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DROIT DU
PAIEMENT
PROCÉDURES
CIVILES
D’EXÉCUTION
Pierre CAGNOLI
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Pierre Cagnoli
Agrégé des facultés de droit
Professeur à l
Université Caen-Normandie
Membre de l
Institut Demolombe
PROCÉDURES
CIVILES
D
EXÉCUTION
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© 2018, LGDJ, Lextenso éditions
70, rue du Gouverneur Général Éboué
92131 Issy-les-Moulineaux Cedex
ISBN 978-2-275-05620-3
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Sommaire
Introduction
.................................................................................................. 7
PARTIE 1
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
DISPOSITIONS GÉNÉRALES...................................................... 19
Vers l
exécution forcée des obligations ........................................ 21
Les conditions de l
exécution forcée............................................ 41
La mise en
œuvre des procédures civiles dexécution.................. 105
PARTIE 2
Chapitre 1
LES MESURES DEXÉCUTION FORCÉE SUR LES MEUBLES ..... 143
Les saisies de créances de sommes d
argent.............................. 145
Chapitre 2
Les saisies de biens meubles corporels ..................................... 221
Chapitre 3
La saisie des droits incorporels autres que les créances
monétaires.............................................................................. 269
Chapitre 4
La distribution des deniers ....................................................... 277
PARTIE 3
LA SAISIE IMMOBILIÈRE ........................................................ 283
Chapitre 1
Dispositions générales ............................................................. 287
Chapitre 2
Le déroulement de la saisie immobilière.................................... 295
Chapitre 3
La vente sur saisie immobilière................................................. 321
Chapitre 4
La distribution du prix ............................................................. 343
PARTIE 4
LEXPULSION ......................................................................... 349
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Introduction
1 Terminologie. Les procédures civiles dexécution peuvent être définies comme
«
lensemble des moyens légaux mis à la disposition des créanciers pour leur permettre
d
obtenir, par la contrainte, ce qui leur est dû »1. À côté de lorganisation juridictionnelle
et de la procédure civile, elles constituent la troisième branche du droit judiciaire privé.
Comme ces matières, les procédures civiles d
exécution constituent un droit « servant »2,
c
est-à-dire au service des autres branches du droit.
Lexpression « procédures civiles dexécution » est récente. Adoptée à loccasion de la loi
nº 91-650 du 9 juillet 1991, elle a remplacé celle de «
voies dexécution ». Par cette
nouvelle terminologie, le législateur a souhaité faire ressortir plusieurs caractéristiques,
propres à cette discipline. Dabord, les voies de droit qui la composent constituent des
procédures, non pas dans le sens de procédures judiciaires car la matière est largement
déjudiciarisée
3, hormis pour la saisie immobilière, mais dans le sens latin du mot « proce-
dere
». Les procédures civiles dexécution constituent un ensemble de démarches,
permettant d
avancer jusquà lobtention dun résultat (le paiement effectif du créancier).
Le qualificatif « civiles » est, pour sa part, utilisé pour désigner l
exécution des obligations
qui incombent à des personnes privées, par opposition aux condamnations prononcées à
l
encontre de personnes publiques, ou de condamnations purement pénales4. Quant à
celui « d
exécution », il est à prendre dans un sens plutôt large, dès lors que la matière
englobe également les mesures conservatoires.
2 Contenu. Les procédures civiles dexécution sont maintenant lobjet dun code qui
leur est propre, même s
il ne régit pas lintégralité de la matière. Ce code envisage deux
grandes séries de mesures : les mesures d
exécution forcée et les mesures conservatoires
(CPCE, art. L. 111-1).
Pour limmense majorité, les mesures dexécution forcée portent sur les biens du débi-
teur. On peut y voir le reflet de l
article 2284 du Code civil, selon lequel « Quiconque
s
est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens
mobiliers et immobiliers, présents et à venir ». Il sagit des saisies dexécution, qui suppo-
sent un titre exécutoire, constatant une créance liquide et exigible. Elles tendent soit à
l
attribution dune créance soit à la vente dun bien, voire à la remise dun bien. Beau-
coup plus rarement, les mesures d
exécution forcée portent sur la personne du débiteur.
La contrainte par corps, sorte de prison pour dette, a été supprimée, en matière civile et
commerciale, par une loi du 22 juillet 1867. De façon très générale, on peut dire que
l
évolution historique des voies dexécution a consisté à passer de mesures sur la
(1)
(2)
(3)
(4)
P. HOONAKKER, Procédures civiles dexécution, Larcier, 5e éd., 2015-2016, p. 11.
Pour la procédure civile, v. J. H
ÉRON et T. LE BARS, Droit judiciaire privé, LGDJ, 6e éd., 2016, nº 1.
La nouvelle terminologie peut, de ce point de vue, induire en erreur, v. C. B
RENNER, Procédures civiles dexécution,
Dalloz, 8
e éd., 2015, nº 1.
En ce sens, faisant observer qu
une fois la distinction opérée, il importe peu que la créance ait une nature civile,
commerciale ou pénale, v. R. P
ERROT et P. THÉRY, Procédures civiles dexécution, Dalloz, 3e éd., 2013, nº 1.
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PROCÉDURES CIVILES DEXÉCUTION
personne du débiteur aux mesures portant sur ses biens5. La contrainte par corps subsiste
simplement, aujourd
hui, en matière pénale, pour le paiement de certaines amendes, et
porte alors le nom de contrainte judiciaire
6. En matière civile, la seule mesure dexécu-
tion sur la personne qui demeure est l
expulsion ; elle consiste à imposer, au besoin par
la force, à une personne de quitter les lieux qu
elle occupe indûment.
Pour leur part, les mesures conservatoires ont pour objectif de préserver le créancier de
l
organisation par le débiteur de son insolvabilité. Obtenues le plus souvent sur autorisa-
tion du juge délivrée sur requête, elles supposent une créance vraisemblable et des
circonstances susceptibles d
en menacer le recouvrement (CPCE, art. L. 511-1). Les
mesures conservatoires se subdivisent elles-mêmes en deux grandes catégories : les
saisies conservatoires et les sûretés judiciaires. Tandis que les premières tendent à
rendre un bien indisponible (art. L. 521-1 et s.), pour éviter sa disparition en l
attente
d
un titre exécutoire qui permettra leur
les
secondes (hypothèques judiciaires conservatoires, nantissements conservatoires de
valeurs mobilières, de parts sociales ou de fonds de commerce) visent à attribuer un
droit de préférence et un droit de suite au créancier bénéficiaire sur les biens concernés.
Les mesures conservatoires sont l
objet dun ouvrage spécifique dans cette collection7.
transformation en saisies dexécution,
Enfin, le Code des procédures civiles dexécution réglemente les procédures de distribu-
tion faisant suite aux ventes sur saisie. Même si la terminologie les distingue des procé-
dures civiles d
exécution, il est indispensable de les aborder, sous peine de ne pas traiter
jusqu
au bout le processus de lexécution forcée.
Ainsi précisées, les procédures civiles dexécution se présentent comme la composante
majeure du droit de l
exécution forcée (§ I). On présentera les caractères de la discipline
(§ II) et ses sources (§ III).
§ I - Les procédures civiles dexécution, composante
majeure du droit de lexécution forcée
3 Exécution volontaire et exécution forcée. Matière éminemment technique, les procé-
dures civiles d
exécution constituent, assurément, une discipline de praticiens. Lhuissier
de justice y tient le premier rôle mais quantité de juristes, de l
avocat au notaire, du
commissaire-priseur judiciaire au juriste de banque ou d
entreprise, ne peuvent prétendre
l
ignorer8. Pour le justiciable, lintérêt est moins immédiatement visible. Pour le créancier
par exemple, il importe peu,
a priori, de savoir par quels moyens il va être payé. Seul le
résultat pourrait compter. La réalité est assurément plus subtile.
Le plus souvent, fort heureusement, lexécution des obligations est réalisée de façon spon-
tanée par le débiteur. Elle est alors volontaire, peu important que ce soit par un respect
naturel de la parole donnée ou en raison de la crainte de subir l
exercice de saisies prati-
quées par le créancier
9 ; les procédures civiles dexécution ont, de ce point de vue, un
premier effet d
incitation qui nest pas négligeable. Au contraire, lexécution est dite
forcée lorsqu
elle se réalise « sans la volonté, voire contre la volonté du débiteur »10.
(5)
(6)
(7)
(8)
(9)
Sur lévolution historique, v. J-P. LÉVY et A. CASTALDO, Histoire du droit civil, Dalloz, 2e éd., 2010, nº 671 et s. ;
J. BART, Histoire du droit privé, Montchrestien, 1998, p. 98, 421 s., 500.
CPP, art. 749.
G. J
AZOTTES et O. STAES, Recouvrement des créances et mesures conservatoires, coll. « Droit du paiement », à paraître.
Sur les acteurs de l
exécution forcée, v. infra nº 262 s.
Le paiement volontaire suscite, en lui-même, de multiples interrogations ; dans cette collection, v. S. D
ELRIEU, Règles
générales et modalités du paiement
, coll. « Droit du paiement », à paraître.
(10) N. CAYROL, Droit de lexécution, LGDJ, 2013, nº 21.
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toute une série dhypothèses
Entre les deux extrêmes existe, au demeurant,
intermédiaires, dans lesquelles le débiteur pourra être incité à exécuter son obligation,
sinon spontanément, du moins par raison
11.
Bien souvent, en raison de linterdiction de se faire justice à soi-même, la saisine dun
juge est nécessaire pour surmonter la résistance du débiteur à la réalisation du droit du
créancier. La décision de justice obtenue, condamnant le débiteur à exécuter son obliga-
tion, sera parfois volontairement exécutée par ce dernier, éventuellement après épuise-
ment des voies de recours. Mais elle pourra également rester lettre morte et c
est là
qu
interviennent, précisément, les procédures civiles dexécution. Lobtention dune déci-
sion de justice ne servirait finalement pas à rien s
il nétait pas possible dobtenir, au
besoin par la force, son exécution forcée. Cette idée est aujourd
hui largement consacrée,
tant dans les textes qu
en jurisprudence. Le droit à lexécution forcée est aujourdhui
érigé en un droit fondamental
12.
Au demeurant, lutilisation des procédures civiles dexécution, comme outil de réalisation
du droit à l
exécution forcée, nimplique pas nécessairement un jugement de condamna-
tion. D
autres titres exécutoires, tels lacte notarié ou certains accords revêtus dune
l
accès aux procédures civiles dexécution13. Le
onction judiciaire, permettront ainsi
développement de ces titres exécutoires accompagne celui du droit à l
exécution forcée.
Dans le même esprit, on peut observer que les procédures civiles dexécution ne consti-
tuent plus, aujourdhui, la seule technique dexécution forcée des obligations, même si
elles en demeurent le noyau dur.
4 Exécution forcée sans saisie. Lexécution forcée peut parfois passer par une vente
forcée non précédée d
une saisie. Le fonds de commerce illustre parfaitement cette hypo-
thèse. Ce dernier est en effet composé d
éléments incorporels, comme lenseigne, le nom
commercial, le droit au bail, mais aussi d
éléments corporels comme loutillage ou les
les divers éléments d
un tel fonds peuvent être saisis de manière
marchandises. Si
isolée, en usant des procédures appropriées
14, il nexiste pas de procédure de saisie de
l
ensemble du fonds de commerce. En revanche, certains textes prévoient la possibilité,
pour le tribunal de commerce, d
ordonner la vente globale du fonds. Ainsi en est-il de
l
article L. 143-5 du Code de commerce qui permet, à la demande dun créancier nanti
sur ce fonds ou du vendeur impayé, ayant inscrit sont privilège de vendeur, d
ordonner
la vente forcée du fonds. Le but de cette disposition est évidemment de permettre aux
créanciers concernés de réaliser leur sûreté sur le prix de vente dégagé. Pareillement,
l
article L. 143-8 du même code prévoit la possibilité pour le tribunal dordonner la
vente du fonds, à la demande d
un créancier, quil soit ou non muni de sûretés, pourvu
que sa créance se rattache à l
exploitation du fonds. Enfin, on trouve également, dans le
Code de commerce, des textes qui permettent de transformer une saisie, qui porterait sur
des éléments séparés du fonds de commerce, en une vente globale de ce fonds, afin
d
éviter son démembrement15. En pratique cependant, ces textes ne sappliquent
presque jamais car, lorsque le débiteur est dans la situation qui justifierait leur applica-
tion, il demande aux tribunaux le bénéfice d
une procédure collective, qui le mettra à
l
abri des poursuites individuelles16.
(11) P. THÉRY, « La place des procédures civiles dexécution », RTD civ. 1993, p. 1.
(12) V. infra nº 61 s.
(13) V.
infra nº 201 s.
(14) Ainsi de la saisie-vente pour l
outillage ou les stocks ou de la saisie des droits incorporels pour lenseigne.
(15) C. com., art. L. 143-10 (pour les créanciers inscrits) et L. 143-3 (pour le créancier poursuivant ou le débiteur) ; sur
cette dernière technique, v. S. PIÉDELIÈVRE, Procédures civiles dexécution, Economica, 2016, nº 442 s.
(16) Sur ces techniques en général, v. C. B
RENNER, « La saisie du fonds dentreprise », Dr. et patr. janv. 2009, p. 52.
9
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PROCÉDURES CIVILES DEXÉCUTION
Ces textes ne sont pas à confondre avec ceux qui organisent la protection des créanciers à locca-
sion d
une cession volontaire de son fonds de commerce par lexploitant. Ainsi en est-t-il du droit
d
opposition au paiement du prix, édicté au profit des créanciers du vendeur
(C. com., art.
L. 141-14)
17. Certains de ces mécanismes peuvent dailleurs, potentiellement, conduire à la vente
du fonds de commerce aux enchères publiques. C
est le cas de la surenchère du dixième des créan-
ciers inscrits (C. com., art. L. 143-13)
18.
5 Techniques issues du droit des sûretés. Le renouveau des sûretés réelles contribue
également à la diversification des modes de réalisation de l
exécution forcée19. La géné-
ralisation des techniques d
attribution en propriété dans les sûretés réelles spéciales
permet ainsi au créancier de réaliser son droit sans passer par le biais de saisies. Une
action en justice, pour l
attribution judiciaire, ou la mise en œuvre dun contrat, sagis-
sant du pacte commissoire, assure ainsi au créancier hypothécaire
20, gagiste ou nanti la
réalisation de son droit, indépendamment des procédures civiles d
exécution. Pareille-
ment, le développement de la propriété comme technique de garantie, qu
elle soit
retenue ou réservée, dispense le créancier bénéficiaire d
exercer ces mêmes voies de
droit pour obtenir satisfaction. Par exemple, l
action en revendication permet au vendeur
resté impayé, mais titulaire d
une clause de réserve de propriété, dobtenir restitution du
bien vendu ; la valeur de ce dernier s
impute alors, à titre de paiement, sur le solde de la
créance garantie. Un autre ouvrage de la collection est pareillement consacré à la réalisa-
tion des sûretés réelles21.
6 Permanence du rôle des procédures civiles dexécution. Pour important quil soit, ce
mouvement de diversification des modes de réalisation de l
exécution forcée nocculte en
rien le rôle central que conservent, toujours, les procédures civiles d
exécution. Même
dans les cas ci dessus évoqués, c
est bien lusage dune procédure civile dexécution, en
l
occurrence une saisie-appréhension, qui dénouera la situation, si le constituant du gage
refuse de remettre le bien objet de la sûreté, suite au transfert de propriété ordonné en
justice ou résultant du pacte commissoire. Et c
est également cette même procédure qui
pourra être mise en
œuvre, si lacheteur refuse de restituer le bien, pour lequel le vendeur
réservataire a agi en revendication avec succès. Pareillement, c
est bien la procédure
d
expulsion qui sera mise en œuvre, si le constituant de lhypothèque refuse de quitter
les lieux, suite à l
attribution de limmeuble affecté au créancier hypothécaire.
§ II - Les caractères des procédures civiles dexécution
7 Le caractère individualiste des procédures civiles dexécution. Les procédures civiles
d
exécution sont souvent présentées comme des procédures individualistes, en ce sens
qu
elles seraient instituées dans lintérêt exclusif du créancier qui les utilise. De ce point
de vue, on les oppose volontiers aux procédures collectives de livre VI du Code de
commerce (procédures de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire) ou
aux procédures du livre VII du Code de la consommation (procédures de surendettement
des particuliers). Ces dernières procédures sont collectives en ce sens qu
elles traitent de
façon globale le passif du débiteur, en imposant une discipline collective aux différents
créanciers, de façon à leur imposer une égalité de traitement. Elles poursuivent par ailleurs
des objectifs qui leur sont propres : le maintien de l
activité, de lemploi et lapurement du
(17) Sur la possibilité deffectuer une saisie-attribution sur le prix de cession pendant le délai dopposition ou en
présence doppositions, v. infra nº 385.
(18) La surenchère du sixième des créanciers opposants ou inscrits, édictée par lancien article L. 141-19 du Code de
commerce, a opportunément été supprimée par la loi nº 2015-990 du 6 août 2015.
(19) Sur la question, v. M. DOLS-MAGNEVILLE, La réalisation des sûretés réelles, thèse (dact.) Toulouse 1 Capitole, 2013,
dir. F. MACORIG-VENIER.
(20) Sauf si limmeuble affecté constitue la résidence principale du constituant (C. civ., art. 2458 et 2459).
(21)
J. THÉRON, Les garanties réelles de paiement, coll. « Droit du paiement », à paraître.
10
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passif pour les premières, la lutte contre lexclusion sociale pour les secondes. Si elle
existe bien, cette différence de nature entre les deux sortes de procédures ne doit pas
être exagérée. Pour la plupart d
entre elles, les procédures civiles dexécution présentent
également une dimension collective
22, en ce sens que, le plus souvent, des techniques
existent pour permettre à un ou à plusieurs créanciers, qui n
ont pas initié la saisie, de
s
y associer. Tel est le cas, par exemple, de la technique de lopposition dans une saisie-
vente, ou encore de l
assignation des créanciers inscrits, dans le cadre dune saisie immo-
bilière. L
image du prix de la course, que lon attribue volontiers aux procédures civiles
d
exécution et selon laquelle le premier arrivé passe avant tous les autres, nexiste vérita-
blement que pour la saisie-attribution ou ses variantes
23. Les procédures collectives
d
entreprise24, tout comme les procédures de surendettement des particuliers qui font
l
objet dun ouvrage dans la présente collection25, ne seront pas ici abordées. Seul le sera
leur impact sur les procédures civiles d
exécution.
8 La recherche dun équilibre. Le législateur recherche ici, en permanence, un équi-
libre : celui entre l
efficacité des procédures civiles dexécution et la prise en compte de
considérations d
humanité à légard du débiteur. Le souci defficacité des procédures
dans l
intérêt du créancier se traduit, par exemple, par la déjudiciarisation des procé-
dures civiles d
exécution opérée par les textes de 1991-1992, qui est source de gain de
temps. Il s
illustre également par lefficacité de la saisie-attribution, liée à son effet attri-
butif immédiat26 et instituée par les mêmes textes, par le développement des mesures
conservatoires ou par la facilitation de la collecte par lhuissier des informations sur le
patrimoine du débiteur. Cependant, la matière est également aussi pétrie de considéra-
tions d
humanité. Les dispositions générales du Code des procédures civiles dexécution
régissent ainsi le temps et la manière pour pratiquer l
exécution forcée dans les locaux du
débiteur, assurant de la sorte le respect de sa tranquillité et de l
intimité de sa vie
privée
27. Elles imposent également le respect dun principe de proportionnalité dans
l
usage des voies de droit utilisées et posent lexistence dun certain nombre de biens
insaisissables, dès lors qu
ils sont indispensables à la vie ou au travail du débiteur et de
sa famille
28. Pareillement, les dispositions propres à chaque procédure déxécution forcée
tentent de préserver au mieux la dignité du débiteur. Que l
on songe, par exemple, à la
nécessité de débuter, pour les plus petites créances à recouvrer, par les procédures
d
exécution les moins traumatisantes (la saisie des rémunérations ou des comptes
bancaires avant la saisie-vente des meubles corporels pratiquée dans le local d
habitation
du débiteur)
29, ou à linstitution des nombreux délais dont profite la personne expulsée de
son lieu d
habitation, instituées dans le but de permettre de trouver une solution de
(22) L. CAMENSULLI-FEUILLARD, La dimension collective des procédures civiles dexécution Contribution à la définition de
la notion de procédure collective, Dalloz, 2008, t. 73.
(23) Avec quelques nuances dans certains cas (saisies-attributions pratiquées le même jour, saisie de créances indispo-
nibles, etc.), v. infra nº 378 et s.
(24) C. SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficulté, LGDJ, 10e éd., 2016 ; F. PÉROCHON, Entreprises en difficulté,
LGDJ, 10
e éd., 2014 ; D. VOINOT, Procédures collectives, LGDJ, 2e éd. 2013 ; D. VIDAL et C. GIORDINI, Cours de droit
des entreprises en difficulté
, Gualino, 2e éd. 2016-2017 ; J. VALLANSAN, P. CAGNOLI et L. FIN-LANGER, Entreprises en
difficulté, commentaire du livre VI du Code de commerce, article par article
, LexisNexis, 6e éd., 2012 ;
A. J
ACQUEMONT et R. VABRES, Droit des entreprises en difficulté, LexisNexis, 9e éd., 2015 ; P.-M. LE CORRE, Droit et
pratique des procédures collectives
, Dalloz action, 9e éd., 2016-2017 ; P. PÉTEL, Procédures collectives, Dalloz
cours, 8
e éd., 2014 ; M.-L. COQUELET, Entreprises en difficulté, instruments de paiement et de crédit, Dalloz hyper-
cours, 6
e éd., 2017 ; A. LIENHARD, Procédures collectives, Delmas 2017-2018.
(25) V. BOURGNINAUD, Procédures de surendettement des particuliers et rétablissement personnel, coll. « Droit du paie-
ment », à paraître. Adde, V. VIGNEAU, G.-X BOURIN et C. CARDINI, Droit du surendettement des particuliers, LexisNexis,
2
e éd. 2012 ; V. AVENA-ROBARDET et F. FERRIÈRE, Surendettement des particuliers, Dalloz référence, 4e éd. 2012-2013.
(26) V. infra nº 378 s.
(27) V.
infra nº 326 s.
(28) V.
infra nº 167 s.
(29) V.
infra nº 575.
11
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PROCÉDURES CIVILES DEXÉCUTION
relogement30. Du reste, ce sont ces considérations dhumanité qui expliquent le caractère
d
ordre public attribué par le législateur à la matière.
9 Une matière dordre public. Il est essentiel que les éléments de protection, institués
au profit du débiteur, ne soient pas écartés par le jeu d
une convention conclue, sous la
pression, par ce dernier avec le créancier poursuivant. C
est la raison pour laquelle les
procédures civiles d
exécution sont considérées comme dordre public31. Les formalités
et les délais propres à la matière ne peuvent être éludés, même avec l
accord du
débiteur.
Le caractère dordre public des procédures civiles dexécution peut sinférer de larticle
L. 111-1 du code qui leur est consacré, selon lequel tout créancier peut contraindre son
débiteur à exécuter ses obligations à son égard «
dans les conditions fixées par la loi ». Il
se déduit également de l
interdiction de la clause de voie parée (CPCE, art. L. 311-3 ;
C. civ., art. 2346 et 2458), clause par laquelle le débiteur dispenserait le créancier d
uti-
liser les procédures civiles d
exécution, pour vendre ses biens en cas de défaillance32.
Certaines atteintes au caractère dordre public de la matière sont cependant régulière-
ment mises en avant. Ainsi de la généralisation du pacte commissoire qui permet
d
obtenir, en vertu dun contrat précédant la naissance du litige et sans recourir au juge,
lattribution en propriété du bien affecté en garantie. Si le phénomène ne peut être nié, il
faut peut-etre davantage y voir une diversification des modes de réalisation de l
exécution
forcée qu
une atteinte au caractère dordre public des procédures civiles dexécution33.
Du reste, même avec ce nouveau mode d
exécution forcée, lordre public nest pas totale-
ment absent. D
une part en effet,
le pacte commissoire reste interdit en certains
domaines
34. Dautre part, lattribution en propriété, quelle soit judiciaire ou convention-
nelle, implique la désignation d
un expert qui chiffrera la valeur du bien, de façon à éviter
l
enrichissement injuste du créancier devenu attributaire35.
10 Territorialité des procédures civiles dexécution. La place des procédures civiles dexé-
cution dans la sphère internationale suscite plusieurs interrogations. L
une delles
constiste à savoir si des procédures d
exécution peuvent être pratiquées en France, en
vertu d
un jugement rendu à létranger ou dun acte établi à létranger. Cette question
sera examinée à l
occasion de létude des titres exécutoires étrangers36. Une autre ques-
tion est de déterminer s
il est possible de pratiquer lexécution forcée contre tout débiteur,
notamment contre des États étrangers ou contre les représentants des États étrangers,
possédant des biens situés en France. Le problème sera, là aussi, abordé ultérieurement
dans le cadre de l
étude des immunités dexécution37. Enfin, il faut se demander, pour
des biens situés sur le territoire d
un État donné, quelle est la loi potentiellement
(30) V. infra nº 976 s.
(31) La protection des autres créanciers peut aussi justifier ce caractère, dès lors qu
est admise la dimension collective
des procédures civiles d
exécution. Par exemple, après la réalisation dune saisie-vente, aucun accord ne saurait
être valablement conclu entre le créancier saisissant et le débiteur, ayant présenté une proposition de vente
amiable, sur le caractère suffisant du prix, sans consulter préalablement les autres créanciers associés à la saisie ;
v.
infra nº 607.
(32) Une jurisprudence ancienne reconnaît toutefois la possibilité dune telle convention lorsquelle est conclue posté-
rieurement à la convention de crédit (Cass. civ., 25 mars 1903, DP 1904, 1, 273, note L. G
UÉNÉE). Sur la possibilité
d
abandonner la procédure de saisie immobilière au profit dune vente amiable, v. infra nº 825.
(33) Sur lobjet des procédures civiles dexécution, v. supra nº 2.
(34) C. cons., art. L. 312-38 (crédits à la consommation).
(35) C. civ., art. 2458 à 2460 (hypothèque), 2388 (gage immobilier), 2347 et 2348 (gage). Dans les hypothèses pour
lesquelles aucun problème d
évaluation nexiste, aucun expert nest évidemment désigné, par exemple pour un
nantissement de créances (art. 2365) ou un nantissement de valeurs mobilières côtées (CMF, art. L. 211-20, V et
D. 211-12).
(36) V.
infra nº 222 s.
(37) V.
infra nº 112 et s.
12
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applicable aux procédures dexécution et, le cas échéant, quel est le juge compétent pour
en connaître ?
Le point commun à ces questions réside dans lidée de souveraineté. En vertu des règles
du droit international public, la souveraineté d
un État ne sexerce que sur son territoire.
Le pouvoir de contrainte d
un État, qui constitue lun des attributs de la souveraineté et
qui est indispensable à la réalisation des procédures civiles d
exécution, ne sexerce que
sur son territoire. Il en résulte que la loi applicable, en matière de procédures civiles
d
exécution, est par principe celle de lÉtat sur le territoire duquel elle est pratiquée38.
Les procédures civiles d
exécution pratiquées sur des biens situés en France seront donc
régies par la seule loi française, peu important que le débiteur qui en est propriétaire
réside à l
étranger. Et, sil est besoin de faire appel à un juge pour autoriser lune de ces
procédures ou pour trancher une contestation, c
est le juge français qui sera seul compé-
tent. En sens inverse, s
agissant de biens situés à létranger, les voies dexécution fran-
çaises ne s
appliqueront pas et les juridictions françaises seront incompétentes, peu
important que le créancier ou le débiteur soient de nationalité française
39. Les mêmes
solutions concernent au demeurant la procédure d
expulsion. Au sein de lUnion euro-
péenne, l
article 24, 5º du règlement 1215/2012 du 12 décembre 2012 confirme la
compétence exclusive des juridictions de l
État membre sur le territoire desquelles sont
exécutées les décision de justice.
Puisque la règle est celle de la territorialité des procédures civiles dexécution, la ques-
tion de la localisation des biens qui en sont l
objet est évidemment déterminante. Il ny
a guère de difficultés s
agissant des biens corporels ; meubles ou immeubles, cest leur
localisation effective qui dictera la loi applicable. S
agissant des biens incorporels au
contraire, la difficulté est très variable. Pour les biens incorporels soumis à des formalités
de publicité, la saisie sera réalisée dans l
État sur le territoire duquel lorganisme chargé
de la publicité a son siège
40. Pour ce qui est de la saisie des créances, il faut logiquement
retenir le lieu où réside le tiers saisi
41. Pour ce qui est des parts sociales sapplique la loi
du siège de la société émettrice, alors que les valeurs mobilières sont censées être
situées au siège de la personne teneur de comptes (société émettrice, mandataire ou
intermédiaire habilité, selon les cas).
Remarque : certaines règlements de lUnion européenne fournissent maintenant dutiles
précisions sur cette question. Ainsi en est-il du règlement nº 2015/848 du 20 mai
2015, relatif aux procédures d
insolvabilité. Larticle 2 de ce règlement pose plusieurs
définitions, dont celle « d
État membre dans lequel les actifs sont situés ». Si ce texte
intéresse avant tout les praticiens de l
insolvabilité42, force est de reconnaître que les
précisions qu
il pose dépassent de loin le cadre de ces procédures collectives et sont
(38) Reconnaissant expressément le principe de territorialité des procédures dexécution, v. Cass. 2e civ., nº 99-21278.
(39) Cass. 1
re civ., 14 avr. 2010, nº 09-11909, Bull. civ. I, nº 91 ; Dr. et proc. 2010, p. 234, obs. E. GUINCHARD.
(40) Par exemple, en matière de saisie des brevets d
inventions, la saisie est à réaliser auprès de lInstitut national de la
propriété industrielle (CPI, art. L. 613-21).
(41) Sagissant de la saisie des comptes bancaires, v. infra nº 411 s.
(42)
J.-L. VALLENS, « Définitions », Règlement (UE) nº 2015/848 du 20 mai 2015 relatif aux procédures dinsolvabilité,
commentaire article par article
, SLD, coll. Trans Europe Experts, p. 38 et s. Lauteur relève que la définition est
spécialement utile pour déterminer le périmètre d
une procédure secondaire dinsolvabilité, qui est nécessairement
territoriale. Elle intéresse également la protection des droits réels des tiers, portant sur biens situés dans un État
autre celui ayant ouvert la procédure principale d
insolvabilité.
13
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PROCÉDURES CIVILES DEXÉCUTION
parfaitement transposables aux procédures civiles dexécution43. Sagissant de la localisa-
tion des comptes bancaires, il rejoint d
ailleurs la définition retenue par le règlement
nº 655/2014 du 15 mai 2014, portant création d
une procédure dordonnance euro-
péenne de saisie conservatoire des comptes bancaires.
§ III - Les sources des procédures civiles dexécution
11 Sources supra-législatives. Parmi
les sources supra-législatives des procédures
civiles d
exécution, figurent naturellement les normes issues de lUnion européenne.
Plusieurs règlements ont pour objet de faciliter la circulation des titres exécutoires, au
sein des pays de l
Union européenne44. De façon plus remarquable, lUnion européenne
entame l
édification dun droit matériel uniforme. Elle a ainsi édicté un règlement
portant création d
une procédure dordonnance européenne de saisie conservatoire des
comptes bancaires
45. Cette procédure, qui sajoute aux procédures internes, permet
ainsi,
en matière civile et commerciale, à tout créancier résidant dans un État membre
de bénéficier d
une ordonnance permettant la saisie conservatoire de comptes bancaires
domiciliés dans un autre État membre. Ponctuellement, certains règlements de l
Union
européenne, qui ne sont pas consacrés aux procédures civiles d
exécution, peuvent égale-
ment avoir un impact sur la matière
46.
Autre Europe, autre source : la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l
homme et des libertés fondamentales intéresse aussi, par plusieurs de ses dispositions,
le droit de l
exécution forcée. En ce quil consacre le droit à un procès équitable, larticle 6,
1º de la convention intéresse bien sûr les procédures qui demeurent judiciaires, notamment
la saisie immobilière, mais aussi toutes les contestations qui sont portées devant le juge,
concernant les procédures d
exécution extra-judiciaires. Par ailleurs, sur le fondement de
ce texte, ainsi que sur celui de l
article premier de son premier protocole additionnel, la
Cour européenne des droits de l
homme a fait du droit à lexécution forcée un véritable
droit fondamental. L
article premier du quatrième protocole additionnel prohibe, pour sa
part, la contrainte par corps, pour l
exécution des créances contractuelles de droit privé.
(43) Le règlement est beaucoup plus précis que son prédécesseur (règlement nº 1346/2000, art. 2). Il faut désormais
entendre, par « État membre dans lequel les actifs sont situés » : i) pour les actions nominatives de sociétés autres
que celles visées au point ii), l
état membre sur le territoire duquel la société qui a émis les actions a son siège
statutaire ; ii) pour les instruments financiers dont la propriété est prouvée par une inscription dans un registre ou
sur un compte tenu par un intermédiaire ou au nom d
un intermédiaire («titres en compte courant»), létat membre
dans lequel est tenu le registre ou le compte où figure l
inscription ; iii) pour les espèces détenues sur des comptes
ouverts auprès d
un établissement de crédit, létat membre mentionné dans le code IBAN du compte ou, pour les
espèces détenues sur des comptes ouverts auprès d
un établissement de crédit ne possédant pas de code IBAN,
l
état membre dans lequel létablissement de crédit détenant le compte a son administration centrale ou, si le
compte est ouvert auprès dune succursale, dune agence ou dun autre établissement, létat membre dans lequel
se situe la succursale, lagence ou lautre établis sement ; iv) pour les biens et les droits que le propriétaire ou le
titulaire du droit inscrit dans un registre public autre que ceux visés au point i), l
état membre sous lautorité
duquel ce registre est tenu ; v) pour les brevets européens, l
état membre pour lequel le brevet européen est délivré
; vi) pour les droits d
auteur et les droits voisins, létat membre sur le territoire duquel le titulaire de ces droits a sa
résidence habituelle ou son siège statutaire ; vii) pour les biens corporels autres que ceux visés aux points i) à iv),
l
état membre sur le territoire duquel le bien est situé ; viii) pour les créances sur des tiers autres que celles
portant sur les actifs visés au point iii), l
état membre sur le territoire duquel se situe le centre des intérêts princi-
paux du tiers débiteur, tel qu
il est déterminé conformément à larticle 3, paragraphe 1.
(44) N. FRICERO, « Leuropéanisation de lexécution forcée », Le droit de lexécution forcée : entre mythe et réalité, EJT
(45)
2007, p. 97 et s. ; sur ces règlements, v. infra nº 226 s.
Il s
agit du règlement nº 655/2014 du 15 mai 2014, dont lentrée en application a été fixée au 18 janvier 2017 ;
v. J. L
ASSERE-CAPDEVILLE, « Une nouvelle procédure utile en matière de recouvrement : lordonnance européenne de
saisie conservatoire des comptes bancaires », Gaz. Pal. 6 nov. 2014, p. 9 ; C. NOURISSAT, « Une nouvelle étape dans
le recouvrement des créances : lEurope, ça marche ! », Procédures 2014, repère 7 ; S. PIÉDELIÈVRE, op. cit., nº 255 s.
(46) Par exemple, pour déterminer l
effet dune procédure dinsolvabilité ouverte dans un autre État de lUnion euro-
péenne, par rapport aux procédures civiles d
exécution menées en France, Régl.nº 2015/848 du 20 mai 2015,
art. 19 et 20 ; sur ces articles, v. V. Legrand, « Principe » et « Effets de la reconnaissance »,
Règlement (UE)
nº 2015/848 du 20 mai 2015 relatif aux procédures d
insolvabilité, commentaire article par article, SLD, coll.
Trans Europe Experts, p. 153 et 160.
14
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I n t r o d u c t i o n
Dans ce mouvement de fondamentalisation47, le droit constitutionnel prend également sa
place. Le Conseil constitutionnel a ainsi censuré une loi qui semblait subordonner l
octroi
de la force publique, nécessaire au respect des décisions judiciaires ordonnant l
expul-
sion,
à une démarche administrative préalable visant au relogement des personnes
expulsées
48. Linstauration de la question prioritaire de constitutionnalité ne peut que
conduire au développement de cette participation.
12 La loi et le règlement. On retrouve, en la matière, les grandes sources directes habi-
tuelles : la loi et le règlement. Pendant longtemps, les voies d
exécution ont été régies par
l
ancien Code de procédure civile. La matière a été profondément réformée et modernisée
par la loi nº 91-650 du 9 juillet 1991 et son décret d
application, le décret nº 92-755 du
31 juillet 1992. Pour l
essentiel, cette réforme est entrée en vigueur le 1er janvier 199349.
Plusieurs saisies nouvelles ont été instituées pour tenir compte de la diversification des
biens, telle la saisie de valeurs mobilières et de droits d
associés. Les procédures ont été
déjudiciarisées afin de revaloriser les titres exécutoires. Le contentieux éventuel de l
exé-
cution a été concentré dans les mains d
une juridiction nouvellement instituée, le juge de
l
exécution. Les nouveaux textes ont également mieux séparé les mesures conservatoires
des mesures d
exécution forcée, ce qui a conduit à la disparition de la saisie-arrêt, qui
présentait successivement les deux caractères. Toutefois, cette réforme n
a concerné
que les procédures civiles dexécution portant sur les meubles. Les saisies immobilières
et les procédures dordre sont restées régies par lancien Code de procédure civile
jusqu
à une époque récente. En la matière, la réforme nest venue dans un deuxième
temps, avec l
ordonnance nº 2006-461 du 21 avril 2006, qui a inséré dans le Code civil
les dispositions législatives correspondantes
50. Un décret dapplication a naturellement
été adopté (Décr. nº 2006-936 du 27 juil. 2006, relatif aux procédures de saisie immobi-
lière et de distribution du prix d
un immeuble). Ces dispositions sont entrées en vigueur
le 1
er janvier 200751.
Pour lessentiel donc, les procédures civiles dexécution mobilières étaient régies par la
loi de 1991 et le décret de 1992, tandis que les procédures immobilières étaient
soumises au Code civil et au décret de 2006. À ces textes centraux, il fallait également
ajouter nombre de dispositions, codifiées ou non, issues d
autres textes, par exemple le
Code du travail pour la saisie des rémunérations, le Code de la construction et de l
habi-
tation pour l
expulsion, le Code de lorganisation judiciaire pour la compétence du juge
de l
exécution, le Code de laviation civile pour la saisie des aéronefs, la loi nº 73-5 du
2 janvier 1973 et le décret nº 73-216 du 1
er mars 1973 pour le paiement direct des
pensions alimentaires, etc. Afin de rendre plus accessible la matière, le législateur a
décidé de procéder à une codification à droit constant de la matière, par voie d
ordon-
nance (L. nº 2010-1609 du 22 déc. 2010, art. 7). A ainsi été adoptée lordonnance
nº 2011-1895 du 19 décembre 2011, instituant la partie législative d
un Code des
procédures civiles d
exécution et ratifiée par la loi nº 2015-177 du 16 février 2015. La
partie réglementaire de ce même code résulte pour sa part du décret nº 2012-783 du
30 mai 2012. L
ensemble est entré en vigueur au 1er juin 201252. Il est censé apporter
une meilleure accessibilité à la matière. De fait, sont regroupées dans ce texte l
essentiel
des textes relatifs aux procédures civiles d
exécution. Même si elle apporte assurément
une meilleure accessibilité de la matière, on observera toutefois que le rassemblement
(47) F. FERRAND, « La fondamentalisation de lexécution forcée », Le droit à lexécution forcée, préc., p. 13.
(48) CCel, DC 98-403 du 29 juil. 1998.
(49) L. nº 91-650 du 9 juil. 1991, art. 97, modifié par L. nº 92-644 du 13 juil. 1992, art. 3.
(50) C. civ., art. 2190 à 2216, aujourd
hui abrogés.
(51) Ord. 2006-461 du 21 avril 2006, art 25 et nº 2006-936 du 27 juil. 2006, art. 168.
(52) Ord. nº 2011-1895 du 19 déc. 2011, art. 7 ; Décr. 2012-783 du 30 mai 2012, art. 12.
15
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PROCÉDURES CIVILES DEXÉCUTION
des textes na pas été complet53 et lon regrettera que loccasion nait pas été saisie de
clarifier certaines interrogations que l
on avait avec les anciens textes54.
13 Jurisprudence et pratique. Comme en toute matière, la jurisprudence apporte son lot
de précisions indispensables. Toutefois, l
importance de la jurisprudence est peut-être un
peu moins marquée que dans d
autres matières, sans doute en raison du fait que la
matière est
déjà largement réglementée dans le détail. En sens inverse, la pratique joue
ici un rôle tout-à-fait essentiel. Constituant avant tout un droit de praticiens, les procé-
dures civiles d
exécution sont mises en œuvre par les huissiers de justice, qui doivent
trouver des solutions concrètes aux situations conflictuelles qui se présentent à eux.
Régulièrement renouvelées, ces façons de procéder peuvent aisément se transformer en
usages professionnels. Au demeurant, les deux sources se complètent, la jurisprudence
étant amenée à dire si telle ou telle pratique des professionnels de l
exécution forcée est
ou non conforme aux principes de la matière.
14 Doctrine. Sans prétendre à lexhaustivité, on signalera les codes commentés,
ouvrages, encyclopédies et ouvrages collectifs suivants, ainsi que les chroniques de
revues, qu
elles soient généralistes ou spécialisées.
Codes. Code des procédures civiles dexécution, LexisNexis, par L. LAUVERGNAT et
L. RASCHEL ; Code des procédures civiles dexécution, Dalloz, 2017, par A. LEBORGNE,
O. S
ALATI et L. DARGENT ; Code des procédures civiles dexécution, EJT, 2016,
dir. N. F
RICERO avec E. DE LEIRIS et G. MECARELLI.
Ouvrages. C. BRENNER, Procédures civiles dexécution, Dalloz, coll. « cours », 8e éd., 2015 ;
N. C
AYROL, Droit de lexécution, LGDJ, 2e éd., 2016 ; G. COUCHEZ et D. LEBEAU, Voies dexé-
cution
, coll. « Sirey », 12e éd., 2017 ; M. et J.-B. DONNIER, Voies dexécution et procédures
de distribution
, Litec, 9e éd., 2017 ; N. FRICERO, Procédures civiles dexécution, Gualino,
Mémentos LMD, 6
e éd., 2016 ; Ph. HOONAKKER, Procédures civiles dexécution, Larcier,
Paradigme, 5
e éd., 2016 ; C. LAPORTE, Guide pratique de la saisie immobilière, LexisNexis,
3
e éd., 2016 ; P. JULIEN et G. TAORMINA, Voies dexécution et procédures de distribution,
LGDJ, 2
e éd., 2010 ; A. LEBORGNE, Droit de lexécution, Voies dexécution et procédures
de distribution
, Précis Dalloz, 2e éd., 2014 ; L. MINIATO, Voies dexécution et procédures
de distribution
, LGDJ, Montchrestien, 2010 ; R. PERROT et P. THÉRY, Procédures civiles
d
exécution, Dalloz, 3e éd, 2013 ; S. PIÉDELIÈVRE, Procédures civiles dexécution, Econo-
mica, 2016 ; F. V
INCKEL, Droit de lexécution forcée, Gualino, 2008.
Ouvrages collectifs et encyclopédies. S. GUINCHARD et T. MOUSSA (dir.), Droit et pratique
des voies d
exécution, Dalloz Action, 8e éd., 2015/2016 ; C. BRENNER et P. CROCQ (dir.),
Le Lamy Droit de lexécution forcée, Wolters Kuwer ; S. GUINCHARD (dir.), Répertoire
Dalloz de procédure civile.
Chroniques. Outre la Revue Droit et procédures (auparavant Revue des huissiers de
justice
), amplement consacrée aux procédures civiles dexécution, on peut signaler les
chroniques suivantes : chronique mensuelle à la revue
Procédures, par L. Raschel et
C. Laporte ; chronique trimestrielle à la
Revue trimestrielle de droit civil par N. Cayrol ;
chronique semestrielle à la
Gazette du Palais par C. Brenner et J.-J. Ansault ; chronique
(53) Ainsi, par exemple, de la saisie des rémunérations qui demeure régie par le Code du travail.
(54) Sur la réalisation du Code des procédures civiles d
exécution, v. J.-B. DONNIER, « Entre accomplissement et inachève-
ment.
À propos de la codification de la partie réglementaire du Code des procédures civiles dexécution », JCP G.
2012, p. 754 ; F. VINCKEL, La codification des procédures civiles dexécution , LexisNexis, coll. « Actualité », 2013 ;
L. L
AUVERGNAT et L. RASCHEL, « Le code des procédures civiles dexécution : un code davenir ! », Procédures 2014,
étude 18.
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I n t r o d u c t i o n
annuelle au Recueil Dalloz par A. Leborgne ; chronique annuelle à la revue Droit et patri-
moine
, par P. Crocq et C. Lefort.
15 Plan. Suivant larticulation des quatre premiers livres du Code des procédures civiles
d
exécution, nous aborderons les dispositions générales de la matière (partie 1), les
procédures dexécution mobilière (partie 2), la saisie immobilière (partie 3) et lexpulsion
(partie 4).
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