effectivement aux dirigeants d'organisations
caritatives et aux propriétaires d’institutions
médiatiques de se porter candidats. En outre,
le projet de loi a mandaté l'ISIE pour
examiner toutes les candidatures et interdire
à toute personne qui a fait des déclarations
contre les valeurs démocratiques, ou l'État
54 | The Carter Center Rapport des élections
L'enregistrement des candidats aux
deux élections a été géré de manière
efficace et professionnelle par
l'administration électorale.
Cependant, le processus a été marqué
par un manque de transparence de la
part de l'ISIE quant aux raisons du
rejet des candidatures et aux
parrainages utilisés par les candidats
à l'élection présidentielle.
Les exigences de la constitution
tunisienne pour se présenter au
Parlement sont conformes aux
normes internationales.
66 L'exigence
constitutionnelle persistante
réclamant que les candidats à la
présidence soient musulmans, est
contraire aux normes internationales
et devrait être reconsidérée.
67 Les
IRIE étaient chargés de la réception
des candidatures aux élections
de droit, ou ceux qui ont continué à faire
l’apologie de l'ancien régime. Le projet de
loi visait l’interdiction à plusieurs candidats
potentiels de se présenter aux élections
présidentielles. Contrairement aux
procédures énoncées dans la Constitution
pour promulguer des lois, le président Caïd
Essebsi ne l’a ni promulgué, ni renvoyé au
Parlement, dans le délai imparti pour une
seconde lecture, et les mesures que le projet
de loi comportait n'ont jamais été
appliquées.
66 Article 53 de la Constitution tunisienne.
67 PIDCP, articles 2 et 25 ; Observation
générale 25 du CDHNU, paragraphe 15.












Page 55
législatives, alors que l'ISIE l’était en
ce qui concerne l'élection
présidentielle.
68
L’élection présidentielle
Tous les candidats à la présidence
doivent être de nationalité
Tunisienne depuis la naissance, âgés
d'au moins 35 ans et de religion
musulmane. Les candidats qui
possèdent une deuxième nationalité
doivent y renoncer après avoir été
élus.
69 Pendant la période de
réception des demandes de
candidatures au poste de Président de
la République, entre le 2 et le 9 août,
l'ISIE a reçu 97 demandes. Les
candidats doivent présenter des
documents prouvant qu'ils ont été
parrainés par 10 députés, 40
présidents de conseils locaux ou 10
000 électeurs, avec un minimum de
500 parrainages provenant
d’électeurs, de chacune d'au moins
10 circonscriptions électorales.
70
Les candidats doivent également
soumettre un dépôt de 10 000 TND
(environ 3 570 $ US), que le
candidat pourra récupérer, s’il
68 Décision 5 de l'ISIE, en date du 11 avril
2017, sur les conditions et modalités de
création des organes électoraux régionaux et
définissant leurs prérogatives et modalités de
fonctionnement.
69 Article 74 de la Constitution tunisienne.
70 Article 41 de la loi électorale n 2014-16
du 26 mai 2014, relative aux élections et au
référendum, modifiée par la loi n 2017-7 du
14 février 2017 et la loi n 2019-76 du 30
août 2019.
71 Onze candidats ont inclus toutes les pièces
justificatives nécessaires et des parrainages
de députés dans leurs dossiers initiaux, dont
Mongi Rahoui, Nabil Karoui, Hamadi
Jebali, Mohamed Moncef Marzouki,
Karen AbuZayd, Tana
de Zulueta et Don
Bisson à la conférence
de presse du Centre
relative aux élections
législatives.
La mission pour les
élections législatives
était codirigée par de
Zulueta, une ancienne
parlementaire
italienne, et Karen
AbuZayd, commissaire
de la Commission
d'enquête
indépendante sur la
République Arabe
Syrienne.
Don Bisson été
directeur des missions
d'observation
électorale du Centre
Carter de 2014 et 2019
en Tunisie.
obtient au moins 3% des votes
valablement exprimés.
L'ISIE a examiné les 97 demandes de
candidatures en deux jours et a
accordé 48 heures aux candidats pour
régulariser ou remplacer les
parrainages nécessaires. Trente et un
candidats ont déposé des
candidatures sans fournir les
parrainages nécessaires ou sans avoir
fait le dépôt financier nécessaire, et
leurs demandes ont été refusés par
l'ISIE.
71 Le 14 août, l'ISIE a publié
la liste préliminaire de candidats aux
élections présidentielles ; 26 des 97
candidats ont été acceptés, 24
hommes et deux femmes.
72
Abdelkrim Zbidi, Abdelfattah Mourou,
Youssef Chahed, Elyes Fakhfakh, Slim
Riahi, Salma Elloumi et Hatem Boulabyar.
Les quinze autres candidats ont déposé des
parrainages d’électeurs, dont Mohamed
Abbou, Abir Moussi, Lotfi Mraihi, Mehdi
Jomaa, Hamma Hamami, Mohsen Marzouk,
Mohamed Sghaïer Ennouri, Hachemi
Hamdi, Omar Mansour, Said Aïdi, Neji
Jelloul, Ahmed Safi Said, Abid Briki, Seif-
Eddine Makhlouf et Kaïs Saïed.
72 L'ISIE a rejeté 71 candidats (dont 62
hommes et neuf femmes) qui n’avaient
fourni ni parrainages, ni garanties
financières.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 55



Page 56
Le lendemain de l'annonce de la liste
préliminaire des candidats et à la
demande pressante des OSC, l'ISIE a
introduit une application mobile
permettant aux électeurs de vérifier
si leur nom figurait sur la liste des
parrainages de l’un des candidats.
73
Environ 500 électeurs se sont plaints
à l'ISIE que leurs noms figuraient sur
la liste des parrainages d'un candidat
sans leur autorisation ou signature.
74
Le 17 août, l'ISIE a publié un
communiqué dans lequel elle a
appelé les électeurs à signaler tous
les cas de parrainages frauduleux, au
juge pénal compétent. Après
l'achèvement de la phase du
contentieux juridictionnel des
candidatures, l'ISIE a annoncé le 31
août la liste définitive de 26
candidats à la Présidence de la
République.
L'ISIE n'a pas communiqué
d'informations détaillées sur les
motifs du rejet de plusieurs
candidatures à l'élection
présidentielle, y compris celles qui
n’ont pas satisfaits les conditions
relatives aux parrainages. Malgré le
manque de transparence dans le
processus de vérification des
parrainages, le processus
d'enregistrement des candidats a été
mené par le personnel de l'ISIE, de
manière inclusive et compétente.
Afin de tenir le public informé de la
manière dont elle contrôle
l'enregistrement des candidats, et en
particulier du processus de
vérification des parrainages, l'ISIE
doit être totalement transparente
s’agissant de ce processus.
Élections législatives
Le droit de se présenter au Parlement
est accordé à tous les électeurs qui
ont la nationalité tunisienne depuis
au moins 10 ans, ont au moins 23 ans
le jour de la présentation de leur
candidature et dont le droit de se
présenter aux élections n'a pas été
retiré par une décision de justice. Les
personnes occupant certains postes
sont exclues de la candidature au
Parlement, sauf si elles
démissionnent, ou sont libérées de
leurs fonctions, avant de se présenter
aux élections.
75
Les listes de candidats sont soumises
à l'IRIE concernée et doivent être
composées d'une liste originale dont
le nombre de candidats est égal au
nombre de sièges dans la
circonscription et d'une liste
supplémentaire composée d'un
minimum de deux candidats et d'un
maximum égal au nombre de sièges
dans la circonscription.
76 Toutes les
listes doivent respecter le principe de
la parité entre les sexes en alternant
les candidats féminins et masculins.
77 La loi ne prescrit pas le genre de la
73 Cette demande a été faite par
Mourakiboun le lendemain de la date de
clôture du processus d’inscription des
candidats.
74 Le président de l'ISIE, Nabil Baffoun, a
été interviewé dans la chaîne Almayadeen le
28 août 2019.
75 Article 20 de la loi électorale.
76 L'ISIE recommande dans son manuel de
candidature que toutes les listes de candidats
présentent une liste supplémentaire avec le
même nombre de candidats que la liste
principale.
77 Article 24 de la loi organique n°2014-16
du 26 mai 2014 relative aux élections et au
référendum modifiée par la loi n° 2017-7 du
56 | The Carter Center Rapport des élections



Page 57
personne qui doit être placée en tête
de liste.
et 1.152 étaient dirigées par des
hommes (86%).
L'enregistrement des candidats s'est
déroulé du 22 au 29 juillet. Les 33
IRIE ont reçu 1.581 candidatures.
Après l’examen par les IRIE, l'ISIE a
publié les listes préliminaires le 6
août ; 1.340 listes ont été acceptées
par les 27 IRIE en Tunisie et 163
listes par les six IRIE à l'étranger. Au
total, 1.503 listes ont été acceptées et
78 ont été rejetées.
78 Quatre IRIE
(Zaghouan, Le Kef, Gafsa et Tozeur)
ont accepté toutes les listes.
Le plus grand nombre de listes se
trouvait à Sidi Bouzid avec 73 listes,
Gafsa avec 70 listes et Kasserine
avec 66 listes. Gabès et Tataouine
ont accepté le nombre le moins élevé
de listes, avec 31 pour chacune.
Parmi les 1 340 listes acceptées, 188
avaient à leur tête des femmes (14%)
L'ISIE a publié les listes définitives
pour les élections législatives le 30
août, après la fin des délais du
contentieux. (Voir l'annexe 2 pour
plus de détails sur les listes de
candidats, par circonscription, en
Tunisie).
Le processus d'inscription des
candidats a été géré efficacement par
les 33 IRIE ; cependant, l'ISIE n'a
pas publié les noms des candidats qui
ont été rejetés, ni la raison de leur
rejet, et n'a jamais publié les noms de
tous les candidats de chacune des
listes.
79
Circonscription
électorale
Listes
totales
accepté
es
Coalition
Parti
Indépendant
Total %
Total
%
Total
%
Sièges
Total (Tunisie : 27
Circonscriptions électorale)
Total (à l’étranger : 6
Circonscriptions électorale)
TOTAL
(33 Circonscriptions
électorale)
1,341
306
23%
579
43%
456
34%
199
165
41
25%
85
51%
39
24%
18
1,506
347
23%
664
44%
495
33%
217
14 février 2017 et la loi n° 2019-76 du 30
août 2019.
78 Voir l'annexe 1 pour plus de détails sur les
listes de candidats déposées et approuvées,
ou rejetées, dans les 27 IRIE du pays.
79 Le Centre Carter a demandé d’accéder à
ces informations, à plusieurs reprises, et a
été informé par l'ISIE qu'il devrait s'adresser
à chaque candidat individuellement, étant
donné qu’ils avaient été informés des raisons
du rejet.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 57















Page 58
Conclusion
Le processus d'enregistrement des
candidats aux deux élections a été
géré par l'administration électorale
de manière efficace et
professionnelle. Cependant, le
manque de transparence concernant
les raisons du rejet de candidats et
sur les parrainages utilisés par les
candidats aux élections
présidentielles, a eu un impact
négatif sur le processus. L'ISIE
devrait rendre publiques les raisons
du rejet de candidats et publier les
parrainages des candidats aux
élections présidentielles. Les efforts
de dernière minute du Parlement
pour restreindre le droit de se porter
candidat ont entaché le processus
électoral et étaient incompatibles
avec les obligations internationales
de la Tunisie en matière d'élections
démocratiques. Les amendements
proposés auraient gravement restreint
un droit fondamental à la
participation politique, le droit des
citoyens tunisiens de se présenter aux
élections.
80
80 Article 74 de la Constitution de 2014.
Article 40 de la loi électorale.
58 | The Carter Center Rapport des élections






























Page 59
La Haute Autorité
Indépendante de
Communication
Audiovisuelle (HAICA)
Les traités internationaux
garantissent la liberté d'expression,
donnant à chacun - y compris les
partis politiques et les candidats - le
droit de rechercher, de recevoir et de
transmettre des idées par tous les
moyens de leur choix, y compris,
mais sans s'y limiter, l'écriture, le
discours, l’impression et l'art.
81 Les
engagements politiques
recommandent aux États de prendre
des mesures pour garantir la
transparence et la nomination des
autorités de régulation.
82 Ces
autorités devraient être
indépendantes et protégées de toute
ingérence.
83 La liberté de
communication audiovisuelle pour
chaque citoyen s'exerce en respectant
les conventions et pactes
internationaux relatifs aux droits de
l'homme et aux libertés publiques, à
la liberté d'expression, à l'égalité, au
pluralisme d'expression des idées et
des opinions, ainsi qu'à l'objectivité
et à la transparence.
84
La Haute Autorité indépendante pour
la communication audiovisuelle
(HAICA) est l'instance publique
indépendante chargée de garantir la
liberté et le pluralisme de la
communication audiovisuelle. Elle
est composée de neuf membres
La Haute Autorité indépendante pour la communication
chargée de garantir la liberté et le pluralisme de la
audiovisuelle (HAICA) est l'instance publique indépendante
membres exerçant un mandat de six ans, non renouvelable.
communication audiovisuelle. Elle est composée de neuf
81 ONU, PIDCP, article 19 (2) ; UA,
Principes de la liberté d'expression en
Afrique, article 1 (1); OEA, CADH, article
13 (1); Conseil de l’Europe, CEDH, article
10, paragraphe 1; CEI, Convention relative
aux droits de l'homme, article 11 (1).
82 Article 7.2, UA, Principes de la liberté
d'expression.
83 Article 7, UA, Principes de la liberté
d'expression
84 Article 5 du décret-loi n 2011-116 du 2
novembre 2011.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 59
















Page 60
Ghias Aljundi
(analyste des médias
sociaux) et Karen
AbuZayd (Leader de
la mission)
s'entretiennent avec
un agent d'un
bureau de vote à
Tunis.
exerçant un mandat de six ans, non
renouvelable.
85
Conformément à l'article 148 de la
Constitution de 2014, la HAICA
continuera d'exercer ses fonctions
jusqu'à l'élection de l’Instance de
communication audiovisuelle, l'une
des cinq instances indépendantes
créées par la Constitution. Selon la
Constitution, le premier Parlement,
démocratiquement élu, aurait dû
mettre en œuvre la nouvelle Instance
après les élections de 2014.
Cependant, à ce jour, cela n'a pas été
fait. La HAICA finalise un projet de
loi pour organiser l’Instance, qu'elle
espère que le gouvernement
présentera au parlement
nouvellement élu.
La HAICA est chargée de surveiller
les médias audiovisuels pendant la
période électorale. Le 21 août 2019,
85 Arrêté républicain n° 2013-156 du 27 mai
2013, portant nomination des membres de la
HAICA. Les membres de la HAICA sont :
Nouri Lajmi, Président ; Omar Oueslati
l'ISIE et la HAICA ont rendu une
décision conjointe fixant les règles et
procédures d'utilisation des médias
audiovisuels et des moyens de
communication pendant la période
électorale. Cette décision réglemente
le droit d'accès aux médias, sur la
base du principe d'un traitement
équitable de tous les candidats. Les
médias doivent également assurer la
diversité des opinions par la présence
de différents courants idéologiques et
politiques.
Pendant la campagne électorale, tout
discours officiel, ou intervention
médiatique du Président de la
République, du gouvernement, du
parlement, des conseils régionaux ou
municipaux, ou de toute autre
autorité publique contenant de la
propagande électorale directe, ou
Vice-président; Soukeina Abdessamad,
Radhia Saidi, Hichem Snoussi, Habib
Belaid, Salah Sersi et Adel Bsili.
60 | The Carter Center Rapport des élections



Page 61
indirecte, est interdit. Tous les
médias ont le droit de couvrir la
campagne électorale. La publicité
politique payante dans les médias est
interdite pendant la période
électorale. La HAICA est censée
informer l'ISIE de toutes les
violations commises et des sanctions
qu'elle a imposées, et ce, dans les 24
heures suivant la prise de la décision.
86
Conclusion
La HAICA a suivi la campagne de
manière précise et bien organisée et a
publié des rapports sur les résultats
de son suivi. Une équipe de 34
moniteurs et cinq informaticiens ont
réalisé ces efforts. La HAICA a émis
des avertissements et des sanctions à
plusieurs stations. La HAICA a
informé l'ISIE de toutes les
violations et des mesures qu'elle a
prises dans les 24 heures qui suivent
ses décisions. Le Centre Carter
recommande une meilleure
collaboration entre la HAICA et
l'ISIE en partageant quotidiennement
des informations sur la surveillance
des médias, en particulier pendant la
campagne électorale.
86 Article 73, loi électorale.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 61






























Page 62
Candidats, partis et
campagnes
candidats indépendants qui ne
comptaient pas initialement présenter
de candidats à la présidentielle, ont
décidé de le faire afin de saisir
l'opportunité de promouvoir leurs
partis, ou listes, pour les élections
législatives pendant la campagne des
élections présidentielles.
Campagne au premier tour de
l'élection présidentielle
La mort du président a entraîné une
période de campagne électorale
raccourcie à deux semaines pour le
premier tour de l'élection
présidentielle. Certains des 26
candidats étaient des personnages
bien connus, tandis que d'autres
étaient relativement nouveaux. La
campagne a permis à tous les
candidats de se faire connaître et de
présenter leurs programmes
électoraux aux Tunisiens.
Les droits à la liberté d'expression et
de réunion ont été largement
respectés tout au long des périodes
de campagne. Des observateurs à
long terme ont indiqué que les
Le pluralisme politique et un
environnement de campagne ouvert
permettant un véritable choix pour
les électeurs, sont des aspects
essentiels des élections
démocratiques. Un traitement
équitable des candidats et des partis
lors d'une élection, ainsi que le
maintien d'un environnement de
campagne ouvert et transparent, sont
importants pour garantir l'intégrité du
processus électoral démocratique. Un
véritable choix de candidats, un
environnement électoral libre, des
conditions de concurrence équitables
pour les candidats et un
environnement de campagne ouvert
et transparent sont tous des aspects
essentiels de la démocratie. L'égalité
de traitement des candidats et des
partis est essentielle pour garantir
l'intégrité du processus électoral
démocratique.
87
La mort subite du Président de la
République et le changement de date
et de séquence des élections qui a
suivi ont contraint les candidats et les
partis à modifier leurs calculs
politiques. Plusieurs partis et
87 PIDCP, article 25.
62 | The Carter Center Rapport des élections























Page 63
observateurs de campagne de l'ISIE
étaient visibles et actifs dans toutes
les régions. Plusieurs représentants
de la campagne se sont plaints des
interrogatoires actifs des
observateurs de l'ISIE, affirmant
qu'ils étaient intrusifs.
Le 23 août, 10 jours avant le début
de la période de campagne électorale
pour le premier tour des élections,
qui a commencé le 2 septembre, le
candidat à la présidentielle et
l'homme d'affaires imminent Nabil
Karoui a été arrêté et emprisonné
suite à un mandat dépôt délivré par
une cour d'appel. Karoui était l'une
des cibles présumées des
amendements manqués à la loi
électorale, qui l'auraient
effectivement empêché de se
présenter. Les accusations, qui
alléguaient une évasion fiscale et un
blanchiment d'argent, datent de 2016
et font toujours l'objet d'une
instruction judiciaire. Le moment de
la détention de Karoui a soulevé des
questions relatives à l’ingérence
politique dans le système judiciaire,
étant donné qu’une juridiction
inférieure lui avait permis de rester
en liberté pendant l’enquête. La
plainte initiale était basée sur des
informations fournies par « I
Watch », une organisation nationale
de la société civile (OSC), qui a
également fourni des informations
ciblant le candidat à la présidence et
le Chef du Gouvernement Youssef
Chahed, ainsi que l'ancien membre
du Conseil de la Shoura du parti
d'Ennahda et candidat à la présidence
de 2019, Hatem Boulabiar. Aucun de
ces derniers n'a été arrêté.
L’arrestation de Karoui n’a eu
aucune incidence sur sa candidature
officielle et son nom est resté sur le
bulletin de vote. Cependant, sa
détention signifiait qu'il était
désavantagé, car il ne pouvait pas
mener sa campagne.
La période de campagne a été
caractérisée principalement par un
manque d’éclat. Les compagnes ont
commencé lentement dans tout le
pays, avec des panneaux d'affichage
et des publicités sur les réseaux
sociaux, apparus le premier jour, et
qui se sont intensifiées durant la
deuxième semaine. Le plus souvent,
les candidats ont organisé des
rassemblements, érigé des tentes de
campagne, distribué des dépliants et
des brochures, posé des affiches et
ont aussi opté pour des activités de
porte à porte. Karoui et l'ancien
ministre de la Défense Abdelakarim
Zbidi ont également utilisé un grand
nombre de panneaux d'affichage, ce
qui, en raison des coûts impliqués, a
conduit des candidats rivaux à les
accuser d'avoir dépassé les plafonds
des dépenses autorisés pour la
campagne.
Pour la première fois, la période de campagne
comprenait des débats télévisés en direct. Trois séries
de débats ont été organisés sur trois jours consécutifs,
dont deux comprenant neuf candidats et un avec
seulement huit
L'ancien enseignant de droit
constitutionnel Kaïs Saïed a adopté
une stratégie entièrement différente,
menant une campagne discrète de
contacts directs et individuels avec
les électeurs, par le biais de visites
sur le terrain dans les régions. Il
n'était souvent pas accompagné par
du personnel et il tenait souvent de
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 63


Page 64
publicité politique a réduit son
efficacité, entraînant un manque de
transparence sur qui parrainait et
payait les publicités politiques.
Pour la première fois, la période de
campagne comprenait des débats
télévisés en direct. Trois séries de
débats ont été organisés sur trois
jours consécutifs, dont deux
comprenant neuf candidats et un
avec seulement huit. Un tirage au
sort a été organisé pour déterminer le
jour où les candidats se
présenteraient aux débats. Il y a eu
cependant, une controverse lorsque
trois candidats, qui représentaient les
trois plus grands partis au Parlement,
ont été autorisés à choisir le soir où
ils souhaitaient débattre. Deux
candidats n'ont pas participé au
débat. En effet, Karoui est resté en
détention et Slim Riahi, installé à
l'étranger, a choisi de ne pas
retourner dans le pays.
Les débats se sont avérés très
populaires, car ils étaient les
premiers du genre dans la région,
attirant un large public tant à
l’intérieur du pays qu'à l'étranger.
Les débats ont permis aux candidats
de se faire connaître du public et au
public de mieux comprendre les
personnalités qui se trouvent derrière
les noms.
La normalisation des relations entre
Ennahda et les partis progressistes,
depuis 2014, a conduit à un
environnement de campagne moins
conflictuel et tendu. Les observateurs
à long terme du Centre Carter ont
Les observateurs du
Centre Carter ont
utilisé l'application
ELMO, à travers le
pays, pour recueillir
des données sur la
mise en œuvre des
élections au cours
des trois tours des
élections.
petites réunions dans les cafés. Il
s'est appuyé sur son cercle
d'étudiants supporters pour diffuser
le message de sa campagne sur les
réseaux sociaux. Il a refusé
d'accepter la subvention d'argent
public à laquelle il avait droit et n'a
fait aucun effort pour collecter des
donations.
De nombreux candidats à la
présidentielle et leurs partisans ont
utilisé les médias sociaux
(principalement Facebook) pour
promouvoir leurs campagnes. Des
activités de sensibilisation ont
également eu lieu, dans une moindre
mesure, sur Twitter et Instagram. La
veille du premier tour de l'élection
présidentielle, Centre Carter a
observé des publicités sponsorisées
soutenant un certain nombre de
candidats sur Facebook, en violation
de la période du silence électorale de
24 heures.
88 Bien que Facebook ait
pris des mesures pour rendre l'achat
de publicités politiques plus
transparent, un manque de critères
clairs et cohérents pour définir la
88 Le Centre Carter a documenté 83
annonces sponsorisées diffusées le 14
septembre et 52 diffusées le 15 septembre.
64 | The Carter Center Rapport des élections



Page 65
confirmé qu'il existait une
atmosphère positive entre les
principaux partis politiques dans
différentes régions du pays, même
lorsque des événements de campagne
avaient eu lieu le même jour dans la
même zone. Aucun incident majeur,
mettant en cause la sécurité, n'a été
signalé.
Les contrôleurs de campagne de
l'ISIE ont signalé environ 650
violations de la campagne. Les
violations concernaient
principalement la campagne précoce,
les activités de campagne non
déclarées, les affiches en dehors des
emplacements dédiés et l'utilisation
d'enfants dans les campagnes. Selon
l'ISIE, aucune de ces violations n'a
été suffisamment grave pour affecter
les résultats de l'élection
présidentielle.
La HAICA a interdit à deux chaînes
de télévision (Nessma, Zeitouna) et
une station de radio (Coran) de
couvrir la campagne électorale
présidentielle à cause de leur manque
de neutralité et leur soutien à des
partis et candidats spécifiques.
89 La
HAICA a adressé des avertissements
et appliqué des sanctions à plusieurs
radiodiffuseurs. Les sanctions
allaient de 10 000 à 50 000 TND
pour des candidats spécifiques. Les
chaînes de télévision qui ont fait
l'objet de sanctions comprenaient
Nessma TV, la chaîne publique Al
Wataniya TV, Alhiwar Ettounsi et
Telvza TV. La HAICA a également
sanctionné des chaînes de télévision
pour avoir commenté, ou publié, les
résultats de sondages liés aux
élections pendant la période de
campagne.
90
Nessma TV, dont Nabil Karoui est
copropriétaire, a été condamnée à
quatre amendes par la HAICA, pour
avoir diffusé de la publicité politique
en faveur de la candidature de ce
dernier et à cause de sa propagande
contre Ennahdha. Les amendes ont
progressivement augmenté pour
chaque infraction, passant de 20 000
TND (7 000 $ US) à 160 000 TND
(56 000 $ US).
Certains observateurs à long terme
du Centre Carter ont signalé
l'utilisation de ressources d'État par
des candidats, qui étaient des
responsables du gouvernement, y
compris l'utilisation de voitures de
l'État et l'utilisation de ressources
d'État, notamment des autobus, pour
transporter les participants aux
rassemblements électoraux.
91
Conclusion
Les électeurs avaient un véritable
choix de candidats et, à l'exception
de Karoui, qui est resté détenu tout
au long de la campagne électorale,
les candidats ont bénéficié d'un
environnement de campagne ouvert
et n'ont fait face à aucune entrave à
89 Nessma TV appartient en partie à Nabil
Karoui. Le propriétaire de Zeitouna est
considéré comme proche d'Ennahda, et le
propriétaire de la station de radio « Coran »
était à la tête de la liste du parti Errahma
dans la circonscription électorale de Ben
Arous.
90 L'article 70 de la loi électorale interdit de
publier, ou de commenter, les sondages
d'opinion pendant la campagne électorale.
91 Ce fut le cas du Chef du Gouvernement
Youssef Chahed (Tahya Tounes) et du
président par intérim du Parlement,
Abdelfateh Mourou (Ennahdha).
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 65




Page 66
leur droit de mener une campagne.
Bien que l'arrestation de Karoui n’ait
eu aucune incidence sur sa
candidature officielle et que son nom
soit resté dans le bulletin de vote, sa
détention signifiait qu'il était
désavantagé car, il ne pouvait pas
faire campagne personnellement. En
outre, les circonstances entourant sa
détention ont soulevé des questions
concernant l'interférence du politique
dans le système judiciaire et l'égalité
de traitement des candidats. Ces
raisons ont partiellement contribué
au fait que sa candidature soit restée
saillante dans les médias sociaux et
traditionnels. L’utilisation massive
des médias sociaux au cours de la
campagne a été marquée par un
manque de transparence s’agissant
de l’identification de ceux qui
parrainaient et payaient les
publicités.
Les campagnes pour les élections
législatives
La campagne pour les élections
législatives a commencé le 14
septembre, coïncidant avec le jour du
silence électorale pour l’élection
présidentielle, et a duré 22 jours. Les
droits à la liberté d'expression et de
réunion ont été respectés dans tout le
pays. Cependant, de nombreux
candidats, indépendants ou
appartenant à des partis politiques,
ont violé la restriction des
campagnes anticipées.
92
Bien que la Constitution donne au
Parlement plus de pouvoirs et
92 L'article 154 sanctionne les campagnes
prématurées par des amendes allant de 5 000
à 10 000 TND (l'équivalent de 1 722 $ US à
3 443 $ US).
66 | The Carter Center Rapport des élections
d'autorité, la campagne électorale
parlementaire a été éclipsée par les
résultats du premier tour de l'élection
présidentielle et la détention continue
de Karoui. La campagne a été
discrète et, dans certaines régions,
inexistante, entraînant l'absence d'un
débat de fond sur les politiques ou
les programmes électoraux des
partis. L'attention des médias est
restée concentrée sur l'élection
présidentielle.
Au lendemain du premier tour de
l'élection présidentielle, la plupart
des partis politiques reconnus ont été
lents à entamer leurs campagnes
alors qu'ils évaluaient leurs stratégies
de campagne, tandis que des listes
indépendantes ont rapidement
entamé leur campagne pour profiter
de l’élan antisystème qui a émergé
lors du premier tour de l'élection
présidentielle. Les partis établis ont
réévalué leur stratégie de grands
rassemblements et d’événements
publics, qui ne semblent pas avoir
influencé les électeurs lors de la
campagne présidentielle. Les
observateurs à long terme du Centre
Carter ont indiqué que la plupart des
partis avaient mené des campagnes
discrètes pour les élections
législatives, distribuant des tracts et
menant des activités de porte à porte.
93
De nombreux partis ont informé la
mission du Centre Carter qu'ils
s'efforceraient de contacter les
électeurs qui soutiennent le candidat
à la présidence Saïed à travers les
93 De nombreux partis ont déclaré qu'ils
manquaient de ressources financières pour
mener une campagne a plus grande échelle.



Page 67
réseaux sociaux et qu'ils
intensifieraient leurs activités de
campagne traditionnelles dans les
cinq jours précédant les élections. En
général, les listes indépendantes et
certains partis ont indiqué qu'ils
avaient du mal à financer leurs
campagnes, compte tenu des
nouvelles dispositions légales sur le
financement des campagnes, qui ont
instauré un système de
remboursement des dépenses
électorales en remplacement de celui
des avances. La plupart des candidats
indépendants ont utilisé des fonds
personnels pour financer leur
campagne.
La campagne électorale pour les
élections parlementaires a été
éclipsée par la détention prolongée
du candidat à la présidence Nabil
Karoui et par les effets qu'elle
pourrait avoir sur le second tour de
l'élection présidentielle. Les médias
se sont concentrés, presque
exclusivement, sur ce sujet et sur une
éventuelle contestation des résultats
en raison du refus de favoriser
l’égalité des chances dans la
réalisation de la campagne, ce qui a
rendu difficile pour les candidats aux
élections législatives de
communiquer leurs messages aux
électeurs.
Comme ce fut le cas lors pour
l'élection présidentielle, les candidats
n'ont pas toujours respecté
l'obligation d'informer les autorités
électorales de tout événement de
campagne 48 heures à l'avance, et de
nombreux événements notifiés aux
IRIE n'ont pas eu lieu. En outre, les
candidats ont fourni le nom du lieu
où leurs activités devaient avoir lieu,
mais pas l'adresse précise, ce qui
rend difficile de trouver
l'emplacement exact de leurs
activités, en particulier dans les
grandes circonscriptions. En
conséquence, il a été difficile pour
les contrôleurs de campagne des
IRIE et de l'ISIE de surveiller tous
les événements de la campagne.
Les contrôleurs de campagne de
l'IRIE et de l'ISIE ont signalé des
violations mineures des règles de
campagne pendant la période de
campagne parlementaire. Il s'agissait
principalement de mener une
campagne précoce, mener des
activités de campagne sans les
déclarer au préalable, poser des
affiches en dehors des emplacements
désignés ou au-dessus des affiches
des adversaires, violer les règles
relatives à la publicité politique et
utiliser des enfants dans les
campagnes. Selon les IRIE, aucune
des violations n'a été suffisamment
grave pour affecter les résultats des
élections. Les observateurs du Centre
Carter n'ont signalé aucune
utilisation de ressources
administratives pendant la
campagne. Les femmes qui
dirigeaient les listes de Qalb Tounes
dans les circonscriptions électorales
de Sfax 1 et de Sidi Bouzid, ont
déclaré avoir subi des violences
verbales. Les candidates, en
question, ont choisi de ne pas
déposer de plaintes formelles.
La télévision nationale, en
collaboration avec l’Initiative
Munathara, a organisé trois débats
entre les listes de candidats aux
élections parlementaires. Les débats
ont eu lieu les 30 septembre, 1
er et 02
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 67


Page 68
contesté le processus de sélection
pour le Débat sur la base de sa non-
conformité à l’exigence légale que
tous les candidats doivent être traités
sur un pied d’égalité en matière de
couverture médiatique et
d’opportunités de campagne. Le
tribunal de première instance de
Tunis a rejeté le recours et autorisé le
déroulement des débats.
Campagne au deuxième tour de
l'élection présidentielle
La campagne pour le deuxième tour
de l'élection présidentielle a
officiellement commencé le 3
octobre, au lendemain de l'annonce
par l'ISIE des résultats définitifs du
premier tour. Saïed a annoncé qu'il
ne mènerait pas personnellement
campagne car cela créerait un
avantage injuste sur son adversaire,
qui est resté en détention, affirmant
que c'était l’attitude « éthique » à
appliquer. Cependant, les partisans
de Saïed ont continué de faire
campagne pour lui sur le terrain et
sur les réseaux sociaux.
96 En raison
de la détention de Karoui et du
caractère innovant de la campagne
non traditionnelle de Saïed, les deux
candidats à la présidentielle étaient
médiatique. La troisième catégorie
comprenait ceux dont les listes étaient
présentes dans 2 à 11 circonscriptions ; ils
devaient recevoir 20 à 30% de la couverture
médiatique. Enfin, la quatrième catégorie
concernait les listes uniques se présentant
dans une circonscription ; ils devraient
obtenir 10% de la couverture médiatique.
96
https://www.aljazeera.com/news/2019/10/tu
nisia-presidential-hopeful-halts-campaign-
ethical-reasons191005143313410.html
(Consulté le 24 mars 2020).
L'observatrice a long
terme Marie Clemence
(Côte d'Ivoire) et
l'observatrice a court
terme Christa Mueller
(Allemagne),
s'entretiennent juste
avant de se déployer
dans leurs zones de
responsabilité en
prévision du jour des
élections.
octobre. Vingt-sept représentants des
1.341 listes y ont participé. 94 Les
participants ont été choisis par tirage
au sort parmi les quatre catégories
fixées par la décision conjointe entre
l'ISIE et la HAICA, qui étaient
basées sur le nombre de
circonscriptions dans lesquelles des
partis ou des coalitions se
présentaient.
95 Les débats ont été
plus interactifs que ceux de l'élection
présidentielle, puisque les candidats
pouvaient s’interroger entre eux. Les
trois thèmes principaux étaient le
développement, l'économie et les
questions sociales.
Al Badil, le parti de l'ancien Chef du
Gouvernement Mehdi Jomaa, qui n'a
pas été tiré au sort pour participer, a
94 Neuf représentants de listes ont participé à
chacun des débats.
95 L’accord appelle à une couverture
médiatique qui soit proportionnelle au
nombre de listes qu'un parti donné ou une
coalition a dans le pays. La première
catégorie comprenait ceux dont les listes
étaient présentes dans 28 à 33
circonscriptions ; cette catégorie devait
recevoir 30 à 40% de la couverture
médiatique. La deuxième catégorie
comprenait ceux dont les listes étaient
présentes dans 12 à 27 circonscriptions ; ils
devaient recevoir 20 à 30% de la couverture
68 | The Carter Center Rapport des élections



Page 69
constamment sous les feux de
l’actualité.
Avant le jour de l’élection, les
observateurs à long terme du Centre
Carter n'ont signalé aucun grand
événement de campagne pour aucun
des deux candidats dans les régions.
Cependant, des observateurs ont
indiqué que des volontaires avaient
distribué des tracts et avaient mené
des activités de porte-à-porte. La
plupart des campagnes ont eu lieu
sur les réseaux sociaux.
Avant sa remise en liberté le 9
octobre, les avocats de Karoui ont
déposé une requête auprès du
tribunal administratif et de l’ISIE
demandant que l’élection soit
reportée d’une semaine pour lui
permettre de faire campagne sur un
pied d’égalité avec Saïed. Le
président de l'ISIE, Nabil Baffoun, a
annoncé le 2 octobre, lorsque les
résultats du premier tour ont été
finalisés, que l'ISIE avait l'obligation
constitutionnelle d'achever le
processus électoral dans le délai
imparti et n'avait pas le pouvoir
d'annuler ou de retarder le deuxième
tour. Le tribunal administratif a
rejeté la requête, déclarant qu'il
n'était pas habilité à passer outre la
disposition constitutionnelle exigeant
que le second tour ait lieu dans les
deux semaines suivant l'annonce du
résultat final du premier tour.
Karoui a reçu une couverture
médiatique importante lors de sa
libération le 9 octobre et a ensuite
accordé plusieurs interviews aux
médias. Le 11 octobre, la chaîne de
télévision publique a organisé un
débat entre Saïed et Karoui. Les
organisateurs ont sélectionné quatre
thèmes pour le débat : la défense et
la sécurité nationale, la politique
étrangère, les relations du président
avec le Parlement et le chef du
gouvernement et les affaires
publiques. Pour chaque sujet, ils ont
demandé aux candidats de répondre à
trois questions. Les candidats ont eu
du temps à la fin de chaque thème
pour développer leurs promesses
électorales spécifiques. Malgré les
efforts des modérateurs pour
encourager les deux candidats à
interagir directement, ces derniers se
sont souvent abstenus de le faire.
Selon l'un des organisateurs du
débat, l’Initiative Munathara, 6,4
millions de citoyens ont regardé le
débat, le plus grand public jamais
enregistré dans l'histoire de la
télévision tunisienne.
97 Ce nombre
n'inclut pas, au moins, un million de
téléspectateurs en lifestreaming, ni le
public radiophonique, ni les
téléspectateurs dans les autres pays
du Monde arabe.
Les partisans des deux candidats ont
tenu leurs derniers rassemblements à
Tunis le 11 octobre à l’Avenue
Habib Bourguiba. Bien que les deux
groupes se soient mélangés, aucune
altercation n'a été signalée.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 69










Page 70
Financement des
campagnes électorales
Il ne peut y avoir d’élections
démocratiques sans des règles
équitables pour le financement des
campagnes électorales. La législation
électorale devrait spécifiquement
prévoir la transparence des dons aux
activités de campagne des candidats,
la présentation standardisée des
comptes de campagne, une limitation
raisonnable des dépenses de
campagne, des mécanismes
permettant de soumettre des rapports
réguliers et des sanctions effectives
et dissuasives.
98
Le plafond des dépenses pour les
campagnes électorales était basé sur
Le plafond des dépenses pour les campagnes électorales
était basé sur des critères qui comprenaient la taille de la
circonscription, le nombre d'électeurs et le coût de la vie
dans une circonscription donnée. Celles-ci sont fixées par
un décret gouvernemental après consultation de l'ISIE.
98 Conseil de l’Europe (Comité des
Ministres), Recommandations (2003)4,
Article 3(b).
99 Loi électorale, article 81.
100 Article 9 de la décision de l’ISIE n 20 de
2014 sur le financement des campagnes.
70 | The Carter Center Rapport des élections
des critères qui comprenaient la taille
de la circonscription, le nombre
d'électeurs et le coût de la vie dans
une circonscription donnée. Celles-ci
sont fixées par un décret
gouvernemental après consultation
de l'ISIE.
99 La loi interdit les
contributions de donateurs étrangers,
ou inconnus, ainsi que de sociétés et
de personnes morales. Les partis
politiques n'ont pas été autorisés à
financer la campagne de leurs
candidats aux élections
présidentielles.
100
Pour le premier tour de l'élection
présidentielle, le plafond des
dépenses était de 1 768 500 TND
(620 520 $ US) avec un
financement public fixé à 25 TND
pour 1 000 électeurs, pour un total
de 176 850 TND par candidat (62
052 $ US). 101 Pour l'élection
législative, le plafond global des
dépenses et le financement public
variaient selon la circonscription.
Le financement public variait entre 5
500 TND (1 925 $ US) à Tozeur et
101 Décret n° 754 du 22 août 2019, fixant le
plafond de dépenses de la campagne
électorale ainsi que le plafond de
financement privé et le plafond du
financement public et ses conditions et
procédures pour l'élection présidentielle de
2019.















Page 71
16 484 TND (5 769 $ US) à Sousse.
102 Bien que le Parlement ait
augmenté le plafond des dépenses
avant les élections de 2019, plusieurs
parties prenantes le jugeaient encore
trop bas pour mener une campagne
significative et efficace, ce qui incite
les candidats à dépasser le plafond et
à ne pas déclarer pleinement leurs
dépenses.
La Cour des comptes est chargée
d'examiner les rapports de dépenses
de campagne et possède le pouvoir,
dans un délai de six mois à compter
de la publication des résultats
définitifs, d'annuler l'élection de
chaque membre de la nouvelle
assemblée élue, qui s'est présenté sur
une liste qui a réalisé un
dépassement de la limite de dépenses
de campagne de plus de 75%, ou n'a
pas soumis ses états financiers, selon
la procédure requise par la loi.
103
Bien que la Cour des comptes soit
habilitée à déployer des contrôleurs
de campagne pour calculer les
dépenses de campagne et signaler les
violations financières, la Cour ne
dispose pas d'assez de contrôleurs
bien formés pour observer toutes les
activités de la campagne.
Bien que la loi électorale stipule que
les activités de tiers soutenant un
candidat, ou une liste, sont
considérées comme faisant partie de
la campagne et que de telles
dépenses devraient être incluses dans
les rapports, aucune réglementation
claire sur les actes des tiers n’a été
mise en place, ni de mécanismes
pour les contrôler. 104 En outre, la loi
ne précise pas si cela fait une
différence si le candidat ou la liste
accepte ou approuve les actes de tiers
partisans.
Le système de financement des campagnes continue de
souffrir d'un manque de transparence, puisqu’il n’oblige
pas à publier de rapports intermédiaires, et aucun
mécanisme n'existe pour permettre au public de revoir
les dépenses des campagnes avant le jour de l’élection.
Le système de financement des
campagnes continue de souffrir d'un
manque de transparence, puisqu’il
n’oblige pas à publier de rapports
intermédiaires, et aucun mécanisme
n'existe pour permettre au public de
revoir les dépenses des campagnes
avant le jour de l’élection. L'absence
d'obligation de faire un rapport sur
les dons, ou les dépenses de
campagne avant le jour des élections
rend difficile pour les électeurs
d'évaluer les sources de financement
du candidat, ou les conflits d'intérêts
potentiels, avant de voter. De plus,
en raison de l'absence d'accord entre
l'ISIE et Facebook sur les
informations concernant les sponsors
et les payeurs des publicités
politiques, les informations requises
par la loi tunisienne concernant le
financement des campagnes n'ont pas
pu être collectées et rendues
publiques.
102 Décret n° 755 du 22 août 2019, fixant le
plafond de dépenses de
la campagne
électorale ainsi que le plafond de financement
privé et le plafond du financement public et
ses conditions et procédures pour
élections législatives de 2019
103 Article 98, loi électorale.
104 Article 3, loi électorale.
les
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 71





Page 72
Observation des réseaux
sociaux
Cadre juridique
Le rapport de l'ONU, du rapporteur
spécial sur la promotion, la
protection et la jouissance des droits
de l'homme sur Internet, établit que
les mêmes droits que les personnes
ont hors ligne doivent également être
protégés en ligne. Cela s'applique, en
particulier, à la liberté d'expression
conformément au PIDCP.
105 Il
comprend la liberté de rechercher, de
recevoir et de communiquer des
informations et des idées de toutes
sortes, y compris sur les modes
d'expressions électroniques et basés
sur Internet. 106 Les normes
internationales mentionnent que la
libre communication des
informations et des idées par les
électeurs et les candidats, y compris
sur Internet, est essentielle pour
mener de véritables élections.
107
Cela comprend la liberté de faire
campagne pour les élections et de
faire connaître des idées politiques.
108
La constitution tunisienne garantit la
liberté d'opinion, de pensée et
d'expression.
109 La liberté
s'applique
indépendamment
105 Le rapport du rapporteur spécial sur la
promotion, la protection et la jouissance des
droits de l'Homme sur Internet affirme que
«les mêmes droits que les personnes ont hors
ligne doivent également être protégés en
ligne, en particulier la liberté d'expression,
qui
des
frontières et par le biais de tout média de son
choix, conformément à l'article 19 de la
Déclaration universelle des droits de
l'Homme et du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques. » Conseil des droits
de l'homme, U.N. Doc. A / HRC / 38/35 (6
avril 2018).
106 Observation générale 34 au PIDCP,
paragraphe 12 : « Le paragraphe 2 protège
toutes les formes d'expression et les moyens
de leur diffusion. […] englobant toutes les
formes d'expression audiovisuelle ainsi que
les modes d'expression électroniques et
basés sur Internet. »
107 Observation générale 34 au PIDCP,
paragraphe 12 : « La libre communication des
informations et des idées par les électeurs et
72 | The Carter Center Rapport des élections
les candidats est essentielle pour mener de
véritables élections. Cela inclut le droit pour
tous, y compris les partis politiques, les
candidats et leurs partisans, de rechercher,
recevoir et transmettre des idées par tous les
moyens de leur choix, y compris, mais sans
s'y limiter, l'écriture, le discours, la presse
écrite, l'art ou Internet. » Le CdE (Comité des
Ministres) a adopté une position similaire
dans sa Déclaration sur l'Etat de droit dans la
société de l'information, article 1.
108 Observation générale 25 du PIDCP,
paragraphe 25, stipule que « afin d'assurer la
pleine jouissance des droits protégés par
l'article
communication
d'informations et d'idées sur les questions
publiques et politiques entre les citoyens, les
candidats et les élus est essentielle. […] Elle
exige la pleine jouissance et le respect des
droits garantis par les articles 19, 21 et 22 du
Pacte, y compris la liberté […] de mener une
campagne pour les élections et de faire
connaître ses idées politiques. »
109 Constitution de 2014, article 31.
libre
25,
la








Page 73
Méthodologie
Le rôle des réseaux sociaux dans les
campagnes en Tunisie a
considérablement augmenté depuis
les élections de 2014. Les réseaux
sociaux servent à forger les opinions
des électeurs et à éclairer leurs choix.
En Tunisie, les réseaux sociaux ont
été largement utilisés lors des trois
campagnes électorales de 2019.
Le monitoring effectué par le Centre
Carter sur l'utilisation des campagnes
sur les réseaux sociaux a commencé
en septembre 2019 et a duré jusqu'à
l'annonce des résultats définitifs. Le
suivi des réseaux sociaux a permis de
Les leaders de la
Mission, Salam Fayyad,
ancien Premier ministre
de Palestine, et Tana de
Zulueta répondent aux
questions des médias à
Tunis avant les élections
présidentielles.
d'expression est également décrite
par le décret-loi sur la presse,
l'imprimerie et l'édition.
110
Cependant, les dispositions sur la
liberté d'expression consacrées par
plusieurs lois, y compris le code de
justice militaire, le code pénal et le
code des télécommunications,
criminalisent la diffamation et sont
utilisées pour engager des poursuites
contre l’expression en ligne, en
violation des normes internationales.
111 Selon Human Rights Watch, les
tribunaux ont condamné au moins
six Tunisiens depuis 2017 a des
peines d’emprisonnement pour avoir
critiqué en ligne les forces de
sécurité, ou des responsables
gouvernementaux.
112 Bien que le
décret-loi protège les journalistes
professionnels contre
l'emprisonnement, il ne s'applique
pas cependant aux blogueurs et aux
journalistes citoyens, ce qui est en
contradiction avec les normes
internationales.
113 En pratique, selon
le Syndicat national des journalistes
tunisiens, certains blogueurs se sont
appuyés sur le décret-loi pour se
défendre lors des actions en justice
engagées contre eux.
conformément
110 Décret-loi 2011-115, relatif à la liberté de
la presse, de l'impression et de l'édition.,
article 1
111 La diffamation est passible d'une peine
d'emprisonnement
aux
articles 245 à 248 du code pénal et à l'article
91 du code de justice militaire. L'article 86 du
code des télécommunications prévoit jusqu'à
toute
deux ans d'emprisonnement pour
reconnue coupable d'avoir «
personne
sciemment
de
communication publics pour insulter ou
déranger les autres. »
112 « Tunisie : poursuites pour commentaire
en ligne : les lois répressives sapent la libre
»
expression
réseaux
utilisé
les
https://www.hrw.org/news/2019/10/15/tunisi
a-prosecutions-online-commentary. Consulté
le 20 février 2020.
113 L'article 7 du décret-loi 2011-115 relatif à
la liberté de la presse, de l'impression et de
l'édition, définit le « journaliste professionnel
» comme une personne diplômée dont
l'activité principale consiste en la collecte et
la publication des informations, des opinions,
des idées et leur transmission principalement
au public de façon régulière, au sein d’un ou
de plusieurs établissements d’information
audiovisuelle ou d’information électronique.
Un
tirer
journaliste professionnel doit
l'essentiel de ses revenus de cette activité.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 73



Page 74
comprendre et d'analyser le débat
public dans le pays, avant et pendant
les élections. Les observateurs du
Centre se sont concentrés sur les
outils et activités des réseaux sociaux
les plus populaires en Tunisie et ont
évalué leur utilisation pendant les
campagnes électorales et leur impact
global sur les élections.
Le monitoring effectué par le Centre
Carter des réseaux sociaux s'est
concentré sur Facebook, puisque
c'est la plate-forme la plus populaire
en Tunisie, et a évalué les pages
officielles et non officielles des
candidats.
114 Il a également observé,
dans une moindre mesure, les
activités de campagne sur Twitter et
Instagram. Malheureusement, il était
impossible de savoir qui dirigeait des
dizaines de comptes soutenant les
candidats en raison du manque
d'accès ou du manque de
transparence de l’administration de
Facebook.
Le Centre a observé la publicité
politique, la désinformation, la
diffamation, le traitement des
femmes candidates, les discours de
haine et d'incitation à la violence. Il a
également observé les attaques et
contre-attaques des candidats. La
méthodologie d’observation des
réseaux sociaux comprenait une
combinaison d'examen
documentaire, de recherche
quantitative manuelle et de recherche
qualitative.
En plus de l’observation manuelle,
l'équipe a utilisé un outil numérique
appelé CrowdTangle pour observer
le contenu des pages Facebook. Cet
outil fournit des analyses des réseaux
sociaux et peut suivre la manière
dont le contenu est partagé et utilisé
sur Facebook. Il montre l’interaction
reçue pour des liens spécifiques et
quelles pages ont été les plus
partagées. L'outil, créé par Facebook
en 2016, est accessible aux
chercheurs via Facebook. Le Centre
Carter a demandé à Facebook un
accès à CrowdTangle et l’a obtenu.
L'équipe a observé les pages
Facebook officielles et non
officielles des candidats à la
présidence ainsi que les pages
officielles de plusieurs partis
politiques pendant les élections
législatives. Ils ont été suivis
quotidiennement pour les thèmes
mentionnés ci-dessus. Les
informations recueillies, y compris le
nombre d'annonces et de captures
d'écran de toutes les annonces et
publications associées, ont été
archivées. Cela a permis d’avoir un
aperçu de l'utilisation des réseaux
sociaux dans les campagnes
électorales. L'équipe a observé plus
de 200 pages Facebook.
L'équipe a également observé le
comportement coordonné entre les
pages Facebook pour établir les liens
entre les pages officielles et non
officielles des candidats. Certains
candidats et partis ont créé des
groupes fermés, que le Centre n'a pas
pu observer. L’équipe a, toutefois,
collecté des données sur les noms
officiels de ces pages, avant ou
114 Par exemple, il y avait une page très
active appartenant à un coiffeur. Pendant les
élections, la page Facebook est devenue une
plateforme de campagne pour un candidat
spécifique.
74 | The Carter Center Rapport des élections



Page 75
pendant les élections, la date de leur
création et l’endroit où se trouvaient
les administrateurs desdites pages.
Elle a également observé les comptes
Twitter des candidats et des partis,
ainsi que les interactions entre ces
comptes, en plus de certains
hashtags.
Le Centre a analysé les données
recueillies sur Facebook pour évaluer
l'utilisation de la désinformation, du
discours de haine et de la diffamation
dans les publicités politiques. Il a
également évalué le niveau de
coordination entre les pages
Facebook pour identifier des
modèles sur les réseaux sociaux.
Élection présidentielle - Premier
tour
Le Centre Carter a surveillé les pages
vérifiées des 26 candidats à la
présidence, ou qui leur sont
favorables et les pages d'affiliations
ou d'origines inconnues en utilisant
les noms et les photos de profil de
115 Le Centre Carter n'a pas constaté
d'annonces sponsorisées soutenant Abir
Moussi, Kaïs Saïed ou Seifeddine Makhlouf.
Les publicités soutenant Nabil Karoui, Medhi
Jomâa, Hamma Hammami, Mohsen
Marzouk, Moncef Marzouki, Mohamed
Essghaïer Ennouri, Amor Mansour, Slim
Riahi et Abid Briki ont commencé à être
diffusées les 17, 30, 31 Août et 1
er septembre.
La bibliothèque publicitaire de Facebook ne
conserve pas les archives des publicités
sponsorisées en Tunisie (contrairement aux
États-Unis), de sorte que seules les publicités
sponsorisées qui étaient toujours diffusées au
début du monitoring des réseaux sociaux par
le Centre Carter ont été notées.
116 Entre 10 et 20 annonces sponsorisées ont
été diffusées sur les pages vérifiées de
Mohsen Marzouk, Mohamed Essghaïer
Ennouri, Medhi Jomâa, Mohamed Abbou,
chaque candidat. Alors que Kaïs
Saïed n'a pas déclaré de page
officielle à l'ISIE, le Centre Carter a
observé plusieurs pages qui
utilisaient son nom et son image pour
son profil. Cette pratique a donné
l'impression que la page était liée à
sa campagne officielle même si elle
semblait fonctionner de manière
indépendante.
Le Centre Carter a constaté que 23
des 26 pages de candidats diffusaient
des annonces sponsorisées, pendant
la campagne pour le premier tour de
l'élection. Beaucoup ont également
diffusé des annonces avant le début
de la campagne.
115 Certains
candidats ont publié plus de 10
annonces par jour sur leurs pages
officielles en plus des annonces
diffusées sur des pages non affiliées.
116 Vers la fin de la campagne, le
nombre d'annonces sponsorisées
ainsi que le nombre de candidats
soutenus par les annonces
sponsorisées ont considérablement
augmenté.
117
Nabil Karoui et Youssef Chahed lors de la
campagne pour le premier tour de l'élection
présidentielle.
117 Le 2 septembre: 16 annonces sponsorisées
remarquées, soutenant 10 candidats: Nabil
Karoui, Medhi Jomâa, Hamma Hammami,
Mohamed Moncef Marzouki, Mohsen
Marzouk, Mohamed Essghaïer Ennouri,
Amor Mansour, Elyes Fakhfakh, Slim Riahi
et Abid Briki; 14 septembre: 101 annonces
sponsorisées ont été remarquées, soutenant
17 candidats: Mongi Rahoui, Mohamed
Abbou, Nabil Karoui, Medhi Jomâa, Hamma
Hammami, Abdelkarim Zbidi, Mohsen
Marzouk, Mohamed Essghaïer Ennouri,
Mohamed Hechmi Hamdi, Amor Mansour,
Youssef Chahed, Elyes Fakhfakh, Slim
Riahi, Salma Elloumi, Ahmed Safi Said,
Hatem Boulabiar et Abid Briki.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 75



Page 76
Les réseaux sociaux ont été
largement utilisés pendant et après
les débats présidentiels. Les équipes
de campagnes ont mis à jour les
pages des réseaux sociaux des
candidats en temps réel pendant le
débat, en affichant les réponses des
candidats aux questions du débat.
Nabil Karoui, qui était en détention
pendant les débats, a tweeté qu'il
avait été empêché de participer.
Les réseaux sociaux ont été largement utilisés pendant
et après les débats présidentiels. Les équipes de
campagnes ont mis à jour les pages des réseaux sociaux
des candidats en temps réel pendant le débat, en
affichant les réponses des candidats aux questions du
débat.
La veille des élections, le Centre
Carter a observé l’existence de
publicités sponsorisées soutenant un
certain nombre de candidats sur
Facebook, en violation de la période
de silence électorale de 24 heures.
118
Le Centre Carter a également
observé des violations de la période
de silence électorale par des
candidats sur Instagram, et au moins
une équipe de campagne a envoyé
des SMS le jour du silence appelant
les électeurs à soutenir son candidat.
L’élection législative
Le Centre Carter a observé les pages
Facebook des 10 partis et les listes de
118 Le Centre Carter a répertorié 83 annonces
sponsorisées diffusées le 14 septembre et 52
annonces sponsorisées publiées le 15
septembre.
119 Al Badil, Amal Tounes, Courant
Démocratique, Ennahdha, Parti Destourien
Libre, Ich Tounsi, Nida Tounes, Parti du
76 | The Carter Center Rapport des élections
coalitions présentes dans les 33
circonscriptions tunisiennes pour les
élections législatives, ainsi que les
pages soutenant ces listes. La
majorité a utilisé les réseaux sociaux
pour présenter leurs candidats,
annoncer les événements de la
campagne, rendre compte des
activités de la campagne et solliciter
le soutien des électeurs.
119 En outre,
la plupart des listes observées ont
partagé leurs programmes de
campagne sur leurs pages Facebook
nationales et régionales, y compris
les pages de leurs sections situées à
l'étranger. Les candidats ont
démontré des niveaux d'activité et
de professionnalisme variables dans
leurs campagnes sur les réseaux
sociaux en fonction de la stratégie,
de l'analyse de l'électorat, des
messages et des ressources
financières.
Sur un total de 10 listes observées,
neuf ont diffusé des publicités
sponsorisées sur leurs pages
Facebook ou sur des pages de
soutien.
120 Certains ont également
publié des annonces sur les pages des
partis à l'étranger. À l'approche du
jour de vote, le nombre d'annonces
sponsorisées sur les pages soutenant
Ich Tounsi, Ennahda et, dans une
moindre mesure, Tahya Tounes, a
considérablement augmenté.
121
Ich Tounsi a supprimé ses publicités
sponsorisées sur Facebook et s'est
abstenu de publier sur ses pages
Front Populaire, Qalb Tounes et Tahya
Tounes.
120 Nidaa Tounes n’a pas utilisé les annonces
sponsorisées
121 Le Centre Carter a observé 52 annonces
sponsorisées en ligne sur les pages Ich
Tounsi le 1
er octobre, une augmentation par



Page 77
Hannah Park, stagiaire au
Centre Carter, a découvert
le processus de vote en
Tunisie grâce à des visites
pratiques dans les
bureaux de vote. Elle
faisait partie d'une équipe
qui a effectué des
communications par
téléphone avec des
observateurs, recueillant
des données auprès d'eux
sur l'environnement du
jour du scrutin.
nationales et régionales le jour du
silence électoral précédant les
scrutins, mais la majorité des pages
observées ont publié des publicités
politiques pendant la période de
silence.
À plusieurs reprises, le Centre Carter
a constaté des listes de partis ou
indépendantes utilisant les images
des candidats à la présidence et leur
parrainage pour faire réussir leur
propre campagne en ligne.
122 Le
Centre a également observé plusieurs
cas de campagnes de diffamation et
de propos incendiaires sur des pages
qui n'étaient pas clairement affiliées
à des candidats spécifiques.
123 De
rapport aux deux annonces publiées le 27
septembre et aux 37 annonces publiées le 29
septembre ; le Centre a constaté 16 annonces
sponsorisées pour Tahya Tounes le 4
octobre, une augmentation par rapport aux
cinq annonces observées une semaine plus
tôt. Le Centre a répertorié 30 annonces
sponsorisées soutenant Ennahda le 4
octobre, ce qui constitue une augmentation
par rapport à deux annonces observées le 25
septembre.
122 Ces partis comprenaient Qalb Tounes,
Al-Karama, Ennahda, Tahya Tounes (à
Sousse et la liste 31 Tunis-1). À la suite de
la publication par Al-Karama de photos
représentant Kaïs Saïed et Seifeddine
Makhlouf, un communiqué a été publié sur
le site Internet de Kaïs Saïed le 2 octobre
pour informer les lecteurs que Saïed n'avait
annoncé son soutien à aucune liste et que
l'ISIE en avait été informée, afin qu'elle
puisse prendre les mesures appropriées. Des
responsables de l'ISIE ont indiqué que la
question ferait l'objet d'une enquête après les
élections.
123 La plateforme en ligne Sawaab Arraii a
publié un documentaire les 27 et 29
septembre sur son compte Facebook et l'a
diffusé sur la chaîne de télévision Al-
Arabiya, alléguant qu'Ennahda était
impliquée dans l'assassinat des leaders de
l'opposition Chokri Belaid et Mohamed
Brahmi en 2013 via son "organisation
secrete." La candidate Olfa Terras,
fondatrice d’Ich Tounsi, a également été la
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 77



Page 78
ces pages a également été partagé par
des pages de soutien.
En plus de mettre en exergue les
activités de la campagne, les pages
soutenant Karoui se sont largement
concentrées sur sa détention et ont
demandé sa libération ; dénigrant les
autres partis et personnalités
politiques, notamment Ennahda, Ich
Tounsi et Saïed et réfutant les
rumeurs circulant sur les réseaux
sociaux, y compris celles alléguant
qu'il avait l'intention de se retirer de
la course.
124 La page officielle de
Karoui ainsi que les pages le
soutenant ont diffusé des annonces
sponsorisées de manière continue
même si, selon la loi électorale, la
campagne pour le deuxième tour
n'est autorisée qu'après l'annonce des
résultats définitifs du premier tour.
125 La campagne pour le second tour
a officiellement commencé le 3
octobre.
La campagne en ligne de Saïed était
composée de pages Facebook, sans
hiérarchie apparente ni relation
directe avec le candidat. Bien que le
candidat n'ait déclaré aucune page,
ou compte officiel à l'ISIE, le Centre
Carter a répertorié 55 pages
Facebook focalisant explicitement
sur le soutien de sa candidature. 126
Le nombre de pages le soutenant a
augmenté après le premier tour, tout
comme leur nombre de followers.
127
La représentante
du Centre au pays,
Fida Nasrallah,
répondant à une
interview devant
un bureau de vote
à Tunis.
faux sondages d'opinion portant le
logo des sociétés de sondage
tunisiennes existantes ont également
circulé sur Facebook induisant les
électeurs en erreur.
Élection présidentielle - second
tour
Lors du second tour présidentiel, le
soutien en ligne de Nabil Karoui était
moins intense que celui de Kaïs
Saïed. Le Centre a répertorié 55
pages officieuses de campagne
soutenant Saïed et 20 pages
soutenant Karoui. La campagne en
ligne de ce dernier s’articulait autour
de sa page Facebook officielle, celles
de ses partisans et des pages de son
parti, Qalb Tounes ; le contenu de
cible d’attaques répétées liées à ses activités
et à celles de son mari.
124 Mr Karoui, son équipe de campagne et
ses partisans ont publié plusieurs documents
en ligne pour nier qu'il envisageait de se
retirer de la course des élections
présidentielles ou que l'ISIE avait retiré sa
candidature. Ces publications ont eu lieu
dans le contexte d'une controverse en ligne
qui est devenue virale, quelques jours avant
les élections législatives, dans laquelle
Karoui était lié à un effort de lobbying basé
aux États-Unis, qui aurait été dirigé par un
ancien membre du Mossad.
125 La loi électorale de 2014, article 50.
126 Ces pages ne semblaient pas liées au
candidat et les administrateurs de page
n'étaient pas identifiés.
127 Bien que le nombre de followers de Kaïs
Saïed ait augmenté de plus de 750 000 sur
78 | The Carter Center Rapport des élections




Page 79
Le Centre a observé des groupes
publics soutenant Saïed sur
Facebook qui comptaient jusqu'à 200
000 membres. La source et les
administrateurs de la plupart des
pages soutenant Saïed manquent de
la clarté. Un nombre limité de pages
soutenant Saïed ont utilisé des
publications sponsorisées.
Le Centre Carter a observé des
campagnes de diffamation et des
propos incendiaires sur plusieurs
pages soutenant les deux candidats à
la présidentielle. 128 Certains de ces
messages ont été largement partagés
en ligne. À quelques reprises, Saïed a
publiquement pris ses distances par
rapport aux messages incendiaires et
a appelé ses partisans à s'abstenir de
publier de tels messages.
Les efforts d’observation locale
Les OSC tunisiennes ATIDE et « I
Watch » ont observé les plateformes
de réseaux sociaux lors des trois
élections. Ces organisations ont
toutes deux formé des équipes
spécialisées qui ont observé
Facebook et d'autres réseaux sociaux
; leur méthodologie s'est concentrée
sur l'impact de leur utilisation sur les
les 55 pages suivies par le Centre Carter, le
nombre de followers sur les 20 pages Nabil
Karoui suivies par le Centre a augmenté de
150 000 au cours de la même période. Les
pages soutenant Karoui comptaient 756 716
abonnés et ont enregistré 754 201 mentions
« J'aime », tandis que celles soutenant Saïd,
comptaient quelque 2 millions d'abonnés et
presque le même nombre de mentions
« J'aime », (1 926 037) pendant la période
précédant immédiatement le jour du scrutin.
128 Certaines pages Facebook soutenant
Saïed ont utilisé, à plusieurs reprises, un
langage incendiaire qualifiant ceux qui
s'opposaient à lui d’ « infidèles», d’
élections. Ils scrutaient la
désinformation, la manipulation
politique et l'incitation à la violence.
129
Facebook
Comme indiqué précédemment, les
partis politiques et les candidats ont
utilisé Facebook comme principal
outil de campagne et de
communication sur les réseaux
sociaux. Bien que dans d'autres pays,
des données récapitulatives sur
l'utilisation de Facebook pour les
campagnes électorales, soient
disponibles via des accords avec
Facebook, l'ISIE ne disposait pas
d'un tel accord pour rendre ces
informations accessibles en Tunisie.
Selon Facebook, les candidats ou les
conseillers peuvent diffuser des
annonces relatives aux élections
lorsque lesdites annonces respectent
« les lois applicables et le processus
d'autorisation requis par Facebook ».
130 Les annonces doivent "respecter
les normes de la communauté
Facebook".
131 Cependant, Facebook
peut restreindre les publicités
pendant les élections. Puisque
Facebook a restreint l'accès à ses
«homosexuels», d’«ordures» ou de
«corrompus».
129 La manipulation politique est l'utilisation
des médias sociaux pour influencer le
soutien politique d'un candidat ou d'un parti
spécifique. Cela peut se produire par le biais
de différentes méthodes, telles que la
diffusion de désinformation ou la
diffamation des candidats.
130
https://www.facebook.com/business/help/16
7836590566506?id=288762101909005
131
https://www.facebook.com/communitystand
ards/.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 79



Page 80
données, les observateurs des OSC
tunisiennes et des ONG
internationales, focalisant sur
l’observation des réseaux sociaux,
n'ont pas pu obtenir de données
détaillées sur les annonces payantes,
y compris celles relatives à leur coût.
Facebook a également autorisé les
campagnes et les supporters à
continuer de diffuser des annonces
pendant la période de silence
électoral. Bien que Facebook ait pris
des mesures pour rendre l'achat
d'annonces politiques plus
transparent, la plateforme manque de
critères clairs et cohérents pour
identifier les annonceurs politiques
ou les problèmes politiques sur son
réseau, ainsi que de critères pour
partager publiquement le coût de ces
publicités. Cela a réduit la
transparence globale de la campagne
en ligne.
132
Le rôle des réseaux sociaux dans les campagnes en Tunisie a
considérablement augmenté depuis les élections de 2014. Il
sert à forger les opinions des électeurs et à éclairer leurs
choix. Le cadre juridique actuel pour l'utilisation des réseaux
sociaux dans les campagnes n'est pas clair, il est inadéquat et
devrait être reconsidéré et mis à jour pour refléter la réalité
actuelle des campagnes en Tunisie.
Conclusion
Le rôle des réseaux sociaux dans les
campagnes en Tunisie a
considérablement augmenté depuis
les élections de 2014. Il sert à forger
les opinions des électeurs et à
éclairer leurs choix. Le cadre
juridique actuel pour l'utilisation des
réseaux sociaux dans les campagnes
n'est pas clair, il est inadéquat et
devrait être reconsidéré et mis à jour
pour refléter la réalité actuelle des
campagnes en Tunisie. Le cadre
juridique devrait indiquer clairement
aux partis et aux candidats comment
et dans quelle mesure ils pourraient
utiliser les réseaux sociaux pour
mener campagne. En outre, l'ISIE
devrait être plus proactive avec les
plateformes des réseaux sociaux, y
compris Facebook, afin de garantir
que les informations requises par la
loi tunisienne, concernant le
financement des campagnes, puissent
être collectées et rendues publiques.
Facebook devrait également être plus
dynamique et ne pas autoriser la
publicité de campagne pendant la
période de silence électoral, comme
l'exige la loi tunisienne.
132 Contrôler, ou restreindre, l'accès aux
moteurs de recherche des plateformes des
réseaux sociaux, y compris les recherches
effectuées pendant les élections, viole les
normes internationales de liberté
d'expression, et ce, selon un document
publié par le rapporteur spécial des Nations
Unies sur la liberté d'opinion et d'expression.
« Une caractéristique transformatrice de
l'environnement des communications
numériques est le pouvoir des entreprises
privées, et en particulier des médias sociaux,
des plateformes de recherche et d'autres
intermédiaires, sur les communications, avec
un pouvoir énorme concentré entre les mains
de quelques entreprises seulement.»
https://www.osce.org/representative-on-
freedom-of-media/425282?download=true.
80 | The Carter Center Rapport des élections







Page 81
La société civile
Les traités internationaux et
régionaux reconnaissent le rôle que
la participation des citoyens joue
dans l'amélioration de tous les
aspects du processus électoral.
133
Les sources du droit international
public reconnaissent le droit de
participer à des organisations
d’observateurs citoyens et de
contribuer aux efforts d’éducation
des électeurs.
134 L'observation des
citoyens est une manifestation
essentielle du droit de participer aux
affaires publiques et de tenir les
gouvernements pour responsables.
La société civile tunisienne a observé
les processus électoraux législatif et
présidentiel de 2019 et a contribué à
la transparence et à l'intégrité du
processus électoral. Les principales
associations d'observateurs de la
société civile qui ont observé les
élections législatives et
présidentielles de 2014 sont restées
actives et ont continué à jouer un rôle
important dans le processus
démocratique.
135 En outre, des
organisations nouvellement créées,
telles que Observateurs sans
frontières (OSF) et des acteurs
durablement engagés la société
civile, notamment l'Union générale
tunisienne du travail (UGTT) et la
Ligue tunisienne des droits de
l'Homme (LTDH), ont aussi observé
les élections de 2019. Bien qu’un
nombre significatif d'organisations
de la société civile se soient
engagées dans l'observation
électorale, le manque de fonds a
Les principales associations d'observateurs de la société
civile qui ont observé les élections législatives et
présidentielles de 2014 sont restées actives et ont
continué à jouer un rôle important dans le processus
démocratique.
133 PIDCP, article 25 ; Union africaine,
Charte africaine de la démocratie, des
élections et de la gouvernance (CADEG),
articles 19 à 22 ; CEI, Convention sur les
élections démocratiques, article 1 (2);
OSCE, Document de Copenhague,
paragraphe 8; OEA, CID, articles 23 à 25;
OSCE / BIDDH, Cadre juridique (Ed. 1), p.
13
134 EISA, Principes pour la gestion, le suivi
et l'observation des élections dans la région
de la SADC, p.19.
135 ATIDE, Mourakiboun, l’Observatoire
Chahed, « I WATCH », Jeunes sans
frontières (JSF), La Coalition Ofiya, Ligue
des électrices tunisiennes (LET) et TU-Med
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 81















Page 82
Les observateurs se
préparent à se
déployer dans leurs
zones de
responsabilité en
attendant le jour du
scrutin pour les
élections
présidentielles. Au
début de la mission,
seize observateurs à
long terme ont été
déployés en équipes
de deux à : Sousse,
Gafsa, Sfax, Bizerte,
Tunis, Béja, Nabeul et
Médenine.
entraîné une diminution générale du
nombre total d'observateurs
nationaux déployés et les OSC
nationales ont mené beaucoup moins
d'activités, liées à l'observation, que
lors des élections de 2014.
136
Des organisations aux vues
similaires ont décidé de collaborer
pour optimiser leurs ressources.
L'Observatoire Chahed, la Coalition
Ofiya, « I Watch », Jeunesse Sans
Frontières, TU-MED et
Mourakiboun, qui ont coordonné
leurs efforts pour observer les
élections municipales de 2018, ont
décidé de coordonner, à nouveau,
136 Lors des élections de 2014, l'ISIE a
accrédité 27.000 citoyens observateurs pour
le premier tour de l'élection présidentielle,
14.000 pour les élections législatives et
29.000 pour le second tour de l'élection
présidentielle. En 2019, ces chiffres ont
diminué : 13.000 observateurs ont été
accrédités pour évaluer le premier tour des
élections présidentielles ; 17.500
leurs efforts d'observation en 2019.
137
Chaque OSC a concentré ses efforts
sur un aspect, ou une étape
spécifique du processus électoral.
Mourakiboun a procédé à une
compilation parallèle des résultats ;
Chahed a observé toutes les étapes
du processus électoral, en focalisant
sur l'inscription des électeurs et le
règlement du contentieux électoral.
Le Centre Tunisien Méditerranéen
(TU-MED) a observé la participation
des femmes des zones rurales dans
sept circonscriptions, pendant la
campagne électorale et le jour du
observateurs pour les élections législatives et
plus de 17.500 observateurs pour le second
tour de l'élection présidentielle.
137 Les six organisations ont publié des
recommandations communes sur la base de
leurs conclusions collectives, à la suite des
élections municipales, quelques mois avant
les élections de 2019.
82 | The Carter Center Rapport des élections



Page 83
scrutin. 138 La Coalition Ofiya a
observé la couverture médiatique de
la période électorale, tandis
qu'ATIDE a suivi la campagne
électorale sur les réseaux sociaux et
« I Watch » s'est concentrée sur le
financement des campagnes.
En outre, la plupart des OSC ont
déployé des observateurs pendant les
trois jours des élections. L'ISIE a
accrédité environ 13.000 citoyens
observateurs pour le premier tour de
l'élection présidentielle. Ce nombre
est passé à 17.500 pour les élections
législatives et à plus de 17.500 pour
le second tour de l'élection
présidentielle.
139
Plusieurs organisations de la société
civile ont publié des rapports sur
leurs conclusions après chaque tour
des élections, faisant des
recommandations visant à améliorer
le processus et démontrant le sérieux
de leurs engagements. Il s'agit
notamment de Mourakiboun,
ATIDE, Observatoire Chahed, la
Ligue des Electrices Tunisiennes, La
Coalition Ofyia, JSF, « I Watch »,
TU-MED, L’UGTT et La Ligue
tunisienne pour les droits de
l’Homme. Alors que les autorités
électorales soutiennent généralement
le rôle des observateurs citoyens et
facilitent leur accès aux bureaux de
vote, l'ISIE a eu peu de contacts avec
138 Les sept circonscriptions étaient Gafsa,
Kasserine, Sidi Bouzid, Kébili, Tozeur,
Jendouba, Siliana.
139 Les OSC ont accrédité le nombre
d'observateurs suivants pour les trois
élections : premier tour de l'élection
présidentielle : ATIDE: 500, Chahed: 1.000,
I Watch: 1.065; élection parlementaire:
ATIDE: 620, Chahed: 1.021, I Watch:
1.432; second tour de l'élection
la société civile concernant les
élections. L'ISIE n'a organisé qu'une
seule réunion avec les OSC pendant
la période électorale. L'événement
était principalement dédié aux
organisations de personnes
handicapées et s'est concentré sur les
efforts de l'ISIE pour faciliter les
procédures de vote pour les
personnes handicapées.
La plupart des organisations de la
société civile ont indiqué que
l'administration électorale s'était
améliorée successivement, à chaque
tour des élections, et que les
opérations de vote et de
dépouillement avaient été menées
conformément aux normes
internationales et aux bonnes
pratiques, en termes de transparence
et d'intégrité des élections. Leurs
rapports ont relevé les irrégularités
courantes suivantes : tentatives
d'influencer les électeurs à l’intérieur
des centres de vote, activités de
campagne autour des centres de vote
et manque relatif de formation de
certains agents des bureaux de vote
et des centres de vote.
L'ISIE a donné suite à plusieurs des
recommandations formulées par les
OSC pendant les périodes séparant
les différentes élections. Par
exemple, l’ISIE a répondu
positivement à la demande d’ATIDE
présidentielle: ATIDE, 620, Chahed, 1.021,
I Watch, 1.347. La CSO JSF a déployé
environ 330 observateurs à chacune des trois
élections, Mourakiboun a déployé 3000
observateurs à chaque élection, TUMED a
déployé 60 à 70 femmes observatrices pour
chaque élection et l'Union générale des
travailleurs tunisiens (UGTT) a déployé
quelque 8000 observateurs pour l'élection
parlementaire.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 83



Page 84
de publier les rapports des
contrôleurs de campagne de l’ISIE
lors des trois élections. Bien que
l'ISIE n'ait pas publié les rapports
relatifs aux deux tours des élections
présidentielles, elle a publié ceux
inhérents aux élections législatives.
En outre, sur la base d'une
recommandation des OSC, l'ISIE a
organisé des sessions d’évaluation
pour les membres de son personnel,
quelques semaines après les
élections, afin d'améliorer leurs
performances lors des prochaines
élections.
En outre, Mourakiboun et « I
Watch » ont réalisé une compilation
parallèle des résultats (CPR) pour
renforcer la confiance du public dans
les résultats des élections.
Mourakiboun a mobilisé 3.000
observateurs pour couvrir un
échantillon représentatif de 1.001
bureaux de vote, à travers la Tunisie,
pour chacune des trois élections.
Mourakiboun a fait état des chiffres
Globalement, la société civile tunisienne a joué un
rôle actif dans l'observation des processus électoraux
de 2019, bien que d’ampleur moindre que lors des
élections de 2014. Beaucoup d’organisations ont
souffert d'un manque de financement, dû peut-être
en partie au calendrier serré pour les trois élections.
Cependant, elles ont effectué leur travail de manière
professionnelle avec les ressources disponibles.
de participation électorale et des
résultats des élections nationales peu
de temps après la fermeture des
bureaux de vote pour chacune des
élections.
140 I Watch a déployé des
observateurs dans un échantillon
aléatoire, représentatif et stratifié de
662 bureaux de vote, à travers la
Tunisie, pour le second tour de
l'élection présidentielle. Ils ont donné
la priorité à la collecte de données à
partir d'un sous-échantillon de 374
bureaux de vote, qu'ils ont utilisés
pour faire leur projection. Les
résultats de (CPR) de I Watch ont
confirmé l'intégrité des résultats
officiels de l'ISIE.
Globalement, la société civile
tunisienne a joué un rôle actif dans
l'observation des processus
électoraux de 2019, bien que
d’ampleur moindre que lors des
élections de 2014. Beaucoup
d’organisations ont souffert d'un
manque de financement, dû peut-être
en partie au calendrier serré pour les
trois élections. Cependant, elles ont
effectué leur travail de manière
professionnelle avec les ressources
disponibles.
140 Au premier tour de l'élection
présidentielle, le taux de participation au
CPR de Mourakiboun était de 51,1% et celui
de l'ISIE de 49,8, avec une marge d'erreur
(ME) de 1%. Pour les élections législatives,
le taux de participation estimé au CPR était
de 43,7% et celui de l'ISIE de 42,8, avec une
ME de 1%. Pour le second tour présidentiel,
le taux de participation estimé au CPR était
de 57,1% et celui de l'ISIE de 56,3, avec une
ME de 0,8%. Les résultats estimés du CPR
pour le premier tour : Saïed à 18,4 % et
Karoui à 15,5%, alors que les résultats de
l’ISIE étaient comme suit : Saïed 18,4% et
Karoui 15,58%. Pour le second tour, les
résultats estimés du CPR : Saïed à 70,9% et
Karoui à 29,1%. Les résultats de l’ISIE
étaient Saïed 72.71% et Karoui 27.29%.
84 | The Carter Center Rapport des élections







Page 85
Règlement du
contentieux électoral
Les procédures de recours et d'appel,
et en particulier les pouvoirs et
responsabilités des différents organes
impliqués, devraient être clairement
réglementés par la loi afin d'éviter
tout conflit de compétences. En
outre, le droit d’introduire de tels
recours doit être accordé aussi
largement que possible et ouvert
pour chaque électeur dans sa
circonscription et pour chaque
candidat se présentant à l’élection.
141 La garantie d'un recours rapide
fait partie intégrante du principe des
moyens efficaces de recours.
142
Enregistrement des candidats à
l'élection présidentielle
Afin de respecter l'exigence
constitutionnelle d'élire un nouveau
président après la mort du président
en exercice dans un délai ne
dépassant pas 90 jours, le Parlement
a été amené
à modifier l’article 49 de la loi
électorale afin de raccourcir les
délais du contentieux électoral. Les
recours devaient être déposées dans
les deux jours suivant la déclaration
des décisions de l'ISIE rejetant les
candidats, auprès des chambres
d'appel du Tribunal Administratif,
dont le siège est à Tunis. Les
décisions des chambres d'appel
pouvaient faire l’objet d’un appel
devant l'Assemblée plénière
juridictionnelle du Tribunal
Administratif.
143 Malgré ces délais
serrés, le Tribunal Administratif a pu
traiter tous les recours relatifs au
contentieux des candidatures à
l’élection présidentielle, en temps
opportun.
Quinze candidats ont contesté devant
les chambres d'appel du Tribunal
Administratif les décisions de l'ISIE
rejetant leur candidature. Le tribunal
a annulé les décisions de l'ISIE dans
quatre cas.
144L'ISIE et sept
141 La Commission européenne pour la
démocratie par le droit (Commission de
Venise), Code de bonne conduite en matière
électorale, CDL-AD (2002) 23.
142 PIDCP, article 2 (3) et avis conjoint de la
Commission européenne pour la démocratie
par le droit (Commission de Venise) et du
Bureau des Institutions Démocratiques et
des Droits de l'Homme de l'OSCE (OSCE /
BIDDH) sur la législation électorale de
Norvège, paragraphe 25.
143 Articles 46 et 47 de la loi électorale
144 Affaire 20192017, Bahri Djelassi c. ISIE,
Chambre d'appel n 8, jugée le 22 août 2019 ;
Affaire 20192018, Sahbi Brahim c. ISIE,
Chambre d'appel n 8, jugée le 22 août 2019 ;
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 85













Page 86
Le leader de
mission Tana de
Zulueta répond
à un entretien
devant un
bureau de vote
à Tunis.
candidats ont déposé des appels
devant l'Assemblée plénière
juridictionnelle du Tribunal
administratif. Ladite assemblée a
annulé les quatre décisions des
chambres d'appel, confirmant les
décisions de l’ISIE de rejeter quatre
candidatures. Les sept appels des
candidats ont été rejetés.
Bien que les audiences du tribunal
aient été ordonnées et que les parties
aient eu la possibilité de présenter
leurs affaires, le délai raccourci
causé par le décès du Président en
exercice n'a pas laissé suffisamment
de temps aux avocats pour préparer
leurs affaires, ce qui a nui à la
capacité des parties à soutenir leurs
demandes avec des preuves crédibles
et une motivation juridique. Tant le
pouvoir judiciaire que les plaideurs
ont critiqué les contraintes de temps
pour déposer un recours comme
menaçant le droit de demander une
réparation par la voie de l’examen
judiciaire.
145
Enregistrement des candidats à
l'élection législative
Les contestations de la décision des
IRIE relatives à l’enregistrement des
candidats aux élections législatives
ne peuvent être introduites que par la
tête de la liste des candidats, l'un de
ses membres, le représentant du parti
politique, ou tout membre d'autres
listes de candidats de la même
circonscription. Les requérants
introduisent le recours devant le
tribunal judiciaire de première
instance de la circonscription
territoriale où se trouve l'IRIE
concernée. Les recours doivent être
déposés dans les trois jours suivant la
décision de l'IRIE. La décision
Affaire 20192020 Mohammed Hedi Ben
Hassine c. ISIE, Chambre d'appel n 8, jugée
le 22 août 2019 ; et affaire 20192025,
Marwen Ben Amor c.ISIE, Chambre d'appel
n 6, jugée le 22 août 2019.
145 CDH des droits de l’Homme,
Observation générale 32, paragraphe 19.
86 | The Carter Center Rapport des élections




Page 87
judicaire de première instance est
susceptible de recours devant les
chambres d'appel du Tribunal
Administratif à Tunis.
146
Peu de candidats ont contesté devant
les tribunaux judiciaires de première
instance les décisions de rejet de leur
liste de candidats ; certains candidats
ont contesté la validité de la
candidature des listes d'adversaires.
147 Seules quatre contestations
devant les tribunaux de première
instance ont abouti à l’annulation des
décisions de l'IRIE. Au total, 18
contestations ont été déposées auprès
des chambres d'appel du Tribunal
Administratif. Le Tribunal a annulé
le rejet de listes de candidats par
l'IRIE dans seulement trois cas.
148
Les observateurs du Centre Carter se
sont vu refuser l'accès à des
informations sur les recours devant la
plupart des tribunaux judiciaires de
première instance, y compris les
jugements de la Cour de Cassation,
malgré une demande officielle
formulée par le Centre fondée sur la
loi tunisienne.
149 Ce manque
d’informations a entravé la capacité
du Centre à analyser la phase pré-
146 Articles 27 et 29 de la loi électorale
147 Les rapports indiquent que les tribunaux
judiciaires de première instance ont rendu
plus de 43 décisions de justice sur les
candidatures aux élections législatives.
(Rapport préliminaire de l’observatoire
Chahed, 2019.)
148 La liste de coalition de l'Union sociale
démocratique pour la circonscription de
Tunis 2. (Cet appel a été rejeté, mais après le
prononcé de cette décision de justice,
l'appelant a obtenu un document écrit de
l'IRIE attestant que l'irrégularité qui était à la
base du rejet de la candidature par l'IRIE
était une erreur qui incombe à l'IRIE.
L'appelant a déposé auprès du même
électorale de règlement des litiges
juridictionnels.
chambre d'appel une demande de révision.
De ce fait, le tribunal a annulé la décision du
juge de première instance et reconnu la
validité de la candidature.) La liste du Parti
démocratique pour la justice et la prospérité,
de la circonscription électorale du monde
arabe et du reste des pays du monde ; et la
liste du Parti démocrate pour la justice et la
prospérité, de la circonscription électorale
du continent américain et le reste du
continent européen.
149 Code de procédure civile et commerciale
tunisien, article 252 : « … Les expéditions
de jugements peuvent être délivrées à toute
personne qui les demande.»
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 87

















Page 88
Jour d'élection
Le processus électoral est la pierre
angulaire de l'obligation de garantir
la libre expression de la volonté du
peuple à travers des élections
honnêtes et périodiques.
150 La
qualité des opérations de vote le jour
des élections est cruciale pour
déterminer si une élection s’est tenue
en conformité avec les obligations
démocratiques. Tenir des élections à
bulletin secret est une obligation clé
en droit international, et un moyen
reconnu pour s’assurer que la volonté
du peuple s’exprime librement.
151
Les trois journées électorales se sont
déroulées sans heurts et le personnel
électoral a bien compris les
procédures. Les listes des électeurs
ont été affichées dans la majorité des
bureaux de vote que les observateurs
du Centre Carter ont visités. La
configuration de presque tous les
bureaux de vote a garantie le secret
Les trois journées électorales se sont
déroulées sans heurts et le personnel
du vote par les électeurs. Le
personnel des bureaux de vote a
correctement scellé les urnes et
vérifié les scellés. Le personnel
électoral a fermé les bureaux de vote
à temps ; à l’heure de la fermeture
aucun électeur ne faisait la queue
pour voter. L'ISIE a pris des mesures
entre chacune des élections pour
combler les lacunes et fournir une
formation supplémentaire. Il en est
résulté une amélioration de l’aptitude
du personnel des bureaux de vote, à
mieux suivre les procédures pour
chaque élection subséquente.
En raison de problèmes de sécurité et
sur recommandation du ministère de
l'Intérieur, trois jours avant les
élections, cinq IRIE dans l'ouest et le
centre ouest du pays (Kef, Kasserine,
Jendouba, Gafsa et Sidi Bouzid) ont
annoncé sur Facebook que certains
bureaux de vote fonctionneraient le
jour de l’élection, selon un horaire
réduit. En effet, l’horaire du vote
dans ces zones a été raccourci de
quatre heures, avec des bureaux
ouvrant à 10 heures et clôturant à 16
heures. La décision de raccourcir
l’horaire du vote a touché environ
112.795 électeurs, ce qui représente
150 PIDCP, articles 2, 25 a) et 9.
151 PIDCP, article 25
; Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme, article
23. EISA et Forum des commissions
électorales des pays de la SADC, Principes de
Gestion de suivi et d’Observation des
Elections dans la région de la SADC, p. 24.
88 | The Carter Center Rapport des élections



















Page 89
1,59% des électeurs inscrits. 152 Vu
que l'ISIE n’a pas réussi à
communiquer ce changement dans
les heures de vote, le délai raccourci
a réduit la possibilité pour les
électeurs concernés de participer aux
élections. Les restrictions relatives
aux heures de vote dans ces zones
ont été maintenues pendant les jours
des élections législatives et du
deuxième tour des élections
présidentielles.
Premier tour de l’élection
présidentielle : 15 septembre
Le Centre Carter a déployé plus de
90 observateurs qui ont visité 317
bureaux de vote ainsi que les 27
centres de compilation des résultats
pour le premier tour de l'élection
présidentielle.
L'ISIE a annoncé un changement de
l'emplacement de 28 centres de vote
dans neuf IRIE le 11 septembre, soit
quatre jours avant l’élection.
Quelques 31.379 électeurs ont été
touchés par ce changement.
153 L'ISIE
a imputé ces changements aux
infrastructures médiocres, aux
constructions inachevées et aux
difficultés d'accès à certains centres
de vote en raison d’inondations
récentes.
Ouverture et vote
Les observateurs du Centre Carter
ont qualifié le processus d'ouverture
dans les 34 bureaux de vote visités
pendant l'ouverture du vote, comme
paisible et bien organisé, avec 100 %
des équipes d'observateurs évaluant
positivement la mise en œuvre des
procédures. Dans plusieurs bureaux,
les observateurs ont signalé que la
gestion des files d'attente était
déficiente. Dans l'un des centres de
vote visités, tous les bureaux de vote
ont ouvert tardivement, parce que
l'IRIE n'a pas livré le matériel
électoral à temps et le personnel des
bureaux de vote est arrivé en retard.
Les observateurs du Centre Carter
ont évalué les opérations dans 317
bureaux de vote le jour de vote. Ils
ont évalué l'environnement électoral
global et la mise en œuvre des
procédures positivement dans la
majorité écrasante des bureaux de
vote. Quelques irrégularités mineures
ont été constatées, notamment le fait
que le personnel de vote n'a pas
donné d'instructions aux électeurs sur
la façon de voter, comme l'exige la
réglementation. L'instruction a été
jugée inadéquate ou défaillante lors
de 24 observations (7,4%). Dans
5,2% des bureaux de vote visités, le
secret de vote a été violé.
152 Kasserine : 105 centres avec 124 bureaux
de vote et 49.940 électeurs ; Jendouba : 40
centres avec 68 bureaux de vote et 29.334
électeurs ; Sidi Bouzid : 28 centres avec 46
bureaux de vote et 18.021 électeurs ; Le Kef
: 47 centres avec 50 bureaux de vote et 5.070
électeurs ; Gafsa: 20 centres avec 28 bureaux
de vote et 9.653 électeurs.
153 Bizerte (trois centres de vote avec 13.403
électeurs); Siliana (deux centres de vote avec
1.216 électeurs); Le Kef (un bureau de vote
avec 1.656 électeurs); Jendouba
(sept
bureaux de vote avec 5.101 électeurs);
Monastir (deux centres de vote avec 1.473
électeurs), Ben Arous (un centre de vote avec
1.338 électeurs); Gafsa (sept bureaux de vote
avec 2.241 électeurs); Médenine (trois
bureaux de vote avec 355 électeurs); Nabeul1
(deux centres de vote avec 4.596 électeurs).
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 89



Page 90
Les représentants des candidats
étaient présents dans presque tous les
bureaux de vote observés - 309 sur
un total de 317 –. Des représentants
de Mourou, Chahed et Karoui étaient
présents dans la majorité des bureaux
de vote observés. Les observateurs
citoyens n'étaient présents que dans
60 d’un total de 317 bureaux de vote
observés, Mourakiboun étant présent
dans 53. Les femmes représentaient
42% des présidents des bureaux de
vote mais seulement 9,7% des
présidents des centres de vote.
Fermeture et dépouillement
La mise en œuvre de la procédure de
fermeture a été évaluée comme étant
très bonne, ou raisonnable, dans 30
des 31 bureaux de vote observés.
Tous les électeurs qui étaient dans la
file d’attente à 18 heures ont pu
voter.
Le dépouillement a été observé dans
29 bureaux de vote ; la mise en
œuvre des procédures et
l'environnement global ont été
évalués positivement dans tous les
bureaux à l’exception d’un seul.
Globalement, les observateurs ont
décrit le processus comme étant
calme, professionnel et minutieux.
Les élections législatives du 6
octobre
Le Centre Carter a déployé plus de
90 observateurs qui ont visité 392
bureaux de vote ainsi que les 27
centres de compilation des résultats.
Comme ce fut auparavant le cas pour
l'élection présidentielle, peu avant
l'élection, l'ISIE a annoncé que 245
bureaux de vote dans cinq
90 | The Carter Center Rapport des élections
circonscriptions (Le Kef, Kasserine,
Jendouba, Gafsa et Sidi Bouzid)
fonctionneraient pendant un horaire
abrégé le jour de l’élection.
Ouverture et vote
Les observateurs du Centre Carter
ont qualifié le processus d'ouverture
dans les 38 bureaux de vote visités
pendant l'ouverture de vote comme
paisible et bien organisé, avec 100 %
des équipes d'observateurs évaluant
positivement la mise en œuvre des
procédures.
Les observateurs du Carter Center
ont évalué 392 bureaux de vote lors
du vote. Ils ont évalué
l'environnement électoral global et la
mise en œuvre des procédures
positivement dans la majorité des
bureaux de vote. Dans 11 bureaux de
vote, les observateurs ont noté que
les électeurs, en particulier les
personnes âgées, avaient du mal à
voter en raison du nombre de listes et
de la longueur du processus de vote.
Le secret du vote a été respecté dans
99% des bureaux de vote visités. Les
observateurs ont indiqué que 49 des
bureaux de vote visités n'étaient pas
accessibles aux personnes à mobilité
réduite. Quatre-vingt-soixante-dix-
sept pour cent des présidents des
bureaux de vote étaient des hommes
et 33 pour cent des femmes. Au
niveau des bureaux de vote, 61% des
présidents de bureaux de vote étaient
des hommes et 39% des femmes.
Les représentants des partis étaient
présents dans la grande majorité des
bureaux de vote observés (373 sur un
total de 392). Des représentants
d'Ennahda étaient présents dans 33%



Page 91
des bureaux de vote observés, Qalb
Tounes dans 19% et Tahya Tounes
dans 9%. Il y avait des représentants
des listes indépendantes dans 20%
des bureaux de vote visités. Des
observateurs citoyens étaient
présents dans 168 des 392 bureaux
de vote observés, le nombre le plus
élevé représentant la Centrale
syndicale de l’UGTT, présent dans
135 bureaux, et Mourakiboun, était
présent dans 25 bureaux.
Fermeture et dépouillement
La mise en œuvre des procédures et
l'environnement électoral général ont
été évalués comme très bons, ou
raisonnables, dans les 35 bureaux de
vote observés pour la fermeture et le
dépouillement. Tous les observateurs
ont indiqué qu’aucun électeur n’était
en file d’attente au moment de la
fermeture à 18 heures. Lors du
dépouillement, la mise en œuvre des
procédures a été évaluée
positivement dans les 35 bureaux de
vote observés.
Deuxième tour de l’élection
présidentielle le 13 octobre
Le Centre Carter a déployé plus de
80 observateurs qui ont visité 337
bureaux de vote ainsi que les 27
centres de compilation des résultats.
Ouverture et vote
Les observateurs du Centre Carter
ont décrit le processus d'ouverture
dans les 30 bureaux de vote visités
comme étant professionnel et
ordonné, tous les bureaux de vote ont
ouvert à l'heure. Les agents candidats
étaient présents dans 15 des 30
Les électeurs qui
s'étaient déjà inscrits
aux élections de 2014
ou 2018 n'étaient pas
tenus de se réinscrire
aux élections de 2019,
ce qui leur a permis de
se présenter
directement pour voter
le jour du scrutin.
bureaux de vote, tandis que les
observateurs citoyens n'étaient
présents que dans 11.
Les observateurs du Carter Center
ont évalué le processus de vote dans
337 bureaux de vote le jour de
l’élection. L'environnement électoral
global et la mise en œuvre des
procédures ont été jugés positifs dans
tous les bureaux de vote visités. Les
observateurs du Centre Carter n'ont
signalé que de légères irrégularités
dans un petit nombre de bureaux de
vote visités. Bien que de nombreux
électeurs aient encore de l'encre des
élections législatives sur leurs doigts,
les observateurs du Centre Carter
n'ont signalé aucun cas de vote
multiple et ont noté que les agents de
tous les bureaux de vote vérifiaient
les pièces d'identité des électeurs et
la signature des électeurs sur les
listes électorales.
Les représentants des candidats
étaient présents dans 67% des
bureaux de vote (227 sur un total de
337 bureaux); 47 % (160 sur un total
de 337 bureaux) des bureaux
comprenaient des représentants de
Saïed et 39 % (130 sur un total de
337 bureaux) comprenaient des
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 91



Page 92
aux centres de compilation des
résultats.
Le processus de comptage
Selon les obligations internationales,
le comptage doit être transparent et
observable. Les bonnes pratiques
internationales stipulent que les
observateurs, les représentants des
candidats et les médias doivent être
autorisés à être présents et à avoir
accès aux affichages des
compilations ; les résultats doivent
être transmis aux niveaux supérieurs
de manière ouverte. 154
Tout au long du cycle électoral, les
observateurs du Centre Carter ont
noté que les centres de compilation
des résultats différaient dans leurs
procédures de réception du matériel,
de la mise en œuvre de la
compilation et d’octroi de l’accès
aux observateurs. L'incapacité de
l'ISIE à publier des règlements
détaillés sur les procédures de
compilation est, en partie,
responsable de ces incohérences et a
parfois conduit à un processus de
compilation qui n'était pas
transparent et observable.
Cependant, après le premier tour de
l'élection présidentielle, l'ISIE a
effectué une évaluation de deux jours
pour les présidents, les
coordinateurs, les juristes et les
administrateurs des 33 IRIE et a
remédié à plusieurs lacunes relatives
à la phase de la compilation. Le
personnel a reçu une formation
supplémentaire sur l'utilisation d'une
représentants de Karoui. Des
observateurs citoyens étaient
présents dans 48% des bureaux de
vote (161 sur un total de 337
bureaux); des observateurs de
l'UGTT étaient présents dans 27 %
(91 sur un total de 337 bureaux),
Mourakiboun étaient présents dans
12 % (41 sur un total de 337
bureaux); et de « I Watch » étaient
présents 5 % (17 sur un total de 337
bureaux). Uniquement 14% des
présidents des centres de vote étaient
des femmes (47 sur un total de 337),
tandis que 44% des présidents des
bureaux de vote étaient des femmes
(148 sur un total de 337).
Fermeture et dépouillement
La fermeture a été jugée très bonne,
ou raisonnable, dans 100% des 30
bureaux de vote observés, et tous les
électeurs éligibles faisant la queue à
la fermeture des centres ont été
autorisés à voter. L'environnement
général et la mise en œuvre des
procédures lors du dépouillement ont
été évalués comme étant très bons,
ou raisonnables, dans les 30 bureaux
de vote observés. Aucune plainte
officielle n'a été déposée dans les
bureaux de vote observés.
Les observateurs du Centre Carter
ont noté une présence réduite de
représentants de candidats et
d'observateurs citoyens par rapport à
celle aux élections législatives. Le
personnel a signé les procès-verbaux
et les ont affichés à l'entrée des
bureaux de vote avant d'en envoyer
des copies officielles et sécurisées
154 Conseil de l'Europe (Commission de
Venise), Code de bonne conduite, Sec.
1.3.2.xiii et xiv
92 | The Carter Center Rapport des élections



Page 93
application logicielle qui calcule
automatiquement les résultats au
niveau du centre de compilation. Les
forces militaires ont également
modifié les itinéraires utilisés pour
collecter et livrer le matériel électoral
aux centres de compilation.
Avec ces changements, le processus
de compilation au cours du second
tour de l'élection présidentielle s'est
déroulé de manière plus efficace et
transparente que lors des deux
élections précédentes. Les centres de
compilation ont reçu le matériel
électoral des bureaux de vote plus
rapidement et, par conséquent, ont pu
compiler les résultats plus
rapidement. Les observateurs
internationaux ont eu un plus grand
accès au processus et ont pu
effectuer une observation
significative dudit processus, dans la
plupart des centres de compilation.
Situation sécuritaire pendant la
période électorale
À la suite des attaques terroristes de
2015, le Président Béji Caïd Essebsi
a déclaré l'état d'urgence dans le pays
qui est resté en vigueur pendant toute
la période électorale. Le 27 juin
2019, deux kamikazes ont fait
exploser leurs engins au centre-ville
de Tunis, l'un près de la patrouille de
police dans la rue Charles de Gaulle
et l'autre à proximité d’un immeuble
occupé par la police dans la zone de
Gorjani.
Malgré cet incident, la situation
sécuritaire en Tunisie est demeurée
satisfaisante, tout au long de la
période électorale, et a permis aux
candidats de faire campagne et au
Davor Corluka,
Directeur de la
Sécurite, et
Oussama Laajimi,
Assistant de
Sécurité, passent
en revue un plan
de déploiement
suivant la
méthodologie
d'observation du
Carter Center.
Centre Carter de déployer ses
observateurs électoraux.
Les exceptions incluent des zones
longeant la frontière avec la Libye et
l'Algérie et certaines zones
montagneuses de l'ouest du pays, qui
sont classées comme à risque élevé
ou très élevé, y compris dans les
gouvernorats de Kasserine, à côté de
la frontière algérienne, et de Sidi
Bouzid dans le centre de la Tunisie,
qui connaissent périodiquement des
niveaux de menace accrus en raison
d'activités terroristes, ou de troubles
sociaux. Toutefois, cela n’a pas
empêché les observateurs du Centre
de mener des opérations dans ces
endroits, tout en mettant en place des
mesures palliatives appropriées.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 93














Page 94
Développements
postélectoraux
Résolution du contentieux des
résultats
D’une manière générale, la loi
électorale prévoit un recours rapide
pour les parties lésées contestant les
résultats et respecte le droit au
recours juridictionnel, garantissant
un contrôle indépendant
conformément aux normes
internationales.
155 Les tribunaux ont
exercé leurs responsabilités de
manière opportune, voire parfois trop
stricte, lors des trois élections.
Le tribunal administratif de Tunis a
autorisé le Centre à assister à toutes
les audiences et, après des demandes
répétées, a fourni au Centre certaines
décisions. Les audiences du tribunal
auxquelles le Centre a assisté se sont
déroulées de manière ordonnée et les
parties ont eu la possibilité de
présenter leurs plaidoiries dans le
délai limité imparti. Cependant, les
tribunaux n'ont pas respecté les
obligations internationales visant
assurer un processus transparent de
règlement des différends, qui exige
que les jugements, les conclusions et
la motivation juridique des
jugements soient rendus publics dans
tous les cas.
156
Le processus de règlement du
contentieux électoral
par l'ISIE reste
opaque. L'ISIE n'a pas partagé toutes
les informations recueillies par ses
contrôleurs de campagne, ni annoncé
publiquement comment elle réglerait
les infractions électorales. Les
tribunaux n'ont pas communiqué des
copies des recours ou de décisions en
temps opportun. Cependant, ils ont
donné aux plaideurs la possibilité
d'être entendus et ont pris des
décisions dans le court délai imparti.
155 Articles 2 et 14 (1) et du PIDCP ; UA,
CADHP, article 7; PIDCP, Observation
générale 32, paragraphe. 58
156 PIDCP, article 14 (1); La tribunal
administrative a remis au Centre Carter
environ 155 jugements, une semaine
seulement avant la fin de la mission
d'observation à la mi-novembre 2019, ce qui
a interdit à la mission d'analyser pleinement
le processus de règlement des différends
électoraux.
94 | The Carter Center Rapport des élections

















Page 95
La loi électorale impose de
nombreuses exigences procédurales
relatives au dépôt des recours en
matière électorale, qui ont été
critiquées par de nombreux candidats
et avocats. Le tribunal a également
été très strict dans l'application de la
loi et n'a toléré aucune erreur de
procédure, abstraction faite de
l'importance du fond contesté.
Le contentieux des résultats de
l'élection législative
Les résultats des élections
législatives peuvent être contestées
auprès des chambres d'appel du
tribunal administratif, puis ils
peuvent être portés en appel devant
l'Assemblée plénière juridictionnelle
du Tribunal Administratif par la tête
de la liste des candidats, l'un de ses
membres, ou les représentants des
partis politiques. Au total, 102
recours ont été déposés auprès des
chambres d'appel du tribunal
administratif, qui a rejeté 40 recours
pour des motifs relatifs aux
procédures et 59 sur le fond. Le
tribunal a modifié les résultats dans
trois cas : il a accordé au parti
Errahma un siège dans la
circonscription de Ben Arous ; il a
annulé un siège Nidaa Tounes dans
la circonscription de Kasserine et l’a
attribué au Mouvement du peuple et
a annulé les résultats des élections
d’une circonscription à l’étranger,
celle de l’Allemagne, et a ordonné la
157 L'ISIE a appliqué l'article 143 de la loi
électorale et a privé le parti Errahma de son
siège à Ben Arous sur la base du rapport
relatif aux violations des règles de la
campagne fourni par la HAICA.
158 Le 7 novembre 2019, la liste électorale de
Ich Tounsi de France 2 a déposé une requête
tenue d’une nouvelle élection dans
ladite circonscription.
L'Assemblée générale du Tribunal
administratif a été saisie de 36
recours. Elle a infirmé les décisions
des chambres d'appel concernant les
circonscriptions d’Allemagne et de
Kasserine et a rétabli les décisions
initiales de l’ISIE. Toutes les autres
contestations ont été rejetés. Le
processus du règlement du
contentieux électoral
sur les résultats
préliminaires des élections
législatives a confirmé toutes les
décisions de l'ISIE relatives aux
résultats préliminaires, à l’exception
de celles relatives à la circonscription
électorale de Ben Arous, où les juges
ont attribué le siège au parti
Errahma.
157 Le tribunal a terminé
l'examen de toutes les contestations
le 6 novembre 2019, dans le délai
légal.
158 Les copies des décisions de
l'Assemblée générale du Tribunal
administratif ne sont toujours pas
disponibles.
Le contentieux des résultats de
l'élection présidentielle
Les chambres d'appel du Tribunal
Administratif ont reçu au total six
recours introduits par des candidats
contre les résultats préliminaires du
premier tour de l'élection
présidentielle.
159 La plupart des
recours alléguaient que de graves
violations aux règles relatives à la
en réexamen à l'Assemblée plénière
juridictionnelle du Tribunal Administratif,
qui a été rejetée le 8 novembre 2019.
159 Youssef Chahed, Hatem Boulabiar, Néji
Jalloul, Slim Riahi, Abdelkrim Zbidi et Seif
Eddine Makhlouf.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 95



Page 96
Au total, 102 recours ont été déposés auprès
des chambres d'appel du tribunal administratif,
qui a rejeté 40 recours pour des motifs relatifs
aux procédures et 59 sur le fond.
publicité politique avaient été
commises en faveur des deux
candidats qui se sont qualifiés pour
le second tour. La plupart des
contestations affirmaient que l'ISIE
n'avait pas sanctionné les candidats
qui avaient commis des violations
aux règles de la campagne.
160
Trois des six contestations ont été
rejetées sur le plan procédural au
motif que le procès-verbal de
notification ne reflétait pas qu'une
notification avait été envoyée à
l'autre partie pour répondre par écrit
avant le jour de l'audience, comme
l'exige l'article 145 de la loi
électorale de 2014.
161 Par
conséquent, les arguments de fond de
ces affaires n'ont pas été examinés
par le tribunal. Cinq de ces affaires
ont été portées en appel devant
l'Assemblée plénière juridictionnelle
du Tribunal Administratif. Le 30
septembre, l'Assemblée générale a
rejeté les cinq contestations,
160 En vertu de l'article 143 de la loi
électorale, l'ISIE peut annuler en partie ou
en totalité les résultats électoraux avant
d'annoncer les résultats préliminaires si les
violations aux règles la campagne étaient
réputées avoir affecté les résultats de «
manière substantielle et décisive ».
161 Y compris : affaire 20194001, Seif
Eddine Makhlouf c. ISIE, Chambre d'appel
7, du 23 septembre 2019 ; affaire 20194002,
Abdelkrim Zbidi c.ISIE, Abdelfatteh
Mourou et Nabil Karoui, Chambre d'appel 7,
du 23 septembre 2019 et affaire 20194003,
Slim Riahi c.ISIE, Abdelfatteh Mourou et
96 | The Carter Center Rapport des élections
confirmant les décisions des
chambres d'appel.
Aucune contestation des résultats du
second tour de l'élection n’a été
déposé et le candidat perdant,
Karoui, a reconnu sa défaite et
félicité son adversaire le 14 octobre
2019.
162
Les développements politiques
L'ISIE a annoncé les résultats
définitifs de l'élection parlementaire
le 8 novembre 2019.
163 Le 13
novembre, le nouveau parlement
s'est réuni en session plénière et a élu
Rached Ghannouchi d'Ennahda
président avec 123 voix.
164 Le
premier vice-président du parlement,
Samira Chaouachi de Qalb Tounes, a
été élue le même jour avec 109 voix,
et le deuxième vice-président, Tarek
Ftiti du bloc de la réforme nationale,
a été élu le 14 novembre avec 93
voix.
Le 15 novembre 2019, le Président
de la République Kaïs Saïed a chargé
Habib Jemli, un homme politique
indépendant désigné par Ennahda, le
parti politique ayant obtenu le plus
grand nombre de sièges au
Nabil Karoui, Chambre d'appel 7, du 23
septembre, 2019.
162
https://ara.reuters.com/article/topNews/idAR
AKBN1WT1SI.
163 Voir l'annexe 3 pour les résultats
définitifs.
164 Trois autres candidats étaient en lice pour
le poste : Abir Moussi (PDL), qui a obtenu
21 voix ; Ghazi Chaouachi (Courant
démocratique), qui a obtenu 45 voix, et
Marouene Falfel (Tahya Tounes), qui a
obtenu 18 voix. Il y a eu 207 votes au total
et 10 bulletins blancs




Page 97
Pour chacun des trois
tours des élections,
des affiches de
campagne ont été
placées dans des
endroits désignés. Les
partis et les candidats
ont également utilisé
d'autres stratégies de
campagne,
notamment des
panneaux d'affichage,
des activités de porte-
à-porte, des dépliants,
des rassemblements,
des tentes de
campagne et les
médias sociaux
(principalement
Facebook)
Parlement, de former le
gouvernement. Jemli n'a pas réussi à
former un gouvernement au cours du
premier mois et a informé le
président qu'il aurait besoin d'un
mois supplémentaire comme le
permet la constitution.
165 Après
l'échec d'intenses négociations avec
les partis élus au Parlement, Jemli a
soumis une nouvelle liste de
ministres techniques, non partisans,
au Président de la République, qui l'a
transmise au Parlement le 2 janvier
2020. Le 10 janvier, le Parlement n’a
pas voté la confiance en faveur du
gouvernement proposé puisque seuls
72 députés ont voté pour, 134 contre
et 3 se sont abstenus.
Selon la Constitution, le président
devrait, dans un délai de dix jours,
des consultations avec les partis, les
165 Article 89 de la constitution.
166 Article 89 de la constitution.
coalitions et les blocs parlementaires,
« en vue de charger la personnalité la
mieux à même d’y parvenir de
former un Gouvernement, dans un
délai maximum d’un mois. ».
166 Le
20 janvier, le président a nommé
Elyas Fakhfakh, ancien ministre du
Tourisme et des Finances sous les
gouvernements dirigés
successivement par Ali La’rayyidh et
Hammadi Jbali.
Le choix de Fakfakh a surpris
certains députés et partis politiques
puisqu’il n'était pas le choix
consensuel.
167 Initialement, sa liste
de ministres proposés a été rejetée
par Ennahda, qui a insisté sur
certains ministères et l'inclusion de
Qalb Tounes dans le gouvernement.
Fakhfakh a changé les noms de
quelques ministres mais a refusé
167 Son nom ne figurait que sur la liste des
candidats éventuels soumise par Tahya
Tounes et le Courant Démocratique.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 97



Page 98
d'inclure Qalb Tounes. Le 17 février,
le président a annoncé que si le
Parlement ne faisait pas confiance au
gouvernement de Fakhfakh, il
n'aurait d'autre choix que de
convoquer de nouvelles élections.
Mercredi 26 février, le Parlement
s'est réuni en session plénière pour se
prononcer sur la formation du
nouveau gouvernement de Fakhfakh,
qui a obtenu la confiance avec 129
voix pour, 77 contre et 1 abstention.
98 | The Carter Center Rapport des élections









































Page 99
Conclusions et
Recommandations
Le Centre Carter félicite
l'administration électorale tunisienne
pour la réussite du cycle électoral de
2019 et salue le profond attachement
du peuple tunisien au processus
démocratique, qui l'a conduit à voter
lors de trois élections successives, en
moins d'un mois.
Dans un esprit de collaboration et de
soutien à la transition continue de la
Tunisie vers la démocratie, le Centre
Carter propose les recommandations
suivantes à l’attention de
l'Assemblée des Représentants du
Peuple, l'ISIE, les partis politiques et
d'autres acteurs électoraux.
A l'Assemblée du Représentant du
Peuple :
1. Élaborer et adopter une loi
sur le découpage des circonscriptions
électorales et les critères d'attribution
des sièges, qui s'appuient sur les
dernières données de recensement
disponibles afin de respecter le
principe de l'égalité du vote, en
résolvant la question de l’écart
important entre les quotients
électoraux pour l'obtention des sièges
dans les petites et les grandes
circonscriptions électorales.
2. Procéder à un examen
transparent et inclusif du découpage
des circonscriptions électorales à
tous les niveaux des élections. À
l'échelle nationale, les
circonscriptions devraient refléter
avec précision le nombre de la
population dans les circonscriptions
de l’intérieur du pays et celles de
l'étranger. À tous les niveaux, le
découpage ne devrait pas être
influencé par le désir d'obtenir des
résultats électoraux spécifiques.
3. Avancer s’agissant de
l'élection des membres restants de la
Cour constitutionnelle et sur la mise
en place du cadre juridique
nécessaire et la nomination des
membres des instances
indépendantes mandatés par la
Constitution, notamment l’Instance
de la bonne gouvernance et de la
lutte contre la corruption, l'instance
du développement durable et des
droits des générations futures,
l'Instance des droits de l'homme et
l'Instance de la communication
audiovisuelle (ICA).
4. Le décret-loi sur la liberté
de la presse devrait être modifié pour
garantir aux blogueurs et aux
journalistes citoyens les mêmes
garanties que celles accordés aux
journalistes professionnels.
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 99












Page 100
5. Revoir et harmoniser la
loi électorale sur la base de
enseignements des élections de 2019,
notamment de la manière suivante :
a) Faciliter l'accessibilité et
l'application du cadre juridique
électoral en minimisant l'utilisation
de règlements ad hoc lors des
prochaines élections, en intégrant
dans la loi les règlements ISIE
adoptés pour les élections
législatives et présidentielles de 2014
et 2019. Cela réduira la nécessité
d'adopter de nouveaux règlements
avant chaque nouveau cycle
électoral.
b) Modifier l'article 143 de la
loi électorale, qui accorde à l'ISIE le
pouvoir de réviser les résultats
préliminaires d'une élection avant
leur examen par le pouvoir
judiciaire, en créant et en publiant
des critères détaillés permettant la
promulgation de telles révisions sur
la base des violations présumées des
règles de la campagne.
c) Envisager de réduire le
nombre de parrainages requis pour
les candidatures à l'élection
présidentielle, afin que l'ISIE puisse
procéder, le cas échéant, à un
examen plus rigoureux de la validité
des parrainages.
d) Examiner l'utilité d'exiger
des parrainages pour les candidats à
la présidence et le mécanisme par
lequel elles sont recueillies, en vue
de réduire l'utilisation de signatures
frauduleuses.
e) Afin de promouvoir le
suffrage universel, il convient
d’accorder le droit de suffrage aux
forces militaires et de sécurité pour
toutes les élections,
f) Envisager d'introduire une
méthode de vote mobile pour
permettre aux électeurs éligibles,
résidant dans les prisons, les
hôpitaux, les établissements
psychiatriques et les foyers pour
personnes âgées d'exercer leur droit
constitutionnel de voter.
g) Reconsidérer les
dispositions actuelles sur la
campagne et le financement dans la
loi électorale, en vue de les rendre
moins restrictives, afin que les
candidats puissent efficacement
mener les campagnes et transmettre
leur message aux électeurs sans avoir
à violer les dispositions actuelles, y
compris celles relatives à la pose des
affiches, la publicité politique , la
publication d'annonces sponsorisées
dans les réseaux sociaux et les
plafonds de financement des
campagnes.
h) Envisager d'introduire une
réglementation des actes des tiers en
faveur des candidats afin de définir
clairement ce qui doit ou ne doit pas
être considéré comme une activité de
campagne qui doit être incluse dans
les rapports de financement de
campagne.
i) Clarifier les dispositions de
la loi sur l'utilisation d'enfants dans
les campagnes politiques.
j) Afin de garantir pleinement
la protection des droits électoraux et
le droit à un recours effectif, il
convient d’étendre le droit des
100 | The Carter Center Rapport des élections


Page 101
électeurs de déposer des plaintes
contre les infractions commises le
jour de l’élection et de pouvoir faire
des recours contre les décisions de
l'administration électorale concernant
les résultats préliminaires.
k) Veiller à atteindre les
objectifs ambitieux de la
Constitution en matière d’égalité des
sexes en modifiant la loi électorale
pour non seulement inclure la parité
verticale mais aussi celle horizontale
des listes, garantissant ainsi le
placement des femmes en tête des
listes.
l) Réviser les définitions de la
publicité politique et de la
propagande pour indiquer clairement
la différence.
m) Indiquez clairement les
moments où l'utilisation de la
publicité sur les réseaux sociaux est
autorisée, ou interdite.
n) Clarifier ce que l'égalité
des chances et le traitement de tous
les candidats signifie dans le
contexte de la campagne, y compris
en cas de détention d’un candidat.
o) Envisager des
modifications à la constitution pour
prolonger le délai de réalisation des
élections présidentielles anticipées,
en cas de vacance définitive, au-delà
de la période maximale actuelle de
90 jours.
À l'ISIE
1. Accroître la transparence
dans tous les aspects du travail de
l'ISIE, y compris en publiant les
résultats des votes du conseil et les
motifs des décisions; publier des
informations sur le site Web de
l'ISIE, y compris les procès-verbaux
des réunions, en temps opportun;
expliquer la vérification des
parrainages et les motifs du refus des
demandes de candidature; et signaler
publiquement les informations sur
les violations des règles de la
campagne recueillies par les
contrôleurs de l'ISIE, y compris
ceux qui surveillent les médias
sociaux.
2. Définir plus en détail la
structure précise de l'ISIE, qui
devrait refléter les besoins réels de
l'institution et détailler les rôles et
responsabilités du conseil vis-à-vis
de l’administration exécutive. Cela
devrait inclure l'établissement d'une
stratégie claire, à long terme, pour le
recrutement et la formation du
personnel.
3. Délimiter clairement les
responsabilités entre le Conseil de
l’ISIE et les organes exécutifs
chargés de mettre en œuvre les
décisions du Conseil. Leurs rôles
respectifs devraient être clairement
définis et des lignes directrices
devraient être fournies pour toutes
les phases du processus électoral.
4. Veiller à l’accroissement
des campagnes d'éducation des
électeurs grâce à une meilleure
coordination et coopération avec les
organisations de la société civile.
5. Établir une collaboration
étroite et solide avec la HAICA
pendant la période électorale, en
particulier sur le moment du partage
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 101



Page 102
des informations et la publication des
rapports sur les infractions aux règles
relatives aux élections.
6. Prendre contact avec les
plateformes de médias sociaux, en
particulier Facebook, avant le début
du prochain cycle électoral pour
établir une relation d'échange
d'informations concernant : le
maintien d'une bibliothèque
appropriée d'annonces pour la
Tunisie; La loi électorale tunisienne
en ce qui concerne les périodes de
silence électoral et l'utilisation des
médias sociaux dans les campagnes;
et un mécanisme permettant à l'ISIE
d'accéder et de publier des
informations sur le nombre et les
coûts des annonces politiques.
Au pouvoir judiciaire
1. Pour accroître la confiance
du public dans le pouvoir judiciaire
et garantir le droit à un recours
effectif, le tribunal devrait être plus
transparent lorsqu'il rend public à la
fois les recours et les jugements en
matière électorale.
2. Afin de réduire le nombre
de cas rejetés pour des motifs de
forme et de procédure, le tribunal
devrait envisager de fournir un guide
complet sur toutes les étapes requises
lors des recours relatif au contentieux
électoral ; offrir une formation aux
avocats qui travaillent sur des
affaires du contentieux électoral et
un modèle facilitant l’introduction de
tels recours ; ainsi que l'allocation de
ressources supplémentaires pour le
contentieux électoral, notamment des
juges et des salles d'audience.
3. Mandater un juge ou une
chambre spécifique dans chaque
tribunal pour traiter rapidement les
affaires relatives aux infractions
électorales et allouer les ressources
nécessaires pour instruire les affaires.
Au gouvernement
1. Lancer une campagne de
sensibilisation aux médias et à
l'alphabétisation numérique sur la
désinformation, en coopération avec
l'ISIE et les OSC, afin de renforcer la
capacité des utilisateurs à vérifier les
informations et à prendre des
décisions éclairées.
2. Conditionner une partie du
financement public aux partis en
augmentant la participation des
femmes dans leurs structures de
gouvernance internes et en soutenant
l'inclusion d'un plus grand nombre de
femmes comme candidates.
Aux partis politiques
1. Augmenter les efforts
d'éducation des électeurs afin
d'augmenter la participation
électorale, en particulier parmi les
groupes marginalisés.
2. Améliorer la démocratie et
la transparence internes aux partis,
notamment dans la sélection des
candidats.
102 | The Carter Center Rapport des élections






Page 103
Aux organisations de la société
civile
1. Améliorer les efforts d'éducation des
électeurs afin d'augmenter la
participation électorale, en
particulier parmi les groupes
marginalisés.

Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 103




















































Page 104
Annexe A :
Remerciements
Le Centre Carter tient à exprimer sa
reconnaissance à de nombreuses
personnes et organisations pour leurs
efforts et leur dévouement lors de
l’observation des récentes élections
tunisiennes. Le Centre remercie
l’Instance supérieure indépendante
pour les élections de l'avoir accrédité
pour observer les élections. Il
remercie aussi le Gouvernement
tunisien et l’Instance pour leur
coopération, tout au long du
processus électoral.
Le Centre exprimer sa gratitude pour
l'Agence américaine pour le
développement international et
l'Ambassade de Suisse en Tunisie,
dont le soutien financier a permis au
Centre de se déployer rapidement et
d'observer l'ensemble du processus
électoral en Tunisie. Le Centre tient
à remercier Mr Salam Fayyad,
ancien Premier ministre palestinien,
M
me Tana de Zulueta, ancienne
parlementaire italienne et M
me Karen
AbuZayd, commissaire de la
Commission d'enquête indépendante
sur la République arabe syrienne,
pour avoir dirigé les délégations
d'observateurs, à court terme, du
Centre Carter. Le Centre apprécie le
travail acharné et le dévouement de
ces leaders, dont les idées et
l’expérience ont renforcé le travail de
la mission d’observation électorale
du Centre. Le Centre est
reconnaissant à l’Instance supérieure
indépendante pour les élections
(ISIE), au Tribunal administratif et
aux organisations de la société civile
qui ont gracieusement partagé des
informations précieuses, qui ont
alimenté nos conclusions.
Le Centre est honoré de compter un
personnel international de bureau,
talentueux et engagé, composé
d'Adeline Marquis, analyste des
médias sociaux ; Ahmed Farag,
analyste juridique; Baya Kara,
analyste électoral; Davor Ćorluka,
responsable de la sécurité des
opérations; Don Bisson, directeur de
la mission d'observation des
élections; Fida Nasrallah, directrice
du bureau du pays et analyste
politique; Ghias Aljundi, analyste
des médias sociaux et Marie
Allegret, coordinatrice des
observateurs. Le Centre Carter
souhaite exprimer sa gratitude au
personnel tunisien de ses bureaux
extérieurs : Abir Chniti, Amel
Tayachi, Amen Abidi, Anouar
Gaaloul, Belhassen Ennouri, Fadhel
Blibech, Ihsen Sbabti, Jezia Labidi,
Lamia Tira, Karim Alkadhkhadhy,
Mohamed Kliti, Oussama Laajimi,
104 | The Carter Center Rapport des élections





















Page 105
Soyia Ellison, Tennielle Bailey,
Tynesha Green et Wyatt Schierman.
Les stagiaires Hannah Park et Brian
Olinger ont également fourni un
soutien précieux en matière de
logistique, de communication avec
les observateurs et effectué
d'innombrables autres tâches à
l'appui de la mission.
Rahma Ben Mansour, Ridha Jebali,
Saber El Missaoui, Wafa Ouahchi,
Ziad Abaoub et Zied Ayari pour
leurs rôles essentiels dans la mission.
Des remerciements particuliers sont
également adressés aux chauffeurs
qui ont assisté le personnel de terrain
et les observateurs à long terme sur
le terrain, ainsi qu'à tous les autres
traducteurs et chauffeurs qui ont
travaillé pendant la mission
d'observation à court terme.
Le Centre tient également à
reconnaître les inestimables
contributions des observateurs à long
terme : Anitra Jankevica, Elvis Same
Mbah, Fanta Traore, Gent Ramadani,
Ghassan Elbitar, Jamal Boubouch,
Jean-Louis Ouraga, Kelechi
Akubueze, Mamoudou Samboly,
Maria Laura Salich, Marie-Clémence
Nodjan, Mohamed Sabahy, Monique
Ranjamanana Rasoloarivelo, Özcan
Çetin, Salma Sharif, Ségolène Tavel
et Yasmin Pederson. Le Centre
apprécie grandement les observateurs
à court terme de toute la région du
Moyen-Orient et de l'Afrique du
Nord, et au-delà, pour avoir mis leurs
diverses expériences et leur expertise
pour l'évaluation du respect des
procédures le jour du scrutin.
Un certain nombre de cadres et
d'employés du Centre Carter ont
travaillé à Atlanta pour assurer le
succès de la mission en Tunisie,
notamment Andrea Nelli Feroci, Dan
Grober, Dan Richardson, David
Carroll, Erika Perry, Jeremy Byrd,
Lance Alloway, Mark Williams,
Michael Baldassaro, Patti Bunker ,
Ramiro Miranda Martinez, Ruby
Kochenderfer, Sandra Urquiza,
Sarah Johnson, Sarah Matthews,
Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie| 105

























Page 106
Annexe B. Population et
quotients électoraux
Circonscription
électorale
Nombre
d’habitants
(recensement
de 2014)
Nombre d’électeurs
inscrits (élections
législatives de 2019)
Sousse
Ben Arous
Kairouan
Sfax 2
Monastir
Bizerte
Tunis 2
Ariana
Sidi Bouzid
Tunis 1
Médenine
Kasserine
Sfax 1
Jendouba
Nabeul 1
Mahdia
Gabès
La Manouba
Gafsa
Nabeul 2
Beja
Le Kef
Siliana
Zaghouan
Kébili
Tataouine
Tozeur
Total Tunisie
674971
631843
570559
519086
548828
568221
505440
576088
429913
550807
479518
439244
436335
401477
440180
410813
374300
379516
337332
347738
303031
243157
223088
176946
156961
149452
107911
10982755
369 688
360 434
330 301
328 491
324 410
323 471
313 645
307 786
300 270
299 031
290 167
289 376
282 756
272 989
263 896
247 294
230 511
224 417
222 060
210 846
209 660
156 250
136 955
118 219
104 182
87 624
75 610
6 680 339
Nombre
de
sièges
(Décret-
loi de
2011)
10
10
9
9
9
9
8
8
8
9
9
8
7
8
7
8
7
7
7
6
6
6
6
5
5
4
4
199
Nombre de
voix obtenues
(élections
législatives)
Quotient
Electoral
176603
168423
116109
162920
155876
136914
167583
149389
101374
135937
116263
111096
128542
80323
124134
102290
93884
93683
102357
93832
68124
57720
53901
50873
51338
32481
36230
17660
16842
12901
18102
17319
15212
20947
18673
12671
15104
12918
13887
18363
10040
17733
12786
13412
13383
14622
15638
11354
9620
8983
10174
10267
8120
9057
106 | The Carter Center Rapport des élections

























Page 107
Information
non disponible
Information
non disponible
Information
non disponible
Information
non disponible
Information
non disponible
Information
non disponible
France 2
France 1
Continent Américain
et reste des pays
d’Europe
Italie
Monde Arabe et
reste des pays du
monde
Allemagne
Total Etranger
Grand total
117 051
88 657
57 775
57 669
35 820
28 574
385 546
7 065 885
5
5
2
3
2
1
18
217
15466
3093
22882
4576
9715
4857
5801
1933
7818
3909
4418
4418
107 | The Carter Center Rapport des élections








































































Page 108
Annexe C. Candidatures
IRIE
Reçues
Acceptées
Rejetées
ARIANA
BIZERTE
MANOUBA
Tunis 1
Tunis 2
BEN AROUS
NABEUL 1
NABEUL 2
KAIROUAN
ZAGHOUAN
BEJA
KEF
JENDOUBA
SILIANA
SOUSSE
MONASTIR
MAHDIA
SFAX1
SFAX2
SIDI BOUZID
KASSERINE
GAFSA
TOZEUR
KEBILI
MEDENINE
GABES
Tataouine
Total
54
44
61
50
60
56
49
42
65
53
48
51
52
53
57
55
50
56
51
75
68
70
43
36
39
34
33
1,405
52
42
57
49
55
55
47
41
62
53
46
51
50
52
49
50
48
52
45
73
66
70
43
34
34
32
32
1,340
2
2
4
1
5
1
02
01
03
00
2
00
02
01
08
05
02
04
06
02
02
00
00
02
05
02
01
65
Nombre total des
listes candidates en
date du 30 août 2019
52
42
57
49
56
55
47
41
62
53
46
51
50
52
49
50
48
52
45
73
66
70
43
34
34
32
32
1,341
108 | The Carter Center Rapport des élections




























Page 109
Annexe D. Résultats des
élections
Résultats officiels du Premier tour des élections présidentielles de 2019
Electeurs inscrits
7,074,566
Nombre d’électeurs ayant voté
Suffrages exprimés
Bulletins de vote nuls
Bulletins de vote blancs
3,465,184
3,372,973
68,344
23,867
100%
48.98
47.67
0.96
0.33
Candidats
Kais Saied
Nabil Karoui
Abdelfateh Mourou
Abdelkarim Zebidi
Youssef Chahed
Safi Said
Lotfi Meraihi
Seifeddine Makhlouf
Abir Moussi
Mohamed Abbou
Mohamed Moncef Marzouki
Mehdi Jomaa
Mongi Rahoui
Mohamed Hechmi Hamdi
Hamma Hammami
Elyes Fakhfakh
Said Aidi
Omar Mansour
Mohsen Marzouk
Hamadi Jebali
Neji Jalloul
Abid Briki
Salma Elloumi
Mohamed Sghaier Nouri
Slim Riahi
Hatem Boulabiar
109 | The Carter Center Rapport des élections
Voix obtenues
Pourcentage des suffrages exprimés
620,711
525,517
434,530
361,864
249,049
239,951
221,190
147351
135,461
122,287
100,338
61,371
27,355
25,284
23,252
11,532
10,198
10,160
7,376
7,364
7,166
5,799
5,093
4,598
4,472
3,704
18,40
15,58
12,88
10,73
7,38
7,11
6,56
4,37
4,02
3,63
2,97
1,82
0,81
0,75
0,69
0,34
0,30
0,30
0,22
0,22
0,21
0,17
0,15
0,14
0,13
0,11












Page 110
Résultats officiels du Second tour des élections présidentielles de 2019
Electeurs inscrits
7,074,566
Nombre d’électeurs ayant voté
Suffrages exprimés
Bulletins de vote nuls
Bulletins de vote blancs
3,892,085
3,820,825
55,348
15,912
100%
55.0151769
54.0079066
0.78235188
0.22491839
Candidats
Kais Saied
Nabil Karoui
Total
Voix obtenues
2 777 931
1 042 894
3,820,825
Pourcentage des suffrages
exprimés
72.71
27.29
100
Résultats officiels des élections législatives de 2019
Electeurs inscrits
Nombre d’électeurs ayant voté
Suffrages exprimés
Bulletins de vote nuls
Bulletins de vote blancs
7,065,885
2,946,628
2,870,314
49,704
26,403
100%
41.70
40.62
0.70
0.37
110 | The Carter Center Rapport des élections




























Page 111
Listes candidates
Ennahdha
Qalb Tounes
Le Courant Démocratique
Coalition Al Karama
Parti Destourien Libre
Mouvement Echaab
Tahya Tounes
Machrouu Tounes
Errahma
Union Populaire Républicaine
Al Badil
Nidaa Tounes
Afek Tounes
Amal wa Aamal
Aïch Tounsi
Front Populaire
Union Démocratique et Sociale
Courant de l’Amour
Parti Socialiste Destourien
Voix des travailleurs
Autres/Listes indépendantes
Nombre de sièges
obtenus
Nombre de femmes
députés
52
38
22
21
17
15
14
4
4
3
3
3
2
2
1
1
1
1
1
1
11
21
16
3
2
5+1
1
1
1
1
0
0
0
0
1
1
0
0
0
0
0
0
111 | The Carter Center Rapport des élections




















Page 112
Annexe E. Délégation et
liste du personnel
Mission Leaders
Karen AbuZayd, United States,
Commissioner, Independent International
Commission of Inquiry on the Syrian Arab
Republic (UNHRC)
Salam Fayyad, Palestine, Former Prime
Minister of the Palestinian Authority,
Economist, and Independent Politician
Tana De Zulueta, Italy, Former Member of
Parliament and Independent Consultant
Atlanta Staff
Patti Bunker, Chief Information Technology
Officer, Information Technology
Jeremy Byrd, Financial Analyst, Peace
Programs
David Carroll, Director, Democracy
Program
Soyia Ellison, Associate Director,
Communications
Andrea Nelli Feroci, Associate Director,
Democracy Program
Sarah Johnson, Associate Director,
Democracy Program
Ruby Kochenderfer, Grants Manager,
Finance
Sarah Matthews, Senior Associate Director,
Development
Hannah Park, Intern, Democracy Program
Daniel Richardson, Program Assistant,
Democracy Program
Wyatt Schierman, Mission Assistant,
Democracy Program
Sandra Urquiza, Program Associate,
Democracy Program
Mark Williams, Associate Director Estate
and Gift Planning, Development
Tunisia International Staff
Ghias Aljundi, United Kingdom, Social
Media Analyst
Marie Allegret, France, Long- Term
Observers Coordinator
Don Bisson, United States, Mission
Director
Davor Corluka, Bosnia and Herzegovina,
Security and Operations Manager
Ahmed Farag, Egypt, Legal Analyst
Baya Kara, Algeria, Electoral Analyst
Adeline Marquis, France, Social Media
Analyst
Fida Nasrallah, United Kingdom and
Lebanon, Country Representative and
Political Analyst
Tunisia National Staff
Amen Abidi, Information Technology
Support Officer
Zied Ayari, Political Officer
Brian Olinger, Intern, Democracy Program
Fadhel Blibech, Legal Consultant
112 | The Carter Center Rapport des élections










Page 113
Abir Chitni, Finance and Administrative
Officer
Saber El Missaoui, Social Media Analyst
Belhassen Ennouri, National Legal
Officer
Karim Kadhkadhi, Office Manager
Oussama Laajimi, Security Officer
Jezia Labidi, National Media Analyst
Rahma Ben Mansour, Operations Officer
Wafa Ouahchi, Electoral Officer
Ihsen Sbabti, Project Officer
Amel Tayechi, Translator and
Interpreter
Lamia Tira, Project Manager
Long-Term Observers
Mamoudou Sambouly Ba, Mauritania
Jamal Boubouch, Morocco
Özcan etin, Turkey
Ghassan El Bitar, Lebanon
Anitra Jankevica, Latvia
Elvis Same Mbah, Cameroon
Marie-Clémence Nodjan, Côte d’Ivoire
Jean-Louis Ouraga, Côte d’Ivoire
Yasmin Pedersen, Denmark
Gent Ramadani, Norway
Monique Ranjamanana Rasolorivelo,
Madagascar
Mohamed Sabbahy, Egypt
Laura Salich Di Francesca, Italy
Salma Sharif, Egypt Ségolène Tavel,
France
Fanta Traore, Mali
Short-Term Observers
Mousedadd Abdallah,Morocco
Mohamed Abdelmeguid, Egypt
Abbas Abouzeid, Lebanon
Maissa Abusamra, Palestine
Issam A. Adwan, Palestine
Nabila Afroun, Algeria
Abubhav Ajeet, Nepal
Mahmoud Alafranji, Palestine
Diaa Aldeen Alhorany, Syria
Salem Alhusumi, Libya
Alexis Arieff, United States
Rania Abu Ayyash, Palestine
Fadi Radwan, Syria
Zaheda Rahman, Palestine
William Raiser, United States
Theophile Renard, France
Magdh Saleh, Sudan
Ashraf Shuaibi, Palestine
Hind M. Azzouz, Libya
Mashood Baderin, United Kingdom
Tommy Barrow, United States
Toshiro Baum, United States
113 | The Carter Center Rapport des élections









Page 114
Daniel Bekele, Ethiopia
Celine Merhej, Lebanon
Cherifa Belghanem, Algeria
Leila Mohameed, Sudan
Ihab Bennar, Morocco
Rudy Mohammad, Syria
Coumba Betty Diallo, Mauritania
Christa Mueller, Germany
Nadija Bouaricha, Algeria
Khalaf Mukhtar, Sudan
Hapsatou Bocoum, Mauritania
Engwase Mwale, Zambia
Peggy Clement, United States
Philippa Neave, France
Adama Dicko, Mali
Annette Nhekairo, Zambia
Clemens Droessler, Austria
Marwa Othman, Egypt
Mohamed El Kory, Mauritania
Kryticous Patrick Nshindano, Zambia
Brigette Vidal Perez, Peru
Karen Sullivan, United States
Paul Sullivan, United States
Greg Teeters, United States
Assaad Thebian, Lebanon
Mya Nandar Thin, Myanmar
Tidiani Togola, Mali
Abu Turay, Sierra Leone
Laura Villalba, United States & Paraguay
Marion Volkmann-Brandau, Germany
Jill Welch, United States
Dima Wiess, Syria
Jacqueline Wittmeyer, United States
Ereny Zarif, Egypt
Mohammed Yahya Ould El Eyil,
Mauritania
Amadou Lamine Gueye, Senegal
Gayelle Haddad, Canada
Mohcine Hafid, Morocco
Robin Hagemeyer, United States
Parastou Hassouri, United States
Kyaw Htin, Myanmar
Soulaima Jabi, Syria
Maša Janjusevic, Croatia
Wilbroad Kangala, Zambia
Cigdem Kaya, Turkey
Rougietou Ibrahim Kane, Mauritania
Amer Khadeij, Lebanon
Issam Khatib, Palestine
Kevin Killer, United States
Mélissa Lakrib, Algeria
Isabelle M.M. Lemba, Zambia
Punam Limbu, Nepal
114 | The Carter Center Rapport des élections







Page 115
Annexe F. Termes et
abréviations
ACDEG
Elections, and Governance
African Charter on Democracy,
Instance Régionale Indépendante
IRIE
pour les Elections
Regional Independent Authority for
Elections
Instance Supérieure Indépendante
ISIE
pour les Elections
High Independent Authority for the
ACHPR
Peoples’ Rights
AfCHPR
Peoples’ Rights
African Charter on Human and
Elections
African Court on Human and
JSF
Youth Without Borders
Assembly of Representatives of the
ARP
People
ATIDE Association Tunisienne pour
l’Intégrité et la Démocratie des Elections
Association for Transparency and
Integrity of the Elections
AU
African Union
CAT Convention Against Torture,
Inhuman, or Degrading Treatment
Convention on the
CEDAW
Elimination of All Forms of Discrimination
Against Women
CERD Convention on the Elimination of All
Forms of Racial Discrimination
CSOs Civil Society Organizations
HAICA Haute Autorité indépendante de la
communication audiovisuelle Independent
High Authority for Audiovisual Communication
LTDH La Ligue Tunisienne des Droits de
l’Homme
Tunisian League for Human Rights
MOE Margin of Error
MPs Members of Parliament
OAS Organization of American States
OSCE Organization for Security and
Cooperation in Europe
OSF Observers Without Borders
PDL
Parti Destourien Libre
Free Destourian Party
PVT
Parallel Vote Tabulation
RCD Rassemblement Constitutionnel
Democratique Democratic Constitutional Rally
SADC Southern African Development
Community
TU-MED
Tunisian Mediterranean Center
ICCPR International Covenant on Civil and
Political Rights
UGTT Union Générale Tunisienne du
Travail
ICESCR
Economic, Social, and Cultural Rights
International Covenant on
Instance Provisoire de
IPCCPL
Contrôle de la Constitutionalité des Projets
de Loi
Provisional Commission to Review the
Constitutionality of Draft Laws
General Union of Tunisian Workers
UNHRC
Rights Council
United Nations Human
115 | The Carter Center Rapport des élections








Page 116
Annexe H. Tableau de
liens aux déclarations et
rapports électoraux des
observateurs nationaux
Mourakiboun
First round: https://drive.google.com/
file/d/1W0v5IBGr78cxsuXLsn1p_Tvi0Hf
6T-yI/ view?fbclid=IwAR3ibzrJK-
yNJk_zMB6Jok_
AQAVJAfeNls4iPtuWNSztbTVgHmsrERR
MBRE
Parliamentary elections:
https://drive.google.com/
file/d/1n8azW3PzLNl1-
SbSJz8mySioFBqjHwDI/
view?fbclid=IwAR3i4W8ASPqXkjYQiRodD8
EGy-
p9Ocj_7AH6zmGWLUfHJtaiGXNMUJkG0
MA
Runoff: https://drive.google.com/file/
d/1SxwgRn8FDMtl5GPVIzNzu_Os-
qRjJswO/
view?fbclid=IwAR2O2mQBxu864XDAQB4_0J
UK
0grvvVHNJmmjD1UZKXhpn2qQzVI7wnjh3
aM
ATIDE
First round:
https://www.facebook.com/atideTu-
nisie/photos/pcb.2675277089158517/2675276
5558 25237/?type=3&theater
Parliamentary elections:
https://www.facebook.
com/atideTunisie/photos/pcb.271666404835
3154/2
716663855019840/?type=3&theater
116 | The Carter Center Rapport des élections
Runoff: https://drive.google.com/
file/d/1I0IB0SZBAizZpCfvoRtThZD
OqLvoug9n/view?fbclid=IwAR0KRWlgtV
ELPgCkrxk65UMxBw-s219_
DBQ8onceL_Cr061Zrs3091o8Q
CHAHED Observatory (available
only in Arabic)
First round statement 1:
https://www.facebook.
com/observatoire.chahed/photos/a.27639913238
31
87/2711764532179956/?type=3&theat
er
First round statement 2:
https://www.facebook.
com/observatoire.chahed/photos/a.27639913238
31
87/2712174365472306/?type=3&theat
er
First round statement 3:
https://www.facebook.
com/observatoire.chahed/photos/a.27639913238
31
87/2712466068776469/?type=3&theat
er
First round statement 4:
https://www.facebook.
com/observatoire.chahed/photos/a.27639913238
31
87/2712637955425947/?type=3&theat
er












Page 117
Parliamentary election:
https://www.facebook.
com/observatoire.chahed/photos/pcb.275286119
47
36956/2752854928070916/?type=3&thea
ter
Runoff statement 1:
https://www.facebook.com/
observatoire.chahed/photos/pcb.2766639390025
80
3/2766638433359232/?type=3&theater
Runoff statement 2:
https://www.facebook.com/
observatoire.chahed/photos/pcb.2767158143307
26
1/2767157056640703/?type=3&theater
Runoff statement 3:
https://www.facebook.com/
observatoire.chahed/photos/pcb.2767405259949
21
6/2767398086616600/?type=3&theater
Runoff statement 4:
https://www.facebook.com/
observatoire.chahed/photos/pcb.2767495236606
88
5/2767494243273651/?type=3&theater
I-Watch (available only in Arabic)
First round:
https://www.iwatch.tn/ar/article/7
21?fbclid=IwAR2mB3vyj5kXTIkAzzv-
SzmXg-
WheXyR_VKwXIb7ptVqtcHJzYToxwXIjegs
Parliamentary elections:
https://www.iwatch.tn/ar/
article/729?fbclid=IwAR3Vl1SW5DLpXfJjWh
Q6b
eL64eGYaLBHW9PBfXPcPtiO6Vp7dMlLWja
36Fo
Runoff:
https://www.iwatch.tn/ar/article/732
?fbclid=IwAR3JGlFxx9XkrHfsKcbqxKMe
W bEUt5-
kfEUMUKfVkAgnGFoqAHVd5VwA1TE
TU-Med
First round statement 1 (in Arabic):
https://www.
facebook.com/centreTUMED/photos/a.140952247
2662133/2403982666549437/?type=3&theater
First round statement 2 (in Arabic):
https://www.
facebook.com/centreTUMED/photos/a.140952247
2662133/2404172333197137/?type=3&theater
Parliamentary elections statement 1 (in
Arabic):
https://drive.google.com/file/d/1R3-
IBoJYljgur5OUPjLPTwyab5VuGjpR/view?fbcli
d=IwAR1351pNjX1tIw39V90CkQYBRF66rC
jhCK_kMwIcrQpe7Cow5ap_hidELW8
Parliamentary elections statement 2:
https://www.
facebook.com/centreTUMED/photos/ms.c.eJwzMjE
yNDM1MjQ0NDGxNDS11DOCCBibmZhbGJmY
mQMAcIYGrQ~-~-.bps.a.2421652084782495/242
1652364782467/?type=3&theater
Runoff statement 1:
https://www.facebook.com/
centreTUMED/photos/pcb.2427588180855552
/242 7588994188804/?type=3&theater
Runoff statement 2:
https://www.facebook.com/
centreTUMED/photos/pcb.2427791600835210
/242 7791047501932/?type=3&theater
JSF (available only in Arabic)
117 | Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie







Page 118
First round: https://www.face-
book.com/JSF.TUNISIE/photos/
ms.c.eJxFztkNA0EIA9COIg4bQ~;~_
NRTNZNr9PNjgqUeXtGaDcP3EhLIoai3wB
J1HdP5AjMgDRFrxn3IEXYEW1NRf4A~;0
B
t2J4vqTljEeQC~;RTaW0CeYa1ZodJNwE~
_ CZndo1yoGZ2lPfwCUoUwNQ~-~-
.bps.a.2634661
163245776/2634671423244750/?type=3&t
heater
Parliamentary elections: https://www.facebook.
com/JSF.TUNISIE/photos/pcb.267401661931023
0/ 2674014859310406/?type=3&theater
Runoff:
https://www.facebook.com/JSF.TUNISIE/
photos/pcb.2688828657829026/26888273011
6249
5/?type=3&theater
Ofiya (only in Arabic)
Parliamentary elections: http://coalition-
ofiya.
com/%D8%A7%D9%84%D8%A7%D9%82%D8
%AA%D8%B1%D8%A7%D8%B9
Runoff: http://coalition-ofiya.
com/%D8%A8%D9%8A%D8%A7%D9%86-
70 9.
118 | The Carter Center Rapport des élections
























































Page 119
Annexe I. Lettre d’invitation
119 | Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie






Page 120
Annexe J. Le Centre
Carter en un coup d'œil
Le Centre Carter a été fondé en 1982
par l'ancien président américain Jimmy
Carter et son épouse, Rosalynn, en
partenariat avec l'Université Emory,
pour faire progresser la paix et la santé
dans le monde. Organisation non
gouvernementale à but non lucratif, le
Centre a contribué à améliorer la vie
des habitants de 80 pays en résolvant
les conflits ; avancer la démocratie, les
droits de l'homme et les opportunités
économiques; prévenir les maladies; et
l'amélioration des soins de santé
mentale. Veuillez visiter
www.cartercenter.org pour en savoir
plus sur le Centre Carter.
120 | The Carter Center Rapport des élections























Page 121
121 | Elections présidentielles et législatives 2019 en Tunisie






Page 122
Le Centre Carter déploie une mission d’observation internationale
pour évaluer le processus électoral en Tunisie
DATELINE (August 7, 2019) — Le Centre Carter a déployé une mission d'observation électorale en Tunisie
pour observer les élections présidentielles
du 15 septembre ainsi que les élections législatives du 6 octobre.
Après la révolution, le Centre a surveillé plusieurs processus législatifs et politiques au cours de la transition
démocratique du pays en commençant par l’observation des élections de l’Assemblée Nationale Constituante en
2011. Cette année, l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE) a invité et accrédité le Centre
Carter pour observer les élections nationales.

Dans le cadre de cette mission d’observation de longue durée, le Centre Carter a institué un partenariat avec
l'Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique (EISA) visant à intégrer leurs efforts communs,
à travers une étroite coordination de leurs plans de recrutement, formation, et déploiement des observateurs de
longue durée pour l’évaluation du processus électoral selon une méthode d’évaluation commune. L’équipe
d’observation de longue durée conjointe est composée de 16 observateurs. Ces observateurs ont été déployés le
22 juillet par équipe de deux dans huit régions du pays pour évaluer les préparatifs électoraux aux niveaux
régional et local. Les observateurs, qui ont rejoint une équipe d'experts basés à Tunis depuis le 10
juin, vont travailler dans chacune des 27 circonscriptions électorales de Tunisie.

Outre sa collaboration avec EISA, le Centre coopérera également avec les principaux acteurs locaux ainsi
qu’avec les autres groupes d’observateurs internationaux et nationaux.

l’inscription des électeurs,
La mission consiste à observer et à examiner les principaux aspects du processus électoral tels que le contexte
l’enregistrement des candidats, la campagne électorale, et
pré-électoral,
leaders de haut niveau
son financement. Des équipes d’observateurs de courte durée et des
rejoindront la mission d'observation pour observer les procédures de vote, le dépouillement et la tabulation
durant les élections du 15 septembre et du 6 octobre. L’équipe suivra le processus post-électoral dont les recours
contre les résultats des élections.

Pendant toute la période électorale, le Centre Carter présentera régulièrement ses principales conclusions. A la
fin de la mission d'observation, le Centre fournira une évaluation indépendante du processus électoral portant
sur les élections législatives et présidentielles. Il s’intéressera notamment à la conformité des processus avec
les engagements internationaux du pays, le droit national, et les normes des élections démocratiques. Tous
les déclarations et les rapports seront disponibles sur www.cartercenter.org .

Les missions d'observation électorale du Centre se déroulent conformément à la Déclaration de principes pour
l’observation internationale d’élections, qui établit des directives pour une observation professionnelle et
impartiale d'élections internationales. La déclaration a été adoptée aux Nations Unies en 2005 et a été approuvée
par plus de 50 groupes d'observation électorale.











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Contact: In Atlanta, Soyia Ellison, associate communications director, soyia.ellison@cartercenter.org
In Tunisia, Don Bisson, Mission Director, don.bisson@cartercenter.org.
The Carter Center
Waging Peace. Fighting Disease. Building Hope.
A not-for-profit, nongovernmental organization, The Carter Center has helped to improve life for people in over
80 countries by resolving conflicts; advancing democracy, human rights, and economic opportunity; preventing
diseases; and improving mental health care. The Carter Center was founded in 1982 by former U.S. President
Jimmy Carter and former First Lady Rosalynn Carter, in partnership with Emory University, to advance peace
and health worldwide.
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Déclaration préélectorale du Centre Carter sur le processus électoral en
Tunisie
9 Septembre 2019
Le Centre Carter félicite les différents acteurs des élections tunisiennes pour les efforts rapides et
efficaces qu’ils ont déployés pour se préparer aux prochaines élections présidentielle et
législatives, compte tenu de la nécessité d’avancer la date de l’élection présidentielle suite au décès
prématuré du président.
Le délai de 90 jours imposé par la constitution pour élire un nouveau président a mené le Parlement
a adopter des amendements à la loi électorale pour tenir compte de la nouvelle date. La situation a
accru la pression exercée sur tous les acteurs du processus électoral pour qu'ils tiennent des
élections dans des délais restreints dans le respect à la fois des standards internationaux en matière
d'élections démocratiques et des dispositions du droit national. Malgré l’absence d’une Cour
constitutionnelle, les pouvoirs exécutifs ont été transférés sans heurts et de manière souple au
président par intérim, évitant ainsi une éventuelle crise constitutionnelle.
Avant la mort du Président Caïd Essebsi, le parlement avait adopté différents amendements de la
loi électoral contenant des mesures visant certains candidats en particulier pour les empêcher de
participer aux élections. Si ces mesures sont passées, elles auraient constitué une restriction au
droit des tunisiens de se porter candidater aux élections. Le président Caïd Essebsi n’a pas signé
ce projet de loi dans les délais fixés par la constitution et sa mort a entériné la question de la
promulgation. Fin août, les autorités ont arrêté l'éminent candidat Nabil Karoui, l'un des accusés
présumés de ces amendements à la loi électorale, qui aurait effectivement empêché les
propriétaires de médias et d'organisations caritatives de se présenter aux élections. La Cour d'appel
a ordonné l'arrestation de Karoui pour des accusations découlant d'une enquête ouverte en 2017.
Sa demande de revoir la décision en appel en vue de sa libération a été rejetée. Il en est de même
pour la demande de la mission d'observation du Centre Carter de le rencontrer en prison qui s’est
soldée par un refus. Bien que l'ISIE ait annoncé que son arrestation ne mettrait pas en danger sa
place sur le bulletin de vote, Karoui est incapable de faire campagne. De plus, on ignore comment
sa détention affectera le statut de sa participation au reste du processus électoral.
Les préparatifs électoraux se déroulent efficacement. La vigoureuse campagne d’inscription des
électeurs menée par l’instance Supérieure Indépendante pour les élections (ISIE) lors de ces
élections a abouti à l’enregistrement de 1 455 898 nouveaux électeurs, dont 63% de femmes et de



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jeunes électeurs. L'ISIE et la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle
(HAICA) ont appelé les médias à faire preuve d'une vigilance accrue en couvrant les activités des
candidats qui sont restés ministres ou en fonction dans le gouvernement. L’ISIE a renforcé son
contrôle de la campagne et a mis en garde les responsables gouvernementaux contre l’utilisation
des ressources de l’État pour toute activité liée à leur campagne électorale.
Cette déclaration fournit à la mission internationale d’observation des élections du Centre Carter
une évaluation de la période préélectorale, y compris les processus d’inscription des électeurs et
d’enregistrement des candidats pour les élections de 2019 en Tunisie. Cette déclaration offre
également des recommandations préliminaires aux acteurs des élections.

Le décès du président Essebsi et la possible crise constitutionnelle. Le décès du président Beji
Caïd Essebsi a mis à l’épreuve la maturité politique de la Tunisie et a fait émerger un risque d’une
crise constitutionnelle. Malgré l'absence d’une Cour constitutionnelle, organe doté du mandat
constitutionnel pour constater la vacance de la présidence et de superviser le transfert des pouvoirs
au président par intérim, un transfert de pouvoirs pacifique et ordonné a été accompli. Une crise
constitutionnelle a été évitée lorsque l’autorité provisoire pour la constitutionnalité des projets de
loi est intervenue pour faire connaître la situation et a informé le Président du Parlement, Mohamed
Ennaceur, de la vacance de la fonction. Il a ainsi, prêté serment le même jour de la mort du
président Caïd Essebsi. En vertu de la constitution, le mandat du président par intérim ne peut
durer plus de 90 jours.
Le Centre Carter félicite le peuple tunisien et ses institutions pour la transition sans heurt du
pouvoir au président par intérim et pour les actions de tous les partis politiques et institutions de
l'État qui ont permis d’éviter que la mort du Président ne puisse altérer à l’égard des citoyens le
fonctionnement normal de l’Etat. La transition souple, malgré l’absence d’une Cour
constitutionnelle, est un signe positif de l’installation des institutions démocratiques en Tunisie et
de la capacité des différentes institutions de l’Etat de collaborer efficacement.
Bien qu'une crise constitutionnelle ait été évitée, les événements récents ont souligné l'urgente
nécessité pour le prochain parlement de mettre en place une Cour constitutionnelle fonctionnelle.
La Constitution de 2014 prévoyait dès son entrée en vigueur que cette juridiction devait être
constituée dans l'année suivant la date des premières élections législatives organisées en octobre
2014. Le Centre exhorte les prochains législateurs une fois en poste à agir rapidement pour mettre
en place cette Cour.
Les amendements à la loi électorale relatives au nouveau calendrier de l’élection présidentielle.
La nécessité d'élire un nouveau président avant l'expiration du mandat du président par intérim a
contraint l'ISIE à avancer la date de l'élection présidentielle du 17 novembre au 15 septembre. Afin
de respecter le délai constitutionnel, l'ISIE a également demandé que le Parlement adopte des
amendements urgents à la loi électorale dans le but de raccourcir le délai légal pour contester les
résultats du premier tour de l'élection présidentielle. Le Parlement a adopté ces amendements le
22 août. Le Centre Carter félicite ces efforts ainsi que les mesures prises par l'ISIE pour mener à
bien le processus d'enregistrement des candidats dans les meilleurs délais. Dans le même temps,
le Centre Carter note que le calendrier serré pour les contestations électorales pourrait
Page 126
compromettre le droit à un recours effectif ; les plaignants potentiels ayant peu de temps pour
rassembler les éléments de preuve nécessaires pour prouver leur cas et le tribunal peut être amené
à rendre des décisions sans avoir les informations adéquates qui permettent de prendre une décision
définitive.

Les amendements à la loi électorale soulignent également la nécessité pour le Parlement de
procéder à un examen approfondi du cadre juridique électoral après les élections nationales de
2019 afin de remédier les lacunes et les incohérences, comme cela a été recommandé dans les
précédents rapports finaux du Carter Center sur les élections. Cela inclut de revoir le cadre
juridique pour la tenue d’élections anticipées et la collecte des parrainages pour se porter candidat.
Il est également nécessaire de revoir les dispositions constitutionnelles relatives au décès ou à
l'incapacité du président afin de s'assurer que les délais soient raisonnables et réalistes.
Les projets d'amendements électoraux controversés. La mort du président Caïd Essebsi a
également mis fin à la possibilité que les projets controversés d’amendement de la loi électorale –
préparés par le gouvernement, adoptés par le Parlement et déclarés constitutionnels par l’instance
provisoire pour le contrôle de la constitutionnalité des projets de loi – soient adoptés à temps pour
les prochaines élections. Le président n'a pas promulgué ces amendements avant son décès et la
constitution n'indique pas clairement la condition juridique des projets de loi non signés par un
président et dont le mandat prend fin de manière inattendue. Les amendements électoraux auraient
introduit un seuil de 3% pour l'entrée au parlement et auraient effectivement interdit aux
propriétaires des chaines de télévision et aux responsables d'organisations caritatives de se porter
candidat aux élections. En outre, cet amendement chargeait l'ISIE d’examiner toutes les
candidatures et de refuser celles des personnes qui font des déclarations contre les valeurs
démocratiques, l'état de droit et ceux qui font les louanges de la dictature.
Certains représentants de partis politiques ont déclaré à la mission d’observation électorale du
Centre Carter que le projet d’amendement visait à assurer des conditions égales pour tous les
candidats qu’il soient issus des partis ou des indépendants. Cependant, le calendrier et le contenu
de ces amendements semblaient cibler certains candidats en particulier et auraient constitué une
grave restriction à un droit fondamental de participation politique, à savoir le droit des citoyens
tunisiens de se porter candidat
1. En outre, ils auraient également pu être utilisés pour introduire
une série de recours sans fin aux candidats à l'élection présidentielle et aux législatives.
L'un des objectifs présumés du projet d’amendement proposé est le candidat à la présidence et
homme d'affaires éminent, Nabil Karoui. Ce dernier a été arrêté et emprisonné le 23 août sur un
mandat délivré par une Cour d'appel. Les accusations, fondées sur la corruption et le blanchiment
de capitaux, ont été lancées en 2016 et font toujours l'objet d'une enquête. Karoui est le propriétaire
de la chaîne de télévision Nessma.
Le moment choisi par le mandat d'arrêt soulève des questions, puisqu'un tribunal d'instance
inférieur lui a permis de rester en liberté depuis 2016 alors que l'enquête était en cours. La plainte
1 Article 74 de la Constitution tunisienne de 2014., Article 40 de la loi électorale, ONU (CCPR): Observation générale
n ° 25: Le droit de participer aux affaires publiques, le droit de vote et le droit d'accès égal à la fonction publique
(Article 25) , paragraphe 15.

Page 127
initiale était basée sur des informations fournies par I Watch, une organisation de la société civile
nationale (OSC), qui visait également le candidat à la présidence et Chef du gouvernement actuel,
Youssef Chahed, et l'ancien membre du Conseil du Shoura de Ennahda et candidat à la présidence,
Hatem Boulabiar. Aucun de ces derniers n'a été arrêté. Le mandat d'arrêt de Karoui n'a aucune
incidence sur sa candidature officielle. Il restera sur le bulletin de vote et pourra être élu, même s'il
reste emprisonné. Le moment de l'arrestation met en lumière des motivations politiques et remet
en cause l'intégrité du processus. L’arrestation signifie également que, contrairement à tous les
autres candidats, Karoui sera désavantagé car il ne peut pas participer personnellement à la
campagne. De plus, sa détention pose certaines ambigüités sur sa participation dans la suite du
processus électoral.
Les règles relatives aux médias et à la campagne des membres du gouvernement et l'utilisation
des ressources de l’Etat
. Le protocole d'accord signé récemment entre l'ISIE et la HAICA,
détaillant les règles applicables aux médias pendant la campagne, constitue une étape positive. Il
appelle les médias à être particulièrement vigilants en couvrant les activités de candidats qui sont
également des fonctionnaires ou des ministres. Le nombre de fonctionnaires se présentant aux
élections a considérablement augmenté au cours de ce cycle électoral, augmentant ainsi le risque
que les ressources de l’État soient utilisées pour financer les activités de leurs campagnes
électorales.
L'ISIE a également publié un règlement spécifique sur la campagne électorale détaillant ce que les
partis et les candidats peuvent et ne peuvent pas faire, y compris l'interdiction d'utiliser des
ressources de l'État pour faire campagne. L'ISIE a lancé un avertissement aux candidats et renforcé
sa capacité à contrôler la campagne en recrutant et en déployant plus de 1 500 contrôleurs dans
tout le pays.
La présentation des candidatures. L'ISIE a annoncé que les candidatures à l'élection présidentielle
doivent être présentées du 2 au 9 août. Malgré le manque d’informations détaillées sur certaines
décisions de l’ISIE, les processus de candidature et d’enregistrement des candidats se sont déroulés
sans heurts. Le personnel d'ISIE a mis en œuvre les procédures d'inscription et a informé les
candidats potentiels de toute lacune dans les documents de leur candidature de manière
professionnelle. L'ISIE a reçu 97 candidatures à la présidence ; 26 ont été approuvés et 71 ont été
rejetés. L'ISIE a publié la liste finale des 26 candidats le 31 août 2019, deux jours seulement avant
le début de la campagne électorale.
Cependant, l'ISIE n'a pas encore fourni d'informations publiques ni de justification détaillée sur le
rejet des trois quarts des candidatures, y compris pour les personnes ayant soumis le nombre de
parrainages requis. L'ISIE a informé le Centre Carter que cette information ne pouvait être obtenue
que par les candidats respectifs, individuellement. Finalement, après que les organisations de la
société civile les aient exhortés à le faire, l’ISIE a mis en place un service SMS permettant aux
électeurs de vérifier si leur nom figure sur l’une des listes de parrainage des candidats. Grâce à ce
service, les électeurs dont les noms figuraient sur les listes ont déposé plus de 245 plaintes selon
Page 128
lesquelles leurs signatures auraient été utilisées à leur insu2. L'échec de l'ISIE d’informer
pleinement le public des raisons pour lesquelles les candidats ont été rejetés a conduit à des
spéculations selon lesquelles elles étaient fondées sur d'autres considérations, plutôt que sur une
application stricte de la loi. Bien que le nombre total des plaintes déposées soit assez faible
comparé au nombre total des parrainages par les électeurs, le manque d'informations publiques
pourrait saper la confiance du public dans l'administration des élections.
Bien que les audiences du tribunal administratif sur les contestations du rejet des candidatures par
l’ISIE aient eu lieu publiquement et que les candidats aient bénéficié d’une procédure régulière, le
tribunal n’a pas divulgué publiquement les plaintes déposées, ni diffusé aucune information
concernant les contestations électorales déposées. À ce jour, aucune des décisions de la Cour n’a
été rendue publique. Le manque de transparence concernant la question de l’enregistrement des
candidats n’engendre pas un regain de confiance dans le pouvoir judiciaire et a alimenté des
spéculations sur le fondement des décisions des juridictions.
La candidature aux élections législatives a eu lieu séparément et a été menée par l’Instance
Régionale indépendante pour les éléctions (IRIE) du 22 au 29 juillet. Le personnel de l'IRIE était
bien préparé pour ce processus et toutes les parties prenantes ont loué leur professionnalisme et
leur travail acharné. Sur la base des processus au niveau IRIE, l’ISIE a ensuite publié le 6 août, 1
340 listes de candidats acceptés dans 27 circonscriptions électorales tunisiennes et 163 listes pour
les six circonscriptions de l’étranger se trouvant en dehors du territoire tunisien
3.
L’inscription des électeurs. Les articles 34 et 54 de la Constitution de 2014 garantissent le droit de
vote à tous les citoyens tunisiens âgés de 18 ans ou plus. L’inscription des électeurs est une pratique
exemplaire qui permet de garantir le droit des citoyens de participer aux affaires publiques de leur
pays et de déterminer leur éligibilité au vote. Dans le contexte de l'inscription des électeurs, il
existe une obligation internationale de suffrage universel qui requiert la promotion d'une large
participation
4.
L'ISIE a mené une campagne d'inscription électorale forte en vue des élections de 2019, qui ont
abouti à l'inscription de 1 455 898 nouveaux électeurs, dont 63% sont des femmes et des jeunes
électeurs, ce qui porte à 7 074 565 le nombre total d'électeurs inscrits. L'ISIE a utilisé une
combinaison de centres d'inscription d'électeurs mobiles et fixes et a déployé des efforts concertés
pour atteindre les électeurs marginalisés. Le nombre total d'électeurs inscrits est inférieur à celui
annoncé par l'ISIE en juillet 2019, l'avancement de l'élection présidentielle ayant un impact direct
sur le nombre d'électeurs éligibles. L'ISIE a supprimé tous les électeurs âgés de moins de 18 ans
avant le jour du scrutin. Le Centre félicite l'ISIE pour ses efforts visant à atteindre les électeurs, y
compris les secteurs de la population exclus lors des scrutins précédents, et pour accroître
l'inclusivité du registre des électeurs.
2 L'ISIE a annoncé qu'elle traiterait ces plaintes, mais elle n'a encore pris aucune mesure à ce jour. Selon les médias,
plusieurs candidats auraient été interrogés par un juge d'instruction au sujet de prétendus avals frauduleux.
3 Le circuit d’appel du tribunal administratif a entendu 17 recours concernant le rejet de listes par l’IRIE. Quatorze
ont été refusées et trois acceptées.
4 PIDCP, Observation générale 25, par. 4 et 11.

Page 129
En collaboration avec l'Association tunisienne pour l'intégrité et la démocratie des élections et la
Ligue des électrices tunisiennes, le Centre Carter a mené une enquête entre 2016-2018 visant à
comprendre les facteurs responsables du faible taux de participation des jeunes et des femmes dans
les élections antérieures. Depuis les premières élections démocratiques de 2011 en Tunisie, des
jeunes et des femmes originaires notamment de zones rurales et de régions marginalisées du nord-
ouest et du sud-ouest du pays se sont abstenus de voter à des niveaux significatifs. Les élections
municipales de mai 2018 ont confirmé cette tendance, reflétant le détachement croissant des
Tunisiens à l’égard de la politique du pays
- Plus de références et documents sur Legaly Docs5.
L'ISIE a déployé des efforts pour résoudre ces problèmes et accroître l'enregistrement des jeunes
et des femmes. Le Centre Carter appelle toutes les parties prenantes électorales, y compris les
partis politiques, les organisations de la société civile et l'ISIE, à prendre des mesures
supplémentaires pour accroître la participation des groupes marginalisés au processus électoral de
2019.
Recommandations. Le Centre Carter propose les recommandations suivantes dans un esprit de
coopération avec les acteurs du processus électoral en Tunisie et dans l'espoir qu'ils fourniront des
points de discussion utiles avant les élections et pour les actions futures:
L'ISIE devrait accroître la transparence de ses travaux en fournissant régulièrement des
mises à jour publiques sur les élections et en affichant des informations détaillées sur son
site Web pour informer le public et les autres parties prenantes du processus électoral de
ses préparatifs et des difficultés éventuelles pour le processus.
L’ISIE, la société civile et les partis politiques devraient mener des campagnes d’éducation
des électeurs dynamiques afin de veiller à ce que les électeurs disposent des informations
nécessaires pour faire un choix éclairé le jour du scrutin. L'ISIE devrait mener une
campagne ciblée pour encourager les électeurs nouvellement inscrits à voter, en particulier
les femmes et les jeunes, et devrait faciliter la participation active des OSC pertinentes pour
contribuer aux efforts d'éducation des électeurs.
Les partis politiques devraient prendre des mesures pour adresser directement à l'électorat,
en particulier aux groupes marginalisés, les problèmes les plus importants de la vie
quotidienne des Tunisiens.

Le tribunal administratif et les autres organes judiciaires impliqués dans le processus
électoral devraient fournir des informations sur tous les recours électoraux afin que le
public puisse évaluer leurs délibérations judiciaires et éviter toute influence de la politique
sur leurs travaux.
5 Les résultats de la recherche suggèrent qu'il existe des opportunités pour les acteurs électoraux d'accroître la
participation des femmes et des jeunes. L'étude a mis en évidence plusieurs mesures pouvant être prises pour
améliorer la participation électorale, notamment: la nécessité de renforcer les campagnes d'éducation civique et
électorale destinées aux jeunes et aux femmes; clarifier le lien entre l'inscription et le vote; renforcer les
mécanismes de contrôle et de sanction des infractions commises par les partis et les candidats; promouvoir une
nouvelle génération de leaders à l'écoute des attentes des jeunes; et des programmes électoraux réalisables,
pratiques et capables de répondre aux aspirations des citoyens.

Page 130
Contexte: Le Centre Carter en Tunisie. Le Centre Carter a un bureau en Tunisie depuis 2011. Le
Centre a observé les élections de l'Assemblée nationale constituante de 2011, le processus
d'élaboration de la constitution de 2012 à 2014 et les élections présidentielles et parlementaires de
2014.
Pour les élections de 2019, le Centre Carter a déployé une équipe centrale en mai 2019 pour
s'acquitter de sa mission d'observation du processus électoral. À la mi-juillet, le Centre en
collaboration avec l’institut électoral pour une démocratie durable en Afrique (EISA) a déployé
16 observateurs à long terme pour surveiller les régions tunisiennes. L'équipe principale et les
observateurs à long terme représentent 18 pays différents. Les observateurs à long terme seront
renforcés par une délégation plus large d’observateurs à court terme, qui devrait arriver le 10
septembre.
Le Centre souhaite remercier les responsables tunisiens, les membres des partis politiques, les
membres de la société civile, les individus et les représentants de la communauté internationale
qui ont généreusement offert leur temps et leur énergie pour faciliter les efforts du Centre visant à
observer le processus des élections législatives et présidentielle. Le Centre Carter évalue le
processus électoral tunisien par rapport à la Constitution tunisienne, au cadre juridique électoral
national et aux obligations internationales découlant des traités internationaux et des standards
élections.
internationaux
applicables
aux
La mission d'observation du Centre est menée conformément à la Déclaration de principes pour
l'observation internationale des élections. Le Centre Carter, en tant qu'organisation d'observation
indépendante, informera immédiatement les autorités et le peuple tunisiens de ses conclusions par
la publication d'un rapport préliminaire de constatations et de conclusions peu après le jour du
scrutin, suivi d'un rapport complet final dans les mois suivant les scrutins.









Page 131
Point d’information
Le Carter Center appelle à plus de transparence dans le processus électoral et fait l'éloge de
la transition constitutionnelle souple qui a eu après le décès du Président
TUNIS (le 9 septembre 2019) – Le Centre Carter a publié aujourd'hui une déclaration proposant
une évaluation de la période pré-électorale qui a été principalement marquée par le décès du
président Beji Caïd Essebsi et par l'arrestation de Nabil Karoui, homme d'affaires et candidat de
premier plan à la présidentielle. La déclaration s’intéresse aux amendements apportés à la loi
électorale, à l'inscription des électeurs et des candidats aux élections. Elle contient aussi des
recommandations préliminaires aux parties prenantes du processus électoral.
La mission électorale du Centre Carter a débuté en mai et comprend une équipe principale et 16
observateurs à long terme qui seront rejoint, le 10 septembre, par Salam Fayyad, ancien Premier
ministre de l'Autorité palestinienne et Tana de Zulueta, ancienne député du Parlement italien et
journaliste. Ces derniers dirigeront une délégation de plus de 50 observateurs à court terme. Le
Centre et l’institut électoral pour une démocratie durable en Afrique (EISA) collaborent au
déploiement d'observateurs pour les élections tunisiennes de 2019.
Le Centre, en tenant particulièrement compte de la nécessité d'avancer la date des élections
présidentielles en raison du décès prématuré du président Caïd Essebsi, félicite les autorités
électorales tunisiennes, les organisations de la société civile et les partis politiques tunisiens pour
leurs efforts rapides et efficaces en vue de la préparation des prochaines élections présidentielle et
législatives. Le Centre appelle les intuitions tunisiennes qui prennent part au processus électoral à
accroitre, d’un côté, la transparence de leur processus décisionnel afin que le public soit pleinement
informé des raisons et motifs amenant à certaines décisions judiciaires et administratives et à
renforcer, de l’autre côté, la confiance du public dans le fait que les élections se déroulent dans le
respect des standards internationaux et du droit national. À l'approche des élections, il est encore
plus important que l’Instance supérieure indépendante des élections (ISIE) accroisse ses efforts de
communication.
L’absence d’informations de la part de l’ISIE en ce qui concerne les motifs ayant amené au rejet
de certaines candidatures individuelles à l’élections présidentielle qui s’est accompagnée d’un
manquement de la part des Cours d’appel de publier à la fois les recours de ces candidats et les
motifs de leurs décisions, ont conduit à des spéculations soutenant que le rejet de ces candidatures
a été motivé par des considérations autres que le strict respect de la loi.
La transition après la mort du président s’est déroulée avec souplesse et sans heurt malgré
l’absence d’une Cour constitutionnelle. La mort du président a contraint l’ISIE d’avancer la date








Page 132
de l’élection présidentielle. Avec la coopération du Parlement, des amendements à la loi électorale
ont été adoptés pour tenir compte de la nouvelle date.
Dans une démarche positive, la vigoureuse campagne d’inscription des électeurs de l’ISIE pour
ces élections a permis d’enregistrer 1 455 898 nouveaux électeurs, dont 63% de femmes et de
jeunes.
Le Centre félicite l'ISIE et la Haute autorité de la communication audiovisuelle pour leurs efforts
visant à encourager les médias à être particulièrement vigilants en ce qui concerne les activités de
candidats qui ont gardé leur statut de fonctionnaire ou de ministre. En outre, l'ISIE a renforcé sa
surveillance de la campagne et a averti les responsables gouvernementaux de ne pas utiliser les
ressources de l'État pour toute activité liée à leur campagne électorale.
La détention du candidat à la présidentielle Nabil Karoui une semaine avant le début de la
campagne, basée sur une enquête en cours depuis 2017, a renforcé les spéculations selon lesquelles
le processus électoral est influencé par des considérations autres que le strict respect de la loi.
Confirme la véracité de cette constatation, le projet de loi adopté par le parlement avant la mort de
Béji Caïd Essebssi, visant à interdire au propriétaires des média, dont Karoui, de candidater aux
élections de 2019. Bien que Karoui reste sur le bulletin de vote, sa capacité à faire campagne est
compromise puisqu’il ne peut pas agir personnellement pendant sa détention. On ignore quel effet
son passage au deuxième tour ou sa victoire à l’élection présidentielle aurait sur sa détention.
La mission d'observation du Centre est menée conformément à la Déclaration de principes pour
l'observation internationale d'élections. Le Centre Carter, en tant qu'organisation d'observation
indépendante, informera immédiatement les autorités et le peuple tunisiens de ses conclusions par
la publication d'un rapport préliminaire de constatations et des conclusions peu après le jour du
scrutin, suivi d'un rapport complet final dans les mois suivant les élections.
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Le Centre Carter est une organisation non gouvernementale à but non lucrative qui a contribué à
améliorer la vie des habitants de plus de 80 pays en résolvant les conflits ; en faisant progresser
la démocratie, les droits de la personne et les opportunités économiques ; en prévenant les
maladies ; et en améliorant les soins de santé mentale. Le Carter Center a été fondé en 1982 par
l’ancien président américain Jimmy Carter et l’ancienne Première Dame Rosalynn Carter, en
partenariat avec l’Université Emory, afin de promouvoir la paix et la santé dans le monde entier.
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Page 133
Déclaration préliminaire du Centre Carter
Election présidentielle en Tunisie
17 septembre 2019
Cette déclaration est préliminaire et ne couvre que les aspects du processus électoral
jusqu’au 16 septembre. Un délai existe également pour le dépôt d’éventuels recours. Le
Centre Carter publiera des déclarations supplémentaires une fois le processus électoral soit
terminé. En outre, un rapport final complet comportant des recommandations sera publié
quatre mois après la fin du processus électoral
.
Énoncé des résultats préliminaires et des conclusions
Contexte politique
À l'approche des élections législatives et présidentielle d'octobre/novembre, des amendements
portés par le parlement visant à limiter les droits fondamentaux des citoyens de se porter
candidats ont renforcé les tensions politiques. Le décès du président Béji Caïd Essebsi en
exercice en juillet 2019 a radicalement modifié la course à la présidence. Tandis que le
calendrier électoral était fortement raccourci, des amendements à la loi électorale qui avaient
été proposés et auraient rétroactivement empêché certains candidats de concourir n’ont pas été
promulgués, le président n’ayant pu les signer avant son décès.
Avant le décès du président, les partis pensaient utiliser les élections législatives comme
tremplins en vue de l’élection présidentielle. Le changement de date les a pris au dépourvu, ce
qui a modifié leurs stratégies politiques. Plusieurs partis et candidats indépendants qui
n'envisageaient pas au départ de briguer la présidence, ont décidé de se présenter, prolongeant
ainsi la période de campagne électorale avec pour objectif de promouvoir leurs partis ou leurs
listes aux élections législatives.
Après la rapide prestation de serment du président du parlement, Mohamed Ennaceur, en tant
que président par intérim, l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE) a fixé
la date de l’élection présidentielle au 15 septembre. L’ISIE a accepté 26 des 97 candidatures
visant à briguer la présidence.
Les autorités tunisiennes ont été déçues par le taux de participation aux élections municipales
de 2018, au cours desquelles les candidats indépendants ont obtenu de bien meilleurs résultats
que les partis établis. Ces résultats laissaient présage de l’intérêt limité des électeurs tunisiens
pour l’élection en cours dans le pays. Le faible taux de participation à l’élection présidentielle
a constitué un nouveau signe de la désillusion ressentie par la plupart des Tunisiens face à la


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situation politique actuelle du pays et la faible confiance que la population place en
l’institution qu’est le gouvernement pour améliorer leur vie quotidienne.
1
Les élections municipales et présidentielles se sont tenues sur fond de turbulences politiques
au cours des cinq dernières années, caractérisées par des querelles internes au sein des
principaux partis politiques. Nidaa Tounes, parti victorieux lors des élections législatives de
2014, et le parti du président, s’est divisé. Plus de la moitié des députés au parlement ont
choisi de quitter le parti, le privant de pluralité parlementaire. Certains de ses membres
fondateurs ont quitté les rangs du parti pour former leurs propres partis alors que d’autres
loyalistes se sont dispersés et ont fait alliance avec d’autres partis. La coalition du Front
populaire, un acteur majeur du parlement, s’est également scindée en deux, menant à la
création d’un parti politique et, séparément, d’une coalition rétrécie. Alors que débutait la
période pré-électorale, Ennhada a souffert également de disputes intestines portant sur le
candidat à la présidentielle et sur les interventions excessives du chef du parti dans le
placement de candidats perçus comme lui étant étroitement liés sur les listes des élections
législatives.
Le décès du président a écarté des amendements à la loi électorale controversés, qui auraient
exclu certains candidats populaires émergents. L’absence d’une cour constitutionnelle
fonctionnelle a créé une situation de crise potentielle dans la gestion de la transition
présidentielle. Bien que la crise ait été évitée, le décès du président au pouvoir a mis en
lumière la nécessité et l’urgence d’établir la cour, afin qu’elle puisse statuer en cas d’une
vacance du pouvoir de la sorte.
Fin août, les autorités ont arrêté Nabil Karoui, accusé de blanchiment d’argent et d’évasion
fiscale. M. Karoui était l’une des cibles présumées des amendements non promulgués à la loi
électorale qui auraient effectivement empêché les propriétaires de médias et les dirigeants
d’organisations caritatives de se présenter aux élections. L’appel de M. Karoui en faveur de sa
libération a été rejeté le vendredi précédent les élections et on lui a refusé le droit de se rendre
aux urnes. Il a fait savoir qu’il débutait une grève de la faim après l’annonce de la décision de
la cour. Sa détention en cours nourrit le sentiment d’une arrestation politique et jette une
ombre sur le processus. Bien que son arrestation n'ait aucune incidence sur sa candidature
officielle, sa détention a abouti à ce que, contrairement à tous les autres candidats, M. Karoui
ait été dans l’incapacité de mener campagne activement. De plus, on ignore dans quelle
mesure sa détention pourra affecter sa participation au reste du processus électoral.
Cadre juridique
Selon les bonnes pratiques internationales, le cadre juridique d’une élection doit être
transparent et facilement accessible au public. Il doit également prendre en compte toutes les
composantes du système électoral nécessaires afin de garantir des élections démocratiques
2.
1 La participation nationale lors du premier tour de l’élection présidentielle de 2019 s’est établie à 45,02%
(3 010 980 votants). La participation s’était établie contre 62,9% en 2014 (3 339 666 votants).
2 OSCE/ODIHR, Guidelines for Reviewing a Legal Framework for Elections, page 4.


Page 135
Le cadre juridique tunisien encadrant l’élection présidentielle est généralement conforme aux
normes internationales
3.
Le processus électoral est régi par la Constitution de janvier 2014, la loi électorale de 2014, la
loi sur l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE) et la loi relative à la
liberté de la communication audiovisuelle, qui a créé la Haute Autorité Indépendante de la
Communication Audiovisuelle
4. Certains aspects du cadre juridique pourraient être améliorés,
en fixant notamment des délais définitifs et appropriés pour les différentes étapes du
processus électoral. Les dispositions relatives à la campagne, dont celles portant sur
l'utilisation de publicités et d'affiches, sont restrictives et difficiles à respecter pleinement pour
les candidats, ce qui encourage à y contrevenir. Dans certains cas, les sanctions ne sont pas
proportionnelles à la gravité de la violation
5.
Système électoral
Tout système électoral a pour objectif de traduire la volonté du peuple en un gouvernement
représentatif. Les normes internationales ne prescrivent pas de système électoral spécifique
6.
Le système électoral tunisien respecte les principes d’élections périodiques et honnêtes et
garantit le suffrage universel, le secret du vote et la protection contre l’intimidation, ainsi que
l’égalité des votes et la juste représentation de tous les citoyens.
Selon la Constitution, le président est élu pour un mandat de cinq ans, conformément aux
engagements internationaux et aux bonnes pratiques
7. Si aucun candidat ne recueille la
majorité absolue des suffrages valides exprimés au premier tour, un second tour aura lieu dans
les deux semaines suivant l'annonce des résultats définitifs du premier tour.
La Constitution garantit le droit de vote à tous les citoyens âgés de 18 ans ou plus, jouissant
pleinement de leurs droits civils et politiques et non soumis à des cas de privation de droit de
vote prévus par la loi électorale. La loi a été amendée en 2017 pour permettre aux membres
du personnel militaire et de sécurité de voter aux élections municipales, même s’il leur est
3 Il s’agit notamment du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (PIDCP), du Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciale (CERD), de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à
l'égard des femmes (CEDAW), la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants (CAT), la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Charte africaine des
droits de l'homme et des peuples (CADHP).
4 Loi organique n°2014-16 du 26 mai 2014 relative aux élections et aux référendums (ci-après : la loi électorale),
et loi organique n°2012-23 du 20 décembre 2012 relative à l’Instance Supérieure Indépendante pour les
Élections telle que modifiée et complétée par la loi organique n°2013-44 du 1
er novembre 2013 et la loi
organique n°2013-53 du 28 décembre 2013 (ci-après: la loi ISIE).
5 Faire campagne pendant la période de silence électoral est sanctionné par une amende allant de 3 000 à 20 000
TND (art. 69 et 155 de la loi électorale). L’annonce d’un numéro de téléphone d’appel gratuit est sanctionné par
une amende de 3 000 TND (art. 58 et 158 de la loi électorale), l'utilisation du drapeau tunisien ou de l'emblème
de la république sur des affiches électorales entraîne des amendes allant de 500 à 1 000 TND (art. 61 et 150 de la
loi électorale).
6 Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques des Nations Unies, articles 25 (b) ; Conseil des droits
de l'homme des Nations Unies, Observation générale n° 25, paragraphes 21
7 PIDCP, articles 25 (b) ; Observation générale n° 25, paragraphes 9 et 19 ; Déclaration Universelle des droits de
l'homme, articles 21 (3) ; Code de bonne conduite en matière électorale du Conseil de l'Europe, section I.1.6.

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toujours interdit de voter aux élections législatives et présidentielle, une restriction non
conforme aux normes internationales
8. Les citoyens se trouvant dans les établissements de
soins et de santé, les pénitenciers et les centres de détention n’ont pu exercer leur droit de
vote, compte tenu de l’absence mécanisme légal le permettant, ce qui entre en contradiction
avec à la Constitution tunisienne et les engagements internationaux de la Tunisie
9.
Enregistrement des candidats
Le droit des individus de participer aux affaires publiques est une obligation en droit
international
10. Bien que le droit d’être élu soit un principe largement reconnu par les traités
régionaux et internationaux, ce n’est pour autant pas un droit absolu et il peut être limité sur la
base de critères objectifs et raisonnables établis par la loi
11. Le cadre juridique tunisien permet
un processus d’enregistrement des candidats inclusif et est généralement conforme aux
normes internationales et régionales
12. Les candidats à la présidence doivent être tunisiens de
naissance, avoir 35 ans et être musulmans. Les exigences constitutionnelles relatives à la foi
du candidat doivent être revues pour se conformer aux normes internationales
13.
Tous les candidats sont tenus de verser un acompte de 10 000 dinars soit 3 508 USD,
remboursable si le candidat obtient au moins 3% des suffrages valides exprimés. En outre,
pour figurer sur le bulletin de vote, les candidats à la présidence doivent être parrainés soit par
dix députés au Parlement (l’Assemblée des Représentants du Peuple), soit par 40 présidents
de conseils municipaux élus, soit par un minimum de 10 000 électeurs inscrits dans au moins
dix circonscriptions comptant au moins 500 électeurs par circonscription
14.
Le dépôt des candidatures a eu lieu du 2 au 9 août, sept jours seulement après le décès du
président. Malgré un calendrier serré, le personnel de l'ISIE a mis en œuvre les procédures
d’enregistrement et a informé les candidats potentiels d’éventuels lacune dans leurs dossiers
de candidature, et ce de manière professionnelle et dans le respect des délais. 97 postulants
ont candidaté, dont 11 femmes. 26 candidats ont été approuvés et 71 ont été rejetés. Les
candidats n’ayant pas initialement présenté la documentation appropriée ont eu l’opportunité
de remédier aux irrégularités constatées au cours de la période d’enregistrement. Nombre de
candidatures n’étaient pas sérieuses, les candidats n’ayant pas payé la caution financière
requise ni soumis les parrainages ou autres documents nécessaires. L'ISIE a publié la liste
8 Voir article 25 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques : « Tout citoyen a le droit et la
possibilité [...] de voter et d'être élu au cours d’élections périodiques, honnêtes [...] ». Voir également
l'Observation Générale 25, paragraphe 14: « Les États parties devraient préciser les motifs de privation du droit
de vote et les expliquer. Ces motifs devraient être objectifs et raisonnables ».
9 Le droit au suffrage universel sur la base de l'égalité de traitement devant la loi : PIDCP, article 25 (b); Charte
africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, article 3 (3).
10 PIDCP, article 25 (a) ; PIDCP, article 21 ; Observation générale 25 de l'UNHRC, paragraphe 26.
11 PIDCP, article 25 ; UA, CADHP, article 13 ; Charte arabe des droits de l'homme, article 24
12 PIDCP, article 25 : « Tout citoyen a le droit et la possibilité [...] de voter et d'être élu au cours élections
périodiques, honnêtes [...] ».Voir aussi l’article 13 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
13 PIDCP, article 2 et 25 ; Observation générale 25 de l'UNHRC, paragraphe 15
14 L'obligation de recueillir un certain nombre de signatures pour se présenter est conforme au principe du
suffrage universel, conformément au Code de bonne conduite en matière électorale du Conseil de l'Europe, selon
lequel la signature requise ne doit pas dépasser 1% des électeurs de la circonscription concernée.

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finale des 26 candidats le 31 août 2019, deux jours seulement avant le début de la campagne
électorale. La liste finale comprenait deux femmes.
L'ISIE n'a pas encore présenté publiquement d'informations ou de justification détaillée du
rejet des trois quarts des candidats potentiels, même parmi ceux ayant soumis le nombre de
parrainages requis. L’ISIE a informé le Centre Carter que cette information ne pouvait être
obtenue que par les candidats respectifs et de manière individuelle. L’incapacité de l’ISIE
d’informer pleinement le public des motifs de rejet des candidats potentiels a conduit à des
spéculations selon lesquelles les refus se basaient sur des considérations autres que celles
d’une application stricte de la loi.
Après exhortations des organisations de la société civile, l'ISIE a finalement mis en place un
service SMS permettant aux électeurs de vérifier si leurs noms figuraient sur l'une des listes
de parrainage. Ce service a abouti à plus de 245 plaintes d'électeurs ayant déclaré que leurs
signatures avaient été utilisées sans leur aval
15. Alors que le nombre de plaintes déposées était
relativement faible comparé au nombre total de parrainages d'électeurs, le manque
d'informations publiques pourrait miner la confiance du public dans la gestion de ces
élections.

L’Administration électorale
Une autorité électorale indépendante et impartiale, fonctionnant de manière transparente et
professionnelle, est le seul moyen efficace garantissant aux citoyens la possibilité de
participer à de véritables élections démocratiques
16. L’organisme de gestion des élections
devrait disposer de suffisamment de temps pour mettre en œuvre toutes les étapes du
processus électoral. La pratique des États suggère que, lors de la planification d’élections, une
durée adéquate devrait être impartie pour administrer avec succès le processus électoral
17.
Selon la constitution tunisienne, l'ISIE est l'organisme qui assure la régularité, l'intégrité et la
transparence du processus électoral et en proclame les résultats
18.
Compte tenu du raccourcissement de la période impartie à la tenue d’élections, à la suite du
décès du président, l’ISIE est parvenue à gérer l’ensemble du processus électoral
efficacement. La gestion des aspects opérationnels de l’élection a tout particulièrement été
traitée de manière professionnelle.
Le conseil de l'ISIE est composé de neuf membres élus par le Parlement pour un mandat
unique de six ans et d'un organe exécutif aux niveaux central et régional. Le mandat de
chaque membre du conseil est différent, en fonction de la date à laquelle il/elle a été élu(e)
19.
15 L'ISIE a annoncé qu'elle traiterait ces plaintes mais elle n'a encore pris aucune mesure à ce jour. Selon les
médias, plusieurs candidats auraient été interrogés par un juge d'instruction au sujet de prétendus parrainages
frauduleux.
16 CDH, Observation générale 25, paragraphe 20
17 NU, Droits de l'homme et élections, paragraphe 75
18 Constitution tunisienne de 2014, art 126
19 Nabil Baffoun (janvier 2014-janvier 2020), Farouk Bouasker (janvier 2017-janvier 2023), Mohamed
TliliMansri (janvier 2017-janvier 2023), Hasna Ben Slimane (janvier 2019-janvier 2025), Anis Jarboui (janvier


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La loi autorise l'ISIE à créer des succursales régionales, des Instances Régionales
Indépendantes pour les Élections (IRIE), afin d'appuyer l'ISIE dans l'accomplissement de sa
mission. Les IRIE coordonnaient également leurs activités avec les administrations régionales
de l'ISIE.
L'organigramme de l'ISIE n'a pas été mis à jour depuis 2014 et ne reflète pas la structure
actuelle. Deux postes de directions de département sont vacants : juridique et formation.
L’ISIE n'a pas eu de chef du service juridique durant la période électorale
20. L’ISIE n’a pas
géré sa communication publique de façon cohérente, les commissaires faisant parfois des
déclarations contradictoires. L'ISIE a relevé la porte-parole de ses fonctions le 1
er septembre,
affirmant que le règlement de l'ISIE ne prévoyait pas de tel poste et que chaque commissaire
avait le droit de faire des déclarations publiques
21.
L’ISIE a créé 33 IRIE (27 au niveau national et six à l’étranger), une dans chaque
circonscription électorale composée d’un maximum de quatre personnes ayant des formations
et expériences différentes. Le processus de nomination des membres de l’IRIE a été conduit
de manière transparente et efficace par l’ISIE. Il n'y avait pas assez de candidats pour
pourvoir les postes vacants, en particulier pour les juges. En conséquence, plusieurs IRIE ne
comptent que deux membres et 16 IRIE en comptent trois. Bien que la majorité des IRIE
n'aient pas eu d’effectif complet et n'aient été constituées que deux jours avant le début du
processus de nomination des candidats aux élections législatives, elles se sont acquittées de
leurs missions de manière satisfaisante.
L'ISIE a recruté et formé plus de 55 000 agents électoraux. Les observateurs de longue durée
du Centre Carter ont évalué que les formations étaient bien organisées et de bonne qualité.
L’un des principaux défis identifiés par l’ISIE est la surveillance de la campagne électorale
pour détecter les violations de ses règles. L’Instance a publié un règlement spécifique à la
campagne électorale qui détaille ce que les partis et les candidats peuvent ou ne peuvent pas
faire, et qui comprend l’interdiction d'utilisation des ressources de l'État
22. Alors qu’en 2014,
l'ISIE n'avait pas surveillé de manière rigoureuse les violations de la campagne électorale,
l’Instance a recruté et déployé 1 500 agents pour contrôler le respect des règles de campagne
et de financement de la campagne. Les observateurs de longue durée du Centre Carter ont
noté que ces observateurs étaient très actifs sur le terrain.

Inscription sur les listes électorales
2017-janvier 2023), Belgacem Ayachi (janvier 2019-janvier 2025), Sofien Laâbidi (Janvier 2019-janvier 2025),
Adel Brinsi (janvier 2017-janvier2 023) et Nabil Azizi (janvier 2017-janvier 2023).
L'ISIE a publié une annonce pour recruter le chef du département juridique avec une date limite de candidature
au 20 septembre.
20 Les administrations régionales sont sous la supervision de l'organe exécutif, tandis que les IRIE sont
supervisées par le Conseil de l’ISIE.
21 L'ISIE n'a pas déclaré publiquement si elle avait ou non voté sur cette décision.
22 Le 31 août, deux jours avant le début de la campagne électorale, l'ISIE a organisé un événement avec les
représentants des candidats et la société civile pour expliquer les règles de la campagne. Lors de la réunion, les
représentants des candidats ont posé plusieurs questions sur les règles de financement de campagne.


Page 139
L’inscription des électeurs et l’établissement d’une liste électorale complète, à jour et exacte
sont reconnus comme des moyens importants de garantir le droit de vote de chaque citoyen.
Selon le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies, « quand l'inscription des électeurs
est nécessaire, elle devrait être facilitée et il ne devrait pas y avoir d'obstacle déraisonnable à
l'inscription »
23. Les procédures d’inscription des électeurs en Tunisie sont largement
conformes aux normes internationales et régionales
24.
Les articles 34 et 54 de la Constitution de 2014 garantissent le droit de vote à tous les citoyens
tunisiens âgés de 18 ans ou plus. L’inscription des électeurs est une bonne pratique établie qui
permet de garantir le droit des citoyens de participer aux affaires publiques de leur pays et de
déterminer leur éligibilité au droit de vote. Il existe une obligation internationale de suffrage
universel qui exige qu’une participation large au scrutin soit encouragée
25.
L’ISIE a mené une vigoureuse campagne d’inscription des électeurs, couronnée de succès
avant les élections de 2019, qui a abouti à l’inscription de 1 455 898 nouveaux électeurs sur
3 500 000 électeurs potentiels, portant ainsi le nombre total d’électeurs inscrits à 7 074 565.
L'ISIE a utilisé une combinaison de centres d'inscription mobiles et fixes et a déployé des
efforts concertés pour contacter les électeurs marginalisés. L'ISIE a entamé sa campagne
d'inscription pour ces élections le 10 avril et l'a clôturée le 4 juillet 2019. L'Instance a accordé
suffisamment de temps pour l'inscription des électeurs, notamment en affichant la liste
préliminaire à des fins d'inspection publique
26. Le public a pu demander des corrections ou
faire état de contestations. L’ISIE a informé le Centre Carter qu’un nombre négligeable de
demandes de correction avaient été faites et qu’aucun recours n’avait été déposé devant les
tribunaux de première instance concernant l’inscription des électeurs
27.
Le nombre total d'électeurs inscrits était inférieur à celui annoncé par l'ISIE en juillet 2019,
puisque l’anticipation de l’élection présidentielle a eu une incidence directe sur le nombre
d'électeurs éligibles. L'ISIE a supprimé tous les électeurs qui n'auraient pas 18 ans avant le
jour du scrutin. Le Centre salue les efforts déployés par l'ISIE visant à établir un contact avec
les électeurs, notamment auprès des composantes de la population exclues lors des précédents
scrutins, ainsi que ses efforts pour rendre les listes électorales plus inclusives.
Aucune partie intéressée n'a exprimé de préoccupations concernant la liste électorale et son
exactitude auprès des observateurs du Centre Carter.

L’Éducation des électeurs
Le respect de l'obligation internationale du suffrage universel repose en partie sur une
éducation des électeurs efficace
28. L’ISIE a lancé une campagne d’éducation électorale
23 CDH, Observation générale 25, « le droit de tout citoyen de prendre part à la direction des affaires publiques,
de voter et d'être élu, et le droit d'accéder aux fonctions publiques », paragraphe 11.
24 CDH, Observation générale 25, paragraphe 11.
25 CDH, Observation générale 25, paragraphes 4 et 11.
26 La liste a été publiée du 12 au 14 juillet dans les bureaux des IRIE.
27 Le Directeur des Opérations de l'ISIE a déclaré qu'il n'y avait pas plus de dix demandes de correction.
28 PIDCP, article 25.

Page 140
spécialement axée sur l’élection présidentielle deux semaines avant le scrutin. Bien que les
IRIE aient mené une campagne importante d’éducation des électeurs pendant la période
d’enregistrement, les organisations de la société civile ont déclaré ne pas disposer de fonds
suffisants pour mener une campagne complète de sensibilisation des électeurs avant le jour du
scrutin. Les organisations de la société civile ont généralement reçu moins de fonds pour les
activités liées aux élections, telles que l’éducation des électeurs et l’observation des élections,
mais l’anticipation des élections présidentielles ne leur a pas permis de mobiliser rapidement
des fonds supplémentaires.
La campagne restreinte de l'ISIE visait à informer les électeurs inscrits des procédures de vote
et à expliquer l'importance de leur participation. Cette campagne a reposé sur le recours aux
médias électroniques et audiovisuels, ainsi qu’à la presse écrite.

Campagne électorale
Le pluralisme politique ainsi qu’un environnement de campagne ouvert offrant aux électeurs
un véritable choix sont des aspects cruciaux des élections démocratiques. Le traitement
équitable des candidats et des partis pendant une élection, ainsi que le maintien d'un
environnement de campagne ouvert et transparent, sont importants pour assurer l'intégrité du
processus électoral démocratique. Un choix authentique entre candidats, un environnement
électoral libre, une égalité des chances entre les candidats et un environnement de campagne
ouvert et transparent sont tous des aspects essentiels de la démocratie. L'égalité de traitement
des candidats et des partis est essentielle pour assurer l'intégrité du processus électoral
démocratique
29.
Le décès du président a impliqué le raccourcissement de la campagne électorale à deux
semaines. Certains candidats étaient des personnalités bien connues tandis que d'autres étaient
relativement nouveaux sur la scène politique. La campagne a permis à tous les candidats de se
faire connaître aux Tunisiens et de présenter leurs programmes électoraux. Certains candidats
à la présidentielle ont profité de la campagne électorale pour créer une dynamique en vue des
élections législatives. La campagne pour les élections législatives, qui durera 22 jours, a
débuté le 14 septembre, jour du silence pour la campagne présidentielle. De nombreux
candidats, qu'ils soient indépendants ou appartenant à des partis politiques, ont violé la
restriction imposée à la campagne électorale précoce
30.
La campagne officielle pour les élections présidentielles a débuté le 2 septembre et les droits
de liberté de parole et de réunion ont été largement respectés. Comme lors des élections
précédentes, les candidats n’ont pas toujours respecté la règle de notification de 48 heures à
l’avance des événements électoraux auprès des autorités électorales et plusieurs événements
annoncés par les équipes de campagne aux IRIE n'ont pas été organisés. En conséquence, il a
été difficile pour les IRIE et les observateurs de surveiller tous les événements de la
campagne. De plus, la plupart des candidats ne fournissaient pas suffisamment de détails sur
29 PIDCP, article 25.
30 L'article 154 punit les premières campagnes d'une amende de 5 000 à 10 000 DT.

Page 141
l'emplacement exact de leurs activités, rendant le monitoring particulièrement difficile dans
les circonscriptions les plus vastes. Les observateurs de longue durée ont indiqué que les
observateurs de la campagne d'ISIE étaient visibles et actifs dans toutes les régions. Plusieurs
équipes de campagne se sont plaintes du questionnement actif de ces observateurs, affirmant
qu'il était intrusif.
La campagne a démarré lentement dans tout le pays, avec principalement des panneaux
d'affichage et des publicités sur les réseaux sociaux le premier jour. Au cours de la deuxième
semaine, la campagne s'est intensifiée. La tenue de rassemblements, la construction de tentes
de campagne et la distribution de tracts ont été les activités politiques les plus fréquentes. Les
partis et les candidats ont également utilisé d'autres modalités de campagne, recourant
notamment aux affiches, au porte-à-porte, aux tentes d'information, aux rassemblements dans
diverses régions du pays ainsi qu’aux réseaux sociaux (principalement Facebook). Les
candidats se sont avant tout prononcés sur des questions de sécurité nationale et de politique
étrangère, qui relèvent des prérogatives de la présidence. Cependant, de nombreux candidats
ont également fait campagne sur des questions qui ne relèvent pas des prérogatives de la
présidence.
Dans un nouveau développement, des débats télévisés en direct entre candidats ont été
introduits dans la campagne. Trois séries de débats ont été organisées durant trois jours
consécutifs, dont deux avec neuf candidats et un débat avec huit. Une loterie a été organisée
pour déterminer le jour où les candidats participeraient aux débats. Toutefois, la priorité
accordée à trois candidats, représentant les trois plus grands partis au parlement, de choisir le
débat auquel ils souhaitaient participer a fait l'objet d'une controverse. Deux candidats n'ont
pas participé, l'un d'entre eux étant en détention (Nabil Karoui) et un autre ayant choisi de ne
pas revenir en Tunisie (Slim Riahi).
La normalisation des relations entre Ennahdha et les partis progressistes a entraîné un climat
de campagne moins conflictuel et tendu qu'en 2011 et 2014. Les observateurs de longue durée
du Centre Carter ont confirmé que l’atmosphère était positive entre les principaux partis
politiques dans différentes régions du pays, même lors de la tenue d’événements le même jour
dans la même zone. Aucun incident de sécurité majeur n'a été signalé.
L’ISIE a identifié environs 440 violations et reçu près de 22 plaintes au sujet des infractions
de campagne. Les violations concernaient principalement des évènements de campagne
anticipés, des activités de campagne non déclarées, l'affichage en dehors des zones non
désignées et le recours à des enfants dans les campagnes. Les observateurs du Centre Carter
ont vu des enfants distribuer des tracts pour le candidat Abdel Karim Zbidi à Ben Arous.
Selon l’ISIE, à ce jour, aucune des violations n’est suffisamment grave pour avoir une
influence sur les résultats des élections.
La Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA) a suivi la
couverture médiatique nationale de la campagne afin de garantir le respect des principes
d'équité du temps de parole et les principes de neutralité. La HAICA a interdit à trois chaînes
Page 142
de télévision (Nessma et Zeitouna TV, Radio Coran) de couvrir la campagne présidentielle,
pointant leur manque de neutralité et leur soutien à des partis et candidats spécifiques
31. La
HAICA a surveillé la campagne dès le début et a émis des avertissements et des sanctions à
l’encontre de plusieurs stations. Les sanctions sont des amendes allant de 10 000 à 50 000
TND pour avoir fourni une publicité politique à certains candidats. Les chaînes de télévision
Nessma TV, la chaîne publique Al Wataniya TV, Alhiwar Tounsi et Telvza TV ont toutes fait
l’objet de sanctions. La HAICA a également sanctionné les chaînes de télévision pour avoir
commenté ou publié les résultats des sondages relatifs aux élections.
Certains observateurs de longue durée du Centre Carter ont signalé l’utilisation de ressources
de l'État par des candidats, également représentants du gouvernement, notamment le recours à
des voitures gouvernementales et des bus pour permettre aux participants d'assister à des
rassemblements
32.
Financement de la campagne
Des élections démocratiques ne peuvent avoir lieu sans règles équitables sur le financement
des campagnes électorales. La législation électorale devrait spécifiquement prévoir la
transparence des dons aux fins d’activités de campagne des candidats, une présentation
normalisée des comptes de campagne, des limites raisonnables pour les dépenses de
campagne, des mécanismes de compte-rendu réguliers ainsi que des sanctions efficaces et
dissuasives
33. La loi électorale de 2014 a élargi les pouvoirs de la cour des comptes en matière
de contrôle des ressources et des dépenses des partis politiques et a ajouté des sanctions plus
sévères et plus proportionnelles aux violations que celles de 2011. Plusieurs insuffisances
portent préjudice à l'efficacité des dispositions légales relatives au financement des
campagnes et devraient être réexaminées, comme le fait de ne pas exiger de rapport de
financement de campagne intérimaire
34.
La loi électorale détaille des limites sur les dépenses et les dons et autorise les financements
privés et publics. Selon le décret sur le financement de la campagne pour les élections
présidentielles, le financement public est réparti équitablement en fonction du nombre
d'électeurs au niveau national. Pour le premier tour, le financement public est de 25 TND pour
1 000 électeurs, soit 176 850 TND par candidat (environ 62 052 USD). Le plafond des
dépenses totales de chaque candidat s'élevait à 1 768 500 TND (environ 620 520 USD). Bien
que le plafond ait été relevé après les élections de 2014, plusieurs intervenants ont jugé le
plafond trop bas pour mener une campagne significative et efficace, encourageant les
candidats à ne pas déclarer toutes leurs dépenses
35. La loi interdit les contributions de
31 Nessma TV appartient en partie à Nabil Karoui ; le propriétaire de Zeitouna TV est considéré comme proche
d’Ennahdha et le propriétaire de Radio Coran est à la tête de la liste du parti Ennahdha à Tunis 2.
32 L'actuel Premier ministre Youssef Chahed (Tahya Tounes) et le président par intérim du Parlement,
Abdelfattah Mourou (Ennahdha).
33 CoE (Comité des Ministres) Recommandations (2003)4, aArticle. 3(b).
34 Convention des Nations Unies contre la corruption, article 7. Sept.
35 Décret n° 3038 du 29 août 2014 relatif au plafond des dépenses pour la campagne électorale, au plafond des
financements privés et au plafond des financements publics et à leurs conditions et procédures pour les élections
présidentielles de 2014

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donateurs étrangers ou inconnus, ainsi que d'entreprises et de personnes morales. De plus, les
partis politiques ne sont pas autorisés à financer la campagne de leurs candidats à la
présidence
36.
Des changements ont été introduits en 2017 : les candidats ne reçoivent plus 50% des fonds
publics avant les élections et 50% après les élections, mais sont remboursés après les élections
pour les dépenses engagées, s’ils atteignent le seuil de 3%. Ce changement, visant à
décourager les candidats qui cherchaient uniquement à collecter des fonds publics, soulève
néanmoins des inquiétudes quant à l'efficacité des financements publics s’agissant d’assurer
l'égalité des chances entre tous les candidats.

Réseaux sociaux
La Constitution de 2014 garantit la liberté d'opinion, d'expression et de publication ainsi que
l'accès aux réseaux d'information et de communication
37. À ce jour, il n’existe pas de cadre
juridique spécifique pour les réseaux sociaux. Le décret-loi relatif à la liberté de la presse, de
l'impression et de la publication a supprimé la plupart des sanctions pénales applicables aux
délits d’expression. Des dispositions présentes dans une série de lois, telles que le code pénal,
le code de justice militaire, le code des télécommunications et la loi antiterroriste entrent en
contradiction avec la disposition constitutionnelle en vigueur ainsi que le décret-loi, créant de
l’incertitude et entravant la liberté d'expression, y compris des publications en ligne
38.
Les deux tiers des Tunisiens environ sont des utilisateurs actifs des médias sociaux, tout
particulièrement de Facebook
39. Plusieurs candidats disposant de pages vérifiées sur Facebook
ont eu recours à des campagnes de publicités payantes ciblées, publiant jusqu’à une douzaine
de publicités électorales payantes par jour sur leur page officielle. De multiples pages dont il
est difficile de déterminer les affiliations et soutenant des candidats ont également été
activement utilisées durant la période électorale, formant une intense campagne de l’ombre.
40
Le Centre Carter a observé que la plupart des candidats ont été soutenus par des publicités
électorales payantes diffusées à travers la campagne de l’ombre, brouillant les frontières entre
les sources de financement. En outre, malgré des démarches pour améliorer la transparence
entourant l’achat de publicités, Facebook ne dispose pas de critères clairs et cohérents pour
l'identification des annonceurs politiques ou des sujets politiques sur sa plateforme, ce qui
entraîne des incohérences et réduit la transparence globale de la campagne en ligne.
36 Article 76 de la loi électorale et art. 9 du règlement n° 20 de l'ISIE sur le financement de la campagne.
37 Articles 31 et 32.
38 La diffamation est punissable d’emprisonnement conformément aux articles 245 à 248 du Code pénal et à
l’article 91 du Code de justice militaire. Selon Human Rights Watch, au moins neuf blogueurs ont été mis en
examen pour des commentaires, publiés sur les plateformes de médias sociaux, qui critiquaient de hauts
représentants de l’État.

39 Selon l'Afro baromètre 2018, 7,5 millions de Tunisiens sont des utilisateurs actifs des médias sociaux. Selon
Napoleon Cat, environ 6,96 millions de personnes avaient un compte Facebook en août 2019.
40 Telles que les pages de fans, les pages non vérifiées de candidats, les pages de partis politiques ou les pages
anonymes.

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Trois débats présidentiels ont été organisés sous le titre « La route vers Carthage, la Tunisie
choisit
». Les médias sociaux ont été largement utilisés pendant et après les débats. Ces
derniers ont été retransmis en direct sur les chaînes de télévision et de radio, tandis que sur les
médias sociaux, les pages des candidats ont été constamment mises à jour, principalement
avec les réponses des candidats aux questions. Un candidat, Nabil Karoui, en détention
pendant les débats, a tweeté qu'il avait été empêché de participer.
Le monitoring effectué par le Centre Carter montre que des annonces payantes soutenant un
certain nombre de candidats étaient toujours en ligne sur Facebook sur les pages vérifiées de
certains candidats ainsi que sur des pages dont les affiliations sont incertaines durant la
période de silence électoral. Il s’agit là d’une violation de la période de silence électoral
41. Le
Centre Carter a également observé des violations de la période de silence électoral par
certains candidats sur Instagram, tandis qu'au moins une équipe de campagne a envoyé un
SMS appelant à voter pour son candidat au cours de cette période.
Des observateurs du Centre Carter ainsi que de Mourakiboun ont rapporté l’existence de
campagnes d’attaque ou de campagnes de dénigrement, sur les pages de la campagne de
l’ombre. L’ampleur de ce phénomène reste à établir, ce qui exigera une attention plus poussée
durant la campagne pour le second tour et les élections législatives.
Observateurs nationaux et des candidats
L’observation par les citoyens est une manifestation essentielle du droit de participer aux
affaires publiques et de tenir les gouvernements pour responsables de leurs actes. Les sources
du droit international public reconnaissent le droit de participer aux organisations
d’observateurs citoyens et de contribuer aux efforts d’éducation des électeurs
42. La société
civile tunisienne et les partis politiques ont pris une part active à l'observation du processus
électoral présidentiel.
L’ISIE a accrédité environ 13 000 observateurs de la société civile pour l’élection
présidentielle
43. De nombreuses organisations ont publié les résultats de leurs observations
portant sur des éléments particuliers du processus électoral. L’Observatoire Chahed a publié
des rapports sur l’enregistrement des électeurs, la Ligue des électrices tunisiennes s’est
exprimée sur la méfiance des femmes à l’égard de l’enregistrement et du vote, en particulier
dans les zones rurales et I WATCH s’est concentré sur la campagne et les violations dans du
financement de campagne. Ofiya, Atide et I WATCH ont toutes mené des projets de
monitoring des réseaux sociaux durant la période électorale. Mourakiboun a organisé un
centre de tabulation parallèle et a fait publié plusieurs déclarations sur les soutiens des
électeurs et leurs monitoring de la campagne électorale.
Règlement du contentieux électoral
41 Article 69 de la loi électorale et article 11 de la Décision de l’ISIE n°2014-28.
42 EISA, Principes pour la gestion, le suivi et l'observation des élections dans la région de la SADC, p.19.
43 Le nombre total d'observateurs citoyens accrédités pour l'élection présidentielle de 2014 était de 20.610
personnes.

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Les procédures de recours, et en particulier les pouvoirs et responsabilités des divers organes
concernés, devraient être clairement définis par la loi afin d'éviter tout conflit de compétence
positif ou négatif. En outre, le droit de former ce type de recours doit être reconnu aussi
largement que possible et ouvert à tous les électeurs de la circonscription et à tous les
candidats aux élections
44.
La garantie d'un recours rapide fait partie intégrante du droit à un recours effectif. Malgré des
délais abrégés prévus à l'article 49 de la loi électorale, le tribunal administratif a pu traiter
toutes les plaintes et tous les recours dans les meilleurs délais. Cependant, tant le juge que les
requérants ont estimé que les contraintes de temps menaçaient le droit de demander réparation
et le contrôle juridictionnel
45.
Le tribunal a fait preuve d'impartialité et a respecté la procédure établie dans ses décisions.
La loi électorale n'autorise pas les électeurs à déposer plainte à l’encontre d'éventuelles
malversations ou irrégularités au bureau de vote ; ceci les prive de leur droit à un recours
effectif
46. De plus, les électeurs n'ont pas la possibilité de contester les résultats des élections
devant les tribunaux. L'article 124 de la loi électorale autorise les représentants des candidats
et les observateurs à consigner des mémorandums qui doivent être attachés au procès verbal
aux fins d'examen par le président du bureau de vote.
Pour les élections présidentielles anticipées, le tribunal administratif a été saisi de 15 requêtes
contestant des décisions de rejet de candidature prises par l'ISIE ; quatre de ces décisions ont
été annulées. L’ISIE et sept candidats ont fait appel auprès de l'Assemblée générale du
tribunal administratif. Cette dernière a confirmé les quatre décisions de l'ISIE qui ont été
annulées en première instance et a rejeté tous les autres appels.
Bien que les audiences aient été correctement administrées et que les parties aient eu
l’opportunité de présenter leurs arguments, le calendrier contraignant relatif à la préparation
du dossier de l’affaire a affecté la capacité des parties à rassembler suffisamment de preuves
pour appuyer leurs revendications. Ce problème risque de s’aggraver si les résultats de
l’élection présidentielle (le cas échéant) sont contestés, compte tenu en particulier du délai
raccourci introduit pour respecter les contraintes constitutionnelles inhérentes à l'élection d'un
nouveau président dans les 90 jours.
Dimanche électoral
Le processus électoral est le véritable pilier de l'obligation d’organiser des élections honnêtes
et périodiques qui permettent de garantir la libre expression de la volonté du peuple
47. La
qualité des opérations de vote le jour du scrutin est cruciale pour déterminer si l’élection a été
44 Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), Code de bonne conduite en
matière électorale, CDL-AD (2002) 23.
45 Comité des droit de l’homme des Nations Unies, Commentaire général n° 32, paragraphe 19.
46 Comité du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, Commentaire générale n° 25, par. 20 ;
Déclaration de l’Union africaine sur les principes régissant les élections démocratiques en Afrique, Section IV,
article 7.

47 Pacte international relatif aux droits civils et politiques, Articles 2, 25(a) et 9

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organisée dans le respect des normes démocratiques. Selon le droit international, les élections
se tiennent à bulletin secret ; il s’agit d’un moyen reconnu pour garantir la libre expression de
la volonté du peuple
48.
Trois jours avant les élections, cinq IRIE situées dans l'ouest et le centre-ouest du pays (Kef,
Kasserine, Jendouba, Gafsa et Sidi Bouzid) ont annoncé sur Facebook que certains centres de
vote auraient des horaires réduits le jour du scrutin. Sur recommandation du ministère de
l'Intérieur, l'ISIE a réduit la durée d’ouverture des bureaux de vote de quatre heures :
ouverture à 10 heures et fermeture à 16 heures pour des raisons de sécurité. L'ISIE a publié les
heures révisées à la veille des élections sur son site Web. Après de nouvelles consultations,
l’ISIE a par la suite annulé sa décision, réduisant ainsi le nombre de bureaux de vote et
d’électeurs touchés. Les centres de vote ayant rebasculé sur les heures normales de vote
étaient principalement situés dans des zones urbaines. Cependant, seule l’IRIE du Kef a
publié les informations révisées. La décision de raccourcir les heures de vote a concerné
environ 112 795 électeurs, soit 1,59% des inscrits
49. Les horaires réduits sont insuffisants pour
assurer une pleine participation des électeurs.
L'ISIE a également annoncé le 11 septembre un changement de locaux de 28 centres de vote
répartis dans neuf IRIE. Quelque 31 379 électeurs ont été affectés par ce changement
50.
L’ISIE a imputé le changement de lieu à la faiblesse de l’infrastructure, des constructions
inachevées et des difficultés d’accès à certains centres de vote en raison des récentes
inondations. On ignore si les électeurs ont eu connaissance du changement et ont pu localiser
les nouveaux centres de vote, malgré les tentatives de plusieurs IRIE d'informer les électeurs à
travers Facebook.
Ouverture et vote
Les observateurs du Centre Carter ont décrit le processus d'ouverture dans les 34 bureaux de
vote visités comme calme et bien organisé ; 100% des observateurs jugeant que la mise en
œuvre des procédures était satisfaisante. L’évaluation globale de l’environnement électoral a
été positive dans 32 bureaux de vote. Dans plusieurs bureaux, des observateurs ont signalé
que la gestion des files d'attente était déficiente. Dans un des centres de vote visités, tous les
bureaux de vote ont été ouverts tardivement car l’ISIE n’avait pas remis le matériel électoral à
temps et que le personnel des bureaux de vote est arrivé en retard.
48 Pacte international relatif aux droits civils et politiques, Article 25 ; Déclaration universelle des droits de
l’homme, article 23. EISA et le Forum de la Commission électorale des pays de la SADC, responsables de la
gestion, du suivi et de l'observation des élections dans la région de la SADC, p. 24
49 Kasserine: 105 centres avec 124 bureaux de vote comprenant 49 940 électeurs, Jendouba: 40 centres avec 68
bureaux de vote comprenant 29 334 électeurs, Sidi Bouzid: 28 centres avec 46 bureaux de vote comprenant 18
021 électeurs, Le Kef: 47 centres avec 50 bureaux de vote comprenant 5 070 électeurs, Gafsa: 20 centres avec
28 bureaux de vote comprenant 9 653 électeurs.
50 Bizerte (trois centres de vote comprenant 13 403 électeurs), Siliana (deux centres de vote comprenant 1 216
électeurs), Jendouba (7 Centres de vote comprenant 5 101 électeurs), Monastir (deux centres de vote ; 1 473
électeurs), Ben Arous (un centre de vote comprenant 1 338 électeurs), Gafsa (sept centres de vote ; 2 241
électeurs), Médenine (trois centres de vote comprenant 355 électeurs), Nabeul (deux centres de vote ; 4 596
électeurs).


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317 bureaux de vote ont été visités par les observateurs du Centre Carter le jour du scrutin.
Dans la très grande majorité des cas, le climat général des élections et la mise en œuvre des
procédures ont été jugés positifs. Dans toutes les observations, sauf neuf, la compréhension
des procédures par les électeurs a été jugée adéquate. L’ISIE a annoncé un taux de
participation de 45,02% en Tunisie.
Quelques irrégularités mineures ont été observées, notamment l’absence d’information venant
du personnel électoral pour renseigner les électeurs sur les procédures de vote, l’impossibilité
de contrôler les mains des électeurs pour vérifier la présence d’encre avant de les autoriser à
se rendre au bureau de vote, comme l’exige la réglementation. L'instruction a été jugée
déficiente ou absente dans 24 observations (7,4%). Dans 94,8% des bureaux de vote visités,
les électeurs ont pu voter dans le respect du secret.
Les représentants des candidats étaient présents dans 309 des 317 bureaux de vote observés.
Un représentant des candidats Mourou, Chahed et Karoui était présent dans la majorité des
centres de vote observés. Les observateurs de la société civile étaient présents dans seulement
60 des 317 bureaux observés. 53 d’entre eux appartenaient à l’ONG Mourakiboun.

Fermeture et dépouillement
L’application des procédures et l’environnement électoral dans son ensemble ont été évalué
comme très bons or raisonnables dans 30 des 31 bureaux de vote observés pour la fermeture.
Les femmes représentent 42% du personnel électoral mais seulement 9,7% des présidents de
centres de vote. Tous les électeurs encore dans les files d’attente à 18h00, à l’heure où les
bureaux ont fermé, ont été autorisés à voter.
Le dépouillement a été observé dans 29 bureaux de vote ; la mise en œuvre des procédures et
l'environnement global ont été évalués de manière positive dans toutes les observations, à une
seule exception près. Les observateurs ont décrit le processus comme calme, professionnel et
détaillé.
La compilation des résultats
Les observateurs du Centre Carter étaient présents dans tous les 27 centres de compilation. La
compilation des résultats a été largement retardée par la livraison tardive du matériel au centre
de compilation, depuis les bureaux de vote. Certains observateurs ont indiqué que le personnel
du centre de compilation limitait leur observation à des endroits trop éloignés du processus.
Néanmoins, l'évaluation de la mise en œuvre des procédures a été positive selon 26
observations sur 27 et l'évaluation globale de l'environnement dans les centres de compilation
a été positive selon 25 observations.

Contexte :
Le Centre Carter a été accrédité par l’ISIE pour observer les élections et a déployé plus de 90
observateurs qui ont visité 340 bureaux de vote uniques ainsi que les 27 centres de
compilation. La mission était codirigée par Salam Fayyad, ancien premier ministre de
Page 148
l'Autorité palestinienne, et Tana de Zulueta, journaliste et ancienne députée italienne. Plus de
trente nationalités étaient représentées dans la délégation de la mission d'observation.
Le Centre est présent en Tunisie depuis 2011. Il a observé les élections de l'Assemblée
nationale constituante de 2011 et les élections présidentielle et législatives de 2014, ainsi que
le processus d'élaboration de la Constitution qui a abouti à l'adoption de la Constitution en
janvier 2014.
Pour ces élections, le Centre Carter a déployé une équipe cadre en mai 2019 pour organiser sa
mission d'observation électorale. À la mi-juillet, le Centre, en collaboration avec l'Institut
électoral pour une démocratie durable en Afrique, a déployé 16 observateurs de longue durée
pour observer l'ensemble de la Tunisie. L'équipe cadre et les observateurs de longue durée
représentent 18 pays différents.
Le Centre restera en Tunisie pour observer le processus de compilation et le règlement du
contentieux électoral. Une mission d'observation sera également envoyée en octobre pour les
élections législatives et pour le second tour de la présidentielle. L’objectif de la mission
d’observation du Centre en Tunisie est de fournir une évaluation impartiale de la qualité
générale du processus électoral, de promouvoir un processus inclusif pour tous les Tunisiens
et de démontrer son soutien à sa transition démocratique.
Le Centre Carter évalue le processus électoral tunisien par rapport à la Constitution
tunisienne, au cadre juridique électoral national et aux obligations découlant des traités
internationaux et des standards électoraux internationaux. La mission d'observation du Centre
est menée conformément à la Déclaration de principes pour l'observation internationale
d'élections.
Le Centre souhaite remercier les responsables tunisiens, les membres des partis politiques, les
membres de la société civile, les particuliers et les représentants de la communauté
internationale qui ont généreusement offert leur temps et leur énergie pour faciliter les efforts
du Centre pour observer le processus de l'élection présidentielle.

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En dépit d’une période électorale comprimée, le Centre Carter rapporte
l'élection présidentielle en Tunisie : organisée et efficace
TUNIS (17 septembre 2019) - Le Centre Carter a publié aujourd'hui une déclaration préliminaire sur
l'élection présidentielle tunisienne du 15 septembre, qui a fourni à la Tunisie l'occasion de revigorer
la transition politique du pays, de renforcer sa culture démocratique et de se refocaliser sur les
réformes qui amélioreront la vie de ses citoyens.
Malgré les efforts déployés par l’instance indépendante de gestion des élections du pays, connue
sous son acronyme
l’ISIE, pour faciliter une plus grande participation des électeurs, le taux de
participation aurait été de 45,02%, une baisse décevante qui reflète la désillusion des Tunisiens face
à la situation politique et à la trajectoire économique du pays. Néanmoins, les citoyens devraient être
fiers du fait que l'élection ait offert un large éventail de candidats et
que l'ISIE ait mis en œuvre le
scrutin avec succès, malgré un calendrier condensé de 90 jours rendu nécessaire par le décès du
Président Béji Caïd Essebsi en juillet.
La mission d’observation du Centre Carter, qui comptait plus de 90 personnes, était dirigée par Salam
Fayyad, ancien Premier Ministre de l’Autorité palestinienne, et Tana de Zulueta, une ancienne
parlementaire italienne. L'équipe d'observateurs, composée de citoyens de plus de 30 pays, a visité
le jour du scrutin, 317 bureaux de vote et les 27 centres de compilation en Tunisie. Les observateurs
n'ont signalé que des irrégularités mineures dans un nombre limité de bureaux de vote visités. La
plupart des problèmes étaient liés à l’insuffisance des instructions données aux électeurs sur la
manière de voter.
La déclaration d'aujourd'hui du Centre Carter fournit une évaluation préliminaire, dont les principales
conclusions sont décrites ci-dessous. Plusieurs aspects clés du processus électoral doivent encore
être achevés, notamment la compilation, l'annonce des résultats finaux et la résolution des plaintes
ou des contestationsm, éventuelles. Le Centre fournira des évaluations supplémentaires, une fois le
processus électoral terminé.
Période préélectorale
En juin, le Parlement a adopté des amendements à la loi électorale qui auraient limité le droit
fondamental des citoyens de se présenter aux élections - notamment en interdisant effectivement
aux propriétaires de médias et aux dirigeants des organisations caritatives de se porter candidats. Le
président Essebsi a refusé de promulguer la loi.
Sa mort soudaine a radicalement modifié la course à la présidence, raccourcissant considérablement
le calendrier électoral et faisant pression sur toutes les parties prenantes, pour qu'elles respectent
les nouvelles échéances. En effet, la Constitution
tunisienne exige la nomination d’un nouveau
Président dans les 90 jours suivant l’installation du Président par intérim. Bien que le Parlement ait
adopté des amendements à la loi électorale visant à raccourcir le processus de plaintes et de recours,
le nouveau calendrier ne garantit toujours pas que la Tunisie puisse respecter les délais
constitutionnels en cas d’organisation d’un second tour.

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Fin août, les autorités ont arrêté le candidat Nabil Karoui, qui dominait des sondages d'opinion à la mi-
juillet et qui était présumé être la cible des amendements parlementaires avortés, pour blanchiment
d’argent et évasion fiscale. Sa détention actuelle laisse penser qu'il a été arrêté pour des raisons
politiques et jette une ombre sur le processus. De plus, on ignore comment sa détention influera sur
sa participation au reste du processus électoral.
Les principales conclusions :
Cadre juridique : certains domaines du cadre juridique pourraient être améliorés, notamment en
fixant des délais définitifs et adéquats pour les différentes étapes du processus électoral. Les
dispositions relatives à la campagne électorale, y compris celles inhérentes à l'utilisation de publicité
et d'affiches, sont restrictives et difficiles à respecter pleinement par les candidats, ce qui encourage
leur violation.
Administration des élections : Bien que les postes vacants dans les effectifs du personnel, en
particulier dans les départements juridique et de la formation, posent des problèmes, l’ISIE a
efficacement conduit les élections dans des délais très serrés. Cependant, elle n’a pas réussi à gérer
ses communications publiques de manière cohérente. Ainsi, les membres de son Conseil ont parfois
fait des déclarations contradictoires.
Enregistrement des candidatures : le personnel de l'ISIE a mis en œuvre les procédures
d’enregistrement de manière professionnelle et dans les délais. Quatre-vingt-dix-sept candidats ont
postulé ; 26 ont été approuvés et 71 rejetés, certains pour avoir utilisé des parrainages frauduleux.
L’ISIE n’a pas fait preuve d’une totale transparence, en s’abstenant de publier des détails sur les
raisons pour lesquelles elle a rejeté des candidats. Elle a publié la liste finale des candidats le 31 août,
deux jours avant le début de la campagne électorale.
Education des électeurs : l'ISIE a lancé une campagne d'éducation des électeurs, spécifiquement
axée sur les élections présidentielles, deux semaines avant le scrutin. Les organisations de la société
civile ont signalé qu'elles manquaient de fonds pour mener une campagne complète d'éducation des
électeurs, avant le jour du scrutin. Les organisations de la société civile ont, en général, reçu moins
de fonds pour des activités liées aux élections, telles que l'éducation des électeurs et l'observation
des élec
tions. Le fait qu’il s’agisse d’élections présidentielles anticipées a affecté leur capacité à
obtenir des fonds supplémentaires.
Environnement de campagne : les observateurs à long terme du Centre Carter ont signalé qu’une
atmosphère positive régnait entre les principaux partis politiques dans les différentes régions du
pays, même lorsqu’ils organisaient des événements de campagne le même jour dans la même région.
Aucun incident de sécurité majeur n'a été signalé. Dans le cadre d’un nouveau développement pour
le pays et la région, les candidats ont participé à des débats télévisés en direct, qui ont été visionnés
par près de la moitié des électeurs enregistrés du pays et télédiffusé dans toute la région arabe.
La campagne a commencé lentement mais s'est intensifiée au cours de la deuxième semaine, les
candidats ayant organisé des rassemblements, utilisé des tentes et des panneaux publicitaires,
distribué des tracts et fait du porte-à-porte. Les candidats ont également largement utilisé les réseaux
de médias sociaux (principalement Facebook), en particulier pour les publicités de campagne.
Financement de la campagne : le financement public est réparti équitablement entre les candidats
en fonction du nombre d'électeurs au niveau national. Bien que le plafond des dépenses de
campagne ait été relevé après les élections de 2014, les parties prenantes le jugeaient encore trop
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bas, ce qui encourageait les candidats à dépasser ce plafond et à ne pas déclarer complètement leurs
dépenses.
Résolution des litiges électoraux: malgré les délais raccourcis prévus à l'article 49 de la loi électorale,
le tribunal administratif a été en mesure de traiter toutes les plaintes et tous les recours
préélectoraux dans les meilleurs délais. Cependant, tant le pouvoir judiciaire que les plaideurs ont
déclaré que les contraintes de temps menaçaient le droit de demander réparation et le contrôle
juridictionnel. Le tribunal a fait preuve d'impartialité et de respect
d’une procédure régulière, mais
n'a pas divulgué publiquement les détails des plaintes et des décisions.
Surveillance des médias sociaux : à ce jour, il n'existe pas de cadre juridique spécifique pour les
médias en ligne. Les deux tiers des Tunisiens sont des utilisateurs actifs des médias sociaux et
Facebook est largement utilisé. La plupart des candidats ont utilisé Facebook pour la publicité payée
ciblée. Certains candidats ont publié jusqu'à une douzaine d'annonces par jour, à partir de leurs
pages vérifiées. À la veille des élections, le Centre Carter a observé des publicités payantes soutenant
un certain nombre de candidatures, diffusées sur leurs pages Facebook vérifiées, ainsi que sur des
pages aux affiliations floues, en violation de la période de silence de la campagne.
Contexte
Le Centre Carter a été accrédité par l'ISIE pour observer les élections et a déployé plus de 90
observateurs qui ont visité 317 bureaux de vote ainsi que les 27 centres de compilation.
Il est présent en Tunisie depuis 2011. Il a assisté aux élections de l'Assemblée nationale constituante
de 2011, aux élections présidentielles et législatives de 2014, ainsi qu'au processus d'élaboration de
la Constitution qui a abouti à l'adoption de la Constitution en janvier 2014.
Pour ces élections, le Centre Carter a déployé une mission principale en mai 2019. À la mi-juillet, le
Centre - en collaboration avec l'Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique - a déployé
16 observateurs à long terme. L'équipe principale et les observateurs à long terme représentent 18
pays différents.
Le Centre restera en Tunisie pour observer le processus de compilation finale et la résolution des
plaintes électorales. Une mission d’observation sera envoyée à l’occasion des élections législatives et,
si nécessaire, d’un deuxième tour de scrutin en octobre. L’objectif de la mission d’observation du
Centre est de fournir une évaluation impartiale de la qualité générale du processus électoral, de
promouvoir un processus inclusif pour tous les Tunisiens et de démontrer son soutien à sa transition
démocratique.
Le Centre Carter évalue le processus électoral tunisien par rapport à la Constitution tunisienne, au
cadre juridique électoral national et aux obligations découlant des traités internationaux et des
normes électorales internationales. La mission d'observation du Centre est menée conformément à
la Déclaration de principes pour l'observation d'élections internationales.
Le Centre souhaite remercier les responsables tunisiens, les membres des partis politiques, les
membres de la société civile, les particuliers et les représentants de la communauté internationale
qui ont généreusement offert leur temps et leur énergie pour faciliter les efforts du Centre visant à
observer le processus des élections présidentielles.
Contact: Soyia Ellison, soyia.ellison@cartercenter.org
Don Bisson +216 21 76 82 08 ou don.bisson@cartercenter.org
Page 152
Le Carter Center
Faire la paix. Combattre la maladie. Construire de l'espoir.
Organisation non gouvernementale à but non lucratif, le Centre Carter a contribué à améliorer la vie
des habitants de plus de 80 pays en résolvant les conflits; Faire progresser la démocratie, les droits
de la personne et les opportunités économiques; prévenir les maladies; et améliorer les soins de
santé mentale. Le Carter Center a été fondé en 1982 par l’ancien président américain Jimmy Carter
et l’ancienne Première Dame Rosalynn Carter, en partenariat avec l’Université Emory, afin de
promouvoir la paix et la santé dans le monde entier.
Visitez notre site Web CarterCenter.org | Suivez-nous sur Twitter @CarterCenter | Suivez-nous sur
Instagram @thecartercenter | Aimez-nous sur Facebook Facebook.com/CarterCenter | Regardez-
nous sur YouTube YouTube.com/CarterCenter
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Le Centre Carter annonce l’arrivée de ses observateurs de courte durée en
Tunisie pour les élections législatives
TUNIS, TUNISIE (3 octobre 2019) - Des dizaines d'observateurs de courte durée sont arrivés à
Tunis cette semaine pour joindre la mission d’observation électorale internationale du Centre
Carter en vue des élections législatives en Tunisie. La délégation compte plus que 90
observateurs et sera co-dirigée par les deux leaders, Tana de Zulueta, ancienne membre du
parlement Italien, et Karen AbuZayd, commissaire au sein
la Commission d'enquête
indépendante sur la République arabe syrienne.
Le Centre Carter, qui travaille en Tunisie depuis 2011, a reçu une invitation officielle et une
accréditation de l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections pour observer les
élections présidentielle et législatives. La mission a débuté en mai 2019 avec le déploiement
d'une équipe d'experts à Tunis et de 16 observateurs de longue durée répartis dans tout le pays.
Au total, le Centre a accrédité plus de 90 observateurs ressortissants de 25 pays pour les élections
présidentielle et législatives.
Les observateurs du Centre Carter ont rencontré régulièrement des représentants de l'ISIE, des
partis politiques, des candidats indépendants, des organisations de la société civile, des membres
de la communauté internationale et des observateurs électoraux de la société civile, pour évaluer
les préparatifs de l'élection du 6 octobre et de l'environnement préélectoral. La mission
d’observation présentera une évaluation indépendante du processus entourant les élections
législatives, en coordination avec les autres observateurs électoraux nationaux et internationaux
et les principales parties prenantes.
L’évaluation du processus électoral du Centre Carter se base sur la constitution et le cadre
juridique tunisiens, ainsi que sur les diverses obligations de la Tunisie en matière d’élections
démocratiques en vertu du droit international public, y compris les accords régionaux et
internationaux concernés. La mission d'observation du Centre est menée conformément à la
Déclaration de principes pour l'observation internationale des élections qui pose les lignes
directrices pour une observation électorale professionnelle et impartiale.
Le Centre a publié une déclaration préliminaire sur l’élection présidentielle, notant que malgré
un calendrier électoral réduit, les élections avaient été bien organisées.











Page 154
Contact :
don.bisson@cartercenter.org
Soyia.Ellison@cartercenter.org

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Le Centre Carter
« Faire progresser la Paix. Combattre les Maladies. Construire l’Espoir »
Le Centre Carter est une organisation non gouvernementale à but non lucrative qui a
contribué à améliorer la vie des habitants de plus de 80 pays en résolvant les conflits ; en
faisant progresser la démocratie, les droits de la personne et les opportunités économiques
; en prévenant les maladies ; et en améliorant les soins de santé mentale. Le Carter Center
a été fondé en 1982 par l’ancien président américain Jimmy Carter et l’ancienne Première
Dame Rosalynn Carter, en partenariat avec l’Université Emory, afin de promouvoir la paix
et la santé dans le monde entier.
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Page 155
Déclaration préliminaire du Centre Carter sur les élections législatives
en Tunisie
8 octobre 2019
Cette déclaration est préliminaire et ne couvre que certains aspects du processus électoral
jusqu’au 7 octobre. Il existe également un délai pour le dépôt d’éventuels recours. CETTE
DECLARATION NE CONSTITUE DONC PAS L’EVALUATION DU PROCESSUS
ELECTORAL DANS SON ENSEMBLE MAIS DOIT ETRE CONSIDEREE PLUTOT
COMME UNE EVALUATION PRELIMINAIRE PARTIELLE DES PHASES DEJA
TERMINEES. Le Centre Carter publiera des évaluations supplémentaires tout au long du
processus électoral et à la fin de celui-ci. En outre, un rapport final complet assorti de
recommandations sera publié dans les semaines suivant la fin du processus électoral.
Énoncé des constatations préliminaires et conclusions
Contexte politique
Les résultats de l’élection présidentielle anticipée du 15 septembre, deux mois plus tôt que prévu
initialement en raison du décès du président Beji Caïd Essebsi, ont eu de profondes répercussions
sur les élections législatives du 6 octobre. Tandis que les candidats indépendants espéraient
capitaliser sur le sentiment anti-establishment qui avait attiré les électeurs lors du premier tour de
l'élection présidentielle, les partis se sont pour leur part efforcés de redynamiser leurs partisans et
d'encourager la participation. D’un côté comme de l’autre, l’obligation s’est fait sentir de
changer de stratégie de campagne à la lumière du rejet par l'électorat du système politique et de
la première place de Kaïs Saïed, un indépendant qui avait annoncé qu’il refuserait les
financements publics et a mené une campagne peu orthodoxe, centrée sur le dialogue en tête à
tête avec les électeurs.
Les résultats du scrutin présidentiel, à l’instar de ceux des élections municipales de 2018, ont
montré la nature dynamique du paysage politique tunisien. Les élections à l'Assemblée Nationale
Constituante de 2011 avaient été marquées par une large victoire pour Ennahdha et les partis
historiquement opposés au régime de Ben Ali. Les élections suivantes, en 2014, avaient pour leur
part été caractérisées par une lutte entre islamistes et laïcs. Nidaa Tounes avait alors réussi à
réunir les forces libérales et à remporter la victoire aux élections législatives et présidentielle.
Les élections municipales de 2018 avaient pour leur part marqué un tournant décisif et mis en
évidence le déclin de l'influence de la plupart des partis politiques et la montée en puissance de
candidats indépendants, qui avaient alors collectivement recueilli le plus grand nombre de voix
dans l'ensemble du pays. Le faible taux de participation aux élections municipales, qui laissait
présager du peu d’intérêt des Tunisiens pour les élections de 2019, avait découragé les instances
électorales tunisiennes.
L’Instance supérieure indépendante pour les élections, l’ISIE, a annoncé que le taux de
participation s’était établi à 41% lors des élections législatives, un taux inférieur aux 48% de
participation lors du premier tour de l’élection présidentielle, et inférieur de plus de 20% à la







Page 156
participation enregistrée lors des élections législatives de 2014. Ce taux de participation faible
reflète le mécontentement continu du peuple tunisien par rapport au parlement et à sa capacité en
tant qu’institution à atteindre les objectifs de la révolution et à répondre aux aspirations des
citoyens.
Les élections législatives du 6 octobre ont été considérées par beaucoup comme une occasion
pour le pays de sortir de l’inertie politique et pour le parlement de jouer un rôle de premier plan
dans la mise en œuvre des réformes politiques et économiques nécessaires pour tirer le meilleur
parti des avancées démocratiques du pays. Les partis et candidats indépendants élus au parlement
vont maintenant devoir mettre de côté leurs différends et agir rapidement afin de solidifier les
institutions du pays, améliorer la situation économique et restaurer la confiance des Tunisiens en
leur jeune démocratie.
Les élections de 2019 reflètent la désillusion du peuple tunisien à l'égard de la classe politique
actuelle et sa frustration devant la lenteur des réformes depuis la révolution de 2011. En raison
du déclin continu de l'économie et de la hausse du coût de la vie, les électeurs cherchent en
dehors du système actuel des candidats qui, ils l’espèrent, apporteront des changements radicaux.
Dans la période qui a précédé les élections législatives, des conflits internes ont divisé les partis
politiques en place. Nidaa Tounes, le parti victorieux aux élections législatives et présidentielle
de 2014, a été paralysé par le départ de plus de la moitié de ses élus, le privant ainsi de sa
pluralité à l’assemblée.
1 La coalition du Front populaire, acteur principal de l’assemblée, s'est
également scindée en deux, ce qui a conduit à la création de deux entités politiques distinctes, un
parti politique et une coalition séparée.
2 Au cours de la période précédant immédiatement les
élections, Ennahdha a également souffert de conflits internes concernant le choix d’un candidat à
la présidentielle et les interventions excessives du chef du parti pour placer des candidats perçus
comme lui étant étroitement liés sur les listes aux élections législatives.
Ce dysfonctionnement des partis représentés à l’assemblée a sapé les performances de
l’institution, déjà affaiblie par son incapacité à contrôler son programme législatif. Selon la
constitution, les projets de loi, émanant du pouvoir exécutif, ont préséance sur les propositions de
loi, avancées par les députés ; la plupart des lois votées sont issues de l’exécutif et ces initiatives
législatives ont dominé l’ordre du jour de l'assemblée.
Outre ces facteurs, l'assemblée a été en proie à l’absentéisme des députés, à l’éclatement des
partis parlementaires et à la « commission des consensus », une commission informelle et en
grande partie opaque, formée par les dirigeants du bloc parlementaire qui ont pris les décisions
politiques les plus essentielles. Ces facteurs combinés ont limité la capacité de l’assemblée à
exercer toute la portée de ses pouvoirs. De plus, elle n'est pas parvenue à mettre en place la cour
constitutionnelle et d’autres instances constitutionnelles indépendantes, telles que l’Instance
nationale de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, l'Instance du développement
1 Le bloc parlementaire de Nidaa Tounes à l’assemblée est passé de 86 sièges en 2014 à 26 sièges en 2019.
2 La scission s’est produite en avril 2019 principalement à la suite de l’annonce par l’un des membres de la coalition
qu’il serait le candidat à la présidence de la coalition et non le porte-parole de la coalition, comme c’était le cas
auparavant.

2







Page 157
durable et les droits des générations futures et l'Instance de la communication audiovisuelle
(ICA).
Cadre juridique
Selon les bonnes pratiques internationales, le cadre juridique d’une élection doit être transparent
et facilement accessible au public. Il doit également comprendre toutes les composantes
nécessaires d’un système électoral pour garantir des élections démocratiques.
3 Le cadre juridique
des élections législatives en Tunisie est généralement conforme aux normes internationales.
4
Le processus électoral est régi par la constitution de janvier 2014, la loi électorale de 2014, la loi
sur l'ISIE et la loi relative à la liberté de communication audiovisuelle, qui a créé la Haute
autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA). Certains aspects du cadre
juridique gagneraient à être améliorés, notamment en fixant des délais définitifs et adéquats pour
les différentes étapes du processus électoral. Comme lors de l’élection présidentielle, les
dispositions relatives à la campagne électorale, notamment celles relatives à l’utilisation de la
publicité et des affiches, sont restrictives. En outre, les plafonds de financement de la campagne
électorale, bien que relevés par rapport à 2014 et visant à aplanir les disparités entre grands et
petits partis, restent bas et difficiles à respecter pour les listes de candidats des partis politiques.
Le cadre juridique vise à assurer l'égalité entre les candidats pendant les campagnes. L'article 52
de la loi électorale stipule que les campagnes électorales doivent respecter les principes
essentiels d'égalité des chances entre tous les candidats. L'article 3 de la loi sur l'ISIE stipule que
la commission doit garantir l'égalité de traitement entre les électeurs, les candidats et toutes les
parties prenantes. Enfin, l'article 5 du décret sur la HAICA stipule que l'exercice des droits et
libertés de la communication audiovisuelle doit respecter le principe de l'égalité. Cependant,
compte tenu du nombre élevé de listes (plus de 1 500), l’ISIE et la HAICA ont éprouvé des
difficultés à respecter ce principe. Le cadre juridique gagnerait à être plus précis sur la manière
dont le principe d'égalité des chances doit être appliqué dans le climat politique actuel.
Système électoral
L’objectif d'un système électoral est de transcrire la volonté du peuple en un gouvernement
représentatif. Les normes internationales ne prescrivent pas de système électoral spécifique.5 Le
système électoral tunisien respecte les principes d’élections honnêtes et périodiques et garantit le
suffrage universel, le vote à bulletin secret et le droit de ne pas faire l’objet d’actes
d’intimidation, ainsi que l’égalité du suffrage et la représentation égale de tous les citoyens.
3 OSCE/ODIHR, Lignes directrices pour la révision du cadre juridique des élections, page 4.
4 Celles-ci comprennent : le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ; le Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ; la Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale (CERD) ; la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des
femmes (CEDAW) ; la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
(CAT) ; la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Charte africaine des droits de l'homme et
des peuples (CADHP).
5 N.U., Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ; Article 25 (b); Conseil des droits de
l'homme des Nations Unies, Observation générale 25, par. 21
3








Page 158
Selon la constitution, l’assemblée est élue pour cinq ans, conformément aux engagements
internationaux et aux meilleures pratiques.
6 L’assemblée compte 217 sièges au total, 199 en
Tunisie et 18 à l'étranger.
La délimitation des circonscriptions n’a pas évolué depuis l’Assemblée nationale constituante de
2011, lorsqu’un facteur de discrimination positive a été introduit pour augmenter la
représentation des gouvernorats défavorisés où la densité de population est faible et aurait conclu
à une représentation minimale. Le gouvernement a soumis un projet de loi à l’ARP en septembre
2018 pour redessiner les frontières des circonscriptions pour les élections sur la base des résultats
du recensement de 2014. Ce projet a été rejeté par la commission compétente de l’ARP en
janvier 2019, l’article 106 de la loi électorale ne permettant pas de modifier les limites des
circonscriptions électorales dans l’année précédant les élections.

La constitution garantit le droit de vote à tous les citoyens âgés de 18 ans ou plus et qui ne font
l’objet d’aucune privation du droit de vote prévue par la loi électorale. La loi a été amendée en
2017 afin de permettre aux militaires et aux policiers de voter aux élections municipales, mais il
leur demeure interdit de voter aux élections législatives et présidentielle, une restriction qui n'est
pas conforme aux normes internationales.
7 Les citoyens dans les centres de soins et de santé, les
pénitenciers et les centres de détention n’ont pas eu l’opportunité d’exercer leur droit de vote,
aucun mécanisme n'étant prévu à cet égard par la loi, contrairement à la constitution tunisienne et
aux engagements internationaux de la Tunisie.
8
Enregistrement des candidats
Le droit des individus de participer aux affaires publiques est une obligation en droit
international.
9 Bien que le droit d’être élu soit un principe largement reconnu dans les traités
régionaux et internationaux, il n’est cependant pas un droit absolu et peut être limité sur la base
de critères objectifs et raisonnables établis par la loi.
10 Le cadre juridique tunisien permet un
processus d'enregistrement des candidats inclusif et est généralement conforme aux normes
internationales et régionales.
11 Les candidats à l’assemblée doivent être citoyens tunisiens depuis
au moins 10 ans et avoir 23 ans le jour de leur enregistrement.
12
6 PIDCP, article 25 (b) ; Observation générale 25, paragraphes 9 et 19 ; Déclaration universelle des droits de
l'homme, article 21 (3) ; Code de bonne conduite en matière électorale du Conseil de l'Europe, sec. I.1.6.
7 Voir Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 25: « Tout citoyen a le droit et la possibilité
[...] de voter et d'être élu au cours d’élections périodiques, honnêtes [...] ». Par ailleurs, l’Observation générale 25,
par. 14 précise: « Les motifs de refus du droit de vote aux citoyens doivent être objectifs et raisonnables, et ils
doivent être prescrits par la loi ».
8 Droit au suffrage universel sur la base de l'égalité de traitement devant la loi: PIDCP, article 25 (b); Charte
africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, article 3 (3).
9 PIDCP, article 25 (a) ; PIDCP, article 21 ; Observation générale 25 de l'UNHRC, par. 26
10 PIDCP, article 25 ; UA, CADHP, article 13 ; Charte arabe des droits de l'homme, article 24
11 PIDCP, article 25 « Chaque citoyen a le droit et la possibilité [...] de voter et d’être élu au cours d’élections
périodiques, honnêtes ». Voir aussi l’article 13 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
12 Contrairement aux candidats à la présidentielle, il n'est pas nécessaire que les candidats soient musulmans, aucun
dépôt ni soutien n'est requis.
4





Page 159
L’enregistrement des candidats aux élections législatives a été effectué par les instances
régionales indépendantes des élections (IRIE) du 22 au 29 juillet. Le personnel des IRIE était
bien préparé à ce processus et toutes les parties prenantes ont loué leur professionnalisme et leur
travail intense. Les IRIE ont reçu 1 581 candidatures de partis politiques, coalitions et
indépendants, 1 405 en Tunisie et 176 dans les six IRIE à l'étranger. Chaque liste doit être
composée d’autant de candidats que de sièges dans la circonscription et d'une liste
supplémentaire composée d'au moins deux membres. Toutes les listes doivent alterner des
candidats et des candidates. Seules 13% des 1 341 listes étaient conduites par des femmes en
Tunisie. L'ordre des listes sur le bulletin de vote a été déterminé par l'ordre respectif dans lequel
les listes ont été soumises à l'IRIE.
Le 6 août, l'ISIE a publié un chiffre préliminaire de 1 340 listes acceptées sur les 27
circonscriptions situées en Tunisie et de 165 listes pour les six circonscriptions à l’étranger.
13 78
ont été rejetées (65 en Tunisie et 13 à l'étranger). Le plus grand nombre de rejets a été enregistré
à Sousse avec huit listes rejetées ; quatre IRIE (Zaghouan, Kef, Gafsa et Tozeur) ont accepté
toutes les listes de candidats. Les circonscriptions qui comptaient le plus grand nombre de listes
en lice pour les élections étaient Sidi Bouzid (73 listes), Gafsa (70) et Kasserine (66). Le nombre
le plus bas de listes a été enregistré à Gabès et Tataouine (31 chacun) et à Kebili (34).
L'ISIE a annoncé le nombre définitif de listes le 31 août, après traitement des recours juridiques.
Au total, 1 506 listes de candidats, dont 1 341 en Tunisie et 165 à l'étranger, ont été acceptées. La
taille du bulletin de vote dans chaque circonscription a été déterminée en fonction du nombre de
listes de candidats. Chaque bulletin de vote présentait des colonnes verticales avec le nom de
chaque parti, coalition ou liste indépendante, son logo et le numéro correspondant à sa position
sur le bulletin de vote.
Le processus d'enregistrement des candidats a été inclusif et géré de manière efficace et
professionnelle par les IRIE. Cependant, à aucun moment l'ISIE n'a publié les noms de tous les
candidats de chaque liste, privant ainsi les électeurs d'informations essentielles.
Administration électorale
Une autorité électorale indépendante et impartiale, fonctionnant de manière transparente et
professionnelle, est le seul moyen efficace pour garantir que les citoyens puissent participer à de
véritables élections démocratiques.
14 La pratique des États suggère que, lors de la planification
des élections, un délai suffisant devrait être assuré pour gérer avec succès le processus
électoral.
15 Selon la constitution tunisienne, l'ISIE est l'organisme qui assure la règlementation,
l'intégrité et la transparence du processus électoral et en proclame les résultats.
16
13 Le circuit d’appel du tribunal administratif a entendu 17 recours concernant le rejet de listes par l’IRIE. 14 ont été
refusés et trois acceptés.
14 CDH de l’ONU, Observation générale 25, par. 20
15 ONU, Droits de l'homme et élections, par. 75
16 Constitution tunisienne de 2014, article 126.
5








Page 160
L'ISIE a formé 33 IRIE (27 en Tunisie et six à l'étranger), une dans chaque circonscription
électorale, composée d'un maximum de quatre personnes avec des qualifications professionnelles
différentes. Le processus de nomination des membres des IRIE par l’ISIE s’est fait de manière
transparente et efficace. Pour les élections législatives, l'ISIE a mis en place 13 830 bureaux de
vote, dont 13 446 en Tunisie et 384 à l'étranger.
Cinq pour cent des quelque 55 000 agents électoraux ayant servi lors de l'élection présidentielle
ont été remplacés après évaluation du personnel par les IRIE. Les chefs des bureaux de vote et
des centres de vote ont été formés par les IRIE du 28 au 29 septembre ainsi que les nouveaux
membres du personnel électoral.
Après l'élection présidentielle, l'ISIE a effectué une évaluation de deux jours à l'intention des
présidents, coordinateurs, juristes et administrateurs des 33 IRIE. L’ISIE a décidé de combler les
lacunes en matière de formation du personnel sur l’utilisation de l’application qui permet
d’agréger automatiquement les résultats au niveau des centres de collecte, ainsi qu’en matière
d’itinéraires empruntés par l’armée pour collecter et livrer le matériel électoral aux centres de
collecte. Cela a permis d’améliorer le processus de tabulation.
Les 1 500 observateurs de la campagne électorale recrutés par l'ISIE pour l'élection présidentielle
ont également supervisé la campagne législative afin de garantir le respect des règles relatives à
la campagne et à son financement. Les observateurs de longue durée du Centre Carter ont signalé
que ces observateurs sont toujours très actifs sur le terrain.
Bien que l'ISIE ait souffert de conflits internes et n'ait pas toujours communiqué de manière
cohérente avec le public, elle a réussi à organiser efficacement deux élections sur une courte
période, enregistrant seulement quelques défaillances minimes sans incidence sur le processus
électoral ou les résultats.
Inscription des électeurs
L'inscription des électeurs et l'établissement d'une liste électorale complète, à jour et exacte sont
les meilleurs moyens pour garantir le droit de vote de chaque citoyen. Selon le Comité des droits
de l'homme des Nations Unies, « lorsque l'inscription des électeurs est requise elle doit être
facilitée et aucun obstacle à cette inscription ne doit être imposé ».17 Les procédures d’inscription
des électeurs en Tunisie sont globalement conformes aux normes internationales et régionales.
18
L'ISIE a ouvert sa campagne d'inscription des électeurs pour ces élections le 10 avril et l'a
clôturée le 15 juin. Durant cette période, l'ISIE a enregistré 1 455 898 nouveaux électeurs sur une
estimation de 3,5 millions d'électeurs potentiels, portant ainsi le nombre total d'électeurs inscrits
aux élections législatives à 7 065 885. Parmi eux, 6 680 339 électeurs sont inscrits en Tunisie et
385 546 à l’étranger
.
17 ICCPR, Observation générale 25, « Le droit de participer aux affaires publiques, le droit de vote et le droit
d'accéder, avec égalité des chances, aux fonctions publiques », par. 11
18 PIDCP, Observation générale 25, par. 11
6










Page 161
Aucun intervenant n'a fait part d’inquiétudes concernant le registre des électeurs et son
exactitude aux observateurs du Centre Carter.
Education des électeurs
Le respect de l'obligation internationale du suffrage universel dépend en partie d'une éducation
effective des électeurs.
19 L’ISIE a poursuivi sa campagne d’éducation des électeurs limitée,
initiée lors des élections présidentielles, pour fournir des informations de base aux électeurs.
Plusieurs organisations de la société civile ont informé les observateurs du Centre Carter qu’il
n’y avait pas eu de campagne d'éducation électorale pour les élections législatives faute de
financement.
Au cours des campagnes présidentielle et législative, l'ISIE a distribué des tracts et des
autocollants afin de tenir les électeurs informés des dates des élections. En outre, plusieurs
vidéos ont été diffusées à la télévision et sur les réseaux sociaux, expliquant les étapes du scrutin
et rappelant aux électeurs les heures d’ouverture et de fermeture des bureaux et des centres de
vote. Pour les élections législatives, l'ISIE a mené une campagne de marketing de rue au cours de
laquelle plusieurs outils de sensibilisation ont été distribués (prospectus, affiches, autocollants,
bracelets, porte-clés).
L'ISIE ou les organisations de la société civile n'ont déployé aucun effort concerté pour
l'éducation des électeurs, sauf pendant le processus d'inscription des électeurs. Cela est dû en
partie au calendrier serré dans lequel se sont déroulées les élections et au manque de
financement.
Environnement de la campagne
Le pluralisme politique et un environnement de campagne ouvert permettant aux électeurs
d’opérer des choix réels sont des aspects cruciaux des élections démocratiques. Un traitement
équitable des candidats et des partis durant une élection est important pour garantir l’intégrité du
processus électoral démocratique. Un choix véritable de candidats, un environnement électoral
libre, une égalité des chances pour les candidats, et un environnement de campagne ouvert et
transparent sont tous des aspects critiques de la démocratie. Un traitement égal des candidats et
des partis est essentiels pour assurer l’intégrité du processus électoral démocratique.
20
La campagne pour les élections législatives a commencé le 14 septembre, jour du silence
électoral pour la campagne présidentielle et a duré 22 jours. La liberté d’expression et la liberté
de rassemblement sont respectées partout en Tunisie. Cependant, beaucoup de candidats, aussi
bien indépendants que ceux issus des partis, ont violé les restrictions sur la campagne anticipée.
21
A la suite du premier tour de l’élection présidentielle, la plupart des partis politiques établis ont
mis du temps pour lancer leurs campagnes pour les élections législatives, désireux d’évaluer
19 PIDCP, article 25
20 PIDCP, Article 25.
21 Article 154 sanctionne la campagne anticipée d’une amende de 5 000 à10 000 TND.
7










Page 162
leurs stratégies de campagne, alors que les listes indépendantes sont rapidement entrées en
campagne tirant profit de l’élan antisystème. Les partis établis ont réévalué leur stratégie basée
sur de grands rassemblements et des évènements publics, qui ne semblaient pas avoir influencé
les électeurs durant la campagne présidentielle. Les observateurs de longue durée du Centre
Carter ont rapporté que la plupart des partis ont décidé de mener des campagnes discrètes,
distribuant des prospectus et faisant du porte à porte pour les élections législatives.
Plusieurs partis ont informé la mission du Centre Carter qu’ils se focaliseraient sur les réseaux
sociaux pour atteindre les électeurs qui avaient soutenu le candidat présidentiel Saïed et qu’ils
allaient intensifier leurs activités traditionnelles de campagne dans les cinq jours précédant
l’élection. En général, les listes indépendantes et certains partis ont éprouvé des difficultés pour
financer leurs campagnes, compte tenu de la nouvelle loi sur le financement de campagne qui
fonctionne sur la base du remboursement plutôt que sur la base d’avances. La plupart ont utilisé
des fonds personnels pour financer leur campagne.
De nombreux interlocuteurs ont fait savoir aux observateurs du Centre Carter que la campagne
législative avait été éclipsée par la détention toujours en cours du candidat à l’élection
présidentielle Nabil Karoui et les effets que cette détention aurait sur le deuxième tour de
l’élection présidentielle. Les médias se sont presque exclusivement concentrés sur ce sujet et sur
les recours possibles contre les résultats sur la base du refus d’égalité des chances pour sa
campagne, compliquant la tâche des candidats aux législatives s’agissant de faire passer leurs
messages aux électeurs.
La chaîne Nessma TV, dont Nabil Karoui est l’un des copropriétaires, a été condamnée à quatre
amendes par la HAICA pour avoir diffusé des publicités politiques en faveur de son candidat et
de la propagande anti-Ennahdha. Les amendes ont augmenté progressivement pour chaque
violation, de 20 000 dinars tunisiens (7 000 dollars US) à 160 000 dinars (56 000 dollars US).
Comme ce fut le cas pour l’élection présidentielle, les candidats n’ont pas toujours respecté la
règle selon laquelle les instances électorales régionales (IRIE) doivent être tenues informées de
leurs activités de campagne 48 heures à l’avance, et beaucoup d’évènements n’ont pas non plus
eu lieu alors que les campagnes en avaient informé les IRIE. En outre, les candidats ont donné le
nom des lieux où leurs activités devaient se passer, sans préciser l’adresse, si bien qu’il était
difficile de trouver le lieu exact de leurs activités. Ainsi, il a été difficile pour les IRIE, les
observateurs de campagne de l’ISIE, et les observateurs de faire le suivi de tous les événements
de campagne.
Les observateurs de campagne des IRIE et de l’ISIE ont identifié des infractions mineures aux
règles de campagne. Ces infractions concernaient principalement la campagne anticipée, des
activités de campagne non-déclarées, l’affichage de posters en dehors des zones désignées ou
par-dessus les affiches de concurrents, et le recours à des enfants pour faire campagne. À ce jour,
selon les IRIE, aucune de ces infractions n’est assez grave pour influencer les résultats des
élections. En outre, les observateurs du Centre Carter n'ont pas fait mention d’utilisation de
ressources administratives au cours de la campagne, probablement de par la nature modeste des
activités de la campagne. Les candidates têtes de liste pour Qalb Tounes à Sfax 1 et à Sidi
8






Page 163
Bouzid ont signalé qu’elles avaient été victimes de violence verbale. Les candidates en question
ont choisi de ne pas porter plainte officiellement.
La télévision nationale en collaboration avec Munathara Intitiative a organisé trois débats entre
les listes de candidats. Les débats ont eu lieu le 30 Septembre, le 1
er et 2 octobre. 27 des 1 340
listes à l’échelle nationale ont participé.
22 Les participants ont été choisis par tirage au sort, dans
les quatre catégories décidées par une décision conjointe entre l’ISIE et la HAICA, basées sur le
nombre de circonscriptions dans lesquelles les partis ou coalitions avaient présenté des listes.
23
Les débats ont été plus interactifs que ceux de l’élection présidentielle, puisque les candidats
pouvaient s’interroger entre eux. Les trois principaux sujets ont été le développement,
l’économie et les questions sociales.
Al Badil, le parti de l’ancien chef du gouvernement Mehdi Jomaa, qui n’a pas été tiré au sort
pour participer a fait opposition au processus de débat sur la base de l’exigence légale que tous
les candidats doivent être traités sur un pied d’égalité en matière de couverture médiatique et
d’opportunités de campagne. Le tribunal de première instance de Tunis a rejeté l’opposition et
autorisé les débats.
Même si la constitution donne à l’assemblée plus de pouvoirs et d’autorité, la campagne
législative a été éclipsée par les résultats du premier tour de l’élection présidentielle et la
détention toujours en cours de Nabil Karoui. La campagne a été discrète, voire inexistante dans
certaines régions, menant à un manque de débat de fond sur les politiques ou les plateformes des
partis. L’attention des médias est restée focalisée sur les élections présidentielles.
Financement de la campagne
Il ne peut y avoir d’élections démocratiques sans des règles équitables pour le financement des
campagnes électorales. Selon les bonnes pratiques internationales la loi électorale doit
spécifiquement prévoir des dispositions sur la transparence des dons aux activités de campagne
des candidats, la présentation standardisée des comptes de campagne, des limites raisonnables
aux dépenses de campagne, des mécanismes permettant de soumettre des rapports régulièrement,
et des sanctions effectives et dissuasives.
24
La loi électorale décrit en détails les limites des dépenses et des dons et autorise le financement
privé et public. Le financement public est partagé de manière équitable sur la base du nombre
22 Neuf participants par débat.
23 L’accord appelle à une couverture médiatique qui soit proportionnelle au nombre de listes qu'un parti ou un
indépendant a dans le pays. La première catégorie comprenait ceux dont les listes étaient présentes dans 28 à 33
circonscriptions ; cette catégorie devait recevoir 30 à 40% de la couverture médiatique. La deuxième catégorie
comprenait ceux dont les listes étaient présentes dans 12 à 27 circonscriptions; ils devaient recevoir 20 à 30% de la
couverture médiatique. La troisième catégorie comprenait ceux dont les listes étaient présentes dans 2 à 11
circonscriptions ; ils devaient recevoir 20 à 30% de la couverture médiatique. Enfin, la quatrième catégorie
concernait les listes d’une circonscription; ils devraient obtenir 10% de la couverture médiatique.

24 Conseil de l’Europe (Comité des Ministres) Recommandations (2003)4, Article 3(b).
9








Page 164
d’électeurs au niveau de la circonscription ainsi que la densité démographique.25 Le plafond total
de dépenses de la campagne pour chaque liste a été établi à six fois le montant du financement
public. La loi interdit les contributions de sources étrangères ou donateurs anonymes, et des
entreprises et personnes morales. Cependant, à la différence des candidats présidentiels, les partis
politiques peuvent financer la campagne de leurs listes législatives.
Bien que les plafonds de financement de campagne aient été relevés après les élections de 2014,
ils demeurent relativement bas et oscillent entre 11 550 dollars US à Tozeur à 34 616 dollars US
à Sousse. Divers interlocuteurs ont considéré que les plafonds étaient trop bas pour mener une
campagne significative et efficace, ce qui encourage les listes à dépasser les plafonds et à ne pas
déclarer toutes leurs dépenses.
L’amendement de 2017 à la loi électorale interdit aux listes de candidats de recevoir des fonds
publics par avance. Les candidats recevront à la place un remboursement des dépenses après les
élections si leurs listes obtiennent au moins 3% des suffrages au niveau de la circonscription.
Cette pratique a soulevé des inquiétudes, puisque les fonds publics n’atteignent pas ainsi leur
objectif de garantir effectivement l’égalité des chances à tous les candidats.
Le système de financement de la campagne souffre d’un manque de transparence, puisqu’il
n’oblige pas à publier de rapports intérimaires. Il n’y a pas d’évaluation en temps réel du
financement et des dépenses, ce qui prive les électeurs d’informations importantes. En outre, le
processus légal n’est pas fait dans les délais, puisque des cas remontant à 2014 sont toujours en
attente.
Observation des réseaux sociaux
Les normes internationales électorales stipulent que chacun doit avoir droit à la liberté
d’expression ; ce droit devra inclure le droit de chercher, recevoir, et de communiquer des
informations et idées de toutes sortes
.26 La constitution tunisienne garantit la liberté d’opinion,
de pensée et d’expression, le droit d’accès à l’information et aux réseaux de communication.
27 À
ce jour, la Tunisie n’a pas de cadre juridique spécifique règlementant les réseaux sociaux.
Le monitoring effectué par le Centre Carter et portant sur les pages Facebook des partis et
coalitions présents dans les 33 circonscriptions et de candidats indépendants, ainsi que les pages
soutenant ces listes, a révélé que la plupart des listes utilisaient les réseaux sociaux comme
plateforme pour présenter leurs candidats, annoncer des événements de campagne, ou pour
appeler les électeurs à voter, plutôt que comme outil pour échanger avec les électeurs sur ces
25 Le plafond du financement public pour chaque liste candidate est calculé sur la base du nombre d’électeurs
inscrits dans la circonscription comme suit : 73 dinars tous les 1 000 électeurs jusqu’à 50 000 ; 50 dinars tous les
1 000 électeurs au-delà de 50 000 électeurs et jusqu’à 100 000 électeurs ; 42 dinars tous les 1000 électeurs au-delà
de 150 000 électeurs et jusqu’à 200 000, 36 dinars tous les 1 000 électeurs au-delà de 200 000 électeurs. Le montant
de la subvention augmente aussi selon la densité démographique de la circonscription.
26 PIDCP, Article 19; en outre l’Observation générale 25 du PIDCP spécifie que « les électeurs devraient pouvoir se
forger leur opinion en toute indépendance, sans être exposés à des violences ou à des menaces de violence, à la
contrainte, à des offres de gratification ou à toute intervention manipulatrice. »

27 Articles 31 et 32.
10








Page 165
questions.28 La plupart des listes observées ont partagé leurs programmes de campagne à travers
des vidéos, textes, ou photos sur les pages Facebook nationales et régionales, y compris les pages
de leurs branches situées à l’étranger. La majorité des listes observées par le Centre Carter ont
posté des publicités payantes sur leurs pages Facebook pendant la campagne.
29
Les observateurs de longue durée du Centre Carter ont signalé qu’à la suite des résultats de
l’élection présidentielle, les candidats et les partis avaient intensifié leurs efforts sur les réseaux
sociaux pour cibler les jeunes partisans de Kaïs Saïed. Cependant, les candidats ont montré des
niveaux variables d’activités et de professionnalisme dans leurs campagnes en ligne, en fonction
de leur stratégie, de leur analyse de l’électorat, des messages et des ressources financières.
Ich Tounsi a mené une campagne très structurée, avec des publications reprises sur les
différentes pages régionales de l’organisation, y compris les publicités payantes. Les autres
campagnes ont montré un moindre niveau de coordination entre les pages nationale et régionales,
publiant moins souvent, et publiant un contenu moins élaboré. Certaines publicités payantes ont
notamment été publiées par les pages Facebook de branches de partis politiques à l’étranger.
Avant même le lancement officiel de la campagne pour le deuxième tour des élections
présidentielles, le nombre de pages et de groupes soutenant ou s’opposant à l’un des deux
candidats présidentiels a augmenté, de même que le nombre de publications et d’interactions,
prenant le pas sur la campagne législative. A diverses reprises, le Centre Carter a observé des
listes partisanes ou indépendantes utiliser l’images et leur soutien affiché à l’un des candidats à
la présidentielle pour avancer leur propre campagne en ligne.
30
Des campagnes de dénigrement et des propos incendiaires ont été observés sur plusieurs pages
soutenant aussi bien des candidats à la présidentielle qu’aux législatives, même si les affiliations
de ces pages restent incertaines.
31 Certaines de ces publications ont été largement partagées en
ligne. Le Centre Carter n’est pas en mesure d’évaluer l’impact de telles publications sur le
processus électoral.
La candidate Olfa Terras, fondatrice de Ich Tounsi, a été la cible d’attaques répétées sur
Facebook, mettant en doute ses activités et celles de son mari.
28Al Badil, Amal Tounes, Courant Démocratique, Ennahdha, Parti Destourien Libre, Ich Tounsi, Nida Tounes, Parti
du Front Populaire, Qalb Tounes, Tahya Tounes.
29Al Badil, Amal Tounes, Courant Démocratique, Ennahdha, Parti Destourien Libre, Ich Tounsi, Parti du Front
Populaire , Qalb Tounes, Tahya Tounes..
30 Qalb Tounes, Al-Karama, Ennahdha, Tahya Tounes Sousse, Liste 31 Tunis-1. À la suite de la publication par Al-
Karama de photos montrant Kaïs Saïed et Seifeddine Makhlouf, un communiqué a été publié sur le site web de Kaïs
Saïed le 2 octobre, rappelant à tous que Saïed ne soutient aucune liste et que l’ISIE a été informée afin de pouvoir
prendre les mesures appropriées. L’ISIE a déclaré qu’elle examinerait ceci après les élections.
31 Entre autres, Olfa Teras, Kaïs Saïed, et le Parti Destourien Libre ont été ciblés par des campagnes de diffamation.
Certaines pages Facebook soutenant le candidat présidentiel Kaïs Saïed ont utilisé de manière répétée un langage
incendiaire appelant les partisans de Nabil Karoui des « infidèles », « homosexuels », « malfrats », ou des personnes
« corrompues ».
11








Page 166
Un autre élément provocateur est le documentaire diffusé sur le compte Facebook de la
plateforme online Sawaab Arraii du 27 au 29 septembre, dont la première partie a également été
diffusé par la chaîne TV saoudienne Al-Arabiya. Selon le documentaire, Ennahdha serait
impliqué dans l’assassinat des leaders d’opposition Chokri Belaid et Mohamed Brahmi en 2013 à
travers ses « services secret ».
32 Au total plus de 350 000 personnes ont regardé le documentaire
en ligne. Il a été largement partagé sur Facebook, y compris par les pages soutenant d’autres
partis en lice pour les élections. La représentante légale d’Ennahdha a annoncé sur Facebook que
le parti allait lancer des poursuites contre ceux qui avaient diffusé ce documentaire.
De faux sondages portant les logos d’instituts de sondages tunisiens existants ont aussi circulé
sur Facebook, pouvant potentiellement induire les électeurs en erreurs.
Vers la fin de la campagne, des documents non-authentifiés ont été publiés sur les réseaux
sociaux affirmant que Nabil Karoui, Olfa Terras et Ennahda avaient des contrats avec des
agences de lobbying pour renforcer leur position sur la scène politique nationale et obtenir un
soutien au niveau international. Après leur diffusion, des photos, vidéos et commentaires
affirmant l’existence de liens entre Nabil Karoui et un ancien membre des services secrets
israéliens, ainsi que des liens entre Ennahdha et le Qatar, sont devenus viraux et ont généré un
nombre important de commentaires critiques sur Facebook.
La majorité des partis observés par le Centre Carter ont violé la période de silence électoral, que
ce soit en publiant des publicités payantes ou en postant sur leurs pages Facebook, la veille de
l’élection et le dimanche électoral. Au moins deux partis, Qalb Tounes et Ennahdha, ont
entremêlé les campagnes législative et présidentielle. Ennahdha a posté en ligne des images
portant le portrait de Kaïs Saïed sur lesquelles on pouvait lire « votez pour Ennahdha pour
réaliser le programme de Kaïs Saïed ». Qalb Tounes a utilisé l’image de Nabil Karoui pour faire
la promotion de ses listes de candidats. En revanche, Ich Tounsi est la seule coalition qui a
présenté des listes dans toutes les circonscriptions, qui a retiré toutes les publicités payantes de
ses pages Facebook et n’a rien publié sur ses pages nationale et régionales durant la période de
silence électoral.
L’utilisation des réseaux sociaux a été plus intense et passionnée pendant la campagne
présidentielle qu’au cours de la campagne législative. Les réseaux sociaux sont restés focalisés
sur la course à la présidentielle et la détention toujours en cours de Nabil Karoui. Cela a renforcé
la polarisation politique et sociale déjà visible dans les résultats du premier tour des élections
présidentielles.
Observateurs nationaux et des candidats
32 “The Black Rooms" est un documentaire en trois parties. La première partie a été diffusée par la chaîne TV Al-
Arabiya. D’autres chaînes TV auraient refusé de diffuser le documentaire en raison de « circonstances
inappropriées ». Les deuxième et troisième parties ont été diffusées sur Internet (Facebook et YouTube) par la
plateforme Sawaab Arraii.
12










Page 167
L’observation citoyenne est une expression significative du droit des citoyens à prendre part aux
affaires publiques et à tenir le gouvernement responsable. Les sources du droit public
international reconnaissent le droit de participer à des organisations d’observation citoyenne et
de contribuer aux efforts d’éducation des électeurs.
33
La société civile a été active dans l’observation des différents aspects du processus électoral. Le
Centre Tunisien Méditerranéen (TU-MED) a concentré son observation sur la participation des
femmes dans les zones rurales dans sept circonscriptions. Son rapport conclut à une absence de
femmes durant la campagne même là où les têtes de listes étaient des femmes. Le jour des
élections TU-MED avait 70 observateurs.
Mourakiboun a déployé 4 000 observateurs le jour des élections pour un comptage parallèle des
voix et a créé une application sur laquelle les électeurs pouvaient obtenir des informations non
disponibles sur le site web de l’ISIE concernant le processus électoral, y compris le nombre
d’électeurs, le nombre de bureaux de vote, le nombre de sièges et les listes avec les noms des
candidats et les programmes des listes en lice dans chaque circonscription.
L’Association pour la transparence et l’intégrité des élections (ATIDE) a déployé 600
observateurs dans tout le pays et s’est concentrée sur l’observation des réseaux sociaux.
L’observatoire Chahed a déployé 1 000 observateurs, soit trois dans chaque municipalité.
Les observateurs de la société civile tout comme ceux des partis politiques ont pris une part
active à l’observation du processus électoral des élections législatives. L’ISIE a déclaré avoir
accrédité plus de 97 000 représentants de candidats, 17 500 observateurs de la société civile et
700 observateurs internationaux pour ces élections.
Règlement du contentieux électoral
Les procédures d’appel, et spécialement l’autorité et la responsabilité des différentes instances
impliquées, devraient être clairement règlementées par la loi afin d’éviter tout conflit de
juridiction positif ou négatif. En outre, le droit au recours doit être très largement reconnu, et
ouvert pour chaque électeur dans sa circonscription et pour chaque candidat se présentant à
l’élection.34 La garantie d'un recours rapide fait partie intégrante du principe de moyens de
recours effectif.
Malgré les courts délais alloués par la loi, le tribunal administratif a traité toutes les plaintes pré-
électorales et les appels en temps voulu. Le tribunal a fait preuve d’impartialité et d’un plein
respect de la procédure régulière dans ses décisions.
Bien que l’article 124 de la loi électorale permette aux représentants des candidats et aux
observateurs d’enregistrer des remarques sur le processus électoral dans les procès-verbaux des
33 EISA, Principes de gestion, de contrôle et d'observation des élections de la région de la SADC Région SADC,
p.19.
34 Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), le Code de bonne conduite en
matière électorale CDL-AD (2002) 23.
13








Page 168
bureaux de vote, la loi électorale n’autorise pas les électeurs à porter plainte concernant des
malversations ou des irrégularités, les privant ainsi de leur droit à un recours effectif.
35 Les
électeurs n'ont pas le droit de contester les résultats des élections auprès des tribunaux.
36
Pour les élections législatives, seuls quelques candidats ont déposé plainte auprès du tribunal de
première instance concernant des décisions de rejet de leurs listes de candidats. La plupart des
recours déposés au tribunal de première instance ont été rejetés. Seuls quatre ont entrainé la
révocation des décisions de l’IRIE. Un total de 18 appels a été déposé auprès des circuits d’appel
du tribunal administratif. Le tribunal administratif a confirmé les décisions de l'IRIE dans la
majorité des cas et en a rejeté trois.
37
Le tribunal de première instance n’a pas autorisé les observateurs du Centre Carter à observer en
entier le processus de résolution du contentieux des candidatures dans la majorité des cas.
38
Malgré plusieurs demandes officielles par écrit, les observateurs n’ont pas reçu les informations
sur ledit contentieux, n’ont pas été autorisés à assister aux audiences publiques, et n’ont pas non
plus reçu de copies des jugements finaux.
39
Dans le même ordre d’idée, l’ISIE a refusé de fournir à la mission du Centre les informations
concernant les différends électoraux et a refusé de partager les décisions par lesquelles elle a
invalidé des candidats à l’élection présidentielle. D’un autre côté, le tribunal administratif de
Tunis a permis au Centre d’assister à toutes les audiences et a occasionnellement fourni au
Centre certaines décisions, parfois avec un léger retard. Les audiences auxquelles le Centre a
assisté étaient méthodiques, et les parties ont eu l’opportunité de représenter leurs arguments.
Le processus de traitement du contentieux de l’ISIE demeure opaque. L’ISIE n’a pas partagé les
informations collectées par ses observateurs de campagne, ni déclaré publiquement comment elle
comptait résoudre les plaintes électorales. Les tribunaux n’ont pas publié les plaintes ou les
décisions dans les délais ; cependant ils ont fourni aux plaignants l’occasion d’être entendus et
ont pris des décisions dans les courts délais fixés.
Dimanche électoral
35 PIDCP, l’observation générale 25, para. 20 et La déclaration de l’Union africaine sur les principes régissant les
élections démocratiques en Afrique, Section IV, Article 7.
36 U.N., PIDCP, Article 2, et la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance Article 17 (2).
37 Trois décisions annulées comprenaient une liste dans la circonscription USA et reste de l’Europe, une dans la
circonscription du Monde Arabe et une dans la circonscription du Reste du Monde, et deux à Tunis.
38 Conformément à l’Article 7 du Règlement 9 de 2014 émis par l’ISIE sur les conditions et procédures pour
l’accréditation d’observateurs nationaux et étrangers pour les élections et referendums. Les observateurs nationaux
et étrangers ont le droit de « observer les différentes étapes du processus électoral concernant les candidatures ….. et
les différends électoraux ». L’Article 252 du Code des Procédures Civiles et Commerciales donne le droit à des
copies des décisions de justice a toute personne qui les demande.
39 Article 55 de la Loi 40 sur le tribunal Administratif de 1972 donne le droit pour obtenir des copies des décisions
de justice a toute personne qui les demande. Le Carter Center, a déposé de multiple demandes officielles auprès du
Conseil Supérieur de la Magistrature et les tribunaux administratifs.
14








Page 169
Le processus électoral est la pierre angulaire de l’obligation de fournir la libre expression de la
volonté du peuple à travers des élections honnêtes et périodiques.
40 La qualité des opérations de
vote le jour des élections est très importante pour déterminer si une élection s’est tenue en
conformité avec les obligations démocratiques. Tenir des élections à bulletin secret est une
obligation clé dans le droit international, et un moyen reconnu pour s’assurer que la volonté du
peuple s’exprime librement.
41
En ce qui concerne les élections présidentielles, l’ISIE a annoncé que 245 bureaux de vote dans
cinq circonscriptions (Kef, Kasserine, Jendouba, Gafsa et Sidi Bouzid) fonctionneraient selon
des horaires réduits le jour des élections, de 10h00 à 16h00 au lieu de 08h00 à 18h00. Ce
changement d’horaires de vote a touché approximativement 112 195 électeurs.
Ouverture et vote
Dans la totalité des 38 bureaux de vote observés par le Centre Carter, l’ouverture a été décrite
comme calme, bien organisée et professionnelle, avec 100% d’évaluations positives s’agissant de
l’application des procédures et de l’environnement électoral.
Les observateurs du Centre Carter ont évalué 392 bureaux de vote le jour des élections.
L’environnement général et l’application des procédures ont été évalués positivement en grande
majorité. Dans 11 bureaux de vote, les observateurs ont observé que des électeurs, des personnes
âgées en particulier, éprouvaient des difficultés à voter à cause du nombre de listes et de la taille
du bulletin de vote. Dans 99% des bureaux de vote visités, les électeurs ont pu voter en secret.
Les observateurs ont signalé que 49 bureaux de vote n’étaient pas accessibles aux personnes en
situation de handicap.
Des agents des partis étaient présents dans 373 des 392 bureaux de vote observés. Les
observateurs d’Ennahdha étaient présents dans 33% des bureaux de vote, ceux de Qalb Tounes
dans 19% et ceux de Tahya Tounes dans 9%. La présence d’observateurs représentant les listes
indépendantes a été observée dans 20% des bureaux de vote visités. Les observateurs de la
société civile étaient présents dans 168 des 392 bureaux de vote observés, le plus grand nombre
était issu de l’UGTT, dans 135 bureaux de vote et Mourakiboun dans 25 bureaux.
Fermeture et dépouillement
L’application des procédures et l’environnement électoral général ont été évalués comme très
bons ou raisonnables dans les 35 bureaux de vote observés pour la fermeture. Aucune équipe
d’observateurs n’a signalé de files d’attente à la fermeture des bureaux à 18h00.
40 PIDCP, articles 2, 25(a) et 9.
41 U.N., PIDCP, Article 25; Déclaration universelle des droits de l’homme, Article 23. EISA et le forum des
commissions électorales des pays membres de la
SADC, Principes de gestion, de contrôle et d'observation des
élections de la région de la SADC Région, p. 24.
15










Page 170
Au cours du dépouillement, l’application des procédures et l’environnement général ont été
évalués de manière positive dans l’ensemble des 35 bureaux de vote observés. Les observateurs
ont décrit le processus comme calme, professionnel et détaillé.
Tabulation
La tabulation est en cours. À ce jour, les observateurs du Centre Carter ont décrit le processus
comme efficace, organisé et détaillé. Dans certains centres de collecte, les observateurs étaient
trop loin pour observer convenablement le processus et n’ont pas été autorisés à interagir avec le
personnel électoral. Dans d’autres centres, les observateurs ont eu accès à l’ensemble du
processus et le personnel s’est montré coopératif s’agissant de répondre à leurs questions.
Contexte : Le Centre Carter a été accrédité par l’ISIE pour observer les élections et a déployé
plus de 90 observateurs qui ont visité 392 bureaux de vote individuels, ainsi que 27 centres de
dépouillement. La mission était conduite conjointement par Tana de Zulueta, ancienne
parlementaire italienne, et
Karen AbuZayd, commissaire de la Commission d’enquête
internationale Indépendante sur la République arabe syrienne. La délégation incluait des
ressortissants de plus de 30 pays.
Le Centre fonctionne en Tunisie depuis 2011. Il a observé les élections à l’Assemblée Nationale
Constituante de 2011, les élections présidentielle et législatives de 2014, ainsi que le processus
de rédaction de la constitution qui a culminé avec l’adoption de la constitution en janvier 2014.
Pour ces élections, le Centre Carter a déployé une équipe cadre en mai 2019. A la mi-juillet, le
Centre en collaboration avec l'Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique, a
déployé 16 observateurs de longue durée en Tunisie. L’équipe cadre et les observateurs à de
longue durée sont issus de 18 pays.
Le Centre restera en Tunisie pour observer le processus de compilation finale et la résolution du
contentieux électoral. Il observera aussi le deuxième tour des élections présidentielles le 13
octobre.
Les objectifs de la mission d’observation du Centre en Tunisie sont de fournir une évaluation
impartiale de la qualité générale du processus électoral, promouvoir un processus inclusif pour
tous les Tunisiens, et démontrer son soutien à la transition démocratique.
Le Centre Carter évalue le processus électoral tunisien par rapport à la constitution tunisienne, le
cadre légal électoral national, et les obligations dérivées des traités internationaux et des normes
internationales électorales. La mission d’observation du Centre est menée en conformité avec la
Déclaration de principes pour l'observation internationale des élections.
42
Le Centre souhaiterait remercier les autorités tunisiennes, les membres des partis politiques, les
membres de la société civile, les personnes, et les représentants de la communauté internationale
42 Déclaration de principes pour l'observation internationale d'élections a été commémorée le 27 Oct. 2005, aux
Nations Unies.
16











Page 171
qui ont généreusement offert leur temps et énergie pour faciliter les efforts du Centre pour
observer le processus des élections législatives.
17




Page 172
Communiqué de presse
Rapport du Centre Carter : les nouveaux représentants du peuple
doivent agir rapidement pour renforcer les institutions
démocratiques tunisiennes

TUNIS (8 Oct. 2019) - Dans une déclaration préliminaire publiée ce jour, le Centre Carter a félicité les
autorités électorales tunisiennes pour la bonne organisation des élections législatives et exprimé
également son inquiétude concernant le faible taux de participation et, perceptiblement, un manque de
confiance de la population en la capacité de l’assemblée parlementaire à réaliser les objectifs de la
révolution de 2011.
Le taux de participation de 41%, plus de 20 points en dessous de celui de 2014, reflète le mécontentement
de la population tunisienne face au peu d’accomplissements de l’assemblée sortante. Les partis et
candidats indépendants élus dimanche vont maintenant devoir mettre de côté leurs différends et agir
rapidement pour consolider les nouvelles institutions démocratiques tunisiennes, améliorer la situation
économique et renouveler la foi des citoyens dans le potentiel positif de la transition démocratique du
pays.
La mission d’observation du Centre Carter, forte de plus de 90 observateurs, a été menée par Tana de
Zulueta, une ancienne parlementaire italienne, et Karen AbuZayd, commissaire au sein de la Commission
indépendante d’enquête sur la République arabe syrienne. L’équipe d’observateurs, qui comprenait des
citoyens de plus de 30 pays, a visité 392 bureaux de vote et les 27 centres de collecte en Tunisie le jour
des élections. Les observateurs n’ont signalé que des irrégularités minimes dans un petit nombre des
bureaux de vote visités.
La déclaration du Centre Carter faite ce jour donne une évaluation préliminaire dont les
conclusions clés sont exposées ci-dessous. Divers aspects importants du processus électoral ne
sont pas encore parachevés, y compris la tabulation, l’annonce des résultats définitifs, et la
résolution des plaintes ou recours. CETTE DECLARATION NE CONSTITUE DONC PAS
L’EVALUATION DU PROCESSUS ELECTORAL DANS SON ENSEMBLE MAIS DOIT ETRE
CONSIDEREE PLUTOT COMME UNE EVALUATION PRELIMINAIRE PARTIELLE DES PHASES
DEJA TERMINEES. Le Centre fournira des évaluations ultérieures une fois le processus électoral
achevé.
Conclusions principales
Période pré-électorale : les résultats de l’élection présidentielle anticipée ont eu un effet notoire
sur les élections législatives du 6 octobre. Les candidats indépendants espéraient capitaliser sur
le sentiment anti-establishment qui avait attiré les électeurs au cours du premier tour de l’élection
présidentielle, alors que les partis avaient du mal à redynamiser leurs partisans et à encourager la
participation. D’un côté comme de l’autre, l’obligation s’est fait sentir de changer de stratégie de
campagne à la lumière du rejet par l'électorat du système politique et du passage de deux outsiders
1















Page 173
politiques au second tour. Kaïs Saïed, un indépendant qui a annoncé qu’il refuserait le financement
public et qu’il ne ferait pas campagne pour le deuxième tour, est arrivé en tête, et le magnat des
médias Nabil Karoui est arrivé deuxième.
Divers interlocuteurs ont signalé aux observateurs du Centre Carter que la campagne législative
avait été éclipsée par le maintien en détention de Nabil Karoui et l’effet que cette détention aurait
sur le deuxième tour de l’élection présidentielle. Les médias se sont presque exclusivement
concentrés sur ce sujet et sur les recours possibles contre les résultats sur la base du déni d’égalité
des chances pour faire campagne, ce qui a compliqué la tâche des candidats aux législatives, au
moment de faire passer leurs messages aux électeurs.
Cadre juridique : De même que pour l’élection présidentielle, les dispositions de campagne, y
compris celles sur l’utilisation de la publicité et des posters, et sur les plafonds de financement de
campagne sont restrictives et difficiles à respecter pour les candidats.
Administration électorale : L’ISIE n’a pas réussi à communiquer efficacement avec le public
concernant les questions électorales clés ou à publier les informations pertinentes sur son site
web. Après les élections présidentielles, l’ISIE a réalisé une évaluation sur deux jours. Sur la base
des informations des Instances Régionales Indépendantes pour les Elections (IRIE), il a été décidé
de combler les lacunes en termes de formation du personnel à l’application qui permet d’agréger
automatiquement les résultats au niveau des centres de collecte et sur les itinéraires utilisés par
les militaires pour collecter et livrer le matériel électoral aux centres. Ceci a amélioré le processus
de tabulation.
Enregistrement des candidats : L’enregistrement des candidats pour les élections législatives a
été fait par les IRIE entre le 22 et le 29 juillet. Le personnel des IRIE était bien préparé pour ce
processus, toutes les parties prenantes ont applaudi leur professionnalisme et leur travail assidu.
Un total de 1 506 listes de candidats, soit 1 341 listes en Tunisie et 165 listes à l’étranger, ont été
acceptées.
Environnement de la campagne : Dans le sillage du premier tour des élections présidentielles,
la plupart des partis politiques établis ont tardé à lancer leurs campagnes pour les élections
législatives, le temps d’évaluer leurs stratégies de campagne, alors que les listes indépendantes
entraient rapidement en campagne
pour tirer profit de la dynamique anti-système. Les
observateurs de longue durée du Centre Carter ont signalé que la plupart des partis ont décidé de
conduire des campagnes discrètes, en distribuant des dépliants et en faisant du porte-à-porte.
Financement de campagne : Bien que les plafonds de financement de la campagne électorale
pour les élections législatives aient été relevés depuis 2014, de nombreux acteurs estiment qu’ils
sont encore trop bas pour mener une campagne efficace. Les plafonds vont de 11 550 USD à
Tozeur à 34 616 USD à Sousse.
Résolution du contentieux électoral : Dans la majorité des cas, au niveau des circonscriptions,
les tribunaux de première instance n'ont pas autorisé les observateurs du Centre Carter à
observer pleinement le processus de traitement des recours liés aux élections. En dépit de
plusieurs demandes écrites officielles, les observateurs n’ont pas été informés des recours
électoraux, n’ont pas été autorisés à assister aux audiences publiques ni à obtenir des copies des
jugements.

Observation des réseaux sociaux : L’observation par le Centre Carter des pages Facebook
des partis ou des listes indépendantes, ainsi que de leurs pages de soutien, a révélé que la
majorité utilisait les réseaux sociaux comme plateforme pour présenter leurs candidats, annoncer
des événements de campagne ou pour appeler les électeurs à voter, plutôt que comme outil pour
2










Page 174
discuter avec les électeurs de certaines questions. Des campagnes de diffamation et des propos
incendiaires ont été observés sur plusieurs pages soutenant des candidats aux élections
présidentielles et législatives, bien que les affiliations de ces pages restent incertaines. La
majorité des partis observés par le Centre Carter ont violé la période de silence électoral en
publiant des publicités sponsorisées sur les pages du parti ou des pages de soutien le samedi et
le jour du scrutin.
Contexte
Le Centre Carter opère en Tunisie depuis 2011. Il a observé les élections de l'Assemblée nationale
constituante de 2011 et les élections présidentielles et législatives de 2014, ainsi que le processus
d'élaboration de la constitution qui a abouti à l'adoption de la constitution en janvier 2014.
Pour ces élections, le Centre Carter a déployé une équipe cadre en mai 2019. À la mi-juillet, le Centre -
en collaboration avec l'Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique - a déployé 16
observateurs de longue durée. L'équipe cadre et les observateurs de longue durée sont issus de 18 pays
différents.
Le Centre restera en Tunisie pour observer le processus final de tabulation et le règlement du contentieux
électoral. Il observera également le second tour de l'élection présidentielle le 13 octobre. Les objectifs de
la mission d'observation du Centre sont de fournir une évaluation impartiale de la qualité globale du
processus électoral, de promouvoir un processus inclusif pour tous les Tunisiens et de montrer son
soutien à la transition démocratique en Tunisie.
Le Centre Carter évalue le processus électoral tunisien par rapport à la constitution tunisienne, au cadre
juridique électoral national et aux obligations découlant des traités internationaux et des normes
électorales internationales. La mission d'observation du Centre est menée conformément à la Déclaration
de principes pour l'observation internationale d’élections.
Le Centre souhaite remercier les responsables tunisiens, les membres des partis politiques, les membres
de la société civile, les particuliers ainsi que les représentants de la communauté internationale qui ont
généreusement offert leur temps et leur énergie pour faciliter les efforts du Centre pour observer le
processus des élections législatives.
Contact :
Soyia Ellison soyia.ellison@cartercenter.org
Don Bisson +216 58 608 980 or don.bisson@cartercenter.org

Le Centre Carter
Promouvoir la paix, Combattre la maladie, Redonner l'espoir.
Organisation non gouvernementale à but non lucratif, le Centre Carter a contribué à améliorer la vie des
habitants de plus de 80 pays en résolvant les conflits, en faisant la promotion de la démocratie, des droits
de l’homme et des opportunités économiques, en prévenant les maladies et en améliorant les soins de
santé mentale. Le Centre Carter a été fondé en 1982 par l’ancien président américain Jimmy Carter et
l’ancienne première dame Rosalynn Carter, en partenariat avec l’Université Emory, afin de promouvoir la
paix et la santé dans le monde entier.
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3














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Déclaration préliminaire du Centre Carter sur le deuxième tour
de l’élection présidentielle en Tunisie

15 octobre 2019
Cette déclaration est préliminaire et ne couvre que certains aspects du processus électoral
jusqu’au 14 octobre. Elle ne couvre pas la tabulation finale, ni les délais pour le dépôt
d’éventuels recours. De ce fait, cette déclaration ne représente pas l’évaluation du processus
électoral dans son ensemble par le Centre, mais plutôt une évaluation préliminaire partielle
des phases complétées. Le Centre Carter publiera une ou plusieurs évaluations
supplémentaires dans la période post-électorale et à la fin du processus. Cette déclaration
doit être lue conjointement avec les déclarations préliminaires émises par Le Centre Carter
le 17 septembre après le premier tour de l’élection présidentielle et le 8 octobre après les
élections législatives. En outre, un rapport final complet assorti de recommandations sera
publié dans les semaines suivant la fin du processus électoral.
Énoncé des constatations préliminaires et conclusions
Le peuple tunisien a démontré son engagement profond dans le processus démocratique en
votant au cours de trois scrutins bien organisées en moins d’un mois ; l’élection présidentielle
le 15 septembre, des élections législatives le 6 octobre, et le deuxième tour de la présidentielle
le 13 octobre. Les trois élections se sont déroulées pacifiquement et dans l’ordre, enregistrant
uniquement quelques irrégularités mineures. Alors que le taux de participation aux élections
du 15 septembre et du 6 octobre était plus bas que lors des récentes élections, le taux de
participation a largement augmenté pour le deuxième tour du 13 octobre. Il convient de féliciter
les autorités électorales tunisiennes pour leur gestion des élections de 2019 dans un calendrier
resserré.
À de nombreux égards, les élections reflètent la désillusion du peuple tunisien face aux
institutions politiques et au système politique existants et l’impatience populaire devant
l’incapacité de l’état à apporter des améliorations économiques sensibles, à protéger les droits
fondamentaux des citoyens et à contrer la corruption à tous les niveaux. Les deux candidats
qui ont participé au deuxième tour sont perçus comme des outsiders : Nabil Karoui, un homme
d’affaires doté d’une grande chaîne de télévision et d’une organisation caritative nationale, et
Kaïs Saïed un spécialiste en droit constitutionnel indépendant sans histoire politique.
Bien que l’environnement général dans lequel s’est déroulée l’élection présidentielle ait été
largement ouvert et concurrentiel, avec 26 candidats au premier tour et un environnement de
campagne amplement ouvert, le processus a été affaibli par ce qui a semblé être un acte
répondant à des préoccupations politiques, le placement de Nabil Karoui en détention durant
la majeure partie du processus. Nabil Karoui est demeuré en détention pendant 47 jours et a été
libéré peu de temps avant le jour du scrutin.
Avec l’élection d’une assemblée plus diversifiée et un nouveau président politiquement
inexpérimenté, il est crucial que les responsables politiques tunisiens travaillent ensemble pour
apporter des solutions inclusives aux difficultés politiques et aux défis économiques du pays,
causes principales de la révolution de 2011.
1









Page 176
Les Tunisiens sont à juste titre fiers du rôle de catalyseur qu’ils ont joué dans le Printemps
arabe et fiers de continuer à être le flambeau de la démocratie dans la région. Afin de renforcer
leur démocratie, les nouveaux leaders tunisiens doivent prendre des mesures concrètes pour
montrer que
la démocratie devrait bénéficier au peuple plutôt qu’aux politiciens
individuellement.
Contexte politique
Kaïs Saïed et Nabil Karoui, deux outsiders politiques, ont terminé premier et second parmi les
26 candidats en lice lors du premier tour de l’élection présidentielle et sont passés au deuxième
tour. Kaïs Saïed est arrivé en tête avec 18,4 % des voix et Nabil Karoui deuxième à 15,58 %.
Plusieurs politiciens vétérans ont été éliminés, y compris le vice-président d’Ennahda et son
candidat officiel, Abdelfattah Mourou, qui s’est classé troisième avec 12,88 % des voix. Le
ministre de la défense Abdelkarim Zbidi, un indépendant qui a été soutenu par Nidaa Tounes
et Afek Tounes, est arrivé quatrième remportant 10,73 % des suffrages. Youssef Chahed, chef
du gouvernement actuel et président de Tahya Tounes, s’est classé cinquième avec 7,38 % des
voix.
Le passage de Kaïs Saïed et Nabil Karoui au deuxième tour reflète le rejet des électeurs des
partis politiques traditionnels tunisiens et laissait présager du résultat des élections législatives.
Les deux candidats étaient perçus comme antisystèmes et non-politiques. Kaïs Saïed est
professeur de droit constitutionnel, c’est un indépendant sans parti politique. Il a mené une
campagne non-traditionnelle, déclarant qu’il ne ferait pas campagne en personne puisque son
rival était en détention jusqu’à quelques jours avant le scrutin.
Nabil Karoui, co-propriétaire d’une chaîne de télévision importante et qui dirige une
organisation caritative, a formé son parti politique en juin 2019. Il fait objet d’une enquête
depuis 2016 pour des accusations d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent, mais n’avait
jamais été arrêté jusqu’au 23 août, juste avant le début de la campagne. Il est resté en détention
tout au long de la campagne du premier tour et des législatives, malgré plusieurs appels à sa
libération lancés par l’Instance supérieure indépendante pour les élections et la majorité de la
scène politique. Nabil Karoui a été libéré le 9 octobre, le jour de l’annonce des résultats
préliminaires des élections législatives, deux jours avant la fin de la campagne électorale
présidentielle.
Le calendrier de son arrestation et de sa libération, ajouté à une tentative par l’assemblée
d’adopter des amendements qui auraient effectivement empêché Nabil Karoui et son parti de
se présenter, ont donné l’impression à de nombreux acteurs du processus électoral que sa
détention était politiquement motivée.
Dans son jugement ordonnant la relaxe de M. Karoui, la cour de cassation a conclu que bien
qu’il ait fait appel de la décision gelant ses avoirs et lui interdisant de voyager, la cour d’appel
avait outrepassé son pouvoir et violé les exigences procédurales fondamentales en émettant un
mandat supplémentaire pour détention préventive même si le procureur n’en avait pas fait la
demande. De ce fait, la cour de cassation a conclu que la cour d’appel avait enfreint les droits
de Nabil Karoui et a déclaré le mandat nul et non-avenu.
Aucun candidat n’ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés lors du premier tour,
la constitution exige qu’un deuxième tour entre les deux candidats ayant reçu le plus grand
nombre de voix, se tienne au plus tard deux semaines après l’annonce du résultat final du
2








Page 177
premier tour. Après épuisement des recours juridiques, l’ISIE a annoncé le résultat final du
premier tour le 2 octobre et a programmé le deuxième tour pour le 13 octobre.
Selon les résultats préliminaires des élections législatives, Ennahda a remporté le plus grand
nombre de sièges, 52 sur un total de 217, en déclin constant, passant de 89 sièges en 2011 et
69 en 2014 à 52. Sa victoire est attribuée moins à sa popularité qu’à la division des partis
séculaires. Qalb Tounes, le parti de Nabil Karoui, est arrivé deuxième avec 38 sièges. Les
partisans du parti de Nabil Karoui sont décrits comme des citoyens marginalisés et apolitiques
qui pensent qu’il peut les aider économiquement à travers son association, Khalil Tounes. Il a
promu son image d’autodidacte susceptible d’aider la Tunisie.
Nidaa Tounes s’est pratiquement écroulé, en raison principalement de ses fractures continues
depuis 2014. Le parti n’a gagné que trois sièges. De plus, les différents partis issus de la division
de Nidaa Tounes ont obtenu soit peu de sièges (El Machrouu a remporté quatre sièges) soit
aucun siège (Amal Tounes). Tahya Tounes, le parti du chef du gouvernement, issu de la
division de Nidaa Tounes, a gagné 14 sièges, ce qui lui permet de former un bloc parlementaire.
Le Parti destourien libre d’Abir Moussi a beaucoup progressé, gagnant 17 sièges en 2019. Le
parti a été créé en 2013 avec l’intention de regrouper le Rassemblement constitutionnel
démocratique (RCD), parti de l’ancien régime. Il avait été interdit aux anciens membres du
RCD de se présenter aux élections pour l’Assemblée nationale constituante et le parti d’Abir
Moussi n’avait remporté aucun mandat à l’assemblée de 2014. Son discours extrême anti-
Ennahda et son éloge de la situation socio-économique sous le régime de Ben Ali, semblent
avoir attiré les électeurs nostalgiques de la stabilité passée du pays. Le Courant démocratique
de Mohamed Abbou a gagné 22 sièges, finissant troisième, alors qu’il n’avait remporté que
trois sièges en 2014.
Le scrutin législatif a aussi signé la montée de nouveaux acteurs politiques tels que le
mouvement El Karama, qui avait soutenu le candidat présidentiel Seif Eddine Makhlouf. Il
remporte 21 mandats. Le parti panarabe, Harakat Chaab, derrière le candidat Safi Said, a lui
gagné 16 sièges.
Les deux partis tiennent un discours agressif, anti-occidental. 16 partis
politiques, deux coalitions, et 14 indépendants sont maintenant représentés à l’assemblée, et
tous à l’exception de neuf partis politiques, sont nouveaux.
Cadre juridique
Selon les bonnes pratiques internationales, le cadre juridique d’une élection doit être
transparent et facilement accessible au public. Il doit également comprendre toutes les
composantes nécessaires d’un système électoral pour garantir des élections démocratiques.
1 Le
processus électoral est régi par la constitution de janvier 2014, la loi électorale de 2014, la loi
sur l'ISIE et la loi relative à la liberté de communication audiovisuelle, qui a créé la Haute
autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA). Le cadre juridique de
l’élection présidentielle est généralement conforme aux normes internationales et est demeuré
inchangé durant les deux tours de l’élection.
2
1 OSCE/ODIHR, Directives pour Revoir un Cadre Juridique pour les Elections, page 4.
2 Celles-ci comprennent : le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP); le Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels; la Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale (CERD); la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard
des femmes (CEDAW); la Convention contre la torture, les traitements inhumains ou dégradants (CAT); la
Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Charte africaine des droits de l'homme.
3








Page 178
L'article 52 de la loi électorale stipule que les campagnes électorales doivent respecter les
principes essentiels d'égalité des chances entre tous les candidats. L'article 3 de la loi sur l'ISIE
stipule que la commission doit garantir l'égalité de traitement entre les électeurs, les candidats
et toutes les parties prenantes.
3 Enfin, l'article 5 du décret sur la HAICA exige l’égalité des
chances dans l'exercice des droits et libertés de la communication audiovisuelle.
4 Cependant,
il n’existe pas de définition explicite de ce qu’est l’égalité des chances et de traitement, en vue
d’appliquer cette loi.
Les bonnes pratiques internationales et les sources juridiques internationales stipulent que tous
les partis et candidats devraient bénéficier de l’égalité des chances. L’état devrait être impartial
et appliquer la loi uniformément. L’égalité devrait être garantie pour les partis et les candidats,
et les autorités publiques devraient adopter une attitude neutre envers la campagne électorale
et la couverture médiatique.
5
Administration électorale
Selon les normes internationales, il devrait y avoir une autorité électorale indépendante et
impartiale, fonctionnant de manière transparente et professionnelle, afin de garantir aux
citoyens la possibilité de prendre part à de véritables élections démocratiques.6 La pratique des
États suggère que, lors de la planification des élections, un délai suffisant doit être assuré pour
mener à bien le processus électoral.
7 Selon la constitution tunisienne, l'Instance supérieure
indépendante pour les élections (ISIE) est l'organisme qui assure la règlementation, l'intégrité
et la transparence du processus électoral et en proclame les résultats.
8
Le Centre Carter tient à féliciter l’ISIE pour la tenue de trois scrutins bien organisés dans un
calendrier restreint. Les trois scrutins se sont déroulés sans incident majeur et l’ISIE a pris des
mesures pour améliorer le processus entre les scrutins.
L’ISIE qui est l’institution responsable d’assurer l’application de la loi électorale, a pris toutes
les mesures en son pouvoir pour s’assurer que Nabil Karoui bénéficierait de l’égalité des
chances. Elle a soulevé à plusieurs reprises la question auprès d’autres institutions
gouvernementales et des fonctionnaires et a demandé qu’il soit relâché afin de faire campagne.
L’institution n’avait pas l’autorité pour ordonner sa libération, elle ne pouvait pas non plus
forcer la justice à le faire.

Le président de l’ISIE, Nabil Baffoun, a annoncé à maintes reprises que l’ISIE avait fait tout
son possible pour garantir l’égalité des chances pour les deux candidats. Le 19 septembre, Nabil
Baffoun s’est entretenu avec le président par intérim Mohamed Ennaceur sur le besoin
d’assurer l’égalité des chances entre les candidats et a indiqué que l’ISIE avait déposé une
requête auprès du juge d’instruction chargé du dossier de Nabil Karoui pour demander sa
libération afin de lui permettre de faire campagne. Nabil Baffoun a déclaré à plusieurs reprises
3 Article 3 de la loi sur l’ISIE.
4 Article 5 du décret sur la HAICA.
5 Commission de Venise, CDL-PI (3016)006, Compilation concernant les médias et les élections, l’égalité des
chances, p.8.
6 CDH de l’ONU, Observation générale 25, par. 20
7 CDH de l’ONU, Observation générale 25, par. 20
8 Constitution tunisienne de 2014, Article 126.
4










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qu’il ne voyait pas comment il pouvait y avoir égalité des chances entre les candidats alors que
Nabil Karoui était toujours en détention.
9
Le 30 septembre, le conseil de l’ISIE a rencontré le candidat Saïed pour discuter de
l’environnement électoral du deuxième tour et, le 3 octobre, M. Baffoun a rendu visite à Nabil
Karoui en détention pour discuter de comment il pouvait bénéficier de l’égalité des chances
alors qu’il était détenu.
Après la libération de Nabil Karoui le 9 octobre, quatre jours avant le scrutin, Nabil Baffoun a
déclaré que la libération de Nabil Karoui allait dorénavant permettre l’égalité des chances entre
les deux candidats. Nabil Karoui a participé à un débat avec son concurrent et a effectué une
longue interview télévisée, similaire à celle accordée à son rival. Tout ceci lui a fourni une
opportunité limitée mais significative de toucher les électeurs.
L’ISIE a mené une campagne limitée d’éducation des électeurs, qui a apporté des informations
élémentaires. Sur la base des observations du Centre Carter, seul un nombre restreint
d’électeurs ayant voté le jour du scrutin semblaient manquer d’information ou de
compréhension des procédures.
Environnement de la campagne
Le pluralisme politique et un environnement de campagne ouvert permettant aux électeurs de
faire un véritable choix sont des aspects cruciaux des élections démocratiques. Le traitement
équitable des candidats et des partis durant une élection est important pour garantir l’intégrité
du processus électoral démocratique. Un choix véritable de candidats, un environnement
électoral libre, l’égalité des chances pour les candidats et un environnement de campagne
ouvert et transparent sont tous des aspects critiques de la démocratie. Le traitement égal des
candidats et des partis est essentiel pour assurer l’intégrité du processus électoral
démocratique.
10
La campagne pour le deuxième tour a officiellement démarré le 3 octobre, au lendemain de
l’annonce du résultat final du premier tour par l’ISIE. Kaïs Saïed a annoncé qu’il ne ferait pas
campagne personnellement puisque cela lui donnerait un avantage inéquitable sur son rival,
estimant que c’était une chose « éthique » à faire.
11 Cependant, à cause de la détention de Nabil
Karoui et la nouveauté de la campagne peu conventionnelle de Kaïs Saïed, les deux candidats
à la présidentielle sont constamment restés au cœur de l’actualité et la couverture médiatique
ne s’est jamais vraiment interrompue. Les partisans de Kaïs Saïed ont continué à faire
campagne pour lui sur le terrain et sur les réseaux sociaux.
Au cours des préparatifs pour le deuxième tour, les observateurs de longue durée du Centre
Carter n’ont signalé aucun évènement de campagne majeur pour l’un ou l’autre des candidats
en région. Cependant, les observateurs ont signalé que des volontaires distribuaient des
prospectus et menaient une campagne de porte-à-porte pour les deux candidats. La campagne
a majoritairement pris place sur les réseaux sociaux. Les partisans des deux candidats ont tenu
leurs réunions de clôture à Tunis le 11octobre sur l’Avenue Habib Bourguiba. Bien que les
deux groupes aient été mélangés, aucune altercation n’a été signalée.
9 Interview de Nabil Baffoun par la chaîne Sky News Arabic TV, 22 septembre 2019.
10 PIDCP, Article 25.
11 https://www.aljazeera.com/news/2019/10/tunisia-presidential-hopeful-halts-campaign-ethical-reasons-
191005143313410.html
5









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Nessma TV, la chaîne de télévision dont Nabil Karoui est le co-propriétaire, s’est vu imposer
des amendes à quatre reprises par la HAICA pour diffusion de publicité politique en faveur de
sa candidature et de la propagande anti-Ennahda. Les amendes ont progressivement augmenté
pour chaque infraction, allant de 20 000 DT (7 000 USD) à 320 000 DT (112 000 USD). Elle
s’est aussi vu imposer une amende pour publication de sondages d’opinion, ce qui est interdit
pendant la campagne.
Avant sa libération, les avocats de Nabil Karoui ont déposé une requête auprès du tribunal
administratif et de l’ISIE demandant le report de l’élection d’une semaine pour laisser à leur
client l’opportunité de faire campagne sur un pied d’égalité avec son concurrent. Le président
de l’ISIE, Nabil Baffoun, a annoncé le 2 octobre qu’une fois le résultat du premier tour finalisé,
l’ISIE avait une obligation constitutionnelle de terminer le processus électoral dans les délais
et n’avait pas autorité pour annuler ou reporter le second tour. Le tribunal administratif a rejeté
la requête, déclarant qu’il n’avait pas autorité pour déroger aux dispositions constitutionnelles
exigeant que le deuxième tour ait lieu dans un délai de deux semaines après l’annonce du
résultat final du premier tour.
Nabil Karoui a bénéficié d’une large couverture médiatique depuis sa libération le 9 octobre,
donnant par la suite plusieurs interviews médias. Le 11 octobre, la télévision publique a
organisé un débat historique entre Kaïs Saïed et Nabil Karoui. Les modérateurs ont choisi
quatre thèmes principaux pour le débat – défense et sécurité nationale, politique étrangère, la
relation du président avec l’assemblée et le chef du gouvernement, et les affaires publiques.
Pour chaque thème, ils ont demandé aux candidats de répondre à trois questions. Les candidats
avaient droit à un temps libre à la fin de chaque thème pour développer sur leurs promesses
électorales. Malgré les efforts des modérateurs pour encourager les candidats à interagir entre
eux, ils n’ont guère saisi cette opportunité.
Selon l’un des organisateurs du débat, The Munathara Initiative, près de 6.4 millions de
citoyens ont regardé le débat de vendredi, la plus large audience dans l’histoire de la télévision
tunisienne. En outre, au moins un million de personnes l’ont regardé en live streaming, tandis
que d’autres ont préféré la radio. Les téléspectateurs situés ailleurs dans les pays du monde
arabe sont également exclus de cette mesure d’audimat.
Financement de la campagne
Il ne peut y avoir d’élections démocratiques sans des règles équitables pour le financement des
campagnes électorales. Selon les bonnes pratiques internationales la loi électorale doit
spécifiquement prévoir des dispositions sur la transparence des dons aux activités de campagne
des candidats, la présentation standardisée des comptes de campagne, des limites raisonnables
aux dépenses de campagne, des mécanismes permettant de soumettre des rapports
régulièrement, et des sanctions effectives et dissuasives.
12
Selon le décret émis par le gouvernement, chaque candidat qui obtient un minimum de 3 % des
voix a le droit de recevoir 106 118 DT (38 000 USD) de financement public pour le deuxième
tour de la campagne présidentielle.
13 Kaïs Saïed avait déjà annoncé qu’il n’accepterait pas de
financement public.
12 Conseil de l’Europe (Comité des Ministres) Recommandations (2003)4, Article 3(b).
13 Décret n° 3038 du 29 août 2014 concernant les plafonds de dépenses pour la campagne électorale, le plafonds
pour le financement privé et le plafond pour le financement public et leurs conditions et les procédures pour les
élections présidentielles de 2014.
6








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L’ISIE a recruté 1 500 observateurs de campagne pour évaluer la campagne du second tour du
point de vue du respect des règles de campagne et du financement de campagne. Cependant,
l’ISIE n’a pas publié de statistiques ou d’informations sur leurs conclusions.
Le système de financement de la campagne souffre d’un manque de transparence, puisqu’il
n’oblige pas à publier de rapports intérimaires. L’absence d’exigence de reporting sur les dons
ou les dépenses de campagne fait qu’il est difficile pour les électeurs d’évaluer les sources de
financement des candidats ou les conflits d’intérêt potentiels avant de voter.
Observation des réseaux sociaux
Les normes internationales électorales stipulent que chacun doit avoir droit à la liberté
d’expression. Ce droit devra inclure le droit de chercher, recevoir, et de communiquer des
informations et idées de toutes sortes
.14 La constitution tunisienne garantit la liberté d’opinion,
de pensée et d’expression, le droit d’accès à l’information et aux réseaux de communication.
15
À ce jour, la Tunisie ne dispose pas de cadre juridique spécifique règlementant les réseaux
sociaux.
16
Le Centre Carter a observé les pages Facebook soutenant les deux candidats à la présidence ou
s’y opposant. Alors que Nabil Karoui avait une page officielle sur Facebook, Kaïs Saïed n’en
avait pas, il n’avait pas non plus déclaré de page officielle à l’ISIE comme requis.
17
La campagne en ligne de Nabil Karoui consistait en sa page Facebook, les pages de son parti,
Qalb Tounes et les pages soutenant aussi bien le candidat que le parti. Ceci a abouti à un
mélange de la campagne pour Nabil Karoui et de celle des candidats de son parti pour
l’assemblée.
18
En plus de souligner les activités de campagne, les pages soutenant Nabil Karoui étaient
largement focalisées sur sa détention et les appels pour sa libération ; dénigrant les autres partis
et figures politiques, y compris Ennahda, Ich Tounsi, et Kaïs Saïed et réfutant les rumeurs qui
avaient circulé sur les réseaux sociaux.
19 La page officielle de Nabil Karoui a eu recours à des
publications sponsorisées de manière continue depuis le premier tour.
Près de 55 pages Facebook observés par Le Centre Carter focalisaient explicitement sur le
soutien à Kaïs Saïed. Certaines pages soutenant Ennahda durant les élections législatives ont
14 PIDCP, article 19, en outre l’Observation Générale 25 au PIDCP spécifie que « les électeurs devraient pouvoir
se forger leur opinion en toute indépendance, sans être exposés à des violences ou des menaces de violence, à la
contrainte, à des offres de gratification ou à toute intervention manipulatrice ».
15 Articles 31 and 32.
16 La diffamation est passible d’emprisonnement selon le Code pénal, articles 245 à 248, et le Code de justice
militaire, article 91. Selon Human Rights Watch, au moins neuf bloggeurs ont fait l’objet d’une procédure pénale
depuis 2017 pour des commentaires sur les réseaux sociaux critiquant de hauts fonctionnaires.
17 La décision de l’ISIE 2019-22 du 22 août, exige que les candidats présentent une liste de leurs sites web, réseaux
électroniques et comptes réseaux sociaux qui seront utilisés au cours de la campagne.
18 La décision conjointe de l’ISIE et la HAICA (article 12) interdit aux médias de mélanger entre les programmes
pour les présidentielles et les législatives, et stipule que chaque programme doit être précédé par un symbole audio
ou visuel spécifique qui identifie l’élection à laquelle il est dédié.
19 Un nombre de publications ont été postées pour nier les rumeurs sur le retrait de Nabil Karoui ou l’annulation
de sa candidature, dans le cadre de la controverse sur le lobbying qui est devenue virale à quelques jours des
élections parlementaires législatives, selon laquelle Nabil Karoui était serait lié à un ancien membre des services
secrets israéliens.
7









Page 182
appelé leurs partisans à sortir pour voter pour Kaïs Saïed alors que d’autres se concentraient
sur l’opposition à Nabil Karoui.
Le nombre de pages et followers soutenant Kaïs Saïed a augmenté depuis le premier tour.20 Le
Centre a trouvé des groupes publics en ligne soutenant Kaïs Saïed sur Facebook ayant jusqu’à
200 000 membres. La source et les administrateurs de la plupart des pages soutenant Kaïs Saïed
manquent de clarté ; il est difficile d’identifier ses véritables partisans.
21 Un nombre limité de
pages soutenant Kaïs Saïed ont utilisé des publications sponsorisées ; leurs affiliations sont
aussi ambigües.
La campagne en ligne de Kaïs Saïed était composée de pages Facebook sans lien hiérarchique
ou relation directe avec le candidat. La plupart de ces pages n’affichaient pas d’affiliations
claires. Les pages soutenant Kaïs Saïed ont rassemblé un nombre largement plus important de
« followers » et de « likes », que les pages soutenant Nabil Karoui.
22
Le nombre de pages soutenant Nabil Karoui était limité par comparaison avec celles de Kaïs
Saïed, 55 pour Saïed et 20 pour Karoui. La campagne virtuelle de Nabil Karoui était structurée
autour de sa page Facebook officielle, celles de ses supporters et la page officielle de son parti,
Qalb Tounes, le contenu de ces pages était souvent partagé par les pages le soutenant.
Des campagnes de diffamation et des exemples de propos incendiaires ont été observés sur
plusieurs pages soutenant les deux candidats présidentiels.
23 Certains de ces posts ont été
largement partagés en ligne. Plusieurs fois, le candidat, Saïed s’est publiquement distancié des
posts incendiaires et a appelé ses militants de s’abstenir de poster de tels messages.
Pour lutter contre la désinformation, les Établissements de la radio et de la télévision tunisienne
(ERTT) avec l’agence Tunis-Afrique-Presse (TAP), ont lancé une plateforme en ligne le 6
octobre. La plateforme a été utilisée pour réfuter certaines des rumeurs virales qui se sont
propagées durant la campagne.
24
Généralement, l’utilisation des réseaux sociaux a été intense et passionnée au cours la
campagne présidentielle. Alors que les deux candidats ont adopté des stratégies différentes, un
grand nombre de pages administrées par des sources inconnues ou non-déclarées ont brouillé
les lignes de la campagne en ligne.

Observateurs nationaux et des candidats
L’observation citoyenne est une expression significative du droit des citoyens à prendre part
aux affaires publiques et à tenir le gouvernement responsable.
25 Les sources du droit public
20 Alors que le nombre de followers est passé a augmenté de plus de 750 ,000 au total sur les 55 pages soutenant
Kaïs Saïed observées par le Centre Carter, le nombre de followers sur les pages de Nabil Karoui a augmenté de
150 ,000 au cours de la même période sur les 20 pages observées par le Centre Carter.
21 L’un des Community managers de la campagne de Kaïs Saïed, a informé le Centre Carter que seules près de 18
pages Facebook étaient gérées par l’équipe de campagne de Kaïs Saïed.
22 Selon l’observation du Centre Carter, les pages soutenant Nabil Karoui avaient totalisaient 756 716 followers
et 754 201 likes alors que celles soutenant Kaïs Saïed affichaient 2 060 291 followers et 1 926 037 likes.
23 Certaines pages Facebook soutenant Kaïs Saïed ont utilisé un langage incendiaire de manière répétitive appelant
ceux qui s’oppposent à Kaïs Saïed des « infidèles », « homosexuels », « racaille » et gens « corrompus ».
24 http://factchecking.watania1.tn/
25 Déclaration des principes internationaux pour l’observation et la surveillance impartiale des élections par les
organisations citoyennes
8







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international reconnaissent le droit de participer à des organisations d’observation citoyenne et
de contribuer aux efforts d’éducation des électeurs.
26 La société civile a été active dans
l’observation des différents aspects du processus électoral
L’ISIE a accrédité approximativement 18 000 observateurs de la société civile pour les
élections présidentielles.
27 L’Union générale des travailleurs tunisiens a déployé près de 8 000
observateurs pour ces élections. La Ligue tunisienne pour les droits de l’homme (LTDH) a
déployé 150 observateurs durant la campagne électorale. La LTDH a surveillé les discours des
candidats s’agissant de rhétorique violente ou de violations des droits de l’homme.
Plusieurs organisations de la société civile ont publié des rapports sur leur observation de
sections spécifiques du processus électoral. Pour le deuxième tour de l’élection présidentielle,
la plupart des organisations de la société civile ont continué leurs activités d’observation dans
leurs domaines d’action respectifs. L’organisation citoyenne Mourakiboun a déployé quelques
3 000 observateurs le jour du scrutin et a mené un comptage parallèle des résultats. Le Centre
méditerranéen tunisien (TU-MED) a continué à évaluer la participation des femmes en milieu
rural dans sept circonscriptions. Le jour du scrutin, TU-MED a déployé près de 60
observateurs. L’Association pour la transparence et l’intégrité des élections (ATIDE) a déployé
600 observateurs dans le pays le jour du scrutin et a aussi observé les réseaux sociaux.
L’Observatoire Chahed a déployé 1 000 observateurs dans le pays, en plus de son observation
du contentieux électoral et des recours contre les résultats.
Globalement, la société civile tunisienne a joué un rôle actif dans l’observation du processus
électoral présidentiel, bien que moins intense que lors des élections législatives. Beaucoup
d’organisations ont souffert d’un manque de financement dû peut-être en partie au calendrier
serré des trois élections. Quelques 32 000 représentants de candidats ont été accrédités pour le
deuxième tour. Parmi eux, 19 000 ont évalué le processus pour Nabil Karoui et 13 000 pour
Kaïs Saïed.
Règlement du contentieux électoral
La garantie d’un recours rapide fait partie intégrante du principe de moyens de recours
efficace.
28 Les procédures d’appel, et spécialement l’autorité et la responsabilité des différentes
instances impliquées, devraient être clairement règlementées par la loi afin d’éviter tout conflit
de juridiction. En outre, le droit au recours doit être très largement reconnu, et ouvert pour
chaque électeur dans sa circonscription et pour chaque candidat se présentant à l’élection.
29
Les traités internationaux exigent que les jugements, les conclusions, et les preuves des
procédures judiciaires et les fondements juridiques du jugement soient être rendus publics dans
tous les cas.
30
L’ISIE a annoncé que ses observateurs ont signalé 657 infractions de campagne au cours du
premier tour de l’élection présidentielle. Près de 140 étaient des infractions graves, dont l’ISIE
a déclaré qu’elle les présenterait ministère public compètent au niveau de la circonscription
26 EISA, Principes de gestion, de contrôle et d'observation des élections de la région de la SADC Région SADC,
p.19.
27 Le nombre total de citoyens observateurs accrédités en 2014 pour les élections présidentielles était de 20,610.
28 PIDCP, article 2 : UA, AfCHPR Article 7
29 Para. 99 de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), Code de bonne
conduite en matière électorale,
CDL-AD (2002) 23.
30 U.N., PIDCP; Article 14(1) ; CoE, ECHR Article (6)(1).
9






Page 184
pour enquêter et prendre les mesures légales appropriées. Au moment de la présente
déclaration, l’ISIE n’avait pas publié les rapports des observateurs de campagne sur les
infractions électorales, ce qui a affecté la transparence du processus.
31
Le Centre Carter a observé les audiences pour les six recours déposés auprès du tribunal
administratif contre les résultats du premier tour de l’élection présidentielle. Tous les recours
ont été rejetés. Cinq cas ont été contestés à l’assemblée générale du tribunal administratif, tous
ont été rejetés.
Bien que les audiences se soient tenues de manière ordonnée et que les avocats aient eu
suffisamment de temps pour présenter leurs arguments, le délai alloué pour déposer et passer à
l’audience a été raccourci, afin de respecter les délais pour élire un nouveau président sous 90
jours après la mort de l’ancien Président Beji Caïd Essebsi.. Les avocats se sont plaints qu’il
était impossible de collecter suffisamment de preuves pour prouver au tribunal que les
violations avaient significativement affecté les résultats.
Dimanche électoral
Le processus électoral est la pierre angulaire de l’obligation de garantir la libre expression de
la volonté du peuple à travers des élections honnêtes et périodiques.
32 La qualité des opérations
de vote le jour des élections est très importante pour déterminer si une élection s’est tenue en
conformité avec les obligations démocratiques. Tenir des élections à bulletin secret est une
obligation clé en droit international, et un moyen reconnu pour s’assurer que la volonté du
peuple s’exprime librement.
33
Le dimanche électoral s’est déroulé sans incident et le personnel électoral maitrisait bien les
procédures. Les listes électorales étaient affichées dans la majorité de bureaux de vote visités.
L’agencement de presque la totalité des bureaux de vote protégeait le secret du vote. Le
personnel électoral a correctement scellé les urnes et vérifié les scellés. Le personnel électoral
a procédé à la fermeture des bureaux de vote à l’heure ; aucun électeur ne faisait la queue pour
voter. Les responsables ont donné lecture à voix haute des scellés placés sur les urnes, les
vérifiant par rapport aux procès verbaux officiels, avant de vider les urnes. Les présidents de
bureaux de vote ont lu chaque bulletin à voix haute et, dans tous les cas, les ont publiquement
montré aux observateurs et représentants de parti présents. Les observateurs du Centre Carter
ont noté une diminution de la présence de représentants de candidats et d’observateurs de la
société civile par comparaison aux élections législatives. Les responsables ont comparé le
nombre de bulletins utilisés au nombre total de bulletins reçus et notés ces chiffres dans les
procès verbaux officiels. Les procès verbaux ont été signés et affichés par les responsables à
l’entrée des bureaux de vote avant d’envoyer une copie sécurisée des minutes officielles au
centre d’agrégation.
Ouverture et vote
Les observateurs du Centre Carter ont qualifié le processus de professionnel et ordonné dans
les 30 bureaux de vote visités. L’évaluation générale de l’environnement électoral a été positive
dans 100 % des bureaux de vote observés et tous ont ouvert à l’heure. Des représentants des
31 U.N., PIDCP; art. 14(1); CoE, ECHR, art. (6)(1). U.N., PIDCP, art. 19(2); AU, Convention sur la Corruption,
art. 9; OAS, ACHR, art. 13(1); CoE, ECHR, art. 10(1); CIS, Convention sur les Droits Humains, art. 11(1).
32 PIDCP, articles 2, 25(a) et 9.
33 U.N., PIDCP, Article 25; Déclaration Universelle des Droits Humains, Article 23. EISA et Forum des
commissions électorales des pays de la
SADC, Principes de Gestion de suivi et d’Observation des Elections dans
la région de lau SADC, p. 24.
10







Page 185
candidats étaient présents dans 15 des 30 bureaux visités, alors que des observateurs citoyens
n’étaient présents que dans 11 bureaux.
Les observateurs du Centre Carter ont évalué les opérations de vote dans 337 bureaux de vote
durant le dimanche électoral. L’environnement général des élections et la mise en œuvre des
procédures a été évaluée positivement dans tous les bureaux visités. Les observateurs ont
rapporté que tout le matériel électoral était présent dans 100 % des bureaux visités ; que 86 %
des bureaux semblaient accessibles aux personnes à mobilité réduite et qu’aucun électeur
n’avait été indument autorisé à voter.
Parmi les 337 bureaux de vote visités, les observateurs du Centre Carter ont fait état
d’irrégularités mineures dans un petit nombre de bureaux de vote. Bien que de nombreux
électeurs ayant voté lors des élections législatives du 6 octobre, juste une semaine auparavant,
aient encore porté des traces d’encre sèche sur les doigts, les observateurs du Centre Carter
n’ont rapporté aucun exemple de vote multiple et ont noté que le personnel des bureaux de vote
vérifiaient les pièces d’identité des électeurs et s’assuraient que les électeurs signaient bien les
listes électorales dans tous les bureaux de vote.
Selon les rapports des bureaux de vote visités par les observateurs du Centre Carter, des
représentants des candidats étaient présents dans 67 % des bureaux de vote (227 sur 337) ;
47 % des bureaux (160/337) avaient des représentants du candidat Saïed tandis que 39 %
(130/337) avaient des représentants du candidat Karoui. Des observateurs de la société civile
étaient présents dans 48 % des bureaux (160/337), des observateurs de l’UGTT ont été observés
dans 27 % des bureaux (91/337), ceux de Mourakiboun dans 12 % (41/337) et ceux d’I Watch
dans 5 % (17/337). Les femmes présidaient 14 % des centres de vote (47/337) tandis que 44%
des bureaux de vote étaient présidés par des femmes (148/337).
Fermeture et dépouillement
La fermeture a été évaluée comme étant très bonne ou raisonnable dans 100 % des 30 bureaux
de vote observés. Tous les électeurs éligibles dans la file d’attente au moment de la fermeture
ont pu voter.
L’application des procédures et l’environnement électoral général ont été évalués comme très
bons ou raisonnables dans les 30 bureaux de vote observés. Les observateurs du Centre Carter
n’ont signalé aucune interférence par les représentants des candidats ou les citoyens
observateurs dans le processus de dépouillement. Aucune plainte officielle n’a été déposée
dans les bureaux de vote observés.
Tabulation
Les observateurs du Centre Carter ont estimé que la mise en œuvre des procédures et le
processus global de tabulation comme étant très bons ou raisonnables dans les 27 centres de
décompte. Les observateurs ont indiqué que l’accès au processus pour les observateurs
internationaux s’était nettement amélioré depuis le premier tour et les élections législatives.
Contexte : Le Centre Carter a été accrédité par l’ISIE pour observer les élections et a déployé
plus de 80 observateurs qui ont visité 337 bureaux de vote individuels, ainsi que les 27 centres
de tabulation. La mission était conduite par Salam Fayyad, ancien premier ministre de
l’Autorité Palestinienne, et incluait des ressortissants de plus de 30 pays.
11










Page 186
Le Centre est présent en Tunisie depuis 2011. Il a observé les élections à l’Assemblée Nationale
Constituante de 2011, les élections présidentielle et législatives de 2014, ainsi que le processus
de rédaction de la constitution qui a culminé avec l’adoption de la constitution en janvier 2014.
Pour les élections de 2019, Le Centre Carter a déployé une équipe cadre en mai 2019. À la mi-
juillet, le Centre en collaboration avec l'Institut électoral pour une démocratie durable en
Afrique, a déployé 16 observateurs de longue durée en Tunisie. L’équipe cadre et les
observateurs de longue durée sont issus de 18 pays. Le Centre restera en Tunisie pour observer
le processus de tabulation final et la résolution des conflits électoraux.
Les objectifs de la mission d’observation du Centre en Tunisie sont de fournir une évaluation
impartiale de la qualité générale du processus électoral, promouvoir un processus inclusif pour
tous les Tunisiens, et démontrer son soutien à la transition démocratique.
Le Centre Carter évalue le processus électoral tunisien par rapport à la constitution tunisienne,
le cadre légal électoral national, et les obligations dérivées des traités internationaux et des
normes internationales électorales. La mission d’observation du Centre est menée en
conformité avec la Déclaration de principes pour l'observation internationale des élections.
34
Le Centre souhaite remercier les autorités tunisiennes, les membres des partis politiques, les
membres de la société civile, les particuliers et les représentants de la communauté internationale
qui ont généreusement offert leur temps et énergie pour faciliter les efforts du Centre pour observer
le processus électoral.

34 La Déclaration de principes pour l'observation internationale d'élections a été commémorée le 27 octobre
2005 aux États-Unis. Elle est à présent approuvée par 55 organisations intergouvernementales et internationales
engagées dans le processus d'amélioration de l'observation internationale d'élections.

12






Page 187
Communiqué de presse
Le Centre Carter invite les nouveaux dirigeants tunisiens à
privilégier des approches inclusives pour relever les
principaux défis politiques et économiques
TUNIS (15 Oct. 2019) — Dans une déclaration préliminaire publiée ce jour, le Centre Carter félicite le
peuple tunisien et l’administration électorale pour la tenue et la réussite du cycle électoral de 2019 et leur
profond attachement au processus démocratique, qui a nécessité de se rendre trois fois aux urnes à la
suite en moins d’un mois.
Bien que l’environnement général dans lequel s’est déroulée l’élection présidentielle ait été largement
ouvert et concurrentiel, avec 26 candidats au premier tour et un environnement de campagne amplement
ouvert, le processus a été affaibli par un acte qui a semblé répondre à des préoccupations politiques, le
placement de Nabil Karoui en détention durant la majeure partie du processus. Le calendrier de sa
détention a soulevé des inquiétudes légitimes concernant le droit des candidats à l’égalité des chances.
Le taux de participation, faible lors des deux premiers scrutins, a largement augmenté pour le second tour
de la présidentielle. La campagne présidentielle a éclipsé les élections législatives, et ce malgré la
l’importance relative du parlement sur le pouvoir exécutif dans la nouvelle constitution tunisienne.
Après l’élection d’une assemblée très diversifiée et d’un nouveau président sans expérience politique, il
est crucial pour les dirigeants politiques tunisiens de former un gouvernement qui puisse aider à réaliser
les objectifs de la révolution et les aspirations du peuple tunisien. Les élus devront trouver une manière
de dépasser leurs différences politiques et idéologiques dans l’intérêt de la Tunisie et des Tunisiens. La
formation de la Cour constitutionnelle et autres instances indépendantes devrait être une priorité urgente
et devrait être basée sur un large consensus politique. En outre, le parlement et le président devraient
travailler en collaboration pour faire face aux défis économiques et politiques du pays, qui étaient la cause
profonde de la révolution de 2011.
Le Centre Carter a déployé une mission d’observation de plus de 80 membres, dirigée par Salam Fayyad,
ancien premier ministre de l’Autorité palestinienne. L’équipe d’observateurs, qui comprenait des citoyens
de plus de 30 pays, a visité 337bureaux de vote et les 27 centres de collecte en Tunisie le jour du scrutin.
Les observateurs ont signalé des irrégularités mineures dans un nombre restreint des bureaux de vote
qu’ils ont visités.
La déclaration du Centre Carter faite ce jour donne une évaluation préliminaire, dont les
principales conclusions sont soulignées ci-après. L’annonce du résultat final et la résolution des
litiges et recours restent encore à achever. La présente déclaration est donc l’évaluation
préliminaire du Centre mais ne constitue pas l’évaluation définitive du processus électoral dans
sa globalité. Le Centre Carter est susceptible de publier des évaluations ultérieures au cours de
la période post-électorale et à sa conclusion.
Conclusions principales
1














Page 188
Période pré-électorale : les deux candidats arrivés en tête au premier tour étaient perçus comme
des outsiders antisystèmes. Kaïs Saïed est un indépendant sans parti politique qui a mené une
campagne peu traditionnelle. Nabil Karoui, qui est co-propriétaire d’un grand média et gère une
organisation caritative, a créé un parti politique en juin 2019 peu avant les élections. Il a été arrêté
juste avant les élections et est resté en détention tout au long du processus, malgré les inquiétudes
soulevées par l’Instance Supérieure Indépendante pour les Elections (ISIE) et la majeure partie
de la classe politique, concernant l’impact de sa détention sur sa capacité à faire campagne. Il a
été libéré à deux jours de la fin de la campagne présidentielle. La question de l’égalité des chances
entre les deux candidats a dominé la période pré-électorale et la campagne.
Cadre juridique : L'article 52 de la loi électorale garantit l'égalité des chances pour tous les
candidats au cours de la campagne, même s'il ne définit pas le sens de « l'égalité des chances ».
Les bonnes pratiques et les sources interprétatives établissent que l'égalité des chances pour les
partis et les candidats doit être assurée et que les autorités publiques doivent rester neutres par
rapport à la campagne électorale et la couverture médiatique. Nabil Karoui a été libéré le 9 octobre
sur ordre de la Cour de cassation, qui a conclu que la cour d'appel avait abusé de son pouvoir et
violé les dispositions procédurales en ordonnant la détention préventive de Nabil Karoui. La cour
a déclaré que le mandat d'arrêt était nul et non avenu.
Administration électorale : Le Centre Carter tient à féliciter l’ISIE pour avoir administré de trois
scrutins bien organisés dans un calendrier serré. Les trois scrutins ont été conduits sans incident
majeur et l’ISIE a pris des mesures pour améliorer le processus entre les élections.
En tant qu'institution responsable d'assurer l'application de la loi électorale, l'ISIE a entrepris toutes
les étapes relevant de son autorité afin de s'assurer que Nabil Karoui puisse bénéficier de l'égalité
de chances. Elle a soulevé, de façon répétée, son inquiétude auprès des autres institutions
gouvernementales et des responsables et a demandé qu'il lui soit permis de faire campagne. L'ISIE
n'avait pas l'autorité d'ordonner sa libération, elle ne pouvait pas non plus obliger les autorités
judiciaires à le faire.
Environnement de la campagne : La campagne pour le deuxième tour a commencé
officiellement le 3 octobre, le jour suivant l'annonce des résultats définitifs du premier tour. Les
campagnes de second tour menées par les deux candidats sont restées minimales. La plus grande
partie de la campagne a eu lieu sur les réseaux sociaux. Nabil Karoui était en détention durant la
majeure partie de la période et Kaïs Saïed a conduit une campagne non-conventionnelle.
Toutefois, les deux candidats à la présidence sont constamment restés au cœur de l’actualité.
Kaïs Saïed a annoncé qu'il ne ferait pas campagne parce que son adversaire ne pouvait pas
faire campagne alors qu’il était en détention, déclarant que c'était éthiquement la chose à
faire. Cependant, ses supporters ont continué de faire campagne pour lui sur le terrain et sur
les réseaux sociaux. Durant la période précédant le deuxième tour, les observateurs de longue
durée du Carter Center n'ont signalé aucun événement de campagne important pour les deux
candidats en région. Cependant, les observateurs ont noté que des volontaires distribuaient
des prospectus et menaient une campagne de porte-à-porte pour chacun des deux candidats.
Les supporters des deux candidats ont tenu des meetings de clôture à Tunis le 11 octobre sur
l'Avenue Habib Bourguiba. Alors que les deux groupes se sont mêlés, aucune altercation n'a
été signalée.
Le dernier jour de la campagne, après la libération de Nabil Karoui, les deux candidats ont pris
part à un débat à la télévision nationale sur des thèmes tels que la défense et la sécurité nationale,
la politique étrangère, les relations du président avec l’assemblée et avec le chef du
gouvernement, les affaires publiques. Pour chaque sujet, les candidats ont été invités à répondre
2








Page 189
à trois questions. Malgré les efforts des modérateurs pour encourager les candidats à interagir, ils
s’en sont généralement abstenus. Ce débat, qui a été suivi par plus de six millions de
téléspectateurs tunisiens et dans des pays du monde arabe et au-delà, était une première dans le
monde arabe.
Résolution du contentieux électoral : Le décès de Beji Caïd Essebsi a réduit les délais pour les
élections présidentielles, raccourcissant ainsi le processus des recours et appels. De ce fait le
processus de résolution du contentieux électoral pour l’élection présidentielle a été marqué par les
plaintes des avocats selon lesquels il était impossible de rassembler suffisamment de preuves
pour démontrer au tribunal que toutes violations présumées avaient affecté les résultats de
manière significative.
Observation des réseaux sociaux : Le Centre Carter a observé les pages Facebook soutenant
et s’opposant aux deux candidats à la présidence. Seul Nabil Karoui avait une page officielle sur
Facebook, qu’il a utilisé pour faire sa campagne. Les pages de son parti politique, Qalb Tounes et
des pages qui n’étaient pas affiliées à la campagne officielle ont aussi soutenu le candidat et le
parti. Bien que Kaïs Saïed n’ait pas de page Facebook officielle, sa candidature a été soutenue
par de multiples pages sans affiliation, avec lesquelles il a nié avoir la moindre connexion.
Certaines de ces pages ont diffusé des rumeurs concernant les efforts de son rival de porter
atteinte à l’intégrité du scrutin. Des exemples de discours haineux ont aussi été signalés. La page
officielle de Nabil Karoui a publié des publicités sponsorisées depuis le premier tour.
À l’avenir, le parlement devra réfléchir à une manière de règlementer les dépenses de campagne
sur les réseaux sociaux, pour plus de transparence et d’équité dans les processus de campagne.
Contexte
Le Centre Carter opère en Tunisie depuis 2011. Il a observé les élections de l'Assemblée
nationale constituante de 2011 et les élections présidentielle et législatives de 2014, ainsi que le
processus d'élaboration de la constitution qui a abouti à l'adoption de la constitution en janvier
2014.
Pour ces élections, le Centre Carter a déployé une équipe cadre en mai 2019. À la mi-juillet, le
Centre, en collaboration avec l'Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique, a déployé
16 observateurs de longue durée. L'équipe cadre et les observateurs de longue durée sont issus
de 18 pays.
Le Centre restera en Tunisie pour observer le processus final de compilation et le règlement du
contentieux électoral. Les objectifs de la mission d'observation du Centre sont de fournir une
évaluation impartiale de la qualité globale du processus électoral, de promouvoir un processus
inclusif pour tous les Tunisiens et de montrer son soutien à la transition démocratique en Tunisie.
Le Centre Carter évalue le processus électoral tunisien par rapport à la constitution tunisienne, au
cadre juridique électoral national et aux obligations découlant des traités internationaux et des
normes électorales internationales. La mission d'observation du Centre est menée conformément
à la Déclaration de principes pour l'observation internationale d’élections.
Le Centre souhaite remercier les responsables tunisiens, les membres des partis politiques, les
membres de la société civile, les particuliers ainsi que les représentants de la communauté
internationale qui ont généreusement offert leur temps et leur énergie pour faciliter les efforts du
Centre pour observer le processus électoral.
3












Page 190
Contact :
Soyia Ellison soyia.ellison@cartercenter.org
Don Bisson +216 21 76 82 08 ou don.bisson@cartercenter.org

Le Centre Carter
Promouvoir la paix, Combattre la maladie, Redonner l'espoir.
Organisation non gouvernementale à but non lucratif, le Centre Carter a contribué à améliorer la vie des
habitants de plus de 80 pays par la résolution de conflits, la promotion de la démocratie, des droits de
l’homme et des opportunités économiques, la prévention des maladies et l’amélioration des soins de santé
mentale. Le Centre Carter a été fondé en 1982 par l’ancien président américain Jimmy Carter et l’ancienne
première dame Rosalynn Carter, en partenariat avec l’Université Emory, afin de promouvoir la paix et la
santé dans le monde.
Visitez notre site Web CarterCenter.org | Suivez-nous sur Twitter @CarterCenter | Suivez nous sur
instagram @thecartercenter | Aimez-nous sur Facebook Facebook.com/CarterCenter | Regardez-nous
sur YouTube YouTube.com/CarterCenter
4






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Le Centre Carter félicite la Tunisie pour la réussite du processus électoral de 2019
Le Centre Carter félicite les autorités tunisiennes et son peuple pour la réussite du processus
électoral de 2019. Les autorités électorales, les organisations de la société civile et les partis
politiques ont déployé des efforts concertés pour préparer et mettre en œuvre le cycle électoral de
2019, ce qui s'est traduit par des scrutins compétitifs qui ont été réalisés de manière efficace. Bien
que l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) ait été confrontée au défi
supplémentaire d'un calendrier serré pour les élections en raison du décès du président en exercice,
elle a mené un processus électoral crédible pour les trois élections. Avec l'investiture du nouveau
président de la République le 23 octobre et l'assermentation du nouveau parlement le 13 novembre,
la Tunisie a donné l'exemple à la région et au monde dans la conduite d'une transition démocratique
pacifique.
Le 15 novembre, le président de la République Kais Saied a chargé Habib Jemli, un indépendant
désigné par Ennahdha, le parti ayant le plus grand nombre de sièges au sein de l’Assemblée des
Représentants du Peuple, de former un gouvernement. En vertu de la constitution, le chef du
Gouvernement désigné dispose d'un délai d'un mois renouvelable une seule fois pour former un
gouvernement. Jemli n'a pas réussi à former un gouvernement au cours du premier mois et a
informé le président de la République qu'il aurait besoin d'un délai supplémentaire comme le
permet la constitution, prolongeant la période de formation du gouvernement au 15 janvier 2020.
Compte tenu de l’élection d'un parlement marqué par la diversité politique et dans lequel aucun
parti n'a suffisamment de sièges pour former un gouvernement à lui seul, il devient primordial pour
les dirigeants politiques tunisiens d'agir rapidement afin de former un gouvernement. Les élus
doivent trouver un terrain d'entente, mettre de côté leurs divergences politiques et idéologiques et
trouver des solutions inclusives aux défis politiques et économiques difficiles du pays qui ont été
à l'origine de la révolution tunisienne de 2011. En outre, le nouveau parlement et le nouveau
gouvernement doivent former rapidement la Cour constitutionnelle et d’autres instances
constitutionnelles indépendantes, y compris le remplacement des trois membres de l'ISIE dont les
mandats expirent en janvier.
Au moment de la publication des déclarations préliminaires du Centre Carter sur les élections
présidentielles et parlementaires, la tabulation était encore en cours et le processus du contentieux
électoral n’était pas encore achevé. Au terme du processus électoral, la mission internationale
d'observation des élections du Centre Carter a constaté que les processus de tabulation se sont
progressivement améliorés d'une élection à l'autre et que les processus des contentieux électoraux
se sont déroulés dans les délais autorisés par la loi. Bien que les audiences du tribunal administratif
se soient déroulées de manière ordonnée et que les parties aient eu la possibilité de présenter leurs

 
 




Page 192
dossiers, les délais très courts n'ont pas permis aux avocats de prendre le temps nécessaire pour
préparer ou présenter leurs recours. Ceci a nui à la capacité des parties à étayer leurs plaintes par
des éléments de preuve et des arguments juridiques crédibles, et à intenter un recours juridique
effectif.
Le processus de tabulation
Selon les obligations internationales, le dépouillement doit être transparent et observable. Les
bonnes pratiques internationales prévoient que les observateurs, les représentants des candidats et
les médias doivent être autorisés à être présents et à avoir accès aux archives; les résultats doivent
être transmis au niveau supérieur de manière ouverte.
1
Tout au long du cycle électoral, les observateurs du Centre Carter ont noté que les centres de
tabulation différaient les uns des autres en matière de procédures de réception du matériel, de
recomptage et d'accès accordé aux observateurs. L'incapacité de l'ISIE à adopter une
réglementation détaillée sur les procédures de tabulation était en partie responsable de ces
incohérences.
Cependant, après le premier tour de l'élection présidentielle, l'ISIE a effectué une évaluation de
deux jours pour les présidents, les coordinateurs, les responsables juridiques et les administrateurs
des 33 IRIEs et a remédié à plusieurs lacunes. Le personnel a reçu une formation supplémentaire
sur l'utilisation d'une application logicielle qui calcule automatiquement les résultats au niveau du
centre de tabulation. L'armée a également modifié les itinéraires utilisés pour collecter et livrer le
matériel électoral aux centres de tabulation.
Avec ces changements, le processus de tabulation du second tour des présidentielles s'est déroulé
de manière plus efficace et transparente que lors des deux élections précédentes. Les centres de
tabulation ont reçu le matériel électoral des centres de vote plus rapidement et, par conséquent, ont
pu compiler les résultats plus rapidement. Les observateurs internationaux ont bénéficié d’un accès
plus large au processus et ont pu effectuer une observation significative du processus dans la
plupart des centres de tabulation.
Contentieux électoral
La garantie d'un recours rapide fait partie intégrante du principe de moyens de recours utile.2 Les
procédures de recours, et notamment les pouvoirs et responsabilités des différents organes qui y
sont impliqués, devraient être clairement réglementés par la loi afin d'éviter tout conflit de
compétence. En outre, le droit de former de tels recours doit être reconnu très largement, et être
ouvert à tout électeur dans la circonscription et à tout candidat qui se présente aux élections.
3 Les
traités internationaux exigent que le jugement, les conclusions, les preuves des procédures
judiciaires et les arguments juridiques du jugement soient rendus publics dans tous les cas.
4
1 CdE (Commission de Venise), Code de bonne conduite, Sec. 1.3.2.xiii et xiv.
2 ONU, Article 2 du PIDCP ; UA, CAfDHP, article 7.
3 Para. 99 de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), Code de bonne
conduite en matière électorale, CDL-AD (2002) 23.
4 ONU, Article Article 14 du PIDCP ; (1) ; CdE, CEDH Article (6)(1).






 
Page 193
Élection présidentielle. En raison du décès du président de la République avant la fin de son
mandat, l’Assemblée des Représentants du Peuple a raccourci les délais légaux de recours afin
d'élire un nouveau président dans le délai constitutionnel de 90 jours. Les délais raccourcis ont fait
craindre à différentes parties prenantes que les candidats et leurs représentants légaux ne soient
pas en mesure de recueillir les preuves nécessaires pour démontrer qu'une quelconque violation
présumée aurait pu influencer de manière substantielle les résultats des élections, comme l'exige
la loi. Ces préoccupations étaient en effet fondées, car le délai raccourci a contribué à un nombre
élevé de rejets des recours pour des motifs procéduraux, bien que la loi exige que les recours soient
déposées par un avocat autorisé à exercer à la Cour de cassation (et par conséquent, ayant au moins
10 ans d'expérience). Les chambres d'appel et l'Assemblée plénière du Tribunal Administratif ont
rejeté la majorité des dossiers pour vice de procédure, ne permettant pas de corrections de
documents et appliquant strictement les règles de procédure.
Après l'annonce des résultats préliminaires du premier tour de l'élection présidentielle, les
chambres d'appel du Tribunal Administratif ont reçu six recours. La plupart ont contesté le fait que
l'ISIE n'avait pas sanctionné les candidats qui avaient commis des violations lors de la campagne.5
Les six requêtes ont été rejetées. Cinq demandeurs ont interjeté appel devant l'Assemblée plénière
du Tribunal Administratif, qui a rejeté à son tour les appels. Bien que les audiences du tribunal se
soient déroulées de manière ordonnée et que les parties aient eu la possibilité de présenter leurs
requêtes, le calendrier n'a pas permis aux avocats de prendre le temps nécessaire pour préparer
leurs recours, ce qui a nui à la capacité des parties à étayer leurs recours par des éléments de preuve
et des arguments juridiques crédibles. Aucun recours n'a été déposé contre les résultats du second
tour des élections présidentielles.
Élections législatives. L'ISIE a annoncé les résultats préliminaires des élections législatives le 9
octobre. Le Tribunal Administratif a reçu 102 recours au sujet des résultats préliminaires. Même
si le nombre de recours est faible compte tenu du nombre total des listes candidates en lice aux
élections (1 506), il a créé une pression considérable sur le Tribunal Administratif. Afin de
respecter le court délai pour statuer sur les recours, le Tribunal a tenu environ 75 audiences en une
seule journée - le 17 octobre - soulevant des préoccupations quant à la procédure établie.
6
Les avocats devant le tribunal ont exprimé un malaise général quant aux procédures adoptées pour
les audiences. Les affaires entendues ont d'abord disposé de suffisamment de temps pour défendre
leurs recours oralement. Cependant, en raison du volume élevé de dossiers, le Tribunal a nettement
limité le temps dont les avocats disposaient pour défendre leurs requêtes à mesure que la journée
se déroulait. Cela a obligé les avocats à ajuster leurs arguments. Par conséquent, la plupart des
audiences ont porté sur la question de savoir si les recours satisfaisaient ou non les exigences
procédurales plutôt que sur le fond. Le grand nombre d'affaires a également entraîné des retards
dans la notification des décisions par le tribunal à certains demandeurs/requérants.
5 En vertu de l'article 143 de la loi électorale, l'ISIE peut annuler en partie ou en totalité les résultats électoraux avant
d'annoncer les résultats préliminaires s’il s’avère que les violations de la campagne ont affecté les résultats des
élections de « manière substantielle et déterminante »
 
6 Le tribunal administratif de Montplaisir, où les audiences ont eu lieu, ne dispose que d'une seule salle d'audience.
Compte tenu du volume important de recours, les différents circuits judiciaires se sont relayés pour les audiences qui
ont duré de 8h30 à 20h30.




 
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Alors que le Parlement a raccourci les délais pour respecter le délai constitutionnel de 90 jours
pour élire un nouveau président, les délais, associés à l'application rigide des procédures, ont limité
le droit des candidats à la présidence et au Parlement d'intenter un recours efficace.
Annonce des résultats et développements post-électoraux
Avant l'annonce des résultats préliminaires, le conseil de l'ISIE se réunit après chaque élection
pour examiner si les violations de la campagne signalées avaient eu un impact substantiel sur les
résultats comptabilisés dans les 33 IRIEs. L'ISIE a déployé quelque 1 500 moniteurs dans les 33
circonscriptions pour évaluer et signaler les violations
7. L'ISIE a annoncé les résultats définitifs du
deuxième tour de l'élection présidentielle le 17 octobre sans apporter de modifications aux résultats
préliminaires sur la base des violations signalées. Kais Saied a remporté l'élection présidentielle
avec une majorité absolue de 72,71% des suffrages exprimés (2 777 931 voix), et Nabil Karoui est
arrivé deuxième avec 27,29% des suffrages exprimés (1 042 894 voix)
8. Karoui a par la suite
accepté le résultat et a félicité le nouveau président.
Pour l'élection législative, l'ISIE a annoncé que plusieurs violations de campagne signalées avaient
eu un impact sur les résultats dans les circonscriptions où les écarts du nombre de voix entre les
listes étaient faibles. Elle a modifié les résultats dans deux circonscriptions, France2 et Ben Arous,
en exerçant le pouvoir qui lui est conféré en vertu de l'article 143 de la loi électorale.
9
Dans la circonscription France 2, l'ISIE a retiré un siège à la coalition 'Ich Tounsi et l'a attribué au
Courant démocratique, après avoir affirmé qu'une annonce sponsorisée diffusée par 'Ich Tounsi
sur sa page Web officielle s’est faite en violation de l'article 57 de la loi électorale interdisant la
publicité politique. L'ISIE a averti le parti pendant la campagne que l'annonce avait violé le
règlement, mais le parti ne l'a pas pour autant supprimée. Bien que d’autres notifications similaires
aient été envoyées aux candidats pendant la campagne, l’ISIE a déclaré qu’elle ne sanctionnait que
'Ich Tounsi car l'écart des voix entre les deux listes candidates aux élections était faible et a été
influencé par les violations constatées.
A Ben Arous, selon le rapport de la HAICA, le tête de la liste du parti Al Rahma a passé 67 heures
et 19 minutes pendant la période électorale à faire campagne à la radio Quran, en dépassement des
limites légales. L’ISIE a annulé le siège du parti et l’a attribué au Mouvement Echaab, qui est
arrivé en deuxième position.
10
7 En vertu de l'article 143 de la loi électorale, l'ISIE vérifie « le respect des dispositions relatives à la période électorale
et à son financement ». Elle doit décider de l'annulation partielle ou totale des résultats s'il s’avère que les violations
de ces dispositions ont affecté les résultats des élections de manière substantielle et déterminante. Ses décisions doivent
être motivées. Dans ce cas, les résultats des élections législatives, municipales ou régionales sont recomptés, quels
que soient les suffrages exprimés. Pour l'élection présidentielle, seuls les candidats sont reclassés sans recomptage de
résultats.
8 Décision 29 de l’ISIE en date du 17 octobre 2019, relative à l’annonce des résultats définitifs du second tour.
9 Dans la circonscription France 2, ‘Ich Tounsi a obtenu 892 voix contre 772 voix pour le Courant Démocratique, soit
une différence de 120 voix. L’ISIE a retiré 207 voix à ’Ich Tounsi sans fournir d’explication sur la façon par laquelle
ce chiffre a été calculé. Pour Ben Arous, le parti Al Rahma a obtenu 12 482 voix et le Mouvement Echaab 4 576 voix.
L'ISIE a annulé toutes les voix du parti Al Rahma dans les résultats préliminaires.
10 L’ISIE a rendu sa décision d'annuler le siège le 6 octobre 2019.





 
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Le Tribunal Administratif a annulé la décision de l'ISIE d'annuler le siège du parti Al Rahma à
Ben Arous et a confirmé la décision de l'ISIE dans la circonscription de France 2. Étant donné que
l'Assemblée plénière du Tribunal administratif n'avait pas encore rendu public ses décisions écrites
au moment de la rédaction de cette déclaration, la base de ses jugements dans ces affaires n'est pas
connue. La loi électorale, qui donne à l'ISIE le pouvoir d'annuler les résultats avant l'annonce des
résultats préliminaires et la phase des recours, est vague quant aux critères que l'ISIE devrait
appliquer pour déterminer si une violation spécifique a effectivement affecté les résultats. De
même, l'ISIE n'a ni fourni des informations sur les violations constatées par ses observateurs
pendant la campagne, ni sur la manière par laquelle elle a déterminé si les violations signalées
avaient affecté les résultats.
Le manque de transparence de l'ISIE et son manquement à publier des rapports sur les violations
de la campagne électorale signalées par ses moniteurs, qu’ils soient basés dans les IRIEs ou chargés
des médias sociaux ont compromis le processus décisionnel et privé le public et les observateurs
électoraux des informations nécessaires pour analyser ses décisions.
Les défis auxquels l’ISIE est confrontée
Le 1er novembre 2019, deux membres de l'ISIE, Adel Brinsi et Nabil Azizi, ont rendu publiques
des accusations non fondées de mauvaise gestion financière et administrative au sein de l'ISIE,
invoquant la corruption et l'ingérence étrangère.
11 En réaction à leurs déclarations aux médias, le
président de l'ISIE a annoncé le 6 novembre qu'il avait déposé une plainte auprès du procureur au
tribunal de première instance de Tunis suite aux déclarations "irresponsables" de deux membres
du Conseil de l'ISIE.
12 Lors d'une réunion du Conseil de l'ISIE le 8 novembre, les membres du
conseil ont discuté de l'opportunité de demander à l’Assemblée des Représentants du Peuple de
révoquer ces membres. Une proposition de renvoi de la question au Parlement pour débat a échoué
par un vote de 5 à 4.
Cet incident a mis en évidence de graves divisions internes au sein du conseil de l'ISIE qui
menacent de compromettre le processus d'apprentissage en cours de l'ISIE et la perception qu'a le
public de l'organisme, y compris la confiance du public dans sa capacité à organiser de futures
élections conformément aux normes internationales. Il serait difficile pour l'ISIE de mener des
réformes électorales basées sur l'exercice des leçons apprises sans un conseil unifié. L'ISIE est
également en train d'organiser plusieurs élections partielles municipales, ce qui obligera le conseil
à exercer son pouvoir de décision. Ces divisions sont aggravées par l'expiration du mandat de trois
membres du conseil, dont l'actuel président, en janvier 2020. Selon la loi, le parlement
11 Dans une déclaration faite aux médias, deux membres de l'ISIE ont exprimé leurs préoccupations concernant le rôle
joué par ce qu'ils ont décrit comme une entreprise de lobbying américaine, l'IFES. Ils auraient allégué que l'IFES avait
réussi à s'infiltrer dans les différents niveaux de l'ISIE grâce à son assistance technique, notamment en finançant la
formation des agents de l'ISIE et en facilitant l'inscription des électeurs, ce qui a permis à l'IFES de prendre possession
de la base de données de tous les électeurs tunisiens inscrits. Selon les informations dans les médias, Brinsi et Azizi
ont également allégué que l'IFES est connue pour son ingérence dans les élections de certains pays et ont cité les
élections présidentielles au Kenya à titre d'exemple. Brinsi et Azizi auraient allégué que l'IFES a falsifié les élections
tunisiennes en vue d'une intervention à plus grande échelle en Algérie. https://www.tunisienumerique.com/lisie-a-ete-
infiltree-par-une-societe-de-lobbying-americaine-qui-a-manipule-les-elections/. Date d’extraction : 17 décembre
2019.
12 Le président de l'ISIE, Nabil Baffoun, aurait déclaré à l'agence TAP (Tunis Afrique Presse) que la plainte avait été
déposée par l'ISIE contre Adel Brinsi et Nabil Azizi, dont les déclarations concernaient des soupçons de corruption
financière et administrative et d'ingérence étrangère.



 
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nouvellement élu devrait élire trois nouveaux membres pour remplacer ceux dont le mandat vient
à échéance. La composition du Parlement peut rendre difficile l’obtention de la majorité requise
des deux tiers.
Ensemble, ces dynamiques peuvent annoncer des défis importants pour l'ISIE dans l’exercice de
son mandat et dans son intérêt à protéger sa réputation en tant qu'organisme indépendant et
impartial mandaté par la Constitution.
Contexte : Le Centre Carter en Tunisie. Le Centre Carter a un bureau en Tunisie depuis 2011. Le
Centre a observé les élections de l'Assemblée Nationale Constituante de 2011, le processus
d'élaboration de la constitution de 2012-2014 et les élections présidentielles et législatives de 2014.
Pour les élections de 2019, le Centre Carter a déployé une équipe centrale en mai 2019 pour lancer
sa mission d'observation du processus électoral. À la mi-juillet, le Centre a déployé 16 observateurs
de longue durée pour observer le processus électoral dans les régions de la Tunisie. 18 pays
différents étaient représentés parmi les membres l’équipe centrale et les observateurs de longue
durée. Le Centre a déployé une mission de courte durée pour observer chacune des élections de
2019 et a publié une déclaration préliminaire après chaque élection. Un rapport final complet,
comprenant des recommandations pour une future réforme électorale, sera publié début 2020.
Le Centre souhaite remercier le gouvernement tunisien, les membres des partis politiques, les
membres de la société civile, les particuliers et les représentants de la communauté internationale
qui ont généreusement offert leur temps et leur énergie pour faciliter les efforts du Centre dans
l’observation du processus des élections législatives et présidentielles. Le Centre Carter évalue le
processus électoral tunisien en fonction de la constitution tunisienne, du cadre juridique électoral
national et des obligations découlant des traités internationaux et des normes électorales
internationales. La mission d'observation du Centre est menée conformément à la Déclaration de
principes pour l'observation internationale des élections.




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Le Centre Carter félicite la Tunisie pour la réussite du
processus électoral de 2019
TUNIS, TUNISIE (20 décembre 2019) - Dans un communiqué publié aujourd'hui, le Centre Carter
a félicité les autorités et le peuple tunisiens pour la réussite du processus électoral de 2019 et a
exhorté les dirigeants politiques tunisiens à agir rapidement pour former un gouvernement avant
le 15 janvier 2020, date à laquelle la prolongation d'un mois accordée par le président de la
République expire.
Bien que l'Instance Supérieure Indépendante pour les Élections ait dû relever le défi
supplémentaire d'un calendrier électoral serré en raison du décès du président en exercice, les
observateurs du Centre Carter ont constaté qu'elle a pu mener un processus électoral crédible
pour les trois élections. Les autorités électorales, les organisations de la société civile et les partis
politiques ont déployé des efforts concertés qui ont abouti à des scrutins compétitifs qui ont été
réalisés efficacement. Avec l'investiture du nouveau président de la République le 23 octobre et
l'assermentation du nouveau parlement le 13 novembre, la Tunisie a servi d'exemple pour la
région et le monde dans la conduite d'une transition démocratique pacifique.
Le communiqué couvre les événements survenus après la publication par le Centre des
déclarations préliminaires d'observation concernant les élections législatives et présidentielles, y
compris le processus de tabulation et de contentieux.
Au terme du processus électoral, la mission internationale d'observation des élections du Centre
a constaté que les processus de tabulation se sont progressivement améliorés d'une élection à
une autre et que les processus des contentieux électoraux se sont déroulés dans les délais
autorisés par la loi.
Bien que les audiences du tribunal administratif se soient déroulées de manière ordonnée et que
les parties aient eu la possibilité de présenter leurs recours, les délais très courts n'ont pas permis
aux avocats de prendre le temps nécessaire à la préparation ou à la présentation de leurs recours.
Ceci a nui à la capacité des parties à étayer leurs plaintes avec des preuves crédibles et des
arguments juridiques et à intenter un recours juridique efficace.
Le chef du Gouvernement désigné, Habib Jemli, le principal parti politique du nouveau parlement,
Ennahda, et les autres partis politiques représentés au parlement devraient faire un effort collectif
pour finaliser la formation d'un gouvernement. Les élus doivent trouver un moyen de mettre de
côté leurs divergences politiques et idéologiques et de trouver des solutions globales aux défis
politiques et économiques difficiles du pays et qui ont été à l’origine de la révolution tunisienne
de 2011. En outre, le nouveau parlement et le nouveau gouvernement devraient former
rapidement la Cour constitutionnelle et d'autres autorités constitutionnelles indépendantes, y
compris le remplacement de trois membres de l'ISIE dont les mandats expirent en janvier.
Le rapport complet est disponible ici.
Contact : Don Bisson, don.bisson@cartercenter.org.








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122 | The Carter Center Rapport des élections







































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